Quatre-vingt-dix-huitième session
Compte rendu analytique (partiel)* de la 2694e séance
Tenue au Siège, à New York, le vendredi 12 mars 2010, à 15 heures
Président :M. Iwasawa
Sommaire
Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40du Pacte (suite)
Troisième rapport périodique de l ’ Ouzbékistan (suite)
*Aucun compte rendu analytique n ’ a été établi pour le reste de la séance .
Questions d’organisation et questions diverses (suite)
La séance est ouverte à 15 heures.
Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)
Troisième rapport périodique de l ’ Ouzbékistan (suite) (CCPR/C/UZB/3, CCPR/C/UZB/Q/3 et CCPR/C/UZB/Q/3/Add.1)
Sur l ’ invitation du Président, les membres de la délégation ouzbè k e prennent place à la table du Comité.
M me Motoc demande combien de personnes ont été emprisonnées en raison de leurs convictions religieuses ou de leur appartenance à un mouvement religieux, en vertu de l’article 244 du Code pénal de l’Ouzbékistan. S’agissant de l’article 25 du Pacte, elle souhaite savoir ce qui a été fait pour donner suite à la recommandation 22 figurant dans les observations finales (CCPR/CO/83/UZB). Elle fait remarquer qu’au paragraphe 707 du troisième rapport périodique, il est indiqué que le prosélytisme demeure une infraction punissable en vertu de l’article 240 du Code pénal, même lorsque ceux qui s’y livrent ont recours, non pas à la force, mais à la persuasion uniquement.
L’intervenante demande des observations à propos des informations selon lesquelles de nombreuses organisations non gouvernementales ne s’enregistrent pas par crainte de subir des pressions physiques ou psychologiques de la part des autorités. En outre, certaines indications fournies par ces organisations donnent à penser que le Gouvernement exerce sur ces dernières un contrôle financier excessif, qui souvent a pour but d’entraver leurs activités ou d’y mettre fin.
Notant que l’Ouzbékistan reconnaît les nationalités et non les minorités, MmeMotoc souhaite savoir quels sont les droits qui ont été accordés et quel est le montant des fonds que l’Ouzbékistan a réservé aux groupes qu’il reconnaît comme des nationalités mais qui sont considérés comme des minorités en vertu de l’article 27 du Pacte, afin qu’ils puissent préserver leur identité culturelle.
M. Amor note que le libellé des paragraphes 699 et 704 du rapport (CCPR/C/UZB/3) risque de soulever de graves problèmes pour l’application de l’article 18 du Pacte; le paragraphe 707 pose également de graves problèmes en matière de droit international. En ce qui concerne la conversion, la Déclaration universelle des droits de l’homme reconnaît expressément le droit de changer de religion. À l’article 18 du Pacte et dans la Déclaration sur l’élimination de toutes les formes d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, le droit de changer de religion est implicitement reconnu. Chaque religion, en reconnaissant le droit de manifester sa religion et d’en enseigner et diffuser les préceptes, autorise indirectement le prosélytisme. Or, en Ouzbékistan, le prosélytisme et les activités missionnaires sont interdits et passibles de sanctions; cette position catégorique pose de graves problèmes. La Commission des droits de l’homme a reconnu l’existence d’un prosélytisme agressif, qui n’est pas acceptable lorsqu’il constitue une atteinte à la conscience ou recourt à des moyens non pacifiques. Toutefois, le prosélytisme peut, et c’est souvent le cas, revêtir un caractère non agressif. L’orateur dit qu’il ne comprend pas pourquoi on interdit à quelqu’un de prêcher en faveur de sa religion par des moyens pacifiques et on sanctionne ceux qui le font. Il demande si l’Ouzbékistan envisage de nuancer quelque peu la façon dont il traite la question du prosélytisme, de sorte que ses lois ne contreviennent pas directement aux dispositions de l’article 18 du Pacte.
M me Chanet fait observer que, depuis l’examen du deuxième rapport périodique en 2005, le climat dans lequel se déroulent les débats a sensiblement changé, même si l’Ouzbékistan qui a notamment aboli la peine de mort et institué la règle de l’habeas corpus se trouve désormais en meilleure posture. Le Comité ayant pour tâche de faire savoir à un État s’il respecte ou non les dispositions du Pacte, il est essentiel qu’il obtienne le plus grand nombre possible de documents contenant des informations fiables et corroborées, qu’ils soient communiqués par des ONG ou des organes chargés de questions relatives aux droits de l’homme ou titulaires de mandats au titre des procédures spéciales. Néanmoins les membres ont pu poser leurs questions et la délégation a eu la possibilité d’y répondre librement, qu’elle ait été d’accord avec eux ou non.
