Nations Unies

CCPR/C/SR.2893

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

11 juillet 2012

Original: français

Comité des droits de l ’ homme

10 5 e session

Compte rendu analytique de la première partie (publique)* de la 2893 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le lundi 9 juillet 2012, à 10 heures

Président e:Mme Majodina

S ommaire

Ouverture de la session

Déclaration de la Chef du Service de l’état de droit, de l’égalité et de la non-discrimination (Division de la recherche et du droit au développement)

Engagement solennel du membre nouvellement élu du Comité

Adoption de l’ordre du jour

Organisation des travaux et questions diverses, y compris adoption du rapport du Groupe detravail des communications

Hommage à M. Lallah

La séance est ouverte à 10 h 5.

Ouverture de la session

1.La Présidente déclare ouverte la 105e session du Comité des droits de l’homme. Elle rappelle que le Comité a appris la triste nouvelle du décès, le 3 juin, de Rajsoomer Lallah, auquel les membres pourront rendre hommage au cours de la séance.

Déclaration de la Chef du Service de l’état de droit, de l’égalitéet de la non-discrimination (Division de la recherche et du droit au développement)

2.M me Rishmawi (Chef du Service de l’état de droit, de l’égalité et de la non-discrimination) rend hommage à la mémoire de M. Rajsoomer Lallah, qui était membre du Comité des droits de l’homme depuis 1976. M. Lallah a assumé parallèlement de nombreuses fonctions, notamment celles de Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar et de Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Chili. Avec sa vivacité d’esprit et son humanité, il a inspiré confiance et respect à tous ceux qui ont eu le privilège de travailler avec lui au fil des ans. Mme Rishmawi a eu cette chance, puisqu’elle a collaboré avec lui lorsqu’il était président de la Cour suprême de Maurice entre 1991 et 1995. M. Lallah était également un membre actif de la Commission internationale de juristes et du Centre pour l’indépendance des magistrats et des avocats; il avait une passion pour l’enseignement du droit et foisonnait d’idées sur les moyens de faire en sorte que les droits de l’homme deviennent une réalité pour tout un chacun. Tous ceux qui l’ont connu le regretteront profondément.

3.Mme Rishmawi souhaite la bienvenue à M. Ben Achour, nouveau membre du Comité des droits de l’homme et fervent défenseur des droits de l’homme depuis de nombreuses années. Il a récemment dirigé la Commission pour la réforme politique tunisienne, chargée de superviser la réforme constitutionnelle engagée à la suite de la chute du régime de Ben Ali.

4.Mme Rishmawi espère que les échanges du Comité avec la Division des traités relatifs aux droits de l’homme et la Division de la recherche et du droit au développement se renforceront à l’avenir. Le Service de l’état de droit, de l’égalité et de la non-discrimination se compose de quatre sections: la section de l’état de droit et de la démocratie, la section du genre et des droits fondamentaux de la femme, la section antidiscrimination et la section des peuples autochtones et des minorités. Il contribue au renforcement des connaissances et des capacités dans les domaines susmentionnés et soutient les activités de la Haut-Commissaire et de ses collaborateurs à Genève et sur le terrain en mettant à leur disposition ses compétences juridiques et en analysant les politiques menées, en réunissant des informations sur les bonnes pratiques et en élaborant des directives et autres instruments. Le Service collabore également avec plusieurs mécanismes intergouvernementaux et mécanismes d’experts. La promotion et la mise en œuvre concrète des droits de l’homme sont au centre des préoccupations du Service, y compris pour ce qui est de la mise en œuvre des deux stratégies thématiques du HCDH que sont la lutte contre la discrimination, en particulier la discrimination fondée sur la race, le sexe et la religion ou la discrimination dirigée contre des groupes marginalisés d’une part, et la lutte contre l’impunité et le renforcement de la responsabilité, de la légalité et de la démocratie d’autre part. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques tient naturellement une place essentielle à cet égard. Le domaine de l’état de droit et de la démocratie revêt une importance particulière, mise en évidence par l’actualité internationale récente, notamment les événements au Moyen-Orient et en Afrique du Nord; il est plus que jamais nécessaire de lutter pour faire régner l’état de droit et pour que les responsables de violations aient à répondre de leurs actes. Pour favoriser la transition vers des régimes viables fondés sur les droits de l’homme, des institutions démocratiques régies par le droit doivent être créées ou rétablies et des mécanismes efficaces doivent être mis en place pour juger les auteurs de violations des droits de l’homme et assurer aux victimes une réparation appropriée. Le Service de l’état de droit, de l’égalité et de la non-discrimination, en particulier la section de l’état de droit et de la démocratie, s’emploie à fournir l’assistance technique et les compétences juridiques nécessaires à cette fin.

