NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/SR.257429 octobre 2008

Original: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

Quatre-vingt-quatorzième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 2574e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, Genève,le mercredi 15 octobre 2008, à 15 heures

Président: M. RIVAS POSADA

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 40 DU PACTE (suite)

Cinquième rapport périodique du Japon

La séance est ouverte à 15 heures .

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 40 DU PACTE (point 8 de l’ordre du jour) (suite)

Cinquième rapport périodique du Japon (CCPR/C/JPN/5; CCPR/C/JPN/Q/5 et Add.1)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation du Japon prend place à la table du Comité .

2.M. UEDA (Japon), introduisant le cinquième rapport périodique du Japon (CCPR/C/JPN/5), dit que le Japon participe activement à la protection et à la promotion des droits de l’homme à la fois à l’échelon national et international. En 2007, il a signé la Convention relative aux droits des personnes handicapées et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et a adhéré au Statut de Rome de la Cour pénale internationale. La même année, il a invité l’ancienne Haute-Commissaire aux droits de l’homme des Nations Unies, Louise Arbour, à se rendre au Japon pour un échange de vues avec de hauts responsables du Gouvernement sur une diversité de sujets, tels que la politique des droits de l’homme et le système judiciaire au Japon. Le Japon s’efforce de jouer un rôle de premier plan au niveau international en matière d’élimination de la discrimination, comme l’illustre, entre autres, son parrainage à la huitième session du Conseil des droits de l’homme d’une résolution sur l’élimination de la discrimination à l’égard des personnes souffrant de la lèpre.

3.Le Gouvernement japonais révise actuellement ses lois et adapte ses politiques afin de suivre l’évolution de la situation des droits de l’homme au Japon. L’accent est mis particulièrement sur la protection des droits de membres vulnérables de la société, notamment les femmes, les enfants, les personnes handicapées, les minorités ethniques et les étrangers. En outre, des efforts considérables sont faits pour améliorer le traitement des prisonniers, éradiquer la traite des personnes et promouvoir l’éducation des droits de l’homme.

4.Passant à la question 1 de la liste des points à traiter (CCPR/C/JPN/Q/5), il dit que dans toutes les affaires énumérées dans les réponses écrites de la liste des points à traiter (CCPR/C/JPN/Q/5/Add.1), la Cour suprême n’a constaté aucune violation du Pacte.

5.S’agissant de la question 2, il dit que le Gouvernement japonais a l’intention de soumettre à nouveau à la Diète (Parlement japonais) un projet de loi visant à mettre en place une institution nationale des droits de l’homme indépendante dont l’objectif serait de promouvoir les droits de l’homme, d’obtenir réparation lorsque les droits sont violés et de communiquer les avis au Gouvernement et à la Diète. Ce projet est actuellement à l’examen au Ministère de la justice.

6.S’agissant de la question 3, il note que certains craignent au Japon que l’introduction de la procédure de communication individuelle ait des incidences sur le système judiciaire japonais, notamment en ce qui concerne l’indépendance du pouvoir judiciaire. C’est pourquoi le Gouvernement est en train de procéder à un examen sérieux afin de décider ou non s’il doit adhérer au premier Protocole facultatif relatif.

7.Passant à la question 4, il réitère que, si la protection des droits de l’homme n’est pas absolue ou illimitée au Japon, l’«intérêt général» ne peut être invoqué comme motif pour autoriser l’État à restreindre les droits de l’homme de manière arbitraire.

8.À propos de la question 5, il dit que le Conseil législatif du Ministère de la justice a proposé de modifier le Code civil afin de fixer l’âge du mariage pour les hommes et pour les femmes à 18 ans et de réduire à 100 jours le délai pendant lequel il est interdit de se remarier suite à un divorce. Ces questions importantes sont actuellement débattues par un échantillon très divers de la société civile au Japon.

