Nations Unies

CERD/C/SR.2034

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

2 septembre 2010

Original: français

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Soixante-dix-septième session

Compte rendu analytique de la 2034 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 17 août 2010, à 15 heures

Président: M. Kemal

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Dix-huitième et dix-neuvième rapports périodiques du Danemark

La séance est ouverte à 15 h 10.

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Dix-huitième et dix-neuvième rapports périodiques du Danemark (CERD/C/DNK/18-19; CERD/C/DNK/Q/18-19)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation danoise prend place à la table du Comité.

2.M. Jacobsen (Danemark) dit que plusieurs événements importants pour l’application de la Convention se sont produits dans son pays depuis la présentation du précédent rapport périodique, en août 2006. En juillet 2010, le Gouvernement danois a pris des mesures supplémentaires de lutte contre la discrimination raciale. Un nouveau plan d’action visant à lutter contre la discrimination fondée sur la race ou l’origine ethnique et à promouvoir la diversité et l’égalité des chances, qui comprend des mesures de soutien aux initiatives pertinentes des autorités locales, a été lancé en juillet 2010, une aide a été versée par les municipalités aux victimes de la discrimination, une campagne de sensibilisation sur le respect des droits fondamentaux a été organisée et plusieurs études sur l’ampleur de la discrimination dans le pays ont été faites.

3.En outre, le Gouvernement danois continue de mettre l’accent sur les mesures de prévention des délits motivés par la haine raciale, y compris les déclarations orales et écrites, et reste déterminé à poursuivre tous les auteurs des crimes et délits de cette nature. Dans ce cadre, le Gouvernement a présenté en 2009 un plan d’action intitulé «Un avenir commun et sûr» qui a pour objectif de prévenir l’extrémisme et la radicalisation chez les jeunes. Le Service danois de la sécurité et du renseignement (CERD/C/DNK/18-19, par. 45) s’est attelé à la réalisation d’un nouveau programme spécifiquement axé sur la prévention des crimes motivés par la haine qui a pour but de déceler les indices d’activités criminelles organisées et systématiques motivées par le racisme et la xénophobie. En novembre 2010, le Ministre de l’intégration remettra, comme chaque année, le prix de l’intégration.

4.En matière d’éducation, le Danemark a participé à l’examen de la formation réalisé par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui a analysé les résultats obtenus par les enfants issus de l’immigration dans le domaine de l’éducation et en particulier dans le cadre scolaire, dont l’objectif était de présenter des données fiables sur l’accès, la participation et les résultats scolaires des élèves issus de l’immigration par rapport aux autres élèves et de recenser une série d’options pour l’action publique à la lumière des expériences positives menées dans de nombreux pays. Cette étude a permis au Danemark d’identifier ses points forts et ses points faibles dans le domaine de l’éducation.

5.M me Auken (Danemark), abordant la première question prévue dans la liste de thèmes établie par le Rapporteur pour le Danemark (CERD/C/DNK/18-19) dit que pour décider d’instruire concernant une violation de l’article 266 b) du Code pénal danois, le Directeur du parquet se fonde sur une évaluation qui consiste, notamment, à déterminer si l’investigation permettra d’établir ou non la véracité des faits dénoncés et à déterminer les circonstances dans lesquelles ils se sont produits. Dans un certain nombre de cas, le Directeur du parquet a ainsi estimé que les déclarations incriminées ne constituaient pas une violation des dispositions figurant à l’article 266 b) du Code pénal, soit parce que les propos en cause n’avaient pas été prononcés avec l’intention de nuire, soit qu’ils avaient été formulés dans le cadre d’une conversation privée ou dans un cercle fermé. Dans d’autres cas, le Directeur du parquet a aussi considéré que les propos visés ne désignaient pas un groupe spécifique de personnes. En 2009, le Directeur du parquet a enregistré 11 plaintes, dont 6 ont fait l’objet d’une enquête et 5 ont été jugées sans fondement.

