Nations Unies

CCPR/C/SR.2808

Pacte international relatifaux droits civils et politiques

Distr. générale

25 juillet 2011

Original: français

Comité des droits de l’homme

102esession

Compte rendu analytique de la 2808e séance*

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 13 juillet 2011, à 15 heures

Présidente: Mme Majodina

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Troisième rapport périodique de la Bulgarie

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40du Pacte (point 7 de l’ordre du jour) (suite)

Troisième rapport périodique de la Bulgarie (CCPR/C/BGR/3; CCPR/C/BGR/Q/3; CCPR/C/BGR/Q/3/Add.1)

Sur l’invitation de la Présidente, la délégation bulgare prend place à la table du Comité.

2.M. Tzantchev (Bulgarie), présentant le troisième rapport périodique de la Bulgarie, indique que la délégation de haut niveau qui participe à l’examen du rapport reflète la volonté des autorités de mener avec le Comité des droits de l’homme un dialogue ouvert et franc sur la façon dont la Bulgarie s’acquitte de ses obligations au titre du Pacte, sur les difficultés auxquelles elle se heurte ce faisant et sur les enseignements tirés au fil de l’application du Pacte.

3.Durant la décennie écoulée, la Bulgarie n’a pas été en mesure de soumettre les rapports attendus aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, du fait des efforts considérables qu’elle a dû déployer pour mettre sa législation interne et sa pratique en conformité avec les normes et principes du droit européen. Toutefois, elle est aujourd’hui à jour dans la soumission de ses rapports périodiques et elle est résolue à coopérer étroitement avec les différents organes conventionnels s’occupant des droits de l’homme. La récente visite, en mai 2011, de Mme Gabriela Knaul, Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats, et celle encore plus récente (elle s’est achevée le 12 juillet 2011) de Mme Gay McDougall, Experte indépendante sur les questions relatives aux minorités, illustrent le nouvel élan donné à cette coopération. Le 17 mars 2011, le Groupe de travail sur l’Examen périodique universel a achevé le premier Examen périodique universel de la Bulgarie. Sur les 113 recommandations qui ont été établies, les autorités ont été en mesure d’en accepter 108, et les difficultés pour accepter les cinq autres tenaient essentiellement à des problèmes d’incompatibilité avec la Constitution.

4.Le rapport et les réponses écrites à la liste des points à traiter ont été élaborés en étroite coopération avec tous les organismes pertinents, notamment le Bureau du Médiateur de la République de Bulgarie, la Commission pour la protection contre la discrimination et, pour certains aspects, avec des représentants des autorités locales.

5.Beaucoup de progrès ont été réalisés ces dernières années. La Bulgarie est aujourd’hui partie aux principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et a accepté une évaluation des plus approfondies de son bilan en matière de droits de l’homme, y compris les arrêts contraignants de la Cour européenne des droits de l’homme concernant les plaintes formées par des particuliers. À la suite de l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne en 2009, la Bulgarie est également liée par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. D’une façon générale, conformément à la Constitution, les instruments internationaux auxquels la Bulgarie est partie et qui ont été promulgués selon la procédure établie font partie intégrante du droit interne et l’emportent en cas de conflit de lois.

6.Au cours de la période visée par le rapport, la Bulgarie a connu de profonds changements, tant sur le plan de la législation que dans la pratique. Ces changements étaient liés à l’adhésion au Conseil de l’Europe puis à l’Union européenne, mais ils ont également permis une meilleure application des dispositions du Pacte. Les autorités continuent de renforcer la législation de façon à assurer pleinement l’indépendance, l’impartialité et le bon fonctionnement de l’appareil judiciaire, d’améliorer les réponses du pouvoir exécutif aux défis qui se posent en matière de droits de l’homme comme celui de la protection des personnes vulnérables, d’actualiser la politique nationale d’intégration et de renforcer les mécanismes permettant à la société civile d’exercer un contrôle sur l’action des forces de l’ordre. Plusieurs faits nouveaux récents méritent d’être signalés. Dans le contexte de l’élaboration d’un cadre européen des plans d’action nationaux destinés à améliorer la situation des Roms, les autorités bulgares ont procédé à un nouveau remaniement de leur politique en faveur de l’intégration équitable des Roms dans la société. Comme dans la plupart des autres pays d’Europe centrale et orientale, les difficultés auxquelles se heurtent les Roms en Bulgarie sont essentiellement d’ordre socioéconomique. Les Bulgares d’origine rom jouissent de tous les droits prévus par la Constitution et les autres lois, qui consacrent les principes de la non-discrimination et de l’égalité. Ainsi, les membres de la communauté rom ont accès dans des conditions d’égalité à tous les services et établissements publics, mais ils doivent se prévaloir de la possibilité d’utiliser ces services. Le Gouvernement a pris différentes mesures pour améliorer l’information des Roms sur ce point. En outre, le Code pénal a été modifié de façon à renforcer le dispositif de lutte contre l’incitation à la haine et les infractions motivées par la haine, et le Ministère de l’intérieur a coopéré avec les organismes internationaux pertinents pour accroître les capacités dans ce domaine.

7.Le Gouvernement poursuit ses efforts en vue de fermer toutes les institutions pour enfants d’ici à 2025 et de les remplacer par un réseau de services communautaires offrant les mêmes conditions qu’un milieu familial. La fermeture des institutions accueillant les enfants handicapés et des foyers médicaux ou sociaux accueillant les enfants de la naissance à l’âge de 3 ans est également une priorité. En attendant, les conditions dans les institutions nationales et municipales pour enfants ont été améliorées.

