Nations Unies

CERD/C/SR.2133

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

22 février 2012

Original: français

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Quatre-vingtième session

Compte rendu analytique de la 2133 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le jeudi 16 février 2012, à 15 heures

Président: M. Cali Tzay (Vice-Président)

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Quinzième à vingtième rapports périodiques du Koweït

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Quinzième à vingtième rapports périodiques du Koweït ( CERD/C/KWT/15-20; CERD/C/KWT/Q/15-20)

1. Sur l’invitation d u Président, la délégation koweï tienne prend place à la table du Comité.

2.M. Marafi (Koweït) dit que son pays, qui est partie aux principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, notamment la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, a pris une série de mesures législatives et réglementaires pour combattre la discrimination raciale sur son territoire, tout en s’efforçant de collaborer avec la communauté internationale afin d’atteindre l’objectif commun qui vise à affirmer les principes des droits de l’homme, dont la lutte contre la discrimination est un des aspects fondamentaux.

3.De nombreux mécanismes ont été établis pour assurer la protection et la promotion des droits de l’homme. Le Comité des droits de l’homme, créé par le Ministère de l’intérieur en 2001, est chargé de traiter les plaintes contenant des allégations d’atteintes aux droits de l’homme, d’instruire ces plaintes et d’émettre un avis à leur sujet; le Comité des affaires féminines, créé en 2002, suit les questions relatives aux femmes koweïtiennes sur les plans local et international; le Comité supérieur de l’enfance et de la famille, créé en 2005, passe en revue les lois en la matière; le Haut Comité des droits de l’homme,créé en2008 et présidé par le Ministre de la justice, est responsable des questions relatives aux droits de l’homme sur les plans national, régional et international.

4.Le Koweït a pris de nombreuses mesures pour promouvoir les droits des femmes. Les Koweïtiennes sont toujours plus nombreuses à assumer les plus hautes fonctions dans les domaines économique et social aussi bien que culturel. Il convient toutefois de noter qu’aucune n’a été élue lors des élections législatives du 2 février 2012.

5.La législation koweïtienne garantit l’égalité en matière d’emploi et interdit la discrimination salariale entre hommes et femmes. La Constitution et la loi garantissent le droit de fonder des syndicats et de s’y affilier. Le législateur koweïtien a garanti ce droit à tous, Koweïtiens ou étrangers, sans distinction d’origine, de race ou de nationalité.

6.Les conditions d’exercice du droit à la nationalité relèvent de la souveraineté du pays. Le Koweït a procédé à plusieurs amendements de la loi de 1959 relative à la nationalité dans le but d’éliminer toutes les formes de discrimination entre les personnes et d’accorder la nationalité koweïtienne à quiconque réunit les conditions prévues par la loi pour son obtention. Plusieurs décrets de l’Émir promulgués en 1999 permettent d’octroyer la nationalité koweïtienne aux enfants et petits-enfants d’une personne naturalisée qui n’ont pas eu la possibilité de l’obtenir au titre de la loi relative à la nationalité et de naturaliser les enfants nés de mère koweïtienne et de père étranger.

7.Le problème des résidents étrangers en situation irrégulière est un des principaux et plus anciens problèmes auxquels est confronté le Koweït. Le Comité exécutif pour les questions relatives aux résidents étrangers en situation irrégulière a été créé par décret en 1996 pour apporter des solutions à ce problème, en prenant en compte ses dimensions et ses conséquences actuelles et futures sur les plans humain, sécuritaire, social, culturel, économique, national, moral et international. Le Koweït traite de façon humaine et civilisée quiconque vit sur son territoire. Une commission spéciale, créée en 2006 pour suivre la situation des personnes concernées, a permis à 23 000 d’entre elles de régulariser leur situation. Le Koweït compte aujourd’hui 93 334 résidents illégaux qui bénéficient d’un certain nombre de services, notamment dans les domaines de la santé, de l’éducation, du logement et de la sécurité sociale. Suite aux engagements pris en 2010 par le Koweït, dans le cadre de l’Examen périodique universel, les autorités ont établi le Bureau central des résidents illégaux, chargé d’améliorer la situation juridique et sociale des intéressés.

