NATIONS

UNIES

CERD

Convention internationale

sur l'élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/SR.143225 septembre 2000

Original : FRANÇAIS

COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Cinquante-septième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1432ème SÉANCE

tenue au Palais des Nations, à Genève,le mardi 22 août 2000, à 15 heures

Président : M. SHERIFIS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Douzième à quinzième rapports périodiques du Ghana

Projet de conclusions du Comité concernant les treizième à quinzième rapports périodiques du Saint-Siège

_______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

La séance est ouverte à 15 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENT PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Douzième à quinzième rapports périodiques du Ghana (CERD/C/338/Add.5)

1.Sur l'invitation du Président, M. Yaw Adjei, M. Nwaneampeh, Mme Amma Twum‑Amaoah et M. Tsakpoe prennent place à la table du Comité.

2.M. YAW ADJEI (Ghana) souligne que depuis l'examen du dernier rapport périodique soumis par le Ghana, d'importants changements politiques et institutionnels sont intervenus dans le pays et y ont renforcé la démocratie, donc l'application des principes consacrés par la Convention. En effet, en 1992, un nouveau parlement et un nouveau président ont été élus au suffrage universel conformément à la nouvelle Constitution, promulguée la même année, mettant ainsi fin à plus de 10 ans de régime militaire. Le Ghana a été un des premiers États à ratifier la Convention, dont les dispositions sont incorporées dans sa législation interne, et a activement contribué à la lutte contre l'apartheid.

3.Selon les résultats provisoires du recensement effectué en juillet 2000, le nombre d'habitants serait passé de 12 296 081 en 1984 à 18 412 247, se décomposant en 9 025 069 hommes et 9 387 278 femmes, le taux d'accroissement actuel de la population étant estimé à 2,5 %. Des informations détaillées sur la structure de la population seront communiquées au Comité ultérieurement, lorsqu'elles seront disponibles.

4.Le Ghana est un État multiculturel, multiethnique et multilingue, dont les principaux groupes sont les Akans, les Guans, les Moshis, les Dagbanis, les Ewes et les Ga‑Adamgbes. Les principales langues employées sont l'akan, l'ewe, le dagbani, le moshi, le ga, le hausa et l'anglais, qui est la langue officielle. Les principales religions représentées dans le pays sont le christianisme, l'islam ainsi que des religions traditionnelles.

5.M. Yaw Adjei tient à insister sur l'attitude d'ouverture du peuple ghanéen, qui contribue à l'harmonie de la société. Cette harmonie s'explique aussi en partie par les mesures législatives, judiciaires, administratives et autres prises par le Gouvernement pour promouvoir et garantir les libertés et les droits fondamentaux, en mettant notamment en œuvre les dispositions de la Convention, ainsi que par les efforts qu'il déploie pour inculquer à la population une culture de tolérance et de compréhension. Néanmoins, certaines régions du pays ont connu des conflits, dont le rapport fait mention.

6.La Constitution garantit les principes énoncés dans la Convention comme : l'égalité de tous les citoyens devant la loi, le droit à un procès équitable, à la vie, à la liberté individuelle, à la sûreté de la personne, le droit de participer à la vie politique, le droit à l'emploi, à la santé, à l'éducation. À ce propos de ces derniers droits, il convient de signaler la nette augmentation du nombre d'établissements scolaires, universitaires et d'enseignement professionnel, de même que d'établissements de soins de santé dans tout le pays.

7.Pour donner effet à ses engagements internationaux, entre autres ceux découlant de la Convention, le Gouvernement a mis en place des institutions et mécanismes tels que : la Commission de l'éducation civique, qui a pour mission d'éduquer la population en matière de libertés et de droits fondamentaux et de promouvoir l'unité, l'amitié et la tolérance entre les communautés, par le biais de publications, d'émissions de radio et de télévision, de séminaires; la Commission nationale des médias, chargée de promouvoir la liberté et l'indépendance des médias; la Commission des droits de l'homme et de la justice administrative, qui enquête sur les allégations de violation des libertés et des droits fondamentaux, de corruption, d'abus de pouvoir et de traitement discriminatoire, veille à ce que les plaignants aient des possibilités de recours et obtiennent réparation s'il y a lieu, et œuvre dans le domaine de l'éducation de la population aux droits de l'homme; la Commission nationale de la femme et du développement; la Commission nationale de l'enfance.

