Nations Unies

CCPR/C/SR.3375

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

5 septembre 2017

Original : français

Comité des droits de l’homme

1 20 e session

Compte rendu analytique de la 3375 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 4 juillet 2017, à 10 heures

Président (e):M. Iwasawa

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 40 du Pacte (suite)

Quatrième rapport périodique de la Suisse (suite)

La séance est ouverte à 10  heures.

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 40 du Pacte (suite)

Quatrième rapport périodique de la Suisse (CCPR/C/CHE/4, CCPR/C/CHE/QPR/4, et HRI/CORE/CHE/2017) (suite)

1. À l’invitation du Président, la délégation sui sse reprend place à la table du  Comité.

2.Le Président invite la délégation à poursuivre ses réponses aux questions posées par les membres du Comité à la séance précédente et lui signale qu’elle a la possibilité de faire parvenir au Comité un complément d’information dans les quarante‑huit heures.

3.M.  Gonin (Suisse) souligne que les personnes bénéficient en Suisse d’un certain nombre de garanties juridiques contre les abus de la part de la police, qui s’appliquent sur l’ensemble du territoire national. Parmi ces garanties figure notamment l’indépendance de la justice, qui est assurée à tous les niveaux de l’État, y compris au niveau cantonal. Cette garantie découle, d’une part, de la Constitution et, d’autre part, des normes internationales telles que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui est directement invocable, y compris devant les juridictions de première instance. Une autre garantie résulte du fait que la maxime de l’instruction impose aux autorités de poursuite pénale d’ouvrir et de conduire une procédure dès qu’elles ont connaissance d’infractions ou d’indices laissant présumer l’existence d’infractions. La Suisse applique donc non pas le principe de l’opportunité des poursuites, mais le principe de la légalité des poursuites. Une troisième garantie réside dans la récusation, c’est‑à‑dire que la victime peut adresser à la direction de la procédure une demande de récusation à l’encontre de toute personne qui exerce une fonction au sein d’une autorité pénale lorsque des motifs sont de nature à la rendre suspecte de prévention. Une quatrième garantie correspond à la possibilité, pour toute personne qui s’estime lésée, de porter plainte directement auprès du ministère public ; le dépôt de plainte n’est soumis à aucune condition de forme. Deux autres garanties tiennent respectivement au fait que les autorités pénales qui constatent elles‑mêmes des infractions dans l’exercice de leurs fonctions ont l’obligation de les dénoncer aux autorités compétentes, et au fait que les parties peuvent faire recours contre les décisions et les actes de procédure du ministère public. Certains cantons ont mis en place des mécanismes alternatifs à ceux prévus par la procédure pénale, et cinq cantons sont ainsi dotés d’un bureau de médiation. Sept villes comptent également un service d’ombudsman communal.

4.Concernant l’incrimination de la torture, le Gouvernement procède régulièrement à un examen approfondi de l’ordre juridique interne, afin de s’assurer de sa conformité avec les obligations de la Suisse au regard des articles 1er et 4 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; en l’état actuel des choses, rien ne permet de conclure à l’existence de lacunes dans l’incrimination de la torture en droit suisse. La torture psychologique est elle aussi une infraction pénale, car le Code pénal incrimine aussi bien l’atteinte à l’intégrité physique que l’atteinte à l’intégrité psychique. L’atteinte grave à l’intégrité physique ou psychique est punie d’une peine pouvant aller jusqu’à dix ans d’emprisonnement. À titre de comparaison, la peine maximale pour le meurtre et l’assassinat est, respectivement, l’emprisonnement pour une durée de vingt ans et l’emprisonnement à vie.

5.M me Baraga (Suisse) confirme que la Commission nationale de prévention de la torture ne supervise systématiquement que les rapatriements par vol spécial. Cela étant, elle a en tout temps la possibilité de superviser également les rapatriements par vol de ligne avec escorte policière. S’agissant du décès tragique, le 17 mars 2010, de Joseph Ndukaku Chiakwa, l’affaire est encore pendante devant les tribunaux. En ce qui concerne la détention administrative relevant du droit des étrangers, la Suisse applique des mesures de substitution, dont certaines consistent à demander à l’intéressé de se présenter régulièrement à l’autorité cantonale des migrations ou à la police cantonale et de fournir des sûretés financières appropriées pendant la durée de la procédure de renvoi.

6.M.  Düblin (Suisse) dit que le Comité de la Conférence des directrices et directeurs des départements cantonaux de justice et police, se fondant sur un arrêt récent du tribunal fédéral et tenant compte des critiques émises par les organisations non gouvernementales, a décidé de charger un comité d’experts d’analyser la situation dans les cantons s’agissant de la détention de mineurs et de familles dans l’attente de leur renvoi ; ce comité est appelé à établir, à l’intention de la Conférence, un rapport visant notamment à évaluer la nécessité de formuler des recommandations concernant la marche à suivre pour exécuter les décisions de renvoi de mineurs ou de familles. La Conférence défend clairement la position selon laquelle la séparation des membres d’une même famille et la rétention des mineurs ne sauraient être ordonnées que dans des circonstances absolument exceptionnelles.