8.La Bulgarie a ratifié en avril 2011 le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et le Médiateur de la République a fait savoir qu’il souhaitait être le mécanisme national de prévention prévu dans le Protocole. Sur le plan du droit interne, une nouvelle législation a été adoptée qui prévoit la création de juridictions spécialisées dans les affaires de crime organisé et de corruption. Un nouveau Code électoral unifié a été également adopté, qui devrait mieux garantir la tenue d’élections libres et démocratiques.

9.La coopération avec les organisations non gouvernementales a été renforcée et plusieurs ministères ont décidé de faire appel aux mécanismes de surveillance de la société civile pour accroître l’efficacité de leur action. Par exemple, le Ministère de l’intérieur coopère avec l’Open Society Institute pour surveiller l’exécution des projets établis en vue de l’adhésion de la Bulgarie à l’espace Schengen. La même organisation non gouvernementale coopère avec le Ministère du travail et de la politique sociale à la définition de critères permettant de mesurer les résultats de la politique d’intégration. Enfin, il convient de signaler que le Médiateur de la République et la Commission pour la protection contre la discrimination ont demandé l’accréditation au Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme.

10.La Présidente remercie la délégation bulgare et invite les membres du Comité à poser des questions supplémentaires sur les points nos 1 à 14 de la liste.

11.M. Thelin constate que depuis la soumission du deuxième rapport périodique (CCPR/C/32/Add.17), qui remonte à 1993, la Bulgarie a connu d’importants changements et a notamment adhéré à l’Union européenne en 2007. Cette adhésion est le gage que l’État partie respecte aujourd’hui davantage les normes internationales relatives aux droits de l’homme en tant qu’élément fondamental de toute démocratie fondée sur la primauté du droit. Entre autres instruments, la Bulgarie a ratifié le Pacte et elle a donc l’obligation de s’acquitter des obligations qui en découlent.

12.Le Pacte est directement applicable dans l’État partie puisqu’il fait partie intégrante du droit interne. Dans ses observations finales concernant l’examen du deuxième rapport périodique (CCPR/C/79/Add.24), le Comité avait d’ailleurs relevé avec satisfaction que le Conseil constitutionnel avait invoqué le Pacte dans plusieurs de ses décisions. M. Thelin est donc surpris de lire dans les réponses écrites que le Conseil judiciaire suprême n’a pas connaissance de cas dans lesquels les dispositions du Pacte auraient été directement invoquées devant les tribunaux. Peut-être cette situation est-elle due à ce que, depuis l’adhésion de l’État partie au Conseil de l’Europe et à l’Union européenne, les conventions européennes et le droit européen en général ont pris le pas sur le Pacte, qui a été ainsi relégué en quelque sorte au second plan, au point que les juges, les avocats − et a fortiori la population − ne savent peut-être même plus qu’il est en vigueur pour l’État partie. Le Gouvernement bulgare devrait à l’évidence encourager la diffusion d’informations sur le Pacte car, même s’il existe beaucoup de points de ressemblance entre tous les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, on peut aussi considérer qu’ils se renforcent mutuellement à bien des égards, et l’appareil judiciaire pourrait utilement s’appuyer dans ses décisions à la fois sur les conventions européennes et sur les instruments des NationsUnies.

13.M. Thelin appelle l’attention sur un arrêt très récent de la Cour suprême administrative relatif à une affaire mettant en jeu des questions de discrimination au motif du sexe, dans lequel les juges ont considéré que les instruments internationaux étaient contraignants pour l’État mais ne l’étaient pas pour les tribunaux. Certes, la décision est apparemment susceptible d’appel devant les tribunaux nationaux et on ne peut donc exclure que la conclusion des juges soit infirmée par une juridiction supérieure, mais elle reflète peut-être aussi le fait que les juges ne savent pas que les instruments internationaux des droits de l’homme qui ont été ratifiés font partie intégrante du droit interne. En outre, on peut lire dans les réponses écrites que les tribunaux sont l’un des mécanismes offrant une voie de recours en cas de violation des droits consacrés dans le Pacte. Mais si les tribunaux n’invoquent jamais les dispositions du Pacte, ils peuvent difficilement jouer ce rôle. En tout état de cause, les juges doivent reconnaître l’applicabilité du Pacte et des autres instruments internationaux ratifiés pour que les victimes de violation de leurs droits puissent saisir la justice.

14.La Bulgarie a mis en place une Commission pour la protection contre la discrimination, et les réponses écrites présentent (tableau no 5) des statistiques sur les affaires examinées au titre de la loi sur la protection contre la discrimination. M. Thelin constate ainsi qu’en 2009 il a été fait droit à deux requêtes seulement, et à trois en 2010, ce qui est bien peu. Il souhaiterait que la délégation bulgare commente les chiffres figurant dans le tableau no 5.

15.La Bulgarie a harmonisé sa législation avec l’acquis communautaire à la suite de son adhésion à l’Union européenne. Il serait cependant important de savoir aussi quelles réformes ont été réalisées pour renforcer les institutions, notamment l’appareil et le système judiciaires. M. Thelin demande quelles mesures ont été prises à cet égard avant 2007 dans la perspective de l’adhésion à l’Union européenne. Plus généralement, il souscrit aux vues de la Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats, qui considère que le pouvoir judiciaire est un pilier de toute société démocratique et que son intégrité et son indépendance doivent être pleinement assurées.

