NATIONS

UNIES

CERD

Convention internationale

sur l'élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.

GÉNÉRALE

CERD/C/SR.1468

12 septembre 2001

Original: FRANÇAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Cinquante-neuvième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1468e SÉANCE

tenue au Palais des Nations, à Genève,

le mardi 31 juillet 2001, à 15 heures

Président: M. SHERIFIS

Puis: M. FALL

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉSPAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Huitième et neuvième rapports périodiques de la Chine

______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l’une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d’édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

GE.01-43877 (F) 030801 120901

La séance est ouverte à 15 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (point 5 de l'ordre du jour) (suite)

Huitième et neuvième rapports périodiques de la Chine (CERD/C/357/Add.4 (Part. I à III); HRI/CORE/1/Add.21/Rev.1)

1. Sur l’invitation du Président, M. Qiao Zonghuai, M. Stephen Wong et M. Jorge Oliveria prennent place à la table du Comité.

2.M. QIAO ZONGHUAI (Chine) dit que le rapport à l’examen, qui a été préparé en collaboration avec les administrations gouvernementales pertinentes et des organisations non gouvernementales (ONG), conformément aux principes directeurs concernant la forme et la teneur des rapports présentés par les États parties, porte sur la période de 1996 à 1999 et apporte notamment des réponses aux questions soulevées par le Comité au cours de l’examen du rapport précédent de son pays.

3.Promouvoir l’égalité, l’unité, l’assistance mutuelle et la prospérité commune entre tous les groupes ethniques est un principe de base appliqué par le Gouvernement chinois pour gérer les relations entre communautés ethniques. Ce principe est consacré dans la Constitution de la République populaire de Chine. Dans ce domaine, la loi sur l’autonomie des régions habitées par des minorités nationales, adoptée en 1984, protège les droits et les intérêts des minorités ethniques. Depuis son entrée en vigueur, sont intervenus d’importants changements d’ordre politique et économique qui ont notamment abouti, en février 2001, à sa révision. Au texte original, qui définit le statut juridique du système d’autonomie régionale comme l’un des systèmes politiques de base de la Chine, ont été apportées de nouvelles dispositions concernant les investissements, les systèmes de financement, bancaire et fiscal, les échanges commerciaux extérieurs et l’utilisation des capitaux étrangers, applicables aux régions autonomes. Le Conseil des affaires d’État et les services gouvernementaux pertinents élaborent des réglementations et des méthodes en vue d’assurer l’application de la loi sur l’autonomie. Les administrations compétentes des régions concernées élaborent ou modifient leur propre réglementation en la matière, conformément à la loi révisée qui constitue un événement important dans la vie politique des minorités ethniques, ainsi qu’une amélioration du système juridique relatif aux minorités et du système d’autonomie régionale.

4.Au cours des cinq dernières années, la Chine a mis en œuvre son neuvième Plan quinquennal pour le développement économique et social. Grâce aux efforts conjoints de toutes les communautés ethniques, les cinq régions autonomes et les trois provinces de Yunnan, Guizhou et Qinghai, qui comptent une forte concentration de communautés ethniques, ont progressé à tous points de vue. Le produit intérieur brut de ces régions a augmenté de 50,9 % par rapport à 1993, ce qui représente 0,3 point de pourcentage de plus que la moyenne nationale. Sur le plan agricole, leur capacité de production a augmenté régulièrement. Les entreprises communales et villageoises de ces régions ont connu un essor important. De 1994 à 1999, le Gouvernement central y a investi des sommes équivalant à 38,4 % des investissements consacrés à des programmes similaires sur le plan national, permettant ainsi à 30 millions de personnes de passer de l’état de pauvreté absolu à un niveau de subsistance. L’augmentation du niveau de vie concerne les zones tant rurales qu’urbaines.

5.En outre, l’accent a été mis sur une stratégie de développement fondée sur les sciences et les technologies et sur la réorganisation des structures de l’enseignement. Des efforts importants ont été faits en ce qui concerne le programme d’enseignement obligatoire et le taux de fréquentation des établissements d’enseignement supérieur, qui a augmenté de 83,9 %, de 1995 à 1999. En dépit de ces avancées et de l’appui du Gouvernement central, les régions habitées par des minorités ethniques, situées dans la partie occidentale du pays demeurent moins développées que les régions orientales et côtières. Pour remédier à cette situation, la neuvième Assemblée populaire nationale a adopté un programme de développement généralisé de ces régions en vue d’accélérer le processus de développement économique et social, décision stratégique qui a été accueillie favorablement par les communautés ethniques. Une attention particulière sera également accordée aux réalités environnementales et culturelles de ces régions et les moyens humains, matériels et financiers mis en œuvre seront accrus à cette fin.

6.En vertu de la Loi fondamentale de la Région administrative spéciale de Macao et de celle de la Région administrative spéciale de Hong Kong, le Gouvernement chinois est responsable des affaires étrangères de ces deux régions et, par conséquent, de la mise en œuvre des instruments internationaux sur leur territoire. Le système juridique, économique et social de ces régions est différent de celui de la Chine continentale, car elles disposent d’un pouvoir exécutif, législatif, ainsi que d’un pouvoir judiciaire indépendant. En conséquence la mise en œuvre de la Convention dans ces régions est assurée par leurs gouvernements respectifs.

7.M. WONG (Chine: Région administrative spéciale de Hong Kong), en réponse au paragraphe 20 des conclusions formulées par le Comité en 1997, dans lesquelles celui‑ci a jugé préoccupante l’absence, dans la Bill of Rights Ordinance (ordonnance relative à la Déclaration des droits) de Hong Kong, de dispositions protégeant les personnes de la discrimination raciale, dont elles peuvent faire l’objet de la part de particuliers, de groupes ou d’organisations, dit que le résultat des consultations tenues en 1997 fait apparaître que la population n’est pas favorable à l’adoption de telles dispositions et qu’une législation de cet ordre n’aurait donc aucun effet. En outre, s’il fallait envisager d’adopter de nouvelles dispositions, celles‑ci devraient prendre la forme d’une loi spécifique élaborée selon les mêmes principes que les ordonnances en vigueur dans le domaine de la lutte contre la discrimination, plutôt que comme une extension des dispositions de la Bill of Rights. Cela étant, compte tenu de l’intérêt croissant de la population pour ces questions et de l’importance que revêt l’année 2001 au regard des questions raciales, les consultations engagées avec les personnes susceptibles d’être directement concernées par l’adoption d’une loi dans ce domaine devraient aboutir à des décisions.