7.M.  Zumwald (Suisse) indique que tout demandeur d’asile peut, dans le cadre de la procédure d’asile, se faire assister à ses frais par un mandataire, professionnel ou non, et que la représentation par un avocat commis d’office est gratuite, sous réserve de certaines conditions. À cet égard l’on distingue les conditions qui s’appliquent en première instance, c’est‑à‑dire pour les démarches auprès du Secrétariat d’État aux migrations, des conditions applicables pour les procédures de recours. En première instance, les conditions de l’octroi d’une aide judiciaire gratuite relèvent des garanties minimales consacrées à l’article 29 de la Constitution, qui sont valables pour tous les types de procédure d’asile ; non seulement les conditions de l’indigence du demandeur d’asile et des chances de succès de la procédure doivent être remplies, mais un mandataire commis d’office doit également être nécessaire, c’est‑à‑dire que la cause doit présenter, en droit ou en fait, des difficultés spécifiques que la partie n’est pas en mesure de résoudre elle‑même, ce qui est rarement le cas en première instance selon la jurisprudence du Tribunal administratif fédéral.

8.Pour ce qui est des procédures de recours, conformément à l’article 110a de la loi sur l’asile, la commission d’office d’un mandataire est soumise aux seules conditions de l’indigence et des chances de succès, et non pas également à la condition de la nécessité. Le titre d’avocat n’est pas indispensable, si bien que les représentants d’organisations non gouvernementales peuvent eux aussi être désignés comme mandataires commis d’office, ce qui facilite les procédures de recours. La nouvelle loi sur l’asile, qui devrait entrer en vigueur en 2019, améliore la protection juridique des demandeurs d’asile, en prévoyant notamment l’octroi d’office d’une aide judiciaire gratuite en première instance et pour les procédures dites « accélérées » auprès du Secrétariat d’État aux migrations.

9.Concernant l’admission provisoire, en octobre 2016, le Conseil fédéral a adopté un rapport intitulé « Admission provisoire et personnes à protéger : analyse et possibilités d’action », dont il ressort notamment que les personnes admises à titre provisoire restent dans les faits durablement en Suisse, et que leur intégration présente un fort potentiel d’amélioration. Le rapport énonce différentes mesures visant à améliorer l’admission provisoire afin de favoriser l’intégration plus rapide de ces personnes tout en faisant en sorte que les bonnes conditions de séjour dans le pays n’entraînent pas une augmentation de l’immigration.

10.M me  Steiger  Leuba (Suisse) explique que la Suisse considère que l’établissement des rapports périodiques à soumettre au Comité des droits de l’homme relève de sa responsabilité, de sorte que, même si elle n’exclut pas de le faire à l’avenir, elle n’associe pas à cette tâche les organisations non gouvernementales et les autres acteurs de la société civile, avec lesquels elle collabore du reste étroitement, notamment pour donner suite aux recommandations du Comité et établir le rapport national au titre de l’Examen périodique universel.

11.M. Ben  Achour aimerait savoir pour quelles raisons il a été décidé de rattacher la future institution nationale des droits de l’homme à un organisme universitaire. Il s’enquiert également des procédures disciplinaires dont peuvent faire l’objet les membres de la police qui font un usage abusif de leurs pouvoirs, et demande si les plaintes pénales déposées contre des policiers ont abouti à des condamnations au pénal. M. Ben Achour souhaite en outre obtenir des renseignements sur les points suivants : les différences importantes, entre concordats et au sein d’un même concordat, dans le taux d’occupation des établissements pénitentiaires ; le fait que les détenues ne sont pas strictement séparées des détenus ; l’absence de prise en charge adéquate des détenus mineurs dans les prisons ; l’état d’avancement de l’élaboration du rapport mentionné au paragraphe 149 du rapport de l’État partie (CCPR/C/CHE/4), et les projets dont il est fait état au paragraphe 150 de ce dernier ; et les mesures prévues ou déjà prises face aux cas préoccupants de détenus atteints d’une maladie mentale qui sont maintenus en détention bien au‑delà de la durée de leur peine.

12.Sur un tout autre sujet, M. Ben Achour s’enquiert du sens des dispositions des constitutions de certains cantons qui confèrent à une religion le statut de religion officielle ou de religion d’État, sachant, comme l’État partie l’indique dans son rapport, qu’il ne protège pas des religions ou des communautés religieuses en tant que telles, mais des individus qui, du fait de leur appartenance religieuse, peuvent être victimes de discrimination ou de racisme. Il demande en outre, d’une part, pourquoi l’initiative populaire « Contre la construction de minarets » a été soumise à votation sans contre‑projet et, d’autre part, si le paragraphe 3 de l’article 72 de la Constitution, qui consacre l’interdiction de la construction de minarets, n’est pas contraire à la politique de l’État partie en matière de religion, ne risque pas de favoriser le radicalisme religieux, et ne pourrait pas être abrogé ou modifié d’une quelconque manière.