16.Il est indiqué dans les réponses écrites que les autorités ont élaboré une stratégie pour lutter contre la corruption mais il n’est donné aucun détail sur les mesures concrètes qui sont envisagées dans ce cadre. M. Thelin serait reconnaissant à la délégation bulgare de bien vouloir donner des renseignements à ce sujet. Il voudrait savoir également quelle est la composition du Conseil judiciaire suprême, quels liens cet organisme entretient avec d’autres institutions, par exemple avec le barreau, et de quelle manière les autorités concilient la nécessité d’instaurer un contrôle judiciaire prévoyant, par exemple, des sanctions disciplinaires contre les juges d’une part, et le respect de l’indépendance du pouvoir judiciaire d’autre part. Certains pays ont réglé cette question en confiant à l’appareil judiciaire les mesures de sanction à prendre, d’autres ont choisi de faire assumer cette responsabilité par le pouvoir exécutif, et M. Thelin voudrait savoir ce qu’il en est en Bulgarie.

17.Selon les informations communiquées par des organisations non gouvernementales, notamment par le Comité Helsinki bulgare, les efforts déployés pour lutter contre la corruption seraient actuellement ciblés sur l’appareil judiciaire, laissant de côté la corruption dans la police et les services des procureurs. M. Thelin espère que ce n’est pas le cas dans la réalité, car si la corruption existe également dans la police et les services des procureurs, les autorités se doivent d’y réagir, d’autant que ces deux institutions n’ont pas l’indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif dont jouit le système judiciaire. La délégation bulgare voudra bien indiquer le nombre de juges, de fonctionnaires de police et de procureurs qui ont été sanctionnés et la nature des sanctions.

18.Différentes juridictions ont été saisies d’affaires au titre de la loi relative à la responsabilité de l’État et des municipalités, ce que reflète le tableau no 9 des réponses écrites. Toutefois, le tableau n’indique pas le nombre de cas dans lesquels les juges ont accordé une indemnisation aux plaignants, de cas dans lesquels ces derniers ont été déboutés et de cas de non-lieu, pas plus qu’il ne précise la nature du préjudice et le montant des indemnités accordées. M. Thelin souhaiterait des précisions sur tous ces points.

19.Le Comité a demandé à l’État partie de donner des renseignements sur les motifs pour lesquels une personne pouvait être privée de liberté, et les réponses écrites portent essentiellement sur la détention par les forces de police. Or, d’après les informations communiquées par le Comité Helsinki bulgare, les mesures privatives de liberté toucheraient des malades mentaux, des étrangers et même des écoliers. M. Thelin demande à la délégation bulgare de bien vouloir préciser la situation à cet égard. En outre, le Comité des droits de l’enfant a recommandé à l’État partie de mettre sa législation concernant la délinquance des mineurs en conformité avec la Convention relative aux droits de l’enfant, ce qui n’est apparemment pas encore fait, et M. Thelin souhaiterait savoir où en est le processus.

20.Les organisations non gouvernementales font également état d’une augmentation des cas de brutalités policières en Bulgarie, et en particulier d’excès de zèle de fonctionnaires de police qui auraient arrêté différentes personnalités de la vie politique et du monde des affaires dans des conditions qui violeraient le droit à la présomption d’innocence. M. Thelin rappelle que, comme le Comité l’a affirmé dans son Observation générale no 32 relative à l’article 14 du Pacte, toutes les autorités publiques ont le devoir de s’abstenir de préjuger de l’issue d’un procès, sous peine de commettre une violation du droit à la présomption d’innocence.

21.Enfin, le tableau no 10 des réponses écrites contient des statistiques sur la jurisprudence en matière de contestation judiciaire d’une arrestation ou d’une détention arbitraires au titre de la loi relative à la responsabilité de l’État et des municipalités, mais n’indique que le nombre de cas dans lesquels les plaignants ont obtenu gain de cause. Rien n’est dit concernant les montants des indemnités accordées, et M. Thelin serait reconnaissant à la délégation bulgare de bien vouloir compléter ces données oralement.

22.MmeMotoc relève que, en matière de lutte contre le terrorisme, la Bulgarie est partie à plusieurs conventions internationales, qu’elle a donné effet à la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité et qu’elle a pris un certain nombre de mesures législatives. Toutefois, le tableau no1 des réponses écrites, qui porte sur les affaires soumises en application des dispositions du Code pénal relatives à la lutte contre le terrorisme, mentionne une seule affaire pour 2010, et n’en indique aucune pour 2009. Cela tient-il au fait qu’il n’y aurait pas eu d’actes de terrorisme commis en Bulgarie? Les organisations non gouvernementales font pourtant état de certains faits liés au terrorisme, et Mme Motoc s’étonne par conséquent du si petit nombre d’affaires mentionnées dans les réponses écrites. La délégation bulgare voudra bien apporter des éclaircissements à ce sujet.

23.Certaines dispositions concrètes ont été prises en matière de lutte contre le terrorisme, ce dont il convient de se féliciter. Par exemple, la Bulgarie a adopté différentes mesures visant à assurer la sécurité à l’aéroport de Burga et, sur le plan de la coopération internationale, des accords ont été conclus avec des pays voisins comme la Grèce et la Roumanie. Une coopération dans le domaine de la formation des effectifs de la lutte antiterroriste a aussi été développée avec les États-Unis.

