Nations Unies

CCPR/C/SR.2747

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

21 octobre 2010

Original: français

Comité des droits de l’homme

Centième session

Compte rendu analytique de la 2747 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 13 octobre 2010, à 10 heures

Président:M. Iwasawa

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Sixième rapport périodique de la Pologne (suite)

La séance est ouverte à 10 heures.

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Sixième rapport périodique de la Pologne (suite) (CCPR/C/POL/6; CCPR/C/POL/Q/6; CCPR/C/POL/Q/6/Add.1)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation polonaise reprend place à la table du Comité.

2.Le Président invite la délégation polonaise à poursuivre ses réponses aux questions posées oralement par les membres du Comité à la séance précédente.

3.M. Górszczyk (Pologne),répondant à une question relative à la définition du terrorisme en droit interne, dit que la Pologne n’a adopté aucune loi de portée générale contenant une définition du terrorisme. Toutefois, pour donner suite à la décision-cadre du Conseil de l’Europe relative à la lutte contre le terrorisme (2002/475/JAI), l’article 115 du Code pénal a été modifié en 2004, de façon à introduire une définition du terrorisme. La répression des actes terroristes se fait sur la base des dispositions générales du Code pénal. La loi du 25 juin 2009, portant modification de la loi du 16 novembre 2000 sur la prévention de l’entrée sur les marchés financiers de ressources matérielles de provenance illégale ou anonyme et la prévention du financement du terrorisme, a introduit dans le Code pénal un nouvel article qui incrimine le financement d’activités terroristes. Il n’y a donc pas de législation spécifiquement consacrée au terrorisme, mais plusieurs dispositions visent différents aspects du phénomène.

4.M me  Glowacka-Mazur (Pologne) dit qu’en règle générale, tout suspect a accès à son dossier mais que dans l’intérêt de la sécurité de l’État − qui est en jeu en cas de terrorisme − celui-ci peut être restreint.

5.M me  Osiecka (Pologne),répondant à la question de savoir si lamotivation raciste est une circonstance aggravante d’une infraction, dit que conformément au Code pénal polonais, le tribunal doit tenir compte du caractère raciste d’une infraction quand il fixe la peine. L’achat, la conservation, la possession, l’échange et la diffusion d’éléments ou de contenus racistes ou faisant l’apologie du fascisme, de même que l’incitation à la haine raciale, sont passibles de sanctions pénales.

6.M. Ozga (Pologne) dit qu’un comité composé de représentants de divers organismes publics et d’organisations non gouvernementales, et une équipe spéciale composée de représentants du Ministère de l’intérieur et de l’administration, sont chargés d’évaluer les résultats de la mise en œuvre du programme national de prévention de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée.

7.M me  Glowacka-Mazur (Pologne), répondant aux questions relatives à la situation des Roms, dit que l’on dénombre 13 000 citoyens polonais d’origine rom, ce qui représente 0,03 % de la population. Il n’existe pas de données sur les Roms qui n’ont pas la nationalité polonaise car la loi ne permet pas de recueillir des statistiques ventilées par origine ethnique. Au plan national, le Gouvernement a lancé un programme complet en faveur de cette communauté, dont l’un des modules, intitulé «Éducation», vise à promouvoir la scolarisation des enfants roms. De plus des projets pilotes à l’intention des Roms sont mis en œuvre dans les voïvodies du sud du pays. Ou espère que ces mesures permettront de faire évoluer le regard que la population porte sur la communauté rom en général. De plus amples informations sur les programmes du Gouvernement en faveur des Roms sont publiées sur le site Web du Ministère de l’intérieur et de l’administration. En ce qui concerne la profanation de cimetières de minorités nationales, des mesures de prévention ont été prises pour que ces endroits soient surveillés de près; une liste des endroits particulièrement exposés a été établie. Les patrouilles sont plus fréquentes, et la police coopère avec les gardiens.

8.M me  Kozlowska (Pologne),dit que la vente ou l’achat d’enfants ne relèvent pas de la nouvelle législation relative à la traite des êtres humains, entrée en vigueur en 2009, car elle ne vise pas l’exploitation des intéressés. Ces pratiques sont réprimées sur le fondement des dispositions du Code pénal relatives à l’adoption illégale.

9.M me  Maciejewska (Pologne),répondant à une question concernant le programme d’intégration des réfugiés, dit que conformément à la loi sur la sécurité sociale, l’octroi d’une aide à l’intégration des réfugiés est obligatoire. Les réfugiés qui bénéficient des programmes d’intégration sont pour la plupart d’entre eux originaires de Tchétchénie, du Bélarus, de Somalie, d’Iraq, de Sri Lanka et d’Afghanistan. En 2008, sur les 267 réfugiés qui ont bénéficié d’une aide à l’intégration, 71 étaient des femmes et sur les 1 492 étrangers pouvant obtenir la protection subsidiaire, 346 étaient des femmes. Certains programmes d’intégration bénéficient aux familles dans leur ensemble, mais les statistiques ne rendent pas compte de la composition de celles-ci. Vu que l’aide à l’intégration est obligatoire, il n’y a pas de cas de discrimination fondée sur le sexe. Les mineurs non accompagnés, bénéficient d’une protection au titre de la loi sur la sécurité sociale, indépendamment du caractère régulier ou non de leur présence sur le territoire polonais. Le mineur isolé est orienté vers une institution éducative ou une famille d’accueil. Un tuteur est désigné pour le représenter dans toutes les procédures, judiciaires et administratives, y compris les procédures relatives à la régularisation de son séjour. Les mineurs non accompagnés ont également droit à une aide à l’intégration, comme toute personne qui se voit accorder le statut de réfugié ou la protection subsidiaire. Tous les mineurs isolés placés dans des institutions éducatives bénéficient automatiquement d’une aide individuelle, avant même qu’il ne soit statué sur leur situation.

