Soixante et onzième session

Compte rendu analytique de la 1907e séance

Tenue au Siège, à New York, le vendredi 23 mars 2001, à 15 heures

Président :M. Bhagwati

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques de la République dominicaine (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiquesde la République dominicaine (suite) (CCPR/C/DOM/ 99/3 et CCPR/C/71/L/DOM)

Liste des questions (suite) (CCPR/C/71/L/DOM)

1.Sur invitation du Président, les membres de la délégation de la République dominicaine reprennent place à la table du Comité.

2.Le Président invite les membres du Comité à reprendre l’examen des réponses de la délégation de la République dominicaine aux questions relatives aux articles 7, 9, 10 et 14.

3.M. Henkin appuie les préoccupations soulevées par les précédents intervenants et se demande quelles sont les mesures qui ont été prises en vue de garantir que les dispositions du Pacte sont entièrement appliquées dans le système juridique de l’État partie. En outre, il sollicite davantage d’informations sur la durée des procès et le chiffre actuel de la population carcérale ainsi que les infractions commises par les détenus et, dans ce contexte, il veut savoir s’il existe un système de défenseur public et la manière dont l’assistance judiciaire est apportée aux prévenus. Il est préoccupé également par rôle de la police et de l’armée et se demande si ces deux corps, en particulier l’armée, n’a pas une trop forte influence sur la vie civile et politique du pays.

4.En relevant les expulsions répétées de personnes par la République dominicaine, qu’il s’agisse de Haïtiens ou de ressortissants d’autres pays, il s’interroge sur la procédure d’expulsion ainsi que sur les motifs de déportation d’une personne. Dans les cas de refoulement, l’État hôte a l’obligation d’assurer que toute personne rapatriée n’est pas soumise à la torture dans son pays d’origine et de suivre le statut de toute personne expulsée ou extradée en vue de garantir qu’elle n’est pas soumise à un mauvais traitement.

5.Sir Nigel Rodley regrette que le précédent rapport fournisse peu d’informations nouvelles et, comme le rapport d’il y’a huit ans, il est largement insuffisant et incomplet. Il insiste sur le fait qu’un rapport doit contribuer à faire avancer le dialogue entre le Comité et l’État partie afin que le Comité apporte sa contribution constructive. Cependant, ce rapport ignore pratiquement les précédents échanges entre l’État partie et le Comité.

6.Quant au système judiciaire spécifique à la police et l’armée, la mention du changement de cadre de cette justice constitue une réponse plutôt dérisoire aux préoccupations de la communauté internationale. Il est important que le point de vue du Gouvernement quant à cette anomalie institutionnelle soit clarifié. Bien que des policiers aient été condamnés pour certaines infractions par ce système judiciaire spécial, notamment l’usage des armes à feu, il est normal qu’une telle institution rappelle souvent ses membres à l’ordre. Toutefois, dans les affaires où les comportements criminels auraient bénéficié de l’aval de l’institution, il est essentiel de garantir que les poursuites, la condamnation et le prononcé de la décision sont appropriés à l’infraction commise.

7.Il existe des signes d’une probable avancée sur les articles 7 et 10. En juin 2000, la Commission d’appui à la réforme judiciaire a soulevé la question du mauvais traitement des adolescents par la police et l’armée. Le procureur a ordonné la suspension des policiers incriminés de leurs fonctions pendant l’enquête, ce qui n’a pas été fait. L’État rapporteur doit indiquer l’état d’avancement de ladite enquête. En mai 2000, le tribunal de la police a mené des enquêtes sur le tabassage de 12 détenus à Santiago et le chef de la police a annoncé la création d’une commission d’enquête sur les accusations de mauvais traitement des personnes en attente de jugement. Il se demande quelles ont été les résultats de ces enquêtes.

8.En dépit de la création d’une institution dédiée aux délinquants juvéniles, les informations en sa possession prouvent qu’elle est occupée par des détenus adultes, et les délinquants juvéniles continuent d’être détenus dans de mauvaises conditions, confinés pendant des mois, et parfois, dans des cellules et sans encadrement adéquat ou de programmes de réhabilitation ou de soins de santé. Toujours dans le cadre de la réforme du système carcéral, il se préoccupe du fait que le personnel pénitentiaire est vraisemblablement constitué de militaires et de policiers, qui n’ont pas suivi une formation spécialisée pour travailler comme gardiens de prison, et il veut connaître les mesures prises pour remédier à cette situation.

9.M. Vella revient sur les observations des autres membres du Comité quant au caractère insatisfaisant du rapport présenté par l’État partie en ce qu’il ne contient assez de données factuelles leur permettant de bien faire leur travail convenablement. Il s’alarme du nombre d’usages que la police a fait des armes à feu en un temps relativement court et se demande pourquoi les policiers ne sont pas jugés par des juridictions de droit commun plutôt que les tribunaux spéciaux de la police. En ce qui concerne ces juridictions, l’État rapporteur doit fournir des informations sur leur composition, les critères de nomination de leurs membres, leurs règles de procédure et de réelles garanties leur assurant une indépendance et une impartialité véritables. Il insiste sur le fait que même lorsqu’un policier tue une personne dans l’exercice de ses fonctions, il doit être jugé devant les juridictions de droit commun, en vue de garantir l’indépendance, l’impartialité et la transparence des juges, et il espère que l’État partie va tenir compte des observations du Comité sur la question.