24.Mme Motoc demande à la délégation d’où vient selon elle la corruption du système judiciaire en Bulgarie et pourquoi les instances européennes se sont davantage intéressées à ce sujet au cas de la Bulgarie qu’à celui d’autres anciens pays communistes entrés dans l’Union européenne avant la Bulgarie, comme la Hongrie, la République tchèque ou la Slovaquie. Eu égard à la loi relative au système judiciaire, adoptée en 2010, elle demande si les autorités bulgares ont envisagé d’établir un régime de responsabilité disciplinaire des juges, à quel type de système il se rattacherait, et quelle est la position des juges sur cette question. La Bulgarie s’est engagée devant les instances européennes à se doter d’un nouveau code pénal et Mme Motoc demande où en est le processus d’élaboration de ce texte, dont la version finale est attendue pour la fin de 2011. Elle voudrait aussi savoir comment fonctionne le système de publication des décisions judiciaires et quelle est la procédure de nomination des juges de haut niveau. Il est de fait que les procès se soldent très souvent par un acquittement dans les affaires de corruption, en particulier lorsque des hommes politiques sont en cause, ce qui soulève la question de la corruption à un niveau élevé de l’État; quelles mesures sont prises pour assurer que des enquêtes efficaces soient menées dans les affaires de cette nature? La délégation pourra peut-être indiquer où en est la réforme de l’administration douanière qui a été entreprise, notamment en vue de lutter contre la criminalité transnationale organisée. Compte tenu de la mise en œuvre de la décision-cadre 2005/212/JAI du Conseil de l’Union européenne, en date du 4 février 2005, relative à la confiscation des produits, des instruments et des biens en rapport avec le crime,et vu que l’État partie a élaboré une loi dans ce domaine avec l’aide de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), il serait intéressant de savoir s’il applique d’ores et déjà la mesure de confiscation extensive concernant les produits d’infractions commises à l’étranger qui sont gardés en Bulgarie.

25.M. Lallah remercie l’État partie pour les réponses écrites détaillées qui donnent des renseignements concrets sur la situation réelle, encore que, concernant les affaires de discrimination, les statistiques ne disent rien des motifs de la discrimination ni de la suite donnée. Les questions 2 à 7 de la liste des points traitent du très vaste sujet de la discrimination; le Comité lit l’article 26 du Pacte, qui interdit la discrimination conjointement avec d’autres articles, comme l’article 3 et tout autre article qui garantit le droit pour des personnes ou des groupes de personnes précis à la protection de l’État. Selon des informations émanant de l’organisation Bulgarian Gender Research Foundation et du Comité Helsinki bulgare, les cas de discrimination à l’égard des groupes minoritaires et des femmes notamment sont nombreux en Bulgarie. L’État partie s’est doté d’une Stratégie nationale pour 2009-2015 visant à encourager l’égalité des sexes, mais elle ne paraît pas être mise en œuvre de manière efficace. Les autorités bulgares ont aussi mis en place une Commission pour la protection contre la discrimination et il faudrait savoir si cette commission a le pouvoir de faire appliquer ses décisions. M. Lallah s’inquiète de ce que ni la Commission ni les tribunaux ne semblent se sentir véritablement investis de la mission de rétablir dans leurs droits les personnes victimes d’actes de discrimination. Il serait peut‑être nécessaire de dispenser une formation aux juges sur cette question.

26.Le rapport du Groupe de travail sur l’Examen périodique universel concernant la Bulgarie (A/HRC/16/9) contient de nombreuses recommandations tendant à l’adoption de mesures pour améliorer la situation dans le domaine de l’égalité des sexes, qui reflètent l’insuffisance de l’action menée par l’État partie pour lutter contre la discrimination fondée sur le sexe.

27.M. Lallah est préoccupé par la situation des Roms, qui restent défavorisés du point de vue économique et social, subissent des atteintes à leur intégrité physique et continuent de souffrir du traitement que leur réserve le système judiciaire. Il évoque avec inquiétude la campagne d’expulsions forcées de leur domicile dont des Roms ont récemment été victimes dans certaines villes, alors qu’ils occupaient leur logement depuis de nombreuses années. Il croit savoir que ces expulsions auraient été motivées par le fait que les logements se situaient près du centre ville, zone qui intéresse les promoteurs immobiliers. Il demande si les autorités bulgares envisagent d’indemniser les personnes expulsées ou de leur fournir un autre logement.

28.Selon les informations dont M. Lallah dispose, les personnes souffrant d’un handicap mental se voient désigner un tuteur, qui relève parfois de la même autorité que celle dont dépend la personne handicapée. Il semble qu’il y a là un grand risque de conflit d’intérêts, d’autant plus que souvent les personnes handicapées ne savent même pas qui est leur tuteur. Il s’ensuit qu’en cas de conflit ou si les intérêts de la personne handicapée sont gravement en jeu, ces dernières n’ont quasiment aucun recours. Ne serait-il pas possible de réfléchir aux moyens de remédier à une telle situation, afin de garantir les droits fondamentaux des personnes qui souffrent d’un handicap mental et leur permettre de bénéficier d’une assistance?

29.M. Salvioli se déclare préoccupé par le fait que le Code pénal bulgare ne contient toujours pas de définition de la torture correspondant à celle qui figure dans la Convention contre la torture et que la torture n’a toujours pas été érigée en infraction pénale spécifique conformément au Pacte. Cette question avait déjà fait l’objet d’une recommandation du Comité contre la torture dans les conclusions et recommandations formulées en 2004 à l’issue de l’examen du troisième rapport périodique de la Bulgarie, et avait aussi été soulevée par le Comité des droits de l’homme en 1993 lors de l’examen du deuxième rapport périodique de l’État partie. Le pouvoir législatif doit sans délai prendre les mesures nécessaires pour mettre la législation nationale en conformité avec les obligations internationales souscrites par l’État partie.