6.S’agissant de la question des mesures spécifiques qui ont été prises ou prévues pour encourager davantage les victimes de la haine raciale et de la discrimination à signaler à la police les infractions à caractère raciste et pour leur permettre de participer activement aux procédures judiciaires, Mme Auken dit que le Gouvernement danois est conscient que tous les crimes et délits motivés par la haine raciale ou ethnique ne sont pas dénoncés et que tout doit être mis en œuvre pour inciter les personnes qui en sont victimes à alerter les autorités de police. La Police nationale prépare un plan d’action pour la dénonciation de crimes liés à la haine raciale et une campagne est menée à Copenhague sur le thème «Mettons un terme aux crimes motivés par la haine». Une ligne téléphonique d’urgence a été créée afin de permettre aux victimes d’actes de racisme de les dénoncer aisément. En outre, de nouvelles directives ont été publiées par le Directeur du parquet concernant la manière de traiter ce type d’affaires.

7.M. Van Deurs, s’agissant de la question de savoir quelles mesures visent à donner effet à la recommandation du Comité tendant à donner aux demandeurs d’asile le droit de faire appel des décisions du Conseil de recours des réfugiés, explique que le Conseil est une instance indépendante dont les décisions sont définitives et ne peuvent faire l’objet d’un quelconque réexamen judiciaire. Les demandeurs d’asile déboutés ont le droit de voir leur demande réexaminée si leur situation personnelle a changé ou si de nouveaux éléments pertinents au regard de la demande déposée sont versés au dossier. En 2009, le Conseil a examiné 51 demandes, dont 26 ont été acceptées et 12 rejetées; 13 requérants d’asile ont bénéficié d’une protection subsidiaire ou d’un statut protégé.

8.M. Rasmussen, s’agissant de la question de savoir quelles mesures le Danemark envisage de prendre au sujet des enfants ne bénéficiant pas de la politique relative à l’enseignement dans la langue maternelle, celui-ci étant réservé aux enfants bilingues originaires de l’Union européenne ou de pays de l’Espace économique européen, pour qu’ils puissent jouir des mêmes droits sur un pied d’égalité, indique qu’aucune disposition du droit international n’oblige son pays à dispenser aux enfants étrangers un enseignement dans leur langue maternelle. L’enseignement est dispensé en danois afin de permettre aux enfants issus de l’immigration d’acquérir la langue officielle et de trouver un jour un emploi sur le marché du travail. Les études menées dans ce domaine montrent que l’enseignement dans la langue maternelle étrangère n’est pas nécessairement synonyme de réussite. Le Gouvernement danois estime que la meilleure solution est de concentrer les ressources disponibles sur l’aide au développement et l’apprentissage précoce du danois.

9.M me Auken,s’agissant desraisons pour lesquelles les candidats d’origine ethnique autre que danoise échouent aux examens d’entrée dans la police et des mesures qui ont été prises pour combattre ce phénomène, explique que la Police danoise a réalisé une étude dont les conclusions n’ont pas encore été publiées mais dont il ressort que les candidats d’origine autre que danoise sont proportionnellement plus nombreux à échouer aux examens d’entrée dans la Police que les Danois de souche, soit 36,1 % contre 33,5. Bien que n’étant pas en mesure d’expliquer ces résultats, la Police est d’avis que cela peut être dû au fait que le métier de policier attire peu les membres des groupes ethniques. La Police s’est toujours efforcée d’assurer une bonne représentation des groupes ethniques et mène des actions avec les institutions éducatives pour encourager les jeunes issus de l’immigration à y entrer.

10.M. van Deurs(Danemark), s’agissant de la troisième question de la liste de thèmes concernant le nombre de titres de séjours délivrés et refusés et les motifs des refus opposés en vertu du paragraphe 2 de l’article 7 modifié de la loi sur les étrangers, indique que le Conseil de recours des réfugiés évalue chaque demande individuellement afin de déterminer si elle satisfait aux exigences de la Convention relative au statut des réfugiés. En outre, en vertu de l’article 7.2 de la loi sur les étrangers amendé en 2002, la possibilité d’obtenir le statut de réfugié de factoa été remplacée par celle de bénéficier d’une protection subsidiaire et le fait d’être objecteur de conscience n’est plus une condition permettant d’obtenir le statut de résident.

