NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/SR.257230 octobre 2008

Original: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

Quatre-vingt-quatorzième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 2572e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, Genève,le mardi 14 octobre 2008, à 15 heures

Président: M. RIVAS POSADA

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 40 DU PACTE (suite)

Deuxième rapport périodique de Monaco

La séance est ouverte à 15 heures .

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 40 DU PACTE (suite)

Deuxième rapport périodique de Monaco (CCPR/C/MCO/2; CCPR/C/MCO/Q/2 et Add.1)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation de Monaco prend place à la table du Comité .

2.M. FILLON (Monaco) procède à un vaste tour d’horizon de l’histoire de son pays depuis le XIe siècle d’un point de vue historique et juridique. La famille Grimaldi, qui règne sur la Principauté depuis 1297, a mis fin à au protectorat espagnol et a placé la Principauté sous protectorat français en 1641 en signant le Traité de Péronne qui assurait à son pays la protection de ses voisins puissants contre les menaces extérieures tout en maintenant la souveraineté princière sur les affaires intérieures.

3.La Principauté a été un allié des rois de France jusqu’à la Révolution française et a été annexée à la France en 1793. Après le Congrès de Vienne, Monaco est placé sous le protectorat du royaume de Piémont-Sardaigne. En 1861, les rois de Sardaigne ont cédé Nice à la France; le traité franco-monégasque de 1861 entérine la souveraineté de Monaco et instaure une union douanière avec la France. Des traités ultérieurs ont été conclus en 1918 et en 2002, le second affirmant clairement la souveraineté de Monaco.

4.Une ordonnance constitutionnelle datant de 1911 établit l’organisation des autorités publiques et les relations entre elles. La Constitution, adoptée en 1962, a été modifiée en 2002 afin d’élargir les pouvoirs du Parlement désormais habilité à donner son avis sur les ratifications des conventions internationales.

5.En prenant part aux conférences préparatoires en vue de créer la Société des Nations, Monaco affiche dès 1919 sa volonté de participer aux organisations internationales. La nomination du Prince héritier à la tête de la délégation de Monaco à l’Assemblée générale, lorsque le pays est devenu membre des Nations Unies en 1993, a reflété la volonté des autorités à participer au niveau le plus élevé à toutes les formes de dialogue et de coopération politique entre les États à l’échelon mondial. Depuis, Monaco a activement contribué aux activités des Nations Unies, en particulier dans le domaine de la coopération.

6.En tant qu’État tiers dans ses relations avec l’Union européenne, Monaco est intégré au territoire douanier de l’Union et a adopté l’euro comme devise. Le pays fait partie de l’espace Schengen et est pratiquement intégré à la France, ce qui permet la libre circulation des personnes. Monaco est devenu membre du Conseil de l’Europe en 2004 et un juge monégasque siège actuellement à la Cour européenne des droits de l’homme. En outre, Monaco a été un membre fondateur de l’Organisation internationale de la francophonie et continue d’y participer activement, affirmant ainsi sur la scène internationale les valeurs de diversité culturelle, de développement viable et de droits de l’homme qui structurent les activités de cette organisation.

7.Son pays attache une grande importance au processus d’examen du Pacte et estime qu’il offre une occasion d’examiner dans quelle mesure ses lois sont conformes aux principes du droit international exprimés dans le Pacte. Son pays se félicite du dialogue engagé qu’il considère comme étant un processus d’apprentissage qui améliorera son corpus et ses pratiques juridiques.

8.Le PRÉSIDENT invite la délégation à passer en revue les questions de la liste des points à traiter.

9.M. GASTAUD (Monaco), se référant aux questions 1 à 5 de la liste des points à traiter, dit que Monaco n’a formulé qu’un nombre limité de déclarations interprétatives et de réserves au moment de la signature et de la ratification du Pacte en 1977, ce qui peut expliquer pourquoi elles demeurent pertinentes. Mais cela n’exclut pas la possibilité d’un changement de position à un moment donné.