10.Concernant la lutte contre les attitudes hostiles à l’égard des étrangers, il convient de souligner que l’Office des étrangers, en partenariat avec des organisations de la société civile, mène des actions de sensibilisation visant à préparer les communautés locales à accueillir des migrants. Des réunions d’information ou des ateliers sont organisés à l’intention des autorités locales, des bureaux pour l’emploi ou des services d’aide sociale. Les enseignants sont également préparés à accueillir des enfants de migrants dans leurs classes.

11.L’âge légal du départ à la retraite reste différent pour les hommes et les femmes. Par une décision en date du 15 juillet 2010, la Cour constitutionnelle a estimé que cette différence ne portait pas atteinte aux dispositions constitutionnelles relatives au principe d’égalité. Le montant de la retraite est calculé sur la base des cotisations versées pendant l’ensemble de la carrière professionnelle et sur une estimation des années de vie restantes; or cette estimation est la même pour les deux sexes, bien que l’espérance de vie des femmes soit supérieure. Il résulte de cette méthode de calcul que les hommes et les femmes dont les revenus et les périodes de cotisation sont identiques percevront une retraite du même montant.

12.En ce qui concerne la ratification de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, il convient de signaler qu’une liste des modifications à apporter à la législation polonaise a d’ores et déjà été établie et qu’un projet de loi en vue de la ratification de cet instrument sera déposé au Parlement début 2011.

13.M. Krych (Pologne),dit que les demandeurs d’asile sont déboutés lorsqu’ils ne satisfont pas aux conditions énoncées à l’article premier de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés. Quand bien même ces conditions seraient respectées, tout demandeur d’asile reconnu coupable de crimes internationaux tels que les crimes de guerre, les crimes contre la paix ou les crimes contre l’humanité serait débouté. En cas de rejet de l’asile d’autres formes de protection sont possibles. Si celles-ci ne lui sont pas accordées, il est expulsé. Quatre centres pour demandeurs d’asile ont récemment été rénovés; ils offrent désormais des cours de récréation, des infrastructures sportives et des équipements informatiques. La supervision de ces centres est assurée par des représentants du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Il faut signaler à ce propos que la Pologne a récemment reçu une aide du Fonds européen pour les réfugiés afin d’améliorer les conditions de vie dans les centres pour demandeurs d’asile. Elle a en outre signé un accord de coopération avec le bureau régional du HCR visant à détecter et à prévenir les actes de violence sexuelle commis contre des étrangers retenus dans les centres pour réfugiés. Tout demandeur d’asile peut présenter à n’importe quel stade de la procédure une demande de réunification familiale dont le coût, si elle est acceptée, est pris en charge par la Pologne.

14.M me  Ksieniewicz (Pologne) dit que la Pologne a adopté un plan d’action national en faveur de l’emploi des femmes, qui prévoit notamment des solutions leur permettant de concilier vie professionnelle et vie de famille. Le plan contient également des mesures d’aide à l’emploi pour les jeunes femmes, les mères qui souhaitent reprendre une activité professionnelle, les femmes âgées de plus de 50 ans qui vivent en milieu rural, les femmes en situation précaire et les femmes handicapées. On peut également mentionner un programme pour la période 2007-2013, visant à améliorer les conditions de vie des femmes qui vivent en milieu rural. En ce qui concerne la représentation des femmes dans la vie politique, un projet de loi sur la question est en lecture au Parlement, lequel a décidé à sa toute dernière session d’opter pour l’imposition d’un quota de 35 % de femmes sur les listes électorales. Bien que le projet de loi soit encore à l’examen, les partis politiques polonais ont d’ores et déjà décidé d’appliquer le quota.

15.M. Lewoc (Pologne) dit que la loi relative à la prévention de la violence dans la famille, entrée en vigueur le 1er août 2010, confère à la police de nouvelles compétences en matière d’arrestation des auteurs d’actes de violence familiale. Les policiers sont tenus d’arrêter les auteurs d’actes de violence dans la famille soupçonnés d’avoir utilisé des objets dangereux, tels qu’une arme à feu ou un couteau. La loi prévoit également, ce qui est nouveau, que le parquet peut, dés l’arrestation, interdire à l’auteur des faits d’avoir des contacts avec la victime en l’obligeant par exemple à quitter les lieux qu’il partage avec elle. Le parquet peut également émettre une ordonnance de restriction. La principale cause de l’arrêt des procédures relatives à des actes de violence dans la famille est l’absence d’éléments de preuve suffisants, en particulier de témoignages.