10.M. García Lara (République dominicaine), parlant de l’incident dans lequel un policier a été tué alors qu’il tentait d’arrêter quatre criminels, qui, plus tard, ont été tués à leur tour, déclare que les officiers de police responsables de leur décès ont été jugés par le tribunal de première instance de la police et condamnés à deux ans d’emprisonnement. Toutefois, en appel, toujours devant une juridiction de la police, ils ont plaidé la légitime défense et ont été acquittés. Néanmoins, le Procureur général s’est pourvu en cassation contre cette décision auprès de la Cour suprême. Quant à l’affaire dans laquelle des Haïtiens ont été tués par des militaires, il déclare que ces militaires sont actuellement jugés par un tribunal mixte police/armée.

11.Il relève les préoccupations soulevées par le Comité quant à l’existence d’un système judiciaire spécial pour la police et l’armée, un problème qui a également été soulevé par les juristes et les organisations non gouvernementales de la République dominicaine qui ont demandé à la Cour suprême de déclarer l’inconstitutionnalité de ces tribunaux. Cette affaire est toujours pendante devant cette juridiction. Néanmoins, il insiste sur le fait que le Code de justice militaire et les tribunaux spéciaux de la police et de l’armée émanent de la loi et sont en conformité avec la Constitution et qu’ils sont compétents pour connaître des affaires impliquant des policiers et des militaires accusés d’infractions pénales. Il existe également des juridictions spéciales dans les domaines tels que la circulation routière, les problèmes fonciers et les affaires impliquant des mineurs.

12.Sir Nigel Rodley, en vue de clarifier les préoccupations exprimées par les membres du Comité, déclare que le Comité n’est pas intéressé par l’analyse juridique des lois et de la Constitution de l’État partie en tant que probable justification de l’existence des tribunaux spéciaux de la police et de l’armée, mais plutôt par une analyse de la nécessité sociale et politique de ces juridictions.

13.M. García Lara (République dominicaine) déclare que les tribunaux spéciaux de la police et de l’armée ont également été critiqués en raison de la nomination de leurs membres par l’Exécutif et non la Cour suprême, mais une fois de plus, il insiste sur le fait que les nominations auprès de ces juridictions sont conformes à la loi. Ce n’est pas un privilège pour les policiers et les militaires d’être jugés par des tribunaux spéciaux, puisqu’il est tout simplement normal qu’ils soient jugés par leurs pairs, qui sont non seulement des juristes, mais bénéficient également d’une expérience directe de la criminalité et des criminels. Les policiers et les militaires ne sont pas des citoyens ordinaires, ils doivent renoncer à beaucoup de leurs libertés, telles que le droit de voyager, la liberté d’expression et d’opinion politique, etc., en vue de se tenir prêts à se sacrifier en vue de protéger leur pays et leurs concitoyens contre les criminels, qui constituent souvent en fait la plus grande menace qui pèse sur les libertés des citoyens ordinaires.

14.C’est un scandale que de suggérer que les policiers et les militaires soient soumis à l’humiliation d’être jugés par les tribunaux civils comme d’ordinaires criminels. Les efforts visant à transformer la police en un corps modèle risque de miner son efficacité et de laisser la société sans défenses. Par ailleurs, il n’est pas d’accord que les condamnations prononcées par ces juridictions spéciales ont tendance à être légères; beaucoup de lourdes condamnations ont été prononcées. En République dominicaine, les policiers sont juridiquement des civils placés sous l’autorité du Secrétariat d’État à l’Intérieur et à la police. Toutefois, récemment encore, la police était placée sous l’autorité du Secrétaire d’État aux forces armées et conservait donc une structure et une discipline de type militaire. Néanmoins, une réforme visant à redéfinir le statut des policiers est à l’étude.

15.M me Abreu de Polanco (République dominicaine), répondant à une question posée dans le cadre du troisième rapport de la République dominicaine, annonce que le décret no 223 (91) a été abrogé.

16.M. Cadena Moquete (République dominicaine) déclare qu’il existe actuellement 31 centres de détention en République dominicaine, puisque la prison de San Cristóbal a été détruite l’année précédente par une explosion. Au 16 mars 2001, environ 15 300 personnes sont incarcérées dans ces centres, dont 63 % en attente de jugement et 37 % de condamnés. La détention préventive est ordonnée pour les individus accusés de graves infractions pénales. Elle n’a pas de durée déterminée et s’étend jusqu’au prononcé d’une décision définitive et couvre les deux étapes de la procédure pénale, notamment l’enquête qui peut durer environ deux mois et la phase de jugement dont la durée est fonction de la complexité de l’affaire. Cette seconde phase peut être prolongée en cas d’appel, puisque la décision qui est considérée comme définitive est celle découlant de la procédure d’appel.

17.Le nombre élevé de détenus en attente de jugement s’explique également par le grand nombre d’affaires à traiter et l’insuffisance des tribunaux. Toutefois, la loi no 50 est entrée récemment en vigueur, et dans le but de donner un coup d’accélérateur à l’administration de la justice et réduire le nombre de détenus, elle multiplie par deux le nombre de juridictions pénales dans plusieurs ressorts judiciaires. Le nombre de juridictions d’instance et de juridictions d’appel est également en cours d’augmentation et la Cour suprême procède actuellement à la sélection des juges pour ces nouvelles juridictions.