10.Les personnes déférées devant les tribunaux de Monaco invoquent les dispositions du Pacte, et le Comité a été informé des décisions à cet égard. Les dispositions du Pacte ont été incorporées dans l’ordre juridique interne et constituent les normes juridiques qui sont appliquées par les juges, si cela est nécessaire.

11.La création d’une institution indépendante pour la protection des droits de l’homme n’est pas envisagée actuellement car, à Monaco, les recours administratifs sont facilement accessibles en raison de la proximité des autorités administratives. Les personnes morales et physiques domiciliées à Monaco ont un accès illimité aux recours judiciaires qui offrent des garanties objectives à la fois aux plaignants et aux défendeurs.

12.Étant donné que les stipulations du Protocole facultatif ne sont pas normatives, mais qu’elles attribuent la compétence au Comité des droits de l’homme, Monaco réexamine la compétence des autorités administratives de l’État en vue, entre autres, de vérifier la compatibilité avec le Protocole facultatif.

13.Comme il est indiqué dans les réponses écrites, la cellule des droits de l’homme qui relève du Département des relations extérieures est compétente à recevoir des communications en vertu de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Vu la similarité des dispositions de la Convention et du Pacte, un recours formé en vertu du Pacte peut aussi bien l’être en vertu de la Convention aux mêmes fins.

14.M. GAMERDINGER, se référant à la question 6 de la liste des points à traiter, rappelle au Comité que son pays a accédé à 13 conventions internationales relatives à la lutte contre le terrorisme, qui sont toutes incorporées dans le droit national et les textes réglementaires. Le terrorisme est défini dans le Code pénal de Monaco comme tout acte commis délibérément par une personne ou un groupe contre la Principauté de Monaco ou d’autres organisations gouvernementales ou internationales qui, par l’intimidation ou la terreur, cherche à menacer, à attaquer ou à détruire la structure politique, économique ou sociale ou à porter gravement atteinte à l’ordre public. Cette définition comprend l’atteinte à la sûreté de l’État, les meurtres, les dommages ou la destruction causés délibérément, et l’incendie criminel.

15.En vertu du droit commun, des sanctions sont imposées pour certaines activités liées au terrorisme, en particulier le trafic d’armes, les actes de torture et de barbarie ainsi que l’offre d’un hébergement et d’une aide financière ou d’une protection à un membre d’un groupe terroriste. Les dommages causés délibérément à l’environnement sont également définis comme un acte terroriste. Dans les affaires de terrorisme, les procédures pénales sont régies par le droit commun, et il n’est pas possible d’y déroger; les personnes poursuivies pour terrorisme jouissent des mêmes droits et garanties que les auteurs d’autres infractions pénales.

16.Les personnes mises en cause dans des activités terroristes peuvent être placées en garde en vue pour une période initiale de 24 heures et doivent être informées des charges qui sont retenues contre elles. Elles ont la possibilité de prévenir leurs proches, ont accès à un conseiller juridique et, si nécessaire, à un médecin et peuvent être assistées d’un interprète. S’il s’agit de personnes handicapées, une assistance leur est fournie pour garantir une communication efficace avec les agents des forces de l’ordre chargés de mener les enquêtes préliminaires. La période de garde à vue peut être prolongée de 24 heures, et ensuite de 48 heures supplémentaires, sur autorisation spécifique d’un magistrat pour chaque affaire. Une partie des fonds ou des avoirs gelés liés à des actes de terrorisme potentiels ou à leur financement peut servir à couvrir les frais juridiques ou d’autres frais nécessaires, y compris les dépenses médicales.

17.Mme PASTOR, se référant aux questions 7 à 9 de la liste des points à traiter, dit qu’en 2001, les femmes occupaient 42 % des postes dans le secteur privé et 37 % dans l’administration publique et qu’elles étaient beaucoup plus nombreuses que les hommes à occuper des emplois classés en catégorie A dans la fonction publique. En 2008, le nombre de femmes travaillant dans le secteur privé a légèrement augmenté, passant à 42,13 %. Au sein du Gouvernement, les femmes occupent un certain nombre de fonctions électives au rang de ministres. Les mesures visant à assurer aux femmes des droits égaux à ceux des hommes comprennent l’introduction en 2003 de la possibilité de travailler à temps partiel. Le Gouvernement étudie la possibilité d’adopter une loi spécifique sur le harcèlement sexuel.

