NATIONS UNIES

CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/SR.18249 août 2007

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante et onzième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1824e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le vendredi 3 août 2007, à 10 heures

Président: M. de GOUTTES

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Deuxième à quatrième rapports périodiques du Kirghizistan (suite)

SUIVI DE LA CONFÉRENCE MONDIALE CONTRE LE RACISME, LA DISCRIMINATION RACIALE, LA XÉNOPHOBIE ET L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE.

La séance est ouverte à 10 h 15.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Deuxième à quatrième rapports périodiques du Kirghizistan (CERD/C/KGZ/4; HRI/CORE/1/Add.101; CERD/C/304/Add.77) (suite)

1.Sur l’invitation du Président, la délégation kirghize reprend place à la table du Comité.

2.M. DJUMALIEV (Kirghizistan) dit que les organisations non gouvernementales (ONG) jouent un rôle important au Kirghizistan et qu’elles apportent une contribution précieuse à la vie sociale, culturelle et économique du pays. Les ONG participent au développement des politiques et à l’élaboration des textes de lois et des rapports du pays, y compris ceux soumis en vertu des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme. Le Gouvernement respecte les ONG et encourage leurs activités.

3.M. NASIZA (Kirghizistan) dit que selon les données officielles communiquées par les instances judiciaires d’État, aucun cas de discrimination raciale tombant sous le coup de la Convention n’a été transmis à la justice au cours de la période à l’examen.

4.M. DJUMALIEV (Kirghizistan) dit qu’aucune plainte individuelle n’a été formée contre l’État au titre de la Convention. Le 14 janvier 2001, un décret présidentiel a été promulgué sur les mesures de renforcement de la protection des droits humains et civils et des libertés fondamentales au Kirghizistan. Le Conseil national kirghize coopère avec toutes les autorités de l’État et les autorités locales pour garantir l’application effective des mesures prises par l’Assemblée du peuple du Kirghizistan. Le Conseil national participe également à la création et à la mise en œuvre des programmes de développement économique et social, joue un rôle consultatif au sein de la société civile en donnant son avis lors de l’élaboration des lois d’application des politiques nationales. Toute une série de manifestations est organisée chaque année sous l’égide de l’Assemblée du peuple du Kirghizistan, tels que les événements organisés pendant les jours fériés pour la promotion de la tolérance interethnique. Toutes ces activités ont pour objectif de renforcer l’harmonie interethnique et nationale entre les peuples du Kirghizistan et de consolider les mesures de développement économique. En 2006, le Président de la République a été élu Président de l’Assemblée du peuple du Kirghizistan. L’Assemblée organise des célébrations et des événements culturels au niveau national afin d’encourager la connaissance des différentes traditions nationales et ethniques. Un centre culturel pour les ONG a été créé dans le sud du Kirghizistan qui concourt à la coopération, la compréhension mutuelle et la tolérance entre les différents peuples du pays. L’Assemblée participe également à l’élaboration des textes de loi, y compris ceux relatifs à la protection des droits des minorités nationales, et organise des activités pour développer les cultures et les langues nationales qui relaient les activités des centres culturels nationaux.

5.Des mesures diversifiées ont été prises pour encourager le développement culturel, par le biais de la participation des institutions d’éducation nationale et des médias nationaux et des initiatives prises par les différents groupes ethniques. Actuellement, 31 centres culturels et ONG exercent des activités sous l’égide de l’Assemblée du peuple du Kirghizistan. L’Assemblée est en contact avec l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), et notamment avec le Haut-Commissaire de l’OSCE chargé des questions relatives aux minorités nationales, qui a eu des contacts réguliers avec les dirigeants de l’Assemblée et les organisations nationales de défense des droits des minorités, et formule des recommandations sur les questions relatives aux minorités.

