NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/SR.257020 octobre 2008

Original: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

Quatre-vingt-quatorzième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 2570e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le lundi 13 octobre 2008, à 15 heures

Président: M. RIVAS POSADA

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 40 DU PACTE

Cinquième rapport périodique du Danemark

La séance est ouverte à 15 heures.

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 40 DU PACTE

Cinquième rapport périodique du Danemark (CCPR/C/DNK/5; CCPR/C/DNK/Q/5 et Add.1)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation du Danemark prend place à la table du Comité.

2.M. JACOBSEN (Danemark), présentant le cinquième rapport périodique du Danemark (CCPR/C/DNK/5), dit que la politique internationale du Danemark en matière de droits de l’homme se concentre sur les cinq domaines suivants: le contrôle de la conformité avec les normes internationales en matière de droits de l’homme, la lutte contre la torture, la promotion de la liberté d’expression et le soutien des droits des peuples autochtones; l’engagement de mesures contre la violation des droits de l’homme, le cas échéant; le renforcement de la démocratie et des infrastructures démocratiques, ainsi que le respect des droits de l’homme dans le cadre des activités de coopération et de développement; enfin, l’amélioration de la coopération avec la société civile. À cet égard, il note que le Rapporteur spécial sur la question de la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants s’est rendu en visite au Danemark en mai 2008 et que le Rapporteur spécial sur le droit à l’éducation va se rendre au Groenland dans le courant de l’année. Le Comité européen pour la prévention de la torture s’est également rendu au Danemark en février 2008, visite dont le rapport a été rendu public.

3.Il souhaite informer le Comité de deux modifications intervenues après la soumission du cinquième rapport périodique. D’abord, en mai 2008, la Commission mixte dano-groenlandaise sur l’autonomie administrative a soumis un projet de loi sur l’autonomie du Groenland, qui a été adopté par les Parlements groenlandais et danois. L’entrée en vigueur de l’autonomie est prévue le 21 juin 2009, jour de la fête nationale du Groenland. Selon ce projet de loi, les autorités autonomes peuvent exercer leurs pouvoirs législatifs et exécutifs dans de nombreux domaines, sauf ceux concernant la Constitution, la politique extérieure et la politique de défense et de sécurité, la Cour suprême, la politique de citoyenneté et la politique monétaire et des taux de change. Les subventions accordées par le Gouvernement demeureront à leur niveau de 2007, même si le Groenland s’engage à financer, à l’avenir, d’autres projets. Les recettes provenant des ressources minérales du Groenland reviendront aux autorités autonomes. Toute décision relative à l’indépendance du Groenland serait prise par le peuple groenlandais.

4.La deuxième évolution concerne les réformes de la police et de la magistrature de juin 2006. Le Parlement danois s’est efforcé de moderniser et d’améliorer l’efficacité de la police et des tribunaux. Dans le cadre du processus de réformes, qui a débuté en janvier 2007 et se poursuivra jusqu’en 2011, le nombre de commissariats sera réduit de 54 à 12 et le nombre de tribunaux d’instance de 82 à 24. Les procès se tiendront, pour l’essentiel, dans des tribunaux de première instance, et même les affaires pénales les plus graves se tiendront en présence d’un jury.

5.Le PRÉSIDENT invite la délégation à examiner la liste des points à traiter. (CCPR/C/DNK/Q/5)

6.M. EGHOLM (Danemark), à propos de la question 1 figurant dans la liste des points à traiter, dit que la Commission parlementaire ad hoc chargée de préparer le projet de Constitution des îles Féroé a été mise en place en mai 2007, comme le stipulent les réponses écrites (CCPR/DNK/Q/5/Add.1). Le mandat de la Commission a pris fin en même temps que la session du Parlement féroïen en juillet 2007. Un nouveau Gouvernement a été formé en février 2008 qui a promis d’organiser un référendum sur la question en 2010. Depuis l’élaboration des réponses écrites, un autre Gouvernement a été formé en septembre 2008, qui a fait part de ses intentions de poursuivre les travaux de la Commission ad hoc mais n’a évoqué aucun référendum.

