Nations Unies

CERD/C/SR.1934

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

7 août 2009

Français

Original: anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Soixante- quinzième session

Compte rendu analytique de la 1934 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le lundi 3 août 2009, à 15 heures

Président e: Mme Dah

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention

Quatorzième à dix-septième rapports périodiques du Pérou

La séance est ouverte à 15 h 15.

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (point 5 de l’ordre du jour)

Quatorzième à dix-septième rapports périodiques du Pérou (CERD/C/PER/14-17; CERD/C/PER/Q/17; HRI/CORE/1/Add.43/Rev.1)

1.Sur l’invitation de la Présidente, la délégation péruvienne prend place à la table du Comité.

2.M. Valdivieso (Pérou) déclare que le rapport présenté par son pays (CERD/C/PER/14-17) est l’aboutissement de consultations approfondies entre tous les secteurs et institutions dont l’action a une incidence sur la mise en œuvre de la Convention. Certaines questions figurant dans la liste des points à traiter (CERD/C/PER/Q/17) font référence à des événements ayant eu lieu après la date de soumission du rapport. D’autres reflètent des positions et des points de vue politiques particuliers, et l’une d’entre elles adopte une approche critique d’un article signé par le Président de la République, définissant sa politique conformément à son mandat constitutionnel.

3.Le Gouvernement péruvien est déterminé à dissiper tous les doutes concernant les objectifs de l’action de l’État et à réfuter toute déclaration tendancieuse ou non fondée portant atteinte au prestige de la démocratie représentative du Pérou ou remettant en question l’engagement des autorités à défendre les droits de l’homme et l’état de droit.

4.C’est le parti actuellement au pouvoir qui a recommandé, lors du débat constitutionnel tenu par l’Assemblée constituante en 1978 et 1979, que la plupart des instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme se voient attribuer le rang constitutionnel au Pérou, ce qui est le cas actuellement.

5.Bien qu’il n’y ait pas au Pérou une institution publique unique chargée de faire respecter le principe de la non-discrimination, une série de mesures visant à éliminer toutes les pratiques discriminatoires et à promouvoir l’égalité formelle et matérielle de toutes les personnes relevant de la juridiction du pays a été adoptée. Pendant la décennie en cours, un instrument de base appelé «Accord national», visant à consolider la démocratie et à réaffirmer l’identité nationale, a été adopté. Il prend acte de la persistance de diverses formes de discrimination et d’inégalités sociales et souligne l’engagement de l’État et des forces politiques du pays à accorder de manière concrète la priorité à la promotion de l’égalité des chances.

6.Des progrès importants ont été accomplis dans la promotion des droits de l’homme et des libertés fondamentales depuis la fin 2000. Le Président de la République a été élu, mais il n’est pas rééligible lors d’une prochaine élection, et le principe de la rotation dans l’exercice de l’autorité est donc appliqué. Des dispositions ont été prises en vue de procéder à un vote préférentiel lors des élections législatives afin d’éviter que les dirigeants des partis politiques n’exercent une influence abusive. Les présidents et les conseillers régionaux ont également été élus. En outre, dans les départements où vivent des communautés autochtones, la représentation proportionnelle de celles‑ci au sein des conseils régionaux en application de la loi en vigueur dépasse largement le nombre d’électeurs qu’elles représentent. Les maires des municipalités sont assistés par des conseillers représentant les organisations de quartier et les communautés locales. Les représentants des autorités régionales, provinciales et de district peuvent être révoqués au moyen d’initiatives populaires, et la loi prévoit également la possibilité d’initiatives populaires dans le domaine législatif.

7.L’État est fondé sur la séparation des pouvoirs, et une cour constitutionnelle a compétence pour statuer sur la constitutionnalité des actes administratifs. Des organismes indépendants tels que le Bureau du médiateur (Defensoría del Pueblo), qui a été mis en place conformément aux Principes de Paris, défendent les droits des citoyens. Le Conseil national de la magistrature nomme et révoque les juges et les procureurs. Les autres autorités de surveillance indépendantes sont notamment le Comité électoral national, la Banque centrale et le Service national d’inspection des banques et des assurances. Étant donné que la liberté d’expression est pleinement respectée, aucun prétexte ne peut être invoqué pour recourir à la violence. En outre, si des citoyens considèrent à titre privé que les décisions nationales sont injustes, ils sont libres de soumettre des plaintes à des organismes d’évaluation externes.

8.Ces dernières années, le Pérou a enregistré des taux élevés de croissance économique, qui ont conduit à une réduction substantielle de la pauvreté. Soixante-dix pour cent du budget national est administré par les gouvernements régionaux et locaux, de sorte que les dépenses et les investissements publics sont approuvés par les représentants élus du peuple sur la base d’un arrangement relatif à la participation du peuple, appelé «budget participatif». Les 30 % restants du budget, administrés par les autorités centrales, sont également alloués, pour l’essentiel, aux régions les plus pauvres. Grâce à cela, en l’espace de trois ans, plus de 6 millions de Péruviens supplémentaires ont pu bénéficier des services d’approvisionnement d’eau et d’assainissement; près de 1,7 million de personnes vivant dans les zones rurales ont bénéficié de projets dans le secteur de l’énergie; quelque 2 millions de personnes ont acquis une propriété; et plus d’un demi-million se sont vu allouer un logement financé par l’État. En outre, 3 000 kilomètres de routes ont été réparés. Le taux de pauvreté a diminué de 12 points, passant de 48 à 36 % sous le Gouvernement actuel, ce qui signifie que 3 millions de Péruviens ont été sortis de la pauvreté en mille jours. Le Président de la République vient d’annoncer la mise en place de centres de coordination pour l’exécution du budget, avec la participation d’organisations de jeunes et de communautés organisées dans les Andes et l’Amazonie, qui conçoivent leurs propres projets et reçoivent des fonds directement du Gouvernement en vue de leur réalisation.