18.Des progrès ont été accomplis dans la réduction du nombre de détenus en attente de jugement. En 1997, 81 % des prisonniers étaient en attente de jugement, et 19 % étaient des condamnés; aujourd’hui, les proportions sont respectivement de 73 % et 27 %. Diverses mesures ont été prises en vue d’améliorer les conditions de détention, notamment : l’augmentation des moyens de transport rapide et convenable des détenus entre les prisons et les tribunaux; l’amélioration des conditions sanitaires à travers la fourniture de soins de santé et de médicaments, un meilleur répertoire des prisonniers bientôt informatisé avec toutes les données d’identification et les antécédents.

19.Enfin, le Gouvernement a usé des pouvoirs que lui confère la Constitution pour gracier plus de 500 prisonniers et la capacité d’accueil est en cours d’augmentation en vue de mettre fin à la surpopulation carcérale. Des mesures ont été prises en vue de séparer les prisonniers selon l’âge et le sexe. Il existe deux prisons pour mineurs uniquement, dont une à San Pedro de Marcoris et la prison des mineurs de San Cristóbal. Bien que les femmes soient détenues dans des établissements mixtes, elles le sont actuellement totalement à l’écart des hommes et à plein temps.

20.Le pays s’évertue également à apporter des innovations à la gestion des prisons par le recrutement qui reçoivent une formation spécifique afin de remplacer les policiers et les militaires dans la gestion des prisons et de la prise en charge des détenus. En général, la torture a été éradiquée des prisons et des commissariats de police où elle a été parfois utilisée lors des interrogatoires. Un magistrat civil du Bureau du Procureur de la République (Ministère public), assure la permanence 24 heures sur 24 dans chaque grand commissariat. Une personne ne peut être gardée à vue pendant plus de 48 heures sans être présentée à un juge en vue d’être formellement inculpée.

21.Pendant de nombreuses années, le Comité a exprimé son inquiétude quant à l’enquête sur l’assassinat du journaliste Orlando Martínez. Il y’a deux ans, les présumés assassins ont été arrêtés, jugés et condamnés à de très lourdes peines. Toutefois, appel a été interjeté contre ces décisions. En ce qui concerne Narciso González, les personnes suspectées de son assassinat ont été interrogées, notamment des responsables de la police et de l’armée. Deux personnes ont été arrêtées puis libérées, selon le juge, suite à une requête en habeas corpus pour insuffisance de preuves. De toute évidence, l’État n’est en rien responsable des décisions prises par le pouvoir judiciaire, en raison du principe de la séparation des pouvoirs.

22.M. Castaños Guzmán (République dominicaine) déclare qu’en République dominicaine une loi ne saurait avoir préséance sur le Pacte, simplement parce qu’il s’agit d’un traité international. La Constitution est la loi suprême du pays, suivie des traités internationaux, des lois et, enfin, des décrets et règlements nationaux. Le Pacte ne peut pas être déclaré inconstitutionnel puisque plusieurs de ses dispositions ont été intégrées à l’article 8 de la Constitution. Les membres du Comité se demandent si les étrangers sont égaux en droits aux Dominicains. L’article 11 du Code civil stipule que tous les étrangers sont égaux en droits lors de leur séjour en territoire de la République dominicaine, tandis que l’article 13 prévoit que tous les étrangers en séjour régulier dans le pays jouissent des mêmes droits civiques que les nationaux. Quant à l’applicabilité du Pacte, pour le cas spécifique du Dr. Ramón Martínez P., les recommandations du Comité ont été intégralement mises en œuvre.

La protection des enfants (art.  4) du Pacte

23.Le Président procède à lecture des questions relatives à l’article 24, notamment les informations sur la situation des enfants de la rue, et particulièrement, l’exploitation sexuelle commerciale des enfants et les mesures visant à les protéger; la situation de fait et de droit des enfants d’immigrés haïtiens nés en République dominicaine.

24.M. Cadena Moquete (République dominicaine) répond que la loi no 14 a créé des tribunaux pour enfants et adolescents. Ils sont compétents pour statuer sur toutes les affaires impliquant un préjudice contre des mineurs; elles sont totalement opérationnelles à l’heure actuelle dans les principaux ressorts judiciaires. Bien qu’il ne dispose pas de statistiques accessibles dans l’immédiat, plusieurs hommes ont déjà été jugés et condamnés à de lourdes peines par ces tribunaux. À titre d’illustration, la semaine dernière, un homme a été condamné à 20 ans d’emprisonnement pour le viol d’une petite fille de 12 ans. Le Bureau du Procureur Général organise régulièrement des raids policiers dans les centres touristiques en vue de s’assurer que les mineurs n’y sont pas exploités sexuellement. Plusieurs étrangers ayant géré des centres employant des mineurs ont été condamnés et, après avoir purgé leur peine, ils ont été expulsés du pays conformément à la loi no 91 sur l’immigration.