11.M. Torp(Danemark), se référant à l’alinéa f de la troisième question de la liste des thèmes (CERD/C/DNK/Q/18-19), dit que les immigrants originaires des pays non occidentaux sont certes plus fortement touchés par le chômage que les Danois de souche mais que les politiques mises en œuvre depuis quelques années pour améliorer le taux d’emploi de ces personnes se sont révélées efficaces puisqu’elles l’ont fait passer d’environ 44 % en 2001 à 54 % en 2009. Pendant cette période, le taux d’emploi des Danois n’a pas varié. De plus, la crise financière a paradoxalement eu moins de répercussions négatives sur les immigrants que sur les Danois: de 2008 à 2010, le taux de chômage a augmenté de 19 % chez les premiers, contre 92 % chez les seconds.

12.La scolarisation des immigrants dans le système éducatif national joue un rôle déterminant dans leur entrée sur le marché du travail. Le taux d’emploi des immigrantes qui ont fréquenté les établissements d’enseignement danois atteint 83 %, pourcentage pratiquement identique à celui des Danoises, qui est de 84 %.

13.Le Gouvernement danois a pris diverses initiatives pour aider les immigrants à trouver du travail. En 2006, il a lancé le programme «Une nouvelle chance pour tous» ainsi que d’autres projets qui ont contribué à améliorer le taux d’emploi des immigrants. Tout récemment, un plan global d’insertion professionnelle a été lancé en faveur des chômeurs de longue durée, parmi lesquels les immigrants sont encore surreprésentés.

14.M. Spies (Danemark), abordant la quatrième question de la liste des thèmes, indique que, conformément à la législation danoise, la plupart des droits et des responsabilités sont liés à la résidence et non à la nationalité, ce qui signifie que tous les immigrants titulaires d’un permis de séjour ont accès à un vaste éventail de services sociaux, y compris les Roms. De plus, toute personne résidant au Danemark qui s’estime victime d’une discrimination en raison de sa race ou de son appartenance ethnique peut se prévaloir des dispositions de la législation interne interdisant la discrimination raciale, dont l’article 266 b) du Code pénal ainsi que les dispositions de la loi sur l’interdiction de la discrimination fondée sur la race, de la loi sur l’interdiction de la discrimination sur le marché du travail et de la loi sur l’égalité de traitement entre groupes ethniques. Ainsi, les Roms vivant au Danemark bénéficient des mêmes droits fondamentaux et protections contre la discrimination raciale que les ressortissants danois et les autres résidents d’origine étrangère.

15.En juillet 2010, pour compléter la législation, un nouveau plan d’action en faveur de l’égalité de traitement entre groupes ethniques a été lancé parallèlement aux politiques d’intégration existantes. Ce plan prévoit le lancement de 21 initiatives concrètes visant notamment à lutter contre la discrimination et l’intolérance dans tous les domaines et à promouvoir la diversité sur le marché du travail. Le Gouvernement danois a prévu de lancer une campagne de sensibilisation aux droits fondamentaux de l’homme avant le printemps 2011 et, au moment de l’achever, il veillera à ce que les observations finales que le Comité formulera sur le rapport périodique à l’examen y soient prises en considération.

16.Dans les années récentes, le Gouvernement danois a pris un certain nombre de mesures afin d’évaluer le nombre de Roms vivant dans le pays. Dans le cadre du dialogue engagé avec une association rom sur l’applicabilité de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales à la minorité rom vivant au Danemark, le Ministère des affaires étrangères, le Ministère chargé des réfugiés, de l’immigration et de l’intégration, le Ministère de l’intérieur et le Ministère de la santé ont étudié plusieurs documents traitant de la présence des Roms au Danemark de 1505 à nos jours. Ces travaux n’ont pas abouti à des résultats précis en raison du manque d’informations, en particulier sur la période comprise entre 1875 et 1960. Il est certain que des Roms ont régulièrement séjourné au Danemark dans le passé mais sans y vivre de façon continue. Actuellement, il y aurait au Danemark entre 1 500 et 10 000 Roms, selon diverses sources. D’après le Conseil danois pour les réfugiés − la principale organisation non gouvernementale danoise − environ 2 000 Roms résident dans le pays, dont une moitié serait établie à Elseneur et l’autre dans la région de Copenhague.