7.M. HERTZ (Danemark), s’agissant de la question 2 figurant dans la liste des points à traiter, dit que la décision du Gouvernement de ne pas inscrire le Pacte dans la législation danoise n’a aucun rapport avec d’éventuels obstacles légaux. Comme l’indiquent les réponses écrites, le Gouvernement danois a estimé que l’inscription du Pacte était inutile. Le Pacte constitue en fait une source pertinente de la loi d’ores et déjà appliquée par les tribunaux danois, entre autres.

8.S’agissant de la question 3, il dit que le retrait des réserves formulées par le Danemark sur le Pacte n’est actuellement pas au centre des débats.

9.S’agissant de la question 4, il décrit la composition du Comité établie aux fins de l’examen et de l’évaluation du système de gestion actuel des plaintes déposées contre la police.

10.MmeNIEGEL (Danemark), répondant à la question 5 figurant dans la liste des points à traiter, a donné un aperçu des droits dont jouissent les femmes dans la sphère publique, lesquels ont été énoncés dans les réponses écrites. La proportion des femmes dans la politique locale est restée inchangée à 27 % depuis 2001; on espère que ce chiffre augmentera après les élections de 2009. Une campagne de sensibilisation est actuellement menée par le Ministre pour l’égalité des sexes dans le but de souligner le faible nombre de femmes impliquées dans la vie politique. Comme l’indiquent les chiffres figurant dans les réponses écrites, le nombre de femmes occupant des postes de cadre dans le secteur privé est faible, et seulement légèrement supérieur dans le secteur public. En mars 2008, une Charte pour l’augmentation du nombre de femmes occupant des postes de cadre a été mise en place, ce qui a obligé les sociétés à fixer des objectifs pour augmenter le nombre de femmes occupant des postes de cadre. Alors que l’objectif initial est de faire signer la Charte à 100 sociétés d’ici à 2010, le nombre de signataires est d’ores et déjà de 75.

11.M. EGHOLM (Danemark) ajoute que des efforts ont été entrepris par le Gouvernement féroïen pour améliorer la participation des femmes à la vie publique, y compris la création d’une Commission indépendante, Demokratia, qui vise à encourager les femmes à participer davantage à la vie politique. Parmi les nombreuses initiatives prises par Demokratia figure l’importante campagne de sensibilisation qu’elle a menée de 2005 à 2008 et qui s’est traduite par une augmentation considérable de la proportion de femmes au Parlement féroïen. Les femmes qui occupent actuellement des postes de ministre dans le Gouvernement féroïen sont au nombre de trois. Des programmes sont également mis en place pour résoudre le problème de la sous-représentation des femmes aux postes de cadre dans le secteur privé.

12.M. FÆRKEL (Danemark), s’agissant de la question 6 figurant dans la liste des points à traiter, dit que, à la suite de l’adoption de la Loi sur la Commission relative au traitement équitable de mai 2008, ladite Commission sera opérationnelle en janvier 2009. La Commission examinera les problèmes de discrimination dans tous les domaines traités par la législation antidiscriminatoire danoise.

13.M. PEROTTI (Danemark), s’agissant de la question 7 figurant dans la liste des points à traiter, dit que les communautés religieuses autres que l’Église nationale continuent de recevoir des subventions de l’État. Il note que les décisions rendues dans les affaires évoquées dans les réponses écrites stipulent qu’il n’existe aucun lien direct entre les impôts courants et les subventions versées par l’État à l’Église nationale et que cette dernière administre le registre des naissances comme le ferait une administration de l’État dans le domaine du droit public, c’est-à-dire en faisant en sorte que l’enregistrement revête un caractère non religieux.

14.M. HERTZ (Danemark), s’agissant de la question 8 figurant dans la liste des points à traiter, dit qu’une section spéciale sur la torture a été incorporée au Code pénal en juillet 2008. La nouvelle section renferme une définition de la torture, qui sera désormais considérée comme une circonstance aggravante dans le cas d’infractions telles que les homicides, les agressions et les viols.

15.MmeHAUBERG (Danemark), s’agissant de la question 9 figurant dans la liste des points à traiter, fait remarquer que le refoulement est interdit aux termes de la Loi danoise sur les étrangers, qui a fait l’objet d’un débat dans les réponses écrites. L’engagement du Danemark à respecter les dispositions du Pacte, y compris l’article 7, est confirmé par les observations figurant dans la section 7 (2) de ladite Loi.