18.La violence familiale n’est pas expressément érigée en infraction, même si certaines dispositions du Code pénal concernant l’homicide peuvent être applicables aux cas de violence familiale. Le Conseil national a adopté un projet de loi sur la violence familiale qui est actuellement examiné par le Gouvernement. Une campagne nationale a également été lancée pour promouvoir la sensibilisation à ce sujet. Alors que la violence familiale est rare à Monaco et qu’il n’existe aucun cadre législatif spécifique pour combattre ce phénomène, un soutien important est offert aux victimes qui ont accès par le biais des services sociaux et de santé à des systèmes de soutien professionnel.

19.En 2003, le Code civil a été modifié par la loi n° 1278 qui donne des droits égaux aux hommes et aux femmes dans le couple et stipule que le choix du lieu de résidence est soumis à l’accord des deux époux.

20.M. GAMERDINGER (Monaco), se référant à la question 10, dit que, conformément à la loi n° 1276 du 22 décembre 2003, les femmes naturalisées peuvent transmettre la nationalité monégasque à leurs enfants mineurs.

21.Mme PASTOR (Monaco), se référant à la question 11, dit que l’interruption médicale de grossesse est réprimée par l’article 248 du Code pénal et que, selon l’article 323 du Code civil, une condamnation pour avortement est un motif de retrait de l’autorité parentale. En fait, ces dispositions ne sont pas appliquées car elles sont considérées comme obsolètes. Le projet de loi en cours d’élaboration par le Gouvernement a trois objectifs: créer un centre de coordination prénatale et de soutien familial, dépénaliser l’interruption médicale de grossesse dans les situations prescrites par la loi et modifier l’article 323 du Code civil pour supprimer les dispositions susmentionnées.

22.Mme SAMPO (Monaco), se référant à la question 12, dit que, selon la loi n° 1343 du 26 décembre 2007, une nouvelle section IV a été insérée dans le Code pénal, qui précise les cas dans lesquels la privation de liberté peut être autorisée et énumère les garanties offertes aux personnes placées en garde à vue. Une personne ne peut être détenue par la police plus de 24 heures; la durée peut cependant être prolongée de 24 heures par le juge des libertés à la demande du procureur général ou du juge d’instruction. Une prolongation de 48 heures peut également être ordonnée dans les cas présumés de blanchiment d’argent, de trafic de stupéfiants et de menaces à la sûreté de l’État.

23.S’agissant de la question 13, elle dit que, compte tenu de l’exiguïté du territoire et du fait qu’entre 1990 et 2006 seulement 16 délinquants mineurs ont été placés en garde à vue, Monaco n’envisage pas actuellement de construire un centre de détention pour mineurs. Il est à noter cependant que les mineurs écroués sont détenus dans un quartier qui leur est réservé et que les alternatives à l’emprisonnement des mineurs, comme le sursis probatoire, sont souvent privilégiées.

24.Passant à la question 14, elle dit que les dispositions concernant le bannissement sont tombées en désuétude; la loi en question est actuellement en cours d’examen en vue de son abrogation.

25.Mme MOTOC dit qu’elle souhaiterait avoir des informations supplémentaires sur les déclarations interprétatives formulées par Monaco qui ne sont pas affectées par la loi salique, en particulier la déclaration concernant le séjour des étrangers dans la Principauté. Elle demande si le Gouvernement envisage de créer une institution spécialisée dans la lutte contre la discrimination, comme l’ont fait plusieurs pays européens. Elle souhaiterait avoir de plus amples détails sur la pratique de l’interruption de grossesse et le raisonnement du Gouvernement concernant cette question complexe. Elle souhaiterait savoir également dans quelle mesure les observations faites par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines et traitements inhumains et dégradants ont eu un impact sur les procédures de garde à vue. Enfin, elle demande un complément d’informations sur les règles régissant le traitement des délinquants mineurs incarcérés.