25.M. Castaños Guzmán (République dominicaine) déclare que, conformément à l’article 11 de la Constitution, tous les enfants nés sur le territoire de la République dominicaine acquièrent la nationalité dominicaine, à moins que leurs parents soient en transit dans le pays au moment de leur naissance. L’article 93 de la loi de 1995 sur l’immigration définit les étrangers comme étant : les visiteurs, les personnes en transit, celles présentes à titre temporaire sur le territoire national pour des raisons professionnelles, ainsi que les travailleurs saisonniers et leurs familles.

26.La République dominicaine et Haïti ont signé des accords sur les conditions de recrutement des « journaliers » (brazeros) et des travailleurs agricoles. Toutefois, la rivière qui sert de frontière entre les deux pays peut être franchie à pied, et beaucoup de Haïtiens entrent clandestinement dans le pays comme résidants permanents ou temporaires. En conséquence, certains Haïtiens séjournent légalement en République dominicaine – les immigrés haïtiens légaux – et, en principe, leurs enfants acquièrent la nationalité dominicaine en raison du droit du sol. Toutefois, pour ceux qui sont en transit ou en séjour irrégulier dans le pays, leurs enfants ne peuvent obtenir la nationalité dominicaine, mais ils sont évidemment de nationalité haïtienne, puisque l’article 11 de la Constitution haïtienne stipule que tout enfant né de parents haïtiens est de nationalité haïtienne. Le système d’enregistrement de naissances a été amélioré récemment, et actuellement les parents doivent présenter leur passeport ou leur carte d’identité lors de l’enregistrement de la naissance d’un enfant.

La liberté de circulation, les garanties d’une application régulière de la loi en cas d’expulsion, l’interdiction de toute discrimination (art. 12, 13 et 26 du Pacte)

27.Le Président procède à la lecture des questions relatives aux articles 12, 13 et 26, à savoir, les mesures prises depuis le précédent rapport face à la détérioration des conditions de vie et de travail des travailleurs haïtiens ainsi que l’arrêt de la complaisance envers les restrictions de leur liberté de circulation; les chiffres officiels ou les estimations du nombre de travailleurs haïtiens présents dans le pays à l’heure actuelle et détenteurs de papiers, ainsi que les mesures prises en vue de la régularisation des haïtiens sans papiers; les informations relatives aux expulsions de masse ainsi que les mesures prises en vue d’y mettre un terme ou de les empêcher; les règles qui régissent l’expulsion des étrangers et des Haïtiens en particulier, ainsi que la conformité de ces règles avec le Pacte.

28.M. Nuñez Vargas (République dominicaine) déclare que selon les estimations des services d’immigration, quelques 340 000 Haïtiens vivent dans le pays, de simples travailleurs journaliers aux résidents légaux. Dont 35 % de résidents légaux jouissant de la liberté de circulation. Le Bureau des affaires haïtiennes, dans le but de régulariser la situation des autres, a délivré 1 600 visas de six mois et une variété d’autres visas de plus longue durée à quelque 40 000 autres Haïtiens. Il est, par conséquent clair que la République dominicaine est un pays ouvert à toutes les nationalités sans discrimination.

29.Quant aux expulsions massives, que les Services d’immigration qualifient de rapatriement d’immigrants illégaux, elles sont régies par la Règle d’immigration no 278. Les personnes qui ont été expulsées en direction de leurs pays d’origine étaient des étrangers sans papiers qui vagabondaient en bandes à travers le pays comme mendiants. Les étrangers qui travaillent, même dans le secteur informel, ont eu l’opportunité de régulariser leur situation. D’autres, tels que les travailleurs immigrés sous contrats, ont bénéficié de mesures spéciales de facilitation, tels que des visas de six mois, et des papiers d’identité temporaires. L’expulsion des étrangers est régie par les dispositions visées dans le rapport (paragraphes 48 et 85).

30.Les grandes lignes de l’action que le Gouvernement compte entreprendre en vue de créer des conditions plus humaines dans les plantations de canne à sucre et les communautés vivant à leur périphérie ont été présentées dans une allocution du nouveau Président le 5 février 2001. Il y promet la construction suffisante d’habitations à loyer modéré, l’ouverture des centres de loisirs ou ce qui en tient lieu, ainsi que l’amélioration des soins de santé, l’éducation, les moyens de transport, l’approvisionnement en eau et en électricité ainsi que d’autres services essentiels. Les ouvriers des plantations de canne à sucre, dont beaucoup, Dominicains et Haïtiens, constituent la couche la plus démunie de la société. Et le Président a annoncé un plan de lutte contre la pauvreté orienté vers ces couches sociales, qui prévoit d’accorder la priorité à l’environnement, les soins de santé et la nutrition de la famille, en collaboration avec les organisations communautaires, les églises et d’autres institutions publiques.

31.Le Gouvernement envisage de déployer des efforts en vue de garantir le respect des lois sociales, ainsi que des lois sur l’immigration et sur la naturalisation. En outre, le Conseil national du sucre a annoncé la réalisation de projets économiques, sociaux et infrastructurels visant à développer le secteur. Toutes ces actions devraient avoir un impact immédiat sur la vie des couches sociales les plus défavorisées en République dominicaine. Les Règles d’immigration sont en conformité avec le Pacte et s’appliquent à tous les immigrés – qu’ils soient en situation régulière ou non - en conflit avec les lois. Aucun immigré en règle avec la loi ne peut être expulsé.