En ce qui concerne la question de la diffusion d’informations relatives au Pacte, l’intervenante se félicite que des brochures contenant des informations supplémentaires aient été fournies aux membres du Comité. L’une de ces brochures en particulier contient des renseignements sur la suite donnée aux observations finales du Comité (CCPR/CO/83/UZB/2). Toutefois, bien qu’elle soit numérotée et structurée conformément au document ou figurent les observations finales, le texte des observations et celui des recommandations ne sont pas mentionnés. L’intervenante demande que, si la publication d’un document analogue rendant compte des travaux des séances en cours est prévue, on incorpore à ce document les recommandations du Comité.
M. Saidov (Ouzbékistan) dit que la brochure d’information supplémentaire avait pour rôle d’assurer la jonction entre les deuxième et troisième rapports périodiques. Si les recommandations du Comité y ont été délibérément omises, c’est parce qu’elle était destinée à des experts qui les connaissaient déjà. Une deuxième brochure dont le texte n’a pas été traduit en anglais a été distribuée; elle contient des renseignements sur la mise en œuvre du Plan national d’action compte tenu des recommandations formulées par le Comité. Y figurent les recommandations qui ont été incluses dans le Plan et des informations sur la façon dont celles-ci ont été appliquées.
Les lois nationales interdisent les activités missionnaires et le prosélytisme. L’Ouzbékistan est une nation traditionnellement multiconfessionnelle où l’on dénombre 16 religions. Le nombre d’organisations religieuses y est 10 fois plus élevé qu’en 1990. Un dixième de ces organisations ont un rapport avec des religions autres que l’islam. Cette diversité tient à une auto-identification religieuse plus prononcée, à une distanciation accrue à l’égard de l’athéisme d’État de l’ère soviétique, et au fait que le Gouvernement garantit la liberté de religion. Le Gouvernement qui attache une grande importance à la préservation de l’entente et de la tolérance religieuses, vertus que les peuples d’Ouzbékistan ont de tout temps pratiquées, craint que les activités missionnaires et le prosélytisme ne perturbent la situation actuelle. L’Ouzbékistan est fier de n’avoir connu aucun conflit religieux ni ethnique depuis son accession à l’indépendance, fait que l’instabilité régnant dans la région rend encore plus remarquable. L’idée d’établir une distinction entre le prosélytisme agressif et le prosélytisme pacifique est certes intéressante mais elle soulève la question de savoir comment définir les critères à utiliser à cette fin et qui devrait se charger de cette définition. La délégation ouzbèke reconnaît qu’il serait peut-être utile d’envisager d’apporter quelques nuances à la politique suivie en matière de prosélytisme et que la question sera examinée plus en détail.
S’agissant de la notion de minorité, l’inclusion de l’expression « minorités ethniques » a été envisagée lors de l’élaboration de la Constitution. Il a été décidé que le terme correspondant en langue ouzbèke avait une connotation négative et pourrait être interprété comme étant péjoratif et méprisant. Pour éviter d’offenser un quelconque groupe ethnique, on a préféré le remplacer par le mot « nationalité ». Ce terme est considéré comme un synonyme de « minorités ethniques ».
En réponse à la question relative aux ressources allouées à la commission créée par décret présidentiel en vue de lutter contre la traite des êtres humains, l’intervenant dit que cet organe n’est pas une entité gouvernementale distincte ou permanente mais qu’il a été créé sur une base volontaire. Elle comprend un secrétariat composé de deux personnes et ses membres incluent, outre lui-même, le Médiateur, plusieurs ministres ainsi que des représentants d’ONG. Aucun crédit supplémentaire n’a été demandé pour la commission.