17.M me Thomsen (Danemark), abordant la quatrième question de la liste des thèmes (CERD/C/DNK/Q/18-19), rappelle que, comme indiqué dans le rapport périodique (CERD/C/DEN/18-19, annexe I, par. 3 et 4), la Cour suprême du Danemark a rendu un arrêt dans lequel elle a conclu que la tribu de Thulé ne constituait pas un peuple autochtone distinct au sein du peuple groenlandais, à la suite de quoi le Gouvernement a affirmé que le Danemark ne comptait qu’un seul peuple autochtone: les Inuits. Le Gouvernement considère donc l’affaire de la tribu de Thulé comme définitivement close.

18.Mme Thomsen rappelle en outre que, depuis juin 2009, le Groenland jouit d’un statut d’autonomie, qu’il a obtenu conformément à l’issue d’un référendum dans le cadre duquel 75,5 % des électeurs, y compris les habitants de la région de Thulé, se sont prononcés en faveur de l’autonomie. Les Inuits représentent 89 % de la population de l’île et l’intégralité des membres du Parlement et du Conseil des ministres du Groenland sont inuits. Actuellement, aucune affaire concernant la tribu de Thulé n’est en instance.

19.M. Peter (Rapporteur pour le Danemark) note avec satisfaction que, depuis la présentation de son rapport initial, le Danemark a soumis ses rapports périodiques au Comité avec régularité. Il note également avec satisfaction que la composition de la délégation danoise est majoritairement féminine. Après une description générale de la situation géographique, démographique et politique de l’État partie, le Rapporteur revient sur la liste des thèmes (CERD/C/DNK/Q/18-19), en se penchant en particulier sur l’application de l’article 266 b) du Code pénal qui, selon lui, est problématique. Il constate en effet que le Directeur du parquet jouit de très larges pouvoirs s’agissant de l’ouverture de poursuites au titre de l’article 266 b) du Code pénal, car il est habilité à refuser d’ouvrir une enquête, à mettre fin à une enquête en cours ou à abandonner les poursuites. Cela n’est probablement pas étranger au fait que, de 2004 à 2008, seules 13 plaintes pour actes de racisme sur 26 ont abouti à une condamnation. D’après le tableau 2 figurant au paragraphe 49 du rapport périodique (CERD/C/DEN/18-19), 99 affaires au total n’ont pas débouché sur un procès, ce qui pourrait donner à penser que le Directeur du parquet protège davantage les auteurs présumés d’actes de racisme que les victimes. M. Peter voudrait donc savoir si les pouvoirs étendus dont dispose le Directeur du parquet sont susceptibles de favoriser une culture de l’impunité et si des initiatives ont été prises pour limiter ces pouvoirs. Sachant que l’immunité parlementaire d’un membre du Parlement a été levée en juin 2010 à la demande du Directeur du parquet et qu’ensuite, une initiative a été lancée en faveur de l’abrogation de l’article 266 b) du Code pénal, le Rapporteur invite la délégation danoise à commenter ces événements et à indiquer si, cédant à des pressions, l’État partie pourrait accepter d’abroger cet article.

20.Tout en relevant avec satisfaction la création du Conseil de l’égalité de traitement, le Rapporteur tient toutefois à appeler l’attention de la délégation danoise sur certaines faiblesses de cette institution. Tout d’abord, le Conseil ne traite que les plaintes qui lui sont soumises par écrit et n’entend pas les dépositions orales des parties ou des témoins. Ensuite, son secrétariat est habilité à rejeter les plaintes qu’il estime irrecevables, ce qui constitue un pouvoir excessif. Enfin, les décisions du Conseil ne sont pas susceptibles d’appel devant une autre autorité administrative. Le Rapporteur espère que l’État partie voudra bien revoir les modalités de fonctionnement de cette institution compte tenu de ses observations.

21.Tout en relevant avec satisfaction que l’État partie n’interdit nullement aux municipalités et aux organismes qui souhaitent offrir aux enfants d’immigrés un enseignement dans leur langue maternelle de prendre des mesures dans ce sens, le Rapporteur souhaiterait savoir si les pouvoirs publics seraient disposés à soutenir financièrement les projets d’enseignement de cette nature.