8.S’agissant de la question des anciens réfugiés et migrants vietnamiens, M. Oliveria précise que le dernier centre d’accueil a été fermé sans incidents en 2000 après qu’il a été décidé de permettre l’intégration de ses résidents dans la société de Hong Kong. Quatre‑vingt‑seize pour cent des quelque 1 400 personnes concernées ont accepté de s’installer à Hong Kong, les 4 % restants ayant refusé cette possibilité afin de s’installer ailleurs. Tous vivent librement à Hong Kong et peuvent, en toute liberté, rechercher un emploi et inscrire leurs enfants dans les écoles locales. Il en va de même pour les 350 ex‑Vietnamiens de Chine, dont le retour en Chine continentale dépend de la décision de la cour d’appel compétente, qui reçoivent un appui sur le plan juridique dans le cadre de la procédure d’appel engagée. Le nombre de ceux dont le retour au Viet Nam a été différé pour des raisons de santé, d’emprisonnement ou de procédure judiciaire est passé de 132 à 108. Hormis ceux qui purgent une peine d’emprisonnement, ils sont tous libres de leurs mouvements à Hong Kong. L’organisation caritative Caritas Hong Kong fournit une aide à ceux qui sont dans le besoin. Les camps et les centres de réfugiés sont donc de l’histoire ancienne.

9.M. OLIVERIA (Chine: Région administrative spéciale de Macao) dit que le rapport à l’examen est le premier à être présenté au Comité sur l’application à Macao de la Convention. De par sa situation, le port de Macao a accueilli des milliers de réfugiés tout au long de son histoire et est par conséquent particulièrement concerné par les questions dont traite le Comité. Le Gouvernement de Macao s’est engagé à mettre sa législation interne en conformité avec les dispositions de la Convention. À cet effet, l’article 25 de la Loi fondamentale de la Région administrative spéciale stipule l’égalité de tous devant la loi et l’égalité de traitement sans discrimination, ce principe qui est également énoncé dans plusieurs textes législatifs de Macao (par. 12 à 27 du rapport). Le principe de non‑discrimination raciale est largement respecté en raison de la diversité des cultures, des races, des convictions religieuses et des langues, qui constitue un des atouts de la Région administrative de Macao.

10.M. VALENCIA RODRIGUEZ (Rapporteur pour la Chine) dit que ce pays est un État multinational dont la population représente le cinquième de la population mondiale. L’ethnie han y est majoritaire et les groupes ethniques minoritaires représentent environ 8 % de la population totale.

11.M. Valencia Rodriguez note que les dispositions de la Convention sont intégrées dans le droit interne chinois et y sont supérieures à celui‑ci. Il souhaite que la Chine retire sa réserve concernant l’article 22 de la Convention.

12.Le Gouvernement chinois a adopté pour les groupes minoritaires une politique de planification de la famille plus souple que pour les Hans. À ce propos, M. Valencia Rodriguez appelle l’attention sur la discrimination dont sont l’objet les nouveau‑nés de sexe féminin, qui a été signalée par le Comité des droits de l’enfant. À ce propos, il souhaite que la délégation de l’État partie indique au Comité quelles mesures sont prises contre les couples qui mettent au monde plus d’enfants que le nombre légal. Il fait observer à ce sujet que des plaintes ont été déposées pour traitements cruels et inhumains commis dans l’application de cette politique restrictive.

13.M. Valencia Rodriguez note par ailleurs que la Chine a pris des mesures visant à promouvoir l’autonomie régionale en vue d’améliorer les conditions de vie des groupes ethniques (par. 8 et suiv.). Il aimerait obtenir de plus amples informations sur les résultats concrets obtenus grâce à cette politique et savoir dans quelle mesure les zones autonomes peuvent gérer leurs propres ressources, compte tenu que les autorités locales dépendent économiquement du Gouvernement central et ne peuvent agir sans l’autorisation du Comité permanent de l’Assemblée populaire nationale.

14.M. Valencia Rodriguez prend note avec intérêt de l’existence de comités de villageois composés notamment de représentants des groupes ethniques minoritaires (par. 14). Il souhaiterait obtenir un complément d’information sur la façon dont ces représentants sont élus et sur les avantages concrets que les minorités tirent de ce système.

15.M. Valencia Rodriguez constate qu’il existe de nombreuses lois et réglementations interdisant la discrimination raciale et visant à promouvoir le développement économique, social et culturel des groupes ethniques (par. 16 à 19). Il souhaiterait que le Comité soit tenu informé de l’application de ces normes et des améliorations qu’elles permettent d’apporter au développement des régions centrales et occidentales de Chine, où sont installées de nombreuses communautés minoritaires.

16.Le rapporteur prend note du fait que la Commission d’État pour les affaires ethniques a à sa tête un représentant d’un groupe ethnique minoritaire (par. 20 et 21). Il lui paraît intéressant de savoir qui désigne cette personne et, dans l’éventualité où ce serait le Conseil des affaires d’État, si les groupes minoritaires peuvent présenter des candidats à ce poste. Il lui paraît intéressant, en outre, de connaître la façon dont cette commission remplit ses fonctions et les résultats qu’elle obtient. Deuxièmement, compte tenu des informations fournies sur la Conférence nationale de travail sur les affaires techniques qui s’est tenue à Beijing en septembre 1999, il lui paraît intéressant également d’avoir des indications sur la manière dont les mesures mentionnées au paragraphe 21 du rapport ont été mises en œuvre.

17.Concernant l’éducation, M. Valencia Rodriguez note que le rapport fait état de progrès dans ce domaine (par. 22 et 40). Il est conscient toutefois de l’inquiétude exprimée par le Comité des droits de l’enfant dans ses observations finales concernant les disparités qui existent dans le domaine de l’éducation entre les zones urbaines et rurales (CRC/C/15/Add.56, par. 11). Par ailleurs, selon diverses sources il y aurait également une inégalité dans ce domaine entre les groupes minoritaires et le groupe han majoritaire. Des efforts ont été faits dans le domaine de l’enseignement supérieur, notamment dans les régions habitées par les groupes minoritaires, et il conviendrait d’indiquer quels résultats ils ont permis d’obtenir.