Le Gouvernement est au courant de l’existence de rapports relatifs au travail des enfants et note que six rapports d’ONG américaines ont été entièrement consacrés à cette question. Toutefois, l’intervenant ne peut souscrire aux faits, aux données et aux arguments qui y sont présentés. L’élimination du travail des enfants est une question que le Gouvernement ouzbek considère comme hautement prioritaire. Au cours des deux années précédentes, plusieurs mesures ont été prises : l’âge minimum requis pour qu’un enfant soit autorisé à travailler à été porté de 14 à 15 ans et on a augmenté les peines prévues à l’encontre de ceux qui ont illégalement recours au travail des enfants; deux conventions internationales de l’Organisation internationale du Travail (OIT) ont été ratifiées et un plan national d’action a été adopté. La question comporte en outre un aspect idéologique et lié à la politique étrangère qui a un rapport avec la politique cotonnière de l’Ouzbékistan. En effet, le pays a refusé de vendre son coton à des nations occidentales, notamment aux États-Unis d’Amérique; plutôt que de recourir à la bourse du coton de Liverpool, il a choisi de faire appel à celle de Tachkent. Après que le coton ouzbek eut déplacé le coton américain sur le marché asiatique, de nombreux chefs d’entreprise occidentaux auxquels ce changement avait occasionné de lourdes pertes financières et qui auparavant étaient demeurés silencieux, ont changé d’attitude et une vaste campagne d’information contre un prétendu recours inhumain au travail des enfants était lancée. L’Ouzbékistan est convaincu que ce sont les intérêts économiques sans scrupules de certains partenaires commerciaux occidentaux qui sont à l’origine de cette campagne. À l’heure actuelle, tout le coton est cultivé par des agriculteurs du secteur privé, sans intervention gouvernementale. L’affirmation selon laquelle des enfants âgés de 8 à 10 ans participeraient à la récolte du coton ne rend pas compte de la véritable situation, comme l’Ouzbékistan l’a affirmé au sommet de l’OIT, en juin 2009.
M. Shodiev (Ouzbékistan) dit que l’Ouzbékistan installe actuellement un système de passeports biométriques et que la question des visas de sortie a été examinée. La recommandation du Comité ne peut être adoptée car elle contrevient aux intérêts nationaux. L’intervenant rejette l’affirmation selon laquelle la procédure d’enregistrement des résidents (propiska) serait un mécanisme de contrôle social. À l’instar des procédures d’enregistrement utilisées par de nombreux autres États, à titre permanent ou temporaire, ce système sert uniquement à connaître le lieu de résidence des citoyens.
M. Rakhmonov (Ouzbékistan) dit que tous les juges sont nommés pour un mandat de cinq ans. Toutes les nominations sont approuvées par le Président. Les juges de la Cour suprême, de la Haute Cour économique et de la Cour constitutionnelle sont nommés par le Sénat et ceux des juridictions inférieures par la Haute Commission de qualification relevant du Cabinet du Président. La commission, qui compte 17 membres, est actuellement présidée par une femme députée à la Chambre législative et comprend des députés, des juristes, ainsi que des représentants de la société civile, des services de répression et d’ONG. Les décisions sont prises à la majorité simple. Il s’agit d’un système de nomination efficace et démocratique.
Si un représentant de la Cour suprême participe à la séance en cours, c’est parce qu’un quart environ des questions du Comité portent sur des sujets qui relèvent de la compétence de cette juridiction, à savoir : l’habeas corpus, l’abolition de la peine de mort, la réclusion à perpétuité, les peines de prison de longue durée, etc.
M. Akhmedov(Ouzbékistan) dit que l’Ouzbékistan, comme beaucoup d’autres États, a décidé de regrouper tous les avocats dans un organe centralisé unique. C’est ainsi que la chambre des avocats a remplacé le barreau des avocats. Le Ministère de la justice offre un appui aux activités de la chambre, notamment pour les activités de formation, veille à ce que les règlements régissant la profession d’avocat soient appliqués et s’acquitte de différentes tâches administratives. Il tient à jour une liste de tous les avocats qui est rendue publique et est aussi responsable de l’enregistrement des cabinets d’avocats. Le Gouvernement ouzbek a pour politique de veiller à ce que tous les citoyens aient droit à une assistance juridique. Les avocats sont protégés contre les poursuites abusives.
Les citoyens âgés de 18 à 27 ans, membres d’une organisation religieuse enregistrée qui interdit à ses adhérents de porter les armes ou de servir dans les rangs des forces armées, peuvent, au lieu d’effectuer leur service militaire, opter pour le service civil. Ce service comprend différents types de travaux non qualifiés, la prestation de services sociaux ou une participation aux efforts de nettoyage entrepris après une catastrophe naturelle ou une situation d’urgence.