13.En ce qui concerne les minorités ethniques, M. Ben Achour salue les efforts déployés par la Suisse pour résoudre la question du manque d’aires de stationnement et de transit pour les gens du voyage, notamment la création, à la fin de 2014, d’un groupe de travail rattaché à l’Office fédéral de la culture et chargé de mieux concrétiser les recommandations de la Convention‑cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales. Il demande où en est l’élaboration du plan d’action prévu pour donner suite aux recommandations du groupe de travail. Il souhaite également savoir quelles solutions définitives sont envisagées par la Confédération pour répondre aux besoins des communautés rom, yéniche et sinti en aires de stationnement et de transit, qui, selon certaines ONG, ne seraient couverts qu’à 50 %.

14.M.  Shany, relevant que la loi portant création de l’institution nationale des droits de l’homme fait explicitement référence aux Principes de Paris, rappelle que, selon ces principes, les organes de défense des droits de l’homme doivent veiller à la promotion et à la protection des droits de l’homme, et demande pour quelle raison la loi en question donne seulement pour mandat à l’institution de veiller à la promotion de ces droits, sans faire aucune référence à la protection. Il remercie la Suisse des efforts qu’elle déploie pour répondre aux préoccupations concernant les abus d’autorité de la part de certaines forces de police et demande si les agents de police sont équipés de caméras vidéo corporelles ou s’il est envisagé de leur en fournir.

15.S’agissant de la traite des êtres humains, M. Shany salue la ratification par la Suisse de la Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains et d’autres instruments internationaux du Conseil de l’Europe en la matière, ainsi que l’adoption du deuxième plan d’action national 2017‑2020 sur la question. Il aimerait savoir quels résultats ont été obtenus grâce au premier plan d’action et quels enseignements en ont été tirés pour l’élaboration du deuxième plan. Il demande si la Suisse entend uniformiser les pratiques des cantons en matière d’identification des victimes de la traite et d’orientation vers les services de protection, et de quelle manière elle entend répondre aux préoccupations exprimées au sujet de lacunes dans la formation et la sensibilisation des responsables de l’application des lois et des procureurs sur les questions relatives à la traite.

16.S’agissant du paragraphe 4 de l’article 98 du Code civil (lex Brunner), entré en vigueur le 1er janvier 2011, qui oblige les fiancés à établir la légalité de leur séjour en Suisse au cours de la procédure préparatoire au mariage, M. Shany constate que le Tribunal fédéral tente de limiter le champ d’application de cette disposition pour la rendre compatible avec le droit international, et demande si l’État partie envisage à terme de modifier cette disposition. Comprenant que les autorités sont tenues de n’autoriser que les « unions sincères », M. Shany souhaite connaître le nombre d’« unions sincères » reconnues à ce jour.

17.En ce qui concerne l’intersexualité, M. Shany demande à la délégation quelles mesures concrètes l’État partie a prises pour sensibiliser les professionnels de la santé et la société en général à cette question et éviter des interventions chirurgicales d’assignation qui ne correspondent pas à une nécessité. Il souhaite savoir si les allégations selon lesquelles l’État partie n’offrirait pas un soutien psychologique approprié aux personnes intersexuées ayant subi dans le passé des interventions chirurgicales d’assignation de sexe non consenties sont fondées, et si la Suisse prend des mesures pour offrir aux intéressés des voies de recours et une indemnisation appropriée.

18.S’agissant des réserves aux articles 12 (par. 1), 20, 25 b) et 26 du Pacte, M. Shany demande quelles mesures ont été prises pour réexaminer ces réserves et si cette question a été débattue au Parlement ou par le Gouvernement. Il s’étonne que l’État partie hésite à adopter une législation complète de lutte contre la discrimination, qui permettrait de combattre toutes les formes de discrimination dont sont victimes les groupes vulnérables et d’abandonner l’approche sectorielle, qui semble présenter des lacunes, en particulier sur les plans civil et administratif, et demande quel est le point de vue de la délégation sur cette question. Concernant les réserves en général, M. Shany note que la Suisse souhaite ne pas multiplier les divergences entre le droit interne et le Pacte, mais rappelle qu’en cas de divergence, un État a le choix de formuler une réserve, de modifier sa législation ou d’en donner une nouvelle interprétation, et se demande si la Suisse a envisagé toutes les éventualités offertes par ces deux dernières possibilités. S’agissant plus particulièrement de sa réserve à l’article 12 du Pacte, dans laquelle la Suisse fait référence au paragraphe 1 de l’article 37 de la loi fédérale sur les étrangers, il ne voit pas en quoi cette disposition est en conflit avec le paragraphe 3 de l’article 12 du Pacte ; il en va de même du conflit qui existerait entre l’article 20 du Pacte et les titres 13 et 16 du Code pénal suisse et les articles 184 et 185 de la Constitution fédérale. M. Shany est d’avis que la Suisse a fait preuve d’une prudence excessive dans la formulation de ses réserves.

19.M. Shany aimerait comprendre ce qui empêche la Suisse de ratifier le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte, sachant qu’elle est déjà partie à la Convention européenne des droits de l’homme, qui permet aux particuliers de déposer des plaintes à titre individuel, et que le Centre suisse de compétence pour les droits humains a relevé que, dans 13 domaines, les garanties offertes par le Pacte allaient au‑delà de celles prévues par la Convention européenne, si bien que la ratification du Protocole permettrait d’assurer aux citoyens suisses une meilleure réalisation de leurs droits.