9.Le Pérou est aujourd’hui le pays d’Amérique latine qui enregistre le taux de croissance le plus élevé (près de 10 % en 2008) et le taux d’inflation le plus bas. Il est l’un des cinq pays du monde dont l’économie continuera à croître pendant l’année en cours malgré la crise économique. La tendance à la hausse des indicateurs en matière de justice sociale et de qualité de vie place également le Pérou parmi les pays chefs de file dans la région.

10.Le système juridique péruvien garantit l’égalité complète des droits à tous ses habitants, sans distinction de religion, de sexe, de race, de langue, d’opinion et d’origine ethnique ou sociale. L’article 2 de la Constitution consacre cette disposition, ainsi que le droit à l’égalité devant la loi et le droit à l’identité ethnique et culturelle. La Cour constitutionnelle a créé un précédent important en statuant, par exemple, que la notion d’égalité était à la fois un principe régissant l’organisation et les activités de l’État fondé sur la primauté du droit, et un droit fondamental de l’individu. Aucune exception ni aucun privilège ne sont admis s’ils ont pour effet de priver un individu d’un droit dont jouissent les autres. Toutefois, la Cour a jugé que le principe d’égalité n’était pas incompatible avec la reconnaissance juridique des différences de traitement à condition que celles-ci soient fondées sur des critères objectifs, raisonnables, rationnels et mesurés. L’objectif fondamental de l’État est donc d’améliorer la situation des groupes défavorisés, en particulier en luttant contre la pauvreté et l’exclusion.

11.En ce qui concerne les droits politiques, la loi sur l’organisation des élections fixe un quota de participation des peuples autochtones. Un quota d’au moins 15 % est requis pour les listes de candidats au poste de maire et de conseiller municipal ainsi que pour les sièges du Conseil régional. La loi sur l’organisation des gouvernements régionaux et la loi sur l’organisation des municipalités favorisent également la participation des autochtones.

12.La loi sur l’enseignement général vise à promouvoir l’accès à l’éducation des groupes sociaux exclus, marginalisés et vulnérables, en particulier dans les zones rurales. Elle dispose que l’État est tenu d’élaborer et de mettre en œuvre des projets visant à remédier aux situations d’inégalité et d’iniquité fondées sur l’origine, l’ethnie, le sexe, la langue, la religion, les opinions, la situation économique, l’âge ou tout autre facteur. Le Code de l’enfance et de l’adolescence dispose que les autorités responsables du secteur de l’éducation sont tenues de prendre les mesures appropriées en vue de prévenir toutes formes de discrimination.

13.La loi sur la lutte contre les actes discriminatoires concernant les offres d’emploi et l’accès aux formations stipule que les offres d’emploi ne peuvent pas contenir d’exigences constituant une discrimination ou un déni de l’égalité de chances ou de traitement. Le Ministère du travail et de la promotion de l’emploi est autorisé à mener des enquêtes sur ces cas, à identifier les responsables et à imposer des sanctions administratives appropriées. La loi sur la productivité du travail et la compétitivité traite les cas de discrimination fondée sur le sexe, la race, la religion, les opinions ou la langue comme des actes hostiles équivalents à un licenciement.

14.La loi sur la protection du consommateur a établi le principe de l’interdiction de la discrimination fondée sur la race, le sexe, la situation socioéconomique, la langue, le handicap, les opinions politiques ou les croyances religieuses dans les espaces commerciaux ouverts au public. Un certain nombre d’établissements ont déjà été sanctionnés pour ce type de discrimination.

15.La loi-cadre sur la modernisation de l’administration publique stipule que tout fonctionnaire ayant commis un acte discriminatoire est passible de sanctions au titre de sa fonction. Les pouvoirs publics régionaux et locaux sont également activement engagés dans la lutte contre la discrimination et ont émis des ordonnances régionales et municipales visant à imposer le principe de non discrimination.

16.La discrimination est définie comme une infraction dans l’article du Code pénal concernant les infractions contre l’humanité. Toute personne qui exerce, personnellement ou par l’intermédiaire d’un tiers, une discrimination envers une ou plusieurs personnes ou un groupe de personnes, ou qui incite ou encourage publiquement à commettre de tels actes, est passible d’une peine d’emprisonnement d’une durée comprise entre deux et trois ans ou de travaux d’intérêt général de soixante à cent vingt jours. Si l’auteur est un agent de la fonction publique, la durée de l’emprisonnement est de quatre ans au maximum.

17.La population autochtone du Pérou est composée des peuples andins et amazoniens, qui représentent 40 % de la population totale du pays. Toutefois, selon le recensement national de la population de 2007, l’espagnol est la langue enseignée durant l’enfance à 83,9 % de la population âgée de 5 ans et plus; le quechua est enseigné à 13,2 %, l’aymara à 1,8 % et une autre langue autochtone à 0,9 %.

18.Le Pérou est un pays hétérogène, multiculturel et multilingue. La population autochtone vit dans les régions les plus pauvres du pays, qui sont aussi des zones rurales reculées. Des cartes de la pauvreté ont été établies et indiquent les zones qui ne disposent pas des services de base et où les taux d’analphabétisme et de malnutrition sont élevés. Selon le recensement de 2007, la population des régions autochtones de l’Amazonie s’élève à 299 218 habitants, dont le niveau d’éducation diffère considérablement de la moyenne nationale, avec des taux élevés d’analphabétisme parmi les femmes, en particulier dans le groupe d’âge de 12 à 49 ans.

19.Les membres de la population afro-péruvienne ont perdu leur langue maternelle au fil du processus de transculturation. Ils sont concentrés dans les régions côtières méridionales et septentrionales et leur niveau d’éducation est proche de la moyenne nationale.

20.Le principal objectif du Gouvernement est de réduire le taux de pauvreté à un niveau inférieur à 30 %. Il s’agit d’un défi majeur, notamment en ce qui concerne la fourniture de services de base tels que l’approvisionnement en eau et en énergie ainsi que la prestation de soins de santé aux communautés vivant dans des villages éparpillés dans les régions reculées du pays. Toutefois, des progrès rapides sont également accomplis dans le domaine de la réforme de l’éducation et de la formation des enseignants, et des milliers d’ordinateurs ont été distribués aux enfants dans les zones rurales.