9.Le Gouvernement a mis en œuvre de nombreuses mesures visant à protéger les droits des femmes et à améliorer la position des femmes dans la société, notamment l’adoption par le Cabinet en 2005 d’un deuxième Plan fondamental pour l’égalité entre les sexes qui définit une politique visant à instaurer une société où les hommes et les femmes sont sur un pied d’égalité et qui prévoit des mesures pour concilier travail, vie de famille et vie communautaire à la fois pour les hommes et les femmes. La mise en œuvre et l’impact de ces mesures sont actuellement à l’examen au Conseil pour l’égalité entre les sexes dont les avis sont communiqués au Premier ministre et aux autres ministres concernés.

10.En ce qui concerne la question 6, il note que la liste des points à traiter comprend un tableau montrant l’évolution de la proportion des femmes occupant des postes de direction dans chaque ministère. Un programme visant à accélérer la participation sociale des femmes a été élaboré en avril 2008, l’une des priorités étant de promouvoir la représentation des femmes dans la fonction publique. Un appel a été lancé pour encourager la promotion des femmes aux postes du service public au niveau local. En outre, des initiatives ont été prises afin que la proportion d’hommes et de femmes membres des conseils consultatifs du Gouvernement atteigne pour les deux sexes 40 % avant 2020 et que l’objectif actuel de 33,3 % de femmes membres soit atteint avant la fin de l’exercice financier de 2010. Le nombre de femmes membres de la délégation japonaise à la réunion d’aujourd’hui indique clairement une évolution de la participation des femmes au Gouvernement.

11.En ce qui concerne la question 7, l’intervenant indique que la proportion de femmes occupant des postes de gestionnaire montre une progression à long terme mais reste faible dans l’ensemble; il est donc indispensable de faire des efforts afin de promouvoir l’accès des femmes à ces postes. Ces efforts sont faits dans le cadre de la loi sur l’égalité des chances en matière d’emploi qui interdit la discrimination fondée sur le sexe et la discrimination indirecte en matière d’emploi et de promotion et encourage les mesures positives. Selon une enquête réalisée en 2007 par le Ministère de la santé, du travail et de la protection sociale, la proportion de femmes occupant des postes de chef de service, de chef de section et de directrice est passé respectivement à 12,5 %, 6,5 % et 41 % par rapport à 2003.

12.En plus des mesures prises pour réduire les écarts salariaux énumérés dans le rapport, un comité d’experts a été réuni pour rechercher des moyens plus efficaces de réduire l’écart des salaires entre les hommes et les femmes. Ce comité a été chargé d’évaluer la situation et d’étudier les effets des systèmes adoptés par les entreprises en matière de salaires sur ces écarts de salaires. La Charte sur la vie professionnelle et la vie familiale et un plan d’action élaboré par le Gouvernement en 2007 pour promouvoir l’équilibre entre le travail et la vie familiale ont fixé des objectifs pour que le pourcentage de femmes bénéficiant d’un congé de maternité atteigne 40 % et celui des hommes bénéficiant d’un congé de paternité atteigne 10 %. Le plan vise également à assurer que, d’ici à 2017,55 % des femmes reprennent le travail après avoir accouché de leur premier enfant.

13.Passant à la question 8, il dit que le viol conjugal est une infraction au titre de l’article 177 du Code pénal japonais. Un certain nombre de mesures ont été adoptées pour protéger et aider les victimes de violences sexistes, dont: des procédures spéciales pour faciliter le signalement des actes de violence et répondre aux souffrances psychologiques des victimes de sévices sexuels; la formation des juges sur les questions relatives à l’égalité entre les sexes, y compris la violence conjugale; et la formation des agents des forces de l’ordre aux droits de l’homme et aux questions relatives à l’égalité entre les sexes. Des stages de formation de base et intermédiaires sont organisés à l’intention des responsables de l’immigration pour les initier aux normes du Pacte et à la traite des êtres humains. Les nouvelles recrues de la police reçoivent une formation concernant spécifiquement le traitement des femmes suspectes et des femmes détenues. Le personnel en fonction dans les établissements pénitentiaires reçoit une formation sur la loi pour la prévention de la violence conjugale et la protection des victimes, sur l’égalité entre les sexes et la prévention du harcèlement sexuel et autres formes de violence à l’égard des femmes. Par ailleurs, des cours sur les problèmes spécifiques aux femmes, notamment leur traitement, sont organisés dans le bureau du procureur.