26.M. JOHNSON invite la délégation à faire des observations sur le statut du Pacte par rapport au droit interne de Monaco. Il exhorte le Gouvernement à donner à la cellule des droits de l’homme et des libertés fondamentales les moyens de surveiller la mise en œuvre des recommandations du Comité et de recevoir les requêtes individuelles. Le Gouvernement devrait également envisager la création d’une institution nationale indépendante pour la protection des droits de l’homme conformément aux Principes de Paris. Par ailleurs, il suggère que Monaco révise sa législation interne pour s’assurer qu’elle est conforme au Protocole facultatif, et pas l’inverse.

27.M. GLÈLÈ‑AHANHANZO dit qu’il serait utile de savoir comment les droits de l’homme et les dispositions du Pacte sont généralement perçus à Monaco. Il est préoccupé par le fait que la définition du terrorisme donnée par l’État partie dans sa réponse à la question 6 est trop large et trop ambiguë. Il serait utile d’adopter une définition plus précise et de donner des exemples de jurisprudence monégasque concernant cette question. Il souhaiterait également avoir une description des fonctions du juge des libertés.

28.Il serait utile de connaître les raisons de la sous-représentation apparente des femmes dans la vie publique à Monaco. L’intervenant demande si une femme pourrait un jour être chef du Gouvernement monégasque.

29.Il souhaiterait avoir des informations plus détaillées sur les recours concernant les affaires liées à la violence familiale, ainsi que des informations générales sur les amendes, les peines, l’application des peines et les établissements pénitentiaires pour les personnes qui violent la loi à Monaco.

30.Mme WEDGWOOD demande si des obstacles particuliers s’opposent à l’abrogation de la pratique archaïque du bannissement, étant donné que le Gouvernement a exprimé son intention de le faire dès 2001. Elle note que Monaco a fait de nombreuses déclarations interprétatives concernant le Pacte et rappelle à la délégation la politique du Comité visant à décourager les États parties à formuler plus de réservations ou de déclarations interprétatives qu’il est jugé absolument nécessaire.

31.S’agissant de la loi salique appliquée à Monaco, elle dit que si le rang aristocratique implique l’exercice réel du pouvoir politique, comme c’est le cas pour le Prince de Monaco, limiter l’accès des femmes au trône est une pratique très contestable. Elle souhaiterait savoir quel aspect du pouvoir exercé par les tribunaux de police le Gouvernement juge être en conflit avec les garanties prévues au paragraphe 5 de l’article 14 du Pacte. Quant à la déclaration de Monaco concernant les articles 21 et 22 du Pacte relatifs au droit de réunion pacifique et au droit à la libre association, les clauses restrictives énumérées par l’État partie semblent inutiles, étant donné qu’il y est déjà fait référence dans le Pacte. La délégation devrait expliquer pourquoi elle juge que cette déclaration est nécessaire.

32.M. IWASAWA note avec satisfaction les nombreux changements importants qui ont eu lieu dans la Principauté de Monaco depuis l’examen par le Comité du rapport initial de l’État partie en 2001, en particulier les modifications apportées à sa législation afin de la rendre conforme au Pacte.

33.M. AMOR dit qu’il n’est pas convaincu par la déclaration de la délégation selon laquelle l’existence de recours auprès des tribunaux efficaces dispense le Gouvernement de créer une institution nationale des droits de l’homme. Il est clair que le Gouvernement ne comprend pas bien les fonctions et les rôles de ces organismes. Il souhaiterait savoir s’il y a un obstacle juridique ou logique à la prolongation du mandat de la cellule de défense des droits de l’homme instituée auprès du Département des relations extérieures qui permettrait de couvrir non seulement la Convention européenne des droits de l’homme mais aussi le Pacte. Il serait peut-être possible de créer une cellule analogue pour veiller à ce que Monaco s’acquitte de ses obligations prévues par les traités des Nations Unies et autres mécanismes des Nations Unies auxquels il a souscrit. Il s’inquiète de l’interprétation très large du terrorisme dans la législation monégasque et demande si des affaires de blanchiment d’argent liées au terrorisme ont donné lieu à des poursuites et quelle en a été l’issue.

