NATIONS

UNIES

CCPR

Pacte international

relatif aux droits civils

et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/SR.20578 janvier 2003

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

Soixante‑seizième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 2057e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le jeudi 24 mars 2002, à 10 heures

Président: M. BHAGWATI

SOMMAIRE

DEUXIÈME RÉUNION AVEC LES ÉTATS PARTIES AU PACTE (suite)

La séance est ouverte à 10 h 15.

DEUXIÈME RÉUNION AVEC LES ÉTATS PARTIES AU PACTE (point 5 de l’ordre du jour) (suite)

1.Le PRÉSIDENT souhaite la bienvenue aux participants à la deuxième Réunion avec les États parties au Pacte, dont l’objet est de renforcer la coopération entre le Comité, les États parties et les ONG.

2.Depuis octobre 2000, les méthodes de travail du Comité ont évolué. Le Comité s’est en effet donné la possibilité d’examiner la situation des droits civils et politiques dans les États parties qui n’ont pas respecté l’obligation qui leur incombe de présenter des rapports en vertu de l’article 40 du Pacte. En outre, il a établi une procédure de suivi de ses observations finales et a désigné un rapporteur spécial chargé de cette tâche.

3.Parallèlement, les organes conventionnels et certains États parties ont organisé des consultations destinées à améliorer et à harmoniser les méthodes de travail des organes créés en vertu d’instruments internationaux. En outre, le premier atelier sur le suivi des observations finales du Comité a été organisé à Quito (Équateur) en août 2002. Enfin, le récent rapport du Secrétaire général sur le renforcement de la réforme de l’ONU (A/57/387) contient des recommandations visant à rationaliser les procédures d’établissement des rapports destinés à l’ensemble des organes conventionnels.

4.En dépit de cette évolution, le Comité est conscient des problèmes qui demeurent, notamment du fait que de nombreux États parties continuent à éprouver des difficultés à respecter leurs obligations en matière d’établissement de rapports périodiques. De nombreux rapports sont en retard, alors que d’autres sont beaucoup trop volumineux ou ne répondent pas aux préoccupations exprimées par le Comité lors de l’examen du rapport précédent.

5.M. KLEIN (Rapporteur du Comité) souhaite apporter quelques précisions quant aux deux nouveautés intervenues dans les méthodes de travail du Comité, à savoir la procédure applicable aux États parties qui n’ont pas présenté de rapport et l’établissement des équipes spéciales chargées des rapports périodiques.

6.À l’heure actuelle, sur 151 pays ou territoires qui ont l’obligation de présenter un rapport au Comité, 35 ont un retard de plus de cinq ans et 15 de dix ans ou plus, ceci en dépit du nombre important de rappels envoyés aux États parties concernés. D’un point de vue juridique, ce retard constitue une violation de l’obligation qui incombe aux États parties en vertu de l’article 40 du Pacte. Depuis peu, le Comité a adopté une nouvelle approche, qui consiste à examiner la situation des droits de l’homme dans l’État partie concerné en l’absence de rapport. Le Comité estime que cette façon de procéder est conforme à l’esprit de l’article 40 du Pacte, puisqu’elle a pour objet d’encourager l’État partie à présenter un rapport. Cette nouvelle procédure fait l’objet de l’article 69 A du règlement intérieur et de l’Observation générale no 30 du Comité, qui remplace l’ancienne Observation générale no 1. Dans le cadre de cette procédure, lorsqu’un État partie n’a pas présenté de rapport en dépit de plusieurs rappels, le Comité peut fixer une date, qu’il notifie à l’État partie, pour examiner les mesures prises par celui‑ci pour donner effet aux droits garantis par le Pacte. Si l’État partie est représenté lors de la séance consacrée à cette question, la séance est publique; dans le cas contraire elle est privée. L’examen de la situation des droits de l’homme se fonde sur une liste de points à traiter communiquée à l’État partie et sur les informations recueillies par le Comité auprès de diverses sources. Lorsqu’une délégation est présente, il va de soi qu’elle peut répondre à la liste des points à traiter et à toute question posée par les membres du Comité. À l’issue de l’exercice, le Comité rédige des observations finales préliminaires, qui sont notifiées à l’État partie afin de lui permettre de présenter des observations et de soumettre le rapport en retard. Le fait que cette procédure a été utilisée est rendu public mais les observations finales préliminaires restent confidentielles. Le Comité ne s’est pas encore prononcé sur la suite à donner en cas d’absence de réaction de l’État partie concerné. L’une des options envisagées consisterait à publier les observations finales préliminaires. Jusqu’à présent, le Comité a eu recours à cette procédure pour deux États parties dont le rapport accusait un retard de 17 ans. Dans l’un de ces cas, une délégation était finalement présente.