8.La discrimination raciale ne constitue pas un réel problème au Ghana, le Gouvernement s'employant à assurer l'harmonie entre les communautés. Les incidents à motivation raciale sont exceptionnels mais il convient de citer le conflit qui a opposé en 1993‑1995, dans le nord du Ghana, les Kokombas d'une part, aux Gonjas, Dagombas et Namumbas; ce conflit, qui avait trait aux droits fonciers et à des problèmes de chefferie, a été résolu grâce à l'intervention d'une équipe de négociation, la Permanent Peace Negociating Team, nommée par le Gouvernement. Cette équipe a en outre contribué à ramener la paix lors de conflits entre musulmans, ainsi qu'entre chrétiens et musulmans.

9.Mme McDOUGALL (Rapporteuse pour le Ghana) regrette, vu la grande hétérogénéité de la population du Ghana, l'absence de renseignements précis sur les effectifs des principaux groupes ethniques, parmi lesquels il faut également compter des immigrés d'Afrique occidentale d'origines ethniques diverses. Le manque d'information sur la structure démographique de la population ghanéenne, déjà signalé par le Comité dans le passé, est tout aussi regrettable eu égard à l'utilité que présentent ces types d'information pour l'évaluation des progrès enregistrés aux niveaux civil, politique, social et économique, par les différents groupes de population, notamment les femmes.

10.Mme McDougall se félicite des divers organismes créés par l'État partie pour mettre en œuvre notamment les principes de la Convention, mais souhaiterait de plus amples informations sur leur fonctionnement. Elle prend note de la définition de la discrimination donnée dans l'article 17 de la Constitution ghanéenne.

11.En ce qui concerne l'application de l'article 2 de la Convention, force est de constater que le rapport ne contient pas suffisamment d'exemples concrets de l'application par le Gouvernement ghanéen de sa politique d'éradication de la discrimination raciale et de promotion de la tolérance entre tous les peuples du Ghana. À cet égard, Mme McDougall aimerait savoir quels lois et règlements visant à appliquer les dispositions de la Convention sont actuellement en vigueur au Ghana et notamment si la loi de 1957 intitulée "Avoidance of Discrimination Act", mentionnée dans le précédent rapport et au sujet de laquelle l'État partie devait fournir de plus amples informations, reste en vigueur. Il serait utile que l'État partie communique au Comité les textes des lois et règlements en question, comme la délégation s'y était engagée lors de l'examen du précédent rapport périodique du Ghana.

12.Mme McDougall salue les efforts déployés par le Gouvernement pour apaiser les conflits interethniques survenus dans le nord du pays, en particulier la création de l'équipe qui a négocié plusieurs accords de paix, tout en constatant que ces efforts n'ont guère été couronnés de succès puisque ces conflits persistent et que d'autres se produisent régulièrement dans le pays. Elle aimerait savoir si le Gouvernement a pris des mesures pour assurer développement égal et protection à tous les groupes raciaux ou ethniques vivant au Ghana ainsi que pour régler la question des droits fonciers, à l'origine de nombreux conflits.

13.Il faudrait que la délégation indique si le Ghana s'est doté de textes législatifs érigeant en infraction et réprimant la diffusion d'idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale ainsi que l'incitation à la discrimination raciale, et interdisant les organisations incitant à la discrimination raciale et toute propagande dans ce sens, comme cela est requis par l'article 4 b) de la Convention. Pourquoi le rapport à l'examen ne mentionne-t-il pas la loi de 1984 relative aux organisations interdites ? Cette loi est-elle toujours en vigueur ? Dans l'affirmative, a-t-elle été remise à jour depuis l'approbation de la nouvelle Constitution ghanéenne en 1992 ?