Vulgarisation du Pacte

32.Le Président procède à la lecture des questions relatives à la vulgarisation du Pacte, à savoir, les programmes de formation et de sensibilisation des autorités publiques, surtout des juges, des avocats et des policiers sur le Pacte; les mesures prises en vue de la vulgarisation des rapports périodiques et leur examen par le Comité, et en particulier, ses observations finales.

33.M me Abreu de Polanco (République dominicaine) déclare que le Conseil national de la magistrature a créé l’École nationale de la magistrature qui intègre les normes de droits de l’homme dans l’enseignement de toutes ses matières. L’Institut des droits de l’homme des forces armées, créé en août 2000, assure la formation des policiers et des militaires sur la question. De surcroît, le ministère des Affaires étrangères a publié l’intégrale des textes de tous les instruments régionaux et internationaux des droits de l’homme et de la législation nationale sur les droits de l’homme, qui a été distribuée auprès des écoles et des universités du pays en vue de promouvoir la sensibilisation sur la question.

34.Le Gouvernement collabore avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et l’Organisation des Nations pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) dans les projets sur le terrain en vue de promouvoir et protéger les droits de l’homme. Les nombreuses organisations non gouvernementales qui travaillent sur le terrain sont soutenues. Le Gouvernement a reçu la visite des représentants des organismes du Traité des droits de l’homme et en 2000, il a organisé, sous les auspices du Haut commissariat des Nations Unies pour les droits de l’homme, un séminaire sur la préparation des rapports périodiques, avec la participation des autorités concernées et de nombreuses organisations non gouvernementales. Elle peut, en conséquence, assurer le Comité que le prochain rapport sera bien préparé. La composition de la délégation est une indication que toutes les institutions publiques travaillent en synergie et coopèrent avec les organisations non gouvernementales dans la vulgarisation des rapports périodiques.

35.M me Chanet, faisant état de sa double déception en raison l’inconsistance du rapport et l’ignorance totale par le Gouvernement des observations finales du Comité sur le précédent rapport, fait remarquer que l’application des nouvelles dispositions constitutionnelles sur la garde à vue ne ressort pas clairement dudit rapport ainsi que les cas dans lesquels elles pouvaient être appliquées. Il semble qu’il y’ait un déphasage entre les garanties offertes et les solutions réellement disponibles. En tous cas, les articles 8 et suivants de la Constitution ne respectent pas intégralement le Pacte.

36.Le rapport fait peu de cas du très grave problème de la situation des Haïtiens en République dominicaine qui semble s’être plutôt aggravée récemment et qui implique des violations de plusieurs articles du Pacte, notamment l’article 8 qui proscrit le travail forcé et l’article 16 sur la reconnaissance de la dignité inhérente à tout être humain. Il est allégué que les Haïtiens sont recrutés de force, et même kidnappés, par les milices en vue de travailler dans les plantations de canne à sucre où les conditions de travail sont déplorables. Le chiffre avancé par la délégation – 340 000 – ne représenterait que la moitié du nombre réel de Haïtiens présents en République dominicaine.

37.Les rapports indiquent que seulement 5 % des Haïtiens sont en situation régulière, sans indiquer si le décret de 1990 qui autorise leur régularisation est appliqué. Beaucoup demeurent susceptibles d’être expulsés; et, en réalité, il semble que le Gouvernement procède à des expulsions massives de Haïtiens, et tout récemment encore, en décembre 2000, à travers une opération sur l’ensemble du territoire au cours de laquelle plusieurs milliers ont été rapatriés en violation de la procédure légale. Elle aimerait que les procédures d’expulsion soient clarifiées pour ce qui est des autorités chargées de leur gestion, de la prise des décisions, des voies de recours prévues et la fréquence de l’usage de ces recours, du nombre de Haïtiens expulsés l’année dernière.

38.M. Scheinin aimerait savoir si le chiffre de 250 000 Haïtiens enregistrés comme immigrés (paragraphe 8 du rapport) inclut à la fois les personnes naturalisées ou non, et le nombre de personnes non naturalisées. Le Gouvernement prétend qu’il n’existe pas de minorités linguistiques, religieuses ou ethniques, bien que les Haïtiens constituent, à coup sûr, une minorité linguistique et ethnique, voire deux minorités séparées composées de personnes naturalisées et de personnes non naturalisées. Le Gouvernement prétend, par ailleurs, qu’aucun type de discrimination n’est pratiqué en République dominicaine. Il aimerait que la délégation réagisse aux allégations de discrimination fondée sur l’ethnicité et sur la couleur à l’égard des Haïtiens, ainsi qu’aux allégations selon lesquelles les Haïtiens sont déportés simplement en raison de la couleur de leur peau. Le Gouvernement conteste-t-il les accusations selon lesquelles des expulsions de masse ont été organisées?