7.Afin d’améliorer encore ses méthodes de travail, le Comité a en outre décidé d’établir des équipes spéciales chargées des rapports périodiques. Chaque équipe spéciale se compose de trois à six membres du Comité. Elle se réunit et adopte une liste de points à traiter aussi précise et pertinente que possible dans le cadre de l’examen du rapport périodique d’un État partie donné. Au cours de l’examen du rapport, ses membres sont chargés de mener les débats avec la délégation de l’État partie concerné, sans préjudice du droit pour les autres membres du Comité de poser toutes les questions qu’ils estiment pertinentes. L’objet de cette réforme était de faire face de manière plus efficace à la quantité importante de documents à étudier avant l’examen des rapports des États parties. Grâce à cette nouvelle méthode, chaque membre du Comité se consacre de manière plus approfondie à un ou deux rapports par session et les questions posées aux délégations sont plus ciblées et plus détaillées.

8.Mme GORELY (Australie) se félicite du renforcement de la coopération entre les organes créés en vertu d’instruments internationaux, ainsi que des mesures prises par le Comité pour se pencher sur ses propres méthodes de travail. La délégation australienne accueille favorablement les mesures prises pour traiter l’examen de la situation des droits de l’homme dans les pays qui n’ont pas présenté de rapport. Enfin, elle demande instamment au Comité de collaborer avec le Département de l’information de l’ONU pour veiller à ce que les communiqués de presse publiés à l’issue des réunions du Comité témoignent de façon plus équilibrée et plus fiable des débats entre les membres du Comité et les délégations des États parties.

9.M. SENARATH (Sri Lanka) se félicite de la désignation d’un rapporteur spécial chargé du suivi des observations finales, ainsi que de l’établissement des équipes spéciales chargées des rapports périodiques et demande si le nom du Rapporteur spécial, des rapporteurs par pays et des membres des équipes spéciales est destiné à être rendu public.

10.M. FARHANE (Maroc) demande des précisions sur le fonctionnement concret des équipes spéciales chargées des rapports périodiques.

11.M. VIGNY (Suisse) estime que la procédure adoptée par le Comité pour examiner la situation des droits de l’homme dans les États parties qui n’ont pas présenté de rapport en dépit de plusieurs rappels est conforme à la lettre et à l’esprit du Pacte.

12.M. FERGUSON (Canada) fait sienne l’observation de la délégation australienne en ce qui concerne la nécessité de disposer de communiqués de presse plus fiables. Par ailleurs, il aimerait connaître l’opinion des membres du Comité sur les recommandations formulées par le Secrétaire général dans son récent rapport au sujet du volume des rapports périodiques. La délégation canadienne se félicite de l’initiative prise par le Comité en ce qui concerne l’examen de la situation des droits de l’homme dans les États parties qui n’ont pas présenté de rapport et lui demande d’envisager la publication des observations finales préliminaires à des fins de transparence.

13.Mme GRAMBYE (Danemark) estime que la nouvelle méthode adoptée par le Comité pour traiter de la situation des droits de l’homme dans les États parties qui n’ont pas présenté de rapport est positive, pour autant qu’il s’agisse d’une mesure de dernier recours. Cela étant, quelles sont les mesures envisagées par le Comité pour assurer le suivi des observations finales préliminaires qu’il adopte en pareil cas et pour éviter qu’une telle situation ne se reproduise à l’avenir? Par ailleurs, la délégation danoise souhaite savoir si des projets de coopération technique ont été mis au point pour aider les États parties qui éprouvent des difficultés à établir leurs rapports.