16.M me  Korbasińska (Pologne) dit que des mesures ont été prises pour faire en sorte que les femmes que la loi autorise à avorter rencontrent moins de difficultés pour obtenir une interruption de grossesse. La question de la clause de conscience, qui peut être invoquée pour refuser de pratiquer un avortement, a été débattue à plusieurs reprises lors des réunions de l’organe national chargé de superviser l’activité des médecins gynécologues. Le Ministère de la santé a en outre adressé une déclaration aux gouverneurs de toutes les voïvodies pour appeler leur attention sur la nécessité de veiller à ce que la loi de janvier 1993 relative à la planification de la famille, à la protection du fœtus humain et aux conditions d’admissibilité de l’avortement, soit appliquée comme il se doit. Des initiatives ont également été mises en œuvre pour mieux faire connaître aux médecins les cas dans lesquels ils sont fondés à invoquer la clause de conscience. Des solutions ont été adoptées, qui permettent d’engager une procédure d’appel lorsqu’un médecin refuse de pratiquer un avortement. Pour ce qui est des contraceptifs, ils sont proposés à des prix raisonnables; la «pilule du lendemain», dont le prix peut aller de 16 à 70 euros, est plus chère. En raison de leurs composants hormonaux et de leurs conséquences possibles pour la santé des femmes, les contraceptifs ne peuvent être obtenus que sur prescription médicale. Selon les estimations, il y aurait eu entre 80 000 et 150 000 avortements clandestins en Pologne depuis l’entrée en vigueur de la loi de 1993. L’accès au dossier médical est régi par des dispositions de loi très strictes, vu le caractère sensible des données qu’il peut contenir. Toute personne hospitalisée doit, le cas échéant, mentionner les membres de la famille qui peuvent y accéder. Si la famille n’a pas été autorisée à accéder au dossier médical du patient, le seul moyen de consulter les informations qu’il contient est de présenter une demande en justice à cette fin.

17.M me  Syroka (Pologne) dit que le Commissaire à la protection des droits du patient, institution récente, n’a été saisi à ce jour d’aucune demande d’un patient contestant une décision médicale.

18.M me  Glowacka-Mazur (Pologne) dit que le Commissaire à la protection des droits civiques, en tant qu’autorité indépendante chargée d’examiner les plaintes pour comportements répréhensibles de la part de policiers, a été saisi de 80 plaintes et de 93 réclamations − relatives à l’utilisation de moyens de contraintes ou à des actes de violence physique ou psychologique − entre le 1er janvier et le 1er septembre 2010. Celles-ci ont été jugées recevables dans 22 cas. Tout étranger arrêté et placé dans un centre de rétention doit être informé par écrit, dans une langue qu’il comprend, de ses droits et obligations. Il est exact que la qualité des services d’interprétation n’est pas toujours optimale, surtout si la langue parlée par l’étranger est peu courante.

19.M me  Osiecka (Pologne) dit que, lorsqu’un policier est soupçonné d’avoir commis une infraction, le parquet engage des poursuites d’office si des éléments de preuve suffisants sont réunis. Si tel n’est pas le cas, il classe l’affaire et la victime peut faire appel de cette décision devant un tribunal.

20.M. Jaros (Pologne) dit que la Pologne a mis au point son propre modèle de justice pour mineurs, qui exclut la responsabilité pénale des mineurs. Les mineurs sont jugés par des tribunaux aux affaires familiales. Dans des cas exceptionnels, les audiences concernant un mineur peuvent être conduites par la police. Toutefois, dans tous les cas, les auditions de mineurs se déroulent en présence des parents, du tuteur ou de l’avocat de l’intéressé ou, à défaut, en la présence d’un enseignant, d’un représentant d’un centre régional d’aide aux familles ou d’un représentant d’une organisation sociale. Malgré toutes ces garanties, quatre cas de comportement répréhensible d’agents de police à l’égard de mineurs ont été signalés et ces affaires sont actuellement examinées par le Défenseur des enfants.

21.M. Zoń (Pologne) dit qu’il existe dans les établissements pénitentiaires un dispositif de surveillance qui enregistre les faits et gestes des détenus, en vue uniquement d’assurer leur sécurité. En 2009, grâce à ce dispositif et à l’intervention rapide des gardiens de prison, 200 détenus ont pu être réanimés après une tentative de suicide. Les détenus sont informés de l’existence du dispositif de surveillance au moment de leur admission dans l’établissement pénitentiaire. L’utilisation du dispositif, qui est encadrée par un texte de loi, peut d’une certaine manière porter atteinte aux droits de l’homme et, par conséquent, les caméras installées dans les toilettes et les salles de bains ne filment pas les parties intimes des détenus.

22.M me Głowacka-Mazur (Pologne) dit que le droit polonais ne reconnaît pas les mariages contractés par des personnes de même sexe dans un pays où de telles unions sont légales. En effet, l’article 18 de la Constitution dispose que le mariage est l’union d’un homme et d’une femme. En vertu d’une décision rendue en 2008 par le tribunal administratif de Gdansk, le certificat que doit produire toute personne souhaitant se marier, qui atteste son statut de célibataire, ne fait pas mention du futur conjoint.

23.M. Jaros (Pologne) dit que les activités à visée discriminatoire, quel que soit leur motif, sont incompatibles avec le principe fondamental énoncé à l’article 30 de la Constitution, qui fait aux pouvoirs publics obligation de protéger la dignité et les droits et libertés de tout être humain. Bien que l’incitation à la haine ne soit pas prévue dans le Code pénal en tant qu’infraction spécifique, une protection efficace contre les discriminations fondées sur le sexe ou l’orientation sexuelle est garantie par l’application d’autres articles du Code pénal, notamment ceux qui répriment la diffamation et les menaces.