16.MmeNIEGEL (Danemark), évoquant la question 10, attire l’attention sur les mesures engagées par le Gouvernement pour combattre la violence à l’égard des femmes, lesquelles sont détaillées dans les réponses écrites. À la suite du premier plan d’action (2002-2004), le nombre de femmes victimes de violences domestiques a chuté d’environ un tiers. Un deuxième plan d’action a été lancé en 2005. Ses activités sont contrôlées par un groupe de travail interministériel. Le Gouvernement compte mettre en place un nouveau plan d’action sur quatre ans en 2009.

17.MmeTHOMSEN (Danemark), évoquant la même question, dit que la police du Groenland, à quelques exceptions, observe les principes dont les grandes lignes figurent dans les instructions officielles concernant l’enquête et les poursuites dans les affaires de violence familiale. Les refuges et les centres d’accueil à l’intention des femmes et des enfants ont été conjointement financés par le Gouvernement autonome et les municipalités du Groenland. Dans le cadre des réformes prévues, les 18 municipalités seront remplacées par 4 régions, une initiative qui devrait permettre d’améliorer l’accès aux refuges. Elle souligne l’importance que revêt la campagne d’information mise en place par le Gouvernement autonome du Groenland sur les violences familiales ainsi que la stratégie qu’il prévoit de mettre en place pour lutter contre les violences, les viols et les abus sexuels.

18.M. FÆRKEL (Danemark), répondant à la question 11 figurant dans la liste des points à traiter, attire l’attention sur les réponses écrites concernant les prétendus vols de la CIA dans l’espace aérien danois et groenlandais et dit que, malheureusement, le rapport de la force opérationnelle qui a été établi pour examiner toutes les informations existantes sur la question ne doit pas être publié avant le 23 octobre 2008. Il n’est pas en mesure de discuter du fond du rapport.

19.Aucune décision n’a été prise pour s’appuyer sur des garanties diplomatiques lors du transfert de ressortissants étrangers vers d’autres pays. Le groupe de travail récemment établi sur l’expulsion administrative de ressortissants étrangers dispose d’un vaste mandat, incluant notamment l’examen de garanties diplomatiques. Toute mesure engagée à cet égard sera en parfaite conformité avec les obligations internationales du Danemark, notamment celles prévues aux termes de l’article 7 du Pacte.

20.M. HERTZ (Danemark), évoquant les questions 12 à 17, dit que les cas de mauvais traitements et de sévices infligés à des détenus sont rares. Les cas de décès durant la détention provisoire font l’objet d’un double examen; une indemnisation est accordée si nécessaire. Il attire l’attention sur les informations qui ont été fournies dans les réponses écrites relatives aux procédures se rapportant à des violations du Code pénal ou du règlement de la prison par le personnel pénitentiaire et sur les sanctions disciplinaires qu’encourt ce dernier.

21.Des modifications ont été apportées à la Loi sur l’administration de la justice limitant la durée maximale pendant laquelle une personne peut être détenue en qualité d’accusée ou au titre de la détention provisoire, et prévoyant une durée de détention limitée pour les mineurs. Aux termes de la loi danoise, une personne ne peut être détenue sans preuve et doit donc être relâchée ou présentée à un juge dans les 24 heures. Si l’intéressé est placé en détention, le juge doit décerner une ordonnance motivée dans les trois jours.

22.Il n’est pas question pour l’instant de limiter la durée de l’isolement cellulaire imposé aux détenus en vertu des chapitres 12 et 13 du Code pénal. L’isolement cellulaire est imposé afin de prémunir l’enquête contre toute influence, notamment dans les affaires de crimes graves. Les détenus, dans ce cas, jouissent d’un certain nombre de droits compensatoires. Dans ces circonstances, des dispositions particulières sont prises à l’intention des mineurs. En outre, il n’est pas question pour l’instant d’introduire d’autres examens de décision visant à imposer l’isolement cellulaire aux détenus. Les travaux préparatoires relatifs à la Loi sur l’application des peines indiquent que, aux termes de cette Loi, une décision visant à imposer l’isolement cellulaire ne peut faire l’objet d’un examen judiciaire immédiat.

