Nations Unies

CCPR/C/SR.2901

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

19 juillet 2012

Original: français

Comité des droits de l ’ homme

10 5 e session

Compte rendu analytique de la 2901 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le vendredi 13 juillet 2012, à 10 heures

Présidente:Mme Majodina

S ommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte

Rapport initial des Maldives (suite)

La séance est ouverte à 10 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties conformémentà l’article 40 du Pacte (suite)

Rapport initial des Maldives (CCPR/C/MDV/1; CCPR/C/MDV/Q/1; CCPR/C/MDV/Q/1/ Add.1; HRI/CORE/MDV/2010) (suite)

1. Sur l ’ invitation de la Présidente, la délégation maldivienne reprend place à la table du Comité.

2.La Présidente invite la délégation à poursuivre ses réponses aux questions posées par les membres à la séance précédente.

3.M. Jameel Ahmed (Maldives) dit qu’il n’y a pas de contradiction entre les droits et libertés consacrés par la Constitution de 2008 et les droits de l’homme universellement reconnus. La question de la compatibilité des préceptes de l’islam avec la conception universelle des droits de l’homme est un vieux débat, mais les spécialistes de l’islam et du droit musulman s’accordent généralement pour dire que les aspects et les caractéristiques de ce que l’on définit aujourd’hui comme les droits de l’homme universels se retrouvent dans les préceptes islamiques. La charte des droits inscrite dans la Constitution des Maldives a été rédigée avec le concours d’experts musulmans et non musulmans de plusieurs pays. Elle a une portée très large et garantit notamment la liberté de réunion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, le droit de ne pas être soumis à la torture ou à des traitements cruels, le droit de ne pas être arrêté ou détenu arbitrairement et le droit d’être jugé sans délai. En outre, l’article 16 de la Constitution, qui dispose que les droits consacrés par celle-ci doivent être interprétés d’une manière qui ne soit pas contraire aux préceptes de la loi islamique, prévoit également que l’interprétation de ces droits doit être large et tenir compte des caractéristiques d’une société moderne et démocratique. L’obligation faite par la Constitution d’être musulman pour être citoyen des Maldives reflète la réalité de la société maldivienne, qui est une société homogène dans laquelle tous les Maldiviens parlent la même langue, sont issus de la même race et ont la même religion. Elle n’est donc pas perçue comme un obstacle à la réalisation des droits de l’homme et ne suscite pas de débat tendant à son abrogation.

4.La raison qui empêche l’accréditation de la Commission maldivienne des droits de l’homme en tant qu’institution nationale des droits de l’homme conforme aux Principes de Paris réside dans la disposition de la loi relative à la Commission qui prévoit que seules les personnes de confession musulmane peuvent en être membres. L’abrogation de cette disposition ne lèverait pas l’obstacle à l’accréditation car en vertu de la Constitution, qui est la norme suprême, tout citoyen maldivien doit être musulman.

5.La prescription n’existe pas en matière civile et pénale, de sorte que toute personne victime d’une violation ou ses ayants droit peuvent saisir la justice pour demander réparation à tout moment quelle que soit la date à laquelle les faits ont été commis. L’absence de restriction temporelle à l’exercice du droit de demander réparation est très importante compte tenu des nombreux épisodes de violences qu’a connus le pays dans le passé et dont les séquelles se font encore sentir aujourd’hui. On a vu des actions en réparation ouvertes au civil comme au pénal en rapport avec des faits vieux de trente, voire de cinquante ans. Si l’État devait indemniser d’office les victimes d’événements survenus pendant une période déterminée, cela serait injuste vis-à-vis des autres victimes non admises à bénéficier de cette indemnisation. Un autre obstacle à la faisabilité d’une telle démarche est la situation financière précaire de l’État, qu’un octroi massif d’indemnités risquerait de gravement compromettre, au détriment de l’ensemble de la société. Il ne faut pas non plus oublier que pour qu’il y ait réparation, l’existence d’un préjudice doit préalablement être établie sur la base d’éléments allant au-delà de simples allégations. Le Gouvernement est donc d’avis que la voie judiciaire est la seule qui convienne en matière de réparation.

6.Le moratoire sur les exécutions capitales est toujours appliqué. Toutefois, en raison de l’augmentation sensible de la criminalité dans le pays et des graves préoccupations qu’elle suscite, la question de la peine de mort est récemment réapparue dans le débat public. Elle ne fait pas l’objet d’un débat officiel au Gouvernement, mais la classe politique, les juristes et d’autres secteurs de la société s’interrogent sur les moyens de maîtriser le taux de criminalité dans le pays. Un projet de nouveau code pénal, élaboré avec la collaboration de Paul H. Robinson, professeur de droit à l’Université de Pennsylvanie, est actuellement à l’étude. Le texte est fondé sur les catégories d’infractions établies dans le droit pénal islamique moderne ainsi que sur d’autres textes législatifs et jurisprudentiels nationaux et devrait pouvoir être soumis au Parlement pour adoption dans quelques mois.