14.En ce qui concerne l'article 5, il faut regretter que le rapport n'expose pas la teneur des dispositions législatives garantissant l'exercice des droits économiques, sociaux et culturels mentionnés au paragraphe 26 et n'évoque pas davantage les problèmes rencontrés dans la mise en œuvre desdites dispositions. En effet, certains groupes ethniques, comme les Ashantis, ne sont pas équitablement représentés au Gouvernement et les Kokombas, de même que d'autres groupes ne suivant pas le système des chefferies, ne sont pas du tout représentés dans les assemblées locales. Il serait intéressant de savoir comment le Gouvernement ghanéen entend concilier les structures de gouvernement modernes avec le système traditionnel des chefferies. Il serait également utile de connaître les mesures que prennent les autorités pour permettre à des représentants des différents groupes ethniques d'occuper des postes de responsabilité au sein de l'administration ainsi que d'avoir des données chiffrées concernant la composition ethnique du Gouvernement et de l'armée.

15.Mme McDougall souhaiterait en outre disposer du texte de la loi sur la protection des droits des femmes et des enfants de juin 1997, qui interdit notamment le mariage forcé des enfants et la pratique traditionnelle du trokosi (consistant à donner des fillettes en esclavage sexuel à des prêtres en expiation des fautes commises par leur famille). Quelle est l'efficacité de cette loi, combien de personnes ont-elles été poursuivies en vertu de ses dispositions et a-t-on pris des mesures en vue de réinsérer dans la société les fillettes victimes de cette pratique ?

16.Notant que le Ghana accueille un grand nombre de réfugiés, Mme McDougall s'enquiert de la politique actuelle du Gouvernement ghanéen concernant le rapatriement des réfugiés et demande en particulier si, comme certaines sources le donnent à penser, des réfugiés ont effectivement été rapatriés contre leur gré.

17.Le rapport est avare de renseignements sur la mise en œuvre de l'article 6 de la Convention, notamment sur les voies de recours devant les tribunaux dont disposent les victimes d'actes de discrimination raciale, et se borne à affirmer que les organes judiciaires et administratifs sont rarement saisis de plaintes concernant de tels actes. Mme McDougall note avec satisfaction que la Commission des droits de l'homme et de la justice administrative a aidé des particuliers à saisir la justice et à obtenir réparation contre des organismes publics et des sociétés privées. Sur les 8 775 plaintes que la Commission a examinées à la date d'août 1997, elle aimerait savoir combien visaient une discrimination au motif de la race, de l'appartenance ethnique ou de l'origine nationale. Un complément d'information sur le fonctionnement et les compétences de la Commission, le nombre d'affaires dont elle a été saisie et sur lesquelles elle a statué serait également utile au Comité.

18.Mme McDougall aimerait savoir quels ont été les résultats du programme pilote d'instruction civique portant sur la Constitution mis en œuvre dans trois districts au niveau de l'enseignement élémentaire et si ce programme prévoit une initiation aux droits de l'homme en général. Elle demande en outre si le Gouvernement ghanéen a recueilli des renseignements quant à l'efficacité des séminaires sur les droits de l'homme organisés à l'intention des membres des forces armées et de la police sur la période 1995‑1997 et si des programmes de sensibilisation aux droits de l'homme sont envisagés au bénéfice de ces personnels et des membres du corps judiciaire.

19. La délégation pourrait-elle indiquer si les médias ghanéens contribuent à la diffusion d'informations tendant à combattre les préjugés raciaux et à promouvoir la tolérance, préciser le statut de la Commission nationale des médias et dire si le Gouvernement a essayé d'évaluer l'efficacité de la Commission ou la façon dont le public juge l'action des médias en matière de promotion de la tolérance et de prévention de la discrimination raciale ?

20.Il est regrettable que le rapport à l'examen soit aussi dépourvu que le précédent de renseignements sur les succès et échecs de la lutte contre la discrimination raciale au Ghana et sur les faits nouveaux intervenus dans la pratique et dans le domaine législatif. Cette situation ne permet guère au Comité de se faire une idée précise de l'application de la Convention au Ghana et semble trahir une certaine réticence à reconnaître l'existence de problèmes ethniques pourtant bien réels, tels que les conflits opposant plusieurs groupes ethniques dans le nord du pays - que le Ghana semble vouloir réduire à des problèmes liés à des droits fonciers. L'affirmation selon laquelle les cas de discrimination raciale sont rares n'est pas crédible et paraît traduire le refus du Gouvernement de se pencher sérieusement sur le problème.