20.En ce qui concerne la conformité avec le Pacte de la loi fédérale sur le renseignement, qui ne figure pas dans la liste des points à traiter puisqu’elle a été adoptée en septembre 2016, M. Shany demande quelles sont les menaces pour la sécurité qui justifieraient le recours aux pouvoirs extraordinaires de surveillance prévus par la loi, et si la liste figurant au paragraphe 2 de l’article 19 de cette loi est exhaustive ou exemplative. Il aimerait savoir quel degré de précision doivent présenter les demandes de surveillance, pour quels motifs une surveillance individuelle peut être demandée, et quelle est la procédure d’approbation d’une mesure de surveillance requise par le Tribunal administratif fédéral. Il se demande également comment est assurée la protection du droit à la vie privée de la personne faisant l’objet de la surveillance, en quoi consiste la surveillance exercée par le Parlement, et s’il existe des garanties en ce qui concerne la collecte de données en masse et la conservation des métadonnées.

21.M. Santos  Pais souhaite connaître le nombre de cas de mutilations génitales féminines en Suisse. En ce qui concerne la violence domestique, il demande si les renseignements concernant la formation dispensée aux agents de police genevois dans ce domaine valent également pour les autres cantons, si les magistrats du parquet et du siège reçoivent également une formation et si des équipes spécialisées d’agents de police et/ou de magistrats ont été créées pour lutter contre la violence domestique. S’agissant de l’article 50 de la loi fédérale sur les étrangers, M. Santos Pais relève que les informations reçues font état d’un manque d’harmonisation au niveau fédéral dans l’application des critères prévus par cette disposition, et il souhaite savoir si les autorités ont prévu d’examiner cette question. M. Santos Pais salue l’adoption de la loi fédérale concernant les mesures de lutte contre les mariages forcés et le nouveau libellé de l’article 181 a) du Code pénal. Prenant note du lancement d’un programme de lutte contre les mariages forcés pour la période 2013‑2017, il souhaiterait en savoir plus sur l’objectif, les résultats et les mesures les plus emblématiques de ce programme. Enfin, il apprécierait de disposer de statistiques sur le nombre et le type de mariages forcés recensés en Suisse.

22.En ce qui concerne les châtiments corporels, il relève que le droit de correction tel qu’interprété par les tribunaux suisses ne semble pas exclure les châtiments corporels à l’égard des enfants et demande à la délégation si elle estime que la législation existante répond aux préoccupations exprimées par certains organes de l’ONU à ce sujet. Il demande si les châtiments corporels à l’égard des enfants sont interdits en Suisse.

23.M.  Heyns aimerait savoir quels recours civils sont ouverts aux personnes LGBT victimes de discriminations, et demande à la délégation si elle dispose de renseignements complémentaires concernant l’application de la loi sur les langues.

24.M.  Muhumuza souhaite savoir comment les requérants d’asile qui ont été déboutés et qui n’ont pas les moyens financiers de faire appel peuvent présenter les garanties financières nécessaires pour intenter une telle procédure.

25.M me Jelić cite la résolution du Comité des ministres du Conseil de l’Europe du 28 mai 2014, dans laquelle il est dit qu’il n’existe pas, au niveau intercantonal, de mécanisme efficace de consultation des gens du voyage, que les préoccupations de ces personnes ne sont pas portées à la connaissance des autorités locales, et que la scolarité des enfants appartenant à cette communauté et voyageant avec leurs parents n’est pas assurée. Elle souhaite savoir ce qui a été entrepris pour améliorer cette situation, pour augmenter le nombre d’aires de stationnement et de transit à la disposition des gens du voyage, et pour encourager la Confédération, les cantons et les communes à tenir compte de la nécessité d’intégrer dans la gestion des plans d’aménagement du territoire les problèmes que rencontrent cette communauté.