7.Des progrès ont été faits en ce qui concerne l’égalité entre hommes et femmes en matière de succession. La loi sur la propriété foncière interdit expressément toute discrimination entre hommes et femmes dans le partage des terres entre héritiers. Dans la pratique, les cas de discrimination sont très rares et le partage des terres se fait généralement dans des conditions d’égalité entre les héritiers des deux sexes.

8.M me  Maumoon (Maldives) dit qu’il est vrai qu’il reste beaucoup à faire pour instaurer l’égalité hommes-femmes mais des progrès ont néanmoins été réalisés. Trois femmes occupent des charges au Gouvernement et bien qu’elles soient encore peu nombreuses au Parlement − à peine 5 % de députées en 2008 −, les femmes ont gagné du terrain au niveau des élections locales et les partis politiques ont pris des mesures pour favoriser leur participation à la vie politique. Le Ministère de l’égalité des sexes, qui avait été supprimé sous le Président Nasheed, a été rétabli. Des campagnes de sensibilisation sont menées dans les médias et à l’école pour faire évoluer les stéréotypes culturels qui font obstacle à l’égalité. Plusieurs lois adoptées ces dernières années, notamment la loi sur la fonction publique, la loi sur l’emploi et la loi sur les pensions, contiennent des dispositions qui visent expressément à combattre toutes les formes de discrimination, notamment la discrimination à l’égard des femmes. Pour encourager la participation des femmes à l’activité économique, le Gouvernement a adopté des mesures spéciales provisoires en vertu desquelles 40 % des prêts aux petites et moyennes entreprises financés par l’État sont accordés à des femmes souhaitant créer leur entreprise. Quatre groupes de femmes ont ainsi reçu un financement pour lancer leur activité.

9.La loi contre la violence au foyer définit une stratégie globale qui met l’accent à la fois sur la prévention, le rôle à jouer par la police et la justice, l’aide aux victimes, la sanction des auteurs et leur accompagnement en vue de leur réadaptation. Des mesures de sensibilisation et de formation ainsi que la construction de centres d’accueil pour les femmes victimes de violences sont également prévues.

10.La loi sur les droits de l’enfant interdit expressément les châtiments corporels à l’égard des mineurs de 18 ans. Cette pratique n’est pas du tout généralisée aux Maldives. Le Gouvernement est néanmoins déterminé à l’éradiquer et suit avec intérêt les enquêtes menées dans ce domaine par la Commission maldivienne des droits de l’homme.

11.M. Jameel Ahmed (Maldives) dit qu’une enquête est actuellement menée par une commission indépendante pour déterminer si des infractions ont été commises dans le contexte de la passation de pouvoirs de février 2012. Si l’existence de violations est établie, la commission en informera le Procureur général; si celui-ci estime que les éléments qui lui ont été soumis le justifient, il pourra ordonner l’ouverture d’une enquête criminelle. La Commission des droits de l’homme est habilitée à exercer des pouvoirs d’enquête, notamment à auditionner des témoins, et à être entendue dans les procédures judiciaires. Récemment, le Procureur général a chargé la Commission d’ouvrir une enquête sur l’enlèvement du Président du tribunal pénal dans lequel était impliqué l’ancien Président Nasheed car il estimait que l’impartialité de l’enquête risquait d’être compromise si celle-ci était confiée à la police. La Commission de l’intégrité de la police est compétente pour enquêter sur les infractions commises par les membres des forces de l’ordre dans l’exercice de leurs fonctions. Elle est totalement indépendante du pouvoir exécutif étant donné qu’elle a été créée en vertu d’une loi et que la nomination, la révocation et la sanction de ses membres relèvent de la compétence exclusive du Parlement. Le Ministère de l’intérieur n’intervient à aucun titre dans son fonctionnement. La Commission est toutefois tenue de lui remettre ses conclusions et recommandations afin qu’il puisse décider des mesures correctives à prendre. Dans les cas où la Commission conclut à des infractions qui justifient l’ouverture de poursuites pénales, elle peut en aviser directement le Procureur sans demander l’autorisation préalable du Ministre de l’intérieur, ce qu’elle a d’ailleurs fait récemment dans une affaire se rapportant aux événements de février 2012. La proportion relativement faible de plaintes soumises à la Commission qui ont donné lieu à des poursuites pénales s’explique par le fait que dans la majorité des cas les infractions constatées par la Commission appelaient des sanctions administratives, non l’ouverture d’une action pénale.

12.Les châtiments corporels sont interdits non seulement par la loi sur les droits de l’enfant, mais aussi par un règlement ayant force de loi émanant du Ministère de l’éducation. Cette pratique est très marginale aux Maldives, l’un des rares pays à avoir pris très tôt des mesures pour interdire les châtiments corporels à l’école.