21.Le Gouvernement ghanéen parvient apparemment assez bien à administrer une population extrêmement diverse en préservant la tolérance et l'harmonie ethniques, ce qui est positif. Cependant, il lui reste encore beaucoup à faire pour s'acquitter pleinement de ses obligations découlant de la Convention. Il devrait s'attacher à soumettre au Comité des rapports périodiques plus détaillés et complets et se montrer plus disposé à lui exposer avec davantage de franchise les problèmes de la société ghanéenne relevant de la compétence du Comité.

22.M. BRYDE note avec satisfaction que les Ghanéens sont parvenus à créer une identité nationale au service du développement de leur pays, tout en préservant leur diversité ethnique et culturelle. Il aimerait savoir si les problèmes liés aux tensions ethniques signalés au paragraphe 17 du rapport ont été réglés ou s'il s'agit des mêmes que ceux mentionnés par Mme McDougall et si la Commission mentionnée au paragraphe 17 du rapport et l'équipe permanente de négociation pour la paix dont a parlé Mme McDougall sont un seul et même organe.

23.Enfin, il serait utile au Comité de savoir comment le dispositif interdisant les partis politiques à base ethnique fonctionne dans la pratique, à quelle loi il est soumis et comment il est organisé.

24.M. de GOUTTES constate que le rapport contient peu d'éléments de nature à permettre au Comité de se faire une idée précise de l'application concrète de la Convention au Ghana. Le complément d'information fourni oralement par la délégation ne comble pas ces carences, en particulier l'absence de renseignements précis : sur la composition ethnique de la population du Ghana, d'autant plus intéressants que les conflits ethniques sont au cœur de la lutte pour le pouvoir dans le pays; sur la représentation des groupes ethniques dans l'administration et les institutions publiques; sur l'évolution des indicateurs socioéconomiques, pourtant indispensables pour identifier les groupes particulièrement susceptibles d'être exposés à l'exclusion, à la pauvreté et éventuellement à la discrimination.

25.Le Comité aurait également besoin d'informations supplémentaires sur le contenu de la législation pénale du Ghana, afin d'être en mesure de déterminer si ce pays met pleinement en œuvre les dispositions de l'article 4 de la Convention; tel ne semble du reste pas être le cas puisque, selon le rapport, seuls les voies de fait et le génocide sont sanctionnés par le Code pénal comme des infractions susceptibles d'être motivées par des considérations raciales. Les informations font également défaut sur les décisions adoptées par les tribunaux dans les rares affaires de discrimination raciale dont ils ont été saisis.

26.Il serait tout aussi utile au Comité de disposer d'informations supplémentaires sur la Commission des droits de l'homme et de la justice administrative instituée pour enquêter sur les allégations faisant état de violations des libertés et droits fondamentaux commis par les fonctionnaires dans l'exercice de leurs fonctions. La délégation peut‑elle présenter un bilan de l'action de la Commission et fournir au Comité des précisions sur sa composition et le mode de nomination de ses membres ? S'agit-il d'un organe indépendant ? Le Comité aurait également besoin de savoir si la Commission destinée à servir de tribune aux groupes ethniques reconnus a joué un rôle et obtenu des résultats s'agissant du règlement du conflit ethnique et religieux dans le nord du pays.

27.Enfin, étant donné l'afflux massif de réfugiés en provenance du Libéria, de Sierra Leone et du Togo, M. de Gouttes note avec satisfaction que le Ghana a adhéré à la Convention relative au statut des réfugiés et au Protocole s'y rapportant et demande si l'État partie envisage d'adhérer à la Convention relative au statut des apatrides et à la Convention sur la réduction des cas d'apatridie, dans le souci d'améliorer la situation des réfugiés au Ghana.

28.Mme ZOU prend note avec intérêt des informations supplémentaires fournies par la délégation mais fait observer que le Gouvernement ghanéen ne semble pas accorder toute l'attention voulue aux conflits entre les nombreux groupes ethniques du pays puisqu'il n'en a mentionné qu'un, opposant les Kolkhozes à trois autres ethnies. Des renseignements plus précis sur le nombre des personnes tuées au cours de ce conflit seraient souhaitables, de même que des éclaircissements sur les renseignements figurant au paragraphe 5 du rapport, des précisions sur la composition ethnique de la population et des renseignements sur les principaux groupes ethniques ainsi que sur les conflits les opposant et les mesures prises par le Gouvernement en vue de les régler.