5.Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et les travaux du Comité des droits de l’homme contribuent à de nombreux aspects des activités de la section de l’état de droit et de la démocratie, notamment à l’élaboration de directives et au renforcement de la protection des droits de l’homme. Pour élaborer des directives, la section de l’état de droit et de la démocratie se réfère constamment au Pacte et à la jurisprudence du Comité ainsi qu’à ses Observations générales. Par exemple, les orientations concrètes données par la Haut-Commissaire dans ses rapports à l’Assemblée générale et au Conseil des droits de l’homme relativement aux droits de l’homme et aux politiques de sécurité, notamment dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, font abondamment référence aux travaux du Comité.

6.En ce qui concerne la promotion du droit des victimes à un recours utile, les travaux menés par la section s’appuient en grande partie sur l’article 2 du Pacte. Ces dernières années, le HCDH a contribué à l’élaboration et à la mise en œuvre de mécanismes et de procédures de justice de transition dans une vingtaine de pays à travers le monde au moyen de divers instruments, portant entre autres sur les commissions pour la vérité, les lois d’amnistie, l’exercice des poursuites, les mesures de réparation et les consultations nationales. Le HCDH met actuellement au point un nouvel instrument qui explique comment élaborer des programmes nationaux de protection des victimes et des témoins pour permettre que des enquêtes efficaces soient menées sur les crimes internationaux et autres violations flagrantes des droits de l’homme et que les auteurs soient poursuivis, pour garantir le droit à un procès équitable et pour assurer aux victimes les moyens de recours et les mesures de réparation auxquels elles ont droit.

7.Le HCDH s’appuie aussi beaucoup sur le Pacte et l’interprétation de certaines de ses dispositions par le Comité pour renforcer la protection des droits de l’homme sur le terrain. Par exemple, les principes affirmés par le Comité dans l’Observation générale no 31 ainsi que dans les observations finales, qui établissent que les instruments relatifs aux droits de l’homme s’appliquent aussi dans les situations de conflit armé et que les obligations qui découlent de ces instruments s’appliquent au-delà du territoire national, sont déterminants pour l’action du HCDH. Celui-ci s’est d’ailleurs inspiré des travaux du Comité dans ce domaine pour élaborer à l’intention des autorités publiques, des défenseurs des droits de l’homme, des acteurs humanitaires et d’autres parties prenantes des directives sur l’application du droit international des droits de l’homme dans les situations de conflit armé.

8.En ce qui concerne la peine de mort, les travaux du Comité, en particulier son insistance sur le fait que l’application de cette peine doit être limitée aux «crimes les plus graves» et les appels qu’il a adressés à certains États pour qu’ils revoient le champ des infractions emportant la peine de mort, ont permis une meilleure compréhension et une meilleure application de l’article 6 du Pacte. Le HCDH lutte de son côté en faveur d’un moratoire mondial sur les exécutions et espère qu’à sa prochaine session l’Assemblée générale des Nations Unies adoptera une résolution dans ce sens. Il a dernièrement organisé à New York une table ronde sur ce sujet, au cours de laquelle plusieurs initiatives nationales favorables à l’abolition de la peine de mort ont été présentées.

