Nations Unies

CERD/C/SR.1974

Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

février 2010

Original: français

Comité pour l ’ élimination de la discrimination raciale

Soixante- seiz ième session

Compte rendu analytique de la 1974 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 16 février 2010, à 10 heures

Président: M. Kemal

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Sixième rapport périodique de Monaco (suite)

La séance est ouverte à 10 h 15.

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l ’ article 9 de la Convention (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Sixième rapport périodique de Monaco (CERD/C/MCO/6; HRI/CORE/1/Add.118; HRI/CORE/MCO/2008; CERD/C/MCO/Q/6; CERD/C/MCO/Q/6/Add.1)

1. Sur l ’ invitation du Président, la délégation monégasque reprend place à la table du Comité.

2.M. Fillon (Monaco) confirme que, comme l’a remarqué le Comité, il existe un dialogue interreligieux nourri et différents lieux de culte dans le pays. Il n’y a pas de pratique collective et constante du culte musulman, mais plusieurs lieux privés sont librement affectés à cet usage.

3.M me Ceyssac (Monaco) indique que depuis 2005, 11 formations ont été données aux magistrats en coopération avec la Cellule des droits de l’homme et, pour une bonne partie d’entre elles, avec la participation d’intervenants du Conseil de l’Europe et de la Cour européenne des droits de l’homme, sur des thèmes aussi divers que la Convention et la Cour européennes des droits de l’homme, le droit à un procès équitable, le rôle du greffe, l’impartialité des juges, la liberté d’expression ou encore la recevabilité des requêtes, par exemple. Certains séminaires de formation ont été ouverts non seulement au personnel judiciaire mais aussi au personnel administratif concerné. Ce type d’initiatives pourrait à l’avenir bénéficier de la participation de formateurs des Nations Unies en plus de ceux du Conseil de l’Europe.

4.Les chefs de cour et tribunaux sont régulièrement tenus au courant de la jurisprudence du Conseil de l’Europe et le résultat concret en est qu’aujourd’hui les jugements rendus à tous les degrés de juridiction se réfèrent directement aux dispositions des instruments internationaux.

5.M. Ravera (Monaco) ajoute que certaines des formations et conférences organisées sur les thèmes des droits de l’homme étaient ouvertes au public. La Cellule des droits de l’homme travaille aussi à diffuser les valeurs universelles des droits de l’homme au sein des services de police. En complément du module de formation aux droits de l’homme obligatoire pour toutes les nouvelles recrues de la police, la Cellule des droits de l’homme a ainsi organisé une conférence de formation à la Direction de la sécurité publique. Par ailleurs, les jeunes générations sont elles aussi sensibilisées: une conférence sur les systèmes onusien et européen de protection des droits de l’homme est organisée pour les élèves de l’enseignement secondaire, notamment afin de les informer de leurs possibilités de présenter aux organes conventionnels des requêtes en cas de violation de leurs droits de l’homme.

6.M. Fillon (Monaco), passant à la question de l’emploi des étrangers, explique que l’adhésion à la Convention no 111 de l’Organisation internationale du Travail (OIT), concernant la discrimination (emploi et profession), est réservée aux États membres de l’OIT. Pour la Principauté de Monaco, qui n’est pas encore membre de cette organisation, le plus important est les accords en matière sociale très complets qu’elle a conclus avec les pays voisins fournisseurs de travailleurs, notamment la France et l’Italie, qui permettent aux très nombreux ressortissants de ces pays concernés de bénéficier de prestations de sécurité sociale, de retraite, d’assurance maladie, d’invalidité, de maternité et de décès.

7.La délégation a pris bonne note des suggestions de certains membres du Comité tendant à lutter contre la discrimination dans l’emploi, telles que la possibilité d’instaurer des systèmes de CV anonymes, de tests ou de sondages, et les transmettra aux autorités compétentes, quoique de tels systèmes ne semblent guère justifiés dans la situation actuelle.

8.L’emploi à Monaco est régi par un système de priorités en vertu duquel les Monégasques sont prioritaires sur les résidents, et ces derniers sur les travailleurs résidant à l’étranger. Cependant, la composition de la population salariée montre que ce système n’est pas synonyme d’exclusion.