14.Passant aux questions 9 à 16, il dit que la loi sur la prévention de la violence conjugale et la protection des victimes a été promulguée en 2001 et amendée en 2004 puis en 2007. Cette loi établit un mécanisme permettant aux victimes de signaler les problèmes et bénéficier de conseils et d’un soutien. La révision de la loi en 2007 oblige les municipalités à formuler leur propre plan relatif à la prévention de la violence familiale et à la prise en charge des victimes de la violence conjugale et élargit l’étendue des mesures de protection ordonnées par les tribunaux pour couvrir non seulement les victimes mais aussi les membres de leur famille. Le bureau du Cabinet envoie régulièrement des conseillers dans les centres de soutien locaux pour fournir des conseils efficaces, une formation et une assistance et travaille à titre d’essai avec une entité privée pour établir des mesures encourageant l’autonomie des victimes.

15.Les centres de conseil et de soutien aux victimes de la violence conjugale et les bureaux de consultation pour les femmes fournissent des conseils et un soutien et assurent la protection des victimes. Diverses ordonnances de protection peuvent être émises par les tribunaux à la demande des victimes de violence conjugale, et le Ministère de la santé, du travail et de la protection sociale fournit aux victimes une assistance juridique, pratique et psychologique. Les victimes qui tentent d’établir leur indépendance ont également la possibilité de faire des emprunts d’argent. Enfin, le Gouvernement prend des mesures pour protéger les ressortissants étrangers qui sont victimes de ces violences, par exemple en leur donnant la possibilité de changer leur statut juridique au Japon.

16.Dans le système des prisons de substitution, les droits de l’homme des détenus sont garantis par la séparation des fonctions de détention et d’enquête. Les conditions de détention sont surveillées par des comités d’inspection composés de citoyens. Les procureurs sont tenus de communiquer à la défense les éléments de preuve, y compris ceux qui sont jugés être liés aux allégations soulevées par le suspect. Le droit des suspects de consulter un conseil désigné par un tribunal dépend de la gravité de la peine prévue et des ressources financières du prévenu; actuellement, environ 80 % des inculpés répondant à des accusations en vertu du Code pénal ont droit de faire appel à des avocats désignés par le tribunal.

17.L’opinion publique est favorable à la peine de mort. Celle-ci est appliquée seulement pour les crimes violents et cruels et obéit à des procédures très strictes. Il n’est pas prévu d’instituer un moratoire sur les exécutions. Dans les affaires criminelles, les inculpés ont le droit de faire appel deux fois et les personnes condamnées à mort font régulièrement valoir ce droit. Il n’est donc pas nécessaire dans ces cas de mettre en place un système de recours obligatoire. Les personnes condamnées à mort peuvent recevoir du courrier et des visites, y compris des visites de leurs avocats.

18.L’isolement disciplinaire de certains détenus dans une cellule individuelle pendant des périodes prolongées est une décision qui est examinée par le personnel pénitentiaire pertinent comme les médecins ou d’autres personnels spécialisés. Il existe des critères spécifiques pour le maintien de ces mesures et les détenus ont droit de recours contre ces décisions en déposant une plainte auprès du Ministère de la justice.

19.La surveillance des conditions dans les prisons et de l’administration pénitentiaire en général est réalisée par les comités d’inspection des établissements pénitentiaires qui gardent une certaine indépendance vis-à-vis du Ministère de la justice. Les détenus peuvent également déposer une plainte auprès du Ministère de la justice, qui met en place des comités d’inspection composés d’experts externes chargés d’examiner la validité des plaintes. Les détenus peuvent également engager des actions civiles ou administratives ou attirer l’attention des organes d’enquête sur leur situation. Les plaintes des détenus peuvent être déposées également auprès des commissions préfectorales de sécurité publique qui sont des instances collégiales composées de citoyens locaux. La Constitution garantit les droits de tous les citoyens, y compris les suspects impliqués dans des affaires criminelles, et les aveux obtenus sous la contrainte, la torture ou l’intimidation ne sont pas admissibles dans les tribunaux. Sauf dans des circonstances exceptionnelles exigeant des procédures spécifiques d’autorisation, les interrogatoires doivent avoir lieu pendant la journée et ne doivent pas dépasser huit heures par jour. La police vient d’établir un système de surveillance interne des interrogatoires.