14.M. CHUMAREV (Fédération de Russie) estime, contrairement à un certain nombre de délégations qui se sont exprimées avant lui, que la pratique adoptée par le Comité pour examiner la situation des droits de l’homme dans un État partie donné en l’absence de rapport n’est conforme ni à l’esprit ni à la lettre de l’article 40 du Pacte. Cette procédure peut être assimilée à un jugement par défaut. En tout état de cause, cette procédure doit être mise en parallèle avec des mécanismes de coopération technique. En effet, en dernière analyse, le fait que des États parties ne soient pas en mesure de présenter des rapports constitue un échec pour le Haut‑Commissariat aux droits de l’homme et le Comité lui‑même en termes de coopération technique. Par ailleurs, l’établissement des équipes spéciales chargées des rapports périodiques constitue une avancée positive, à condition que la désignation des membres au sein de ces équipes spéciales ne réponde pas à des motivations politiques.

15.Le PRÉSIDENT donne l’assurance que la désignation des membres des équipes spéciales ne repose nullement sur des considérations d’ordre politique.

16.M. REYES RODRIGUEZ (Colombie) souligne la nécessité de développer les mécanismes d’assistance technique destinés à aider les États parties à élaborer les rapports qu’ils présentent au Comité.

17.M. ULTRERAS (Chili) se félicite des nouvelles méthodes de travail du Comité et est convaincu qu’elles contribueront à améliorer encore le dialogue avec les États parties. Il note toutefois que si la liste des points à traiter présente le plus grand intérêt, il serait souhaitable qu’elle soit transmise suffisamment tôt à l’État partie concerné.

18.M. KLEIN (Rapporteur du Comité) dit, en réponse au représentant de la Fédération de Russie, que la procédure applicable aux États parties qui n’ont pas présenté de rapport n’est pas contraire à l’article 40 du Pacte, dont l’objectif est d’engager ces derniers à présenter des rapports. Il ne s’agit en aucun cas d’organiser le procès par contumace d’un État partie mais d’exercer un peu de pression afin qu’il honore ses obligations et consente à dialoguer avec le Comité. À cet égard, M. Klein assure la représentante du Danemark que le Comité aura recours à cette procédure en dernier ressort.

19.Pour ce qui est de la coopération technique, il y a lieu de rappeler aux États parties que le Haut‑Commissariat aux droits de l’homme, et en particulier son secrétariat, est à leur disposition permanente pour leur fournir les services dont ils auraient besoin.

20.En réponse au représentant de Sri Lanka, M. Klein dit que les noms des membres nommés rapporteurs pour un pays ou une communication sont publiés dans le rapport annuel du Comité, et cela dans un souci de transparence totale. Il en sera de même pour la composition des équipes spéciales chargées des rapports périodiques.

21.M. MATSCHER (Allemagne) estime que l’article 69 A du règlement intérieur du Comité (CCPR/C/3/Rev.6) est tout à fait conforme à l’article 40 du Pacte et se dit satisfait par la procédure adoptée par le Comité concernant les États défaillants. Il serait malvenu de faire porter au Comité une quelconque responsabilité si les États parties ne s’acquittent pas de leurs obligations en vertu du Pacte. Notant que l’article 69 A dispose que le Comité peut, à sa discrétion, adresser à l’État partie une notification lui indiquant la date à laquelle il entend examiner la situation des droits de l’homme dans le pays, M. Matscher demande des précisions à propos des critères sur lesquels le Comité se fonde pour recourir à cette procédure. Le fait que l’État partie n’ait pas présenté de rapport est‑il l’unique critère pris en compte?

22.Mme SUNDBERG (Suède) s’associe à la déclaration de la représentante du Danemark concernant l’assistance technique et demande à ce sujet si le Comité rappelle systématiquement aux États parties qu’une assistance peut leur être offerte. Par exemple, dans le cas de l’État partie qui a dépêché une délégation sans soumettre de rapport, le Comité lui a‑t‑il proposé une assistance technique? Mme Sundberg demande en outre comment le Comité procédera avec l’État partie en question et s’il invitera de nouveau une délégation après réception du rapport. Par ailleurs, elle estime que les listes des points à traiter sont trop longues et souhaite qu’elles soient raccourcies afin de mieux cibler le dialogue entre le Comité et les États parties. Enfin, elle demande l’avis des membres du Comité sur la proposition formulée par le Secrétaire général dans son récent rapport (A/57/387) tendant à ce que chaque État produise un rapport unique résumant la façon dont il observe l’ensemble des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il est partie.