18.En outre, sachant que d’importantes ressources financières consacrées à des projets d’aide aux régions habitées par des groupes minoritaires (par. 29 et suiv.), le rapporteur dit qu’il serait intéressant de disposer de statistiques permettant d’apprécier dans quelle mesure ces projets ont permis d’améliorer les conditions de vie des groupes minoritaires.

19.M. Valencia Rodriguez note avec satisfaction que des programmes de lutte contre la pauvreté ont été mis en place (par. 33 et 37), compte tenu de la gravité de la situation. Il s’inquiète en particulier de la condition des femmes qui, selon le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, compteraient plus de 100 millions d’analphabètes (document A/54/38). Il invite donc le Gouvernement chinois à tenir le Comité informé des progrès en la matière et en ce qui concerne les mesures visant à promouvoir le développement des cultures traditionnelles (par. 34).

20.S’agissant de l’application de l’article 4 de la Convention, M. Valencia Rodriguez note que le Code pénal chinois interdit la discrimination raciale et punit les responsables de la publication de documents discriminatoires ou diffamatoires à l’égard d’un groupe ethnique «si les faits sont flagrants et les conséquences graves» (par. 49), cette disposition qui signifie que l’application du Code pénal est subordonnée à l’appréciation du juge qui qualifie l’infraction. Il convient donc d’établir des critères plus objectifs d’application de la loi.

21.S’agissant de l’application de l’article 5, M. Valencia Rodriquez se félicite que l’État partie ait continué d’adopter, depuis 1996, des mesures spéciales tendant à protéger le droit des minorités nationales de participer à la conduite des affaires publiques et à assurer une meilleure représentation des minorités aux organes électifs. Il aimerait toutefois, que la délégation chinoise indique au Comité si le nombre de représentants des minorités qui, en 1998, représentait 5 % de la population du pays correspond, proportionnellement, à l’importance numérique des minorités nationales.

22.Selon deux rapports d’Amnesty International pour 2000 et 2001, de graves violations des droits de l’homme auraient été commises contre la population ouïgour et 24 de ses dirigeants politiques accusés de «séparatisme» et de «terrorisme» auraient été exécutés. L’organisation Freedom House prétend pour sa part que le Gouvernement exploite les ressources minérales de la région du Xingjiang, où vit cette minorité, et en modifie l’équilibre démographique en stimulant l’immigration de l’ethnie han. La délégation peut‑elle fournir des explications à ce sujet?

23.Le rapporteur se félicite par ailleurs de ce que le renforcement de la législation régissant l’autonomie des régions ethniques se soit poursuivi depuis 1996 (par. 67) grâce à la promulgation de lois appropriées, en espérant bien entendu, que cette politique ne comporte pas une forme occulte de discrimination raciale. En outre, plus de 10 000 écoles dispensent, dans toute la Chine, un enseignement bilingue en chinois et dans les langues d’autres minorités ethniques, soit dans plus de 60 langues (par. 69). À ce propos, il pense qu’il serait utile au Comité de connaître le pourcentage que représentent ces écoles par rapport aux autres établissements dans lesquels seul le chinois est enseigné. À cet égard, le Comité souhaitera peut‑être réitérer la recommandation qu’il avait formulée, en 1996, lors de l’examen du précédent rapport périodique de la Chine, dans laquelle il avait invité l’État partie «à assurer l’accès à l’éducation, à tous les niveaux, aux membres des nationalités minoritaires, et que, dans les régions autonomes, les programmes scolaires incluent l’enseignement de l’histoire et de la culture des nationalités minoritaires concernées».

24.Le rapporteur souhaite que la délégation puisse en outre indiquer au Comité si le fait que «plusieurs nationalités en Chine vivent soit mélangées, soit en petites communautés séparées ou côte à côte» (par. 72) ne leur porte pas préjudice. Peut‑elle faire le bilan de la décision relative à la protection de l’égalité des droits des minorités ethniques mélangées ou dispersées (par. 73), promulguée en 1952 par le Gouvernement central?

25.M. Valencia Rodriguez se félicite des divers programmes mis en place afin de distinguer des émissions artistiques de télévision consacrées aux minorités et aux écrivains et réalisateurs de cinéma. Il relève cependant que le Groupe de travail sur les détentions arbitraires de la Commission des droits de l’homme de l’ONU a appris que deux écrivains chinois, ont été incarcérés en 1998 pour avoir compilé des informations en vue de la publication d’un document sur la renaissance culturelle chinoise. L’un des deux hommes aurait depuis été remis en liberté. Quelles observations la délégation chinoise peut‑elle faire à ce sujet?

26.S’agissant de la question de la liberté religieuse au Tibet (par. 98), l’organisation Human Rights Watch indique dans son rapport pour l’année 2000 que la liberté religieuse est réprimée au Tibet, que des moines ont été placés en détention et que les autorités tenteraient d’y faire prévaloir l’athéisme. Deux autres ONG affirment que la mortalité infantile serait deux à trois fois plus élevée parmi les Tibétains que parmi les citoyens chinois, que les services sociaux tibétains seraient moins développés, et que 80 % des Tibétains seraient analphabètes contre 25 % de la population chinoise. Selon certaines organisations, les membres de l’ethnie han seraient encouragés à venir s’installer au Tibet, de sorte que la population tibétaine serait actuellement minoritaire dans ce territoire.

27.S’agissant de l’application de l’article 6 de la Convention, le rapporteur souligne que, la disposition de l’article 41 de la Constitution en vertu de laquelle «ceux qui ont subi des préjudices de leurs droits civiques de la part des organismes et des travailleurs de l’État ont le droit d’être dédommagés conformément aux dispositions prévues par la loi» (HRI/CORE, par. 44), se limite aux actions commises par l’État ou ses fonctionnaires. Existe-t-il d’autres dispositions garantissant, de manière concrète, l’application de l’article 6 de la Convention? La loi mentionnée au paragraphe 108 du rapport, sur les sanctions administratives autorisant les personnes dont les droits ont été violés à réclamer une indemnisation, a-t-elle été appliquée dans des affaires de discrimination raciale? La délégation de l’État partie est‑elle en mesure de fournir au Comité des informations détaillées sur le nombre et le pourcentage de détenus appartenant à des minorités ethniques, les types d’infractions retenus contre eux, ainsi que sur les plaintes déposées et les jugements prononcés pour actes de discrimination raciale?