23.S’agissant de la question 16, il explique que, bien qu’un jeune délinquant purge actuellement sa peine dans centre de détention ouvert pour adultes afin d’éviter les inconvénients que présentent les centres de rééducation pour jeunes délinquants, un centre de détention ouvert spécial prévu pour accueillir cinq adolescents âgés de 15 à 17 ans ouvrira ses portes en 2009. Le centre proposera un large choix d’aides socio-éducatives.

24.Le terme «bracelet électronique» mentionné au paragraphe 278 du rapport constitue un terme familier qui désigne un accord par lequel les délinquants peuvent porter un dispositif électronique de surveillance et purger leurs peines chez eux. Depuis juillet 2008, toutes les personnes condamnées à des peines de trois mois de prison au maximum peuvent demander à participer au programme.

25.Des statistiques sur les violences entre détenus indiquent que 199 détenus ont été l’objet de violences et de menaces de la part de compagnons de cellule en 2007. Le Service des prisons et de la probation s’efforce de garantir aux détenus des conditions de sécurité qui soient, dans la mesure du possible, le reflet de la vie quotidienne à l’extérieur de la prison. Ces conditions sont garanties par un dispositif de sécurité dynamique et par un contact étroit et permanent avec les détenus. Des services spéciaux ont également été mis en place à l’intention des détenus particulièrement vulnérables ou violents.

26.M. O’FLAHERTY, Rapporteur de pays, félicite l’État partie pour son rapport instructif et qui n’hésite pas à faire son autocritique. Il demande s’il aurait été possible de faire davantage pour promouvoir les intérêts des organisations non gouvernementales (ONG) dans le cadre des travaux du Comité et sollicite de plus amples informations sur l’application du Pacte au Groenland et dans les îles Féroé ainsi que sur la culture relative à la société civile et aux droits de l’homme sur ces territoires. Il demande comment l’État partie fait en sorte que la question des droits de l’homme soit au cœur du débat sur l’autonomie et qu’il fasse l’objet d’une garantie aux termes de tout nouvel accord conclu sur ce territoire.

27.Il observe que le retrait des réserves concernant le Pacte renforcera l’architecture des droits de l’homme dans le pays. Il invite donc l’État partie à se demander dans quelle mesure il compte poursuivre l’examen actuel de ses réserves en vue de fournir une réponse à la question 3 figurant dans la liste des points à traiter. S’agissant de la question 16, il souhaiterait savoir quel est l’âge du jeune délinquant détenu dans centre de détention ouvert pour adultes et demande de plus amples informations sur la logique de sa présence dans cette prison. Il demande également confirmation qu’aucun enfant ne sera placé en détention avec des adultes quand le centre de détention pour jeunes délinquants aura ouvert ses portes. Il se demande si les jeunes délinquants du Groenland ou des îles Féroé seront transférés dans ce service à l’avenir, dans la mesure où cela soulèverait certaines questions aux termes de l’article 24 du Pacte.

28.Bien que l’État partie ait résolument soutenu l’Église établie, il invite la délégation à examiner les éventuelles questions soulevées aux termes de l’article 18 du Pacte. Il suggère que certaines fonctions actuellement assumées par l’Église et citées comme justifiant l’appui de l’État, tel que le registre des naissances, des inhumations et l’entretien des locaux puissent être transférés vers d’autres bureaux.

29.Il aimerait savoir si l’article 18 a été invoqué dans les affaires Koza et Toft, mentionnées dans les réponses écrites de l’État partie à la question 7, puisque cela indiquerait dans quelle mesure la non-inscription du Pacte dans la législation danoise fait obstacle à son application.

30.MmeCHANET observe que, selon une récente étude sur le bonheur, dont la protection des droits de l’homme constitue l’un des paramètres, le peuple danois est le plus heureux d’Europe. Le Comité sera donc d’autant plus exigeant en ce qui concerne les efforts déployés par l’État partie pour faire en sorte que tous les citoyens de ce dernier jouissent des droits de l’homme.

31.Elle observe que, bien que le Comité sur l’incorporation des Conventions relatives aux droits de l’homme dans la législation danoise ait recommandé que le Pacte soit inscrit dans la législation locale, l’État partie a déclaré que des obstacles et des inconvénients politiques l’en empêchaient. Toutefois, il ne suffit pas d’invoquer le Pacte devant les tribunaux, puisque cela ne permet pas de conférer à ce dernier la priorité sur la législation locale. Elle souhaite donc que la délégation explique quels sont ces obstacles et ces inconvénients.