M. Sa i dov (Ouzbékistan) dit qu’il ne connaît pas d’ONG qui aurait eu des difficultés pour s’enregistrer ni de cas récent où une ONG se serait vu refuser une demande d’immatriculation. Toutefois, en vertu de la législation ouzbèke, toutes les ONG doivent être établies en tant que personnes morales. À la date de son accès à l’indépendance, l’Ouzbékistan comptait 206 ONG. Dix années plus tard, ce chiffre était passé à 2 300 et au 1er janvier 2010 on recensait plus de 5 000 ONG en activité. Il n’y a aucune raison de croire que ces organisations craignent d’être harcelées.
Le fait que les organisations religieuses sont tenues d’avoir au moins 100 membres pour pouvoir être enregistrées n’est pas un problème pour les organisations religieuses musulmanes. En tout état de cause, la loi s’applique avec beaucoup de souplesse et certaines organisations chrétiennes plus petites ont été autorisées à s’enregistrer, alors qu’elles ne comptaient que 50 membres.
En ce qui concerne la nationalité, il existe trois catégories de personnes en Ouzbékistan : les citoyens ouzbeks, qui constituent la majorité écrasante; les apatrides, qui sont généralement des Roms et des groupes assimilés; et les ressortissants étrangers. Malheureusement, on ne dispose d’aucune statistique sur les apatrides. Une commission spéciale qui compte parmi ses membres des représentants d’organismes gouvernementaux et d’ONG est chargée d’examiner toutes les demandes de nationalité et ses recommandations sont subordonnées à l’approbation du Président.
En réponse aux questions posées à la précédente séance concernant les défenseurs des droits de l’homme, l’orateur dit que sa délégation fournira au Comité des réponses écrites sur les personnes dont il est fait mention.
M me Motoc dit que la question du prosélytisme a été soulevée dans le précédent rapport (par. 22). Ce terme s’entendait, à une époque, comme signifiant une conversion forcée, mais le Pacte ne l’utilise pas dans ce sens. Le Comité fait donc une distinction entre le prosélytisme agressif et celui qui ne l’est pas. L’article 18 du Pacte fait référence au droit à la liberté de religion et au droit de manifester sa religion par l’enseignement, droits qui impliquent le droit d’enseigner cette religion à autrui. Cet article devrait être interprété à la lumière de l’article 19 sur la liberté d’expression, qui inclut la liberté de recevoir des informations. En outre, le droit à la liberté d’association implique le droit de quitter des associations, y compris des associations religieuses.
M. Thelin dit que, faute de temps, il acceptera une réponse écrite à sa question relative à l’indépendance du pouvoir judiciaire et à sa participation à l’établissement du rapport. Il déplore que l’organisation Freedom House ait placé l’Ouzbékistan au septième rang de son classement, rang qui correspond au degré de liberté le plus faible et espère voir une amélioration, lorsque le prochain rapport périodique sera présenté.
M. Nigel Rodley demande quels sont les critères utilisés par la Cour suprême pour commuer les condamnations à mort et si la procédure se déroule en public ou à huis clos. Il souhaiterait avoir des renseignements complémentaires sur cette procédure. Il se demande aussi quel rôle la Cour suprême, le pouvoir exécutif ou certains organismes d’État sont amenés à jouer dans la suite donnée aux recommandations du Comité.
M. Rakhm o nov (Ouzbékistan) dit que la décision de commuer une peine de mort en réclusion perpétuelle ou en peine de prison de longue durée relève de la Cour suprême, agissant dans le strict respect de la législation pertinente. Les deux critères principaux sont la nature de l’infraction et l’ampleur du tort causé à la société et aux personnes.
M. Saidov (Ouzbékistan) dit que, lorsque que la peine de mort a été abolie, les peines ont été commuées conformément aux dispositions révisées du Code pénal utilisées pour le prononcé des jugements. Il ajoute qu’il peut indiquer les numéros des articles pertinents. Conformément au Code de procédure pénale, la Cour suprême examine les dossiers sur la base d’une procédure de contrôle, ce qui signifie qu’elle les traite comme s’ils avaient été rouverts.
En ce qui concerne le prosélytisme, l’orateur souligne que toute personne a le droit de choisir librement sa religion. C’est là un élément essentiel de la liberté de parole, de la Constitution et du Pacte. La liberté en matière d’éducation religieuse est également garantie. Avant l’indépendance, il n’existait que deux établissements d’enseignement religieux en Ouzbékistan; il en existe aujourd’hui plus de 20, tous des établissements islamiques. Toutefois, la loi n’autorise ni les activités missionnaires, ni la diffusion illégale de littérature religieuse, ni la conversion de personnes d’autres confessions. La délégation ouzbèke ne manquera pas d’étudier en détail les recommandations du Comité sur la question.
