NATIONS UNIES

CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/SR.182517 août 2007

Original: FRANÇAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante et onzième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1825e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le vendredi 3 août 2007, à 15 heures

Président: M. de GOUTTES

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Deuxième à douzième rapports périodiques du Mozambique

La séance est ouverte à 15 h 15.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième à douzième rapports périodiques du Mozambique (CERD/C/MOZ/12; CERD/C/MOZ/Q/12/CRP.1)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation mozambicaine prend place à la table du Comité.

2.Mme MACHAVELA (Mozambique) dit que le Mozambique, qui compte 19,8 millions d’habitants, est composé de 16 groupes ethniques et 732 groupes religieux, auxquels s’ajoutent quelque 7 000 réfugiés venus de la région des Grands Lacs et de la Somalie. Le portugais est la langue officielle mais il existe plusieurs autres langues nationales. La Constitution de la République du Mozambique consacre le principe de l’égalité de tous et interdit la discrimination fondée sur la race, la couleur, le sexe ou l’origine ethnique. Divers instruments juridiques reprennent ces principes, dont la loi sur le tourisme qui oblige les prestataires de tourisme à dispenser leurs services sans aucune discrimination fondée sur la nationalité, la condition sociale, la race, le sexe, l’origine ethnique, la religion ou l’appartenance politique et la législation du travail qui interdit toute discrimination au motif des préférences sexuelles, de la race ou de la séropositivité du candidat à un emploi. En outre, le Code pénal est en cours de révision afin de supprimer toute loi à caractère discriminatoire.

3.Les races, groupes ethniques et religieux divers ont toujours vécu en harmonie au Mozambique, et rares ont été les conflits découlant de la diversité culturelle ou religieuse. D’ailleurs, aucun groupe ne se qualifie de minorité ethnique ni ne demande à faire l’objet de mesures positives.

4.Des instances locales de conciliation sont chargées de régler les différends, le cas échéant, et l’accent est mis sur la justice de proximité, la prévention des conflits et le renforcement de la stabilité sociale. Dans les régions rurales, les chefs traditionnels, appelés régulos, ont une grande influence. Assistés d’un conseil comprenant des membres de la communauté dont des femmes, ils jouent un rôle de médiation pour les affaires civiles et se fondent sur les pratiques coutumières locales pour rendre leurs décisions, ce qui explique que les mécanismes traditionnels de résolution des conflits diffèrent d’une région du pays à l’autre.

5.Compte tenu des effets de la pauvreté sur la jouissance des droits de l’homme, le Gouvernement a mis sur pied un programme visant à réduire la pauvreté et stimuler la croissance économique. Le Plan d’action 2006‑2009 pour la réduction de l’extrême pauvreté a pour objectif de faire baisser le taux de pauvreté à 45 % en 2009, contre 54 % en 2003. Ce plan d’action, comme le précédent qui a couvert la période 2001‑2005, met l’accent sur le développement des ressources humaines, l’éducation et la santé, l’amélioration de la gestion des affaires publiques, la mise en place d’infrastructures de base et le développement de l’agriculture, entre autres. Le Plan d’action 2006‑2009 a ceci de nouveau par rapport au précédent qu’il vise plus spécifiquement à améliorer les conditions de vie des plus défavorisés grâce à la redistribution des richesses.

6.L’éducation constitue un outil stratégique de la lutte pour atténuer la pauvreté. Le plan stratégique pour le développement de l’éducation adopté par le Gouvernement comprend trois composantes, dont l’élargissement de l’accès et de l’égalité dans l’éducation, l’amélioration de la qualité de l’enseignement et la création d’établissements scolaires. Entre autres mesures visant à élargir l’accès à l’éducation, l’enseignement bilingue a été introduit dans les provinces de Gaza et Tete dans le cadre d’un projet pilote couvrant la période 1992‑1997, qui consistait à dispenser aux élèves des cours à la fois dans leur langue maternelle et en portugais. Compte tenu du succès qu’a connu ce programme, l’expérience a été élargie à 16 langues et concerne désormais deux écoles par province en moyenne.