39.L’article 13 du Pacte définit les procédures légales d’expulsion, notamment les décisions prises par les deux autorités indépendantes, avec la possibilité d’user des voies de recours. Il aimerait savoir si la République dominicaine respecte ces procédures, ou si elle se contente de rassembler les Haïtiens et de les rapatrier, ce qui pourrait revenir à une expulsion de masse. De plus, le Gouvernement peut-il garantir au Comité que les personnes naturalisées ne risquent pas d’être déportées en Haïti? Pour ce qui est de la protection des enfants haïtiens nés en République dominicaine, il serait intéressant de savoir pendant combien de temps les ressortissants peuvent être considérés comme étant en transit dans le pays, et s’il existe des adultes qui y ont passé toute leur vie et sont toujours considérés comme des non ressortissants au motif que leurs parents voire leur grands-parents ont été en transit.

40.M me Medina Quiroga déclare que des informations plus claires doivent être fournies sur la détention et l’invocation de l’habeas corpus (par. 78 du rapport). Davantage d’informations sont également requises sur la situation des mineurs, en général, surtout les enfants de la rue. Référence a été faite au Code des mineurs, mais aucune disposition pertinente n’a été citée. Elle s’interroge aussi sur le statut des étrangers non naturalisés, et si ce statut peut être hérité de génération en génération; et si les enfants de personnes ayant ce statut reçoivent une éducation et des soins de santé. Elle souscrit aux observations de Mme Chanet sur la déportation en relevant que les extraits du discours du Président qui viennent juste d’être lus promettent un effort en vue de l’application des lois, surtout la législation du travail, ce qui laisse présumer qu’elles ne le sont pas à l’heure actuelle.

41.En faisant remarquer que la liberté d’expression inclut le droit à l’information auprès de sources officielles, une chose vraisemblablement difficile à obtenir en République dominicaine, elle demande la clarification des règles qui régissent l’accès à ce type d’informations, surtout en ce qui concerne les procédures devant les tribunaux de la police et les procédures contre les autorités publiques. Il serait également intéressant de savoir si la diffamation écrite et les insultes à l’égard de ces autorités constituent une infraction à la loi pénale. Le Comité vient d’être informé que les policiers ne jouissent pas de la liberté de culte et du droit de vote, toutes choses qui constituent de véritables violations du Pacte; cependant, aucune de ces restrictions ne justifie la mise sur pied de tribunaux spéciaux pour la police. Il serait utile que les raisons de leur création soient mieux élucidées.

42.M. Yalden déclare n’avoir reçu aucune réponse à ses propres questions lors de la précédente séance sur le Médiateur, le statut de la femme en République dominicaine, ou les agences indépendantes de suivi qui surveillent le travail de la police et des autorités publiques. Il existe de gros écarts, de l’ordre de 250 000 à des millions, entre les chiffres produits par la délégation et ceux des sources indépendantes sur le nombre de Haïtiens vivant en République dominicaine. Toutefois, quel que soit leur nombre, il n’est pas d’accord avec l’argument du rapport selon lequel il n’y a pas de discrimination en République dominicaine: il existe des preuves suffisantes que l’article 26 du Pacte n’est pas respecté, au vu des mauvaises conditions de vie et de l’expulsion massive des Haïtiens, ainsi que des restrictions à leur liberté de circulation. Tout de même, il ne saurait admettre qu’il n’existe pas de minorités en République dominicaine, au sens de l’article 27 du Pacte et à l’observation générale no 23 du Comité, paragraphes 4 et 5. En effet, les Haïtiens constituent une minorité et la République dominicaine, par le traitement qu’il leur accorde, viole l’article 27.

43.M. Ando, parlant du travail des enfants, demande à la délégation de faire un rapprochement entre l’affirmation faite au paragraphe 106 du rapport selon laquelle, il est interdit aux enfants âgés de moins de 14 ans de travailler, avec la mention au paragraphe 7 à une population économiquement active âgée de 10 ans ou plus. De plus, étant donné que le Code du travail proscrit le travail des enfants la nuit, (par. 106 du rapport), cela implique que ce type de travail est effectué par les adultes, il aimerait obtenir davantage d’informations sur les règles régissant ce type de travail et sur la durée maximale de la semaine de travail. En outre, les raisons de l’interdiction faite par l’article 230 du Code du travail que les mineurs travaillent comme garçons de course.

44.Quant à la liberté syndicale, il se demande si la garantie par la Constitution du droit absolu de s’organiser en syndicats s’applique également aux Haïtiens travaillant dans les plantations de canne à sucre et combien sont syndiqués; et s’il existe un syndicat de travailleurs agricoles. Il aimerait avoir davantage d’informations sur les politiques publiques en matière syndicale, en général, ainsi qu’une observation spécifique sur deux incidents récents où le leader d’un syndicat d’enseignants a été abattu par la police dans son village, ainsi qu’un groupe d’infirmières qui réclamaient, pacifiquement, de meilleures conditions de travail.

45.Sir Nigel Rodley dit que, nonobstant sa première intervention, le Comite se préoccupe des droits humains de tous et partout, y compris les policiers. Des affirmations ont été faites selon lesquelles les policiers ne jouissent pas de la liberté de conscience et de culte, davantage d’informations y doivent être apportées.