26.M me Cleveland rappelle l’évolution récente de la législation cantonale relative à la liberté de religion, notamment que, dans le canton de Bâle‑Ville, un règlement oblige les jeunes filles musulmanes à suivre des cours de natation mixtes, qu’à Bâle‑Campagne, les garçons musulmans ont l’obligation de serrer la main de leur maîtresse d’école, qu’en mars 2014, une commune du canton de Saint‑Gall a interdit le port du voile à l’école, qu’en 2013 le Tessin a interdit le port de la burqa dans les lieux publics, et que, dans le courant de 2017, le peuple suisse sera peut‑être appelé à se prononcer sur l’extension de l’interdiction de la burqa à l’ensemble du territoire. Elle relève que cette évolution pourrait être perçue comme l’expression d’un sentiment d’hostilité à l’égard d’une minorité religieuse de l’État partie. Elle ajoute qu’au paragraphe 176 de son rapport, la Suisse indique que le Conseil fédéral et le Parlement ont conclu que la validité de l’interdiction du port de la burqa dans les lieux publics instituée au Tessin devrait être confirmée, eu égard notamment à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme. Étant donné que, dans ce domaine, la jurisprudence du Comité diffère de celle de la CEDH, Mme Cleveland demande s’il a été a tenu compte des obligations de la Suisse au titre des articles 18 et 22 du Pacte et de la jurisprudence du Comité dans ce domaine, et dans quelle mesure l’évolution de la législation rappelée plus haut est conforme à la liberté de manifester sa religion et à l’interdiction de la discrimination. Elle souhaite savoir si la Suisse a tenu compte de la recommandation du Comité selon laquelle il appartient à l’État partie d’instituer un mécanisme indépendant chargé d’examiner ex  ante la compatibilité des initiatives populaires avec ses obligations au titre du droit international des droits de l’homme. En ce qui concerne la loi genevoise de 2008 sur les manifestations sur le domaine public, qui prévoit que toute manifestation sur le domaine public est soumise à une autorisation préalable et qui punit tout contrevenant d’une amende pouvant atteindre 100 00 francs suisses, Mme Cleveland souhaite savoir dans quels cas cette loi a été appliquée, quelles ont été les peines prononcées, et comment la loi est interprétée de manière à assurer sa conformité avec les articles 19 et 21 du Pacte relatifs aux libertés d’expression et de réunion.

La séance est suspendue à 11 heures 25 ; elle est reprise à 11 heures 45.

27.M.  Dumermuth (Suisse) indique que la Suisse applique effectivement le Protocole d’Istanbul. Un cas d’extradition a soulevé des questions à cet égard ; l’affaire est actuellement devant les tribunaux.

28.M.  Schürman (Suisse) explique en quoi le statut de la nouvelle institution nationale des droits de l’homme correspond à un « statu quo plus ». Le système d’achat de prestations qui prévalait pour le Centre suisse de compétence pour les droits humains disparaît : la nouvelle institution décidera ainsi de son programme de travail et de l’utilisation de son budget en toute indépendance. En outre, elle sera constituée de manière permanente et pourra compléter ses ressources, à l’instar du Centre suisse de compétence pour les droits humains, en fournissant des prestations aux différents échelons du Gouvernement ou à des acteurs privés. Dans la définition des missions du projet d’institution nationale des droits de l’homme, il n’est délibérément pas fait de distinction entre promotion et protection des droits de l’homme, car les deux vont de pair. La fonction de protection des droits de l’homme reviendrait plutôt à un ombudsman ; la création d’un ombudsman fédéral a été proposée au Conseil fédéral, mais ce dernier l’a refusée. La Suisse envisage de rattacher l’institution nationale des droits de l’homme aux universités car elle s’appuie sur le modèle éprouvé du Centre suisse de compétence pour les droits humains, qui collabore avec quatre universités. C’est aussi un moyen de faire participer les cantons à ce processus et de tirer parti des ressources des universités. La création d’un institut totalement indépendant a été envisagée, mais le Conseil fédéral lui a préféré l’option « statu quo plus » afin de ne pas mettre en danger l’ensemble du projet, qui ne bénéficiait pas d’un soutien unanime.

29.M me Bonfanti (Suisse) dit qu’en 2016, 66 affaires pénales ont été ouvertes contre des membres des forces de police, dont 29 pour mauvais traitements. Ce nombre inclut les plaintes déposées par les victimes, les dénonciations de la hiérarchie policière ainsi que les affaires ouvertes à la suite d’informations parues dans les médias. La base réglementaire est solide, puisque tout fonctionnaire est tenu de dénoncer toute infraction dont il a connaissance. Les plaintes enregistrées sont instruites par le ministère public. La direction de la police genevoise n’hésite pas à suspendre de leurs fonctions les policiers soupçonnés d’actes particulièrement graves. Les incriminés disposent de recours au niveau cantonal et fédéral. Ils peuvent faire l’objet de sanctions disciplinaires allant du blâme à la révocation, contre lesquelles ils disposent des mêmes recours. Une vingtaine de sanctions disciplinaires sont prononcées chaque année. Les policiers soupçonnés de mauvais traitements sont suspendus de leurs fonctions. Il convient de souligner qu’un policier peut être révoqué y compris lorsqu’il commet des actes répréhensibles dans sa vie privée.

30.M.  Zumwald (Suisse) donne des précisions sur les garanties financières demandées aux demandeurs d’asile déboutés qui déposent un recours. En principe, la procédure est gratuite et les frais de mandataire sont pris en charge, à condition que le recours ne soit pas manifestement voué à l’échec. Si le recours semble a priori manifestement infondé, le ministère public peut demander le versement d’une avance de frais sous peine d’irrecevabilité. Ce cas ne se présente que rarement puisque sur 2 845 recours déposés entre janvier et juin 2017, seuls 324 ont été déclarés irrecevables.