7.En matière d’accès à la santé, le Gouvernement mozambicain continue de mettre l’accent sur les soins de santé primaires en vue de réduire les taux élevés de mortalité et de morbidité au sein des groupes les plus vulnérables, à savoir les femmes sans protection, les orphelins et les personnes âgées, et notamment sur la prévention et la gratuité de ces soins. Divers programmes ont en outre été élaborés pour réduire l’incidence du VIH/sida qui touche actuellement quelque 16 % de la population, dont un programme multisectoriel qui comprend des mesures de prévention de la maladie et de prise en charge des personnes touchées par ce virus, auxquelles s’ajoutent les mesures visant à éviter la mise à l’écart des personnes séropositives ou malades, en particulier sur le lieu de travail.

8.En matière d’accès à la justice, le Gouvernement mozambicain continue de déployer des efforts considérables pour améliorer l’aide juridique et l’assistance judiciaire offertes aux citoyens les plus défavorisés, principes qui, au même titre que la liberté d’accès à la justice et le droit de se défendre, sont garantis par la Constitution. L’Institut chargé de l’aide juridique et de l’assistance judiciaire a d’ailleurs été créé pour venir en aide aux citoyens les plus démunis et garantir leur droit à la défense.

9.Pour renforcer les mécanismes de protection et de promotion des droits de l’homme, l’institution du Provedor de Justiça (Médiateur) a été prévue par la Constitution et la loi portant création de la Commission nationale des droits de l’homme a été soumise à l’Assemblée de la République pour approbation.

10.Le Centre de formation dans le domaine juridique et judiciaire a conçu des modules d’éducation aux droits de l’homme et aux principes consacrés par la Constitution et les autres instruments internationaux pertinents − comme le respect des droits de l’homme, l’interdiction de la discrimination pour quelque motif que ce soit, la citoyenneté et la résolution pacifique des conflits entre autres − qui ont été inscrits aux programmes de formation des magistrats et autres membres de l’appareil judiciaire et du ministère public, ainsi que des gardiens de prison ou encore des policiers. Dans les établissements d’enseignement supérieur, et en particulier les facultés de droit, l’enseignement des droits de l’homme est devenu obligatoire. Enfin, des campagnes d’information sont mises en œuvre pour sensibiliser les citoyens à leurs droits fondamentaux.

11.Mme Machavela reconnaît qu’en dépit des efforts mis en œuvre et des progrès accomplis beaucoup reste à faire, notamment pour ce qui est de la mise en œuvre des instruments existants visant à garantir l’égalité de tous.

12.M. EWOMSAN (Rapporteur pour le Mozambique) se félicite que le Mozambique ait renoué le dialogue avec le Comité en soumettant ses deuxième à douzième rapports périodiques et salue la présence d’une délégation de haut niveau. Il rappelle que l’État partie a connu une guerre de libération ainsi qu’une guerre civile et a été victime de nombreuses catastrophes naturelles ayant provoqué des déplacements massifs de population, soit à l’intérieur du pays, soit à destination des pays voisins. Il précise qu’avec l’appui de l’ONU, des accords de paix ont été signés entre les principaux belligérants, à savoir le Fonds de libération du Mozambique (FRELIMO) et la Résistance nationale du Mozambique (RENAMO) et que le programme de rapatriement mis en œuvre entre 1993 et 1995 a permis à 3,8 millions de personnes déplacées à l’intérieur de leur pays et à 1,7 million de réfugiés de regagner leurs localités d’origine. Le Mozambique a en outre enregistré des progrès considérables sur le plan de la démocratie, avec l’organisation d’élections libres et l’adoption d’une nouvelle Constitution en 2004, ainsi que la mise en œuvre d’une politique de protection et de promotion des droits de l’homme qui consacre les droits et les libertés fondamentales. M. Ewomsan se félicite également de la création du poste de médiateur (Provedor de Justiça) ainsi que des efforts mis en œuvre par le Gouvernement mozambicain pour se doter d’une institution nationale des droits de l’homme conforme aux Principes de Paris.

13.Sur le plan de la législation, des progrès ont été également enregistrés, avec l’adoption de la loi sur la famille, qui définit les droits et obligations entre époux, ainsi que de la loi foncière, qui garantit aux hommes et aux femmes les mêmes droits en matière d’accès à la propriété. M. Ewomsan souligne que l’État mozambicain devra veiller à ce que ces lois soient appliquées, compte tenu que, dans ces domaines, il est difficile de changer les mentalités, en particulier dans les zones rurales.