24.M. Ozga (Pologne) dit que la participation des lesbiennes, des gays, des bisexuels et des transsexuels à la vie sociale et publique de la Pologne connaît une certaine évolution ces derniers temps. Le grand public est de mieux en mieux sensibilisé aux questions relatives à la discrimination, notamment grâce à l’action du bureau du Plénipotentiaire pour l’égalité de traitement, qui appuie par exemple l’exposition «Ars Homo Erotica» consacrée à l’homosexualité présentée du 11 juin au 5 septembre 2010 au Musée national de Varsovie, ainsi que l’EuroPride. Le bureau du Plénipotentiaire pour l’égalité de traitement intervient dans chaque affaire de discrimination qui lui est signalée. La loi réprime le fait de refuser d’employer une personne en raison de son orientation sexuelle et un enseignant homosexuel qui travaille dans une école catholique est pleinement protégé par le Code du travail. Les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transsexuelles peuvent acheter un bien immobilier en commun avec leur partenaire ou en tant que bien propre et en disposer comme elles l’entendent.

25.M. Sobczak (Pologne) dit qu’en 2000 la Pologne a ratifié le Protocole no 6 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales concernant l’abolition de la peine de mort et que le Code pénal de 2007 a aboli la peine capitale, réalisant ainsi l’objectif du deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort. Les autorités n’en poursuivent pas moins leurs travaux relatifs au processus de ratification du deuxième Protocole facultatif.

26.M me Skórka (Pologne) dit que l’enseignement de la religion et de l’éthique dans les jardins d’enfants et les écoles est dûment encadré par des règlements. Les notes que les élèves reçoivent pour les connaissances et compétences acquises dans ces cours ne comptent pas pour leur passage dans la classe supérieure. Les programmes et les manuels d’instruction religieuse sont élaborés et approuvés par l’autorité religieuse de la confession concernée et sont communiqués au Ministère de l’éducation. Les écoles sont tenues d’organiser des cours d’éthique si les élèves ou les parents le demandent. À la demande des autorités religieuses de diverses confessions, 25 centres d’instruction religieuse ont été ouverts à Varsovie et sont fréquentés par 1 400 élèves. Dans les jardins d’enfants et les écoles de Varsovie, un enseignement religieux est dispensé pour 14 confessions. Ces bonnes pratiques sont applicables dans les autres régions de Pologne.

27.Sir Nigel Rodley demande sous quelle qualification pénale sont réprimés les actes terroristes puisque la législation ne contient pas de définition du terrorisme. Il s’étonne d’apprendre que l’auteur d’un acte terroriste encourt au maximum cinq ans d’emprisonnement et souhaiterait savoir si des poursuites ont déjà été ouvertes et des condamnations ont été prononcées sur le fondement de cette législation, qui prévoit que le caractère terroriste est une circonstance aggravante des infractions.

28.D’après des informations émanant de sources non gouvernementales, les étrangers faisant l’objet d’une mesure d’expulsion n’ont pas accès aux informations et avis les concernant, détenus par les services de la sécurité intérieure (ABW) et les services de surveillance des frontières et sur la base desquels est prise la décision d’expulsion. Aucune mesure de protection contre l’utilisation de ces informations, pour la plupart confidentielles, n’est appliquée. Il faudrait savoir si l’État partie envisage de prendre des mesures visant à rééquilibrer le système et à permettre que les avis puissent faire l’objet d’un réexamen.

29.M. Thelin s’étonne du petit nombre de condamnations prononcées dans les affaires de traite d’êtres humains par rapport au nombre de cas signalés, ce qui peut révéler soit l’inefficacité des procureurs soit l’importance des mesures de protection juridiques dont bénéficient les prévenus. De plus, d’après les informations dont il dispose, le nombre de cas officiellement signalés serait loin de refléter la véritable ampleur du phénomène. M. Thelin souhaiterait des éclaircissements.

30.M me Keller demande combien d’affaires d’actes de violence commis à l’égard de mineurs dont le Défenseur des enfants est actuellement saisi, concernent des mineurs étrangers. Elle se déclare très préoccupée par les informations émanant d’ONG, selon lesquelles 150 000 avortements clandestins seraient pratiqués chaque année. Compte tenu de l’importance de ce chiffre et du danger pour la santé et la vie des femmes que présentent ces interventions, ou peut se demander si la législation actuelle sur l’avortement n’est pas trop restrictive.

31.M. El-Haiba dit que selon les informations qu’il a recueillies certains médias relayent des discours racistes, en particulier à connotation antisémite. Or la Charte de déontologie des journalistes de la télévision polonaise énonce l’interdiction de pratiquer toute discrimination fondée notamment sur la race, la religion ou la culture. Un complément d’information sur l’action du Conseil de déontologie des médias, chargé notamment de veiller au respect de ce principe par les journalistes, serait le bienvenu. La délégation pourrait en outre indiquer si un tel code de déontologie existe aussi pour les médias utilisant les nouvelles technologies, telles que l’Internet, et s’il existe une jurisprudence dans ce domaine.

32.M me Motoc demande s’il est exact que le fait qu’un élève n’ait pas suivi les cours de religion à l’école est consigné dans son certificat de fin de scolarité.