8.Le Koweït accorde une grande importance aux travailleurs étrangers, comme en témoigne l’adoption d’une loi visant à promouvoir et à protéger leurs droits ainsi qu’à réglementer leurs conditions de travail. Un décret ministériel de 2010 exige des agences pour l’emploi et des employeurs qu’ils signent un contrat avec les travailleurs domestiques afin que ces derniers bénéficient de la protection juridique la plus large possible. Le Service des travailleurs domestiques a été institué pour délivrer des autorisations aux agences pour l’emploi et surveiller leurs activités afin de s’assurer qu’elles n’exploitent pas ces travailleurs; un centre d’accueil a en outre été mis en place à l’intention des travailleurs domestiques en conflit avec leur employeur.

9.Le Parlement koweïtien est saisi d’un projet de loi sur la lutte contre la traite des êtres humains qui prévoit l’emprisonnement à vie pour les auteurs de tels actes et de longues peines pour leurs complices, tout en offrant une protection complète aux victimes. Une formation sur le phénomène de la traite et ses liens avec la criminalité transnationale organisée est en outre dispensée aux policiers.

10.M. Avtonomov (Rapporteur pour le Koweït) regrette que plus de dix ans après la présentation de son dernier rapport périodique, le Koweït ne soumette au Comité qu’un document de 18 pages, qui, de surcroît, n’est pas pleinement conforme aux principes directeurs du Comité concernant l’établissement des rapports des États parties.

11.Notant que l’article 29 de la Constitution koweïtienne consacre le principe d’égalité et interdit la discrimination «fondée sur la race, l’origine, la langue ou la religion», il fait observer que cette définition n’est pas pleinement conforme à celle figurant à l’article premier de la Convention, aux termes duquel l’expression «discrimination raciale vise toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique».

12.Il note que le Koweït a signé la Charte arabe des droits de l’homme et demande des précisions sur l’état d’avancement de la procédure d’approbation de ce texte par l’Assemblée nationale préalable à sa ratification. Constatant que le Koweït a ratifié la Convention en 1968 sans émettre de réserve, le Rapporteur souhaite savoir si les autorités envisagent de ratifier l’amendement à l’article 8, qui prévoit que les États parties prennent à leur charge les dépenses des membres du Comité pour la période où ceux-ci s’acquittent de fonctions au Comité, et de faire la déclaration prévue à l’article 14, reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant de personnes ou groupes de personnes se plaignant d’être victimes d’une violation des droits énoncés dans la Convention.

13.Étant donné qu’en vertu de l’article 70 de la Constitution koweïtienne les instruments internationaux ont force de loi, il serait intéressant de savoir si la Convention a déjà été appliquée par les tribunaux, ou si, comme l’affirment certaines organisations non gouvernementales (ONG), elle n’est pas incorporée dans le droit interne de l’État partie.

14.Se félicitant des nombreux progrès enregistrés dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale, le Rapporteur demande si le Haut Comité des droits de l’homme est conforme aux Principes de Paris et quel est son mode de fonctionnement.