14.M. Ewomsan se félicite que la Constitution interdise la discrimination fondée sur la race, la couleur ou l’origine et que les dispositions de la Convention sont directement applicables par les tribunaux nationaux, mais il regrette qu’il n’existe pas d’exemples concrets de cas dans lesquels la Convention aurait été appliquée (par. 106) et que le Mozambique n’ait pas encore adopté une loi sur l’élimination de la discrimination raciale qui contienne des dispositions prévoyant des mesures spécifiques. De plus, il déplore que le Code pénal mozambicain ne définisse ni ne réprime l’infraction de racisme, ce à quoi l’État partie devrait remédier au plus vite, et il demande quelle instance est chargée au niveau national d’harmoniser la législation interne avec les dispositions de la Convention et des instruments universels pertinents auxquels l’État partie a adhéré.

15.Saluant la volonté de l’État partie d’inscrire l’enseignement aux droits de l’homme dans les programmes scolaires, M. Ewomsan juge qu’il serait bon d’inscrire également cette matière au programme de formation des magistrats.

16.M. Ewomsan relève une contradiction entre le paragraphe 100, où il est dit que la discrimination ne se manifeste dans le pays que de manière sporadique, et le paragraphe 121, où il est indiqué qu’il n’y a pas de cas de discrimination raciale, de xénophobie ou d’autres formes d’intolérance. Il estime que l’État partie ne sera pas à même de combattre la discrimination s’il ne reconnaît pas l’existence d’actes et de situations discriminatoires et souhaiterait que l’État partie donne des indications précises sur les manifestations de discrimination fondée sur l’origine ethnique ou tribale, la race, ou encore la couleur, ainsi que sur les mesures prises pour y mettre fin. Le Comité dispose en effet d’informations dignes de foi selon lesquelles il y aurait eu des actes avérés de discrimination fondés sur l’appartenance politique, notamment dans la province de Cabo Delgado, où un membre du parti politique d’opposition aurait été démis de ses fonctions de directeur de l’Université Eduardo Modlane pour cette raison.

17.Se fondant sur des informations émanant de l’Institut danois des droits de l’homme selon lesquelles il y aurait d’énormes disparités entre la capitale, Maputo, et les régions rurales du centre et du nord du pays en matière de revenus, M. Ewomsan aimerait savoir où en est la mise en œuvre du programme de décentralisation et si l’État partie envisage de ratifier le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

18.Face à l’ampleur de la corruption, en particulier au sein des instances judiciaires, M. Ewomsan souhaiterait savoir si cette question est abordée au cours de la formation du personnel judiciaire, si le bureau central de lutte contre la corruption fonctionne toujours et, le cas échéant, quelle est son efficacité.

19.Le rapporteur demande à la délégation de confirmer ou d’infirmer les informations communiquées par Amnesty International selon lesquelles 1 % seulement des mineurs séropositifs bénéficieraient d’un traitement antirétroviral et s’il est vrai, comme le prétend cette organisation, que des policiers accusés d’avoir fait un usage excessif de la force contre des manifestants n’ont pas été poursuivis en justice.

20.M. Ewomsan demande des informations complémentaires sur les réseaux de traite d’enfants à des fins de prostitution et de travail forcé existant dans le pays ainsi que sur le trafic d’organes avec l’Afrique du Sud et le Zimbabwe. À ce sujet, il souhaiterait savoir quel sort a été réservé aux deux religieuses brésiliennes qui ont dénoncé le trafic d’organes dès 2001.

21.M. Ewomsan souhaiterait également recevoir des informations complémentaires sur les conditions de vie des réfugiés, venus principalement de la République démocratique du Congo et du Rwanda, dans les camps de Nampula et de Maratane, notamment savoir s’il y a des cas de retour volontaire de ces réfugiés dans leur pays.

22.M. Ewomsan souhaiterait en outre recevoir des informations complémentaires sur la politique de l’État partie en matière de naturalisation, laquelle semble particulièrement difficile à obtenir contrairement au statut de réfugié. Enfin, il voudrait savoir si l’État partie envisage de retirer sa réserve à l’article 22 de la Convention.