21.Ce processus nécessite des investissements importants. Au cours des trois dernières années, 1,5 million d’emplois ont été créés et les recettes des impôts qui en ont découlé ont été utilisées pour financer le système de protection sociale et les projets infrastructurels dans les zones rurales. La dette publique extérieure et intérieure a également été considérablement réduite et les réserves nationales péruviennes ont augmenté pour atteindre un niveau sans précédent. La stabilité économique et le faible taux d’inflation qui en découlent ont considérablement amélioré le bien-être de la population péruvienne.

22.Prenant en considération la relation particulière qu’entretiennent les communautés rurales et autochtones avec la terre, l’État garantit les différentes formes de droits de propriété foncière, à savoir la propriété privée, la propriété communautaire et d’autres formes sociales de propriété. L’environnement et les ressources naturelles sont la propriété de la nation, et l’État a le droit souverain de les utiliser selon les besoins, de façon à promouvoir leur utilisation durable, à préserver la biodiversité, à protéger les réserves naturelles et à favoriser le développement durable de l’Amazonie.

23.Le Système national de zones naturelles protégées a été créé en 1997. Il a donné aux peuples autochtones le droit exclusif d’exploiter, conformément aux pratiques ancestrales et coutumières, les ressources naturelles se trouvant dans les réserves et les parcs nationaux protégés.

24.Il est toutefois indéniable que les peuples autochtones de l’Amazonie se sont opposés aux activités existantes d’extraction d’hydrocarbures et d’autres ressources en raison de leur impact potentiel sur l’environnement. Le Ministère de l’énergie et des mines a pris des mesures en vue d’assurer le développement intégré de la société et de promouvoir les droits environnementaux. La Réglementation sur la protection de l’environnement liée aux activités du secteur des hydrocarbures prévoit que ces activités doivent être menées dans le respect des communautés autochtones et rurales. Un Plan de gestion environnementale est élaboré afin de prévenir ou d’atténuer l’impact de ces activités sur les communautés et l’environnement. La Réglementation relative à la participation des citoyens au développement des activités du secteur des hydrocarbures prend acte du droit de participation des communautés affectées par la gestion de l’environnement. Un texte législatif similaire est applicable à l’exploitation minière et à ses effets négatifs potentiels.

25.Le Congrès de la République envisage d’adopter, dans le domaine de l’environnement, une législation telle que le projet de loi sur la consultation et la participation des peuples autochtones, qui vise à garantir que les activités infrastructurelles susceptibles d’affecter les droits des peuples autochtones ne puissent être mises en œuvre qu’avec leur consentement préalable, libre et éclairé. L’État partie s’efforce également de mettre sa législation nationale en conformité avec la Convention de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants (no169).

26.L’Institut national pour le développement des peuples andins, amazoniens et afro-péruviens (INDEPA) a été créé en avril 2005 pour proposer des politiques nationales dans ce domaine et en superviser la mise en œuvre ainsi que pour coordonner, avec les pouvoirs publics régionaux, l’exécution des projets et des programmes visant à promouvoir, défendre et réaffirmer les droits des peuples concernés et à mener des enquêtes sur ces questions.

27.En réponse à une question posée par le Comité dans sa liste des points à traiter, M. Valdivieso déclare que le service militaire a été obligatoire jusqu’en septembre 1999. En juin 2008, le Congrès a promulgué la loi no29248 sur le service militaire, en vertu de laquelle les personnes qui effectuent volontairement le service militaire bénéficient d’un certain nombre d’avantages, notamment une meilleure formation dans diverses branches technologiques et des facilités pour commencer, poursuivre et terminer des études universitaires ou d’autres types d’enseignement supérieur. Le Président de la République a récemment annoncé l’affectation de ressources à la création d’une armée professionnelle.

28.L’INDEPA a établi une nouvelle carte ethnolinguistique du Pérou en 2009, en s’appuyant sur des informations fournies par les institutions et les personnes travaillant dans le domaine des affaires autochtones. La carte proposée, qui constitue une mise à jour d’une carte établie en 1994, a été soumise au Congrès en février 2009. Les recherches ont permis de recenser 76 groupes ethniques, 15 familles ethnolinguistiques et 67 langues: 58 dans la région amazonienne, 8 dans la région andine et 1 dans la région côtière. Le document contient également une galerie de photos décrivant tous les groupes ethniques du pays afin de familiariser le public avec leurs caractéristiques physiques et vestimentaires. Pour la première fois, les noms de ces groupes en langues autochtones ont été traduits en espagnol afin d’en faire connaître le sens au grand public. Une fois officialisée, la carte sera notamment utilisée pour élaborer les politiques relatives à l’enseignement bilingue, à la médecine traditionnelle, à la sécurité alimentaire et à l’enregistrement des titres fonciers autochtones.

29.Le Gouvernement péruvien a reconnu l’existence et la valeur de la diversité ethnique et culturelle du pays, comme en témoigne la création de l’INDEPA. Les Afro-Péruviens ont apporté une contribution importante à la culture péruvienne, et l’INDEPA s’est efforcé de promouvoir leur participation à la vie politique. Une congressiste afro-péruvienne a été Vice-Présidente et Présidente du Groupe de travail des affaires afro-péruviennes de la Commission pour les peuples, l’environnement et l’écologie andins, amazoniens et afro-péruviens. Le 4 juin a été déclaré Journée de la culture afro-péruvienne en 2005, et le premier musée consacré à la culture afro-péruvienne a été inauguré en 2009.