13.M me  Maumoon (Maldives) dit qu’être Maldivien et être musulman sont deux éléments indissociables et que la réserve relative à l’article 18 du Pacte reflète la conviction profonde du peuple que les Maldives ont toujours été et doivent rester un pays exclusivement musulman. Le Gouvernement ne prévoit donc pas de retirer sa réserve. Il veille toutefois à ce que le souci de préserver l’unité sociale et religieuse du pays ne porte pas préjudice aux droits des personnes d’autres confessions, notamment des travailleurs étrangers présents dans le pays. Ces personnes sont libres de pratiquer leur religion en privé, et d’importer pour leur usage personnel des articles et des ouvrages religieux. L’article 9 d) de la Constitution, qui établit que les non-musulmans ne peuvent pas acquérir la nationalité maldivienne, signifie que les étrangers non musulmans qui souhaiteraient acquérir la nationalité maldivienne devraient pour ce faire se convertir à l’islam, non que les Maldiviens qui n’adhéreraient pas à l’islam pourraient être déchus de la nationalité maldivienne. Une telle interprétation serait contraire à l’article 9 b) de la Constitution, qui dispose que nul citoyen maldivien ne peut être déchu de sa nationalité. La question ne s’est jamais posée mais, le cas échéant, il appartiendrait à la Cour suprême de se prononcer.

14.M. Jameel Ahmed (Maldives) dit que l’amputation et la lapidation, qui sont prévues par la charia, n’ont jamais été appliquées dans l’histoire moderne des Maldives. La seule peine prévue par la charia qui a cours à l’heure actuelle est la flagellation. Répondant à une question posée par Sir Nigel Rodley, il confirme qu’au moment des élections de 2008, le nom de M. Waheed, en tant que vice-président pressenti, figurait sur le bulletin de vote à côté de celui de M. Nasheed, candidat à la présidence, conformément aux règles en vigueur. Le nouveau gouvernement ne s’est jamais engagé à organiser une élection anticipée. Il a simplement dit qu’il accepterait les conclusions de la commission indépendante chargée de l’enquête sur les circonstances de la passation de pouvoirs, et que si celle-ci recommandait l’organisation d’une élection anticipée, il se conformerait à sa recommandation.

15.M me  Adam (Maldives)explique combien il est difficile pour un petit État insulaire comme les Maldives de s’acquitter de ses obligations en matière d’établissement de rapports. À la demande du Gouvernement, le document de base commun des Maldives (HRI/CORE/MDV/2010) a été élaboré avec l’aide d’un spécialiste des droits de l’homme mandaté par le Haut-Commissariat. En attendant d’avoir les moyens d’établir un rapport pour chaque organe conventionnel, les Maldives continueront d’élaborer des documents de base communs, comme le font d’autres États. Pour l’heure le Ministère des affaires étrangères ne dispose que d’un expert chargé des questions relatives aux droits de l’homme et de l’établissement des rapports. Déterminé à s’acquitter de ses obligations, le Gouvernement maldivien a demandé au Haut-Commissariat de lui accorder l’aide d’un conseiller supplémentaire pour ses prochains rapports. La délégation maldivienne accueille avec intérêt les observations et recommandations des membres du Comité.

16.M me  Maumoon (Maldives)dit que le Président des Maldives a créé une commission indépendante chargée d’examiner les questions relatives à la passation de pouvoirs. Il n’y a pas lieu de débattre de la date des élections tant qu’elle n’aura pas rendu ses conclusions. D’après la Constitution, les prochaines élections doivent se tenir en 2013. Pour changer cette date il faudrait donc modifier la Constitution, ce qui suppose d’obtenir une majorité des deux tiers des voix au Parlement.

17.M. Jameel Ahmed (Maldives)ditque, en ce qui concerne l’agression dont M. Rasheed aurait été victime à cause de ses opinions, aucun mobile n’a encore été établi. On ne peut donc pas affirmer qu’il s’agit d’une atteinte à la liberté de religion ou d’expression. La flambée de violence touche l’ensemble de la société maldivienne, sans distinction de religion, d’âge, de sexe ou de situation sociale. Il n’appartient pas au Gouvernement d’établir le mobile de telle ou telle attaque.

18.Pour ce qui est de la torture, le Gouvernement maldivien est fermement résolu à ne pas répéter les erreurs du passé; c’est pourquoi il a adopté une Constitution et diverses lois très progressistes et s’efforce sans relâche de mettre en œuvre les instruments internationaux. Divers articles de la Constitution sont le fruit de cette volonté d’instaurer une société harmonieuse, moderne, islamique et démocratique, en particulier les articles 16 (modernisme et application de la charia), 48 (interdiction de l’arrestation et de la détention arbitraires) et 69 (ouverture). Le Gouvernement a tenu à énoncer les motifs d’arrestation de manière très détaillée dans la Constitution (art. 49), plutôt que dans un code de procédure pénale, pour éviter les erreurs du passé.

19.Les Maldives sont dotées d’un pouvoir judiciaire indépendant. Outre la Commission nationale des droits de l’homme, elles disposent de mécanismes tels que la Commission de l’intégrité de la police. Pour un petit État qui n’a pas hérité de système juridique de ses anciens colonisateurs, les Maldives sont sur la bonne voie. Le nouveau cadre législatif constitue un grand pas en avant et le Parlement met tout en œuvre pour répondre aux attentes de la société.

20.M me  Maumoon (Maldives)dit qu’il n’est pas juste d’accuser les Maldives de pratique systématique de la torture et dénonce la politisation de cette question. Le Gouvernement est résolu à lutter contre la torture, il a mis en place une nouvelle Constitution et s’est doté d’organes indépendants compétents pour protéger les droits de tous, y compris des détenus.