9.M me Pastor (Monaco) précise ainsi que les Monégasques ne représentent que 2,20 % de la population salariée du pays, contre un peu plus de 67 % pour les Français, plus de 13 % pour les Italiens et quelque 17 % pour les autres nationalités. La population locale étant insuffisante pour répondre aux besoins de main-d’œuvre, 40 % seulement de la population active réside sur le territoire de la Principauté, et 75 % de celle active dans le secteur privé réside en France, contre 15 % à Monaco.

10.M me  Ceyssac (Monaco) donne au Comité l’assurance que les autorités gouvernementales en général et la Direction des services judiciaires en particulier sont conscientes de la nécessité de poursuivre la réflexion sur l’incrimination de la discrimination raciale dans le Code pénal. Même si la situation sur le terrain ne présente pas de difficulté a priori, cela ne dispense en effet pas les autorités de se doter des moyens de combattre la discrimination raciale, conformément aux engagements qu’elles ont souscrits sur le plan international. Un projet de loi est du reste en préparation, qui s’inspire fortement de la définition de la discrimination raciale énoncée au paragraphe 1 de l’article premier de la Convention et qui ferait de cette discrimination, selon les cas, une infraction pénale à part entière ou une circonstance aggravante d’une autre infraction.

11.Mme Ceyssac présente de façon détaillée différents éléments du projet de loi qui devrait permettre à son pays de renforcer la législation interdisant la discrimination raciale, en particulier deux nouveaux articles figurant dans un chapitre du Code pénal rebaptisé «Atteintes à la dignité de la personne» qui, par souci de simplicité d’application, ne créeront pas un trop grand nombre d’infractions mais assureront une protection devant les tribunaux, sans toutefois aller à l’encontre du principe de liberté d’expression consacré par la Constitution. Ces travaux étant déjà bien avancés, on peut s’attendre à ce que ladite modification du Code pénal intervienne prochainement.

12.Sans attendre cette modification législative, les juges punissent les atteintes à la dignité humaine que représentent les propos racistes en se fondant sur diverses dispositions visant les actes de discrimination raciale, qui figurent notamment dans la loi sur la liberté d’expression publique de juillet 2005, dans la loi sur la protection des informations nominatives ou encore dans la loi sur le renforcement de la répression des crimes contre les enfants. L’interdiction de la discrimination raciale est également clairement énoncée dans le projet de loi relatif aux systèmes d’information ainsi que dans le projet de loi relatif au statut de la fonction publique.

13.M. Gastaud (Monaco) dit que la Constitution occupe le premier rang de la hiérarchie des normes en droit monégasque, les traités bilatéraux et multilatéraux le deuxième rang et les lois le troisième rang. Un traité prime une loi que celle-ci soit antérieure ou postérieure à l’incorporation du traité. Le Titre III de la Constitution et l’article 5 de la Convention consacrent essentiellement les mêmes droits et libertés, mais il appartient à la loi nationale d’en définir les modalités d’exercice.

14.M. Ravera (Monaco) indique que la première mission de la Cellule des droits de l’homme, rattachée au Département des affaires extérieures, est d’analyser tous les textes et projets de lois relatifs aux droits de l’homme pour juger de leur conformité aux normes internationales et de proposer des révisions ou amendements si cela est nécessaire. Pour ce faire, elle suit évidemment de près la jurisprudence internationale et travaille en étroite coopération avec l’ensemble des organes de l’État. Elle étudie aussi de manière approfondie tous les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme que Monaco envisage de signer. La Cellule s’acquitte également d’une mission de conseil juridique permanent auprès des autorités monégasques. Elle répond aux demandes des instances internationales, auxquelles Monaco présente des rapports.

15.M. Ravera (Monaco) indique qu’il n’est pas prévu pour l’instant de créer une institution nationale des droits de l’homme à Monaco. L’essentiel des fonctions de promotion, de diffusion et de défense des droits fondamentaux se partage actuellement entre la Cellule des droits de l’homme et le Médiateur auprès du Ministère d’État. Il précise qu’il n’existe à Monaco aucune organisation ni association liée aux droits de l’homme, ce qui est révélateur de l’absence de besoins de la société civile à cet égard. S’il se dégageait un besoin de ce type, le Gouvernement réexaminerait la question.