6.M. NASIZA (Kirghizistan) dit que la nouvelle Constitution, entrée en vigueur le 20 janvier 2007, contient un chapitre sur les droits et libertés fondamentales de l’homme et du citoyen qui garantit l’égalité de tous devant la loi et interdit la discrimination fondée sur le sexe, la race, la langue, la nationalité, la croyance religieuse, l’appartenance politique ou toute autre caractéristique. La nouvelle Constitution garantit le droit à la vie et c’est pourquoi la peine de mort a été abolie dans le pays. Tous les cas de personnes condamnées à la peine capitale mais non exécutées seront réexaminés par la Cour suprême. Depuis le 1er juillet 2007, toutes les affaires relatives à des perquisitions, à la saisie de documents, à l’arrestation et à la détention de personnes ont été traitées par les tribunaux et toutes les décisions prises dans ce cadre ont été rendues en consultation avec les avocats de la défense des prévenus. À cet égard, la nouvelle Constitution et la nouvelle législation sont pleinement conformes aux normes internationales.

7.Conformément à la législation régissant les fonctions des médias, les journalistes ont le droit de publier toutes les informations qu’ils souhaitent, excepté celles qui sont soumises à des restrictions comme l’a indiqué la délégation à la réunion précédente du Comité (CERD/C/SR.1823). Les affaires d’atteinte à l’honneur et de diffamation sont jugées par les tribunaux et par eux seuls. Suite à une déclaration publiée dans le journal Slovo Kyrgystana affirmant que tous les Ouïgours sont des terroristes, il a été conseillé au Centre culturel ouïgour d’engager des poursuites judiciaires contre ledit journal afin de défendre les droits du peuple ouïgour, ce que n’a pas choisi de faire ledit centre. Toutes les publications ont leur place dans la société mais les victimes sont habilitées à saisir la justice lorsque des articles de presse incitent à la haine ou à la discrimination.

8.S’agissant de la question des plaintes pour infractions à la législation du travail, M. Nasiza dit que le Procureur général qui est chargé de veiller au respect de la législation a relevé des infractions ordinaires à la législation relative au paiement des salaires, à la couverture sociale, aux pensions de retraite et aux allocations sociales et qu’il prend les mesures nécessaires pour traduire les coupables en justice par le biais de mesures disciplinaires.

9.Le Kirghizistan n’a pas de problème avec les réfugiés ouzbèkes impliqués dans les événements qui ont eu lieu à Andijan, en mai 2005. En 2005, le Gouvernement a montré qu’il était résolu à respecter ses obligations internationales. Dans le cadre des événements d’Andijan, le Gouvernement a pris la décision de transférer 439 réfugiés ouzbèkes dans un pays tiers en étroite coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Les autorités kirghizes ont créé un camp pour ces réfugiés et leur ont offert un refuge et une assistance matérielle tant qu’ils résidaient dans le pays. Les autorités ouzbèkes ont demandé que 29 réfugiés ouzbèkes accusés d’infractions graves soient extradés mais le Procureur général a refusé cette demande pour 25 d’entre eux en raison de preuves insuffisantes quant à leur participation aux événements d’Andijan. Les quatre réfugiés restants ont été extradés, l’enquête ayant démontré leur participation à l’assassinat du Procureur d’Andijan et ayant conclu qu’ils posaient par conséquent une menace grave à la sécurité kirghize. Le Kirghizistan avait le droit souverain, en vertu du droit international, d’expulser ces personnes de son territoire.

10.M. DJUMALIEV (Kirghizistan) dit que le développement économique du pays est une priorité du Gouvernement, d’autant que le Kirghizistan a hérité d’un certain nombre de problèmes de l’ex-Union soviétique, notamment de la pauvreté, et que la transition vers l’économie de marché a été difficile. Le Gouvernement a adopté plusieurs programmes de lutte contre la pauvreté, sur recommandation de plusieurs organisations internationales, y compris d’institutions financières internationales. Le problème est que le pays doit faire face au poids considérable de la dette extérieure, qui est actuellement équivalente à 100 % de son produit intérieur brut (PIB). Le fait que le Gouvernement n’accorde pas assez d’attention aux questions relatives aux minorités n’est pas dû à la discrimination mais plutôt à un manque de ressources financières. Une stratégie nationale de développement a récemment été élaborée qui contient des programmes en vue de la réduction de la pauvreté, du développement de l’économie et du renforcement du commerce et des investissements. La société civile participe activement à la mise en œuvre des plans de développement et aux efforts de réduction de la dette extérieure. Après avoir consulté la société civile et plusieurs organes d’État, le Gouvernement a décidé de ne pas participer à l’initiative en faveur des pays pauvres lourdement endettés (PPLE), préférant élaborer sa propre stratégie de développement économique et surmonter les problèmes liés à la dette extérieure grâce à des initiatives nationales.