23.M. MARTINEZ (Mexique) approuve les nouvelles procédures du Comité et dit que le Mexique a adopté lui‑même de nouvelles méthodes aux fins de l’élaboration des rapports qu’il doit soumettre aux organes conventionnels. L’accent est dorénavant mis sur la participation des associations de la société civile. En ce qui concerne l’assistance technique, M. Martinez souligne à quel point les pays d’Amérique latine ont apprécié l’atelier sur le suivi des observations finales du Comité, organisé à Quito (Équateur) en août 2002. Il souhaiterait par ailleurs que le Comité formule des recommandations plus concrètes à l’intention des États parties et les présente par ordre de priorité.

24.M. SARAN (Inde) apprécie la volonté du Comité de rationaliser ses méthodes de travail mais se demande si les mesures prises par le Comité produiront l’effet escompté. En ce qui concerne le suivi des observations finales, il n’est pas convaincu de l’utilité d’un rapporteur spécial et estime que ce suivi pourrait être assuré par le Comité dans le cadre de l’examen des rapports ultérieurs. Par ailleurs, il craint que la nouvelle procédure du Comité applicable aux États défaillants ne crée un climat de confrontation et souligne que la protection des droits de l’homme ne peut se faire que par le dialogue. Comme de nombreux autres représentants, M. Saran note que l’assistance technique revêt une importance cruciale car elle permet de renforcer la capacité des États parties de soumettre leurs rapports dans les délais prescrits.

25.M. HAMID (Égypte) demande ce que signifie l’expression «à sa discrétion» employée dans l’article 69 A du règlement intérieur. Il souhaiterait que les critères sur lesquels le Comité se fonde pour adresser une notification à un État partie soient clairement définis. Le Comité entend promouvoir le dialogue mais comment cela sera‑t‑il possible s’il examine la situation d’un État partie en l’absence de délégation de celui‑ci? Par ailleurs, en présentant récemment son rapport, l’Égypte a constaté que les membres du Comité posaient parfois les mêmes questions. Il serait peut‑être utile que les membres des équipes spéciales chargées des rapports périodiques veillent à assurer un minimum de coordination avec les autres membres du Comité. Enfin, pour ce qui est du suivi des observations finales, il ne faudrait pas que la nouvelle procédure constitue un fardeau supplémentaire pour le Comité comme pour les États parties.

26.M. DUQUE ESTRADA MEYER (Brésil) demande combien de temps à l’avance le Comité notifiera à un État partie son intention d’examiner sa situation en l’absence de rapport. Par ailleurs, il partage les préoccupations exprimées par plusieurs représentants concernant les critères utilisés par le Comité pour décider d’examiner la situation de tel ou tel pays défaillant. Il suggère par exemple que le Comité veille à assurer un équilibre géographique.

27.Mme ANDRIANJAKA (Madagascar) souligne combien est importante l’assistance technique pour les pays qui ne disposent pas de ressources humaines suffisantes pour présenter leurs rapports dans les délais prescrits. C’est par exemple le cas de Madagascar qui n’a pas pu soumettre de rapport au Comité depuis 1991 par manque de moyens et du fait d’une longue période d’instabilité politique. À cet égard, Mme Andrianjaka juge intéressante la proposition du Secrétaire général tendant à présenter un rapport unique car cela faciliterait grandement la tâche des États parties.

28.M. VEGAS TORRES (Pérou) approuve les nouvelles méthodes de travail du Comité et juge raisonnable et justifiée la nouvelle procédure applicable aux États parties qui n’ont pas présenté de rapport. Il note que de nombreux États parties déploient des efforts sans relâche pour soumettre leurs rapports dans les délais prescrits. À ce sujet, le Comité pourrait envisager d’imposer un nombre maximal de pages pour les rapports. Enfin, s’agissant de l’assistance technique, M. Vegas Torres dit que le Comité devrait organiser des ateliers régionaux sur le modèle de celui de Quito car ils permettent aux États parties de mieux comprendre les spécificités des travaux du Comité et de mieux s’acquitter de leurs obligations en vertu du Pacte.