L’Ouzbékistan met actuellement en place un appareil judiciaire solide et indépendant et a accompli des progrès considérables depuis l’indépendance. Le Gouvernement a conscience des conditions à réunir pour assurer l’indépendance du pouvoir judiciaire et examine attentivement l’expérience des pays démocratiques. Quant à la participation à la séance d’un représentant de la Cour suprême, l’intervenant dit qu’il n’est pas nécessaire d’établir une séparation entre les pouvoirs exécutif et judiciaire, dans la mesure où ils œuvrent de concert.
M. Saidov dit qu’il a le plus grand respect pour les travaux de l’organisation Freedom House, mais que celle-ci semble mesurer la liberté en termes de droits civils et politiques uniquement, alors que le droit international contemporain considère les droits de l’homme, y compris les droits économiques, sociaux et culturels, comme un tout indissociable. L’Ouzbékistan œuvre pour lui-même et non pas pour améliorer son classement par une organisation quelconque.
L’intervenant remercie le Comité du dialogue constructif qui s’est engagé. Il y a certes eu des moments de tension mais c’est précisément lors de discussions animées de ce type que la vérité peut surgir. Les observations finales du Comité seront rendues publiques et la délégation ouzbèke s’attellera bientôt à l’élaboration du plan d’action national destiné à donner suite aux recommandations formulées. Le plan sera élaboré avec le concours des partenaires internationaux de l’Ouzbékistan à savoir le Programme des Nations Unies pour le développement, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance et d’autres organisations.
Le Président dit que, en raison des délais impartis, le Comité a consacré davantage de temps à exprimer ses préoccupations qu’à reconnaître les progrès accomplis, mais qu’il prendra note des avancées de l’Ouzbékistan dans ses observations finales.
Un dialogue constructif s’est engagé avec la délégation ouzbèke, même si les réponses écrites du Gouvernement, qui avaient été présentées dans une langue officielle de l’ONU, n’ont malheureusement pas été traduites. Le Comité a été très heureux de recevoir une délégation d’un aussi haut niveau.
Les membres de la délégation ouzbèke se retirent.
La séance est suspendue à 16 h 25 ; elle est reprise à 16 h 35.
Le Président dit que le Sous-Secrétaire général au Département de l’Assemblée générale et de la gestion des conférences, le Directeur du Bureau de New York du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et le Chef de la Section du budget du Bureau de la planification des programmes, du budget et de la comptabilité ont été invités à s’entretenir avec le Comité pour examiner les questions relatives à la documentation.
En vertu de l’article 40 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, il est demandé aux États parties de présenter des rapports périodiques au Comité. Pour faciliter l’examen de ces rapports, le Comité leur demande de soumettre à l’avance leurs réponses à la liste des questions. La traduction, dans les langues de travail du Comité, des rapports des États parties et des réponses écrites à la liste des questions est d’une importance capitale. Dans le passé, le Comité avait recours, pour ce service, à la Division de la gestion des conférences de l’Office des Nations Unies à Genève, mais des problèmes se sont posés lors de ses récentes sessions.
Lors d’une réunion avec la Division qui avait été demandée par le Comité, en octobre 2009, les représentants de la Division ont expliqué que, comme les rapports des États parties sont des documents requis par les organes délibérants et que les réponses écrites à la liste de questions n’en sont pas, les réponses ne sont traduites que s’il existe des ressources à cette fin. D’aucuns ont également souligné que les ressources allouées à l’Office de Genève étaient insuffisantes et qu’il y avait une grave pénurie de traducteurs du russe vers l’anglais.
Compte tenu du fait que la Division est davantage sollicitée en raison de la création du Conseil des droits de l’homme, et des conséquences qui en résultent pour les services de traduction et de reproduction des documents mis à la disposition des organes de suivi des traités, le Président souhaiterait savoir quelles mesures peuvent être prises pour résoudre les problèmes actuels, compte tenu en particulier de la nécessité d’améliorer la situation des droits de l’homme dans les États parties à la Convention.