30.Selon des informations émanant du Comité Helsinki bulgare et d’Amnesty International, les forces de sécurité et les forces de police bulgares font un usage excessif de la force et les abus restent en général impunis, ce qu’a déjà constaté la Cour européenne des droits de l’homme dans des affaires dont elle a été saisie. Les commentaires de la délégation à ce sujet seraient utiles. En ce qui concerne la violence au foyer, l’information donnée porte sur les actions engagées au plan civil seulement et M.Salvioli souhaiterait des informations, notamment statistiques, sur les poursuites pénales ouvertes et les condamnations prononcées contre les auteurs de faits de violence dans la famille. Il demande si les faits de violences au foyer sont poursuivis d’office, que la victime ait ou non porté plainte. L’État partie a adopté un grand nombre de mesures visant à faire disparaître la pratique des châtiments corporels; toutefois, compte tenu de la recommandation formulée en 2008 par le Comité des droits de l’enfant (CRC/C/BGR/CO/2, par. 32 c)), M. Salvioli souhaiterait des informations sur les décisions prises par les autorités administratives et sur les poursuites pénales qui peuvent avoir été engagées contre les auteurs de châtiments corporels à l’égard d’enfants. Il serait utile que l’État partie réalise une évaluation de la situation dans le domaine de la traite des êtres humains. En effet, les réponses qu’il a données à ce sujet ne correspondent pas aux préoccupations exprimées par plusieurs États en 2010 dans le cadre de l’Examen périodique universel concernant la Bulgarie, face à la persistance de ce phénomène.

31.M. Bouzid dit que l’État partiea consenti d’importants efforts pour lutter contre la traite des êtres humains et s’est notamment doté d’une loi visant à lutter contre la traite. Cependant le problème demeure et, selon des informations émanant d’ONG, il existerait des cas de traite de femmes enceintes bulgares à la frontière avec la Grèce aux fins de la vente en Grèce de leur enfant nouveau-né, ainsi que des cas de trafic d’enfants roms. La délégation pourrait peut-être éclairer le Comité sur les efforts supplémentaires qui ont été faits dans ce domaine. Toujours selon des rapports d’ONG, il arrive que, dans certains couples, en cas de litige, le père enlève l’enfant à sa mère. Lorsque celle-ci porte plainte, on lui répond que les deux parents ont les mêmes droits à l’égard des enfants; il y a peut-être là une différence de traitement entre les pères et les mères.

32.M. Flinterman relève qu’il n’existe pas en Bulgarie de loi spécifique en faveur de l’égalité des sexes et que la législation applicable en la matière est la loi générale sur la protection contre la discrimination. Il souhaiterait savoir si un nouveau projet de loi relatif à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes va être soumis au Parlement puisque le texte proposé en 2006 a été rejeté. L’État partie indique dans ses réponses écrites à la liste des points à traiter que la plupart des cas signalés à la Commission pour la protection contre la discrimination sont des cas de discrimination multiple. Il serait intéressant de savoir quelles sont les formes de discrimination dont il est question, et notamment combien de cas concernent des actes de discrimination à l’égard des femmes appartenant à une minorité, en particulier à la minorité rom.

33.La délégation pourra peut-être apporter des précisions sur le rôle des commissions d’éthique dans l’action menée pour répondre à la diffusion par les médias de messages véhiculant des stéréotypes sur les femmes. Il serait utile de disposer d’exemples de plaintes déposées auprès de ces organes et de connaître les suites données à ces plaintes. En ce qui concerne la loi sur la protection contre la violence dans la famille, il est surprenant de noter que celle-ci ne fait pas de différence entre les hommes et les femmes, alors que les victimes de ce type de violence sont principalement des femmes et que la violence à l’égard des femmes constitue indéniablement une forme de discrimination fondée sur le sexe. Il serait souhaitable que l’État partie revoie sa position pour tenir compte, dans la législation, du fait que la violence dans la famille soulève avant tout le problème de la protection des droits fondamentaux des femmes. De même, bien que la traite des êtres humains concerne les hommes comme les femmes, il est toujours intéressant de connaître la proportion de victimes de chaque sexe. La délégation est invitée à commenter sous cet angle les chiffres donnés dans les réponses écrites à ce sujet.

34.Sir Nigel Rodley note que la commission d’enquête chargée de faire la lumière sur la mort de Marian Dimitrov en 2010 a conclu que les agents de la Direction régionale de Pleven avaient agi conformément aux dispositions de la loi sur le Ministère de l’intérieur. Ne connaissant pas la teneur de cette loi, il s’interroge sur sa conformité avec les Principes de base des Nations Unies sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois, eu égard en particulier aux critères de nécessité et de proportionnalité. Les commentaires de la délégation sur ce point seront les bienvenus.

La séance est suspendue à 16 h 25; elle est reprise à 16 h 50.

35.M. Tzantchev (Bulgarie) dit que la Cour constitutionnelle s’est référée à des dispositions du Pacte dans plusieurs de ses décisions. Il mentionne en particulier la décision no 2 de 1998, qui concernait l’application de l’article 8 de la Convention-cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales et dans laquelle la Cour a cité l’article 18 du Pacte, et la décision no 1 de 2000, dans laquelle elle a invoqué le paragraphe 2 de l’article 22, parallèlement à l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme. Il est vrai que dans la pratique courante, les magistrats se réfèrent plutôt à la Convention européenne qu’au Pacte, mais cela est simplement dû à l’influence de l’abondante jurisprudence de la Cour européenne et ne signifie aucunement que la Bulgarie établisse une hiérarchie entre les instruments internationaux auxquels elle est partie. La Cour suprême de cassation a elle aussi affirmé l’applicabilité en droit interne des instruments internationaux et notamment du Pacte, dans sa décision interprétative no 2 du 16 juillet 2009.