29.Au vu du rapport, les dispositions pénales prévues pour combattre la discrimination raciale ne visent que les actes de génocide et sont donc très en deçà des exigences de l'article 4 de la Convention. En outre, l'affirmation selon laquelle les cas de discrimination raciale sont très rares au Ghana est contredite par diverses sources signalant de nombreux conflits ethniques dans le pays. Il est possible que les victimes d'actes de discrimination raciale ne portent pas plainte par manque d'information sur les recours judiciaires disponibles. Mme Zou souhaite que des informations supplémentaires sur ces points figurent dans le prochain rapport périodique du Ghana.

30.M. BANTON constate que des informations émanant de diverses sources donnent à penser que contrairement aux affirmations de la délégation ghanéenne les conflits intra-ethniques ont parfois des répercussions interethniques. Il est possible que, sans se désintéresser des problèmes ethniques, le Gouvernement ghanéen ne tienne pas suffisamment compte de ce risque. Le potentiel de conflits n'est pourtant pas à négliger sachant qu'il existe une certaine hiérarchie tacite entre les groupes ethniques.

31.Dans le domaine de la santé, les musulmans seraient fréquemment victimes de pratiques discriminatoires fondées sur l'identité religieuse et la nationalité; si tel est le cas, il faudrait que les autorités y remédient.

32.M. VALENCIA RODRIGUEZ demande s'il y a eu des cas de saisine de la Haute Cour pour violation d'une disposition constitutionnelle. Les dispositions de la Convention ont-elles été invoquées devant la Haute Cour, la cour d'appel ou la Cour suprême et la Convention est-elle directement applicable par les tribunaux ghanéens ?

33.Tout en se félicitant de la création de la Commission des droits de l'homme et de la justice administrative, M. Valencia Rodriguez demande à la délégation de préciser si cet organe a été saisi de plaintes pour des violations des dispositions constitutionnelles et d'indiquer les résultats auxquels cette Commission est parvenue. La délégation peut-elle également préciser le mode de composition de la Commission destinée à servir de tribune aux groupes ethniques reconnus ainsi que les résultats obtenus par cette instance ? A-t-elle notamment permis de rétablir un climat de compréhension entre les tribus qui vivent dans le pays ? Le rapport étant en outre peu prolixe quant aux "rares cas de discrimination raciale" qu'ont eu à connaître les tribunaux, la délégation peut-elle indiquer au Comité quels ont été ces cas et s'ils ont donné lieu au versement de dommages et intérêts ?

34.Notant que le Ghana a adopté en 1993 une loi portant modification du Code pénal qui traite spécifiquement des infractions susceptibles d'être motivées par des considérations raciales, M. Valencia Rodriguez souligne que l'article 4 de la Convention va beaucoup plus loin en ce qu'il recouvre l'obligation de sanctionner la diffusion d'idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale, l'incitation à la discrimination raciale ainsi que la propagande raciale. Le Ghana devrait donc modifier sa législation en ce sens. La délégation peut-elle en outre indiquer quelles mesures ont été prises par les autorités ghanéennes afin d'assurer le respect des droits économiques, sociaux et culturels ?

35.Comment la population a-t-elle réagi aux initiatives prises par la Commission des droits de l'homme et de la justice administrative, et plus particulièrement à l'organisation de séminaires et d'ateliers destinés à informer les citoyens de leurs droits ainsi que de l'existence d'institutions auxquelles ils peuvent s'adresser en cas de violation de leurs droits individuels ?

36.M. YAW ADJEI (Ghana) indique que sa délégation, composée exclusivement de membres de la Mission permanente du Ghana à Genève, n'est malheureusement pas en mesure de répondre aux questions extrêmement précises et détaillées posées par les membres du Comité mais que ces questions seront transmises aux autorités, dont les réponses figureront dans le prochain rapport périodique.