21.M. Jameel Ahmed (Maldives)dit que la raison pour laquelle la Constitution prévoit que tout instrument international doit être approuvé par le Parlement avant d’être intégré au droit national relève du principe selon lequel, avant d’imposer des obligations à la population, les représentants du peuple démocratiquement élus doivent avoir voix au chapitre.

22.M. O’Flaherty demande comment, dans un système juridique dualiste, l’État partie veille à donner effet en droit interne aux instruments internationaux qui lient les Maldives. Il invite le Gouvernement maldivien à promouvoir la connaissance des dispositions du Pacte auprès des magistrats.

23.En ce qui concerne la liberté de religion, certaines prescriptions de la Constitution, notamment celle établissant que les non-musulmans ne peuvent pas acquérir la nationalité maldivienne, sont incompatibles avec les dispositions du Pacte et créent des inégalités en matière de protection. M. O’Flaherty demeure préoccupé par le fait que les membres de la Commission des droits de l’homme doivent être musulmans et sunnites, d’autant plus que de nombreux non-musulmans vivent aux Maldives.

24.M. Thelin dit que le fait que les dispositions du Pacte et des autres instruments internationaux ne soient pas directement applicables, la primauté des préceptes et du droit islamiques et la faiblesse du système judiciaire laissent peu d’espoir aux victimes de violations des droits garantis par le Pacte du fait de la prévalence du droit religieux. L’indépendance du pouvoir judiciaire est une très bonne chose, mais on ne peut que noter une nette disparité entre le nombre de cas de torture signalés et le nombre de procédures effectivement engagées, en particulier pour les cas survenus entre 1978 et 2008. L’État partie devrait établir une commission chargée d’enquêter sur ces affaires pour faire en sorte que les coupables soient condamnés et que les victimes obtiennent réparation et éviter ainsi toute politisation de ces questions. M. Thelin demande qui, du Ministère de l’intérieur ou du Parlement, décide du budget de la Commission de l’intégrité de la police. Le nombre de plaintes reçues et transmises aux tribunaux par la Commission en quatre ans d’existence demeure insuffisant. Le Gouvernement devrait s’assurer que la Commission a pleinement conscience de la portée de son mandat. En cas d’action conjointe des forces de défense et de police, M. Thelin souhaite savoir lequel de ces deux corps assume la responsabilité. Dans les affaires de mauvais traitements dans des lieux de détention autres que ceux placés sous la supervision de la police, il craint que l’esprit de corps ne fasse obstacle au bon déroulement de l’enquête. Les Maldives devraient mettre en place un organe indépendant et autonome. Il demande si le projet de loi antiterrorisme se trouve dans l’impasse faute d’avoir obtenu l’appui des parlementaires ou du fait de rivalités politiques. Il souhaiterait également connaître le degré de sévérité des peines prononcées dans les affaires de violence dans la famille et savoir si les nouvelles directives prévoient davantage de peines de prison. Les sanctions doivent être assez strictes pour faire évoluer les comportements.

25.Au sujet des châtiments corporels dans le système scolaire, M. Thelin relève que les informations communiquées par la Haut-Commissaire contredisent les propos de la délégation maldivienne qui affirme que la loi sur l’éducation interdit cette pratique. Il invite donc la délégation à préciser la date à laquelle la loi a été promulguée et à indiquer quelles dispositions interdisent les châtiments corporels. Enfin, il demande si l’État partie envisage d’interdire la flagellation, pratique dont, de l’aveu même de la délégation, les femmes sont les principales victimes. Il demande également si ces châtiments sont imposés par des tribunaux de la charia ou par des tribunaux ordinaires.

26.M me  Waterval souligne que la peine de mort n’est pas un moyen de prévenir la criminalité et engage l’État partie à l’abolir.

27.Sir Nigel Rodley demande une nouvelle fois quelles mesures ont été prises pour préparer la société aux conclusions de la Commission nationale d’enquête chargée de faire la lumière sur les événements qui ont précipité le changement de régime.

28.Sir Nigel Rodley partage l’avis de Mme Waterval sur la question de la peine de mort. Il souhaite des précisions sur l’application du moratoire. Il demande si des peines de mort sont encore prononcées et, le cas échéant, si ces peines sont commuées. Il demande également ce qui se passerait en cas de levée du moratoire.

29.M. Sarsembayev juge préoccupant le maintien par les Maldives de la réserve à l’article 18 du Pacte. Il demande si c’est parce que la société maldivienne fonctionne selon les préceptes de l’islam qu’elle ne juge pas nécessaire de tenir un débat sur les autres religions. Il se demande également si cette position n’est pas due à la crainte des problèmes de cohabitation que pourrait engendrer un afflux massif d’étrangers de confessions différentes, sans parler de l’exiguïté du territoire. Il demande en outre si une augmentation importante du nombre des migrants ne risquerait pas d’introduire de nouvelles façons de penser aux Maldives et d’y bouleverser le paysage politique.

30.La Constitution des Maldives énonce que l’islam est la religion d’État. Il existe des pays musulmans où l’appareil religieux est séparé de l’État et qui respectent donc leurs obligations internationales; les Maldives pourraient s’inspirer de leur exemple. M. Sarsembayev rejoint Mme Waterval et Sir Nigel Rodley au sujet de la peine capitale; les Maldives devraient s’attaquer aux causes économiques, sociales, politiques et organisationnelles de la récente vague de délinquance plutôt que d’accroître la répression judiciaire.