20.Dans le système juridique japonais, l’interrogatoire des suspects joue un rôle important pour établir la vérité et la procédure pénale japonaise exclut les négociations de la défense, l’interception des communications et de nombreuses autres méthodes utilisées dans d’autres pays pour recueillir des éléments de preuves. Le fait de faire appel à un avocat pendant une enquête risquerait donc de compromettre l’enquête. Le Code de procédure pénale stipule toutefois que les suspects peuvent s’entretenir avec un avocat à tout moment sauf quand les nécessités de l’enquête s’y opposent, et les instructions récentes données par les autorités de police ont élargi les possibilités de ces consultations.

21.En plus des services médicaux gratuits offerts dans les établissements de la police, les détenus peuvent également consulter un médecin de leur choix et recevoir des soins médicaux à leurs propres frais.

22.Passant aux questions 17 à 19, il dit qu’une personne ne peut être expulsée vers un autre pays si sa vie ou sa liberté y sont en danger. Les personnes détenues faisant l’objet d’une expulsion peuvent déposer une plainte au directeur du centre de détention et ensuite auprès Ministère de la justice. Pour remédier au problème de la surpopulation carcérale, le Gouvernement a récemment fait des efforts pour agrandir les prisons et recruter du personnel pénitentiaire supplémentaire.

23.M. SHEARER se félicite du vif intérêt que les organisations non gouvernementales (ONG) prêtent à la situation des droits de l’homme au Japon et dit qu’il espère que le dialogue entre le Comité, l’État partie et les ONG se poursuivra dans les années à venir. Se référant à la question 1 de la liste des points à traiter, il se dit préoccupé par le fait que tous les exemples où le Pacte est invoqué concernent la Cour suprême. Il demande s’il existe des cas où le Pacte est invoqué dans des juridictions inférieures; il est spécialement important que les juridictions inférieures connaissent le Pacte, car c’est à ce niveau que les questions relatives aux droits de l’homme couvertes par le Pacte risquent d’être le plus souvent soulevées. Si le Pacte est généralement considéré comme faisant partie du droit japonais, il n’est pas reconnu de façon constante par tous les représentants des tribunaux. À cet égard, il demande si le Pacte fait partie intégrante de la formation des juges à tous les niveaux de l’appareil judiciaire et des parquets, ainsi que de celle des avocats en exercice.

24.À propos de la question 3 de la liste des points de traiter, il prend acte des préoccupations exprimées par l’État partie concernant les incidences que la ratification du premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte peut avoir sur le système judiciaire national, ce qui laisse penser que les implications de cette adhésion n’ont pas été entièrement comprises. Il exhorte l’État partie à consulter l’observation générale 13 relative aux obligations des États parties découlant du premier Protocole facultatif pour avoir de plus amples informations à ce sujet et exprime l’espoir que le Japon reviendra sur sa position concernant l’adhésion éventuelle à cet instrument.

25.M. O’FLAHERTY, Rapporteur de pays, est préoccupé par le fait que l’État partie a soumis son rapport tardivement. Se référant à la question 2 de la liste des points à traiter, il note qu’une institution nationale des droits de l’homme indépendante n’a toujours pas été établie. En 2002, La Fédération japonaise des Associations du barreau a appelé à la création d’une commission nationale des droits de l’homme selon les six critères suivants: la commission devra être instituée sous l’égide du Cabinet au lieu de celle d’un ministère donné; elle devra adopter des procédures transparentes pour la sélection de ses membres; elle devra adopter une procédure indépendante pour la nomination et le retrait de ses membres; ses membres devront avoir une connaissances et une expérience appropriées; elle devra être présente dans chaque préfecture; son mandat devra porter sur toutes les normes internationales des droits de l’homme adoptées au Japon. Il demande que l’État partie réponde à ces critères et donne son assurance que le Japon est déterminé à créer cette institution en pleine conformité avec les Principes de Paris.