29.M. SHIBUYA (Japon) estime qu’il est essentiel d’améliorer la coordination entre les États parties et le Comité, d’une part, et au sein des organes conventionnels, d’autre part, et il salue les efforts déployés dans ce sens par le Comité. Il considère également que le fait d’établir des rapports périodiques mieux ciblés et de réduire le nombre des questions adressées aux États parties permettra d’améliorer l’ensemble du processus de surveillance de l’application du Pacte ainsi que le dialogue entre les États parties et le Comité. Cela devrait aussi aider les États parties à s’acquitter dûment de leurs obligations au titre de l’article 40 du Pacte. D’autres organes conventionnels pourraient d’ailleurs utilement s’inspirer des procédures qui ont été adoptées par le Comité des droits de l’homme, en publiant, par exemple, les réponses des États parties aux observations finales de l’organe.

30.Enfin, M. Shibuya voudrait connaître le point de vue du Comité sur la question de l’opportunité de prévoir un seul rapport complet de l’État partie pour tous les organes conventionnels.

31.Mme MEDINA QUIROGA saisit l’occasion de la présente réunion pour rappeler aux États parties l’importance d’un instrument comme le Pacte pour la protection des droits de l’homme et l’importance également des rapports qu’ils présentent au titre dans l’article 40. L’établissement de ces rapports est en effet l’occasion, pour les autorités nationales, d’une réflexion sur la situation de leur pays en matière de droits de l’homme. Il est aussi essentiel que les États parties se considèrent responsables à l’égard de la conduite des autres États parties, et Mme Medina Quiroga lance un appel à tous les États parties au Pacte pour qu’ils gardent toujours à l’esprit les principes énoncés dans le préambule du Pacte, à savoir que le respect des droits de l’homme constitue le fondement de la paix, de la démocratie et de la sécurité dans le monde.

32.M. RIVAS POSADA, revenant sur l’atelier de dialogue qui s’est tenu à Quito (Équateur) en août 2002, dit que cette réunion a marqué les progrès réalisés dans la coopération entre les États parties et le Comité pour remédier aux difficultés concernant le suivi des observations finales du Comité et l’établissement des rapports périodiques. L’atelier a aussi montré que la non‑présentation de rapports par les États parties ou le retard dans la présentation des rapports n’était pas toujours dû à la négligence ou à l’absence de volonté politique des autorités nationales. Un certain nombre d’États parties, surtout les pays en développement, se heurtent à de très grandes difficultés sur le plan institutionnel, qui les empêchent de s’acquitter dûment de leurs obligations au titre du Pacte. Les participants à l’atelier ont formulé diverses recommandations et suggestions, adressées tant aux États parties qu’au Comité, au Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, aux institutions intergouvernementales et non gouvernementales ainsi qu’à la société civile, et M. Rivas Posada en recommande la lecture aux représentants de tous les États parties, notamment des pays en développement. À l’avenir, différents États parties, et pas seulement ceux de la région de l’Amérique latine, devraient s’engager à parrainer, avec le Haut‑Commissariat aux droits de l’homme, ce type de réunion qui permet de mieux identifier les difficultés auxquelles se heurtent beaucoup de pays pour s’acquitter de leurs obligations au titre du Pacte.

33.M. HENKIN souligne que le «dialogue» entre les États parties et le Comité souvent évoqué durant la présente réunion suppose un partage des tâches et des responsabilités des deux côtés. Or, le Comité assume en réalité la tâche qui incombe normalement aux États parties en matière de surveillance du respect du Pacte. M. Henkin rappelle à cet égard que les États parties ont le droit mais aussi la responsabilité de veiller à ce que tous les États parties s’acquittent des obligations auxquelles ils ont souscrit en vertu du Pacte, ainsi que du Protocole facultatif, le cas échéant.

34.En ce qui concerne le suivi des observations finales du Comité, M. Henkin rappelle aux États parties qu’ils ont, là aussi, des obligations, et il les invite instamment à reconnaître les responsabilités que leur confère le Pacte en matière de promotion et de protection des droits de l’homme.