11.Évoquant la question des soins de santé, M. Djumaliev dit que conformément à la loi, toutes les personnes vivant au Kirghizistan ont accès aux services de santé et que tous les citoyens doivent être enregistrés auprès des organismes de santé. Une personne qui n’y serait pas enregistrée peut financer elle-même ses soins médicaux. Par ailleurs, un système d’allocations a été mis en place afin de veiller à ce que les personnes âgées aient correctement accès aux soins médicaux. Il n’existe aucune discrimination à l’égard des groupes nationaux ou ethniques en matière de prestation des services de santé.

12.S’agissant de la question des manuels scolaires, M. Djumaliev dit que le manque de matériel pédagogique adapté est un problème répandu dans tout le pays et qu’il n’est pas spécifique à un groupe ethnique particulier. Conformément au décret présidentiel promulgué en 2003, un groupe de travail a été créé afin de résoudre ce problème.

13.M. NASIZA (Kirghizistan) dit qu’en vertu de la loi sur les réfugiés, toutes les demandes d’octroi du statut de réfugié sont traitées de la même manière par le service des migrations, quel que soit le pays d’origine du demandeur. Le principal problème du pays en matière de réfugiés est lié à la somme de dossiers en instance auprès du service des migrations. Il assure qu’il n’y a jamais eu de politique délibérée de déportation des membres de la minorité chinoise ouïgoure dans leur pays d’origine même si, en effet, en 2001, le Procureur général a ordonné l’extradition d’un certain nombre de ressortissants chinois dans leur pays d’origine parce qu’ils étaient entrés illégalement sur le territoire kirghize. Le Ministère chinois de la justice a fourni des documents au Procureur général attestant que les personnes concernées avaient commis des crimes graves en Chine et que leur extradition était conforme à un traité bilatéral d’entraide judiciaire. Les autorités kirghizes ne disposent pas d’informations concernant l’allégation selon laquelle des membres de la minorité ouïgoure de Chine auraient subi un traitement discriminatoire au Kirghizistan et M. Nasiza souhaite que le Comité puisse lui communiquer les informations qu’il détient à ce sujet.

14.M. Nasiza rappelle que le kirghize est la langue d’État et que le russe est la langue officielle du Kirghizistan. Les membres des quelque 90 groupes ethniques du pays, y compris les Dounganes, dont il fait lui-même partie, ne parlent pas toujours le kirghize et préfèrent communiquer en russe, la lingua franca depuis l’époque soviétique. La loi de 2000 sur la langue officielle rend passible de poursuites tout fonctionnaire qui refuse d’accepter et d’examiner les recours déposés par un citoyen dans la langue officielle. Par conséquent, il n’y a pas de discrimination fondée sur la langue à l’égard des minorités ethniques.

15.Depuis l’indépendance du Kirghizistan, tant le kirghize que le russe sont enseignés à l’école, parallèlement à d’autres langues. Une instance spéciale a été créée pour veiller à l’enseignement du kirghize et le Gouvernement s’efforce d’augmenter le nombre de cours de langues proposé. Il convient toutefois de reconnaître que l’apprentissage des langues est plus facile pour certains, en particulier les jeunes, que pour d’autres. Il n’est pas difficile d’acquérir une compréhension de base du kirghize mais la langue utilisée dans les documents officiels est plus difficile à maîtriser. Le Gouvernement a pour politique de veiller à ce que l’ensemble de la population puisse parler et comprendre le kirghize dans l’intérêt de l’unité nationale.

16.M. DJUMALIEV (Kirghizistan) dit que davantage de traducteurs reconnus par l’État bénéficient d’une formation pour traduire les documents officiels du kirghize vers le russe afin d’éliminer les obstacles linguistiques à la pleine jouissance des droits de l’homme.