31.Le chef de la délégation a indiqué qu’aucun délai ne s’appliquait au dépôt de plaintes et M. Sarsambayev demande s’il en va de même pour les demandes d’indemnisation. Les informations dont dispose le Comité indiquent que le traitement des demandes d’indemnisation peut durer des années et il est donc souhaitable de faire en sorte que le versement d’indemnisations soit effectué rapidement. Les fonctionnaires responsables du traitement des demandes d’indemnisation qui ne s’acquittent pas de leur tâche dans les délais prescrits devraient être sanctionnés.

32.M. Ben Achour relève que la délégation maldivienne dans toutes ses interventions a fait référence au sunnisme et lui demande de préciser la place d’autres mouvements, comme le chiisme, dans le pays, par rapport au sunnisme.

33.M. Salvioli dit que la délégation n’a répondu que partiellement à certaines de ses questions. Il est heureux d’apprendre que les Maldives ont pris une série de mesures visant à promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes et souhaiterait recevoir par écrit, avant la fin du dialogue, des exemples concrets des résultats obtenus grâce à la campagne de sensibilisation du public menée par les Maldives pour éliminer la discrimination sexiste et lutter contre la violence à l’égard des femmes.

34.M. Salvioli s’interroge sur la compatibilité avec le Pacte de textes tels que la loi qui disposent que le témoignage d’une femme dans certaines affaires a deux fois moins de valeur que celui d’un homme et des dispositions qui criminalisent l’homosexualité. La délégation a invoqué les dispositions de la Constitution nationale pour justifier l’application de la charia mais le Comité n’est pas lié par les constitutions nationales car sa mission est de surveiller l’application de l’instrument international en vertu duquel il a été créé. Un État partie ne peut pas invoquer son droit interne pour justifier la non-application d’une règle de droit international. La délégation a indiqué que la loi relative à la succession, qui octroie à l’homme une part d’héritage double de celle de la femme, n’était plus appliquée dans la pratique; si tel est le cas, cette loi devrait être abolie afin que cette discrimination disparaisse aussi de la législation.

35.M. Rivas Posadademande si un citoyen maldivien qui se convertit à une autre religion que l’islam encourt des sanctions, comme la déchéance de la nationalité. Il demande s’il y a dans la jurisprudence des cas de sanctions portant sur les droits en matière de citoyenneté. Quoi qu’il en soit, M. Rivas Posada considère que ces dispositions portent atteinte à la liberté de religion et sont incompatibles avec l’objet et le but du Pacte.

36.La Présidente invite la délégation à répondre aux observations supplémentaires des membres.

37.M. Jameel Ahmed (Maldives) dit qu’il transmettra au Gouvernement les recommandations du Comité tendant à la création d’un organe chargé d’enquêter sur les allégations de torture, de préférence à caractère permanent. De nombreux crimes motivés par la haine ont été commis, notamment en 1997, dans les atolls les plus méridionaux des Maldives et, en 1998, lors d’une attaque de mercenaires des Tigres tamouls soutenus par des éléments de ces atolls.

38.Le budget de la Commission de l’intégrité de la police est soumis à l’approbation du Parlement en même temps que ceux du Ministère de l’intérieur et de la Police des Maldives. M. Jameel Ahmed se renseignera sur les raisons pour lesquelles la Commission de l’intégrité de la police recommande rarement l’ouverture de poursuites contre des personnes visées par les plaintes qu’elle reçoit. D’après son mandat la Commission de l’intégrité de la police est habilitée à examiner des plaintes dénonçant des mauvais traitements imputés à des membres des forces de l’ordre mais n’est pas compétente pour les incidents impliquant les forces de défense. Si le processus d’élaboration de la loi antiterrorisme et du projet de code pénal a pris de nombreuses années, c’est que les Maldives n’ont pas bénéficié de l’assistance technique dont elles avaient besoin.

39.Le système judiciaire et juridique des Maldives n’établit pas de séparation entre les différentes juridictions. Les affaires civiles et celles qui relèvent de la charia sont traitées par les mêmes juridictions. Les affaires familiales sont jugées par des juridictions distinctes.

40.M me Maumoon (Maldives) confirme que conformément au droit maldivien, il faut être musulman pour devenir membre de la Commission nationale des droits de l’homme. Toutefois, une modification de cette règle n’est pas exclue. La Constitution dispose que l’islam, et plus précisément l’islam sunnite, est la religion d’État. Cela ne pose pas problème car les citoyens maldiviens forment une communauté homogène. Les travailleurs migrants de confessions différentes ne cherchent pas à s’intégrer à la société maldivienne car ils restent temporairement sur le territoire. Quant aux touristes, ils ne se mêlent pas non plus à la société maldivienne car ils ne séjournent que sur certaines îles. Cela étant, les Maldives devront tôt ou tard tenir compte de l’évolution de leur composition démographique dans la législation.