15.La délégation pourrait indiquer en outre ce que l’État a fait depuis l’examen de son précédent rapport périodique pour protéger les droits des travailleurs domestiques étrangers et des autres groupes d’étrangers vulnérables, ainsi que pour régler le problème d’accès des Bidouns à la nationalité koweïtienne − un complément d’information sur ces personnes sans nationalité serait le bienvenu en particulier sur leur nombre exact dans l’État partie (250 000 en 1990, 125 000 en 1991 après la guerre du Golfe et environ 92 000 selon des données de 2008) et leur situation particulière. Les Bidouns semblent être divisés en trois catégories: ceux qui habitaient dans le pays avant 1920 et peuvent à ce titre prétendre à la nationalité koweïtienne en vertu de l’article premier de la loi sur la nationalité, ceux qui, nomades, sont venus de pays voisins après cette date et ceux qui ne sont pas parvenus à faire régulariser leur situation avant que les nomades soient exclus du champ d’application de ladite loi. Beaucoup de ces individus vivent dans le pays depuis les années 1950 et ont servi dans l’armée ou dans la police mais ne disposent pas de documents officiels attestant de leur présence de longue date sur le territoire et n’apparaissent pas dans les statistiques nationales; ils sont toujours perçus comme une menace pour la sécurité nationale. En outre, ils sont privés des droits dont jouissent les Koweïtiens car faute de documents d’identité, ils ne peuvent sortir du territoire, créer d’entreprise ou travailler dans la fonction publique.

16.Il serait souhaitable que les Koweïtiennes mariées à un étranger puissent transmettre leur nationalité à leur enfant automatiquement au même titre que les Koweïtiens mariés à une étrangère, ce qui n’est pas le cas actuellement.

17.Le Comité aimerait avoir des précisions sur le système de la kafalah auquel sont soumis les travailleurs migrants, les rendant tributaires de l’employeur qui les parraine et restreignant ainsi leurs possibilités de changer d’emploi à des conditions bien précises, savoir si l’État partie envisage de réviser ce système et, dans l’affirmative, en quoi les travailleurs migrants, exclus du champ d’application du Code du travail, y gagneraient. Il aimerait en outre savoir si les travailleurs migrants employés comme domestiques − pour la plupart des femmes venues d’Inde, du Pakistan, de Sri Lanka ou de Malaisie, qui ne parlent que leur langue vernaculaire et vivent dans des conditions de quasi-captivité chez leur employeur ont le droit de se syndiquer.

18.Le Rapporteur demande quelle école juridique (madhab) est suivie au Koweït, si les chiites, qui constituent 30 % de la population, relèvent de tribunaux qui leur sont propres, si le droit musulman s’applique à tous les ressortissants koweïtiens, musulmans ou non, et si les non-ressortissants, les Bidouns et les étrangers peuvent être les bénéficiaires du produit de l’aumône obligatoire (zakat) ou non obligatoire (sadaqa).

19.M me Dah, aprèsavoir salué l’engagement de l’État partie en faveur de la promotion et de la protection des droits de l’être humain en général et de la femme en particulier, regrette l’absence de document de base commun et de renseignements détaillés sur la composition de la population. Même si cette population semble homogène, il serait utile de connaître l’origine nationale et ethnique des nombreux non-ressortissants vivant au Koweït.

20.Elle demande si l’article 29 de la Constitution − qui dispose que «tous [les Koweïtiens] sont égaux devant la loi, en dignité ainsi qu’en droits et en devoirs, sans distinction de race, d’origine, de langue ou de religion» − prime l’article 70 de ce même texte, qui dispose qu’un traité (comme la Convention) a force de loi dès lors qu’il a été signé, ratifié et publié au Journal officiel.

21.La délégation koweïtienne pourrait indiquer si, depuis la présentation de son précédent rapport, l’État partie a bien modifié le Code pénal comme il s’était engagé à le faire et incrimine désormais l’incitation à la haine raciale, et, dans l’affirmative, si des fonctionnaires ont déjà été poursuivis en justice pour ce motif ou auraient fait l’objet d’une procédure et/ou d’une sanction administrative.

22.En outre, il serait intéressant de savoir si l’État partie s’est employé à améliorer la qualité de l’enseignement relatif aux droits de l’homme dispensé aux fonctionnaires et aux personnes chargées de faire respecter la loi, comme il y a été encouragé lors de l’Examen périodique universel auquel il s’est soumis en 2010, et s’il entend réviser la loi sur la nationalité afin de permettre aux femmes koweïtiennes de transmettre sans restrictions leur nationalité à leur mari étranger et à leurs enfants.