17.Tous les fonctionnaires publics sont tenus de suivre une formation obligatoire dans le domaine des normes et des instruments juridiques internationaux. Les nombreuses ONG que compte le pays ainsi que les organisations internationales contribuent également à garantir que les fonctionnaires soient pleinement conscients des obligations qui incombent à l’État partie en vertu de la Convention. En avril 2007, en coopération avec le Programme des Nations Unies pour le développement et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, le Ministère des affaires étrangères a organisé une table ronde sur la question de l’établissement de rapports, en application des conventions relatives aux droits de l’homme. Les représentants des ministères et des institutions kirghizes y ont participé avec des experts internationaux. Le Gouvernement est cependant conscient que l’éducation aux droits de l’homme doit être, dans l’ensemble, améliorée.

18.M. NASIZA (Kirghizistan) dit que l’OSCE a été particulièrement active dans le domaine de l’éducation aux droits de l’homme dans le pays, en particulier grâce à son Académie à Bichkek et que tous les fonctionnaires du bureau du Procureur général ont été formés dans cette Académie.

19.M. MURZAHALILOV (Kirghizistan) dit que le programme national intitulé «Le Kirghizistan: notre maison commune» a contribué au succès de la politique interethnique et à la promotion de l’unité et de la cohésion nationales. Des centres culturels ont été créés afin de protéger les intérêts des groupes ethniques ainsi que leur identité linguistique et culturelle. Chaque communauté dispose de ses propres institutions éducatives, du jardin d’enfants à l’université. L’Université américaine d’Asie centrale à Bichkek joue également son rôle. Tous les organes nationaux ont formulé des plans d’action pour veiller à ce que les membres des divers groupes ethniques participent à la vie publique. La politique publique en faveur de l’unité et de la tolérance nationales a eu notamment pour effet de ralentir l’exode des Russes du Kirghizistan.

20.M. NASIZA (Kirghizistan) ajoute qu’en vertu de la Constitution kirghize, chaque personne jouit dès sa naissance des droits et libertés fondamentales de l’homme. Les seules restrictions aux droits des non-ressortissants concernent l’entrée dans les forces armées ou la police et la détention de mandats électifs. La Constitution et la législation disposent expressément que tous les autres droits, y compris les droits sociaux et économiques, s’appliquent de la même manière aux citoyens et aux non-ressortissants.

21.S’agissant de la question de la représentation des minorités dans les organes d’État, le représentant indique que les Russes, les Ouzbeks, les Coréens et les autres groupes ethniques sont tous représentés au Parlement. Bien que la minorité des Dounganes, à laquelle il appartient, soit numériquement peu nombreuse, elle est bien représentée au sein des instances gouvernementales et des autorités chargées de l’application des lois. Il précise à cet égard qu’il dirige le Département des affaires internationales du bureau du Procureur général. Il souhaite également, comme d’autres, que les minorités ethniques soient davantage représentées au sein du pouvoir judiciaire, des instances de décision politique et des autorités chargées de l’application des lois mais souligne qu’il faudra pour cela déployer davantage d’efforts pour améliorer le niveau d’instruction des minorités, ce que le Gouvernement s’efforce sans compter de faire.

22.M. DJUMALIEV (Kirghizistan) confirme que tous les groupes ethniques sont bien représentés à chaque niveau de la sphère publique, y compris au Parlement et au Gouvernement. L’article 9 du Code du travail de 2004 interdit la discrimination raciale sur le lieu de travail. Le Kirghizistan a signé les conventions internationales pertinentes de l’Organisation internationale du Travail et soumet des rapports sur l’état d’application de celles-ci.

23.M. MURZAHALILOV (Kirghizistan) dit que, comme les autres minorités nationales, les russophones sont bien représentés à chaque niveau de la sphère publique, y compris au sein du Gouvernement, des commissions parlementaires, des autorités chargées de l’application des lois et du pouvoir judiciaire. Aucune discrimination n’est exercée contre les membres des minorités ethniques mais il est vrai que les fonctionnaires de l’administration publique doivent disposer des qualifications nécessaires pour entrer dans la fonction publique.