M. Thelin dit que la situation actuelle n’est pas satisfaisante et laisse peu de choix au Comité. D’un côté, suspendre l’examen d’un rapport, faute de ressources suffisantes, serait injuste pour les États parties qui ont présenté leur rapport dans une langue officielle, comme il leur a été demandé; de l’autre, continuer de faire appel aux ressources du Secrétariat qui ne sont pas spécifiquement allouées au Comité n’est pas non plus une solution viable. Étant donné qu’en vertu de l’article 36 du Pacte, le Secrétaire général de l’ONU doit mettre à la disposition du Comité le personnel et les moyens matériels qui lui sont nécessaires pour s’acquitter efficacement des fonctions qui lui sont confiées, il serait peu judicieux d’imposer cette charge au Haut-Commissariat aux droits de l’homme. Tant que cette question n’aura pas été résolue, le Comité ne sera pas en mesure de fonctionner de manière satisfaisante.
M. Lallah dit qu’il faudrait aussi examiner les difficultés auxquelles le Comité se heurte de temps à autre, en ce qui concerne les travaux relatifs au Protocole facultatif. Constatant que les plaintes que le Comité a précédemment adressées à l’Assemblée générale ne semblent pas avoir facilité les choses, il demande au Sous-Secrétaire général de donner des indications sur les mesures internes que le Comité pourrait prendre pour améliorer la situation. En outre, il serait utile de savoir si le Comité doit s’adresser directement aux organes qui sont chargés de l’allocation de ressources aux services de traduction, comme le Comité consultatif sur les questions administratives et budgétaires.
Sir Nigel Rodley dit que la présence du Sous-Secrétaire général et du Chef de la Section du budget du Bureau de la planification des programmes, du budget et de la comptabilité à la séance montre que les préoccupations du Comité sont prises au sérieux. L’importance de la liste des questions n’est peut-être pas suffisamment claire. En invitant les États parties à répondre par avance à certaines préoccupations, le Comité peut engager directement un débat lors de ses séances publiques, et ainsi rationaliser ses travaux, comme on le lui a souvent demandé. Toutefois, si les réponses écrites ne sont pas disponibles dans ses langues de travail, l’État partie doit en donner lecture à la séance publique, procédure qui, en mobilisant une partie du temps déjà limité alloué aux réunions, va à l’encontre des efforts de rationalisation en question. Le Comité traverse actuellement une phase de transition entre son système actuel et une méthode de travail suivant laquelle les réponses écrites pourraient à terme remplacer les rapports périodiques, ce qui permettrait de réduire la charge de travail globale, notamment les besoins en matière de traduction.
M. Salvioli dit que divers États parties, dont l’Argentine et le Mexique à la session en cours, ont aussi déploré que le Comité ne puisse obtenir les moyens dont il a besoin pour s’acquitter de sa tâche. Poser à un État partie des questions qu’il a déjà traitées dans ses réponses écrites, mais que le Comité n’a pas pu lire à l’avance, nuit à sa crédibilité, laquelle est indispensable au fonctionnement efficace d’un organe de suivi des traités relatifs aux droits de l’homme.
M. O ’ Flaherty dit que les problèmes rencontrés par le Comité touchent tous les documents dont il a besoin pour s’acquitter de ses fonctions, notamment les projets de document qu’il doit adopter, comme les observations finales et les vues relatives aux communications. Les retards de publication ou le fait que les documents ne sont pas disponibles, soulèvent trois types de problèmes. Tout d’abord, l’impossibilité d’avoir accès à certains documents nuit à la qualité des travaux du Comité. Ensuite, le fait que certains documents ne sont pas disponibles nuit à la transparence de ses activités. Enfin, le Comité est contraint d’accélérer ses travaux lorsque les documents dont il a besoin lui sont communiqués avec retard.
Il faut reconnaître que les services de traduction de New York, qui sont disponibles 24 heures sur 24, étaient généralement plus fiables que ceux de Genève. Le problème est imputable aux services de traduction de Genève en particulier, et non pas au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. Dans ce contexte, il serait intéressant d’entendre les vues du Sous-Secrétaire général sur la question des ressources allouées au Conseil des droits de l’homme depuis que celui-ci a été créé.
M. Amor dit que les membres du Comité pourraient devoir s’abstenir de participer aux activités si certains problèmes de traduction les empêchent de s’acquitter des tâches qui leur ont été confiées.
M me Motoc dit que, bien qu’il y ait toujours eu des problèmes concernant la traduction des documents, la situation s’est aggravée au cours des 10 dernières années; les rapports des États parties jadis disponibles dans deux ou trois langues de travail, ne sont parfois distribués que dans la langue originale. L’intervenante se demande où cette tendance inquiétante vers la disparition de la diversité linguistique risque de conduire. Certains de ses collègues, dans d’autres organisations, ont refusé de participer aux délibérations lorsque les documents ne sont pas traduits dans leurs langues de travail.