22.Lisant au paragraphe 199 du rapport à l’examen que l’État partie considère qu’il n’y a pas d’explication au fait que le taux d’échec aux examens d’entrée dans la police est relativement élevé parmi les candidats d’origine ethnique autre que danoise, M. Peter estime que l’État partie devrait tenter d’expliquer la situation de manière scientifique.

23.M. Peter se demande si la loi portant modification de la loi sur les étrangers, qui subordonne l’octroi d’un titre de séjour permanent à l’acquisition de 100 points attribués en fonction d’un certain nombre de critères, n’est pas de nature discriminatoire. En effet, à part l’obligation d’être âgé de 18 ans ou plus, de résider au Danemark depuis quatre ans, de ne pas avoir été condamné à une peine d’emprisonnement de dix-huit mois ou plus, d’avoir réussi à un examen de danois et d’avoir occupé un emploi à temps plein au Danemark pendant deux ans et demi dans les trois ans précédant la demande du titre de séjour figure celle de ne pas avoir bénéficié de l’assistance publique au cours des trois années précédant ladite demande et de ne pas être endetté de plus de 13 500 euros. M. Peter ne comprend pas pourquoi l’endettement constitue une entrave à l’octroi d’un titre de séjour et apprécierait des explications à ce sujet. Il se demande en outre si ce nouveau système n’a pas pour effet de compliquer le processus d’octroi de la résidence permanente et n’établit pas une distinction entre les personnes capables de satisfaire à tous ces critères et celles qui le sont moins − comme les demandeurs d’asile −, entre les personnes pauvres et peu instruites et celles qui sont riches et ont fait des études. Il craint en outre que ce nouveau système n’aille à l’encontre des engagements internationaux pris par l’État partie, et notamment des dispositions de la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 et de son Protocole facultatif de 1967.

24.M. Peter rappelle que dans ses observations finales formulées en 2006 à la suite de l’examen des seizième et dix-septième rapports périodiques de l’État partie, le Comité s’était dit préoccupé par l’âge minimum aux fins du regroupement familial, fixé manifestement à 24 ans pour lutter contre les mariages précoces et les mariages forcés. Le Rapporteur pour le Danemark souhaiterait savoir si le Centre national danois de la recherche sociale (SFI), qui avait été chargé d’étudier la question, a publié son rapport en septembre 2009. Dans l’affirmative, quelles en ont été les conclusions et est-il possible d’en obtenir un exemplaire en anglais?

25.Pour ce qui est de la protection des Roms, M. Peter fait observer que l’État partie distingue les Roms venus au Danemark à la fin des années 1960 de ceux qui, fuyant la guerre des Balkans, y ont afflué au début des années 1990. Faisant observer que d’après le rapport, les premiers sont intégrés dans la société danoise, il voudrait savoir ce qu’il en est des derniers, qui, en tant que minorité ethnique, ont droit à la protection prévue à l’article 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. La délégation danoise pourrait indiquer s’il est vrai, comme l’avancent un certain nombre d’organisations non gouvernementales (ONG), que les Roms font parfois l’objet d’expulsions, sont soumis au profilage racial par les forces de l’ordre ou encore se voient refuser l’accès à des terrains de campement. Elle pourrait en outre indiquer quelles mesures concrètes ont été prises pour protéger les Roms arrivés sur le territoire danois dans les années 1990.

26.M. Peter voudrait en outre savoir si l’État partie dispose de statistiques précises sur la composition de sa population.

27.M. Peter rappelle que dans sa décision du 28 novembre 2003, la Cour suprême n’avait pas considéré la tribu thulé du Groenland comme un peuple autochtone distinct, contrairement à la perception qu’a cette tribu d’elle-même, au motif que ses membres vivent dans les mêmes conditions que le reste de la population groenlandaise. Il rappelle en outre que cet avis est conforme à la déclaration faite par le Gouvernement danois − et approuvée par le Gouvernement autonome du Groenland − lors de la ratification de la Convention no 169 de l’Organisation internationale du Travail concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants. Selon cette déclaration, le Danemark a «un seul peuple autochtone» au sens de la Convention no 169, à savoir la population autochtone du Groenland, également appelée population inuit.