24.M. DJUMALIEV (Kirghizistan) reconnaît que le rapport périodique à l’examen aurait dû être plus analytique et transparent et assure que le prochain rapport périodique de son pays contiendra davantage de données statistiques sur la manière dont le Kirghizistan respecte les dispositions de la Convention. Le Gouvernement kirghize est ouvert au dialogue et n’a rien à cacher, ce que la société civile, qui est très active dans le pays et parfaitement représentée à la présente réunion, ne permettrait pas de toutes manières. De fait, les ONG ont souvent communiqué aux autorités des informations concernant de possibles violations de la Convention que le Gouvernement n’était pas en mesure de remarquer. Il existe une forte volonté politique au Kirghizistan de procéder à une plus grande ouverture et d’améliorer la transparence dans la politique d’État non seulement à l’égard des traités relatifs aux droits de l’homme mais aussi des progrès socioéconomiques en général.

25.Tant l’institution du Médiateur (Akyikatchy) que la Commission des droits de l’homme établis par décrets présidentiels, sont habilités à recevoir des communications émanant de personnes physiques et morales mais leurs domaines de compétences ne se chevauchent pas. La Commission est chargée des allégations de violations des droits protégés par la Constitution, de fournir des avis politiques au Président et d’élaborer des propositions en vue du renforcement du respect des droits de l’homme. Le Médiateur examine les plaintes soumises par les citoyens, les étrangers, les apatrides et les ONG, entre autres, concernant des actes commis par les autorités publiques ou locales, les organes d’État, les entreprises et les fonctionnaires publics. Le pays dispose par conséquent d’un solide mécanisme de protection des droits de l’homme qui est renforcé par la vigilance et la coopération des ONG. La délégation kirghize serait heureuse d’entendre les suggestions des membres du Comité sur les moyens d’améliorer le système en place.

26.M. MURZAHALILOV (Kirghizistan), répondant à une question sur l’enseignement dans la langue maternelle des élèves, dit que l’utilisation de plusieurs langues dans le système éducatif fait l’objet de la plus grande l’attention de la part du Gouvernement au plus haut niveau et que cet enseignement bénéficie d’un financement propre, de programmes et de manuels scolaires spéciaux. Les écoles et les institutions d’enseignement spécialisé proposent un enseignement sur l’histoire et la culture des différents groupes ethniques du pays.

27.M. DJUMALIEV (Kirghizistan) dit que de nombreuses personnes vivant dans des zones reculées du pays ont émigré vers les grandes villes afin d’occuper les postes laissés vacants par les émigrés. Ainsi, par exemple, le nombre de personnes ayant quitté la province de Batken pour s’installer à Bichkek, la capitale, a quasiment doublé entre 1999 et 2006, passant de 506 à 922 personnes. Les migrants appartiennent à tous les groupes ethniques. Près de 600 000 personnes ont émigré en Fédération de Russie et dans d’autres pays européens, y compris l’Italie et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, où nombre d’entre eux disposent de permis de travail même si d’autres se trouvent en situation irrégulière. Le Gouvernement coopère étroitement avec les États concernés, l’Organisation internationale pour les migrations et les migrants eux-mêmes afin de protéger leurs droits et de régulariser leur situation professionnelle le cas échéant.

28.M. NASIZA (Kirghizistan) reconnaît que les migrations internes posent certains problèmes graves. De nombreuses personnes, tentant d’échapper à la situation économique et sociale défavorable qui prévaut dans les zones reculées et montagneuses du pays, viennent s’installer dans les centres urbains pour trouver un travail. Les ONG ont beaucoup étudié ce problème et le Gouvernement a entrepris d’élaborer un programme pour y remédier.

29.Ces trois dernières années, aucune sanction n’a été prise au titre de l’article 131 du Code pénal pour des infractions à motivation raciale. Cela peut être interprété comme un signe positif ou comme révélateur d’une information insuffisante des victimes sur leurs droits au titre de cet article. Le Code pénal contient d’autres dispositions qui interdisent l’expression de la haine raciale ou religieuse et huit personnes ont été récemment poursuivies au titre de ces dispositions.

30.M. SICILIANOS, malgré les affirmations de la délégation, reste préoccupé par la situation des demandeurs d’asile chinois et ouzbeks en particulier compte tenu d’informations émanant de plusieurs sources communiquées au Comité. Apparemment, depuis l’été 2006, plusieurs réfugiés et demandeurs d’asile ouzbeks auraient été enlevés et surveillés et harcelés par la police. D’après certaines informations, quatre demandeurs d’asile auraient été extradés vers l’Ouzbékistan et quelques semaines plus tôt, en juin 2007, un autre demandeur d’asile aurait été extradé vers ce même pays après que sa demande avait été rejetée pour des raisons apparemment tenant plus à la forme qu’au fond.