9.À Vienne, en avril 2012, la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale a adopté une résolution établissant les nouveaux principes et directives concernant l’accès à l’assistance d’un défenseur dans les systèmes de justice pénale. Il est intéressant de noter que ces directives étendent le droit à l’assistance d’un conseil aux simples suspects, contiennent des dispositions spéciales sur l’assistance à accorder selon que de besoin aux victimes, aux témoins et aux mineurs et incorporent une approche soucieuse de l’égalité entre hommes et femmes dans l’application du droit à l’assistance d’un défenseur. Il est intéressant que le Comité envisage d’élaborer une Observation générale sur l’article 9 du Pacte, initiative particulièrement bienvenue, car le droit de chacun à la liberté et à la sécurité de sa personne est au cœur des travaux et des préoccupations du HCDH. La violence et l’insécurité liées à la criminalité sont de plus en plus problématiques dans de nombreuses régions du monde et créent des situations auxquelles les forces de l’ordre et la justice pénale ont du mal à faire face. Certains pays ont fait appel à l’armée pour protéger la sécurité intérieure et maintenir l’ordre public lorsque les forces de l’ordre étaient dépassées ou ont adopté des mesures de répression au nom de la sécurité. Le droit à la liberté et à la sécurité de la personne est sérieusement mis à mal par la lutte contre la criminalité croissante et la violence sociale, en particulier dans les pays où le système de justice pénale est inopérant, et l’avis du HCDH sur les moyens de garantir le droit à la liberté et à la sécurité de la personne dans ces circonstances adverses est de plus en plus sollicité. L’éclairage que le Comité pourra apporter sur l’application de l’article 9 dans ce type de situation sera très utile. Dans le cadre de la présidence de l’équipe spéciale des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme, le HCDH travaille à l’élaboration de guides de référence sur les droits de l’homme pour aider les États Membres à renforcer la protection des droits de l’homme dans le cadre de la lutte contre le terrorisme; l’un de ces guides est expressément consacré à la détention. Le HCDH collabore également à l’organisation d’ateliers régionaux sur le thème du droit à un procès équitable dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, qui traiteront notamment des articles 9 et 14 du Pacte. Ces travaux se fonderont sur la jurisprudence du Comité. Enfin, Mme Rishmawi appelle l’attention du Comité sur la résolution adoptée par la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale en avril 2012 en vue de la révision de l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus approuvées par le Conseil économique et social en 1957. Cette résolution porte sur plusieurs questions liées au droit à la liberté et à la sécurité de la personne, comme l’ouverture d’enquêtes sur tout décès en détention ainsi que sur tout signe ou allégation de torture ou de peine ou traitement inhumain ou dégradant de détenus, la protection et les besoins spéciaux des groupes vulnérables privés de liberté et le droit à l’assistance d’un avocat.

10.En ce qui concerne la réforme du système des organes conventionnels, le Comité aura l’occasion au cours de la session de s’entretenir avec M. Salama au sujet du rapport de la Haut-Commissaire sur le renforcement du système des organes conventionnels (HRI/MC/2012/1), dont une copie a été adressée à tous les membres du Comité et qui sera publié officiellement le 16 juillet à New York. À cette occasion, M. Salama fera également part au Comité des réactions des autres parties prenantes au sujet du rapport et des prochaines étapes du processus intergouvernemental. Il fera également le point des contraintes financières que le HCDH connaît actuellement.

11.M.  Thelindit que la disparition de M. Lallah laissera un grand vide au Comité, qui a déjà perdu il y a peu un autre de ses membres éminents.

12.M. Thelin prend note avec intérêt des activités du Service de l’état de droit, de l’égalité et de la non-discrimination. Pour ce qui est des travaux du Comité, il aurait souhaité que Mme Rishmawi fasse référence à l’Observation générale no 34 du Comité sur la liberté d’opinion et la liberté d’expression. Les droits politiques, en particulier la liberté d’expression, jouent en effet un rôle primordial dans le renforcement de l’état de droit et de la démocratie, comme on l’a encore vu lors du printemps arabe.