26.Se référant à la question 4 de la liste des points à traiter, il dit que même s’il se félicite de la déclaration de l’État partie selon laquelle l’État ne peut restreindre les droits de l’homme de manière arbitraire au nom de l’«intérêt général», il craint qu’une interprétation restrictive du Pacte reste une possibilité institutionnelle. Il invite l’État partie à émettre un avis sur la compatibilité de la restriction au titre de l’«intérêt général» avec ses engagements internationaux et souhaiterait savoir s’il prend en considération la proposition faite par l’ancien membre du Comité M. Nisuke Ando de prendre les restrictions spécifiques prévues dans le Pacte comme référence pour interpréter le terme «intérêt général» dans la Constitution japonaise.

27.Il demande à l’État partie d’émettre un avis sur les cas de discrimination en matière d’emploi et de logement à l’égard de couples de même sexe vivant en concubinage et s’il est vrai que l’orientation sexuelle ne figure dans aucune des catégories couvertes par la loi contre la discrimination. Si c’est le cas, il invite l’État partie à examiner cette question sans tarder.

28.Mme PALM, se référant à la question 5 de la liste des points à traiter, souhaiterait avoir des informations sur le statut du projet de loi portant modifications partielles du Code civil qui modifierait les clauses existantes concernant l’âge du consentement et la période durant laquelle il est interdit de se remarier suite à un divorce. Le Comité a déjà exprimé son inquiétude vis-à-vis de ces clauses discriminatoires à l’égard des femmes dans les observations finales qu’il a formulées il y a dix ans. Le Code civil va-t-il être modifié et, si oui, quand?

29.Se référant à la question 6 de la liste des points à traiter, elle se félicite des institutions, des stratégies, des plans et des programmes mis en place pour promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes mais souhaiterait avoir des informations sur des mesures plus concrètes. Les activités de sensibilisation sont importantes pour promouvoir l’idée de l’égalité entre les sexes dans la société. L’intervenante remarque que les objectifs fixés en matière de participation des femmes au processus de prises de décision sont trop limités. Elle souhaiterait avoir un complément d’informations sur les mesures concrètes prises pour encourager les femmes à solliciter des postes supérieurs dans la fonction publique et à la Diète, comme la pratique du recrutement selon laquelle toute offre d’emploi doit être obligatoirement proposée aux candidats hommes et femmes. Elle souhaiterait également savoir quelles mesures concrètes ont été prises pour encourager les entreprises du secteur privé à recruter des femmes aux postes supérieurs.

30.Mme MAJODINA, se référant à la question 8 de la liste des points à traiter, salue les progrès réalisés en matière de violence sexiste mais est préoccupée par l’inefficacité des agents de police lorsque les femmes victimes de sévices sexuels s’adressent à eux, un grand nombre d’entre elles subissant une discrimination secondaire. Il n’existe apparemment aucune disposition légale qui exige la mise en place d’une formation tenant compte des sexospécificités à l’intention des agents des forces de l’ordre. Pour compléter les renseignements fournis dans les réponses écrites, elle invite la délégation à indiquer le nombre d’agents des forces de l’ordre qui ont reçu une formation appropriée et le nombre de bureaux de consultation et de services de détresse mis en place. Il faut renforcer l’application et le respect des directives et des politiques relatives au soutien des victimes.

31.Passant à la question 9, elle constate avec préoccupation que, selon l’État partie, la violence familiale ne devrait pas être punie plus sévèrement que les autres délits violents et que la peine maximale est une peine d’emprisonnement de deux ans. Elle demande si l’État partie envisage d’introduire une peine minimum de prison pour cette infraction. Elle salue les mesures décrites dans les réponses écrites concernant la protection et l’assistance offertes aux victimes de la violence familiale, mais souhaiterait avoir de plus amples détails sur la manière dont ces mesures sont mises en œuvre et savoir si des études ont été réalisées pour vérifier leur efficacité. Il serait également utile d’indiquer le nombre de victimes de la violence familiale ayant fait l’objet d’un examen spécial lorsqu’elles ont demandé de changer leur statut résidentiel au cours des cinq dernières années.