37.Sur le fond, le Ghana a effectivement connu des conflits ethniques malgré le fort sentiment d'appartenance nationale régnant dans le pays. La population ghanéenne ne considère pas ces problèmes comme majeurs. Pour ce qui est des Kokombas, il s'agit de tribus venues du Togo qui se sont installées dans le nord du Ghana; la population locale a mal réagi quand ils ont décidé d'établir leur propre chefferie. Les pouvoirs publics ont pris un certain nombre de mesures afin de restaurer le calme et la paix et la recherche de solutions à long terme s'impose pour éviter que les erreurs du passé ne se répètent.

38.Le système trokosi est un sujet de préoccupation et une loi a été adoptée afin d'assurer la réinsertion sociale des fillettes ayant été placées dans le cadre de ce système sous l'autorité de prêtres fétichistes en tant qu'esclaves sexuelles. Il a été progressivement mis un terme à cette pratique et les fillettes ont rejoint leur famille. Elles ne sont nullement bannies de la société et bénéficient du reste de programmes de formation professionnelle. Vu que cette pratique était traditionnellement acceptée et reconnue, les prêtres n'ont toutefois pas été inquiétés. La délégation ghanéenne n'est pas actuellement en mesure de dire si des poursuites judiciaires ont été ouvertes en application de cette loi depuis son entrée en vigueur.

39.La Commission des droits de l'homme et de la justice administrative a eu à connaître de plusieurs cas de discrimination et les décisions qu'elle a rendues ont été très bien reçues par l'opinion publique qui, d'ailleurs, a manifesté son soutien à cette instance.

40.Mme McDOUGALL constate que le Ghana, qui compte une cinquantaine de groupes ethniques ou linguistiques différents, a échappé aux tensions ethniques exacerbées qui ont frappé tant d'autres pays comme le Rwanda ou la Bosnie-Herzégovine. Des enseignements peuvent à l'évidence être tirés de l'exemple du Ghana et il serait donc souhaitable que les autorités du pays songent à inclure dans leur prochain rapport périodique toutes les informations pertinentes sur la façon dont le Ghana a réussi à éviter les drames qu'ont connus des pays voisins. Quelles sont les politiques qui ont fonctionné en la matière et peuvent être source d'inspiration pour les pays voisins ?

41.Le Ghana connaît certes des conflits ethniques, dont l'origine est à rechercher aussi bien dans les rivalités pré-coloniales que dans l'inégal exercice des droits économiques et sociaux, mais ce pays se singularise par une certaine fluidité entre les divers groupes ethniques installés sur son sol ainsi que par une identité partagée, deux éléments qui devraient, s'ils étaient mieux analysés par les autorités, constituer une source d'enseignement pour de nombreux pays.

42.La délégation ghanéenne se retire.

Projet de conclusions du Comité concernant les treizième à quinzième rapports périodiques du Saint‑Siège (CERD/C/55/Misc.41/Rev.2, document distribué en séance, en anglais seulement)

43.M. VALENCIA RODRIGUEZ (Rapporteur pour le Saint-Siège) dit avoir rédigé le texte du projet de conclusions concernant les treizième à quinzième rapports périodiques du Saint‑Siège en tenant compte des observations formulées par les différents membres du Comité. Il apportera le cas échéant au cours de l'examen de chaque paragraphe les explications voulues.

44.Les paragraphes 1 et 2 sont adoptés.

Paragraphe 3

45.M. ABOUL‑NASR ne pense pas que la structure "unique" de l'État partie empêche la mise en œuvre de la Convention et propose donc de supprimer le titre B (Facteurs et difficultés empêchant la mise en œuvre de la Convention) et de placer le paragraphe 3 dans la section A (Introduction).

46.M. de GOUTTES serait même favorable à la suppression pure et simple du paragraphe 3 qui ne lui semble pas indispensable.

47.M. FALL croit quant à lui que la nature de l'État partie limite l'application de certains articles de la Convention. Le terme "unique" pourrait toutefois être supprimé.

48.M. VALENCIA RODRIGUEZ fait observer que la formulation du paragraphe 3 n'est pas catégorique puisqu'il y est dit seulement que la structure et la nature de l'État partie sont susceptibles de limiter l'application de la Convention.