30.Le Gouvernement péruvien a adopté une série de mesures politiques, législatives et administratives visant à protéger les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels des peuples autochtones. L’équivalent de 1,1 milliard et de 1,6 milliard de dollars des États-Unis a été consacré, en 2007 et 2008 respectivement, aux programmes sociaux destinés aux catégories les plus pauvres de la société. Dans le cadre du programme «Juntos» (Ensemble), 460 000 familles extrêmement pauvres ont reçu une assistance dans les domaines de l’alimentation, de la santé et de l’éducation. Le système général d’assurance-maladie (SIS), qui compte 11 millions de membres, prend en charge la fourniture de soins de santé subventionnés pour les pauvres. Une législation-cadre a également été adoptée en vue d’assurer une couverture universelle des soins de santé. Sa mise en vigueur a commencé dans les trois départements les plus pauvres, à savoir Huancavelica, Apurímac et Ayacucho.

31.Des progrès importants ont été accomplis dans la lutte contre l’analphabétisme grâce au Programme national de mobilisation pour l’alphabétisation (PRONAMA) et aux nouvelles mesures pour l’éducation bilingue. Des campagnes d’enregistrement à l’échelon national sont menées en vue de garantir le droit à une identité pour tous, y compris pour les populations vivant dans des régions reculées.

32.Des mesures ont été prises pour indemniser les victimes des violences qui ont ensanglanté le pays pendant les années 80 et 90. Conformément aux recommandations formulées par la Commission Vérité et Réconciliation dans son rapport final, le Congrès a adopté en 2005 une loi relative au Plan général d’indemnisation (PIR). Afin d’appliquer ce Plan, une Commission des réparations a été créée en 2006 et chargée d’établir un Registre des victimes. À ce jour, 1 400 communautés rurales touchées par les violences ont reçu une réparation collective s’élevant au total à 130 millions de nouveaux soles entre 2007 et 2009. Cette somme n’inclut pas les dotations de la Commission des réparations ou de la Commission multisectorielle de haut niveau responsable de l’élaboration et de la mise en œuvre du Plan. Des progrès notables ont été réalisés en ce qui concerne l’enregistrement des victimes; un programme de compensation individuelle est en cours d’élaboration et sera mis en œuvre dès 2010.

33.Le Programme gouvernemental d’assistance juridique gratuite (ALEGRA) vise à garantir l’accès à la justice pour les pauvres. Ce Programme a connu un démarrage difficile, en raison d’un manque de ressources, mais la Banque mondiale a fourni des fonds pour y remédier. En conséquence, les citoyens pauvres et les personnes vivant dans des régions reculées ont accès à la justice, et des services d’assistance et de conseils juridiques sont disponibles gratuitement. Des renseignements sur les services fournis par ALEGRA ont été diffusés à la radio en espagnol et en quechua, ainsi que dans des documents illustrés. Un programme récemment mis en œuvre prévoit la création de centres d’assistance juridique gratuite (appelés «casas de justicia») dans les zones rurales. En plus des services offerts par ALEGRA, ces centres fournissent une assistance en matière de violence familiale, de violence sexiste, d’enregistrement des naissances et de titres fonciers.

34.L’Académie de la magistrature, qui représente le pouvoir judiciaire auprès du Conseil national des droits de l’homme et des cours supérieures de justice, offre une formation sur les droits de l’homme destinée aux agents chargés de l’application des lois, aux membres de la magistrature et aux agents de la fonction publique. Depuis 2000, l’Académie a dispensé 68 formations sur les droits de l’homme dans différents districts judiciaires et, en tant que représentant du pouvoir judiciaire auprès du Conseil national des droits de l’homme, elle a organisé 11 cours sur les droits de l’homme. Des dispositions introduites en 2001 facilitent l’intégration des droits de l’homme au programme des formations destinées aux agents des forces de l’ordre. Le Manuel sur les droits de l’homme appliqués à la police civile, publié en 2006, présente des procédures et des techniques d’intervention policière respectueuses des droits de l’homme. Le Manuel inclut le texte de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et un chapitre sur les communautés autochtones et campesino (paysannes). Entre 2001 et 2008, 258 instructeurs de la police ont reçu une formation sur les droits de l’homme. De plus amples détails sur la formation dans le domaine des droits de l’homme sont fournis dans les réponses écrites.

35.Les décrets législatifs contestés par certaines communautés autochtones et campesino ont été adoptés dans le cadre de la mise en œuvre de l’accord de libre-échange États-Unis-Pérou, qui vise à renforcer la productivité et à promouvoir une utilisation appropriée des ressources naturelles, et nécessite la construction ou la modification d’infrastructures, sans porter atteinte aux droits des communautés locales ou à leurs biens. Conscient du fait que les communautés autochtones et campesino peuvent avoir besoin d’en savoir plus sur le contenu de ces décrets, le Gouvernement a organisé une table ronde en vue d’examiner les questions pertinentes avec leurs dirigeants et de clarifier le contenu des réglementations qui pourraient être perçues comme portant atteinte à leurs droits.

36.Se référant aux affrontements violents de Bagua le 5 juin 2009, qui ont entraîné la mort de 33 personnes, dont une majorité de policiers, M. Valdivieso informe le Comité qu’une enquête officielle sur ces incidents a été ouverte. Une commission d’enquête a également été mise en place dans le cadre de la table ronde susmentionnée. Ces incidents ont été largement diffusés à travers le monde mais, malheureusement, les médias ont déformé les faits. Le Pérou est une démocratie participative et ces violences ne sauraient être justifiées. Des barrages routiers illégaux ont privé plusieurs communautés d’énergie, de nourriture et de fournitures médicales et, compte tenu de leur impact négatif sur la population locale, le Gouvernement a été forcé de prendre des mesures. Alors que des discussions étaient menées dans le cadre de la table ronde, des éléments extérieurs avaient incité à des actions violentes, ce qui avait poussé des représentants autochtones à quitter la table de négociation. Malheureusement, une station de radio locale a diffusé de fausses informations concernant un prétendu «massacre» des populations autochtones à Curva del Diablo. Les policiers envoyés pour rétablir l’ordre ont été confrontés à des actes de violence et ont recouru à la force en légitime défense. M. Valdivieso dit être en mesure de fournir au Comité des documents filmés corroborant sa version des faits, notamment les actes de torture puis l’assassinat de plusieurs policiers. Étant donné les progrès accomplis sur la voie de la démocratie, de l’inclusion sociale et de l’éradication de la pauvreté, il n’y a aucune excuse à ces actes de violence, qui sont attisés par des groupes extrémistes. Le Gouvernement déplore vivement les incidents de Bagua, et des enquêtes indépendantes et impartiales seront effectuées. Toute allégation d’ingérence politique dans ces enquêtes est sans fondement. Il est absurde d’accuser les responsables politiques péruviens d’agir contre un ordre démocratique qu’ils ont eux-mêmes établi.