23.Croyant comprendre que l’octroi de la nationalité aux personnes en situation irrégulière est assez complexe, car il est conditionné par la durée de résidence, la religion du requérant et les quotas, Mme Dah demande des précisions sur ce point. Elle souhaiterait en outre savoir ce que l’État partie compte faire pour régler le problème de l’apatridie et de la situation d’illégalité dans laquelle se trouvent les Bidouns. Se félicitant que le Koweït se soit engagé, dans le cadre de l’Examen périodique universel, à étudier la possibilité de ratifier la Convention relative au statut des réfugiés et les Protocoles s’y rapportant, elle demande un complément d’information sur la situation des demandeurs d’asile et des réfugiés, qui n’ont souvent pas accès aux services sociaux ou à l’emploi.

24.Elle souhaiterait savoir en outre s’il est prévu d’adopter une loi conforme aux prescriptions de la Convention contre la criminalité transnationale organisée, sachant que l’État partie est exposé au risque de traite d’êtres humains transfrontières vu la très forte proportion de travailleurs migrants. Elle salue les progrès accomplis en matière de protection des travailleurs domestiques et de réglementation du secteur privé et espère que les efforts dans ce domaine vont se poursuivre.

25.M. Saidou demande si l’État partie envisage de ratifier le Protocole additionnel à la Convention contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Il aimerait en outre des détails sur les attributions et la composition du Haut Comité des droits de l’homme.

26.M. de Gouttes demande si une loi incorporant la Convention dans l’ordre juridique interne a été adoptée et si la Convention a déjà été appliquée par les tribunaux.

27.Il s’interroge surles fonctions respectives du Comité des droits de l’homme et du Haut Comité des droits de l’homme. Il salue l’État partie pour l’importance qu’il semble apporter à l’éducation aux droits de l’homme et à la participation de la société civile à la vie publique et demande quelles associations de la société civile ont participé à l’élaboration du rapport.

28.Il demande quelle suite a été donnée au décret ministériel no 1182/2010 du Ministère de l’intérieur, qui renforce les droits des travailleurs domestiques et vise à améliorer leurs conditions de travail, et au décret du Ministère des affaires sociales interdisant à l’employeur de confisquer le passeport des employés étrangers sous peine de poursuites, quel est le bilan du Centre d’accueil pour les travailleurs étrangers et si la proposition de loi visant à modifier le décret-loi no 15 de 1979 relatif à l’interdiction, pour les fonctionnaires, d’établir une distinction entre les usagers des services administratifs est à l’examen.

29.Sachant que les Bidouns ne peuvent prétendre à la nationalité koweïtienne et sont considérés comme résidents illégaux, M. de Gouttes demande quelles mesures l’État partie envisage de prendre en vue de mieux intégrer ce groupe de population. Il aimerait en outre avoir des précisions sur le rôle du Comité exécutif pour les questions relatives aux résidents étrangers en situation irrégulière et savoir si l’État partie envisage de ratifier la Convention relative au statut des apatrides et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie.

30.M. Murillo-Martínez demande quelles stratégies l’État partie met en œuvre pour faciliter l’intégration des étrangers et favoriser l’unité nationale, eu égard à la grande diversité de sa population.

31.Il aimerait savoir si l’État partie envisage d’abolir la peine capitale et s’il existe des données ventilées sur son application.

32.Il faudrait en outre indiquer s’il est prévu de ratifier la Convention (no189) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur les travailleuses et travailleurs domestiques et si des actions de sensibilisation ont été menées dans le cadre de l’Année des personnes d’ascendance africaine.

33.M. Diaconu félicite l’État partie pour les progrès accomplis dans les domaines de l’éducation et de la protection des travailleurs migrants. Constatant que la législation de l’État partie se borne à proclamer l’égalité entre tous les citoyens, il souligne qu’il importe au plus haut point de définir et d’interdire expressément la discrimination raciale dans la loi afin que les victimes présumées puissent faire valoir leurs droits. Il rappelle qu’en vertu de l’article 4 de la Convention, les États parties sont tenus d’incriminer pénalement tous les actes visés dans la Convention, ce qui ne semble pas avoir été fait dans le droit koweïtien.