33.M. Górszczyk (Pologne) dit que la définition du caractère terroriste d’un acte figurant dans le Code pénal est très générale et permet, dans les circonstances énumérées au paragraphe 20 de l’article 115, d’ajouter la qualification d’acte terroriste à différentes infractions. Tel serait par exemple le cas d’un acte qui entraînerait une catastrophe dans les transports et engendrerait d’importantes perturbations dans les services publics ou d’un attentat qui provoquerait la mort de plusieurs personnes. La peine maximale de cinq ans d’emprisonnement mentionnée dans cet article ne signifie pas que certains actes ne peuvent pas emporter de peines plus lourdes puisque le Code pénal prévoit jusqu’à vingt-cinq ans d’emprisonnement pour certaines infractions. Les tribunaux n’ont pas eu à connaître d’affaires concernant des actes terroristes depuis l’entrée en vigueur, en 2004, des dispositions du paragraphe 20 de l’article 115 du Code pénal.

34.M me Głowacka-Mazur (Pologne) dit que la décision relative à l’expulsion d’un étranger est prise par le gouverneur (Voïvode) de la voïvodie concernée. La décision peut être contestée auprès du chef de l’Office des étrangers. Lorsque la décision est motivée par la nécessité de protéger la sécurité de l’État, elle est exécutée immédiatement. Toutefois, si l’étranger a déposé une demande d’octroi du statut de réfugié, l’exécution de l’arrêté d’expulsion est reportée.

35.M. Dzialuk (Pologne) ajoute que les informations et les avis concernant les étrangers frappés d’une mesure d’expulsion sont en principe accessibles à tous sauf s’ils sont classés confidentiels pour des motifs prévus par la loi.

36.M me Głowacka-Mazur (Pologne) précise que les documents et avis peuvent être classés confidentiels pour des raisons tenant à la sécurité de l’État ainsi que dans les circonstances prévues par la législation relative à la protection des informations confidentielles. Lorsque l’étranger fait appel de la décision d’expulsion, le tribunal a accès à toutes les pièces du dossier.

37.M. Ozga Dziurkowski (Pologne) ajoute que les documents contenant les avis émis par les services de sécurité sont accessibles uniquement aux personnes spécialement autorisées à consulter les documents classés confidentiels. Les avocats peuvent obtenir l’autorisation et les droits des étrangers sont donc pleinement respectés.

38.M me Kozłowska (Pologne) dit que, avant la modification apportée au Code pénal en septembre 2010 et l’introduction dans la loi d’une définition de la traite des êtres humains, les actes constitutifs de la traite tombaient sous le coup des articles du Code pénal réprimant par exemple l’enlèvement de personnes à des fins de prostitution à l’étranger. Le Ministère de l’intérieur prend très au sérieux la question de la traite des êtres humains et est résolu à offrir une meilleure protection aux victimes. Il a récemment établi un rapport très détaillé sur le phénomène, dans lequel il a analysé les statistiques communiquées par les services de surveillance des frontières, par la police et par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Il a aussi entrepris de recueillir des statistiques sur les victimes de la traite, polonaises ou étrangères, directement prises en charge par l’organisation La Strada, qui exécute un programme mis au point par le Gouvernement. Enfin il a élaboré, en collaboration avec l’École nationale de la magistrature, un programme de formation sur la lutte contre la traite à l’intention des juges et des procureurs.

39.M. Lewoc (Pologne) dit qu’aucune des affaires actuellement examinées par le Défenseur des enfants ne concerne de mineurs étrangers.

40.M me Korbasińska (Pologne) dit que l’avortement est autorisé dans les cas où la santé et la vie de la femme enceinte est en danger ou lorsqu’il apparaît, au cours de la grossesse, que le fœtus est atteint d’anomalies graves et irréversibles ou encore lorsque la grossesse résulte d’un acte criminel, comme le viol. Le Gouvernement souhaite que la loi soit appliquée et n’a pas entrepris de la modifier. Le chiffre de 150 000 avortements clandestins par an, communiqué par des représentants d’organisations non gouvernementales, ne paraît pas réaliste et il faudrait savoir quelle méthode a été utilisée pour recueillir ces données.

41M me Skórka (Pologne) dit que les notes obtenues dans les cours de religion ou d’éthique figurent dans le certificat de fin de scolarité.

42.M. Sobczak (Pologne) dit que les autorités compétentes ont réagi immédiatement aux nombreuses allégations de détention secrète qui ont commencé à circuler en 2005 dans les médias. Dès décembre 2005, la question a été soumise à la Commission parlementaire pour les services secrets, qui n’a conclu à aucune violation de la législation interne et des instruments internationaux ratifiés par la Pologne. Comme suite à plusieurs rapports d’organismes internationaux, parmi lesquels le rapport de la Commission des questions juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, de nouvelles mesures ont été prises pour vérifier ces allégations. Une enquête a été ouverte en mars 2008 par le bureau du Procureur de district de Varsovie, puis confiée au bureau du Procureur près la juridiction d’appel.

43.M. Górszczyk (Pologne) précise que le champ couvert par l’enquête du bureau du Procureur ne se limite pas aux infractions à l’article 231 du Code pénal, qui concerne l’abus de pouvoir commis par des agents de l’État, mais porte aussi sur l’ensemble des éléments permettant de vérifier les circonstances des cas rapportés de détention illégale et de transport de détenus de la CIA sur le territoire polonais. Cette enquête, confiée aux plus hautes autorités judiciaires, est menée en toute indépendance. Si elle prend du temps c’est en raison de la complexité de l’affaire et de la nécessité de recourir à l’entraide judiciaire internationale. Il est impossible à ce stade de donner de plus amples renseignements sur le contenu ou les résultats de l’enquête, les éléments de preuve recueillis étant classés secrets.