16.M. Fillon (Monaco) explique que la présence d’une population française nombreuse à Monaco est une tradition qui fait partie intégrante de l’identité de la Principauté, mais il est certain que les conditions économiques de ces dernières années peuvent avoir dissuadé un certain nombre de ressortissants français d’y demeurer. Leur départ n’est pas le résultat d’une volonté des Gouvernements monégasque ou français, mais il est plutôt dû aux conditions économiques qui prévalent depuis peu dans la région.

17.Il précise que les règles du droit civil relatives à la transmission des biens s’appliquent à Monaco indépendamment de toute considération de nationalité et de race, de religion ou d’ethnie. En conséquence, aucune distinction n’est faite en matière de transmission de biens, en particulier des biens immobiliers, entre vifs ou suite à un décès, en fonction de l’état civil des personnes concernées.

18.M. Ceyssac (Monaco) indique que Monaco ne tient pas de statistiques à caractère racial ou ethnique, mais que certaines statistiques prennent en considération la nationalité. Cette question renvoie à la problématique de la protection des informations nominatives. La loi de 2008 sur le traitement des données nominatives prévoit qu’il ne peut y avoir de système de collecte de données à caractère racial, ethnique, religieux, social, philosophique ou politique, mais permet également des exceptions, en cas de besoins liés à la sécurité publique ou avec le consentement des intéressés, ou pour satisfaire à une obligation légale ou défendre un droit devant la justice. Par conséquent, des fichiers à caractère racial ou ethnique ne pourraient être élaborés que pour des motifs impérieux de sécurité.

19.Au sujet de l’accès aux institutions susceptibles de recevoir une plainte en matière de racisme, M. Ceyssac indique que, à l’exception des faits classés sans suite qui ont eu lieu en 2004, aucun fait de racisme n’a été signalé. Leur extrême rareté, ou leur absence pour ainsi dire, est un fait objectif, et elle n’est pas un indicateur négatif car, à Monaco, l’accès à la justice est libre et facile, et l’accès aux informations est aisé. Enfin, les autorités font preuve d’une grande vigilance à cet égard et les gens ont un rapport de confiance avec les forces de police monégasques.

20.M. Fillon (Monaco) rappelle que la langue monégasque est enseignée dans les écoles primaires et fait l’objet d’une option au baccalauréat. Le Gouvernement apporte son appui pour la préserver et en assurer l’enseignement auprès des jeunes générations. Toutefois, le monégasque n’a jamais été la langue officielle du pays et est surtout une langue orale, qui a fait l’objet d’une transcription au XIXe siècle. Il existe effectivement une grammaire et un dictionnaire français-monégasque, et tout adulte a la possibilité d’apprendre la langue monégasque en suivant les cours universitaires de langues romanes ou ceux de l’Académie des langues dialectales.

21.M. Ceyssac (Monaco) indique, concernant la scolarisation des enfants des travailleurs frontaliers, que la loi sur l’éducation prévoit que tout enfant monégasque doit pouvoir être accueilli dès 3 ans dans les écoles, que tout enfant dont les parents résident à Monaco doit pouvoir être accueilli dans les limites des places disponibles, et que, s’il en reste, les enfants sont accueillis quelle que soit leur origine. Le fait qu’un parent travaille à Monaco est alors un élément favorable. L’accueil des enfants des travailleurs frontaliers se fait donc sans problème.

22.En matière de constitution des associations, Monaco est passé d’un régime d’autorisation à un régime de déclaration. Ce régime est établi par une loi de 2008, aux termes de laquelle les associations se forment librement sans autorisation ni déclaration préalable. Elles ont la capacité juridique dès qu’elles se soumettent à un certain nombre de formalités, notamment l’envoi au Ministère d’État d’une lettre comportant les statuts de l’association. Un contrôle est donc exercé dans ce domaine, notamment a posteriori puisque toute association peut être légalement dissoute si son objet est contraire à la loi, si elle porte préjudice aux intérêts de Monaco, s’oppose aux libertés et droits fondamentaux, à l’ordre public et aux bonnes mœurs ou est de caractère sectaire.