34.Il fait observer que le rapport ne fournit aucune données démographiques sur les Bidouns et demande s’il a été envisagé de leur accorder un statut de résidents permanents, afin de remédier en partie à leur situation d’apatridie. Il engage l’État partie à reconsidérer sa politique concernant l’enregistrement des naissances des enfants bidounset l’octroi de carte d’identité. Il demande si les travailleurs palestiniens peuvent obtenir la nationalité koweïtienne. Enfin, il demande si le temps n’est pas venu d’envisager d’abolir certaines dispositions du droit koweïtien, héritées pour des raisons sécuritaires de la première guerre du Golfe en 1991, qui instituent des restrictions attentatoires aux droits de certaines catégories de la population, en particulier les Bidouns.

35.M. Vá z quez demande s’il est vrai que l’utilisation de manuels scolaires qui traitent de l’holocauste est interdite dans les écoles.

36.M. Kemal félicite le Koweït pour les résultats atteints en ce qui concerne les objectifs du Millénaire pour le développement, notamment en matière d’accès à l’éducation et à la santé.

37.Il constate que le pays accueille de très nombreux travailleurs migrants, qui constituent une précieuse source de main-d’œuvre pour le Koweït et font vivre des milliers de personnes dans leurs pays d’origine, mais qu’ils sont victimes de nombreuses violations de leurs droits: confiscation de leur passeport, obligation de rembourser leurs dettes aux intermédiaires qui ont facilité leur recrutement, contrats de travail opaques, salaires plus bas que prévu, violences et abus divers. M. Kemal demande s’il est prévu d’instituer un organe de protection des travailleurs migrants ou un bureau du médiateur, qui leur permette de faire valoir leurs droits devant la loi. Il demande si la proposition d’interdire l’utilisation d’enfants jockeys et de relever l’âge minimum à 18 ans a été suivie d’effets.

38.M. Thornberry demande combien d’affaires d’incitation à la haine raciale et de plaintes pour diffusion de propos racistes ont été recensées. Il souhaiterait en outre savoir combien de Bidouns pratiquent encore le nomadisme dans l’État partie.

39.Notant que dans ses observations finales relatives au deuxième rapport périodique de l’État partie, le Comité des droits de l’homme a exprimé des inquiétudes au sujet de la discrimination envers les hindous, les sikhs et les bouddhistes s’agissant des possibilités de naturalisation et de liberté de culte, M. Thornberry recommande à l’État partie de prendre des mesures pour y remédier. Des précisions sur la suite donnée à cette recommandation seraient bienvenues car le Comité s’intéresse aussi à la discrimination fondée sur la religion dans la mesure où elle se combine avec la discrimination fondée sur l’origine nationale, ce qui est le cas en l’espèce.

40.Un commentaire de la délégation serait bienvenu sur les points de convergence entre la notion de «wastiya» (modération) apparaissant au paragraphe 130 des versions arabe et anglaise du rapport et certaines valeurs mises en exergue à l’article 7 de la Convention, à savoir la tolérance et l’amitié entre les groupes raciaux ou ethniques. Enfin, il serait intéressant de savoir quelle vision l’État partie a de lui-même et s’il considère comme étant toujours d’actualité le point de vue formulé en 1997 par le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et l’intolérance qui y est associée dans son rapport sur sa visite au Koweït, selon lequel il n’yaurait pas de manifestations de discrimination contre les étrangers «mais une “préférence nationale” inavouée d’une population en minorité démographique dans son propre pays et frileuse face à une présence étrangère massivement majoritaire dans le domaine de l’emploi».