32.La délégation doit également fournir des informations sur la façon dont les personnes en état d’arrestation se voient notifier leurs droits, notamment si celles-ci ont accès à un avocat ou à un médecin et s’il leur est donné la possibilité de contacter leur famille dans les 24 heures. Elle se félicite de l’entrée en vigueur de la Loi danoise sur l’administration de la justice, qui fixe des limites à la durée de la détention provisoire. Elle demande quelle est la durée maximale de détention provisoire. Bien qu’elle se réjouisse à l’idée que l’on puisse utiliser un dispositif électronique en lieu et place d’une période de détention provisoire de trois mois, elle se demande si l’application de ce dispositif sur le terrain est réalisable.

33.S’agissant de la question de l’isolement cellulaire, elle aimerait savoir si le fait d’exclure toute association avec d’autres détenus constitue l’unique aspect qui distingue les détenus placés en isolement cellulaire de ceux placés en cellule ordinaire. Elle demande une explication sur les raisons pour lesquelles on a recours à l’isolement cellulaire par mesure de sécurité dans certains cas, alors que dans d’autres, celui-ci est utilisé comme une sanction. Il est difficile d’imaginer ce qui justifie d’imposer indéfiniment l’isolement cellulaire aux prisonniers; étant donné que la situation d’un détenu n’est pas stable, une durée limitée doit être établie. La décision de mettre un détenu en isolement cellulaire ne doit pas être laissée à la discrétion exclusive des autorités pénitentiaires. On peut se demander si la pratique qui consiste à exclure les juges des décisions pénitentiaires est compatible avec les obligations du Danemark aux termes du droit international. En effet, on a actuellement tendance à augmenter l’implication judiciaire extérieure de façon à garantir un suivi de l’application des peines et de tenir compte de la possibilité de contester les peines ou même des mesures très restrictives.

34.MmePALM demande à quelle date sera rendu le rapport de la commission, qui a été établi pour examiner et évaluer le système actuel de gestion des plaintes déposées contre la police. Elle souhaite savoir selon quelles procédures et quel calendrier cette commission entend mettre en œuvre les réformes qu’elle pourrait proposer. Elle demande si le Gouvernement prévoit dans l’immédiat d’examiner les questions relatives au temps que prend le dépôt de plainte contre la police et l’absence de confiance du grand public dans le système actuel. Elle souhaiterait obtenir de plus amples explications quant aux critiques formulées à propos de certaines décisions rendues dans des affaires concernant le comportement de la police en 2005.

35.En dépit des efforts louables du Gouvernement visant à l’élimination de la violence à l’égard des femmes par l’adoption de deux plans d’action, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour examiner les 28 000 cas de violence signalés chaque année au Danemark. Elle souhaiterait pouvoir obtenir de plus amples informations sur le type d’assistance dispensé aux femmes qui signalent des actes de violence à la police. Elle se demande si les policiers se sont vu dispenser une formation spéciale dans la gestion de ces affaires et si des procédures particulières ont été mises en place pour ce faire. Elle aimerait savoir si la disposition relative aux refuges pour les femmes battues relève de la responsabilité de l’État, des municipalités ou des ONG, et quelles ressources sont allouées à ces refuges. Elle demande quelle action a été engagée pour aider les femmes immigrées qui ont été victimes de mauvais traitements, étant donné que les violences commises envers les femmes immigrées ne sont que rarement signalées, en raison de la dépendance économique de ces femmes et de leur crainte d’être expulsées.

36.MmeMOTOC demande quelles mesures le Gouvernement met en place pour concilier le rôle traditionnel attribué aux femmes autochtones dans les îles Féroé, notamment concernant leur participation à la vie publique, avec les droits des femmes. Un des moyens qui permettrait de prévenir la discrimination contre les femmes dans le secteur privé et de garantir un plus haut niveau d’occupation de postes de cadres supérieurs par les femmes dans le secteur privé consisterait à mettre en place des partenariats publics/privés pour une meilleure prise de conscience des droits des femmes.