35.Sir Nigel RODLEY se félicite du nombre important d’États parties qui sont représentés à la réunion. Il constate néanmoins que le débat porte essentiellement sur ce que fait et doit faire le Comité. Sir Nigel Rodley fait observer à cet égard que le Comité ne serait pas confronté au problème du retard dans l’établissement des rapports périodiques et de la non‑présentation de rapports si les États parties assumaient leurs responsabilités dans ce domaine et il est regrettable que le Comité ait dû réviser son règlement intérieur en conséquence de ce problème. Il va sans dire à ce sujet qu’il ne saurait y avoir d’échanges avec un État partie qui ne répond pas aux sollicitations du Comité. En ce qui concerne l’établissement des rapports périodiques, Sir Nigel Rodley est bien conscient que certains États parties rencontrent des difficultés à cet égard, mais il rappelle qu’ils peuvent bénéficier des services consultatifs du Haut‑Commissariat, et le secrétariat pourrait peut‑être utilement rappeler cette possibilité aux États parties intéressés. De même, les États parties pourraient faire appel aux services consultatifs offerts par le Haut‑Commissariat dans le cadre du suivi à donner aux observations finales du Comité, ce qui allégerait sûrement leur tâche, notamment l’établissement de leur prochain rapport périodique.

36.Plusieurs représentants d’États parties ont évoqué la question des critères pour examiner la situation dans un État partie en l’absence de rapport. Différents critères ont été évoqués: l’importance du retard, la gravité de la situation dans le pays, le statut du rapport périodique, le facteur géographique, etc. On pourrait également en mentionner d’autres, par exemple la qualité de membre de la Commission des droits de l’homme ou du Conseil de sécurité. Tout cela montre qu’il est difficile d’établir des critères précis, qui pourraient d’ailleurs présenter plus d’inconvénients que d’avantages: en effet, en fixant, par exemple, un nombre d’années maximal de retard au‑delà duquel il appliquerait l’article 69 A de son règlement intérieur, le Comité pourrait donner à penser aux États parties qu’ils sont autorisés à ne pas présenter de rapport pendant ce délai.

37.Le représentant de l’Égypte a regretté que, comme cela s’est produit la semaine précédente lors de l’examen du rapport de son pays, le Comité pose parfois un nombre considérable de questions à la délégation de l’État partie, dont plusieurs d’ailleurs se recoupent. Sir Nigel Rodley reconnaît que tel a été le cas lors de l’examen des troisième et quatrième rapports périodiques conjoints qui ont été présentés par l’Égypte. Cela étant, des questions ont parfois été répétées dans le souci d’éclaircir certains points qui demeuraient obscurs. Plusieurs questions posées dans la liste des points à traiter étaient complexes, et les réponses apportées par la délégation égyptienne l’étaient nécessairement aussi. D’une façon générale, l’établissement d’équipes spéciales chargées des rapports périodiques vise, entre autres, à limiter le nombre des questions posées par le Comité aux États parties. La procédure étant nouvelle, cela explique qu’elle n’ait pas encore eu les effets escomptés.

38.Mme CHANET se félicite de cet échange de vues très utile avec les représentants des États parties. Certains d’entre eux se sont interrogés sur les critères de désignation des membres des équipes spéciales chargées des rapports périodiques, craignant que la composition de ces équipes spéciales n’induise une certaine partialité à l’égard des États parties intéressés. Mme Chanet tient à assurer les États parties qu’il n’en est rien; le Comité respecte pleinement les règles d’impartialité qu’il a fixées dans ses directives à l’intention de ses membres concernant l’exercice de leurs fonctions (Documents officiels de l’Assemblée générale, cinquante ‑troisième session, Supplément n o  40 (A/53/40), vol. I, annexe III). Les membres des équipes spéciales sont choisis en fonction de leurs compétences linguistiques, de leur connaissance de la situation dans l’État partie mais aussi d’un critère aussi pragmatique que celui de leur disponibilité. Mme Chanet espère que ces précisions auront permis de lever les doutes des représentants des États parties, et souligne que, d’une façon générale, le Comité révise constamment ses méthodes de travail pour améliorer ce qui peut et doit l’être.

39.En ce qui concerne la question des rapports périodiques, on ne saurait à la fois préconiser l’établissement d’un rapport unique pour tous les organes conventionnels et souhaiter que ce rapport soit centré sur quelques questions seulement. En effet, un rapport unique aurait, par définition, un caractère très général. Quoi qu’il en soit, le Comité pourra s’appuyer sur la nouvelle procédure adoptée pour alléger encore la tâche des États parties et cibler davantage les questions prioritaires au regard du respect du Pacte. Pour ce qui est de la procédure d’examen des rapports périodiques par le Comité, Mme Chanet indique que de grands progrès ont été réalisés dans ce domaine et que les répétitions de questions sont évitées. Il arrive simplement parfois que les membres du Comité reformulent leurs questions sous un angle différent quand la délégation de l’État partie n’y a pas répondu.