34.M. LALLAH demande à la délégation combien de personnes ont été détenues, arrêtées ou jugées en vertu de la loi contre le terrorisme au cours des années récentes. Étant donné que Monaco ne possède pas de prisons et transfère les prisonniers condamnés dans des établissements pénitentiaires en France, la délégation devrait expliquer quelles dispositions le Gouvernement a prises pour s’assurer qu’il s’acquitte de ses obligations prévues au paragraphe 3 de l’article 10 de la Convention vis-à-vis des personnes qui purgent leurs peines. Ces détenus sont-ils soumis au droit français?

35.Mme CHANET s’inquiète de la réserve formulée par Monaco quant au paragraphe 5 de l’article 14 du Pacte et dit que dans les affaires pénales le Gouvernement devrait établir une procédure de recours sur le fond. Notant que la législation nationale contient des dispositions concernant le terrorisme dit «écologique», elle dit que l’emploi très large du terme «terrorisme» en référence à ces actes qui, bien que répréhensibles, ne sont pas comparables aux actes de terrorisme, nuit au sens du terme juridique. Enfin, la délégation devrait informer le Comité du nombre d’affaires qui ont fait l’objet de poursuites ou de condamnations pour violation de la loi contre l’avortement.

36.Mme MAJODINA dit que les institutions nationales des droits de l’homme jouent un rôle promotionnel important et sont donc indispensables non seulement dans les pays qui ont connu de nombreuses violations des droits de l’homme mais dans tous les pays. Il est important de créer à Monaco une institution chargée de promouvoir tous les instruments des Nations Unies ainsi que les conventions européennes. La cellule des droits de l’homme à laquelle il est fait référence dans le rapport manque d’indépendance, un élément fondamental indispensable pour ces institutions. Monaco devrait mettre en place cette institution conformément aux Principes de Paris.

La séance est suspendue à 16 heures 45 ; elle reprend à 17 heures 05 .

37.M. FILLON (Monaco) dit que la loi salique, qui exclut les femmes de la succession au trône, n’a jamais été appliquée à Monaco. Même si l’accès au trône est donné en priorité aux hommes, il y a eu deux cas au cours des 300 dernières années où une femme a régné ou a transmis le droit au trône.

38.Dans les affaires présumées de violence familiale, le département des enquêtes criminelles est habilité à convoquer l’auteur d’une infraction et à lui faire prendre conscience qu’il n’a pas respecté la loi; cette procédure, appelée rappel à la loi, ne constitue pas une condamnation mais une simple mesure pour éviter que la personne ne récidive.

39.Mme PASTOR (Monaco) dit que la campagne de sensibilisation sur la violence familiale vise principalement à informer les femmes de leurs droits et des mesures disponibles pour leur protection. Elle traite de la violence à la fois physique et psychologique et s’adresse à des groupes tels que les élèves, les femmes, le personnel médical, les agents des forces de police et le personnel judiciaire, les travailleurs sociaux et les psychothérapeutes.

40.M. FILLON (Monaco) dit que la sanction du bannissement est obsolète et n’est plus infligée. Le Prince ne peut l’abolir à lui seul, car une telle mesure requiert l’accord du Conseil national. Cette sanction sera probablement bientôt éliminée lors de la prochaine révision de la loi.

41.Alors que les membres du Comité ont mentionné un certain nombre de réserves à la Convention, Monaco n’en a, en fait, formulé qu’une seule. Le reste des réserves ne constituent que des déclarations interprétatives qui visent à clarifier la manière dont l’État partie envisage de mettre en œuvre les dispositions de l’instrument. Si l’on peut concevoir qu’une organisation internationale appelle à limiter le nombre de réserves à ses conventions et finalement à les retirer, l’État partie estime qu’il est important de préciser la manière dont le Pacte sera appliqué. Il ne fait aucun doute que la législation nationale évoluera de façon qu’il soit finalement possible de retirer la réserve et les déclarations interprétatives.