23.M. LINDGREN ALVES note que les accords de paix qui ont mis fin à des années de guerre civile au Mozambique ne datent que de 1992 et que le pays a depuis déployé des efforts incommensurables pour instaurer la démocratie et faire reculer l’extrême pauvreté. Il se félicite de la détermination des pouvoirs publics à promouvoir l’unité nationale depuis la fin de la guerre civile mais se demande pourquoi les autorités mozambicaines privilégient l’enseignement des langues locales plutôt que celui du portugais qui, en tant que langue nationale, contribue à renforcer l’unité du pays. Il ajoute que l’enseignement d’une seule langue permettrait de faire reculer l’analphabétisme dans les régions rurales et d’atténuer le phénomène de «tribalisme», qui sape la cohésion nationale.

24.M. PILLAI se félicite que le Mozambique soit resté un pays pluriethnique et multiracial en dépit des pressions que lui a imposées pendant longtemps le régime sud-africain d’apartheid. Notant que l’État partie compte 16 groupes ethniques, il demande quelles mesures spéciales l’État partie a prises conformément au paragraphe 2 de l’article 2 de la Convention pour assurer le développement ou la protection de ces groupes en vue de leur garantir le plein exercice des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il voudrait en particulier savoir si des programmes spécifiques ont été mis en œuvre pour réduire la pauvreté des groupes ethniques les plus vulnérables et si les différentes communautés connaissent le même rythme de développement. S’agissant de l’article 4 de la Convention, M. Pillai souhaite que la délégation réponde aux questions 8 et 9 de la liste des points à traiter adressée au Mozambique (CERD/C/MOZ/Q/14/CRP.1) et fournisse en particulier des renseignements précis sur les actes racistes et les propos incitant à la haine raciale qui ont été signalés dans certains secteurs. Par ailleurs, il se félicite de la création prochaine d’une institution nationale des droits de l’homme mais se demande quelles seront ses compétences. Il exhorte l’État partie à tenir dûment compte des Principes de Paris pour faire en sorte que cette institution puisse s’acquitter de sa mission de la façon la plus efficace et la plus indépendante possible. Enfin, il demande des informations sur la situation des femmes et des jeunes filles qui, d’après certaines sources d’information, varierait grandement d’un groupe ethnique à l’autre.

25.M. AVTONOMOV demande des informations sur les modalités de nomination du Médiateur (Provedor de Justiça) et sur le nombre de plaintes pour discrimination raciale dont il a été saisi. Lisant au paragraphe 95 du rapport que les étrangers peuvent acquérir la nationalité mozambicaine par naturalisation, à condition qu’ils aient leur résidence habituelle au Mozambique depuis au moins dix ans et qu’ils soient âgés d’au moins 18 ans, il voudrait savoir si ces conditions de résidence et d’âge s’appliquent à tous. Par exemple, les enfants dont les parents étrangers sont décédés au Mozambique doivent-ils attendre l’âge de 18 ans pour acquérir la nationalité? Par ailleurs, il demande à la délégation d’expliquer ce que signifie la distinction faite au tableau 21 du rapport entre les autorisations de travailler et les permis de travail. Enfin, il souhaite savoir si le Mozambique envisage de ratifier les amendements au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention.

26.M. VALENCIA RODRIGUEZ note que plusieurs textes législatifs sanctionnent la discrimination raciale au Mozambique mais qu’il n’existe aucune loi spécifique visant l’élimination de la discrimination raciale. Il voudrait savoir quels textes de loi peuvent être invoqués pour réprimer les actes de discrimination raciale. Il lit au paragraphe 49 qu’un certain nombre de mesures ont été prises dans le cadre du plan quinquennal 1995-1999 et voudrait savoir quels résultats ont été obtenus. Par ailleurs, il voudrait savoir quelle est la proportion de membres de minorités nationales travaillant dans l’administration publique.