41.Mme Maumoon approuve l’idée de créer une commission indépendante chargée d’enquêter sur les cas de torture mais pense que, dans le climat politique actuel, ce ne sera pas chose facile. Le Gouvernement est résolu à aller de l’avant mais son pouvoir d’action législatif est limité par le fait que c’est un gouvernement de coalition. L’examen par le Parlement des projets de loi contre la torture et de la loi antiterrorisme et du projet de code pénal a pris des années parce qu’après son arrivée au pouvoir, en 2008, le Président Nasheed n’a malheureusement pas fait preuve de la volonté politique nécessaire à l’accélération de ce processus ni, du reste, pris les mesures voulues pour renforcer la démocratie. La délégation transmettra au Gouvernement les remarques du Comité insistant sur la nécessité de faire voter ces textes dans les meilleurs délais.

42.Mme Maumoon, qui a participé à l’élaboration de la loi sur les violences dans la famille, menée en consultation avec de nombreuses parties prenantes, dit que les violences au foyer sont considérées comme une infraction pénale pouvant notamment emporter une peine d’emprisonnement. La délégation demandera des renseignements supplémentaires au sujet de cette loi et des campagnes de lutte contre la violence à l’égard des femmes. En vertu de l’article 10 de la loi de 1991 sur les droits des enfants il est interdit d’infliger aux enfants un châtiment, non adapté à leur âge, qui peut entraîner des dommages physiques ou psychologiques, ce qui manque certes de précision. Le Gouvernement sera engagé à étudier les moyens de renforcer les textes relatifs aux châtiments corporels.

43.La peine capitale est toujours en vigueur aux Maldives. Actuellement, un moratoire officieux sur les exécutions capitales est appliqué. La délégation a conscience du fait que la hausse de la criminalité est étroitement liée à l’augmentation de la toxicomanie chez les jeunes et que la priorité serait donc de résoudre ce problème, mais c’est aux parties prenantes nationales qu’il appartient de se prononcer sur la question de la peine de mort.

44.En ce qui concerne les réserves à l’article 18 du Pacte, elles reflètent le choix fait par le peuple maldivien de lier la citoyenneté maldivienne à la foi musulmane. En effet, la Constitution de 2008 a été rédigée par un Majlis spécial, représentatif de la population du pays. Bien que la religion musulmane soit l’un des piliers de l’identité du pays, aucun contrôle n’est exercé dans la pratique et les habitants des Maldives jouissent du droit à la liberté de religion. Aucun Maldivien n’a jamais dû renoncer à sa citoyenneté parce qu’il voulait renoncer à l’islam. Toutefois, il est vrai que les non-musulmans ne peuvent pas acquérir la nationalité maldivienne, ce qui crée des problèmes, notamment dans le cadre du mariage. L’homosexualité est interdite par la loi puisqu’elle est proscrite par la charia.

45.M. Jameel Ahmed (Maldives) dit que la Cour suprême a invoqué les dispositions du Pacte en 2010 et en 2011, à la suite de l’arrestation par le Président Nasheed d’hommes politiques et de députés. Les Maldives appliquent la charia mais les dispositions des instruments internationaux peuvent aussi être invoquées devant les tribunaux pour défendre les droits des citoyens. M. Jameel Ahmed appelle l’attention du Comité sur l’article 68 de la Constitution, selon lequel les juridictions nationales doivent promouvoir les valeurs qui sous-tendent une société démocratique, fondée sur la dignité humaine et la liberté et tenir compte des instruments internationaux auxquels les Maldives sont parties. S’il est vrai que certains articles de la Constitution subordonnent toutes les lois à la charia, il y a de nombreuses possibilités d’invoquer les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Les Maldives étudient les manières de mettre le droit islamique en harmonie avec les valeurs de la démocratie moderne tout en conservant les principaux traits du droit islamique car l’islam est la principale source de toutes les lois. En droit islamique, l’homosexualité est un délit. Les peines, y compris la flagellation, sont appliquées sans distinction entre les hommes et les femmes, et la délégation va s’enquérir des allégations selon lesquelles les femmes seraient davantage condamnées à être flagellées que les hommes. La religion d’État est le sunnisme chaféite et il est précisé à l’article 72 de la Constitution qu’il faut être sunnite pour être membre du Parlement.

46.Concernant la question de la prise en compte des témoignages de femmes dans les procès, les Maldives s’emploient à renforcer leur système judiciaire et à créer une société plus démocratique conformément à la Constitution de 2008 mais elles ne disposent malheureusement pas encore de véritables code de procédure pénale et code de procédure civile. Dans ce contexte, les règles d’administration de la preuve se résument à un document d’une page qui dispose que le droit islamique s’applique dans ce domaine et que les preuves indirectes sont admises dans certains cas. La future loi sur l’administration de la preuve apportera sans doute des éléments de réponse aux questions des membres du Comité. Il convient cependant de souligner qu’à l’heure actuelle, les témoignages des femmes n’ont moins de poids que ceux des hommes que dans de rares cas, notamment les affaires d’adultère et de fornication, tandis que leur témoignage prévaut par exemple dans les affaires touchant au bien-être des enfants.