M. Rivas Posada dit que le problème de la traduction a été soulevé session après session, sans qu’aucun résultat n’ait été obtenu. Pour tenter d’aboutir à une solution satisfaisante, il est indispensable de déterminer dans quelle mesure les besoins en documentation du Conseil des droits de l’homme ont affecté des services mis à la disposition des organes de suivi des traités relatifs aux droits de l’homme, car l’idée d’une concurrence interne pour l’obtention de ressources ne doit pas être tolérée.
M me Morales (Secrétaire du Comité) dit qu’au cours des 15 dernières années, les organes chargés du suivi des traités relatifs aux droits de l’homme ont dû renoncer aux crédits qui leur étaient initialement alloués pour s’adapter à la pénurie croissante de ressources à Genève. En dépit des efforts importants déployés à cette fin, la situation actuelle donne à penser qu’une nouvelle ligne de conduite s’impose.
M. Baumann (Sous-Secrétaire général au Département de l’Assemblée générale et de la gestion des conférences) dit que la traduction de documents est non seulement une question de ressources mais aussi un problème de capacité et de gestion. Déjà en 1997, dans ses premières propositions de réforme, le Secrétaire général Kofi Annan avait reconnu la nécessité d’une gestion globale des services de conférence qui permettrait de définir des priorités et de renforcer la coopération entre les différents lieux d’affectation. Malgré cela, il subsiste encore des domaines où les systèmes ne communiquent pas, même si le Sous-Secrétaire général et le Secrétaire général adjoint du Département de l’Assemblée générale et de la gestion des conférences accordaient un rang de priorité élevé à la communication. Les réponses aux demandes de traduction sont plus rapides à New York, car la planification y est plus efficace. Les services de traduction du Siège et ceux de Genève ont une charge de travail équivalente et tous deux une productivité élevée, mais New York s’est doté d’outils de gestion interne, tels que le système des « créneaux » pour la soumission des documents et le système de planification des capacités et de prévision, qui font une différence. Les besoins en matière de services de conférence doivent être connus longtemps à l’avance si l’on veut que ces services soient fournis dans les délais prescrits. L’Organisation a pour politique de recruter 20 % de son personnel de traduction en tant que vacataires pour répondre aux besoins, et ce recrutement s’effectue parfois neuf mois à l’avance, car le personnel linguistique est une ressource rare et très recherchée, et les conditions d’emploi a l’ONU ne sont pas toujours compétitives.
Le Sous-Secrétaire général est encouragé par le fait que le Comité examine en détail les mesures qui pourraient être prises. Le Siège exporte actuellement à Genève et à Vienne, et dans une certaine mesure à Nairobi, une approche professionnalisée de la projection et de la planification des capacités, ainsi que du système des « créneaux » pour la soumission des documents. Le Comité lui-même peut contribuer à ces efforts, en réduisant le nombre et le volume des documents présentés et en indiquant avec précision la date de leur soumission. On rappellera aussi que les délégations répondaient en général oralement à la liste des questions lorsque le Comité les rencontrait, comme Sir Nigel l’a lui-même souligné. Ce qui était auparavant un aspect non budgétisé s’est ainsi transformé avec le temps en un droit acquis.
Le budget alloué aux services de traduction relève non pas de l’Office des Nations Unies à Genève mais du Département de l’Assemblée générale et de la gestion des conférences, car les questions budgétaires sont traitées à New York. De fait, le Secrétaire général a transféré d’importantes ressources à Genève et, en décembre 2009, l’Assemblée générale a contribué à cet effort en approuvant le budget sous une forme essentiellement analogue à celle qu’avait proposée le Secrétaire général. Le Département a également été invité à surveiller la situation à Genève et à demander des fonds supplémentaires si les crédits alloués s’avéraient insuffisants. Toutefois, il est impossible de demander des fonds supplémentaires aux États Membres dès le premier trimestre de l’exercice biennal et il faut pour le moment compter sur une amélioration des méthodes de gestion interne. Le Sous-Secrétaire général estime que la création du Conseil des droits de l’homme a drainé des ressources et que l’augmentation des crédits alloués aux organes de suivi des traités n’est pas suffisante par rapport à la charge de travail. À un stade ultérieur, on pourrait peut-être réexaminer la demande soigneusement chiffrée d’un montant de quelque 9 millions de dollars supplémentaires pour le Conseil des droits de l’homme, sur laquelle la Troisième Commission n’avait pas pris de décision deux ans auparavant. Le Comité ne doit pas s’attendre à ce que le montant des fonds alloués augmente du jour au lendemain, mais il pourrait peut-être espérer une augmentation d’ici à la fin de l’année.