13.M.  Fathallaexprime sa tristesse pour la disparition de M. Lallah.

14.En ce qui concerne le rapport de la Haut-Commissaire sur le renforcement du système des organes conventionnels, il se demande quelle sera l’utilité pour M. Salama de prendre connaissance des vues des membres du Comité et de répondre à leurs questions alors que le document aura déjà été présenté officiellement.

15.M me Ri shmawidit que le Haut-Commissariat s’appuie souvent sur l’Observation générale no 34, notamment dans le cadre de ses travaux portant sur les articles 19 et 20 du Pacte et sur la structure démocratique. Elle ne l’a pas évoquée dans sa déclaration liminaire parce que celle-ci avait pour thème principal la justice pénale. Si elle en avait eu le temps, elle aurait aimé aborder également les thèmes des droits des femmes et des relations hommes-femmes, des minorités, ainsi que de l’interaction entre la liberté d’expression, en particulier la liberté de religion, et les principes énoncés aux articles 19 et 20 du Pacte.

16.Les membres du Comité ont pu largement contribuer au rapport de la Haut-Commissaire sur le renforcement du système des organes conventionnels. M. Salama, actuellement absent de Genève, entend rendre compte aux membres du Comité des réactions suscitées par le rapport. Dans un contexte de crise financière, il souhaite également examiner avec eux comment appliquer certaines des recommandations convenues sans avoir besoin de l’aval d’autres organes.

Engagement solennel du membre nouvellement élu du Comité

17.La Présidente remercie Mme Rishmawi de ses propos. Au nom de tous les membres du Comité, elle souhaite la bienvenue au nouveau membre, M. Ben Achour, élu en remplacement du regretté Abdelfattah Amor. Elle invite M. Ben Achour à prendre l’engagement solennel ainsi qu’il est prévu à l’article 16 du Règlement intérieur.

18.M. Ben Achour fait la déclaration suivante: «Je m’engage solennellement à m’acquitter de mes fonctions de membre du Comité des droits de l’homme en toute impartialité et en toute conscience.». Il se dit honoré d’avoir été élu au Comité et espère être digne de son éminent prédécesseur et ami, M. Amor.

Adoption de l’ordre du jour (point 3 de l ’ ordre du jour provisoire) (CCPR/C/105/1)

19.L’ordre du jour est adopté.

Organisation des travaux et questions diverses, y compris adoption du rapportdu Groupe de travail des communications (point 4 de l ’ ordre du jour)

20.M.  Flinterman(Président-Rapporteur du Groupe de travail des communications) rappelle que les membres du Groupe de travail étaient M. Bouzid, Mme Chanet, Mme Majodina, M. O’Flaherty, M. Rivas Posada, Sir Nigel Rodley, M. Salvioli, Mme Waterval, et lui-même. Le Groupe de travail, réuni du 2 au 6 juillet 2012, était saisi de 22 projets de décision ou de recommandation établis par le Rapporteur. Il recommande au Comité plénier de rendre sept décisions d’irrecevabilité et d’examiner 14 communications quant au fond. Le Groupe de travail a jugé recevable une communication pour laquelle le Rapporteur spécial chargé des nouvelles communications et des mesures provisoires avait accédé à la demande de l’État partie d’examiner la question de la recevabilité séparément du fond.

21.Le Groupe de travail a également examiné diverses questions relatives aux méthodes de travail et décidé de proposer au Comité plénier de débattre de la teneur du mandat du Rapporteur spécial chargé des nouvelles communications et des mesures provisoires. À ce sujet, il invite la Présidente à prévoir le temps nécessaire à la tenue d’un tel débat pendant la session en cours.