37.M. Cali Tzay (Rapporteur pour le Pérou) se dit préoccupé par les incidents violents de Bagua. Bien que le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones ait déclaré que ces incidents ne constituaient pas un génocide au sens de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, il convient de ne pas minimiser les faits. Le Rapporteur spécial a recommandé la création d’une commission d’enquête indépendante composée d’experts et de représentants des populations autochtones et a exprimé sa volonté de visiter le pays pour examiner la situation dans le cadre de son mandat. Compte tenu de la gravité des faits, M. Cali Tzay exhorte le Gouvernement à donner suite à ces recommandations, qui offrent une réelle occasion de remédier à ce problème de façon pacifique, participative et fondée en droit.

38.Notant que l’État partie a adopté une série d’instruments législatifs sur le droit à la non-discrimination, M. Cali Tzay déclare que les informations dont est saisi le Comité permettent de penser que ces instruments sont peu connus des agents de la fonction publique, du grand public et des peuples autochtones eux-mêmes. La législation n’aurait pas été traduite dans les langues autochtones et les formations sur les droits de l’homme destinées aux agents de la fonction publique seraient insuffisantes. L’État partie lui-même reconnaît aux paragraphes 4 et 5 de son rapport que la pleine jouissance des droits n’est pas toujours garantie pour les catégories marginalisées et pauvres de la société. Il faudrait prendre davantage de mesures pour garantir la mise en œuvre concrète de la Convention sur le terrain, en veillant à assurer la participation la plus large possible de tous les secteurs de la société. Bien que la reconnaissance et la protection de la diversité ethnique et culturelle inscrites dans la Constitution et la législation de l’État partie soient louables, ces dispositions n’ont de sens que si les différents groupes ethniques ont réellement la possibilité de participer à la vie politique du pays.

39.Notant que la Constitution fait référence aux «communautés campesino et autochtones» plutôt qu’aux «peuples autochtones», M. Cali Tzay invite la délégation à donner de plus amples précisions sur la signification de l’expression «diversité ethnique et culturelle» au Pérou. Le rapport témoigne d’une certaine incohérence terminologique, car on y emploie indifféremment les termes de groupes «aborigènes», «indigènes» ou «autochtones»; il demande donc à la délégation de donner des précisions à ce sujet.

40.Attirant l’attention sur les paragraphes 75 à 77 du rapport, M. Cali Tzay demande si les populations afro-péruviennes, en vertu de cette désignation, sont visées par les dispositions de la Convention no 169 de l’OIT. Il souhaite également savoir si les populations autochtones participent directement à l’élaboration, à l’exécution et à l’évaluation des plans et programmes administrés par l’INDEPA.

41.Se référant au paragraphe 40 du rapport, M. Cali Tzay demande comment l’État partie tranche la question de savoir si des actes de violence mentale revêtent également un caractère discriminatoire.

42.En ce qui concerne le paragraphe 44 du rapport, M. Cali Tzay fait remarquer que les autochtones malentendants ou atteints de troubles de la parole peuvent être victimes d’une double discrimination et que des mesures particulières doivent donc être prises pour protéger leurs droits.

43.Les informations fournies dans le rapport doivent être analysées dans un contexte qui se caractérise par une discrimination marquée envers les peuples autochtones. À cet égard, M. Cali Tzay demande dans quelle mesure les peuples autochtones ont participé à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation du programme pour l’emploi des ruraux pauvres («A Trabajar Rural») mentionné au paragraphe 165 du rapport.

44.M. Cali Tzay demande des informations complémentaires concernant l’élaboration des textes législatifs, mentionnés dans les paragraphes 15 à 39 du rapport périodique, ayant trait à la Convention et à d’autres instruments et documents sur les droits de l’homme. En particulier, il serait utile de savoir comment les lois nos 26-859, 26-864, 27-683, 27-867 et 27‑972 reprennent les dispositions de la Convention no 169 de l’OIT et de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones relatives à la participation réelle et effective des peuples autochtones à toutes les décisions les concernant, directement ou indirectement. À cet égard, l’État partie devrait également garder à l’esprit le paragraphe 4 d) de la Recommandation générale XXIII du Comité sur le droit des populations autochtones à une participation effective à la vie publique et l’obligation d’obtenir leur consentement éclairé concernant toute décision directement liée à leurs droits et à leurs intérêts. M. Cali Tzay demande si la loi no 28-044 est conforme à la Convention contre la discrimination dans l’éducation de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture; si la loi no 27-337 est conforme à la Convention relative aux droits de l’enfant et aux recommandations du Comité des droits de l’enfant concernant les droits des enfants autochtones; et si la loi no 26-772 est conforme à la Convention de l’OIT concernant la discrimination en matière d’emploi et de profession (no 111). Se référant au paragraphe 29 du rapport périodique, il demande si la Convention a été invoquée dans le cadre des peines, enquêtes ou plaintes relatives à des violations des droits des consommateurs.

45.Plusieurs experts et organisations autochtones ont indiqué que les décrets législatifs qu’a promulgués le Gouvernement en vue de donner effet à son accord de libre-échange avec les États-Unis d’Amérique ont dépassé les limites prévues. Le Gouvernement aurait légiféré dans des domaines ne relevant pas des compétences que lui reconnaît le Congrès, sans tenir compte des engagements internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier ceux concernant les droits des peuples autochtones et aux questions environnementales. En effet, des rapports indiquent que de nombreux problèmes rencontrés par les populations autochtones dans l’État partie résultent du manque de consultations avec celles-ci et du refus du Gouvernement de leur permettre de participer aux décisions qui les concernent. Ces décrets législatifs constitueraient une violation des droits relatifs à la survie physique et culturelle des groupes autochtones du Pérou. À cet égard, M. Cali Tzay recommande à l’État partie de prendre acte des articles pertinents de la Convention no 169 de l’OIT et de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. S’agissant de la portée du «consentement préalable, libre et éclairé», l’opinion des experts est que le consentement doit résulter d’un dialogue dans lequel toutes les parties ont agi de bonne foi et qui, dans l’idéal, déboucherait sur l’établissement d’un document détaillé, traduit dans la langue autochtone et signé par les parties.