37.Elle demande des informations complémentaires sur les cas de mauvais traitements dans les prisons danoises, notamment les îles Féroé. D’une manière générale, elle aimerait savoir quelle place occupent les droits de l’homme, notamment le Pacte, dans la société civile danoise.

38.M. IWASAWA se félicite de l’engagement ferme du Gouvernement à combattre la torture. Toutefois, la délégation doit fournir au Comité le texte des sections 31 et 32 de la Loi sur les étrangers. Il demande si, dans les sections susmentionnées de la Loi, figure le principe du non-refoulement et si elles garantissent qu’une personne ne sera pas renvoyée dans son pays si elle risque d’être victime d’actes de torture, en violation de l’article 7 du Pacte. Il aimerait également savoir si la règle du non-refoulement est observée dans le cas de personnes qui risquent d’être l’objet de torture ou de traitements inhumains, même si elles ne se sont pas vues accorder l’asile aux termes de la Convention relative au Statut de réfugié. Enfin, il souhaite savoir si le mémorandum explicatif de la section 7 (2) de la Loi sur les étrangers stipule plus particulièrement que le Danemark a l’obligation de respecter l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ainsi que l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

39.Il demande à la délégation de commenter les plus de 100 affaires présumées de violations de l’espace aérien danois et les 45 survols des aéroports danois à des fins de reddition. Il s’efforce également de glaner des informations complémentaires sur la conformité avec l’article 7 du Pacte du Danemark faisant état de son intention de s’appuyer sur des garanties diplomatiques lors du retour de terroristes présumés dans des pays où la torture serait pratiquée. Peut-être la délégation pourrait-elle dire comment le Gouvernement danois entend vérifier les garanties diplomatiques fournies par les pays de destination.

40.Il serait utile de savoir dans quelle mesure le Pacte a été inscrit dans la législation nationale. Le fait que le Danemark dispose d’un système dualiste aux termes duquel les accords internationaux ne sont pas automatiquement incorporés dans la loi nationale ne semble pas coïncider avec le fait que les instruments juridiques internationaux, notamment les conventions, sont considérées comme une source pertinente de la loi, et que les dispositions relatives aux conventions des droits de l’homme sont applicables devant les tribunaux danois Il aimerait connaître le nombre d’affaires dans lesquelles les tribunaux danois ont estimé que le Pacte a été violé et si ce dernier est cité moins souvent du fait qu’il n’est pas inscrit dans la législation locale.

41.M. AMOR aimerait connaître l’appartenance religieuse des 17 % de la population danoise qui n’appartient pas à l’Église établie du Danemark. Il souhaiterait obtenir des éclaircissements sur cette dernière, ainsi que sur les privilèges accordés à ses membres. Il se demande quels types de documents d’identité font état de l’appartenance religieuse du titulaire. Il se dit inquiet des sources potentielles de discrimination à l’encontre des personnes n’appartenant pas à l’Église établie. Il demande s’il existe un intégrisme religieux au Danemark et, dans l’affirmative, quelle peut en être l’origine. La délégation doit également expliquer comment le Gouvernement interprète l’article 19, paragraphe 3 et l’article 20, paragraphe 2 du Pacte.

42.M. PÉREZ SÁNCHEZ-CERRO dit que l’expulsion des personnes soupçonnées de représenter une menace pour la sécurité du Danemark vers des pays où ils pourraient être l’objet de torture viole l’article 7 du Pacte et le principe du non-refoulement. La délégation doit émettre des observations sur la nécessité de renforcer la protection de ces personnes. Il demande pour quelle raison le Danemark n’a pas employé les moyens judiciaires locaux afin de poursuivre les individus en question, au lieu de les déporter sans garantie de protection. Il aimerait savoir quelles mesures le Danemark entend mettre en place pour conformer sa législation nationale avec les directives européennes qui seront adoptées prochainement et qui limiteront la détention des immigrés illégaux à 180 jours.