46.M me Abreu de Polanco (République dominicaine) déclare que le rapatriement des Haïtiens se fait en trois phases, à savoir, la détention, l’identification, l’enquête et l’interrogatoire, et la vérification et la confirmation. Au cours de la dernière phase, la vérification est faite au niveau de la frontière en vue d’assurer que les personnes qui sont sur le point d’être rapatriées n’ont pas le droit légal de rester en République dominicaine. Les consulats d’Haïti prennent part au processus et s’assurent que ces personnes sont véritablement des Haïtiens. Les organisations non gouvernementales sont également invitées à s’impliquer dans le but de garantir que la procédure de rapatriement se déroule dans la transparence. Ainsi, tout risque de violation de la procédure ou des droits de l’homme est écarté.

47.La Cour interaméricaine des droits de l’homme avait tenu une audience préliminaire au cours de laquelle elle a statué sur une plainte contre son gouvernement pour déportations massives. La Cour a pris des mesures préventives pour le cas de cinq Haïtiens que son gouvernement a accepté de surseoir à expulser. Le Gouvernement informe périodiquement la Cour de l’évolution de leur statut.

48.Son pays, comme tous les pays qui ont une frontière commune avec un voisin moins développé économiquement, fait face à des pressions migratoires. Des centaines de Haïtiens tentent d’entrer illégalement dans le pays, ce qui entraîne des conséquences désastreuses. Pendant de nombreuses années, son gouvernement a, pour des raisons humanitaires, permis à un nombre inestimable de Haïtiens d’occuper la plupart des emplois dans le secteur informel. Et il s’efforce de promouvoir des activités économiques dans les zones frontalières en vue de réduire le nombre de Haïtiens qui émigrent.

49.Un accord a été passé entre les responsables des services d’immigration des deux pays. Le gouvernement de la République dominicaine a décidé de procéder à des rapatriements entre 18 heures et 6 heures, dans le but d’éviter de séparer les familles nucléaires, et ce à des points de passage précis. Il a également accepté de déployer tous les efforts possibles en vue de garantir que les personnes en cours de rapatriement emportent tous leurs effets personnels et reçoivent une copie de la lettre de déportation. Pour sa part, le gouvernement haïtien a accepté de créer des points de contrôle le long de la frontière et renforcer l’inspection au niveau des zones frontalières. Il a également reconnu l’importance de la remise de papiers d’identité appropriés à ses ressortissants.

50.M. Nuñez Vargas (République dominicaine) dit qu’un grand nombre de Haïtiens séjournent dans le pays avec des permis de travail temporaires. Ces permis peuvent être prorogés sur demande pour six autres mois. Les Haïtiens jouissent de la liberté de circuler à travers tout le pays. Ils bénéficient des mêmes avantages sociaux que les Dominicains. Il existe des établissements scolaires primaires et secondaires francophones qui sont principalement fréquentés par les enfants d’immigrés haïtiens, y compris des sans-papiers. Il n’existe pas de discrimination fondée sur la race ou tout autre critère. Les Haïtiens en situation régulière peuvent épouser des ressortissants dominicains et participer sur un pied d’égalité à la vie du pays.

51.Les Haïtiens ne sont pas les seuls à vivre dans la précarité. Plusieurs Dominicains sont dans la même situation, parce que le produit intérieur brut du pays ne permet pas de subvenir à leurs besoins. La plupart des Haïtiens qui vivent dans les camps des plantations de canne à sucre épargnent leur revenu. Ils ne quittent ces camps que pour se rendre en visite en Haïti.

52.M me Abreu de Polanco (République dominicaine) déclare que sa délégation détient un document dans lequel Haïti reconnaît que la République dominicaine fait des efforts visant à améliorer la situation. En effet, son gouvernement le fait pour tous les étrangers en situation irrégulière, et pas seulement les Haïtiens. Quant à la question de M. Ando sur le travail des enfants, le Directeur régional de l’Organisation internationale du travail a récemment visité son pays et il a rendu un hommage au programme dominicain d’éradication du travail des enfants qu’il a décrit comme un modèle à copier. Son gouvernement verse une allocation mensuelle aux parents en échange du retrait de leurs enfants du travail pour les inscrire à l’école. Ce programme a eu des résultats très bénéfiques. Quant à la question relative aux femmes et le Bureau du Médiateur, elle dit qu’en raison des contraintes de temps, sa délégation y répondra par écrit.

53.M. García Lara (République dominicaine), en réponse à la question relative à la liberté de l’accès à l’information dans les tribunaux de la police, déclare que la loi no 285 prévoit que les audiences dans ces tribunaux sont orales et publiques et doivent offrir l’opportunité de procéder au contre-interrogatoire des témoins. Il est interdit d’intenter une action en indemnisation devant ces juridictions. A son avis, les tribunaux de la police doivent être réformées et non dissoutes. Les raisons qui sous-tendent cette position seront présentées au Comité en temps opportun.

54.L’interdiction faite aux militaires et aux policiers de voter est conforme aux articles 14 et 15 de la Constitution. Quant à la liberté religieuse, les forces de police constituent un organe du système politique. Les systèmes politiques ont une base idéologique et le partisan d’un système ne peut avoir une opinion contraire à celle dudit système. Bien que les policiers jouissent de certains droits spécifiques, ils n’incluent pas la liberté d’association ou les droits de négociation collective.

55.M me Abreu de Polanco (République dominicaine) déclare qu’on a le droit de critiquer les responsables publics.