46.Alors que plusieurs décrets législatifs ont été abrogés, les groupes autochtones ont indiqué que le Gouvernement continuait de ne pas promouvoir leurs droits à la participation et à la consultation. Le Bureau du Médiateur a déposé une requête en inconstitutionnalité concernant plusieurs décrets législatifs pour des motifs tels que la violation des droits des communautés rurales à participer aux décisions concernant la gestion de leurs propres terres, ainsi que des droits des peuples autochtones à avoir une identité culturelle, à posséder des terres et à donner leur consentement préalable. En juin 2009, les chefs traditionnels autochtones de la région de San Martín ont également présenté une requête demandant que la Cour constitutionnelle déclare inconstitutionnels 10 des décrets législatifs affectant les droits de leurs peuples à la terre, aux territoires et à l’identité. Une fois encore, les principales raisons invoquées étaient l’absence de consultation et d’information sur le contenu et les conséquences des décrets.

47.À propos des renseignements fournis dans les paragraphes 37 à 39 du rapport périodique, M. Cali Tzay demande des informations complémentaires sur le statut juridique des normes promulguées par les pouvoirs locaux ou régionaux, et sur les dispositions constitutionnelles et juridiques leur permettant de le faire. Il demande également quels instruments internationaux sont invoqués dans ce processus, et si des normes peuvent être promulguées sur d’autres aspects, tels que la terre, les ressources naturelles, l’eau et les activités culturelles.

48.Plusieurs organisations autochtones ont relevé des éléments discriminatoires dans certains décrets législatifs concernant les terres, l’eau, les ressources naturelles et l’identité culturelle des peuples autochtones. La discrimination est fondée principalement sur le manque d’information, de consultation et de consentement préalable des peuples ou des communautés concernées, sur l’ignorance ou la violation des dispositions des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, les conséquences indéniables pour les peuples autochtones et les réactions qui en découlent. S’agissant des droits relatifs à l’eau, M. Cali Tzay rappelle la décision du Comité statuant que l’extraction d’eau sur les terres des communautés autochtones Aymara d’Ancomarca à Tacna était injuste et discriminatoire. Il demande si les problèmes subis par cette communauté ont été résolus, conformément à la teneur de la lettre que le Comité a adressée à l’État partie le 13 mars 2009.

49.M. Cali Tzay souhaite connaître la réaction de la délégation aux rapports reçus par le Comité indiquant que les peuples autochtones ne sont actuellement pas autorisés à exprimer leur avis sur les décrets législatifs et les politiques du Gouvernement concernant la gestion environnementale de leurs propres terres et les concessions d’exploitation des ressources minières, des hydrocarbures et de l’eau accordées sur ces terres.

50.M. Cali Tzay fait remarquer que le rapport périodique ne contient que peu d’informations sur la population afro-péruvienne. D’autres rapports reçus par le Comité mentionnent la vulnérabilité de ce groupe, étant donné qu’il n’est pas reconnu dans la Constitution ou dans l’histoire de l’État partie. Certaines communautés afro-péruviennes semblent ne pas avoir accès aux services de base et on y observe une forte incidence de la toxicomanie et de la violence. Selon certains rapports, beaucoup d’Afro-Péruviens sont stigmatisés en tant que criminels de droit commun au seul motif de leur origine ethnique et n’ont pas réellement accès à la justice. M. Cali Tzay attire l’attention de l’État partie sur le fait que la communauté afro-péruvienne est en droit de bénéficier pleinement de toutes les dispositions de la Convention, et que la Déclaration et le Programme d’action de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée s’appliquent entièrement à cette population.

51.Enfin, abordant des questions qui ne sont pas traitées en détail dans le rapport périodique ou d’autres rapports reçus par le Comité, M. Cali Tzay demande quel est le rôle des systèmes juridiques autochtones en matière de fourniture d’une assistance juridique gratuite, et si une telle assistance inclut des services d’aide juridique de base sur des questions non contentieuses. Il demande également des informations complémentaires sur la stérilisation forcée. Il note que les programmes de planification familiale dans les communautés autochtones qui ne sont pas traduits dans la langue concernée et qui ne fournissent pas d’informations complètes sur la signification et les conséquences de la stérilisation chirurgicale pourraient être très discriminatoires. Enfin, les données d’expérience concernant d’autres pays indiquent que les comités d’autodéfense et les mesures de lutte contre les insurrections visées aux paragraphes 128 à 132 du rapport périodique peuvent donner lieu à des pratiques discriminatoires concernant le recrutement, le fonctionnement des groupes, leurs objectifs, le traitement de leurs ennemis et les répercussions qu’ils ont sur certaines communautés. M. Cali Tzay demande quelles relations entretiennent ces groupes avec le Ministère de la défense et le Ministère de l’intérieur, quelles sont les fonctions assignées à ces groupes, quel ordre juridique civil ou militaire est appliqué en cas de conflits avec la loi, et dans quelle mesure leurs membres sont bénévoles. Il souhaite également savoir si la réparation accordée aux victimes de ces groupes est faite sous forme d’argent ou de terres.