23.En matière de naturalisation et d’ascendance des personnes naturalisées, le système en vigueur repose notamment sur la filiation et sur une politique de regroupement familial, mais il ne tient pas compte de l’État d’origine et prend en considération des critères objectifs portant notamment sur la bonne moralité et sur l’attachement aux valeurs et aux institutions de Monaco, ainsi qu’à l’effectivité des liens avec la Principauté. Il n’y a donc pas d’incidences déterminantes de l’ascendance. Il convient de noter que les demandes peuvent se faire à compter de dix ans de résidence à partir de l’âge de la majorité. Étant donné que la naturalisation relève du Prince souverain, cette condition de durée peut être réduite au cas par cas. Les liens familiaux jouent en faveur d’une demande mais il ne s’agit pas d’une condition exclusive.

24.M. Gastaud (Monaco) indique que le Code pénal monégasque prévoit que les juridictions peuvent infliger en matière criminelle des peines infamantes, y compris le bannissement, peine qu’aucune juridiction monégasque n’a infligée au cours des dernières décennies et qu’il est prévu d’abroger dans le cadre de la révision générale du Code pénal en cours.

25.M. Ravera (Monaco) dit que la ratification de la Charte sociale est à l’étude. Le Gouvernement princier a récemment saisi à ce sujet le Conseil d’État, organe consultatif composé de juristes éminents, et attend son rapport pour prendre une décision. La ratification du Protocole no 12 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales a également été retardée car Monaco partage les inquiétudes de nombreux États européens concernant ce protocole. Elle reste donc à l’étude.

26.M. Gastaud (Monaco) dit que la réserve de Monaco concernant l’article 4 de la Convention a été formulée en 1995, lors de la ratification de cet instrument. Depuis lors, le contexte a en partie changé car le droit interne monégasque a été modifié par la loi de 2005 sur la liberté d’expression et la loi de 2008 sur les associations. Dès lors, cette réserve, qui vise la liberté d’expression, les associations et la liberté de réunion, mérite sans doute un nouvel examen quant à sa pertinence.

27.M. Fillon (Monaco), donnant des précisions sur la communication des rapports aux organes conventionnels et les mesures visant à favoriser la promotion des droits de l’homme, rappelle que des communiqués de presse sont systématiquement publiés sur le site Internet du Gouvernement chaque fois que Monaco fait l’objet d’un examen devant l’un des organes conventionnels de l’Organisation des Nations Unies. Ces communiqués précisent quels éléments ont fait l’objet des débats et contiennent des liens Internet qui renvoient vers les rapports et les recommandations dont ils ont fait l’objet. L’accès à Internet étant totalement libre à Monaco, toutes les personnes intéressées peuvent prendre connaissance très facilement de ces documents.

28.Le Président invite la délégation monégasque à fournir au Comité des précisions concernant la différence entre la peine de bannissement et la déportation.

29.M. Gastaud (Monaco) précise que la déportation n’est pas une peine prévue par le Code pénal monégasque et que les juridictions monégasques ne peuvent donc pas l’infliger. De manière générale, la déportation, comme le bannissement, comporte l’éloignement du territoire pour la personne condamnée, mais étant donné qu’elle n’a jamais été prononcée à Monaco, il serait difficile d’en dire davantage.

30.M. d e Gouttes se dit très intéressé par le projet de loi en cours visant à introduire une disposition dans le Code pénal avec le double objectif de définir la discrimination raciale en conformité avec la Convention et de prévoir une circonstance aggravante pour la motivation raciste de l’infraction. Il pense que le Comité sera intéressé de prendre connaissance dans le prochain rapport de Monaco de l’évolution de cette loi. En effet, même losqu’il n’existe pas de phénomène raciste dans un pays, comme c’est le cas à Monaco, la loi et la justice pénale ont un rôle pédagogique et de proclamation de valeurs, et peuvent ainsi avoir une action préventive sur la société.