42.M. GASTAUD (Monaco) dit que la relation entre la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et le Pacte doit être interprétée dans le cadre de la hiérarchie des normes à Monaco. Les dispositions constitutionnelles l’emportent sur les dispositions conventionnelles. Il n’existe pas de hiérarchie entre les traités. Les dispositions conventionnelles sont incorporées dans le droit monégasque par une ordonnance souveraine. Les traités qui produisent un effet immédiat sont automatiquement intégrés dans le droit monégasque. Toutefois, s’ils ne sont pas immédiatement exécutoires, une disposition législative ou réglementaire est nécessaire avant qu’ils ne puissent entrer en vigueur.

43.La cellule des droits de l’homme et des libertés fondamentales est chargée de surveiller la mise en œuvre de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales mais, faute de ressources, pas celle du Pacte. Une institution similaire sera mise en place pour surveiller la mise en œuvre du Pacte seulement si elle est jugée nécessaire pour répondre à des besoins spécifiques de la Principauté.

44.À Monaco, les recours judiciaires offrent des garanties suffisantes, car les tribunaux de la Principauté ne sont pas encombrés et les membres des autorités judiciaires connaissent bien les codes de procédure.

45.M. GAMERDINGER (Monaco) dit que la définition du terrorisme dans le droit monégasque est extrêmement précise. Même s’il n’y a jamais eu d’activités terroristes dans le pays, Monaco a prouvé son engagement à lutter contre le terrorisme en adhérant aux accords internationaux pertinents et en les ratifiant, comme ses États voisins. La pollution marine est un délit dans le droit monégasque, mais elle n’est pas considérée comme une infraction terroriste à moins qu’il n’y ait une volonté délibérée de terroriser la population. Aucune procédure n’a été lancée ni aucune décision judiciaire n’a été prise contre des terroristes ou des personnes soupçonnées de blanchiment d’argent lié au terrorisme pour la simple raison que le pays n’a jamais été confronté à des actes terroristes.

46.M. FILLON (Monaco), répondant aux observations faites sur la création d’une commission des droits de l’homme indépendante, dit que l’une des raisons pour lesquelles les tribunaux sont habilités à examiner les questions liées aux droits de l’homme est qu’en raison de l’exiguïté du pays, les tribunaux de Monaco sont beaucoup plus accessibles que ne le sont ceux des autres pays, et que les décisions y sont prises beaucoup plus rapidement.

47.Mme SAMPO (Monaco) dit qu’il existe des accords bilatéraux sur la détention entre Monaco et la France visant à établir les responsabilités de chaque État dans les domaines de la surveillance des prisonniers et du régime pénitentiaire. Les ressortissants étrangers qui ont été condamnés sont transférés dans l’État voisin, tandis que les ressortissants monégasques purgent leur peine dans la prison de Monaco. La rééducation des prisonniers fait l’objet d’accords entre la France et Monaco. Les mineurs peuvent être détenus pendant de courtes périodes dans la prison de Monaco et bénéficient d’un régime spécial. Il n’existe pas de cas où des mineurs ont été détenus ou transférés en France pendant de longues périodes.

48.Le juge des libertés, établi par la loi n° 1343 du 27 décembre 2007, est un juge nommé par le Président de la Cour de première instance selon un système de roulement. Le juge des libertés rend les décisions sous la forme d’une ordonnance motivée qui est immédiatement exécutoire et est chargé de toutes les décisions concernant la prolongation de détention avant jugement. Étant donné la tendance à ramener le crime au délit, les recours introduits devant les tribunaux pénaux sont peu nombreux; on en compte trois au total depuis 2007.