28.Évoquant la situation à Hong Kong, le rapporteur estime que bien que le rapport portant sur cette région ne l’admette pas explicitement, certaines pratiques de discrimination raciale existent toujours à Hong Kong, comme l’ont estimé le Comité des droits de l’homme et le Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU ainsi que plusieurs ONG. Il rappelle que la Région administrative spéciale de Hong Kong ne dispose pas de lois condamnant la discrimination raciale, contrairement aux obligations qui lui incombent en vertu de la Convention et il souligne que cette lacune législative devrait être comblée afin de protéger les individus contre ce phénomène. Il juge par ailleurs indispensable d’éliminer les pratiques discriminatoires à l’encontre des travailleurs étrangers et, en particulier d’abroger la «règle des deux semaines» (CERD/C/357/Add.4 (Part II); par. 31), en vertu de laquelle les employés de maison ne disposant plus de contrat de travail disposent de deux semaines après la résiliation de leur contrat pour quitter le territoire.

29.Pour ce qui est de la situation à Macao, M. Valencia Rodriguez souligne que le Code pénal sanctionne l’incitation à la discrimination raciale et l’incitation aux actes de violence (CERD/C/357/Add.4 (Part III); par. 16), de même que la création d’organismes ou l’organisation d’activités de propagande systématique. Afin d’être en mesure de contrôler l’application à Macao, des dispositions de l’article 4 de la Convention, il serait utile au Comité de disposer des articles 229, 230, 231, 233 et 234 du Code pénal de cette région administrative de la Chine. La délégation peut-elle également indiquer au Comité si les articles susmentionnés ont été appliqués dans des affaires de discrimination raciale?

30.En ce qui concerne l’application de l’article 5 de la Convention, le rapporteur demande à la délégation d’expliquer pour quelles raisons plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, notamment la Convention, n’ont pas été incorporés dans la législation interne de Macao. Il lui semblerait en outre que les formes de réparation et d’indemnisation pour atteintes aux droits fondamentaux, notamment l’obligation d’intenter une action en réparation civile au cours de l’examen de l’affaire, (par. 170) ne soient pas conformes aux dispositions de l’article 6 de la Convention.

31.En conclusion, M. Valencia Rodriguez dit que le Comité souhaitera peut‑être recommander au Gouvernement chinois d’envisager la possibilité de faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention. Il estime qu’il reste beaucoup à faire pour assurer la bonne application de la Convention en Chine, et qu’il serait souhaitable que le Gouvernement chinois publie son neuvième rapport périodique ainsi que les recommandations que le Comité formulera à son sujet.

32.M. Fall prend la présidence.

33.M. DIACONU estime que le rapport de la Chine répond à la plupart des questions que s’étaient posées le Comité en 1996, lors de l’examen de son précédent rapport périodique. Il est frappé par l’accent qui est mis dans ce rapport sur l’unité nationale et l’interdiction de tous actes ou programmes visant à créer des divisions dans le pays ou à saper l’unité nationale, et par l’approche collective des autorités chinoises à l’égard de la discrimination raciale. Cette stratégie est certainement importante compte tenu du fait que la Chine compte 55 ethnies différentes représentant 109 millions de personnes, soit un peu moins de 10 % de la population totale, mais on peut toutefois se demander comment les politiques mises en place et les textes adoptés en vue de combattre la discrimination raciale sont appliqués lorsque la victime appartient à une minorité, et si la protection de l’individu n’est pas sacrifiée à des objectifs d’ordre général. Le Comité pourrait‑il savoir comment ces objectifs généraux se traduisent dans la protection de chaque individu contre la discrimination raciale?

34.La troisième partie du rapport évoque un grand nombre de mesures concrètes et de principes visant à prévenir et à éliminer les discriminations, en particulier des mesures spéciales (par. 19) visant à faciliter et à appuyer le développement social, culturel, économique et autre des minorités et des zones habitées par les minorités. Elle indique que la Chine s’est dotée d’une politique multisectorielle d’élimination des discriminations, ce qui est un élément positif, de même que la nouvelle Commission d’État pour les affaires ethniques, dirigée par un membre d’un groupe ethnique minoritaire. Quelles activités cette Commission mène-t-elle? Est‑ce un organe purement consultatif ou peut‑elle proposer des projets de lois, aux niveaux central et provincial?

35.S’agissant de l’application de l’article 4 de la Convention, M. Diaconu note qu’il est dit au paragraphe 48 du rapport qu’il «n’existe en Chine aucune organisation propageant la discrimination raciale ou l’idée de la supériorité d’un peuple quel qu’il soit». Toutefois, il n’existe apparemment dans la législation en vigueur en Chine aucune disposition punissant expressément les actes de violence ou la provocation à de tels actes dirigés contre des personnes d’une autre race, d’une autre couleur ou d’une autre origine ethnique, conformément à l’article 4 b) de la Convention. La Chine devrait donc réviser sa législation à la lumière des dispositions de cet article et prendre les mesures nécessaires pour combler les lacunes dans ce domaine.

36.Le paragraphe 114 du rapport indique en outre que le Gouvernement a encouragé la publication de deux ouvrages contenant en annexe le texte intégral de la Convention internationale sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid et de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. M. Diaconu se demande pourquoi la Convention sur l’élimination de la discrimination raciale ou la Déclaration de 1992 de l’Assemblée générale des Nations Unies sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales ne figurent pas elle aussi dans ces ouvrages.

37.Tout en se félicitant par ailleurs que les deux régions administratives spéciales de Macao et de Hong Kong aient chacune fait l’objet d’un rapport séparé, M. Diaconu s’interroge sur les raisons pour lesquelles le texte de l’article 25 de la Loi fondamentale de Macao, qui garantit l’égalité de tous devant la loi, sans discrimination en raison de la race, de la couleur ou de l’origine ethnique ou nationale, ne figure pas également dans la Loi fondamentale de Hong Kong, ce qui est d’autant plus étonnant que la Loi fondamentale de Hong Kong ne contient aucune disposition concernant cette question.