44.M. Lewoc (Pologne) dit qu’un certain nombre de mesures ont été prises pour réduire la durée de la détention provisoire comme suite à la recommandation formulée par le Comité à ce sujet en 2004. Ainsi, certains motifs de prolongation de la détention provisoire ont été supprimés, la période d’observation psychiatrique a été réduite et il a été rendu obligatoire de déduire la période de détention provisoire du temps d’emprisonnement. Ces mesures ont permis une réduction notable du nombre de personnes en détention provisoire. Toute partie peut engager une action en justice pour durée excessive de la procédure. Si le tribunal saisi conclut à un retard excessif compte tenu des faits et des questions de droit de l’affaire, il peut ordonner une indemnisation de 500 à 5 000 euros. En 2009, 4 000 plaintes ont été déposées pour ce motif, dont la moitié environ pour des affaires civiles. Dans près de 600 cas, le tribunal a ordonné le versement d’une indemnité, d’un montant moyen de 750 euros.

45.M. Zón (Pologne) dit que les mesures prises par le Gouvernement pour réduire la surpopulation carcérale ont été couronnées de succès puisqu’en septembre 2010 le nombre des détenus et prisonniers était tombé à 81 000, ce qui correspondait à 97 % de la capacité des centres de détention et établissements pénitentiaires. Plusieurs innovations ont contribué à ce résultat, parmi lesquelles l’introduction de la surveillance électronique, dont peuvent bénéficier sous certaines conditions les condamnés à un emprisonnement de moins d’un an, et l’instauration, depuis juin 2010, de l’obligation de travailler associée aux peines de prison. Les frais afférant à l’emploi des prisonniers (examens médicaux et primes d’assurance, en particulier) sont couverts par l’État. L’action du Gouvernement en faveur de la réinsertion sociale des prisonniers a été mondialement reconnue. En juin 2009, l’administration pénitentiaire a reçu le prix de la «Balance de cristal», remis par la Commission européenne et le Conseil de l’Europe et visant à récompenser les projets nationaux tendant à améliorer le fonctionnement de la justice.

46.La protection des détenus qui saisissent le Médiateur ou la Cour européenne des droits de l’homme est pleinement garantie. Les plaintes peuvent être déposées directement auprès des organes compétents et demeurent confidentielles. Pour faciliter la circulation de la correspondance, la Direction générale des services pénitentiaires a décidé de faire installer dans chaque établissement une boîte spécialement destinée à recueillir les plaintes. En 2009, plus de 1 000 plaintes ont été reçues, dont 29 seulement ont été considérées comme fondées.

47.M me Glowacka-Mazur (Pologne) dit que la loi sur les minorités nationales et ethniques prévoit le droit d’utiliser une langue minoritaire comme langue auxiliaire dans les contacts avec les autorités, oralement et par écrit, dans les communes dont le nombre d’habitants appartenant à une minorité représente au moins 20 % de la population et qui sont inscrites à ce titre au registre officiel des communes utilisant une langue auxiliaire. Le registre comprend actuellement 30 communes. La loi prévoit également la possibilité d’utiliser les noms traditionnels de lieu dans la langue minoritaire, en même temps que les noms officiels. À ce jour, trois communes se sont prévalues de cette possibilité.

48.M. Thelin demande quand seront connues les conclusions de l’enquête en cours sur les allégations relatives à l’existence d’un centre de détention secret en Pologne. En ce qui concerne la détention avant jugement, il note que les progrès accomplis sont attribuables en grande partie au contrôle exercé par le Ministère de la justice sur les activités des tribunaux, ce qui soulève des questions pour l’indépendance des organes judiciaires. Des commentaires sur ce point seraient les bienvenus. Il serait également intéressant de savoir si d’autres mesures sont envisagées pour réduire la détention avant jugement, comme l’imposition d’une durée maximale, non prorogeable. Étant donné l’écart notable entre les indemnisations accordées par les juridictions nationales et celles ordonnées par la Cour européenne des droits de l’homme pour durée excessive de la procédure, on peut se demander si les tribunaux polonais ne pourraient pas interpréter et appliquer directement la norme européenne.

49.En ce qui concerne le traitement des étrangers en situation irrégulière, la délégation pourra peut-être indiquer si des mesures de substitution à la détention, telles que l’assignation à résidence, sont envisagées et si la loi fixe la durée maximale de la période de détention pour les personnes en attente d’expulsion. L’action menée par l’État partie pour réduire la surpopulation carcérale a été efficace mais elle repose surtout sur des mesures à court terme. Il serait donc utile de connaître la stratégie à long terme du Gouvernement dans ce domaine.

50.Il semblerait, d’après les renseignements dont dispose le Comité, que les personnes arrêtées par la police et soumises à un interrogatoire ne soient pas informées au même moment de leur droit d’être assistées d’un conseil et de la possibilité de recevoir une assistance judiciaire gratuite. L’État partie envisage-t-il de modifier la pratique actuelle en la matière? La correspondance entre les détenus et leur avocat est également un sujet de préoccupation étant donné que tout courrier échangé entre eux transite par les services du procureur ce qui, outre les problèmes de confidentialité que cela soulève, ralentit considérablement la procédure. Des mesures sont-elles prévues pour corriger cette situation? De même, l’État partie envisage-t-il de prendre ou a-t-il déjà pris des mesures pour que les communications adressées à la Cour européenne des droits de l’homme soient acheminées directement et sans être ouvertes?