56.M. Scheinin s’enquiert si la délégation est au courant des accusations selon lesquelles, lorsque les services d’immigration arrêtent les Haïtiens, prétendument en se fondant sur la race, ils ont tendance à détruire tous les papiers d’identité retrouvés sur eux. Si les membres de la délégation ne sont pas au courant desdites allégations, il va les renvoyer aux sources correspondantes. Il serait important de savoir si la délégation va transmettre ces accusations aux autorités compétentes.

57.M me Medina Quiroga déclare n’avoir reçu aucune réponse à la question de savoir pendant combien de temps les Haïtiens peuvent conserver le statut d’immigré et si leurs descendants héritent de ce statut.

58.M me Abreu de Polanco (République dominicaine) affirme que l’on procède à des contrôles d’identité dès la première détention des personnes arrêtées et non seulement au niveau de la frontière.

59.M. Castaños Guzmán (République dominicaine) déclare qu’il convient de faire une distinction entre les trois groupes de Haïtiens qui séjournent dans son pays. Certains sont des travailleurs agricoles sous contrats à durée déterminée; ils devraient retourner en Haïti au terme de leur contrat. D’autres sont des immigrés légaux qui peuvent demander la résidence permanente. Cependant, d’autres – probablement la majorité, bien qu’on ne puisse l’affirmer avec certitude du fait que le dernier recensement remonte à 1993 – ne peuvent qu’être considérés comme des immigrés illégaux, parce qu’ils sont en conflit avec les règles d’ordre et de sécurité publics

60.Le Comité devrait étudier les facteurs historiques qui sous-tendent les relations entre son pays et Haïti. Contrairement aux autres pays hispanophones d’Amérique latine qui ont été colonisés par l’Espagne, son pays a été envahi par Haïti en 1822 et occupé pendant 22 ans. L’identité politique dominicaine s’est forgée à travers un mouvement politique qui avait pour but la séparation de Haïti.

61.Son gouvernement est préoccupé par le problème des Haïtiens de deuxième génération, les enfants d’immigrés qui n’ont pas pu régulariser leur situation. Cette question sera examinée dans le cadre du prochain recensement. Une enquête montre qu’un grand nombre de femmes haïtiennes accouchent dans les hôpitaux dominicains pour profiter de la gratuité des soins. Toutefois, du fait qu’elles sont sans-papiers, ces naissances ne peuvent être enregistrées.

62.Le Gouvernement reconnaît être confronté à des problèmes difficiles à résoudre. Cependant, conformément à l’article 1 du Pacte, son pays jouit du droit à l’autodétermination et à la souveraineté. Étant l’un des pays les plus pauvres du monde, la République dominicaine ne peut pas à elle seule résoudre tous les problèmes d’Haïti. Les Dominicains aimeraient aider leurs frères et sœurs d’Haïti, mais ils ne peuvent y parvenir sans l’appui de la communauté internationale.

63.M. Klein déclare que la référence faite par M. García Lara aux dispositions constitutionnelles relatives aux droits des fonctionnaires prouve qu’il y’a un malentendu de fond quant à l’objectif de la présentation des rapports. Des dispositions peuvent être en conformité avec le droit interne, mais ce qui compte c’est sa conformité ou non avec le Pacte.

64.Le Président, en guise de synthèse des débats, déclare que le Comité accueille favorablement l’opportunité de reprendre langue avec le Gouvernement. La présentation du quatrième rapport est la preuve de son engagement envers la promotion et la protection des droits de l’homme. Néanmoins, ce rapport est insuffisant et insatisfaisant. Il se contente d’énoncer les dispositions légales et de manière incomplète, tout en étant muet sur la situation réelle des droits de l’homme. Les directives du Comité stipulent clairement que ce sont les données sur la promotion effective des droits de l’homme qui comptent. Le travail du Comité aurait été largement facilité, si la délégation avait inclus les informations présentées dans ses réponses orales dans le rapport.

65.Les informations mises à la disposition du Comité par d’autres sources soulèvent quelques graves interrogations. Elles ont été exprimées par le Comité dans ses observations finales sur le troisième rapport. Cependant, elles demeurent sans réponses. Par exemple, sur la question des tribunaux de la police, le Comité avait demandé que toutes les mesures soient prises en vue d’assurer que tous les policiers et les militaires accusés de violations des droits de l’homme sont jugés par des juridictions de droit commun indépendantes. Les raisons du maintien de ces juridictions spéciales auraient dû être présentées dans le rapport.

66.Il demande à la délégation de transmettre au Comité, en milieu de la semaine suivante, les réponses détaillées à toutes les questions restées sans réponses à l’issue des débats. Ce qui permettra au Comité de parachever ses observations finales qui seront transmises au Gouvernement. Il se dit confiant que le prochain rapport du Gouvernement sera plus complet et conforme aux directives du Comité. L’objectif du Comité n’étant pas de critiquer simplement mais d’améliorer la situation des droits de l’homme.

67.M me Abreu de Polanco (République dominicaine) présente les excuses de la délégation pour les manquements du quatrième rapport. Son Gouvernement aimerait sincèrement surmonter les obstacles à l’application complète du Pacte et faire du pays un État de droit.

La séance est levée à 18 h 5.