31.M me Baraga (Suisse) indique que la délivrance d’un permis de séjour aux victimes de violences de nationalité étrangère est de la compétence des cantons. En cas de refus de la part d’un canton, la personne intéressée peut déposer un recours au niveau fédéral. Le Secrétariat d’État aux migrations et le Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes ont organisé plusieurs ateliers régionaux à l’intention des autorités cantonales des migrations et des services spécialisés afin d’optimiser la collaboration entre services. Le Secrétariat d’État aux migrations a également adressé aux autorités cantonales et aux services spécialisés une circulaire sur la violence conjugale présentant en détail la jurisprudence, sa mise en œuvre pratique, la collaboration avec les services concernés, l’extension de la définition de la violence conjugale aux mariages forcés et les mesures prévues par le droit des étrangers contre les auteurs de violences conjugales. Des activités de formation continue sont aussi régulièrement organisées dans les cantons.

32.M.  Barsuglia (Suisse) indique qu’en 2013, le nombre de femmes concernées ou menacées par les mutilations génitales en Suisse était estimé à environ 147 000. Ce chiffre est fondé sur la prévalence des mutilations génitales féminines dans les pays d’origine.

33.M me Bonfanti (Suisse) précise qu’un mécanisme a été mis en place pour lutter contre les violences familiales, prévoyant des actions de formation de base et de formation continue des policiers sous l’égide de l’Institut suisse de police. Les modalités pratiques varient selon les cantons. Les magistrats sont également formés à ces questions. La police genevoise estime que les policiers de proximité sont les mieux placés pour déceler les violences familiales. Dans les cas les plus graves, elle fait appel au personnel spécialisé de la police judiciaire qui est formé pour auditionner dans les meilleures conditions les victimes et les enfants.

34.M me Zermatten (Suisse), abordant la question de la surpopulation carcérale, dit que la situation s’améliore, puisque le taux de surpopulation carcérale pour 2016 s’établit à 104,6 % et que 2 200 nouvelles places en détention devraient être ouvertes d’ici 2025. À Champ‑Dollon, la construction de la nouvelle prison devrait s’achever en 2021. S’agissant de l’organisation pénitentiaire, les cantons sont regroupés en concordats pour plus de simplicité. Dans chaque concordat se trouvent donc des personnes originaires de différents cantons. La surpopulation carcérale est plus importante dans le concordat latin, qui compte environ 500 détenus supplémentaires, car la proportion d’étrangers y est supérieure et il est souvent plus difficile de trouver des alternatives à la détention et des solutions de réinsertion pour ces personnes.

35.S’agissant des conditions de détention, la séparation entre femmes et hommes, mineurs et adultes, prévenus et condamnés est prévue dans les textes. Selon un rapport de 2015 du Centre suisse de compétence pour les droits humains, ce principe est globalement respecté, sauf dans les prisons de très petite taille, où il ne paraît pas nécessairement pertinent d’imposer une stricte séparation sous peine d’isoler certaines personnes. Les enfants sont généralement placés dans des établissements spécifiques, qui sont reconnus et subventionnés par la Confédération à condition qu’ils aient élaboré un concept adapté aux mineurs. Les lacunes qui subsistent sont donc minoritaires. Par ailleurs, la Suisse avait fait une réserve à la Convention relative aux droits de l’enfant et elle a jusqu’en 2017 pour construire des établissements adaptés. Une table ronde a été organisée par l’Office fédéral de la justice avec les juges des mineurs et les représentants cantonaux, notamment du concordat latin, au sujet de l’amélioration de la prise en charge des mineurs condamnés par la justice pénale.

36.S’agissant des personnes souffrant de troubles psychiques, le groupe de travail mis en place par la Conférence des directeurs cantonaux de justice et police a rendu début 2016 un rapport sur les besoins de ces personnes, assorti de recommandations. Les concordats vont formuler des propositions pour leur mise en œuvre dans les cantons. Plusieurs projets d’aménagement de centres de soins destinés aux personnes souffrant de troubles psychiques et condamnées par la justice pénale sont également en cours dans différents cantons. Dans le cas de personnes souffrant de troubles psychiques qui, bien que condamnées à de courtes peines de prison, restent longtemps en détention, il convient de noter que l’exécution de la peine privative de liberté est suspendue au profit d’une mesure de sûreté pour troubles mentaux. En application de l’article 59 du Code pénal, cette mesure dure au maximum cinq ans mais peut être prolongée par le juge, notamment en cas de risque élevé de récidive. Cette situation n’est pas satisfaisante, comme l’a souligné la Commission nationale de prévention de la torture dans son dernier rapport, et diverses mesures visant à favoriser la réinsertion de ces personnes sont d’ores et déjà mises en œuvre par les cantons.