38.M. Diaconu constate que la Convention n’est pas mentionnée dans la Loi fondamentale de Hong Kong bien que cette région administrative y soit explicitement devenue partie en 1969, lorsqu’elle était encore un territoire soumis à la juridiction du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord. Par ailleurs, il semble que les traités applicables à Hong Kong n’aient pas force de loi (par. 101, HRI/CORE) dans son système juridique interne. Pour remédier à ce problème, il faudrait absolument que la Région administrative spéciale de Hong Kong adopte des lois incorporant ces traités et interdisant la discrimination raciale. M. Diaconu comprend très difficilement pourquoi, comme l’affirme le rapport, la population de Hong Kong serait opposée à l’adoption d’une loi interdisant la discrimination raciale. Si des lois ont été adoptées en matière de télévision, de cinéma et de télécommunications (par. 72), pourquoi d’autres lois concernant d’autres domaines de la vie sociale ne seraient‑elles pas adoptées? Le Gouvernement chinois affirme que la Convention s’applique aux minorités et que des sanctions pénales sont prévues en cas d’infractions, mais sans indiquer en vertu de quelles lois. Compte tenu du principe selon lequel sans loi, il n’y a ni peines, ni infractions, cette situation est très préoccupante.

39.M. Diaconu dit que la Chine, en tant qu’État partie à la Convention, est tenue d’en assurer la mise en œuvre à Hong Kong comme sur toute autre partie de son territoire national, car Hong Kong ne peut être maintenue à l’écart du processus de mise en œuvre de la Convention sans susciter de graves doutes quant au respect de l’égalité des droits sur le territoire de cette région.

40.M. THORNBERRY fera des observations concernant certains paragraphes du rapport général de la Chine, puis des observations concernant spécifiquement Hong Kong. Il constate que le paragraphe 10 du rapport énumère les dispositions juridiques qui régissent les questions ethniques, mais qu’aucune loi ne donne une définition précise de la discrimination raciale. Le paragraphe 12 évoque l’égalité en droit des nationalités, mais en termes très généraux. Le paragraphe 16, relatif à la promotion de la culture nationale, ne précise pas quelle est la place faite aux cultures locales.

41.Les nombreuses références à la notion de développement et aux projets de développement soulèvent la question de savoir si les communautés intéressées sont associées à la prise des décisions qui les concernent dans ce domaine. Au paragraphe 20, il est question des pouvoirs de la Commission d’État pour les affaires ethniques, chargée notamment d’étudier les conditions de vie des minorités. Il serait intéressant de savoir si des études ont été effectivement réalisées, quels ont été leurs résultats et si elles ont été publiées. À propos du paragraphe 21, relatif au développement des minorités, il y aurait lieu de préciser s’il s’agit d’une notion purement économique ou bien si ce développement comporte une dimension humaine, notamment culturelle.

42.À propos du paragraphe 44, M. Thornberry aimerait connaître la nature des projets ayant fait l’objet d’investissements en faveur de la culture traditionnelle des minorités. En ce qui concerne la participation de ces dernières à la vie de la nation, il aimerait savoir s’il existe des mécanismes de consultation autres que les élections à l’Assemblée nationale populaire évoquées à l’article 55 du rapport. À propos du bilinguisme dans l’enseignement, (par. 69), il aimerait recevoir des informations sur les méthodes pédagogiques et savoir si les cours sont véritablement bilingues ou s’ils ont seulement pour but de faciliter aux écoliers le passage de leur langue maternelle à la langue majoritaire.

43.À propos du paragraphe 78, il aimerait savoir ce qu’il faut entendre par des activités culturelles, artistiques et sportives «saines» ayant des caractéristiques ethniques.

44.À propos des paragraphes 82 et 83, M. Thornberry suppose qu’il convient d’englober dans la catégorie des «écrivains» les journalistes et les intellectuels en général, et il fait valoir qu’il faut faire une distinction entre les créations artistiques et littéraires portant sur les minorités ethniques et les créations rédigées par les minorités dans leur propre langue. En ce qui concerne le paragraphe 109, consacré au traitement des détenus, il aimerait avoir des précisions sur l’alimentation des détenus issus de minorités ethniques, qui met parfois en jeu le principe important de la liberté religieuse. À propos des cours sur les théories relatives aux minorités ethniques, évoqués au paragraphe 111, il serait utile au Comité de connaître la teneur des manuels et la manière dont les minorités y sont présentées, en ce qui concerne notamment leur rôle dans le développement du pays ou leur histoire.

45.M. Thornberry aborde ensuite le rapport concernant la Région administrative spéciale de Hong Kong (CERD/C/357/Add.4 (Part II)). À propos du paragraphe 3, il s’interroge sur le processus de consultation concernant la discrimination raciale évoqué à l’alinéa a) et aimerait en connaître les modalités. Des victimes d’actes de discrimination ont‑elles été interrogées? Il souscrit aux observations de M. Diaconu concernant la responsabilité qui incombe au Gouvernement chinois de faire appliquer les dispositions de la Convention sur l’ensemble du territoire de la République. Il s’interroge aussi sur l’absence d’une législation applicable à Hong Kong en matière de discrimination raciale et pense que les mesures administratives et l’enseignement comme facteur de dissuasion sont insuffisants et doivent être complétés par une législation adéquate. L’absence d’une infrastructure juridique touche une question de principe très importante: l’obligation de faire appliquer des instruments internationaux qui ont été rédigés avec soin et dont la mise en oeuvre a été riche d’enseignements. Le projet de loi contre la discrimination raciale évoqué au paragraphe 17 paraît donc important. Sans négliger les avantages inhérents aux mesures positives en faveur de l’égalité des chances ou ceux de l’autoréglementation, mentionnés au paragraphe 22, M. Thornberry reste convaincu de l’utilité de dispositions législatives contraignantes. Quant à l’impossibilité pour le Gouvernement de s’appuyer, sur la majorité pour légiférer (par. 23), M. Thornberry craint que l’opinion majoritaire ne soit systématiquement défavorable aux droits des minorités.