32.Elle demande si le Gouvernement japonais a l’intention de mener une enquête sur le phénomène des «femmes de réconfort», d’engager des poursuites contre les responsables qui sont encore en vie, d’informer le grand public de la question et d’indemniser les victimes.

33.À propos de la question 17 de la liste des points à traiter, elle aimerait connaître le nombre de personnes qui ont bénéficié du programme de réinstallation de réfugiés d’un pays tiers, étant donné le pourcentage très faible des réfugiés à qui il a été accordé un statut légal.

34.Elle souhaiterait avoir une réponse écrite à la question 18 concernant la mise en place d’une inspection indépendante et d’un organe chargé de recevoir les plaintes afin de surveiller les conditions de détention des immigrants. Certains rapports indiquent que le pays continue de procéder à des expulsions arbitraires et qu’il y a de nombreux cas de détention illimitée, par exemple le cas de ressortissants vietnamiens qui sont maintenus en détention parce que leur pays d’origine n’accepte pas leur retour. Elle souhaiterait avoir l’opinion de l’État partie sur cette question.

35.Mme CHANET espère que les progrès réalisés par le Japon seront mis en relief pendant cette séance et qu’il ne sera pas nécessaire de formuler à nouveau les recommandations faites par le Comité en 1993 et en 1998. Elle se réjouit de la présence des femmes dans la délégation et souhaiterait avoir leurs points de vue.

36.Se référant à la question 10 de la liste des points à traiter, elle dit qu’à la fois le Comité et le Conseil des droits de l’homme ont condamné le système des prisons de substitution (Daiyo Kangoku), considérant qu’il est incompatible avec les engagements internationaux de l’État partie. Dans le cadre de ce système, les interrogatoires sont réalisés pendant 24 jours et nuits dans le but d’obtenir des aveux, sans qu’ils soient enregistrés et sans la présence d’un avocat. L’importance donnée à l’accusation est incompatible avec le paragraphe 1 de l’article 14 du Pacte et la mise à l’écart du conseiller juridique constitue une violation de cet article. L’enquête scientifique offre une réelle alternative au système archaïque actuel et pourrait améliorer l’efficacité des services de police sans exercer de pression sur les personnes placées en garde à vue qui amène le suspect à faire des aveux qui ne sont pas corroborés par des preuves scientifiques.

37.Passant à la question 12 de la liste des points à traiter, elle dit que la position du Japon selon laquelle le pays n’abolira pas la peine de mort ni n’adhérera au deuxième Protocole facultatif est connue. Elle souhaiterait cependant savoir pourquoi le nombre de condamnations à mort a augmenté si la peine capitale est un moyen de dissuasion efficace contre les crimes qui justifient son application. Contrairement au Protocole, le Pacte n’est pas facultatif. La liste des crimes qui justifient l’application de la peine capitale dans l’État partie comprend l’utilisation illégale d’explosifs; or, ce délit ne figure pas dans les catégories de crimes les plus sérieux reconnus par la communauté internationale.

38.Le Comité demande à l’État partie de respecter l’article 6 ainsi que l’article 14 et de fournir toutes les garanties judiciaires aux personnes risquant la peine capitale, à la fois pendant l’instruction et pendant la phase d’appel. Elle demande à la délégation de préciser si les peines en appel sont suspendues et souhaiterait avoir des renseignements supplémentaires sur la durée de l’exécution qui, selon les rapports d’ONG, durent une heure et demie. Elle souhaiterait également savoir si les familles des détenus exécutés sont désormais informées préalablement de l’exécution ou si elles continuent de l’apprendre par les médias.

39.Même si la délégation a fait valoir que l’opinion publique était favorable à la peine de mort, le Gouvernement a voté, dans d’autres cas, une loi qui va à l’encontre de l’opinion publique, comme l’institution d’un jury dans les affaires criminelles. L’opinion publique est également favorable à la peine de mort dans des pays où elle est abolie; en outre, des voix, comme celles des ONG, de l’Association du barreau et des membres du Parlement, se sont élevées pour demander son abolition.