51.Il est frappant de noter que seulement 2 % des plaintes émanant de détenus ont été examinées quant au fond en 2009. Une explication possible pourrait être le manque de transparence de la procédure et une mauvaise compréhension par les détenus des étapes et conditions à respecter, entraînant l’irrecevabilité de leur plainte. Des commentaires sur ce point seraient les bienvenus.

52.M me  Keller note que les organisateurs qui font appel d’une décision d’interdiction de rassemblement ne reçoivent pas toujours de réponse à leur recours avant la date prévue pour le rassemblement. Elle souhaiterait connaître l’avis de la délégation sur ce problème et sur ce qui pourrait être fait pour y remédier. Elle demande en outre quand seront adoptés les projets d’amendements à la loi sur les rassemblements.

53.D’après les réponses écrites à la liste des points à traiter, il n’a été fait usage de la langue auxiliaire pour communiquer avec les autorités que dans 18 des 30 communes inscrites au registre officiel établi en vertu de la loi sur les minorités nationales et ethniques. De plus, aucune commune ne se serait prévalue de la possibilité d’ajouter des noms de rue dans une langue minoritaire. Il serait intéressant de savoir pourquoi les membres des communautés concernées n’ont pas fait davantage usage de ces nouveaux droits que leur reconnaît la loi et si des campagnes d’information et de sensibilisation sur ce sujet ont été ou vont être menées.

54.M. El-Haiba demande des précisions sur le rôle de l’Institut de la mémoire nationale (IPN), chargé d’élucider les crimes commis contre le peuple polonais pendant la période communiste. Il s’inquiète tout spécialement des conséquences des amendements apportés en 2006 à la «loi de lustration». Notant que les journalistes font désormais partie des catégories de personnes visées par cette loi, il fait observer qu’il y a là un risque d’atteinte à la liberté d’expression. Il souligne en outre le paradoxe de cette situation où des personnes sont amenées à devoir prouver ce qu’elles n’ont pas fait. Il souhaiterait donc savoir quelles sont les garanties prises pour que l’application de cette loi ne devienne pas une chasse aux sorcières et pour éviter que l’IPN ne se transforme en tribunal. Il souhaiterait en particulier des éclaircissements sur le cas du Sous-Secrétaire d’État aux affaires internationales qui a démissionné mais dont il a finalement été établi qu’il n’avait jamais collaboré, même s’il avait signé un engagement à travailler avec la police communiste.

55.Il serait intéressant de connaître la capacité d’accueil des quartiers pour mineurs dans les locaux de police afin de la comparer au nombre total de mineurs détenus par la police. Les questions relatives à l’accès de ces mineurs à une nourriture suffisante, à l’éducation et aux soins de santé sont régies par l’ordonnance du 21 janvier 2002 du Ministre des affaires intérieures et de l’administration. Des précisions concernant les mesures prévues pour garantir l’accès effectif des mineurs à ces services et le rôle joué par le Ministère de l’éducation et le Ministère de la santé dans leur mise en œuvre seraient utiles. Il faudrait savoir quelles dispositions régissent les modalités des visites, si elles prévoient des motifs pour lesquels un mineur détenu peut être privé du droit de recevoir des visites et quelles sanctions sont prévues en cas de privation abusive de ce droit.

56.Les mesures législatives prises par l’État partie pour la protection des enfants contre toutes les formes de violence et d’exploitation sont certes bienvenues mais seraient utilement complétées par un plan d’action national traitant toutes les questions visées par la législation. Un certain nombre d’initiatives ont déjà été prises par le Médiateur pour les enfants dans ce domaine et méritent d’être encouragées. Des précisions concernant le contenu des cours d’éthique seraient souhaitables, car il ne faudrait pas que les valeurs qui y sont enseignées soient contraires aux principes fondamentaux des droits de l’homme.

57.M me Motoc note que le projet de modification du Code pénal visant à alléger la peine prévue pour l’infraction de diffamation (question no 30) devait être soumis au Parlement en 2009 et demande où en est le processus d’examen et dans quel délai le texte est susceptible d’être adopté. À propos des minorités, il faudrait savoir si l’État partie reconnaît aux Cachoubes le statut de minorité ethnique ou s’il les considère toujours comme une minorité linguistique. Des précisions sur le statut des Silésiens, population difficile à classer du fait de sa diversité ethnique et linguistique, seraient utiles. La communauté rom, beaucoup moins nombreuse en Pologne que dans les autres pays de la région, est-elle considérée comme une minorité nationale?

58.M. Bhagwati voudrait savoir si le droit à l’aide juridictionnelle est prévu par la loi et, dans l’affirmative, quels sont les dispositions applicables et les critères qui régissent l’octroi de l’aide juridictionnelle et à quel stade de la procédure elle est effectivement assurée. Des chiffres récents sur le nombre de cas où l’aide juridictionnelle a été accordée seraient utiles.

59.Le Président remercieles membres du Comité et invite la délégation polonaise à répondre aux questions complémentaires qui lui ont été posées.

60.M. Dzialuk (Pologne) dit que le projet de loi visant à supprimer la peine privative de liberté prévue par le Code pénal pour l’infraction de diffamation a été rejeté par le Parlement mais qu’un nouveau projet est actuellement examiné par le Gouvernement. La portée de l’infraction de diffamation a néanmoins été considérablement restreinte par un récent arrêt de la Cour constitutionnelle, qui a considéré que la divulgation d’informations relatives à des personnalités publiques était toujours dans l’intérêt du public.