46.Vu tout ce qui précède, et nonobstant l’harmonie qui règne prétendument dans la société cosmopolite de Hong Kong, M. Thornberry estime à son tour qu’il est nécessaire que le Gouvernement chinois fasse appliquer la Convention à Hong Kong.

47.M. de GOUTTES se propose de commenter le neuvième rapport de la Chine à la lumière des observations et des recommandations formulées par le Comité en 1996, à l’occasion de l’examen du septième rapport de cet État partie afin de s’assurer qu’il contient les réponses aux questions posées alors à la délégation chinoise par les membres du Comité. M. de Gouttes constate d’emblée un contraste entre le rapport de la Chine, axé sur la législation, et l’approche pragmatique qui se dégage des documents des ONG, d’un caractère plus concret. Le rapport à l’examen est en particulier peu instructif quant à la mise en œuvre de la législation. Les questions de M. de Gouttes vont compléter l’analyse approfondie qui a été faite par M. Valencia‑Rodriguez, rapporteur pour la Chine.

48.En ce qui concerne la démocratie, M. de Gouttes aimerait connaître les résultats du troisième recensement national effectué en 2000 et évoqué au paragraphe 6 du neuvième rapport. Concernant l’application de l’article 2 de la Convention sur l’élimination de la discrimination raciale, il souhaite savoir si, comme il est dit dans le document de base concernant la Chine (HRI/CORE/1/Add.21/Rev.1), la Convention est applicable directement dans le droit interne chinois sans être incorporée dans une loi spécifique et, si elle peut être invoquée devant les tribunaux.

49.Lors de la présentation du rapport précédent de la Chine, en 1996, le Comité s’est préoccupé du sort des groupes minoritaires et des régions autonomes. Le neuvième rapport de la Chine développe l’action menée en faveur des minorités et le représentant de la Chine a annoncé des amendements à la loi concernant l’autonomie des régions autonomes et les investissements destinés à ces régions. Sur ce point, Amnesty International et Human Rights in China font état d’un décalage entre les textes et la réalité. Il semblerait que dans trois régions, le Sin-kiang, le Tibet et la Mongolie, une discrimination subsiste à l’égard de trois groupes défavorisés: les populations rurales, les migrants pratiquant l’exode rural et les minorités nationales. M. de Gouttes aimerait savoir quelles mesures ont été prises en faveur de ces groupes. Par ailleurs, il aimerait aussi savoir quelle suite a été donnée à trois observations et recommandations formulées dans les conclusions précédentes du Comité en 1996, concernant l’équilibre démographique, la liberté religieuse et la sûreté des personnes dans les trois régions autonomes.

50.En ce qui concerne l’application de l’article 4 de la Convention, le Comité avait exprimé des préoccupations concernant la répression de l’ensemble des actes de discrimination raciale sans exception. Les réponses apportées aux paragraphes 48 à 53 du neuvième rapport de la Chine, qui évoquent notamment deux articles du Code pénal, sont insuffisantes. Il aimerait que la délégation chinoise indique au Comité toutes les dispositions du Code ou les autres dispositions juridiques réprimant les actes visés à l’article 4 de la Convention. À ce propos, M. de Gouttes constate que Hong Kong ne dispose pas d’une législation pénale spécifique réprimant ces actes, contrairement à Macao.

51.Concernant l’application de l’article 5 de la Convention, M. de Gouttes relève une divergence entre le rapport à l’examen et les rapports des ONG concernant la situation des Tibétains. Ainsi, les paragraphes 54 à 103 du rapport évoquent des mesures visant à protéger les droits des minorités, notamment au Tibet, alors que les ONG font état d’une discrimination persistante à l’encontre de ces minorités dans les domaines religieux, scolaire et sanitaire. M. de Gouttes aimerait que la délégation chinoise fasse part au Comité de ses observations à ce sujet.

52.En ce qui concerne l’application de l’article 6 de la Convention, M. de Gouttes demande à la délégation chinoise de fournir au Comité des chiffres concernant les plaintes, poursuites et condamnations pour discrimination raciale ou ethnique, ainsi que des chiffres sur la proportion des détenus issus des groupes minoritaires par rapport à la population totale des prisons chinoises. Il lui demande en outre d’indiquer le pourcentage des membres de groupes minoritaires condamnés à la peine de mort ou exécutés par rapport à l’ensemble de la population de la Chine.

53.Concernant l’application de l’article 7 de la Convention, il serait bon que la délégation chinoise indique quelles mesures sont prises dans son pays pour diffuser le texte de la Convention et des conclusions et recommandations du Comité dans la population, et pour favoriser la coopération du Gouvernement avec les ONG de défense des droits de l’homme. Enfin, M. de Gouttes aimerait savoir si la Chine envisage de faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention, en vue de donner à toute victime présumée d’une violation par l’État chinois d’un des droits énoncés dans la Convention, la possibilité d’adresser une communication à ce sujet au Comité. Cette déclaration revêt un intérêt particulier compte tenu de la proximité de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.

54.MmeBRITZ, se référant au paragraphe 19 du neuvième rapport périodique de la Chine (CERD/C/357/Add.4 (Part I)), concernant l’aide aux régions qui comprennent des minorités, dans lequel il est question notamment de projets de développement, de projets d’infrastructure ou d’exploitation des ressources minérales, s’interroge sur l’efficacité de ces mesures pour les minorités elles‑mêmes. Elle aimerait savoir si ces mesures sont directement bénéfiques aux minorités ou surtout à la population majoritaire. Existe‑t‑il des mécanismes permettant de s’assurer que les mesures gouvernementales améliorent directement la situation des minorités ou, à défaut, de mesurer leur efficacité? Comme l’a indiqué le rapporteur, des statistiques appropriées seraient fort utiles au Comité.

55.M. PILLAI souhaite avoir des renseignements sur les mécanismes permettant d’identifier les minorités ethniques et savoir s’il existe encore en Chine des groupes qui revendiquent le statut de minorité ethnique. Il aimerait également savoir comment le Gouvernement évalue l’efficacité concrète des mesures visant à améliorer le niveau de vie des minorités, notamment les mesures spéciales de développement socioéconomique et les investissements financiers, dont il serait utile au Comité de connaître les résultats.