37.M.  Knubel (Suisse) rappelle que le plan national d’action contre la traite des êtres humains est élaboré dans le cadre du Service de coordination contre la traite d’êtres humains et le trafic de migrants (SCOTT), dirigé par l’Office fédéral de la police, qui réunit 18 organisations membres de l’administration fédérale et des cantons. Ce plan est contraignant pour les organisations membres, mais sauf exception, il ne dispose pas d’un budget spécifique : il est directement mis en œuvre par ces organisations, qui conservent leurs compétences et prérogatives. Le premier plan d’action national comportait 23 mesures, dont 17 ont été mises en œuvre, une a été redéfinie, 3 sont toujours en cours et 2 sont reprises dans le prochain plan qui portera sur la période 2017‑2020. Ce plan ne fait pas l’objet d’une évaluation à proprement parler, mais chaque organisation membre doit régulièrement rendre compte des progrès accomplis. La Suisse étant un État fédéral, harmoniser totalement les pratiques entre cantons, notamment pour l’identification des victimes, ne paraît pas envisageable ; en revanche, il convient de garantir partout le respect des normes minimales inscrites dans la législation. Des efforts importants sont faits pour expliciter et promouvoir ces normes. La Confédération réunit chaque année les responsables des mécanismes cantonaux de coopération contre la traite pour un échange d’informations et de bonnes pratiques. Elle organise régulièrement des formations pour les autorités de police et les services cantonaux de migration, et a élaboré un processus‑cadre à l’intention des cantons. En outre, le programme de protection des victimes du plan 2017‑2020 prévoit l’élaboration d’un document de référence destiné aux cantons pour une application uniforme du droit dans ce domaine. Enfin, le plan d’action 2017‑2020 prévoit de nombreuses mesures de formation pour les policiers, qui viennent s’ajouter aux dispositifs déjà existants.

38.M me Bonfanti (Suisse) indique que la Brigade de lutte contre la traite des êtres humains et la prostitution illicite a été créée en 2016 au sein de la police judiciaire. À Genève, la loi sur la prostitution prévoit l’obligation pour toute personne désireuse d’exercer cette activité de s’enregistrer auprès de la police. Un entretien est alors mené pour s’assurer que la personne n’est pas contrainte à la prostitution. Ces dispositions permettent d’apaiser les rapports entre la police et les personnes prostituées et donc d’améliorer la sécurité de ces dernières. La brigade a aussi pour mission de lutter contre le travail illicite, l’exploitation de la force de travail, les mariages blancs et le trafic d’organes. La police genevoise collabore étroitement avec EUROPOL pour lutter contre l’exploitation de la force de travail, ainsi qu’avec les foyers d’accueil qui lui signalent les situations problématiques.

39.M me Gianinazzi (Suisse) dit que l’alinéa 4 de l’article 98 du Code civil, qui vise à empêcher le mariage des étrangers en situation irrégulière, ne sera pas modifié pour l’instant, car une décision prise en 2011 par le Tribunal fédéral a posé les principes de son application. L’évaluation de la sincérité des fiancés se fait au cas par cas sur la base des dossiers des Services des migrations et en tenant compte des doutes éventuels que la situation peut susciter, par exemple lorsqu’il existe une différence d’âge importante ou lorsque les fiancés ne parlent pas la même langue.

40.M me Baraga (Suisse) indique que des mesures de lutte contre le mariage forcé ont été mises en place ou renforcées, et que le programme fédéral d’évaluation a permis d’améliorer le cadre de la lutte contre ce phénomène. Des informations chiffrées sur le sujet figureront dans le rapport du Conseil fédéral qui sera publié à l’automne 2017, de même que des informations sur les suites à donner à l’engagement de la Confédération.

41.M me Ramseyer (Suisse) explique que le Gouvernement et le Parlement fédéral ont dénoncé l’initiative concernant les minarets, qui contrevient aux dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme et du Pacte. Cependant, le Parlement a estimé qu’elle ne portait pas atteinte à la norme impérative de droit international (jus  cogens), et il ne l’a donc pas déclarée nulle. La construction de minarets est interdite depuis 2009, mais les quatre minarets déjà construits ont été conservés. Dans la pratique, cette disposition ne cause aucun problème. Il serait possible de remplacer dans la Constitution la disposition d’interdiction par un article plus général sur les religions, mais remettre en cause si rapidement une décision populaire serait inopportun, et empiéter sur les compétences cantonales ne serait pas conforme à la culture politique suisse. Les rapports entre l’église et l’État relèvent de la compétence des cantons, et c’est donc la tradition locale qui guide la reconnaissance des communautés religieuses.

42.Concernant le cas d’un enfant qui a refusé de serrer la main de son enseignante, Mme Ramseyer souligne que le Gouvernement a dénoncé ce comportement, mais qu’il n’existe pas de base légale pour le sanctionner. L’interdiction de dissimuler son visage dans les lieux publics, en vigueur depuis le 1er juillet 2016, est inspirée de la loi française du 11 octobre 2010, qui a été validée par un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme le 1er juillet 2014. Le Parlement fédéral a donc entériné cette disposition. Dans la pratique, la police informe les femmes voilées de l’interdiction, dont l’application pose rarement de problèmes. A contrario, un tribunal régional a jugé abusif le licenciement d’une salariée en raison du port du voile. Concernant l’obligation de suivre des cours de natation à l’école primaire, la Cour européenne des droits de l’homme a confirmé l’arrêt de 2012 du Tribunal fédéral, qui a souligné la primauté des obligations scolaires et de l’intégration des enfants sur le respect des pratiques religieuses. Mme Ramseyer rappelle que cette obligation prend fin à la puberté et qu’il existe des mesures d’accompagnement telles que des vestiaires et douches séparés ou l’autorisation du port du burkini.