61.La délégation n’est pas en mesure de dire quand l’enquête sur les allégations relatives à l’existence de centres de détention secrets sur le territoire polonais sera terminée mais le Comité peut être assuré que tout est mis en œuvre pour qu’elle soit conclue dans des délais raisonnables. Les formations à l’intention des juges et des procureurs tiennent compte des optiques différentes propres aux deux fonctions et font donc généralement l’objet d’activités séparées. Du fait de la relative facilité avec laquelle juges et procureurs peuvent passer d’une fonction à l’autre, le risque d’une certaine confusion des rôles peut se poser, mais l’attention voulue est accordée à cette question.

62.M. Lewoc (Pologne) dit que la diminution du nombre de personnes placées en détention provisoire et de la durée moyenne de la détention provisoire a plusieurs explications. La criminalité a régulièrement diminué depuis plusieurs années sous l’effet des politiques menées par l’État à cet effet. Les nombreuses mesures législatives prises à l’initiative du Ministère de la justice pour limiter le champ d’application et la durée de la détention provisoire ont débouché sur la modification dans ce sens de plusieurs dispositions du Code de procédure pénale. Des sessions de formation à la nouvelle législation ont été organisées à l’intention des juges et des procureurs et le contrôle des décisions relatives à la détention provisoire et de leur mise en œuvre a été renforcé.

63.M. Dzialuk (Pologne) dit, au sujet des indemnisations, que le Ministère de la justice ne peut pas établir de directives imposant des obligations aux juges. Il a diffusé à l’intention de ceux-ci une note d’information qui explique les règles appliquées par la Cour européenne des droits de l’homme pour calculer le montant des indemnités à verser en cas de durée excessive de la procédure, afin d’encourager un changement dans leur pratique. En ce qui concerne les migrants sans papiers, le Ministère de la justice mène depuis plusieurs années un important travail pédagogique auprès des juges afin qu’ils intègrent l’idée que le placement en détention doit être une mesure de dernier recours; mais les mentalités sont lentes à évoluer.

64.M me Glowacka-Mazur (Pologne) confirme qu’un projet de modification de la loi sur les rassemblements est à l’étude. Il vise à imposer à l’autorité saisie d’un recours contre l’interdiction d’un rassemblement l’obligation de rendre sa décision avant la date prévue pour le rassemblement. La loi sur les minorités nationales garantit le droit des personnes appartenant à une minorité qui représente 20 % au moins de la population d’une commune d’utiliser leur langue comme langue auxiliaire dans leurs relations avec les autorités communales, à condition que la commune soit inscrite au registre officiel des communes où une langue auxiliaire est utilisée. À l’heure actuelle, 30 des 54 communes qui satisfont au critère des 20 % ont demandé et obtenu leur inscription au registre officiel. La langue cachoube est protégée en tant que langue régionale et la minorité cachoube jouit de la même protection que les minorités nationales. Le débat se poursuit sur le point de savoir si le silésien peut être considéré comme une langue régionale. Les populations de Silésie peuvent difficilement être considérées comme une minorité ethnique ou nationale; elles s’apparentent plutôt à une minorité régionale, mais là encore, la question reste ouverte. Les Roms ont le statut de minorité ethnique; ils bénéficient d’un programme de protection spécifique financé conjointement par l’État, les collectivités locales et l’Union européenne.

65.M. Zoń (Pologne) dit que la stratégie adoptée par le Ministère de la justice et l’Administration pénitentiaire pour lutter contre la surpopulation carcérale mise davantage sur les mesures susceptibles de faire baisser la population carcérale − mesures de substitution à la privation de liberté, remplacement des peines d’emprisonnement par d’autres peines non privatives de liberté pour certaines infractions − que sur l’accroissement de la capacité des établissements pénitentiaires. Plusieurs lois ont été adoptées dans ce sens. En ce qui concerne la confidentialité de la correspondance des détenus, un pli ne peut être ouvert par un agent pénitentiaire qu’à titre exceptionnel, lorsqu’il existe des motifs raisonnables de penser que son contenu est dangereux ou illicite, et en présence du détenu. Les détenus sont informés dès leur arrivée de la procédure à suivre pour déposer une plainte. La confidentialité des plaintes déposées par les détenus est garantie. Il est veillé à ce que les détenus puissent communiquer avec leur famille tant par correspondance qu’en recevant des visites. Les détenus qui n’ont pas de quoi affranchir leurs lettres peuvent bénéficier d’une prise en charge des frais postaux par l’administration de l’établissement. Les salles de parloir sont aménagées de façon à être aussi conviviales que possible − absence de barreaux, espaces de jeux pour les enfants, etc.

66.M. Dzialuk (Pologne) remercie le Comité pour la pertinence de ses nombreuses questions, auxquelles la délégation s’est efforcée de répondre de manière aussi complète et satisfaisante que possible. Les réponses qui n’ont pas pu être données oralement faute de temps seront transmises par écrit ultérieurement.

67.Le Président remercie la délégation polonaise de sa franchise et de sa collaboration, qui ont permis un dialogue fructueux. Il l’invite à faire parvenir le complément de réponses dans les meilleurs délais pour qu’il en soit tenu compte dans les observations finales.

La séance est levée à 13 h 5.