52.M. Diaconu demande comment le Gouvernement garantit que le régime législatif en matière de discrimination raciale soit le même dans l’ensemble de l’État partie. Il souhaite également savoir si une raison particulière préside à l’utilisation des différentes expressions «populations autochtones» et «populations indigènes» dans le rapport périodique. Il juge utile de savoir si l’État partie envisage d’adopter une législation spécifique pour se conformer aux dispositions de l’article 4 de la Convention. Il demande des précisions concernant le nombre d’autochtones dans l’État partie, étant donné que le paragraphe 42 du rapport périodique indique qu’ils représentent 40 % de la population, alors que le tableau du paragraphe 44 semble suggérer que ce pourcentage est nettement inférieur. Il juge également utile d’avoir des données supplémentaires concernant la situation socioéconomique des différents groupes, notamment les taux de chômage, les statistiques de la santé et l’accès au logement. Il demande quelles langues sont enseignées dans le cadre du programme d’éducation bilingue, combien d’écoles dispensent un enseignement bilingue et à quel niveau.

53.S’agissant de la question des ressources naturelles, M. Diaconu demande des informations à jour sur l’élaboration de la Règlementation relative à la participation des citoyens à la mise en œuvre d’activités pétrolières, mentionnée au paragraphe 84 du rapport périodique.

54.Rappelant que le rapport périodique fait état d’une indemnisation des victimes de conflit, sous le contrôle de la Commission Vérité et Réconciliation, M. Diaconu souhaite savoir quelles mesures ont été prises pour punir ceux qui ont été reconnus coupables d’actes de violence pendant le conflit.

55.Enfin, M. Diaconu demande si le cas de Mme Mamérita Mestanza Chávez, mentionné au paragraphe 178 du rapport périodique, est un incident isolé ou s’il est révélateur d’une pratique plus généralisée de la stérilisation forcée.

56.M. Thornberry demande des informations complémentaires concernant l’incorporation des instruments internationaux dans la législation interne, notamment la Convention no 169 de l’OIT et l’accord de libre-échange avec les États-Unis d’Amérique. Il souhaite savoir quelles normes sont appliquées pour remédier aux incohérences qui pourraient exister entre ces instruments et les dispositions du droit interne.

57.Il demande des éclaircissements concernant le libellé juridique de la législation nationale de l’État partie, qui contient à la fois les termes campesinos et autochtones. Dans certains cas, ces deux termes semblent être utilisés comme synonymes, alors qu’ailleurs ils semblent se référer à des catégories distinctes de la population.

58.M. Diaconu demande dans quelle mesure le Gouvernement estime que la modernisation peut contribuer aux droits des autochtones. Il serait intéressant de savoir si le modèle de développement mentionné par la délégation est fondé sur ce qu’on appelle «l’effet de retombée économique», étant donné en particulier les liens reconnus entre la pauvreté et l’appartenance ethnique.

59.Notant avec intérêt les observations de la délégation sur l’égalité différenciée, qui sont en accord avec le point de vue du Comité, M. Diaconu demande si la politique du Gouvernement relative à l’enseignement bilingue ne risque pas d’entraîner une discrimination indirecte.

60.M. Diaconu demande quelles mesures sont prises pour mettre un frein aux discours haineux, en application des normes de la Convention. Cela est important pour promouvoir le dialogue civique entre les différents secteurs de la société et éviter la dégradation du débat public.

61.M. Diaconu demande de plus amples explications concernant les raisons pour lesquelles la situation de calme relatif au sujet des ressources en minerais et en eau a changé en 2009.

62.De manière générale, M. Diaconu souhaite savoir quelle vision l’État partie a de lui-même, et comment le Gouvernement estime que les Afro-Péruviens et les populations autochtones s’intègrent dans le Pérou moderne.

63.M. A vtonomov, se félicitant de la reprise du dialogue entre le Comité et l’État partie après une pause de dix ans et faisant écho aux observations formulées par MM. Diaconu et Thornberry, déclare que l’écart observé au Pérou entre le nombre d’autochtones et le nombre de personnes parlant des langues autochtones montre que ces langues sont en train de disparaître. Bien que la situation soit complexe, comme dans la plus grande partie de l’Amérique latine, et que des facteurs historiques évidents soient en jeu, le tableau du paragraphe 44 du rapport périodique montre que la proportion de la population péruvienne parlant quechua ou aymara a diminué entre 1993 et 2007, tant dans les zones urbaines qu’en milieu rural, tandis que le nombre de locuteurs espagnols a augmenté. M. Avtonomov demande des précisions concernant le déclin apparent des langues autochtones, qui peut être causé par divers facteurs, notamment une réduction de la taille des populations, une perception négative de ces langues ou l’absence d’enseignement dans ces langues, malgré l’existence d’écoles bilingues et la protection constitutionnelle des droits des peuples autochtones. Il estime que les données présentées dans le tableau ne semblent pas prendre en considération les personnes parlant plusieurs langues et suggère que dans les prochains rapports la situation soit décrite de façon plus détaillée.

64.M. Avtonomov attire l’attention sur le potentiel, parfois caché, de conflit ethnique entre la police et les populations autochtones, en particulier au sujet des préoccupations relatives aux ressources en eau et à leur utilisation, qui ont des conséquences importantes sur les populations autochtones du Pérou. Il dit que la question est abordée dans certaines sections de la Convention no169 de l’OIT et de la Recommandation générale XXIII du Comité, et en particulier dans sa Recommandation générale XXXI sur la prévention de la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale, dont le paragraphe 5 définit une série de stratégies à suivre par les États parties. Il demande dans quelle mesure l’État partie applique la Recommandation générale XXXI en droit et dans la pratique afin d’éviter les conflits ethniques et la discrimination raciale dans le domaine de la justice pénale, par exemple en promouvant une meilleure compréhension aux niveaux linguistique et culturel entre les services chargés de faire appliquer les lois et les communautés autochtones.

65.M. M urillo Martínez, exprimant le regret que la composition de la délégation péruvienne ne reflète pas la diversité ethnique et culturelle du pays, se félicite néanmoins des mesures telles que la création d’une Journée annuelle et d’un musée consacrés à la population afro-péruvienne, qui contribueront à consolider la mémoire historique de ce peuple. Il est à espérer que l’élection d’un membre du Congrès d’origine afro-péruvienne ne reste pas seulement une exception à la règle.