43.M. LALLAH demande des informations sur l’approche que le Danemark a adoptée par rapport à la lutte combat contre le terrorisme et du type de législation et de mesures pratiques qui ont été adoptées pour mettre en œuvre la résolution 1373 du Conseil de sécurité (2001). La délégation doit préciser combien de personnes ont été détenues le cas échéant pour terrorisme présumé, combien de temps elles ont été détenues et si l’une d’elle a été poursuivie. Une lettre adressée par le Représentant permanent du Danemark aux Nations Unies au Comité antiterroriste du Conseil de sécurité en 2004 stipule qu’un citoyen danois a été placé en détention provisoire par l’armée des États-Unis en Afghanistan en 2001 ou en 2002. Il aimerait savoir comment le Danemark a assuré le suivi de cet arrêt, ce qui est advenu de la personne en question et si le Gouvernement danois a pris des mesures pour s’assurer de son intégrité physique, comme le prévoit le Pacte.

44.M. SHEARER dit que le Danemark a fait part de ses réserves à un moment mal choisi, peut-être à cause de scrupules excessifs. À titre d’exemple, il n’est pas nécessaire de maintenir les réserves concernant l’article 14, paragraphe 7 du Pacte. Le Gouvernement doit envisager de lever ses réserves, ou à défaut, en expliquer les raisons.

45.Sir Nigel RODLEY s’est enquis de l’incorporation du crime de torture dans la législation danoise. Contrairement au Comité contre la torture, le Comité des droits de l’homme ne pense pas qu’il soit nécessaire de promulguer une loi interdisant spécifiquement les actes de torture afin de mettre un État en conformité avec son traité correspondant. Toutefois, le Comité a estimé que l’affirmation des États selon laquelle leur législation actuelle traite de la question de la torture ne résiste pas vraiment à l’examen. Plus précisément, il est assez difficile d’identifier les dispositions de la législation nationale qui interdisent la torture psychologique contrairement à la torture physique, par exemple, la détention au secret prolongée, les menaces ou encore les intimidations. La délégation doit informer le Comité de l’existence éventuelle de toute faille dans la législation danoise qui serait de nature à favoriser la torture psychologique et, à défaut de telles failles, s’il existe des moyens de contourner la loi sur le terrain.

La séance est suspendue à 17 heures 15; elle reprend à 17 heures 35.

46.M. FÆRKEL (Danemark) dit que, en règle générale, lorsque le Gouvernement danois soumet des rapports aux organes conventionnels, les organisations de la société civile soumettent également deux ou trois rapports alternatifs. Sa délégation a donc été quelque peu surprise de constater que le Comité ne s’est pas vu remettre le cinquième rapport périodique du Danemark. Cela peut s’expliquer, du moins en partie, par le fait que le champ d’application de la plupart des Conventions couvertes par les organes de traité est beaucoup plus concentré que celui du Pacte. Le mandat de la plupart des ONG a trait à des droits très spécifiques. Bien que l’Institut danois des droits de l’homme eût pu soumettre un rapport, le Gouvernement ne le lui a pas demandé. Néanmoins, les ONG ont accordé une attention toute particulière à la mise en œuvre du Pacte: elles ont souvent évoqué ses dispositions et se sont référées très largement aux conclusions du Comité chaque fois qu’une question pertinente a été soulevée.

47.M. JACOBSEN (Danemark) ajoute que les ONG danoises de défense des droits de l’homme ont tendance à accorder une plus grande attention aux instruments européens y afférents et aux affaires traitées par la Cour européenne des droits de l’homme, dans la mesure où elles semblent davantage se rapporter aux situations qui se présentent au Danemark.

48.M. EGHOLM (Danemark) note le que Parlement des îles Féroé a ratifié pratiquement tous les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels le Danemark a accédé. Il est donc très probable que si les îles Féroé obtiennent leur indépendance, le nouvel État respectera les engagements pris par le Danemark en matière de droits de l’homme. Il est en outre un certain nombre d’ONG actives aux îles Féroé.

49.MmeTHOMSEN (Danemark) dit que la principale ONG du Groenland est affiliée à la Conférence circumpolaire inuit et défend activement les droits des Inuits, ethnie majoritaire au Groenland, en les représentant sur les plans national et international, très récemment au Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones du Conseil des droits de l’homme. Amnesty International est également active au Groenland. La société civile s’est montrée très intéressée par la défense des droits des peuples autochtones au niveau international grâce à des mécanismes tels que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, adoptée en 2007. Bien des célébrations internationales des Nations Unies ont été organisées au Groenland et tous les traités majeurs sur les droits de l’homme ont été traduits en groenlandais.