27.M. Rodriguez relève au paragraphe 101 du rapport que, d’après l’État partie, les cas de discrimination raciale trouvent leur origine dans l’histoire coloniale et dans la persistance d’attitudes de soumission ou de supériorité raciale et engage donc le Mozambique à prendre des mesures pour surmonter les séquelles de l’histoire coloniale. Enfin, l’expert voudrait savoir si l’Académie des sciences de la police, mentionnée au paragraphe 119 du rapport, dispense à la police mozambicaine une formation sur les droits de l’homme en général et sur les dispositions de la Convention en particulier.

28.M. KJAERUM éprouve un grand respect pour le Mozambique car, malgré les importantes difficultés qu’il a rencontrées depuis la fin de la guerre civile, ce pays a su se transformer en un État démocratique et guérir peu à peu les blessures du passé. Le Comité ne peut que se réjouir de la reprise du dialogue avec cet État partie.

29.M. Kjaerum évoque en outre l’extrême vulnérabilité des nombreux enfants originaires du Zimbabwe qui sont arrivés en masse au Mozambique. Soulignant qu’en raison de leur situation irrégulière, ces enfants sont employés illégalement, qu’ils ont un accès limité à l’éducation et aux soins de santé et que les jeunes Zimbabwéennes sont souvent employées dans l’industrie du sexe, il demande à la délégation mozambicaine d’indiquer si des programmes spécifiques de protection ont été adoptés par les autorités mozambicaines pour venir en aide à ces enfants.

30.S’agissant du problème de la traite des êtres humains, M. Kjaerum note que l’État partie a ratifié en 2006 la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et le Protocole facultatif visant à prévenir, réprimer et punir le trafic des personnes, en particulier des femmes et des enfants, mais que les dispositions de ces deux instruments n’ont pas été incorporées dans le droit interne.

31.L’expert indique que plusieurs sources font état de 200 enlèvements d’enfants mozambicains chaque mois qui seraient vendus dans des pays étrangers et que, selon une enquête de l’Organisation internationale pour les migrations de 2005, de nombreuses Mozambicaines seraient vendues dans un district minier près de Johannesburg, en Afrique du Sud. M. Kjaerum souhaite savoir si le Gouvernement mozambicain a pris des mesures contre la traite des êtres humains et a entrepris de sensibiliser les forces de police à ce phénomène pour éviter que les policiers ne ferment les yeux sur ce trafic ou n’y participent.

32.Notant que le droit d’asile est garanti par la Constitution mozambicaine, M. Kjaerum se demande si le tableau 6 du rapport à l’examen ne fait pas une confusion entre les statistiques relatives aux demandeurs d’asile et celles relatives aux réfugiés puisque, par la force des choses, nul ne peut être à la fois demandeur d’asile et réfugié.

33.M. THORNBERRY demande à la délégation mozambicaine d’indiquer le nombre de personnes qui ont été condamnées pour avoir commis des «actes destinés à compromettre l’unité nationale, à perturber l’harmonie sociale ou à créer des divisions ou des situations de privilège ou de discrimination fondées sur la couleur, la race ou le sexe» (par. 35) et de préciser dans quels cas ces dispositions ont été appliquées. Il se félicite de l’introduction des langues locales dans les programmes des écoles primaires (par. 30) et recommande leur généralisation rapide.

34.M. TANG Chengyuan note que selon les tableaux du rapport périodique à l’examen, plus de 11 000 réfugiés seraient arrivés au Mozambique entre 1995 et 2004 mais que seuls 619 ont obtenu le statut de réfugié de 1995 à 2004 (tableau 7). Il demande à la délégation d’indiquer quelle était la nationalité des personnes qui ont obtenu le statut de réfugié au Mozambique et de fournir des informations sur le traitement dont bénéficient les demandeurs d’asile qui ne l’ont pas obtenu mais sont restés néanmoins dans le pays.

35.M. Tang Chengyuan souhaite également savoir quelle était la nationalité des 1 275 personnes qui ont été naturalisées entre 1975 et 2003 et de celles dont la demande de naturalisation a été rejetée.

36.Mme DAH dit que le Mozambique est un État emblématique pour les autres pays d’Afrique car ce pays a vécu quatre cent soixante‑dix‑sept ans de colonisation et connu trente ans de guerre de libération et de lutte contre les régimes racistes des pays voisins. De nombreux peuples africains s’interrogent encore sur le point de savoir comment un pays peut survivre à cinq siècles de colonisation. C’est pour cette raison qu’il convient de saluer le Mozambique et les efforts qu’il ne cesse de déployer pour retrouver son identité de nation et d’État africain.