31.M. AVTONOMOV, tout en remerciant les membres de la délégation kirghize des réponses détaillées aux questions des membres du Comité, regrette que le rapport périodique à l’examen contienne très peu d’informations statistiques sur la mise en œuvre de la Convention et la législation nationale pertinente. Il se demande si la population kirghize est suffisamment informée de ses droits et si elle a suffisamment confiance dans les autorités nationales pour pouvoir les exercer. Le Comité a besoin d’informations pour pouvoir évaluer si la Convention est pleinement mise en œuvre dans le pays. Il relève en outre que le Kirghizistan n’a pas fait la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention permettant au Comité de recevoir et d’examiner les communications individuelles, tout en soulignant que, quoi qu’il en soit, l’État partie est tenu de respecter les obligations qui lui incombent en vertu de la Convention. M. Avtonomov espère que le prochain rapport périodique du Kirghizistan expliquera pourquoi si peu de plaintes pour discrimination raciale ont été déposées alors qu’il existe certainement des cas de haine raciale ou religieuse et de discrimination directe ou indirecte dans le pays. Le Comité a besoin d’un tableau complet de la situation.

32.M. KJAERUM remarque que le mot «citoyen» est utilisé dans le rapport périodique à l’examen dans des situations où il devrait s’appliquer à toutes les personnes placées sous la juridiction des autorités kirghizes, qu’elles soient ressortissantes ou non du pays. Il demande à la délégation de confirmer que les droits tels que le droit à la liberté d’association et de réunion sont garantis tant aux citoyens qu’aux non-ressortissants.

33.M. YUTZIS se félicite que la délégation kirghize soit disposée à entendre les conseils du Comité pour améliorer le prochain rapport périodique de l’État partie. Les problèmes de migrations internes décrits par la délégation sont communs à de nombreux pays en transition qui connaissent des changements politiques et économiques radicaux et une redistribution rapide des richesses. M. Yutzis est particulièrement préoccupé par les tensions interethniques qui peuvent découler d’une situation dans laquelle de plus en plus de nouveaux arrivants se trouvent en concurrence avec les personnes originaires des grandes villes alors qu’il n’y a pas assez de ressources pour satisfaire tout le monde. Il espère que le prochain rapport périodique du Kirghizistan contiendra des données ventilées par groupes ethniques.

34.Le PRÉSIDENT, s’exprimant en sa qualité d’expert du Comité, espère que le prochain rapport périodique de l’État partie contiendra davantage de données recueillies par les forces de police ou les tribunaux concernant le nombre de poursuites engagées pour des infractions à motivation raciale. Il juge également important d’informer les victimes et la population en général des dispositions de la Convention et des droits qu’elle garantit, par exemple en assurant une large diffusion du rapport de l’État partie et des conclusions finales du Comité s’y rapportant.

35.M. DJUMALIEV (Kirghizistan) note que le Comité a reçu des informations supplémentaires concernant le respect par le Kirghizistan de la Convention par l’intermédiaire des rapports alternatifs des ONG mais estime que ces rapports ne rendent pas compte de manière adéquate des efforts déployés par le Gouvernement pour promouvoir les droits de l’homme. Il espère que les rapports alternatifs qui seront présentés à l’avenir sur son pays seront plus équilibrés.

36.M. Djumaliev souligne que le Kirghizistan a dû prendre plusieurs décisions difficiles dans les affaires relatives aux réfugiés et aux demandeurs d’asile auxquelles a fait allusion

M. Sicilianos. Il rappelle que les pays voisins du Kirghizistan ont été victimes d’une série d’événements tragiques et qu’à cette époque son pays avait amorcé plusieurs processus politiques délicats. Le Kirghizistan a offert une aide humanitaire à de nombreux réfugiés, avec l’aide du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Les quatre demandeurs d’asile dont la situation a fait l’objet d’une grande attention au niveau international étaient, en réalité, des terroristes qui menaçaient le Kirghizistan et la société dans son ensemble.