28.Après avoir donné lecture du paragraphe 20 des observations finales formulées par le Comité (CERD/C/DEN/CO/17) à l’issue des seizième et dix-septième rapports périodiques de l’État partie, puis du paragraphe 13 des observations finales du Comité des droits de l’homme formulées par ce dernier à l’issue du cinquième rapport périodique du Danemark (CCPR/C/DNK/CO/5), et rappelé les recommandations générales no 8 concernant la manière dont un individu s’identifie comme appartenant à un groupe racial ou ethnique particulier et no 23 concernant les droits des populations autochtones du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, M. Peter se demande si, en dépit de la décision de la Cour suprême de 2003, l’État partie serait disposé à prendre des mesures pour engager avec la tribu thulé des négociations libres et éclairées sur son statut de peuple autochtone ou tribal.

29.M. Avtonomovse demande si la Convention ne serait pas plus souvent invoquée si elle avait été transposée dans l’ordre juridique interne de l’État partie en vertu d’une loi spéciale, comme l’a été la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui, d’après des informations émanant de l’Institut danois des droits de l’homme, serait plus souvent citée devant les tribunaux danois.

30.M. Avtonomov s’étonne que l’État partie fasse valoir que les Roms vivant sur le territoire danois n’ont pas de liens historiques durables et ininterrompus avec le Danemark, alors qu’il s’agit d’un peuple nomade. Il se demande si, depuis l’ouverture des frontières européennes, la population rom a augmenté au Danemark et si son arrivée a été source de conflits et de tensions avec la population locale.

31.M. Avtonomov précise qu’il ne s’agit pas d’octroyer aux Roms le statut de minorité nationale ou ethnique mais de les reconnaître comme un groupe distinct pouvant prétendre à un certain nombre de droits, notamment à une éducation dans leur propre langue. Il apprécierait de recevoir un complément d’information sur le sujet.

32.La délégation danoise voudra bien fournir au Comité des informations complémentaires sur le nouveau statut du Groenland, en particulier sur les compétences du Gouvernement autonome de ce territoire, et préciser si ce dernier doit adhérer directement à la Convention ou s’il y est partie par le biais du Danemark. Le nouveau Gouvernement du Groenland dispose-t-il de pouvoirs en matière de lutte contre la discrimination et peut-il légiférer en matière de statut civil et de droits fonciers?

33.M. Avtonomov aimerait savoir si les Inuits parlent le groenlandais, qui est la langue officielle du Groenland, ou une langue appartenant à la famille des langues inuits. Il juge intéressant de savoir si les personnes de souche et de langue danoises font l’objet de discriminations au Groenland et si leurs droits sont protégés.

34.M. Avtonomov considère qu’en dépit de la décision de la Cour suprême, la question de la tribu thulé ne sera pas réglée tant que ce peuple ne s’identifiera pas lui-même à la population autochtone du Groenland. Le Comité apprécierait un complément d’information à ce sujet.

35.M. Thornberry demande pourquoi, à l’avis de la délégation danoise, le Comité est il saisi d’un nombre disproportionné de communications émanant de particuliers au Danemark. L’expert pense que la non-incorporation de la Convention dans l’ordre juridique interne et les discours xénophobes tenus par des dirigeants politiques pourraient expliquer en partie cette situation.

36.S’agissant de l’éducation bilingue, M. Thornberry demande pourquoi les autorités n’appliquent pas la même politique sur l’ensemble de son territoire et proposent uniquement une éducation bilingue dans les langues de l’Union européenne. Notant au paragraphe 33 du rapport à l’examen que les Roms arrivés au Danemark avant les années 1960 sont complètement intégrés dans la société, il voudrait savoir ce qu’il en est en particulier de l’intégration des enfants roms à l’école.

37.M. Cali Tzay évoque des informations selon lesquelles, à une certaine époque, des familles danoises recevaient une aide financière de l’État pour s’installer au Groenland et permettre ainsi au Gouvernement danois de maintenir son contrôle sur le territoire. Il souhaiterait que la délégation danoise revienne sur ce passé heureusement révolu et indique quel pourcentage d’Inuits fait partie du Gouvernement autonome du Groenland. Enfin, il voudrait savoir s’il existe des chances que le Danemark révise sa position à l’égard du droit du peuple thulé à l’auto-identification.