40.En ce qui concerne l’examen de la situation dans un État partie in abstentia, Mme Chanet renvoie les États parties à l’Observation générale no 30 du Comité, d’une lecture plus aisée que le règlement intérieur. D’une façon générale, elle souscrit pleinement à la suggestion visant à offrir une assistance technique aux États parties qui ne sont pas en mesure d’établir et de présenter un rapport périodique au Comité. Enfin, en ce qui concerne la question des communiqués de presse qui a été évoquée par certains États parties, Mme Chanet rappelle que le Comité n’est pas habilité à censurer, non plus qu’à autoriser, les propos tenus par la presse, et la question doit être réglée avec les services pertinents de l’ONU.

41.M. YALDEN (Rapporteur spécial chargé du suivi des observations finales) souligne que le Comité a modifié ses méthodes de travail dans le but d’aider les États parties et non pas de leur compliquer la tâche. La décision de nommer un rapporteur spécial chargé du suivi des observations finales vise également à assister les États parties dans l’exécution de leurs obligations au titre du Pacte. M. Yalden explicite ensuite la procédure prévue à l’article 70 A du règlement intérieur du Comité, en indiquant qu’un an avant l’expiration du délai fixé pour l’examen des éléments de réponse que doit fournir l’État partie concerné sur certains aspects prioritaires des observations finales du Comité, le secrétariat prend contact officieusement avec les représentants de l’État partie pour leur rappeler qu’ils doivent fournir ces éléments de réponse dans le délai fixé. Si, à l’expiration de ce délai, l’État partie n’a toujours pas communiqué ces informations, le Rapporteur spécial lui adresse un rappel par écrit. Dans le cas où, malgré le rappel, l’État partie ne fournit pas d’informations, le Comité mentionne la situation dans son rapport annuel et le Rapporteur spécial s’efforce de rencontrer des représentants de l’État partie. Il est entendu que si, dans l’intervalle, le Comité reçoit de l’État partie les informations qu’il avait demandées, il peut décider, par exemple, de reporter la date de soumission du prochain rapport périodique. Cette procédure a été adoptée par le Comité à sa soixante et onzième session, en mars 2001, et elle est donc trop récente pour que l’on puisse en évaluer les résultats. M. Yalden précise cependant que plusieurs États parties auxquels il avait été demandé de fournir des informations à ce titre les ont communiquées.

42.Le représentant de l’Inde s’est dit préoccupé par le fait que la nouvelle procédure pourrait alourdir la tâche qui incombe aux États parties. M. Yalden souligne que, au contraire, elle l’allège puisqu’elle leur permet de ne communiquer des informations que sur certains aspects prioritaires, et de fournir ultérieurement des informations sur le reste des observations finales du Comité.

43.Le représentant de l’Égypte s’est inquiété de la teneur des informations qui peuvent être demandées au titre du paragraphe 5 de l’article 70 du règlement intérieur. M. Yalden dit que le dernier paragraphe des observations finales du Comité peut identifier trois ou quatre questions revêtant un caractère prioritaire, dont la teneur varie selon la situation dans l’État partie et l’échange qui a lieu entre ce dernier et le Comité.

44.M. KLEIN ajoute que la nouvelle procédure vise aussi à encourager les pays à reprendre un dialogue, parfois interrompu depuis de nombreuses années, dans le respect des obligations contractées lors de la ratification du Pacte. En ce qui concerne l’élaboration des listes de points à traiter, il indique que le Comité tient effectivement compte des informations reçues des ONG, mais qu’il ne se fonde pas uniquement sur celles‑ci et que les États parties ont toute latitude pour les contester s’ils le souhaitent. Par ailleurs, les dispositions prévues à l’article 69 A du règlement intérieur du Comité n’ont été appliquées jusqu’à présent qu’à deux reprises, dans le cas de retard considérable accumulé dans la soumission des rapports, et que, par conséquent, l’expérience du Comité est limitée dans ce domaine. Les dispositions de l’article 69 A peuvent toutefois également s’appliquer dans d’autres circonstances. Ainsi, le Comité peut reporter l’examen du rapport d’un pays par exemple lorsque le gouvernement légitime n’est pas concrètement en mesure de garantir l’application des droits civils et politiques.