37.Mme Dah regrette que la structure très déséquilibrée du rapport périodique du Mozambique rende sa compréhension impossible et que la seconde partie de celui-ci, qui traite de la mise en œuvre des articles 2 à 7 de la Convention, ne soit pas suffisamment développée. Bien que la délégation mozambicaine ait apporté des éclaircissements importants, il est regrettable que la liste des questions écrites du rapporteur pour le Mozambique, qui a été transmise aux autorités, soit restée sans réponse.

38.Mme Dah trouve intéressante la notion de justice de proximité exposée par la délégation mozambicaine et souhaite savoir si ce type de justice est régi par une loi spécifique qui en prévoit l’application automatique ou si elle est facultative. Elle se félicite de l’introduction du projet pilote visant à enseigner les langues locales dans les écoles primaires mozambicaines et souhaite que le prochain rapport périodique de l’État partie évalue les résultats obtenus dans ce cadre.

39.Mme Dah relève que le Gouvernement mozambicain accorde une haute priorité aux femmes et que de nombreuses mesures ont été prises pour veiller à ce qu’elles jouissent des mêmes possibilités et des mêmes droits que les hommes, pour élever leur niveau d’éducation et renforcer leur rôle d’éducatrices des générations futures. Elle souhaite cependant recevoir des informations concrètes sur le nombre de femmes qui occupent un emploi au Ministère de la justice, qui ont accédé à la magistrature et sont entrées dans les forces de police.

40.Elle demande à la délégation d’indiquer si le Gouvernement mozambicain a l’intention de ratifier l’amendement à l’article 8 de la Convention, de faire la déclaration prévue à l’article 14 de cet instrument et de retirer sa réserve à l’article 22.

41.M. AMIR se félicite que la délégation mozambicaine soit dirigée par la Ministre de la justice et estime que cela atteste de l’importance accordée par le Mozambique tant à la Convention qu’au Comité qui est chargé de veiller à son application.

42.M. Amir rappelle que le Mozambique est un État d’Afrique sub-saharienne dont le PNB par habitant ne permet pas de répondre à toutes les exigences relatives aux droits de l’homme. Le Mozambique fait son possible pour éliminer la pauvreté, améliorer sa croissance et accroître sa capacité de production mais n’a pas encore atteint le stade de développement qui lui permettrait de s’acquitter de toutes ses obligations découlant de la Convention. Malgré cela, le Mozambique est le pays africain qui souffre le moins de la fuite des cerveaux alors qu’il est sorti exsangue de la guerre civile. C’est un pays qui a choisi un modèle de développement par la base dans lequel la cohésion socioéconomique des collectivités locales est le moteur du développement du pays tout entier.

43.L’orateur rappelle que, contrairement à l’Europe, l’Afrique n’a pas bénéficié d’un plan Marshall et qu’il faut d’abord sortir les pays africains de la stagnation économique et de la misère avant de leur demander de respecter leurs engagements relatifs aux droits de l’homme. Il regrette que la question de la discrimination raciale ne soit jamais traitée en relation avec celle du sous-développement, estimant que les problèmes de discrimination rencontrés par les pays en développement ne seront réglés que lorsque ces derniers pourront subvenir aux besoins de leur population.

44.M. YUTZIS, constatant que, d’après les statistiques de la répartition des langues fournies dans le tableau 5 du rapport, les femmes sont généralement plus nombreuses que les hommes à parler les langues locales, demande pourquoi l’écart entre les sexes est particulièrement important parmi les locuteurs du xinchangana. Il fait en outre observer que, dans les pays qui ont connu la colonisation, la maîtrise de la langue des anciens colons joue un rôle crucial dans l’amélioration de la situation économique et sociale des individus. Compte tenu du fait que 20 % des hommes et 12 % des femmes seulement parlent le portugais dans l’État partie, M. Yutzis se demande si le Gouvernement mozambicain ne pourrait pas faire davantage d’efforts pour promouvoir l’enseignement de cette langue.