66.Le Rapport du Pérou au Comité aurait pu contenir davantage de données ventilées, en particulier en ce qui concerne la population afro-péruvienne. Ayant déjà participé à un séminaire organisé au Pérou sur l’intégration des variables relatives à l’appartenance ethnique dans les recensements, M. Murillo Martínez demande quels progrès ont été accomplis à cet égard et dans quelle mesure les peuples autochtones sont représentés dans les résultats du recensement au Pérou. Il juge indispensable de disposer d’indicateurs précis reflétant la situation de tous les groupes de la population pour effectuer une évaluation du développement économique et d’autres aspects de la société. Il demande quels sont les effets sur les différents groupes ethniques du Pérou de la crise financière mondiale et de l’accord de libre-échange conclu avec les États-Unis; il souhaite également savoir si la décision 391 de la Communauté andine approuvant un régime commun d’accès aux ressources génétiques a provoqué des tensions avec les communautés autochtones, et quels efforts de reconstruction sont effectués au Pérou suite au séisme de 2007, qui a durement touché les populations autochtones du pays.

67.M. Murillo Martínez demande à la délégation de préciser si la peine de mort figure encore dans le recueil des lois péruviennes, bien qu’aucune exécution n’ait été pratiquée depuis plusieurs décennies, et, le cas échéant, si le Gouvernement envisage son abolition. Il souhaite également de plus amples renseignements sur les récents efforts visant à associer les différents groupes ethniques, en particulier les personnes d’ascendance africaine, aux processus décisionnels. Il approuve la proposition visant à créer une commission d’enquête afin d’étudier les événements du 5 juin 2009. Enfin, il demande si le Pérou mène des programmes visant à accorder des droits fonciers aux groupes autochtones, en particulier aux Afro-Péruviens.

68.M . L indgren A lves, soulignant qu’une législation détaillée sur la discrimination dans divers domaines a été adoptée au Pérou depuis les années 90, demande si les projets de loi mentionnés aux paragraphes 88 à 96 du rapport périodique ont été promulgués. Il prend acte des nombreuses initiatives positives du pays dans le domaine social, fondées sur une «culture du respect des différences». S’agissant des groupes d’autodéfense des communautés campesino, il demande si l’organisation du Sentier lumineux est encore active.

69.Les divergences entre les informations fournies par l’État partie et sa délégation d’une part, et les rapports soumis par les ONG et d’autres groupes d’autre part, rendent plus difficile la formulation par le Comité de recommandations à l’État partie concernant la voie à suivre. Bien que le Pérou ait effectué de grands progrès dans de nombreux domaines, certains groupes autochtones semblent actuellement en subir les conséquences. M. Lindgren Alves est toutefois fortement encouragé par le fait que plus de la moitié de la population du pays se définit elle-même comme mestizo (métis), ce qui, selon lui, est la meilleure façon de concilier des notions contradictoires telles que le progrès et la tradition tout en évitant les conflits raciaux.

70.M. de Gouttes fait observer que l’article 323 du Code pénal péruvien ne reprend pas complètement les dispositions de l’article 4 de la Convention et invite le pays à modifier ou compléter sa législation en conséquence. Constatant le nombre réduit de plaintes pour discrimination raciale enregistrées au Pérou, il rappelle l’avis du Comité, exprimé dans sa Recommandation générale XXXI, selon lequel l’absence ou la rareté des plaintes ne doit pas nécessairement être considérée comme positive, car cela peut signifier que les victimes ne disposent pas d’informations suffisantes concernant leurs droits, qu’elles craignent une réprobation ou des représailles au niveau social, que les victimes ayant des ressources limitées sont effrayées par le coût et la complexité de la procédure judiciaire, qu’il existe un manque de confiance à l’égard des autorités policières et judiciaires, ou que les autorités ne sont pas suffisamment attentives aux infractions relevant du racisme ou consciente de ces infractions. Il accueille avec satisfaction le programme d’assistance juridique ALEGRA destiné à faciliter l’accès des populations autochtones à la justice, et les mesures de sensibilisation des agents de police aux questions relatives aux droits de l’homme, même si l’efficacité de telles initiatives doit être jugée sur leurs résultats. Il demande quel est le rôle du procureur dans le traitement des plaintes relatives aux discriminations raciales.

71.En ce qui concerne la protection aussi bien de l’environnement que des droits des communautés autochtones et rurales relatifs aux terres et aux ressources naturelles, M. de Gouttes demande si l’État partie a réalisé des progrès sur le plan législatif à cet égard et si les communautés touchées par l’exploitation minière et d’autres activités industrielles participent au processus législatif. Ce type d’activités industrielles n’est-il autorisé qu’avec le consentement préalable, libre et éclairé des communautés concernées? Quel est la contribution à cette situation du système de zones naturelles désignées, du Ministère de l’énergie et des mines, et du Ministère de l’environnement, et de la Règlementation mentionnée au paragraphe 82 du rapport périodique?

72.M. de Gouttes demande quelles conclusions la Commission Vérité et Réconciliation a jusqu’ici tirées concernant les violences qui ont touché les communautés autochtones au Pérou. S’agissant de l’obligation historique des communautés de créer des comités d’autodéfense, il demande des précisions concernant le nombre de comités encore en place.

73.Au sujet de la stérilisation forcée, M. de Gouttes demande s’il existe d’autres cas que celui de Mme Mamérita Mestanza Chávez, qui a été porté devant la Commission interaméricaine des droits de l’homme. Il demande également des informations complémentaires concernant l’observation du Gouvernement selon laquelle les taux de fertilité sont corrélés positivement avec les niveaux d’éducation.

74.M. Sicilianos, se référant à un rapport soumis par la Commission juridique pour l’autodéveloppement des peuples andins d’origine (CAPAJ), demande des informations sur les décrets législatifs nos 1064 et 1081 et sur le Plan national pour les droits de l’homme pour la période 2006-2010, concernant en particulier la discrimination potentielle contre les peuples autochtones et leur droit à l’eau.

La séance est levée à 18 h 10 .