56.Certaines informations font état d’un déséquilibre croissant entre la situation des populations migrantes et celle des populations autochtones dans les zones habitées en majorité par des minorités ethniques, déséquilibre qui touche des questions importantes comme les droits à la santé, à l’éducation et à l’emploi. Sur ce point, le rapporteur pour la Chine et d’autres membres du Comité ont évoqué le cas du Tibet.

57.M. Pillai constate, d’une manière générale, que le rapport de la Chine fait apparaître une divergence entre le droit au développement et le droit pour les minorités de préserver leur identité ethnique, problème sur lequel la Commission d’État pour les affaires ethniques, mentionnée aux paragraphes 20 et 84 du rapport, pourrait peut‑être se pencher. Il aimerait que la délégation fournisse au Comité des renseignements précis sur l’action de cette commission. Par ailleurs, il croit savoir que des incidents de discrimination raciale ont eu lieu dans la Région administrative spéciale de Hong Kong, mais que, faute de législation pertinente, les victimes de ces actes ne disposaient pas de voies de recours efficaces. Le Gouvernement de Hong Kong considère qu’une telle législation n’est pas nécessaire et qu’il faut agir par l’éducation, ce qui, selon M. Pillai, est évidemment insuffisant sans le pouvoir répressif de la loi. En outre, il estime que le Gouvernement de la Région administrative spéciale de Hong Kong devrait élaborer une législation pertinente précise pour prévenir de tels incidents.

58.Enfin, M. Pillai s’inquiète de l’ampleur de la discrimination raciale à l’égard des travailleurs migrants et constate que la Chine n’a pas encore ratifié les conventions pertinentes.

59.M. RESHETOV se félicite des progrès démocratiques remarquables enregistrés depuis 1996 dans les campagnes chinoises. Il rappelle l’importance du processus de démocratisation sur la situation des minorités. À cet égard, il salue l’adoption, par le Gouvernement chinois, d’une politique de planification de la famille plus souple pour les groupes minoritaires que pour les Hans. Au Tibet par exemple, la population n’est pas soumise à la politique de limitation des naissances, ce qui témoigne de la bonne volonté des autorités centrales à l’égard des minorités. Il souhaite toutefois que la délégation chinoise donne au Comité davantage d’informations sur l’autonomie administrative accordée aux collectivités locales dans lesquelles résident des minorités nationales.

60.S’agissant de la violation des droits religieux au Tibet dénoncée par nombre d’ONG, M. Reshetov croit pouvoir affirmer, à la suite d’un séjour personnel au Tibet, que la Chine ne mène sûrement pas dans cette région une politique de répression manifeste, au contraire. Il confirme les informations fournies au paragraphe 98 du rapport périodique consacré à la Chine (CERD/C/357/Add.4 (Part. I)), selon lesquelles tous les adeptes ont à leur domicile une pièce ou un autel consacré à l’incantation des écritures bouddhistes ou encore un moulin à prières, preuve que les adeptes peuvent pratiquer leur religion librement.

61.S’agissant de la contradiction entre le droit au développement et le droit de préserver son identité culturelle, M. Reshetov fait observer que le Tibet fait partie des régions les moins développées de la Chine, et que l’arrivée de spécialistes chinois dans divers domaines peut être la manifestation de la volonté des autorités chinoises de développer cette région, de modifier la composition ethnique de cette province, d’autant plus que la Chine semble attacher une grande importance à la préservation de la culture des groupes minoritaires.

62.MmeJANUARY‑BARDILL suggère, à l’intention de la Chine, de renommer les «textes législatifs à caractère ethnique», qui ne semblent viser qu’une partie de sa population, en les appelant «lois sur l’égalité», modification qui permettrait de préciser leur objet.

63.Sachant que la loi interdit «toutes activités qui pourraient offenser les usages ou les coutumes d’une minorité ou saper l’unité nationale» ou encore tous «programmes contenant des éléments incitant à créer des divisions dans le pays ou sapant l’unité nationale», Mme January‑Bardill souhaite savoir quelles sanctions sont imposées en cas d’infraction.

64.D’après le rapport, le Gouvernement chinois a toujours mis l’accent sur la nécessité de protéger les droits et les intérêts des femmes membres des minorités ethniques et a notamment adopté en 1994 une loi sur la protection de la santé maternelle et infantile. S’est‑il assuré que les femmes appartenant à des minorités ethniques bénéficient effectivement des dispositions de ce texte de loi?

65.Dans le domaine de la santé génésique et sexuelle, Mme January‑Bardill invite la délégation chinoise à se référer à la recommandation générale n° XXV concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale.

66.Sachant qu’il n’existe actuellement aucune disposition législative ou administrative régissant l’octroi de l’asile en Chine, Mme January‑Bardill aimerait savoir à quel stade en est la rédaction du projet de loi sur les réfugiés dont il est question dans le rapport à l’examen.

67.S’agissant de la Région administrative spéciale de Hong Kong, Mme January‑Bardill souligne l’existence d’un code de bonne pratique contre la discrimination raciale en matière d’emploi et demande à la délégation de confirmer, s’il y a lieu, qu’aucune loi n’interdit la discrimination raciale dans ce domaine. L’adoption d’une loi adaptée ne concourrait‑elle pas à renforcer les effets du code de bonne pratique?

68.D’après différentes organisations non gouvernementales, les employés de maison étrangers rencontrent de nombreuses difficultés dans le domaine du droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage. Mme January‑Bardill souhaite vivement que la Chine fournisse au Comité des précisions à ce sujet dans un prochain rapport périodique.

69.M. YUTZIS se félicite de l’intérêt que suscite le neuvième rapport périodique de la Chine concernant l’application de la Convention, comme en témoigne la présence d’une délégation nombreuse, représentant un pays de 1,2 milliard de personnes, soit un cinquième de la population mondiale, ainsi que le millier de pages soumises par des ONG sur l’application de la Convention en Chine. Au cours des années précédentes, on a souvent exprimé la crainte que la mise en œuvre de la Convention ne soit entravée par l’application du concept «un pays, deux systèmes».