37.M. Djumaliev reconnaît que le rapport périodique à l’examen ne contient pas assez de données statistiques mais dit disposer d’un ensemble de données démographiques, ventilées par sexe, qu’il va transmettre immédiatement au secrétariat du Comité. Il veillera à ce que le prochain rapport périodique de son pays contienne davantage d’informations statistiques et d’analyses économiques.

38.M. NASIZA (Kirghizistan) dit que les mesures prises par le Kirghizistan concernant les personnes mentionnées par M. Sicilianos ne doivent pas être considérées comme la preuve du non-respect par le Kirghizistan des dispositions internationales relatives au traitement des réfugiés ou d’une aggravation de la situation des réfugiés en général. Le pays n’a reçu aucune nouvelle demande d’extradition en 2006 et en 2007. M. Nasiza explique qu’en vertu de la Convention de Minsk relative à l’entraide judiciaire et aux relations judiciaires en matière civile, familiale et pénale, adoptée en 1994, le Kirghizistan est tenu d’extrader les personnes ayant commis un crime dans les États de l’ex-Union soviétique. Il reconnaît que les autorités de son pays ont parfois tardé à se prononcer sur les demandes d’asile et que les décisions rendues n’étaient pas toujours parfaites mais souligne que les demandeurs déboutés peuvent faire appel de la décision rendue. Le cas en question n’est pas extraordinaire: il s’est simplement agi du cas ordinaire d’extradition d’un criminel .

39.M. Nasiza reconnaît que les migrations internes peuvent provoquer des tensions interethniques et que, dans certains cas, les nouveaux arrivants se sont appropriés des terrains qui appartenaient légitimement à d’autres. Les parlementaires kirghizes élaborent actuellement un texte de loi visant à qualifier d’infraction pénale la saisie illégale de terrains.

40.Le concept de citoyenneté kirghize est défini par la Constitution. Dans certains cas spécifiques, décrits par la délégation, les citoyens jouissent de droits que n’ont pas les ressortissants étrangers. Cependant, la plupart des lois, y compris le Code du travail et le Code de la famille, garantissent les mêmes droits aux ressortissants et aux non-ressortissants. Aucune discrimination n’est exercée contre les non-ressortissants.

41.M. KEMAL, tout en reconnaissant les lacunes du rapport à l’examen, félicite le Kirghizistan des efforts déployés pour s’attaquer aux problèmes colossaux auxquels il est confronté ainsi que la délégation kirghize pour son attitude positive. Bien que le Kirghizistan soit le plus petit pays de la région et connaisse les problèmes économiques les plus graves, particulièrement en termes de dette extérieure, les ONG ont fait valoir que les minorités y jouissent d’une situation bien meilleure que dans n’importe quel autre État de la région. Il recommande à l’État partie de se pencher sur les problèmes de la porosité des frontières et de l’immigration illégale, qui risquent de causer d’autres problèmes à l’avenir, et espère que le Kirghizistan parviendra à édifier une nation nouvelle.

42.M. VALENCIA RODRIGUEZ (Rapporteur pour le Kirghizistan) résume le dialogue entre le Comité et la délégation kirghize et attire l’attention de la délégation sur un certain nombre de questions précises, et notamment: le rôle des ONG, la situation des réfugiés, la question des migrations internes, la question des langues, en particulier l’enseignement dans la langue maternelle, les affaires publiques, la liberté des médias, la réduction de la pauvreté, les droits civils et l’absence de poursuites des auteurs de crimes à motivation raciale. Il accueille avec satisfaction les données statistiques supplémentaires fournies par la délégation.

43.Le PRÉSIDENT remercie la délégation kirghize de ses réponses et dit que le Comité a reçu des informations très intéressantes à la fois de la délégation et des ONG qui, de l’avis même de la délégation, jouent un rôle important pour exprimer le point de vue de la société civile.

44.La délégation kirghize se retire.