47.Les Maldives comptent bien respecter leurs obligations internationales tout en préservant les caractéristiques propres de leur Constitution. La plupart des questions soulevées par le Comité sont tout à fait légitimes mais les Maldives sont un petit pays qui connaît des transformations radicales depuis quelques années et dont les moyens humains, les infrastructures et la législation doivent encore être renforcés.

48.La Présidente remercie la délégation pour ses réponses et invite les membres du Comité à poser des questions complémentaires concernant la deuxième partie de la liste des points à traiter (12 à 25).

49.M me Waterval demande quelles sont les mesures prises par le Gouvernement pour veiller à ce que la disposition constitutionnelle qui fixe la durée maximale de la garde à vue à vingt-quatre heures soit toujours respectée. Elle salue l’élaboration d’un projet de loi relatif à l’administration de la preuve ainsi que les progrès réalisés dans ce domaine en attendant son adoption et souhaiterait des exemples d’affaires dans lesquelles des éléments de preuve autres que des aveux ont été examinés. Elle souhaiterait des précisions sur le fonctionnement du nouveau centre de détention pour mineurs et voudrait savoir si les garçons y sont séparés des filles. En ce qui concerne la question de la discrimination religieuse, elle demande comment l’État partie entend concilier sa réserve à l’article 18 avec le respect d’autres articles du Pacte tels que les articles 2 et 27. Elle demande si les élèves qui le souhaitent peuvent être exemptés de l’enseignement obligatoire de l’islam dispensé dans les écoles.

50.M.  O ’ Flaherty prend note tout d’abord de la position exprimée par la délégation au sujet de la réserve à l’article 18 du Pacte mais souhaite faire part de la vive préoccupation du Comité. Cette réserve n’est pas conforme aux critères de validité énoncés dans l’Observation générale no 22 du Comité relative au droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Telle qu’elle est formulée, la réserve semble viser non seulement le paragraphe 3 mais le paragraphe 1 de l’article 18, qui consacre un des droits auxquels il ne peut être dérogé énoncés à l’article 4: le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Si ce n’est pas l’effet recherché, le Gouvernement devrait au minimum envisager de faire une déclaration expliquant aux autres États parties et au Comité qu’il n’a aucune intention de faire jouer cette réserve pour restreindre le droit intangible énoncé au paragraphe 1 de l’article 18. Cependant, la réserve devrait être retirée car le simple fait d’indiquer que «l’application des principes énumérés à l’article 18 du Pacte se fera sans préjudice de la Constitution de la République des Maldives» ne suffit pas pour garantir le respect de la règle selon laquelle les réserves doivent être spécifiques et transparentes et doivent donner des indications claires aux titulaires des droits quant aux incidences qu’elles pourraient avoir sur leur vie quotidienne.

51.En ce qui concerne le paragraphe 15 de la liste des points à traiter, M. O’Flaherty souhaiterait des renseignements concrets supplémentaires sur les mesures visant à améliorer les conditions de détention dans le pays. En particulier, il invite la délégation à commenter les allégations selon lesquelles la gestion de la population carcérale se ferait aux dépens des droits des détenus et la mise à l’isolement serait pratiquée de manière excessive. Il souhaiterait aussi des précisions sur le contenu du projet de loi sur la prison et la libération conditionnelle et sur son calendrier d’adoption. De même, il serait utile d’avoir des informations plus détaillées sur le contenu du projet de loi relatif à l’aide juridictionnelle, l’incidence que le texte aura sur le respect de l’article 14 du Pacte et son calendrier d’adoption.

52.M. O’Flaherty remercie la délégation pour ses réponses franches concernant le système judiciaire des Maldives et se demande s’il n’y a pas de contradiction entre l’affirmation faite au paragraphe 103 des réponses écrites selon laquelle le Gouvernement appuiera le plan stratégique élaboré par la Commission des services judiciaires et les critiques formulées à l’égard de cette même institution aux paragraphes 102 et 104. Il souhaite savoir quelles mesures concrètes sont prévues pour réformer la Commission. Il aimerait également en savoir plus sur les interactions entre la Commission des services judiciaires et le juge Abdulla Mohamed. En particulier, il demande s’il est vrai que ce dernier a été condamné pour malversation et que la Commission a refusé de prononcer une quelconque sanction.

53.La délégation est invitée à commenter les informations selon lesquelles six des sept juges qui composent la Cour suprême ont pour seule qualification d’être des spécialistes de la charia. Si tel est le cas, il faudrait savoir quelles mesures sont prévues pour veiller à ce que les magistrats de la Cour suprême aient des domaines de compétence plus divers. L’une des solutions au manque de candidats qualifiés pourrait être de faire appel à des magistrats étrangers, comme le font d’autres pays dans la même situation. M. O’Flaherty s’interroge aussi sur l’absence de femmes dans les juridictions supérieures et demande quelles mesures sont envisagées pour remédier à cette situation. Enfin, il note que la Commission internationale de juristes a publié un rapport très intéressant sur l’état du système judiciaire des Maldives et demande si le Gouvernement compte s’en inspirer.