36.La délégation ne dispose pas d’éléments suffisants pour répondre immédiatement aux questions concernant les affaires de terrorisme et la réforme de l’administration douanière, mais les renseignements demandés seront transmis sous peu au Comité par écrit. En ce qui concerne la loi sur la confiscation, il convient de signaler que le texte soumis au Parlement n’a pas été approuvé en première lecture et qu’il est donc toujours à l’examen.

37.Mme Panova (Bulgarie) dit que le Conseil judiciaire suprême est régi par la loi de 2007 sur le système judiciaire. Il est composé de 25 membres dont trois (le Président de la Cour suprême de cassation, le Président du Tribunal administratif suprême et le Procureur général) sont membres de droit et 22 sont élus pour un mandat non renouvelable de cinq ans (11 par le pouvoir judiciaire et 11 par l’Assemblée nationale). Depuis la réforme de 2007, le Conseil judiciaire suprême est devenu un organe permanent, qui comprend deux commissions, chargées respectivement des questions relatives à la capacité professionnelle et à la carrière des magistrats et des questions d’éthique.

38.La Constitution et la loi de 2007 contiennent diverses dispositions visant à garantir la transparence du système judiciaire et l’indépendance des magistrats. Les séances du Conseil judiciaire suprême sont publiques. Les décisions du Conseil sont publiées sur Internet, de même que les candidatures des juges, procureurs et magistrats enquêteurs et les renseignements personnels y afférents. Plusieurs mécanismes ont été mis en place pour lutter contre la corruption, dont le plus récent est l’Inspection générale, créée en 2007, qui peut engager des procédures disciplinaires. De plus, une stratégie de lutte contre la corruption a été adoptée par le Conseil pour la période 2008-2012. La loi interdit aux juges d’exercer un certain nombre d’autres fonctions incompatibles avec leur charge et de participer à des activités politiques. En outre, chaque magistrat est tenu de déclarer ses revenus et son patrimoine auprès de la Cour des comptes.

39.Des amendements tendant à améliorer les compétences du Conseil judiciaire suprême en matière disciplinaire ont été adoptés en janvier 2011. Un Code d’éthique a été élaboré en collaboration avec les représentants d’ONG et l’échange d’informations entre la société civile et les commissions permanentes du Conseil a été renforcée aux fins d’un meilleur suivi des affaires disciplinaires. Depuis 2010, 192 cas ont été soumis au Conseil, qui a prononcé des sanctions administratives contre 42 magistrats. L’adoption de mesures disciplinaires n’exclut pas l’exercice de la responsabilité pénale. Entre janvier 2007 et juin 2011, 9 juges, 17 procureurs et 20 enquêteurs ont fait l’objet de poursuites pénales.

40.La décision-cadre du Conseil de l’Union européenne relative à la confiscation des produits, des instruments et des biens en rapport avec le crime a été transposée en droit interne en 2010. Une loi spéciale sur la reconnaissance mutuelle des décisions de confiscation a été adoptée. Son application repose sur le principe de l’intérêt mutuel des États de l’Union européenne concernés.

41.L’Institut national de justice, qui relève du Conseil judiciaire suprême, dispense une formation initiale et continue aux magistrats. Ses programmes comprennent un module sur la Convention européenne des droits de l’homme, ainsi que des modules sur le traitement des mineurs dans les procédures civiles et pénales, la criminalité transfrontière et la lutte contre la traite, notamment.

42.M.Tzantchev  (Bulgarie) dit que le Conseil des médias électroniques est le principal organe chargé de surveiller le contenu des programmes diffusés par les stations de radio et les chaînes de télévision, ainsi que des films et des publicités. Il peut être saisi par le Ministre du travail et des affaires sociales ou par d’autres organes gouvernementaux et par des ONG ou des particuliers. Il analyse notamment les risques de discrimination fondée sur le sexe, en tenant compte à la fois des messages explicites et des messages implicites véhiculés par les médias. Depuis 2006, des plaintes peuvent également être soumises aux deux commissions d’éthique (pour la presse et pour les médias électroniques) du Conseil national de la Fondation pour la déontologie journalistique.

43.La décision du Tribunal administratif suprême à laquelle M. Thelin a fait référence n’est pas définitive et la procédure est susceptible de se poursuivre. On peut donc espérer que la juridiction compétente, dans la suite de la procédure, ne laissera place à aucun doute quant à l’application directe du Pacte par les tribunaux bulgares.

44.La lutte contre la traite des êtres humains est une priorité pour le Gouvernement bulgare. Le Ministère de l’intérieur participe à des enquêtes internationales conjointes sur des cas de traite, et l’action des équipes de gardes frontière mises en place par la Bulgarie et la Roumanie à la frontière entre les deux pays et le long des côtes de la Mer noire donne de très bons résultats. La législation nationale en matière de lutte contre la traite des êtres humains est pleinement conforme aux normes internationales en la matière. Le Code pénal interdit toutes les formes de traite et depuis 2009 les peines pour toutes les infractions en rapport avec la traite ont été aggravées. La vente d’enfants constitue une infraction distincte, elle est aussi punie plus sévèrement depuis 2009. La coopération des victimes de la traite avec les forces de police et la justice reste difficile à obtenir, mais elle est encouragée par des mesures telles que l’octroi d’un titre de séjour temporaire et d’un permis de travail pendant la durée de la procédure. Le Comité trouvera dans les réponses écrites (tableaux nos 7 et 8) des statistiques de la Commission nationale de lutte contre la traite des êtres humains sur le nombre d’enquêtes ouvertes concernant des faits de traite et sur le nombre de poursuites et de condamnations auxquelles elles ont donné lieu. Toutes les victimes de la traite peuvent obtenir auprès du système de santé public et de diverses ONG un suivi médical et psychologique gratuit. Elles peuvent sur demande être hébergées dans un centre d’accueil pendant une période initiale de dix jours, qui peut être prolongée jusqu’à trente jours. Si la victime est partie à une procédure judiciaire, la période d’hébergement peut être prolongée jusqu’à la fin de la procédure. En ce qui concerne le trafic de nouveau-nés vers la Grèce, les autorités grecques et bulgares coopèrent étroitement pour poursuivre et punir les responsables. Elles ont mené avec succès une opération conjointe en janvier 2011, à la suite de laquelle des poursuites ont été ouvertes. La procédure est en cours.