45.M. AMOR, revenant sur la question de la coordination des travaux des organes conventionnels, fait observer que la composition et les fonctions de chaque organe sont régies par l’instrument même dont ils sont chargés de surveiller l’application. Certes, la possibilité de mettre sur pied un organe central chargé de suivre tous les aspects des droits de l’homme pourrait être envisagée et la solution consistant à établir un rapport unique pourrait éviter aux États parties les difficultés que leur pose l’élaboration de nombreux rapports dans une multitude de domaines. Toutefois, la présentation d’un rapport unique risque de marginaliser certains domaines et de ne pas répondre aux exigences découlant des dispositions du Pacte. Enfin, M. Amor juge intéressante la suggestion visant à tenir les réunions du Comité dans certains États parties plutôt qu’à Genève ou New York, dans la mesure où elles pourraient donner un retentissement plus important aux questions des droits de l’homme.

46.M. SHEARER pense que la notion de «dialogue», fréquemment évoquée au cours de la réunion, suppose un échange de vues non seulement entre les délégations et le Comité lors de l’examen des rapports, mais aussi au niveau interne, au sein de l’État partie. En d’autres termes, la préparation et la publication des rapports devraient permettre de mieux faire connaître les droits de l’homme et impliquer davantage les citoyens et les organismes concernés au sein même de l’État partie. M. Shearer approuve la proposition du représentant de la Colombie concernant des directives plus précises pour l’élaboration des rapports, notamment pour les rapports initiaux, ce qui permettrait de réduire le volume des rapports et, partant, de les traiter plus rapidement. Il se félicite également de l’initiative du Mexique qui a fait appel à des experts pour la préparation de certaines parties des rapports et suggère que les ONG concernées par les droits de l’homme contribuent aussi à l’élaboration des rapports. Il pense que les États parties ne gagnent pas à entretenir le flou sur certaines questions et encourage les délégations à être claires en toutes circonstances. Il est en effet préférable de reconnaître que des progrès restent à faire afin de favoriser des échanges constructifs. Enfin, M. Shearer pense qu’il n’est pas indiqué de communiquer l’identité des membres des équipes spéciales ou du rapporteur spécial.

47.M. SCHEININ indique que l’établissement d’un rapport unique risquerait de voir le Comité saisi d’un rapport ne répondant pas à ses attentes et qu’il faudrait plutôt que chaque État partie définisse le contenu des informations respectives à envoyer à chaque organe conventionnel. Par ailleurs, le suivi des observations finales pourrait s’inscrire dans le mandat des organisations nationales responsables des droits de l’homme dans chaque État partie.

48.M. LALLAH demande aux représentants des États parties d’examiner les solutions concrètes qui permettraient d’améliorer la diffusion des dispositions du Pacte au niveau national. Une meilleure implication de toutes les instances concernées par la mise en œuvre du Pacte permettrait d’instaurer un climat favorable à l’élaboration des rapports et au respect des droits de l’homme. La présentation régulière de rapports devrait résulter d’initiatives nationales et non pas être une obligation imposée par le Comité.

49.M. ANDO dit que les procédures adoptées par le Comité ont été mises en place par les États parties eux-mêmes lorsqu’ils ont ratifié le Pacte, au même titre que d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, et qu’il leur appartient de proposer des solutions nouvelles s’ils estiment que certains aspects du système pourraient être améliorés.

50.M. SCHMIDT (Secrétaire du Comité) dit qu’une assistance technique pourrait être proposée systématiquement dans le cas d’un retard important accumulé dans la présentation des rapports attendus, possibilité qui est actuellement à l’étude au sein du secrétariat et de la Division de la coopération technique. Jusqu’à présent, aucune règle n’a été fixée dans ce domaine. Toutefois l’aide proposée dépendra également des ressources financières disponibles.

51.Le PRÉSIDENT dit qu’il est encourageant de constater que l’atelier destiné aux pays d’Amérique latine, organisé récemment à Quito, a produit des résultats particulièrement positifs et que les États parties devraient continuer à étudier la possibilité d’organiser de tels ateliers au niveau régional. Il remercie les représentants des États parties et les membres du Comité pour les échanges de vues constructifs qui ont eu lieu au cours de cette deuxième réunion.

La séance est levée à 13 h 5.

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