40.Sir Nigel RODLEY dit que les réponses de la délégation indiquent qu’elle n’a ni lu les observations finales du Comité de 1998 ni modifié sa manière de concevoir le système des prisons de substitution ou la peine de mort. Alors que le Comité a demandé à l’État partie de ne pas invoquer l’argument de l’opinion publique, le fait qu’il l’ait fait de nouveau est décourageant et le conduit à se demander si le dialogue entre l’État partie et le Comité est fructueux et constructif.

41.Attirant l’attention sur la question 13 de la liste des points à traiter, il demande pourquoi il y a si peu de recours déposés contre les peines de mort, comme l’indiquent les rapports d’ONG. L’État partie a expliqué que de nombreux recours sont déposés contre ces décisions et qu’il n’est donc pas nécessaire de mettre en place un système de recours obligatoire. Il se demande toutefois si le nombre élevé d’exécutions sans que les condamnés puissent faire valoir leurs droits vient du fait qu’il est difficile de faire appel d’une condamnation. Il demande à la délégation de préciser dans quelle mesure les prisonniers condamnés ont accès à un conseiller juridique.

42.À la lumière du nombre croissant de peines de mort prononcées chaque année, il demande à la délégation de préciser comment elle considère son dialogue avec le Comité. Un État partie ne peut se contenter de décrire simplement les pratiques qu’il applique; l’objectif du dialogue est de comprendre le Pacte et de l’appliquer de manière cohérente dans les différents systèmes des pays. Il espère que l’échange de vues qui a lieu aboutira à des résultats plus constructifs.

43.Mme WEDGWOOD dit que les attentes élevées du Comité vis-à-vis de la délégation ont été fixées par le travail impressionnant de Mme Ogata, ancienne Haute-Commissaire aux réfugiés des Nations Unies, dans le domaine du droit humanitaire et par la contribution considérable du Japon à l’aide au développement international et aux activités des Nations Unies en matière de maintien de la paix et d’aide aux réfugiés.

44.Se référant à la question 1 de la liste des points à traiter, elle demande à la délégation de faire des commentaires sur un cas donné où le Pacte a été invoqué dans les tribunaux japonais et où le tribunal a constaté que l’interdiction du démarchage politique par les citoyens était compatible avec l’article 19.

45.À propos de la question 6, elle note que le Gouvernement a fixé comme objectif d’attribuer aux femmes 30 % de tous les postes de direction avant 2020 et demande si d’autres objectifs intermédiaires plus larges ont été fixés, comme l’égalité entre les sexes dans le cursus scolaire, l’élimination des stéréotypes sexistes et l’instauration d’une culture familiale sur le lieu de travail afin de donner les moyens aux femmes et aux hommes de mener une vie plus équilibrée. Elle souhaite savoir si la législation de l’État partie interdit le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Elle suggère que le Japon revoie les distinctions juridiques existantes entre les hommes et les femmes, comme les différences d’âge pour se marier ou le délai imposé aux femmes pour se remarier après le divorce, distinctions qui renforcent les stéréotypes sexistes.

46.Se référant à la question 8, elle demande si l’État partie a prononcé des condamnations pour viol conjugal. Elle souhaiterait également savoir pourquoi il n’a pas été possible d’affecter un nombre suffisant de surveillantes au quartier des femmes.

47.Elle approuve les remarques de Sir Nigel Rodley concernant la question 10, ajoutant qu’il est possible d’aboutir à une condamnation en ayant recours à des méthodes moins musclées; les enregistrements vidéo pourraient donner à l’accusation des éléments de preuves utiles et décourager les abus. De plus, les avertissements de la police et le droit de garder le silence ne constituent pas des obstacles pour aboutir à une condamnation. Elle se dit étonnée par les dispositions existantes en vertu desquelles le conseiller juridique est nommé seulement après un délai de 72 heures et ne peut assister à l’interrogatoire, et par le fait que le silence est considéré comme un aveu de culpabilité. La haute technologie pourrait servir à prévenir les faux aveux tout en n’excluant pas les avocats du processus, une disposition qui serait plus conforme à l’image et au rôle du Japon dans le système des Nations Unies. Le devoir de divulguer en temps voulu à la défense les éléments de preuve à décharge est absolu en vertu de l’article 14 du Pacte, en particulier dans un pays qui applique la peine de mort.