49.Le PRÉSIDENT ne constate pas d'objection à la proposition de M. Aboul‑Nasr tendant à supprimer le titre B et à conserver le paragraphe 3 dans son intégralité à la section A.

50.Il en est ainsi décidé.

51.Le paragraphe 4 est adopté.

Paragraphe 5

52.M. RECHETOV se demande de quelles initiatives il est question dans ce paragraphe. Selon lui, il serait préférable de parler des "informations" diffusées par Radio‑Vatican et l'Osservatore Romano.

53.M. VALENCIA RODRIGUEZ renvoie les membres du Comité aux paragraphes 88 à 91 du rapport de l'État partie exposant les mesures prises par Radio‑Vatican et l'Osservatore Romano pour promouvoir les principes de la Convention. Il propose de reformuler le début du paragraphe 5 de la façon suivante : "Les informations diffusées par Radio‑Vatican et l'Osservatore Romano...".

54.Le paragraphe 5, ainsi révisé, est adopté.

Paragraphe 6

55.M. ABOUL‑NASR fait observer que l'État partie s'emploie à favoriser le dialogue non seulement entre les religions mais entre les tendances d'une même religion. Notant d'autre part que les Balkans et la région des Grands Lacs ne sont pas les seules régions où l'État partie essaie de promouvoir la paix, il propose de supprimer le membre de phrase : "in the Balkans and the region of the Great Lakes".

56.M. BOSSUYT fait valoir que les Balkans et la région des Grands Lacs sont des exemples cités dans le rapport de l'État partie et propose donc d'introduire après "conflicts" une expression du type "comme par exemple". Il propose également de supprimer le mot "more" à la première ligne dans la mesure où l'État partie joue déjà un rôle actif dans la prévention des conflits.

57.M. VALENCIA RODRIGUEZ donne lecture du texte du paragraphe 6, révisé compte tenu des différentes propositions des membres du Comité : "Le Comité encourage les efforts déployés par l'État partie pour continuer de jouer un rôle actif afin de promouvoir la prévention et le règlement des conflits ainsi que le dialogue inter et intrareligieux. Il note en particulier les initiatives positives prises par l'État partie pour promouvoir la paix et mettre un terme aux conflits ethniques. L'État partie est encouragé à poursuivre ses initiatives à cet égard".

58.Le paragraphe 6, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 7

59.M. ABOUL-NASR ne pense pas qu'il soit adapté de mentionner le droit des Roms à un espace vital, d'autant plus qu'ils ne revendiquent pas particulièrement ce droit; il propose donc de supprimer le dernier membre de phrase du paragraphe : "particularly their right to a living space".

60.M. RECHETOV signale qu'il n'est pas précisé par qui sont entrepris les efforts visant à promouvoir les droits des Roms.

61.M. VALENCIA RODRIGUEZ propose de modifier la dernière phrase du paragraphe 7 de façon à ce qu'elle se lise : "À cet égard, le Comité note les efforts entrepris par l'État partie pour promouvoir les droits des populations roms".

62.Le paragraphe 7, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 8

63.M. BOSSUYT dit que l'ouverture des écoles catholiques aux enfants d'autres religions n'est pas chose nouvelle et propose donc de supprimer le membre de phrase "the recent initiatives which, inter alia, allows for". Il propose en outre de remplacer dans la phrase suivante "are often" par "may be".

64.M. ABOUL-NASR suggère quant à lui de remplacer "the only place" par "a place".

65.M. BRYDE, faisant observer que les deux dernières propositions ont le même objet, propose de dire : "catholic schools are a place where...".

66.Le paragraphe 8, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 9

67.Plusieurs membres du Comité faisant observer que les recommandations formulées par le Comité dans les paragraphes 9 à 12 ne sont pas toutes appropriées et ne tiennent pas compte de la spécificité de l'État partie, il est convenu que M. Valencia Rodriguez revoie, en consultation avec M. Bryde, le texte de ces paragraphes compte tenu des suggestions et observations des membres du Comité.

68.L'adoption des paragraphes 9 à 12 est reportée.

69.Le paragraphe 13 est adopté.

70.Le paragraphe 14 est adopté avec une modification d'ordre rédactionnel.

La séance est levée à 18 heures.

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