54.En ce qui concerne le paragraphe 20 de la liste des points à traiter, la question tout à fait essentielle de la liberté religieuse a déjà été abordée sous de nombreux angles au cours du débat. Toute information supplémentaire sera néanmoins la bienvenue. Enfin, M. O’Flaherty relève que des incidents récents d’incitation à la haine religieuse seraient restés impunis et invite l’État partie à réaffirmer son engagement à appliquer l’article 20 du Pacte.

55.M.  Thelin remercie la délégation pour ses réponses constructives au paragraphe 18 mais note que le rapport parallèle de la Commission des droits de l’homme des Maldives dresse un tableau bien plus sombre de la situation concernant la traite des êtres humains et le travail forcé. La présence d’une centaine de milliers de migrants sans papiers sur le territoire maldivien constitue de toute évidence un problème majeur. Il s’étonne que le Gouvernement ait élaboré un plan d’action alors qu’il affirme ne pas disposer de données de référence, données qui figurent par ailleurs dans le rapport de la Commission. Il souhaite savoir quand le projet de loi visant à interdire toutes les formes de traite des personnes devrait être adopté. Des éclaircissements seraient aussi les bienvenus sur les conditions d’accueil des victimes de la traite placées en détention à des fins de protection. M. Thelin salue la volonté des Maldives de ratifier le Protocole de Palerme et note que le Parlement devait donner son accord avant la mi-2012; qu’en est-il?

56.En ce qui concerne le paragraphe 25 de la liste des points à traiter, M. Thelin espère que la société civile participera à l’élaboration du prochain rapport périodique de l’État partie, afin d’éviter les divergences entre les informations fournies par le Gouvernement et celles communiquées par les ONG. La délégation est invitée à indiquer les mesures qu’elle compte prendre pour diffuser une information concernant la présentation du rapport initial de l’État partie et les observations finales du Comité. À ce sujet, M. Thelin suggère de cibler en particulier les membres de la profession judiciaire et les dirigeants de la société civile.

57.M.  Salvioli signale que le rapport de la Commission des droits de l’homme des Maldives fait état de 15 cas d’atteintes graves à la liberté de la presse survenus au cours des deux dernières années et aimerait savoir si ces faits ont fait l’objet d’enquêtes, de poursuites et de condamnations, en particulier lorsque les auteurs présumés étaient des membres des forces de l’ordre. À ce sujet, il attire l’attention de la délégation sur l’Observation générale no 34 sur la liberté d’opinion et la liberté d’expression.

58.M.  Ben Achour dit que le droit à la liberté de religion inscrit dans le Pacte va au-delà de la liberté d’exercice, que respecte généralement la loi islamique. Comme il est précisé dans les paragraphes 2 et 5 de l’Observation générale no 22 du Comité, l’article 18 du Pacte protège les convictions théistes, non théistes et athées, ainsi que le droit de ne professer aucune religion ou conviction, et la liberté d’avoir ou adopter une religion ou une conviction implique nécessairement la liberté de changer de religion ou de conviction. La liberté de religion ne signifie donc pas seulement reconnaître aux autres le droit de pratiquer leur religion mais aussi reconnaître aux adeptes de sa propre religion le droit d’en changer. M. Ben Achour se demande comment cette interprétation du Pacte peut être conciliée avec la Constitution de la République des Maldives, qui impose à tous les citoyens maldiviens d’être de confession musulmane.

59.M.  Sarsembayev note que l’article 32 de la Constitution consacre le droit à la liberté de réunion pacifique sans autorisation préalable de l’État. Il demande si ce droit s’applique aux manifestations et aux défilés et, si tel est le cas, souhaite connaître les raisons pour lesquelles certaines manifestations auraient été dispersées et certaines personnes n’auraient pas été autorisées à y participer. Il relève que l’article 27 de la Constitution assujettit la liberté d’expression au respect des préceptes de l’islam et demande des éclaircissements à ce sujet. Il souhaiterait aussi des précisions sur le nombre de partis politiques en activité dans le pays et sur les critères qui s’appliquent à la création d’un parti.

60.M.  Fathalla, évoquant l’alinéa d du paragraphe 9 de la Constitution des Maldives qui dispose qu’une personne non musulmane ne peut pas acquérir la citoyenneté maldivienne, demande comment cette disposition s’appliquerait concrètement dans le cas d’une famille composée d’un citoyen maldivien, de son épouse étrangère non musulmane et de leurs enfants. À son avis, cette disposition est contraire au Pacte et va à l’encontre du rôle central que joue la famille dans la religion musulmane.

61.M.  Bouzid dit que selon certaines informations les jugements prononcés contre des membres des pouvoirs exécutif et législatif ne seraient pas toujours exécutés. Si tel est le cas, la délégation est invitée à indiquer les mesures que compte prendre le Gouvernement pour que la loi s’applique à tous sans discrimination.

62.Sir Nigel Rodley demande des précisions sur l’importance du rôle de l’islam dans la législation maldivienne. La traduction anglaise de la Constitution dont il dispose indique, à l’alinéa a de l’article 10, que l’islam est l’un des fondements de toutes les lois des Maldives, et non pas le principal fondement. Il se demande donc ce qu’il en est exactement.

63.La Présidente remercie les membres du Comité pour leurs questions et dit que la délégation y répondra à la prochaine séance.

La séance est levée à 13  heures.