45.Les châtiments corporels sont interdits par la loi. Les articles 10 et 11 de la loi sur la protection de l’enfant garantissent la protection des enfants contre les méthodes d’éducation préjudiciables à leur dignité, la violence physique ou morale et toute forme d’emprise contraire à leur intérêt. En vertu du Code pénal modifié en 2010, quiconque inflige des sévices à un mineur dont il a la responsabilité encourt jusqu’à trois ans d’emprisonnement; si les actes commis constituent des infractions punies de peines plus lourdes, celles-ci s’appliquent, conformément aux articles pertinents du Code pénal. Parallèlement aux mesures législatives, des mesures de sensibilisation aux droits de l’enfant sont mises en œuvre à l’intention des parents et des professionnels travaillant avec des enfants, notamment les enseignants, pour faire évoluer les mentalités et promouvoir l’utilisation d’autres méthodes de discipline. Le Service public de la protection de l’enfance joue un rôle très actif dans ce domaine. Il assure également un service d’assistance téléphonique gratuit qui permet de signaler les cas d’enfants victimes de violences mais qui est aussi ouvert aux parents en quête d’informations ou de conseils concernant leurs rapports avec leurs enfants.

46.Le Gouvernement poursuit ses efforts pour améliorer la situation des personnes handicapées dans tous les domaines de la vie quotidienne. Un ensemble de dispositifs a été mis en place pour assurer une protection aux personnes qui, pour des raisons de santé, d’âge, de situation sociale ou d’autres motifs indépendants de leur volonté, ne sont pas en mesure de subvenir à leurs besoins essentiels. Les personnes âgées seules et les personnes atteintes d’un handicap physique ou mental bénéficient d’une protection spéciale. L’hospitalisation sans consentement n’est autorisée que dans le cas de personnes qui représentent un danger pour leur entourage direct, pour la société ou pour elles-mêmes; elle doit être ordonnée par un juge. Les personnes visées par une telle mesure sont confiées aux soins de structures spécialisées dans le traitement des troubles psychiatriques.

47.La loi sur la protection contre la violence dans la famille a été adoptée en 2005. En vertu de cette loi, le tribunal peut ordonner différentes mesures de protection, notamment contraindre l’auteur des violences à quitter le domicile familial et à ne pas s’approcher de la victime, de son lieu de travail et de tout autre endroit qu’elle a l’habitude de fréquenter, et le condamner à une amende de 200 à 1 000 leva. Depuis 2009, l’inobservation d’une ordonnance de protection est passible de sanctions pénales en application du paragraphe 1 de l’article 296 du Code pénal. Des mesures autres que législatives sont prises pour lutter contre la violence dans la famille. Un programme interministériel a été élaboré dans ce domaine et le Ministère de l’intérieur a nommé un coordonnateur national pour en faciliter la mise en œuvre et veiller à ce que les situations de violence dans la famille soient traitées avec la diligence voulue. Une brochure d’information à l’intention des victimes est publiée sur le site Web du Ministère de l’intérieur, qui montre aussi des modèles de plaintes dont les victimes peuvent s’inspirer. Il existe également une permanence téléphonique gratuite auprès de laquelle les victimes peuvent obtenir des informations ainsi qu’une assistance psychologique et juridique. Il existe à l’heure actuelle trois foyers et cinq centres d’accueil d’urgence pour les femmes victimes de violence au foyer; leur financement est assuré conjointement par le budget de l’État et des collectivités locales et par des sources non gouvernementales.

48.Deux voies de recours sont ouvertes aux victimes de discrimination: la voie administrative, auprès de la Commission pour la protection contre la discrimination, et la voie judiciaire. À propos des statistiques qui figurent dans les réponses écrites, il convient de préciser que les chiffres donnés aux paragraphes 13 et 14 concernent le nombre de plaintes pour discrimination soumises à la Commission pour la protection contre la discrimination, tandis que ceux du tableau correspondent aux affaires examinées par les tribunaux. Ces chiffres montrent clairement que les victimes privilégient la procédure devant la Commission − 896 plaintes reçues en 2010, contre seulement 18 affaires portées devant les tribunaux la même année. Le fait que les frais de la procédure devant la Commission soient entièrement imputés au budget de l’État explique sans doute en partie ce succès, mais on peut y voir aussi une marque de confiance dans l’efficacité de cette procédure. Pour ce qui est des procédures judiciaires, 36 jugements et six recours en cassation sont actuellement pendants.

49.Le projet de loi relatif à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes a été approuvé par le Conseil des Ministres le 20 juillet 2006, mais les commissions permanentes du Parlement l’ont renvoyé pour réexamen au motif que de nombreuses dispositions faisaient double emploi avec la loi sur la protection contre la discrimination. Les autorités compétentes travaillent actuellement à la mise en œuvre des mesures élaborées par le Conseil national sur l’égalité des sexes.