La pénurie de services est incidemment un problème qui se pose non seulement dans les lieux d’affectation mais aussi à la CNUCED et dans les différents tribunaux – en d’autres termes, il s’agit d’un problème général. Toutefois, le Sous-Secrétaire général tient à assurer aux membres du Comité qu’il a clairement compris leurs messages que ceux-ci lui ont adressés et que le Département fait tout son possible pour gérer les services. Il espère que l’année suivante, lorsqu’il rencontrera de nouveau les membres du Comité, chacun conviendra que la situation s’est nettement améliorée.
Sir Nigel Rodley dit que le Comité se félicite de la tonalité des observations formulées par le Sous-Secrétaire général, lui sait gré d’avoir conscience du problème et de sa gravité, et des méthodes sérieuses qu’il a instituées pour y remédier.
S’agissant des éléments budgétisés et non budgétisés – ou des activités prescrites et non prescrites par les organes délibérants selon l’expression en usage à Genève –, Sir Nigel souligne que les organes de suivi des traités ont régulièrement réaffirmé lors de leurs réunions intercomités, qu’ils étaient préoccupés par le fait que les réponses écrites à la liste des questions, qu’ils considéraient tous comme faisant partie intégrante de leurs travaux, n’étaient pas traduites. Ces organes pouvaient-ils faire quelque chose pour que le coût de ces traductions soit inscrit au budget?
M. Thelin dit qu’il estime lui aussi que le Comité lui-même devrait planifier ses travaux à l’avance. Toutefois, ses documents émanent des États parties et lui parviennent souvent avec beaucoup de retard; dans le même temps, le Comité ne peut pas les refuser. Les organes chargés du suivi des traités devraient pouvoir disposer immédiatement d’une réserve de ressources qui leur permette de recruter des traducteurs indépendants pour faire face aux imprévus. Le fait de pouvoir disposer d’une certaine souplesse à court terme pourrait leur être d’un grand secours.
M. Baumann (Sous-Secrétaire général du Département de l’Assemblée générale et de la gestion des conférences) dit qu’il appartient à l’Assemblée générale de décider si une activité donnée est prescrite; à sa connaissance, aucun montant n’est prévu pour le type de capacité de réserve envisagé par M. Thelin.
Le Sous-Secrétaire général dit qu’il a lu avec grand intérêt le projet de rapport de la dixième réunion intercomités des organes chargés du suivi des traités, en particulier le paragraphe 16 dans lequel il est indiqué que ces organes doivent restreindre le nombre de recommandations au sujet desquelles les États parties doivent fournir des informations de suivi, ce qui aiderait effectivement à limiter la documentation à traduire. Il serait aussi utile que les comités dressent un inventaire de tous les documents relevant de leur responsabilité et établissent un calendrier pour leur soumission. De nombreux organes, à l’instar du Comité, dépendent des services d’amont, situation qui crée de graves problèmes dans la production de documents. La prévisibilité est une condition essentielle. Le Département peut même traiter un volume important de documents, s’il a été informé à l’avance. Mais il semblerait que le fonctionnement en mode de crise soit la norme. La gestion globale intégrée traite les lieux d’affectation comme un tout; il serait souhaitable qu’ils réorganisent leurs activités sur le plan local, en mettant en attente les tâches moins urgentes pour répondre aux priorités à l’échelle mondiale.
Le Président informe le Sous-Secrétaire général qu’en octobre 2009, le Comité a décidé qu’une fois qu’un État partie aurait présenté son deuxième rapport périodique, ses réponses écrites à la liste des questions feraient ensuite office de rapport au titre de l’article 40 du Pacte. La mise en œuvre de cette décision prendra du temps; dans l’intervalle, le Président souligne aussi que les réponses écrites devraient être traduites en tant que documents prescrits. Il remercie le Sous-Secrétaire général de s’être entretenu avec les membres du Comité, lesquels ont été encouragés par le fait qu’il s’est montré réceptif à leurs préoccupations et a indiqué que plusieurs mesures étaient prises pour y remédier.
Les débats dont rend compte le présent compte rendu analytique ont pris fin à 17 h 30.