31.S’agissant de la réserve formulée par l’État partie concernant la liberté d’expression, M. de Gouttes rappelle la recommandation générale no 15 du Comité concernant l’interprétation de l’article 4 de la Convention. Le Comité y rappelle que l’interdiction de la diffusion de toute idée fondée sur la supériorité ou la haine raciale est compatible avec le droit à la liberté d’opinion et d’expression, tel qu’énoncé notamment dans la Convention. Cette observation amènera peut-être Monaco à évoluer dans l’interprétation de l’article 4 de la Convention.

32.M. Lindgren Alves souhaite savoir si les dialogues interreligieux qui ont lieu à Monaco sont organisés et encouragés par le Gouvernement ou s’il s’agit d’activités dont les différentes communautés religieuses prennent l’initiative. Par ailleurs, relevant que dans l’Église catholique un système hiérarchique oblige les croyants à se conformer aux décisions de leurs dirigeants religieux, il demande si c’est également le cas pour les autres religions, notamment pour les musulmans qui vivent à Monaco.

33.M. Murillo Martí nez demande de quelle façon le multiculturalisme peut contribuer à la cohésion sociale à Monaco, pays qui se caractérise notamment par la coexistence de quelque 126 nationalités.

34.M. Saidou voudrait savoir quelle est exactement la mission de la Cellule des droits de l’homme en matière de protection des droits fondamentaux. Il souhaite également savoir si c’est l’absence d’associations de la société civile qui empêche la création d’une institution nationale des droits de l’homme à Monaco.

35.M. Fillon (Monaco) indique, au sujet du projet de loi visant à modifier le Code pénal, qu’il partage l’avis exprimé par M. de Gouttes tendant à dire que ce type de disposition a un rôle pédagogique et de proclamation de valeurs. En ce qui concerne la réserve concernant les libertés d’expression, son gouvernement estime également que la liberté d’expression ne peut pas s’étendre à la diffusion d’idées racistes. Cela apparaît très nettement dans la loi sur la liberté d’expression que Monaco a votée récemment.

36.À propos du dialogue interreligieux, M. Fillon pourrait difficilement dire si les musulmans se conforment ou pas à ce que préconisent leurs dirigeants religieux; cependant, il précise que ce dialogue n’est pas institutionnalisé par le Gouvernement et qu’il s’inscrit dans le cadre de la coexistence des religions et du multiculturalisme qui se développe librement. Il ajoute à cet égard que le multiculturalisme contribue effectivement à la cohésion sociale car il fait profondément partie de l’identité de Monaco, État pacifique qui favorise le dialogue entre communautés. Cela se traduit par une société où les tensions sont peu nombreuses.

37.M. Ravera (Monaco) déclare que la Cellule des droits de l’homme protège les droits de l’homme surtout par son action de prévention. La Cellule suit attentivement les faits nouveaux au niveau international, l’adoption de nouvelles conventions, les nouvelles normes et jurisprudences, et alerte les autorités publiques, participant ainsi au travail législatif et à la définition de normes et de lois respectueuses des droits de l’homme. Elle protège également les droits de l’homme dans le cadre de ses activités d’information et de formation. Les formations font l’objet de communiqués de presse et sont également annoncées dans les médias.

38.À propos de la création éventuelle d’une institution nationale des droits de l’homme, M. Ravera répète que l’absence d’associations ou d’ONG consacrées aux droits de l’homme à Monaco est un fait révélateur d’une société paisible dans laquelle les droits fondamentaux et le racisme n’ont pas lieu de préoccuper les individus. C’est pourquoi Monaco ne souhaite pas créer une institution qui existerait sans répondre à une attente comme une coquille vide. Toutefois, la réflexion n’est pas fermée et une institution de ce type pourrait voir le jour à condition d’avoir une utilité.

39.M. Ewomsan salue la place que la Principauté de Monaco accorde à la démocratie directe, rendue possible notamment par la petite taille du pays. Il juge surprenant qu’elle ne rencontre pas de problèmes liés à la présence des Roms sur son territoire, à l’instar des autres pays d’Europe. Aussi aimerait-il savoir si l’État partie est un lieu de passage de la population rom et, dans l’affirmative, de quelle manière les membres de ce groupe de population sont traités.