41.M. Lindgren Alves demande si les étrangers vivant au Koweït sont compris dans les 3 millions d’habitants que compte le pays selon le rapport à l’examen. Il s’étonne de lire dans ce rapport que les ministères emploient des personnes en situation irrégulière et que l’État a pris des mesures pour que leurs enfants puissent être scolarisés et se demande donc si les autorités koweïtiennes ne pourraient pas régulariser ces personnes et prendre des mesures afin de garantir que les enfants de tous les étrangers en situation irrégulière vivant dans le pays puissent aller à l’école.

42.M. Ewomsan fait observerque même si l’État partie n’est pas directement responsable de la discrimination et de l’exploitation envers les travailleurs migrants en situation irrégulière, dont ceux employés comme domestiques, il est tenu de prendre des mesures législatives, administratives et judiciaires pour prévenir et combattre ces violations et qu’il pourrait envisager de coopérer avec les pays d’origine des intéressés en vue de l’octroi de titres de séjour à ces travailleurs.

43.Le Président note que l’État partie s’est doté d’un comité des affaires féminines mais que les travailleuses migrantes continuent, de même que les travailleurs migrants, à faire l’objet d’une forme de discrimination si ancrée dans les mœurs qu’elle n’est plus perçue comme telle. La délégation est invitée à apporter des précisions sur la situation des femmes et à indiquer combien de plaintes pour discrimination ont été déposées par des femmes et des travailleurs migrants, si un revenu minimum a été fixé dans l’État partie et quels en sont les bénéficiaires.

44.Il note que le Koweït verse des contributions généreuses à plusieurs institutions des Nations Unies, ce qui témoigne de son engagement en faveur des droits de l’homme.

45.M. Marafi (Koweït) souligne que la volonté de son pays de combattre toutes les discriminations est illustrée par la composition de la délégation, qui compte des représentants de divers groupes ethniques et religieux (chrétiens, sunnites et chiites) ainsi qu’une femme et une personne handicapée.

La séance est suspendue à 17 h 40; elle est reprise à 17 h 45.

46.M. Jafar (Koweït) indique que l’article 21 de la loi no 3 sur les publications promulguée en 2006 interdit la publication de tout contenu portant atteinte à la dignité d’un individu ou constituant une incitation à la haine contre un groupe quel qu’il soit. De même, l’article 11 de la loi no 61 de 2007 sur les médias audiovisuels dispose que la diffusion de contenus portant atteinte à la dignité et à la religion d’un individu ou d’un groupe ou prônant la haine contre un groupe donné est passible d’une amende allant de 10 à 30 000 dollars des États-Unis.

47.En 2010, 709 plaintes pour incitation à la haine ont été déposées, dont 576 ont été portées devant les tribunaux. Parmi ces affaires, 64 ont abouti à un non-lieu. Le Parlement a été saisi d’un projet de loi visant à lutter contre le fanatisme religieux et le tribalisme et à interdire et punir l’incitation à la haine fondée sur l’appartenance nationale ou ethnique ainsi que la diffusion d’idées susceptibles de porter atteinte à l’unité nationale.

48.Le Conseil de la fonction publique, créé en application du décret-loi no 15 de 1979 sur la fonction publique, a notamment pour tâche d’exécuter des plans en faveur de l’égalité de traitement au sein de la fonction publique. Il veille notamment à ce qu’en cas de décès ou d’incapacité de travail d’un fonctionnaire, son conjoint touche des allocations familiales, quelle que soit la nationalité de ce conjoint. Toutes les décisions des tribunaux administratifs reposent sur le principe de non-discrimination entre nationaux et étrangers et entre hommes et femmes. En 2010, les juridictions administratives ont rendu 2 373 jugements dans des affaires de discrimination au travail et beaucoup de femmes victimes d’injustices, notamment en matière de promotion professionnelle, ont obtenu des réparations financières et morales.

49.M. Alsulaimi (Koweït) dit que la loi no 24 de 1962 sur les associations interdit clairement les organisations prônant la haine, le fanatisme et le tribalisme et dispose que les autorités compétentes peuvent prononcer la dissolution du conseil d’administration de ces organisations.

La séance est levée à 18 heures.