45.Enfin, se référant aux paragraphes 84 et 95 du rapport, l’expert prie la délégation d’expliquer pourquoi les étrangers qui résident au Mozambique de manière temporaire ou permanente n’ont ni droits politiques, ni certains autres droits que la loi réserve expressément aux citoyens mozambicains et pourquoi l’une des conditions que les candidats à la naturalisation doivent remplir est la capacité juridique.

46.Le PRÉSIDENT, s’exprimant en sa qualité de membre du Comité, note avec satisfaction que les 16 groupes ethniques et les 732 communautés religieuses que compte l’État partie coexistent en bonne intelligence. Il prie la délégation de donner de plus amples renseignements sur les rapports entre ces minorités et d’indiquer en quoi consisteront les réformes évoquées au paragraphe 113 du rapport tendant à mettre la législation pénale en conformité avec l’article 4 de la Convention.

47.M. LINDGREN ALVES souhaiterait savoir si, parmi les 16 minorités ethniques, un groupe peut être qualifié de dominant et si l’une de ces minorités est particulièrement vulnérable.

La séance est suspendue à 17 h 45; elle est reprise à 17 h 50.

QUESTIONS D’ORGANISATION ET QUESTIONS DIVERSES (point 2 de l’ordre du jour) (suite)

48.Le PRÉSIDENT rend compte brièvement aux membres du Comité d’une réunion tenue la veille par le Bureau, qui a porté essentiellement sur trois points. Premièrement, le Bureau a examiné la possibilité de créer un groupe de travail à composition non limitée qui serait chargé d’étudier la question de l’amélioration et de l’harmonisation des méthodes de travail du Comité, afin de donner suite aux recommandations formulées à l’issue de la sixième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et de la dix-neuvième réunion des présidents des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, tenues toutes deux en juin 2007.

49.Deuxièmement, le Bureau a passé en revue les thèmes sur lesquels le Comité pourrait organiser un débat général, en vue d’élaborer éventuellement une recommandation générale à la suite de ce débat. Les trois sujets qui ont été retenus comme étant particulièrement importants sont: les mesures spéciales visées au paragraphe 4 de l’article premier de la Convention, les minorités et les liens entre race et religion. Le Bureau estime que la question des mesures spéciales devrait être considérée comme prioritaire, l’examen récent du rapport de la délégation néo‑zélandaise ayant montré une fois de plus que les États parties ne comprennent pas clairement la position du Comité à cet égard et qu’un texte de doctrine sur cette question serait le bienvenu.

50.Enfin, le Bureau a dressé une liste non exhaustive de sujets qui pourraient être abordés lors de la réunion avec les États parties, le 14 août 2007, à savoir: l’amélioration et l’harmonisation des méthodes de travail, le suivi des observations finales, le suivi des décisions relatives aux communications individuelles au titre de l’article 14 de la Convention, la réforme des organes de suivi des traités, la collaboration avec le Conseil des droits de l’homme et l’examen périodique universel.

51.M. AMIR fait observer que, s’il décidait d’organiser un débat général sur la question des liens entre race et religion, le Comité devra se préparer de manière approfondie et recueillir l’avis d’experts spécialisés dans ce domaine car ce sujet est extrêmement sensible.

52.Mme PROUVEZ (Secrétaire du Comité) dit, en réponse à une demande de M. Lindgren Alves, que le secrétariat distribuera aux membres du Comité le rapport sur les méthodes de travail des organes conventionnels relatives au processus de présentation de rapports par les États parties (HRI/MC/2007/4), afin qu’ils puissent comparer leur pratique avec celle de leurs homologues et formuler en connaissance de cause des propositions sur l’harmonisation des méthodes de travail.

53.M. SICILIANOS signale que le rapport en question est passablement long et d’une lecture difficile. Il suggère donc que le secrétariat élabore un tableau comparatif de la pratique de sept comités, qui pourrait être distribué aux membres du Comité lors de la soixante‑douzième session. S’agissant du thème à retenir pour le débat général, M. Sicilianos pense comme le Bureau que la priorité devrait être accordée à la question des mesures spéciales.

54.Le PRÉSIDENT invite les membres du Comité à poursuivre la discussion à une séance ultérieure.

La séance est levée à 18 h 5.

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