40.M. Fillon (Monaco) n’a pas connaissance de l’existence d’un tel problème à Monaco. Il s’engage à fournir un complément d’information si ce problème se posait dans son pays.

41.M. Amir (Rapporteur pour Monaco) remercie la délégation monégasque pour la précision et la concision de ses réponses. Il dit que Monaco est un espace réduit, urbain, dépourvu d’agriculture, qui a assis son développement sur le commerce international. Il salue la politique d’assistance économique et financière de Monaco en faveur des pays en développement, à laquelle ce pays a toujours consacré une part importante de son PIB.

42.M. Amir dit que Monaco n’est pourtant pas un «petit pays»: un pays existe en effet non par sa taille mais par son outil institutionnel et par l’état de droit qui y règne et en vertu duquel se mesure le respect qui lui est dû. Or, grâce à la dynastie des Grimaldi, la Principauté a su rester proche de son peuple et gérer ses affaires au mieux. Il constitue en ce sens un exemple à suivre.

43.M. Amir se félicite que ce soit la Cellule des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui se charge d’une partie des programmes de formation des magistrats ainsi que des membres de la police. À cet égard, il se félicite que ces derniers soient au nombre de 500 pour une population de 35 000 habitants.

44.Malgré sa spécificité due à son histoire et à sa géographie, Monaco tient compte du droit international et des conventions internationales. Monaco est également un exemple de multiculturalisme, puisque près de 130 nationalités coexistent sur son territoire.

45.Cependant, la Principauté de Monaco ne devrait pas invoquer le fait qu’elle n’est pas membre de l’Organisation internationale du Travail pour négliger les droits des travailleurs, notamment en matière de division du travail ou de sécurité sociale. En effet, des conventions internationales, notamment au niveau européen, établissent des garanties qui doivent être appliquées, en tout cas dans la fonction publique. Il serait souhaitable que l’État partie réfléchisse aux moyens d’adhérer à ces conventions.

46.Enfin, M. Amir estime que le XXIe siècle devra être celui de la mise en œuvre de la Charte internationale des droits de l’homme dans le monde. En effet, compte tenu des risques majeurs qu’encourt la communauté internationale dans son ensemble du fait des changements climatiques, le législateur ne peut plus faire abstraction de ces droits, et ce, quel que soit le régime économique, politique, social, religieux, idéologique ou stratégique envisagé. Les catastrophes naturelles et le réchauffement climatique frappent souvent les plus démunis, comme cela a été le cas en Haïti, et des pays comme le Bangladesh risquent d’être submergés demain. Tous ces événements ne feront qu’accentuer les inégalités. La communauté internationale devra donc se poser la question de savoir comment lutter contre les discriminations qui en découleront.

47.M. Amir tient à rendre un vibrant hommage à la famille régnante de Monaco pour la qualité du sixième rapport périodique que l’État partie a soumis au Comité.

48.Le Président remercie à son tour la délégation monégasque pour la qualité de ses réponses et salue celle du sixième rapport périodique soumis au Comité. Il indique que ce dernier veillera au suivi d’un certain nombre des recommandations qui figureront dans les observations finales qui seront publiées à l’issue de la session en cours. La Principauté de Monaco sera invitée à fournir au Comité des informations complémentaires sur la mise en œuvre desdites recommandations avant la présentation de son septième rapport périodique.

49.M. Fillon (Monaco) remercie le rapporteur pour ses observations, dont le Gouvernement monégasque tirera grand profit. Il ajoute que son pays s’est efforcé de décrire au mieux et dans la plus grande transparence l’esprit qui préside à la politique législative de Monaco ainsi que les textes eux-mêmes.

50.M. Fillon souligne que les membres de la délégation monégasque appartiennent à plusieurs secteurs de l’administration qui ont travaillé conjointement pour élaborer le rapport et préparer les réponses orales. Cet esprit d’équipe a également permis d’instaurer un dialogue constructif avec le Comité, dont un compte rendu détaillé sera fait au Gouvernement monégasque.

La séance est levée à 12 h 5.