70.Dans le rapport concernant la Région administrative spéciale de Hong Kong (CERD/C/357/Add.4 (Part. II)), les autorités chinoises reconnaissent leur obligation de protéger les minorités contre la discrimination, sous réserve de la nécessité d’être attentif à l’opinion publique, et de trouver un équilibre entre des pressions et des jugements contradictoires qui se manifestent sur ce qu’il convient de faire en un lieu et à un moment donné. Elles ajoutent qu’une législation ayant de vastes répercussions sociales doit avoir le soutien de la communauté pour être efficace, surtout si elle vise à lutter contre la discrimination, car elle touche intimement à la vie quotidienne de chacun. M. Yutzis se dit préoccupé par l’idée qu’une politique gouvernementale accordant trop d’importance aux revendications individuelles ne risque de fragiliser l’équilibre social et de nuire à l’application de certaines dispositions de la Convention visant à garantir, dans des conditions d’égalité, le plein exercice des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

71.M. Yutzis regrette que le rapport ne fasse pas référence à la question des migrations internes, sachant notamment que la Chine applique le système du hukou, «certificat de résidence» qui attache des millions de paysans pauvres à leur terre, afin d’éviter un exode massif vers les grandes villes. Il craint que cette politique, qui stigmatise une partie de la population, ne risque de susciter des attitudes discriminatoires semblables à celles qui frappent les immigrés. Aussi aimerait‑il savoir si la Chine compte perpétuer le système du «hukou».

72.Enfin, en ce qui concerne la liberté de religion, M. Yutzis souhaiterait que la délégation de la Chine confirme ou infirme les informations selon lesquelles les membres du parti communiste n’ont toujours pas le droit de revendiquer une appartenance religieuse. Il estime que la Chine devrait faire preuve de souplesse en matière religieuse car la religion est très importante pour la survie des minorités.

73.M. BOSSUYT lit dans le rapport de la Chine (CERD/C/357/Add.4 (Part I)) que, d’après le recensement national de 1990, les Hans représentent 92 % de la population totale, contre seulement 8 % pour les 55 autres groupes ethniques (par. 6). Cela étant, il souhaiterait recevoir des éclaircissements sur plusieurs données statistiques fournies dans le rapport où il est dit notamment qu’environ 80 % des investissements publics effectués pour subventionner les actions sociales menées localement ont été dirigés vers les zones pauvres dans les parties centrale et occidentale de la Chine et dans les zones habitées par des minorités (par. 26). Il estime peu probable que 80 % des investissements publics soient dirigés vers 8 % de la population composée de minorités. Aussi demande‑t‑il à la délégation de préciser quel pourcentage est alloué aux zones pauvres des parties centrale et occidentale et aux zones habitées par des minorités. Il est dit également dans le rapport que 45 % du montant total alloué au programme d’atténuation de la pauvreté ont été investis dans des districts pauvres habités par des minorités (par. 35), ce qui ne permet pas de comprendre pourquoi les districts habités par des minorités sont les plus pauvres de Chine. Enfin, les Tibétains et les délégués représentant les autres minorités nationales constituent, d’après le rapport, 80 % de l’ensemble des délégués à l’Assemblée nationale populaire (par. 61). M. Bossuyt ne comprend pas comment une minorité de 8 % de la population pourrait détenir 80 % des sièges de l’Assemblée nationale populaire et aimerait recevoir des précisions à ce sujet. En outre, il se demande si la Chine applique une politique d’action positive pour le recrutement des élèves, si le recrutement se fait en fonction de la nationalité ou du mérite et s’il tient compte de quotas. De même, les organismes d’État, qui sont encouragés à appliquer une politique de «priorité dans l’égalité» en faveur des candidats issus des groupes ethniques, prennent‑ils également en considération le mérite des candidats et sur quels critères les sélectionnent‑t‑ils?

74.Le rapport mentionne également des «médicaments adaptés spécialement aux membres des minorités». M. Bossuyt aimerait que la délégation lui fournisse des explications à ce sujet sachant qu’un principe actif doit avoir les mêmes effets sur tout être humain, quelle que soit son appartenance ethnique.

75.L’islam et le lamaïsme sont mentionnés dans le rapport mais aucune information n’est donnée sur les chrétiens. Quelle en est la raison? Qu’en est‑il des catholiques et des protestants?

76.En matière de planification de la famille, il est indiqué dans le rapport (par. 103) que les minorités ethniques habitant les régions agricoles et pastorales du Tibet ne sont soumises à aucune restriction quant au nombre des naissances. Qu’en est‑il des personnes vivant dans ces régions qui n’appartiennent pas à des minorités ethniques? Tombent‑elles sous le coup de la politique de réglementation des naissances ou sont‑elles soumises aux mêmes règles que les minorités ethniques de ces régions?

77.Il est également indiqué que, en vertu des amendements importants apportés au Code de procédure pénale de 1979, «les innocents sont protégés de façon plus précise contre les poursuites pénales». Toute personne n’est‑elle pas présumée innocente avant d’être déclarée coupable, présomption qui la protège contre des poursuites pénales arbitraires?

78.Comme M. Diaconu l’a déjà fait, M. Bossuyt suggère à son tour que le texte des pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme et de la Convention soient incorporés dans les deux ouvrages évoqués au paragraphe 114 du rapport, d’autant plus que, contrairement aux deux conventions qui y figurent déjà, ces trois instruments confèrent des droits directs aux personnes.

79.M. Bossuyt fait remarquer que la Chine est partie à la Convention relative au statut des réfugiés depuis 1982 mais qu’elle n’a toujours pas adopté de lois internes en la matière. Dans la pratique, il semble que les réfugiés ne soient pas traités de la même manière selon leur pays d’origine, les réfugiés venus de la République populaire démocratique de Corée se heurtant à plus de difficultés que les autres. Enfin, il semble que la Chine s’oppose au retour des citoyens chinois ayant fui le pays en s’adressant à des organisations criminelles. La politique de la Chine en la matière ne contribue‑t‑elle pas à faire prospérer ces organisations criminelles, le trafic d’êtres humains étant plus rémunérateur encore que le trafic des stupéfiants? La Chine ne pourrait‑elle envisager d’assouplir sa politique à cet égard?

80.Le PRÉSIDENT annonce que le Comité a achevé la première partie de l’examen du neuvième rapport périodique de la Chine.

La séance est levée à 18 h 10.

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