43.M.  Galizia (Suisse) dit que les services de lutte contre le racisme ont constaté un climat d’opposition à l’égard des musulmans, qui prévaut aussi dans d’autres pays en raison du contexte international. Un rapport sur la situation du racisme en Suisse sera présenté en octobre. Il convient de résoudre les problèmes sur le terrain et au niveau sociétal plutôt que juridique, et beaucoup d’initiatives sont prises à cette fin par les communes, les cantons et les institutions nationales. La Suisse est consciente que des menaces pèsent sur la sécurité des communautés juive et musulmane, et le Réseau national de sécurité a mis en place un groupe de travail, auquel participent des représentants de ces communautés religieuses, en vue d’améliorer la sécurité et le respect des droits des minorités, y compris des LGBT. Un rapport est attendu d’ici la fin de l’année.

44.M me Gianinazzi (Suisse) indique que le droit de correction des pères et des mères a été abrogé lors de la révision de 1978 du Code civil, et que le Code pénal sanctionne les châtiments corporels. La Suisse estime qu’il vaut mieux privilégier une approche concrète de sensibilisation des parents plutôt que de voter de nouvelles lois.

45.M.  Barsuglia (Suisse) dit que la Suisse a mené des actions de sensibilisation aux droits des enfants intersexués auprès du corps médical et du grand public, notamment par l’intermédiaire des associations de médecins et de patients et des universités. À ce jour, il n’y a eu aucune action civile de demande de réparation morale en lien avec une opération de changement de sexe.

46.M me Wigger (Suisse) dit qu’une série de recommandations a été élaborée, en consultation avec les représentants des gens du voyage, pour remédier au manque d’aires de stationnement et de transit. Un rapport a été soumis au Gouvernement fin 2016, et des négociations sont en cours avec les cantons au sujet des aires de stationnement. La Suisse est consciente du manque d’emplacements, mais la planification du territoire relève de la compétence des cantons. La mise en place d’un groupe de travail chargé de la question a favorisé une prise de conscience, qui s’est concrétisée par la création d’emplacements dans plusieurs cantons, et la Confédération veille à ce que cette question soit intégrée dans les plans directeurs cantonaux. Les représentants des gens du voyage participent de façon active au groupe de travail et aux comités de consultation, ce qui favorise le développement d’un sentiment de citoyenneté parmi les minorités et sensibilise les autorités à la nécessité de consulter les gens du voyage lors de la création de nouveaux emplacements. Par ailleurs, le budget alloué à l’encouragement de la culture de ces minorités a été doublé en 2016. La question de la scolarisation des enfants itinérants relève des cantons. La difficulté est de concilier le droit des parents de vivre une culture nomade et le droit des enfants à l’éducation. La Suisse s’inspire de l’expérience en la matière de l’Allemagne et de la France, dont les populations nomades sont beaucoup plus importantes. Les enseignements d’un projet pilote en cours à Berne seront partagés au niveau national en janvier 2018.

47.M.  Schürmann (Suisse) dit que pour certaines réserves, la situation est similaire pour le Pacte et la Convention européenne des droits de l’homme, et que toute réflexion portant sur un retrait des réserves au Pacte devrait aussi, par souci d’économie de procédure, aborder la question de la ratification du Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme. La Suisse a pris note avec intérêt des remarques formulées par le Comité quant au fait que les obstacles à la levée des réserves qui existaient en 1993 ne sont peut‑être plus d’actualité, et elle procédera à une nouvelle analyse de la situation. En ce qui concerne le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte, M. Schürmann rappelle que la Suisse a déjà ratifié d’autres instruments instituant des mécanismes de plaintes individuelles. Il indique que ces dernières années, le climat n’a pas été très favorable pour la protection des droits de l’homme, ni en Suisse ni ailleurs. En Suisse, il y a même eu une proposition parlementaire visant à dénoncer la Convention européenne des droits de l’homme, proposition que le Conseil fédéral a très clairement rejetée. Pour l’heure, il est donc préférable pour la Suisse de chercher à consolider les acquis en matière de droits de l’homme plutôt que d’essayer d’élargir ses engagements internationaux dans ce domaine.

48.M.  Dumermuth (Suisse) indique que la question portant sur les services de renseignements recevra une réponse écrite.

49.M me Bonfanti (Suisse) déclare qu’une modification législative a été introduite après que des manifestations ont dégénéré, afin de responsabiliser les organisateurs d’événements quant à l’obligation d’en assurer la sécurité. En 2016, 1 024 manifestations autorisées ont eu lieu à Genève. Quelques contraventions ont été dressées pour non‑respect de dispositions relatives à l’organisation de manifestations, sans jamais que l’amende n’atteigne le montant maximum de 100 000 francs prévu par la loi. Les manifestations organisées ne posent pas de problème, contrairement aux manifestations spontanées déclenchées au moyen des réseaux sociaux et qui, faute d’organisateurs identifiés, posent un problème juridique de responsabilité.

50.M.  Heyns demande que soit communiqué un document décrivant les critères auxquels les activités de profilage doivent satisfaire pour être jugées légitimes.

La séance est levée à 13  heures.