22.Le Groupe de travail a en outre tenu une discussion préliminaire sur les recommandations relatives à la procédure régissant les communications qui figurent dans le rapport de la Haut-Commissaire sur le renforcement du système des organes conventionnels. M. Flinterman attend avec intérêt de poursuivre ce débat en Comité plénier.

23.Le rapport du Groupe de travail des communications est adopté.

Hommage à M. Lallah

24.La Présidente rappelle que Rajsoomer Lallah était membre du Comité depuis 1976 et en avait assumé la présidence de 1989 à 1991. Membre fondateur du Comité, il en était la mémoire institutionnelle. Son expérience de juge et de président de Cour suprême était particulièrement précieuse et il a joué un rôle primordial dans l’établissement de la jurisprudence du Comité concernant la procédure d’examen des communications émanant de particuliers.

25.L’action de M. Lallah en faveur des droits de l’homme ne se limitait pas au Comité, puisqu’il a exercé de nombreuses fonctions importantes sur le terrain, comme Mme Rishmawi l’a évoqué. Il était toujours une source d’inspiration pour les membres du Comité et son nom restera synonyme d’honnêteté, d’intégrité et de professionnalisme. Ses remarquables qualités intellectuelles et humaines sont gravées dans les mémoires. Il représentait ce que le Comité a de meilleur.

26.M me Chanetdit qu’il est particulièrement difficile pour elle d’évoquer la mémoire de M. Lallah avec lequel elle avait tissé des liens particuliers depuis qu’il l’avait accueillie dans le Comité il y a plus de vingt-cinq ans. Comme en témoigne sa prestigieuse carrière nationale et internationale, M. Lallah avait l’âme d’un juge. Ancien Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar et Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Chili, il a contribué à la libération du Chili et à l’évolution favorable de la situation au Myanmar et aura eu la satisfaction, avant sa mort, de voir Mme Aung San Suu Kyi libre. Le Comité a perdu avec ce membre fondateur une partie de sa mémoire vivante. Malgré sa qualité de membre le plus ancien du Comité, M. Lallah n’a jamais eu d’attitude conservatrice mais a toujours voulu aller de l’avant. On se souviendra qu’il a été le rédacteur et le rapporteur du Comité pour l’Observation générale no 23 relative à l’article 27 (Droits des minorités), question qui lui tenait particulièrement à cœur comme tout ce qui concerne la dignité humaine. Cet homme particulièrement doux pouvait défendre ces valeurs avec vigueur, voire avec colère.

27.M. Lallah avait un esprit vif, brillant et précis; il savait mettre ses nombreux talents intellectuels au service de ses convictions, qui avaient autant de force que son courage. On pouvait toujours compter sur lui dans les situations difficiles.

28.Sir Nigel Rodleydit qu’il connaissait M. Lallah depuis plus de trente-cinq ans. Il l’avait rencontré dans le secteur de la société civile alors qu’il était lui-même conseiller juridique d’Amnesty International et que le Comité commençait ses travaux. M. Lallah était membre de la Commission internationale de juristes de 1988 à 1998. Il a également été membre du conseil consultatif d’Interights de 1988 à 1994, alors que Sir Nigel était lui-même membre de ce groupe de défense des droits de l’homme basé à Londres. M. Lallah avait conscience de l’importance de la société civile comme moteur de la défense des droits de l’homme. La représentante d’Amnesty International auprès de l’Organisation des Nations Unies à l’époque de la création du Comité a évoqué avec Sir Nigel Rodley ses souvenirs, soulignant que M. Lallah avait joué un rôle central dans l’évolution du Comité. Elle se souvenait d’un juriste brillant et d’un intellectuel respecté de tous, qui avait su protéger le Comité de la politisation et du clivage Est-Ouest. Il était l’un des tout premiers membres du Comité disposés à recevoir des renseignements de la part des organisations non gouvernementales à une époque où la question faisait encore controverse.