38.M. Diaconu voudrait obtenir davantage de renseignements sur les Roms du Danemark, notamment sur leur nombre et les difficultés particulières qu’ils rencontrent. Selon des ONG, les Roms seraient victimes de profilage racial et leurs enfants seraient placés dans des écoles spéciales. La délégation danoise est invitée à revenir sur ces points.

39.L’expert demande à la délégation d’indiquer les résultats de la stratégie de lutte contre la «ghettoïsation» évoquée aux paragraphes 131 à 135 du rapport et de donner au Comité des informations sur le respect du droit à la terre et à la propriété des peuples autochtones du Groenland et des îles Féroé. Enfin, il voudrait savoir si les questions relatives aux droits de l’homme au Groenland relèvent de la compétence du Gouvernement autonome ou du Gouvernement danois.

40.M. de Gouttes demande quelles sont les raisons juridiques pour lesquelles le Danemark n’a pas incorporé la Convention dans son ordre juridique interne alors qu’il l’a fait pour d’autres instruments internationaux. S’agissant de l’application de l’article 4 de la Convention, il constate que seulement 13 condamnations pour des infractions à caractère raciste sont mentionnées dans le rapport et que la plupart des poursuites engagées n’ont pas eu de suite. Dans ce contexte, il s’étonne du nombre élevé de communications adressées par des particuliers au Comité, la plupart concernant des discours de haine tenus par des personnalités politiques danoises. Il voudrait savoir quelles mesures sont prises pour favoriser l’accès des victimes d’actes de racisme à la justice et les aider à en établir la preuve.

41.S’agissant des Roms, l’expert demande quelles sont les mesures prévues pour assurer un accueil et des conditions de vie décentes aux Roms et leur fournir un accès à l’éducation, à la santé et au logement. Il se félicite des pouvoirs très larges conférés au Conseil pour l’égalité de traitement mais note que ses décisions ne sont pas susceptibles d’appel devant les autorités administratives. Il voudrait savoir s’il existe des cas dans lesquels des parties ont saisi les tribunaux nationaux après que le Conseil eut rendu une décision négative. Évoquant les relations tendues entre la police et les immigrés, l’expert demande si l’État partie a recruté des membres issus de minorités dans la police et dans les organes de justice.

42.M. Murillo Martínezvoudrait en savoir plus sur les conclusions et les recommandations du rapport du Ministère chargé des réfugiés, de l’immigration et de l’intégration mentionné au paragraphe 173 du rapport, d’après lequel, en 2007, «11 % des immigrés avaient subi des discriminations sur la voie publique». Il demande en particulier quelle était la nationalité des immigrés concernés. Par ailleurs, il souhaite obtenir un complément d’information sur la situation pénitentiaire dans l’État partie et, en particulier, des statistiques sur la nationalité et l’origine ethnique des détenus.

43.M. Prosper, soulignant que sa question est plus politique que technique, voudrait savoir comment l’État partie entend, compte tenu de l’évolution de la société danoise vers la diversité ethnique, créer une dynamique qui permettrait à tous de vivre en harmonie et de manifester une plus grande tolérance les uns envers les autres.

44.M. Kut dit que l’État partie devrait s’abstenir d’établir une hiérarchie des droits de l’homme dans la mesure où la liberté d’expression semble être plus importante que d’autres droits fondamentaux au Danemark. Il appelle l’attention de la délégation danoise sur le fait que, selon nombre d’études scientifiques, il existe une corrélation étroite entre la diffusion de propos politiques racistes et la violence raciale.

45.M. Saidou, se référant à l’article 5 e) de la Convention, voudrait en savoir plus sur l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels par les minorités ethniques dans l’État partie. Il demande en particulier si des immigrés non occidentaux occupent des postes de responsabilité.

46.M. Jacobsen (Danemark) remercie les membres du Comité pour leurs questions précises et dit que la délégation danoise n’épargnera aucun effort pour tenter d’y répondre avec précision à la séance suivante.

La séance est levée à 18 heures.