49.M. GAMERDINGER (Monaco) dit, à propos de l’interruption de grossesse, que lorsqu’un médecin estime qu’une grossesse risque de mettre la vie de la mère ou de l’enfant en danger, il autorise l’avortement au motif qu’il existe un état de nécessité. Des discussions sont en cours entre le Gouvernement, le Parlement, les médecins et les chefs religieux en vue d’adopter une législation pertinente; dans le projet de loi en cours d’examen, l’avortement serait possible dans les cas où un médecin estime que la grossesse met la vie de la mère en danger, qu’il y a une malformation grave du fœtus ou que la grossesse résulte d’un viol et de l’inceste. Le projet de loi devrait être soumis au Parlement à la fin de 2008 ou au début de 2009.

50.M. LALLAH souhaiterait savoir plus précisément quand les détenus sont incarcérés à Monaco et quand ils sont transférés en France. Par ailleurs, il souhaiterait avoir des informations supplémentaires sur les responsabilités de l’État concernant la surveillance des prisonniers et la supervision du régime pénitentiaire, comme le prévoient les accords bilatéraux. Il demande à quelle loi sont soumis les prisonniers transférés en France en ce qui concerne la durée des peines, la remise des peines et les mesures disciplinaires. Il souhaiterait également savoir comment les conditions prescrites au paragraphe 3 de l’article 10 du Pacte sont satisfaites.

51.Mme CHANET dit qu’on a laissé sans réponse sa question concernant le droit de faire appel des condamnations à des peines criminelles ainsi que celle de savoir si des personnes ont fait, ou font, l’objet de poursuites suite à un avortement.

52.Mme MOTOC souhaiterait savoir comment un état de nécessité justifiant un avortement est déterminé: le médecin prend-il cette décision seul ou fait-il partie d’un groupe ou d’un comité? Elle se demande si ces décisions ont lieu fréquemment, étant donné que les femmes ont la possibilité de se rendre dans les États voisins pour recourir à un avortement.

53.Mme WEDGWOOD note que si la loi salique ne s’applique pas à l’accession au trône, la succession est attribuée en priorité aux hommes, un fait qui influence l’idée qu’on a sur cette question. Attirant l’attention sur les dangers de l’incarcération des mineurs dans les mêmes prisons que les adultes, elle demande si les mineurs se voient proposer la possibilité de purger leur peine dans un centre de détention pour mineurs en France.

54.M. FILLON dit que la prison de Monaco est essentiellement réservée aux personnes qui purgent des peines d’emprisonnement courtes. Les ressortissants monégasques peuvent y purger leur peine. Le système pénitentiaire français assure l’exécution des peines prononcées par les tribunaux monégasques.

55.Mme SAMPO dit qu’en application de l’accord bilatéral avec la France, les personnes condamnées à Monaco et transférées en France purgent leur peine et sont soumises au régime établi dans ces établissements, conformément aux dispositions du Code de procédure pénale français. Les mineurs pour lesquels une mesure de rééducation a été prononcée à Monaco peuvent être reçus dans les établissements français d’éducation surveillée, bien que cela ne se soit jamais produit dans les faits. Les grâces ou remises de peines des personnes condamnées à Monaco mais purgeant leur peine en France sont accordées par le Prince et notifiées au Gouvernement français qui prend alors les dispositions nécessaires pour l’exécution de ces décisions.

56.M. FILLON dit que si les condamnations pénales ne peuvent faire l’objet d’un appel, les décisions rendues par les tribunaux pénaux peuvent être réexaminées par la Cour de révision qui, à son tour, peut rendre une nouvelle décision.

57.M. GAMERDINGER (Monaco) explique qu’une fois qu’il a été établi qu’une grossesse met la santé de la mère et de l’enfant en danger et que le diagnostic est confirmé par un autre médecin, c’est le médecin qui décide de pratiquer l’avortement, sous sa propre responsabilité. Dans ces cas, aucune procédure pénale n’est engagée car il n’y a aucune raison que les personnes impliquées signalent le délit. Si c’est le cas, cependant, il revient aux tribunaux de décider si un état de nécessité a justifié les actes du médecin. Il est vrai que les femmes vivant à Monaco peuvent se rendre dans les pays voisins pour recourir à un avortement, mais il est important de créer une législation dans ce domaine, c’est là une question de principe.

La séance est levée à 17 heures 55 .

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