48.M. SANCHEZ‑CERRO, se référant à la question 2 de la liste des points à traiter, dit que l’incapacité de l’État partie à créer une institution nationale des droits de l’homme conformément aux Principes de Paris est décourageante, malgré les recommandations répétées à la fois du Comité et du Conseil des droits de l’homme de le faire. Alors que dans ses réponses écrites le Japon a indiqué que le projet de loi sur cette question n’a pas été voté par la Diète, le Comité a été informé que ce projet présentait des lacunes et que les ONG s’y étaient fermement opposées. La version actuelle du projet de loi devrait prêter une attention particulière aux Principes de Paris et tenir compte de la nécessité d’établir une institution nationale des droits l’homme indépendante du Gouvernement et du Ministère de la justice avec un financement et des membres indépendants.

49.En ce qui concerne les questions sexospécifiques, l’intervenant attire l’attention sur la responsabilité historique de l’État partie vis-à-vis des femmes de réconfort qui ont été contraintes à fournir des services sexuels aux soldats avant 1945 et insiste sur la nécessité pour l’État partie de rétablir sa dignité et de réparer les injustices commises en indemnisant immédiatement ces femmes avant qu’elles ne décèdent tout en intentant des actions en justice et en punissant les responsables du recrutement de ces femmes, avant qu’ils ne décèdent eux aussi.

50.Même si l’État partie a indiqué que des changements ont été apportés au système des prisons de substitution, le Comité considère que ce système devrait être aboli car il implique l’interrogatoire prolongé et éprouvant des suspects et constitue une violation de la dignité humaine et des droits de l’homme. Le Comité et le Conseil des droits de l’homme ont formulé de nombreuses recommandations à cet égard et l’État partie a été prié de rendre sa législation conforme aux dispositions du Pacte.

51.M. LALLAH dit que la réponse écrite de la délégation à la question 16 le conduit à penser que les rôles de l’enquêteur et de juge ne sont pas du tout compris. La présence d’un avocat est nécessaire pour assurer que les droits des suspects sont garantis. Les raisons données par la délégation pour ne pas autoriser la présence d’un avocat indique l’incapacité de l’État partie à comprendre la nature des poursuites et des enquêtes et démontre la très forte ingérence de la police dans les tribunaux.

52.En plus des violations du paragraphe 1 de l’article 14 mentionnées par les autres membres du Comité, l’intervenant constate une autre violation du droit de garder le silence au titre du paragraphe 3 de l’article 14 qui prévoit qu’une personne accusée ne peut pas être forcée à témoigner contre elle-même ou de s’avouer coupable. Cette garantie minimale est applicable pendant le procès et devrait également être donnée par les autorités chargées de l’enquête. L’intervenant souhaite savoir comment les autorités chargées de l’enquête réagissent face à des suspects qui gardent le silence. En outre, étant donné que la délégation a déclaré dans sa réponse à la question 16 que son Code de procédure pénale interdisait les condamnations fondées seulement sur des aveux, il souhaite savoir pourquoi chercher à obtenir des aveux s’ils ne sont pas nécessaires et sont interdits par la loi. L’État partie semble n’avoir pas compris l’article 14 et devrait réviser toute sa procédure pénale puisqu’elle a des répercussions sur la vie de personnes innocentes.

53.Mme KELLER, se référant à la question 12 de la liste des points à traiter, souhaite savoir comment est mesurée l’opinion publique sur la peine de mort. Il serait utile d’avoir les chiffres actuels afin de déterminer la proportion de personnes favorables à la peine de mort et de savoir la date à laquelle les données ont été recueillies. Elle demande si le Gouvernement a l’intention de prendre des mesures pour expliquer aux citoyens les problématiques liées à la peine de mort.

La séance est levée à 18 heures .

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