50.M. JACOBSEN (Danemark), répondant aux questions soulevées à propos des réserves émises par le Danemark concernant le Pacte, dit que la levée de ces réserves ne fait actuellement l’objet d’aucun examen officiel.

51.M. HERTZ (Danemark) dit que, sachant que le Comité est d’avis que les réserves du Danemark soient retirées immédiatement, la délégation conseille au Gouvernement d’examiner ces réserves et d’envisager leur reformulation, au cas où elles seraient maintenues.

52.Les délinquants juvéniles sont par définition âgés de 15 à 17 ans inclus et sont généralement transférés dans des institutions d’aide sociale. Seuls les éléments qui sont trop violents ou trop dangereux sont détenus dans les prisons. Ils y sont transférés pour purger leurs peines sur injonction du tribunal. Bien qu’ils soient détenus dans les mêmes services que les prisonniers adultes, ils ne couchent pas dans les mêmes cellules et ne sont réunis que pendant la journée. Il existe actuellement moins de 20 jeunes dans les prisons sur l’ensemble du territoire. Le fait qu’il y en ait si peu rend irréalisable la création d’un service spécial pour les jeunes, dans la mesure où cela reviendrait à les réunir dans un seul établissement, ce qui veut dire qu’ils seraient loin de leur famille. On prévoit de créer des services spécialement conçus pour les jeunes vers le milieu de l’année 2009. Toutefois, dans la mesure où ces services ne pourraient accueillir que cinq détenus, il est possible que dans certaines conditions, les jeunes puissent être encore détenus dans les mêmes centres de détentions que les adultes.

53.M. JACOBSEN (Danemark) dit que, pour des raisons historiques, l’Église nationale danoise n’a pas de fonction particulière au Danemark et que, afin de faciliter l’enregistrement des naissances, l’État a délégué ce pouvoir à l’Église nationale. L’enregistrement peut être réalisé dans des locaux de l’Église nationale, par courriel ou par la poste. Les subventions publiques accordées à l’Église pour l’entretien de ses locaux sont plus faibles que le coût réel de l’entretien et sont aussi proportionnellement inférieures aux subventions indirectes accordées par l’État aux autres communautés religieuses du Danemark.

54.M. HERTZ (Danemark) dit que les détenus sont autorisés à accéder à un avocat dans les 24 heures suivant leur arrestation. Dans de rares cas, ce délai a été dépassé, par exemple lorsqu’il y avait un grand nombre de détenus mais pas suffisamment d’avocats disponibles. Dans tous les cas, les détenus sont toujours autorisés à voir un avocat avant d’être auditionnés par un juge. Le droit d’un détenu à voir un médecin dépend d’une évaluation menée par le personnel dans les locaux de la police où la personne est détenue.

55.L’information la plus récente relative à la durée de la détention provisoire date de 2006: à cette époque, la détention provisoire la plus longue a duré près de deux ans. Toutefois, cette période a été calculée selon des méthodes dépassées qui tenaient compte de la période de «détention en dehors de tout jugement» au lieu de la «détention provisoire», sachant que la durée du procès est comprise. L’affaire, qui s’est révélée particulièrement complexe, concernait 28 défendeurs accusés de trafic de drogue et a donné lieu à un procès anormalement long.

56.Le Danemark dispose des ressources nécessaires pour une application des peines reposant sur l’usage d’un dispositif électronique de surveillance, connu sous le nom de «bracelet électronique». L’utilisation de cette technologie, quoiqu’assez coûteuse, l’est tout de même moins que l’incarcération. Toutefois, tous les détenus ne peuvent bénéficier d’une libération conditionnée au port du bracelet électronique. D’aucuns sont habilités à en bénéficier mais préfèrent purger leur peine en prison. On a parfois recours à l’isolement cellulaire pour des raisons de sécurité, lorsque, par exemple, la sécurité d’un détenu ou de quiconque est menacée. Mais aussi à titre de mesure disciplinaire. Dans ce dernier cas, le détenu se voit offrir la possibilité de faire appel de la décision devant un médiateur parlementaire ou un juge. Si la mesure est disciplinaire, le détenu peut faire appel de cette décision, auquel cas les autorités pénitentiaires sont tenues de renvoyer l’affaire devant le tribunal.

La séance est levée à 18 heures.

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