50.Toute allégation de violation de la loi par des membres de la police donne lieu à une enquête; si au vu des éléments recueillis il existe des motifs raisonnables de croire qu’une violation a bien été commise, le dossier est transmis au parquet pour suite à donner. Cette procédure s’applique dans tous les cas, indépendamment de l’origine ethnique de la victime ou de la nature de l’infraction. L’indépendance des enquêtes est garantie par le Code de procédure pénale, qui dispose expressément que les enquêtes portant sur des infractions imputées à des membres de la police doivent être menées par des magistrats, et non par des enquêteurs de la police. Les devoirs des membres de la police sont définis dans le Code de déontologie de la police, dont la Commission permanente des droits de l’homme et de la déontologie policière surveille le respect; tout manquement aux devoirs définis dans ce code constitue une infraction disciplinaire. Les services d’inspection du Ministère de l’intérieur effectuent chaque année une analyse des infractions disciplinaires qui ont été signalées et vérifient que les sanctions voulues ont été appliquées. Ils font ensuite rapport au Ministère de l’intérieur, qui décide des éventuelles mesures à prendre pour renforcer la discipline et prévenir de nouvelles infractions. L’instruction no 1711 du 15 septembre 2009 du Ministère de l’intérieur interdit expressément l’usage de la force physique, de moyens auxiliaires ou d’armes à l’égard de détenus, sauf dans les rares cas prévus par la loi sur le Ministère de l’intérieur. L’utilisation de la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants, l’incitation à commettre de tels actes ou le consentement à de tels actes sont également proscrits, de même que la discrimination. Les agents sont tenus d’informer les détenus des motifs de leur arrestation et de leurs droits dès le début de la détention. Ces dispositions s’appliquent également aux membres des forces armées. En mai 2011, le Ministère de l’intérieur a organisé un débat public consacré aux modifications à apporter à la loi sur le Ministère de l’intérieur pour limiter l’usage de la force par les organes chargés de faire respecter la loi aux situations satisfaisant au critère de l’absolue nécessité, conformément aux normes européennes. Un projet de texte est actuellement à l’étude. En ce qui concerne l’affaire Marian Dimitrov (question no 10), la commission d’enquête a examiné les circonstances du décès et a conclu que le policier avait agi dans le respect de la loi sur le Ministère de l’intérieur. Le procureur chargé de l’affaire a mis fin à l’instruction préliminaire après avoir conclu que le policier n’avait pas commis d’infraction. Le tribunal du district de Pleven a confirmé la décision du procureur.

51.M.Rupchev (Bulgarie) dit que c’est à la Commission européenne qu’il faudrait demander pourquoi elle s’est particulièrement intéressée à la corruption en Bulgarie puisque c’est elle qui a mis en place le mécanisme de coopération et de vérification dans le cadre duquel la situation de la Bulgarie dans ce domaine est évaluée. Il ne faudrait toutefois pas en déduire que la corruption est un phénomène qui ne touche que certains États européens. La preuve que tous les États de l’Union sont concernés est que la Commission européenne a annoncé en juin 2011 de nouvelles mesures anticorruption qui seront applicables à l’ensemble des États membres. Le Code pénal bulgare punit de la même façon la corruption des juges, des procureurs ou des membres de la police.

52.Une question a été posée au sujet de l’adoption annoncée d’un nouveau Code pénal. Un groupe de travail composé d’universitaires, d’experts du Ministère de la justice, de procureurs et de juges élabore actuellement un projet. Il devrait avoir terminé ses travaux d’ici à 2012. Le texte fera l’objet d’un débat public avant d’être soumis au Parlement, idéalement d’ici à l’été 2012. Que la définition de la torture énoncée dans la Convention contre la torture ne soit pas reprise dans une seule et même disposition du Code pénal n’empêche pas que tous les actes visés par cette définition sont couverts par différentes dispositions du Code pénal. Par conséquent, les actes constitutifs de torture au sens de la définition de la Convention contre la torture constituent des infractions au regard du Code pénal et sont punis comme telles, comme l’exige l’interdiction de la torture énoncée à l’article 7 du Pacte.

53.M.Tzantchev (Bulgarie) dit que le Gouvernement fait preuve de la volonté politique nécessaire pour améliorer la situation des Roms mais qu’il s’agit d’une problématique complexe qui nécessite des efforts concertés et un partage équitable des responsabilités entre le Gouvernement, les communautés roms et leurs dirigeants et la société civile. La coordination des différentes initiatives prises en faveur des Roms est assurée par le Conseil national pour la coopération en matière ethnique et démographique. La participation de représentants des collectivités locales au Conseil favorise la mise en œuvre de la politique d’intégration du Gouvernement au niveau local.

54.En ce qui concerne l’expulsion forcée dont auraient été victimes des Roms pour satisfaire des intérêts immobiliers, M.Tzantchev dit ne disposer d’aucune information qui confirme ces allégations. Il y a bien eu des expulsions de Roms dans plusieurs villes du pays, mais elles avaient toutes pour but la restitution à leur propriétaire de biens ou de terres qui étaient illégalement occupés par des Roms. Il peut également arriver que des expulsions soient décidées pour des raisons de salubrité ou de sécurité, dans l’intérêt des occupants eux-mêmes. Ceux qui n’ont pas d’autre domicile peuvent présenter une demande de logement social. Il arrive que des procédures d’expulsion débouchent sur d’interminables batailles juridiques, mais les dispositifs de médiation entre les autorités locales, les ONG et les communautés concernées permettent généralement de trouver des solutions satisfaisantes pour tous.

55.La Présidente remercie la délégation et l’invite à poursuivre le dialogue à la séance suivante.

La séance est levée à 18 heures.