SUIVI DE LA CONFÉRENCE MONDIALE CONTRE LE RACISME, LA DISCRIMINATION RACIALE, LA XÉNOPHOBIE ET L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE (point 8 de l’ordre du jour)

45.M. DOUGAN-BEACA (Chef du Groupe antidiscrimination du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme) dit que le Groupe de travail intergouvernemental sur l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban a commandé deux études sur les normes complémentaires. En 2006, le Conseil des droits de l’homme a décidé de diviser en deux parties la session annuelle de 10 jours du Groupe de travail intergouvernemental, l’une devant se tenir au mois de mars et l’autre en septembre. La première partie de cette session a permis aux experts chargés d’élaborer des normes complémentaires de procéder à un échange de vues préliminaires qui a été suivi d’un dialogue permanent avec le Comité. En septembre 2007, le Groupe de travail examinera les conclusions de ces études ainsi que son mandat futur, pour lequel rien n’a encore été décidé.

46.Le rapport des experts chargés d’élaborer des normes complémentaires, qui accuse un léger retard, sera disponible prochainement. M. Dougan-Beaca indique d’ores et déjà que ce rapport ne fera pas d’effet d’annonces et qu’il ne recommandera pas l’élaboration de nombreux autres instruments, hormis probablement d’un instrument relatif au droit à l’éducation.

47.Le bureau de la Conférence d’examen de Durban, composé de 20 membres, n’a pas encore été officiellement désigné mais il a été décidé que le bureau pressenti devrait entamer le processus préparatoire à la Conférence. M. Dougan-Beaca dit que le calendrier de plusieurs réunions a déjà été approuvé, notamment des trois sessions du Comité préparatoire. À l’issue de plusieurs discussions, le bureau pressenti est convenu que le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale et d’autres organes créés en vertu des traités relatifs aux droits de l’homme ne seront pas invités à participer à la première session d’organisation du Comité préparatoire mais qu’ils pourront présenter chacun une communication écrite. La Conférence d’examen de Durban se tiendra au cours de la première moitié de l’année 2009 mais la date exacte de sa tenue, qui dépend du pays hôte, n’a pas encore été fixée. Les objectifs de la Conférence d’examen seront définis par le Comité préparatoire, sur la base, notamment, de la communication écrite du Comité. Il a été recommandé de créer un groupe de travail intersessions pour examiner toutes les communications reçues et identifier les principaux thèmes qui constitueront la base du document final de la Conférence d’examen et préparer une version initiale de celui-ci.

48.M. SICILIANOS estime que le Comité devrait être associé à toutes les étapes du processus préparatoire de la Conférence d’examen, compte tenu de son mandat et de la mission de premier plan qui lui a été confiée par le Programme d’action adopté par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée. Il demande à M. Dougan-Beaca d’indiquer quels devraient être selon lui, les objectifs de la Conférence d’examen.

49.M. AMIR souhaite savoir ce que signifie précisément l’expression «les objectifs de la Conférence d’examen».

50.M. DOUGAN-BEACA (Chef du Groupe antidiscrimination du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme) explique que l’ordre du jour du bureau pressenti contient un point intitulé «Objectifs de la Conférence». Conformément à la pratique suivie par des conférences d’examen similaires des Nations Unies ces quinze dernières années, l’objectif de ce point de l’ordre du jour est, selon lui, de définir l’objet du processus d’examen. En l’espèce, le bureau pressenti et le Comité préparatoire doivent identifier les objectifs de la Conférence, en tenant compte du point de vue des différentes parties prenantes, y compris du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale.

51.Répondant à la question de M. Sicilianos, M. Dougan-Beaca explique que, par le passé, des efforts intensifs ont été déployés pour recommander aux États de respecter les obligations qui leur incombent en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels ils sont parties. Il estime qu’il convient désormais de s’intéresser aux victimes de la discrimination raciale afin de savoir pourquoi, à leur avis, elles n’ont pas bénéficié des droits garantis par les instruments ratifiés. M. Dougan-Beaca estime qu’il importe d’améliorer le dialogue avec les États afin de promouvoir les droits de l’homme. Le but de cette Conférence ne doit pas être l’adoption de nouvelles déclarations ou de nouveaux programmes d’action puisque ceux qui ont déjà été adoptés ne sont pas mis en œuvre de manière effective. Il estime qu’il faudrait, en revanche, définir les mesures qui permettraient de garantir une élimination effective de la discrimination raciale.

La séance est levée à 13 heures.

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