29.Dans le contexte du système des Nations Unies, Sir Nigel Rodley a connu M. Lallah quand celui-ci était Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar et le rencontrait lors des réunions annuelles des titulaires de mandat au titre des procédures spéciales. Il a toujours été une source d’inspiration et un exemple de sagesse. C’est au sein du Comité que l’influence de M. Lallah a été la plus forte. Il a su mettre son multilinguisme juridique, sa connaissance profonde de tous les systèmes de droit, y compris ceux fondés sur des préceptes religieux, au service du Comité et de ses membres. Sa gentillesse, sa modestie, son désir d’aider, son esprit tourné vers l’avenir manqueront grandement aux membres du Comité.

30.M. Rivas Posada évoque les multiples facettes de la personnalité de Rajsoomer Lallah, éminent juriste et particulièrement investi dans l’action du Comité. M. Lallah a enrichi nombre de décisions du Comité de sa grande expérience et de sa conception sûre de la justice, de l’équité, de la pondération et de la modération. Il s’est toujours distingué par son pouvoir imaginatif, qui lui permettait de trouver les points de convergence entre des opinions et des conceptions très diverses et facilitait le règlement des différends les plus marqués. Par sa vigilance, son imagination et son esprit de compromis, M. Lallah aidait le Comité à trouver une issue de façon à rendre des décisions unifiées et l’a souvent sorti d’une impasse.

31.M. Iwasawa insiste sur la grande sagesse de M. Lallah, auquel il a souvent fait appel pendant sa présidence, lorsque se posaient des problèmes complexes. Excellent juriste et ardent défenseur des droits de l’homme, M. Lallah intervenait souvent en termes énergiques pendant l’examen des rapports présentés par les États parties, n’hésitant pas à critiquer la situation des droits de l’homme dans ces États, quels qu’ils soient. M. Lallah représentait la mémoire vivante du Comité, et M. Iwasawa a beaucoup appris en l’écoutant raconter ses expériences.

32.M.  O ’ Flaherty dit qu’il est difficile d’imaginer le Comité sans Rajsoomer Lallah, tant celui-ci est indissociable de ses travaux. Dans le cadre de ses recherches en vue de l’élaboration de l’Observation générale no 34, M. O’Flaherty a consulté des éléments de jurisprudence remontant jusqu’aux débuts du Comité et il a constaté maintes fois l’autorité morale et intellectuelle de M. Lallah sur des questions très épineuses. M. Lallah était passionnément attaché à la cause des droits de l’homme, qu’il servait avec l’intégrité et la rigueur inhérentes à sa personnalité.

33.M. Salvioli souligne la modestie du brillant juriste qu’était M. Lallah. Membre le plus ancien du Comité, M. Lallah n’était jamais conservateur; il allait toujours de l’avant, n’hésitant pas à revenir sur sa position initiale si elle pouvait être améliorée. Il restera un modèle pour le Comité.

34.M. Thelin souligne combien la volonté constante de M. Lallah de rechercher le compromis était bénéfique pour le Comité. Venant de la tradition de la common law il réussissait toujours à concilier les particularités du système de droit romain et de la common law. Face à des problèmes complexes, il savait analyser la situation sous un angle nouveau. Cette faculté, qui s’exerçait de surcroît dans la bonne humeur, sera irremplaçable.

35.M me Waterval lit le poème Farewell de Rabindranath Tagore, véritable ode à l’amitié, qui symbolise bien les liens du Comité avec M. Lallah.

36.M. Bouzid dit que la disparition de M. Lallah est une grande perte pour sa famille, son pays et le monde entier, ainsi que pour la cause des droits de l’homme et pour le Comité. Suivant la tradition musulmane, M. Bouzid dit que l’esprit de M. Lallah plane au-dessus du Comité; M. Lallah aura la grâce de Dieu, car celui qui est aimé de tous l’est aussi de Dieu.

37.Sur l ’ invitation de la Présidente, l ’ assistance observe une minute de silence en hommage à la mémoire de Rajsoomer Lallah.

La première partie (publique) de la séance prend fin à 11 h 25.