CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/SR.165012 août 2004

Original: FRANÇAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante‑cinquième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1650e SÉANCE

tenue au Palais des Nations, à Genève,le jeudi 5 août 2004, à 15 heures

Président: M. YUTZIS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION(suite)

Quinzième à dix-septième rapports périodiques du Bélarus

La séance est ouverte à 15 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION(point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Quinzième à dix-septième rapports périodiques du Bélarus (CERD/C/431/Add.9; HRI/CORE/1/Add.70)

1.Sur l’invitation du Président, la délégation bélarussienne prend place à la table du Comité.

2.M. MALEVICH (Bélarus) dit que la composition ethnique de la population du Bélarus ne s’est pas sensiblement modifiée pendant la période couverte par le rapport et que les relations interethniques continuent à se caractériser par la stabilité et l’absence de conflits fondés sur l’appartenance ethnique, linguistique ou religieuse, comme en témoignent notamment les résultats de l’enquête menée par le Comité des affaires religieuses et ethniques auprès des responsables des associations publiques nationales, conformément à une recommandation formulée par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale à l’issue de l’examen du quatorzième rapport périodique du Bélarus.

3.La stabilité de la situation est due à la politique ethnique du Bélarus, qui repose sur l’idée que la nation bélarussienne est d’abord une société de citoyens plutôt qu’une communauté ethnique, et à l’importance que les autorités bélarussiennes attachent au respect des principes et des normes du droit international, en particulier ceux consacrés dans les instruments relatifs aux droits de l’homme, dont les principaux ont été ratifiés par le Bélarus. En outre, l’article 50 de la Constitution dispose que chacun a le droit de préserver son appartenance ethnique et que nul ne peut être contraint de l’indiquer. Toute apologie de la haine ethnique, raciale ou religieuse est interdite et punie par la loi. La liberté du choix de la langue de communication et d’éducation est garantie. La Constitution dispose également que toutes les religions et les confessions sont égales devant la loi (art. 16) et interdit toute activité des organisations religieuses dirigée contre la concorde civile ou comportant des violations des droits et libertés civils.

4.Un certain nombre de textes normatifs consacrent le principe d’égalité, notamment le Code pénal, le Code civil et le Code du travail, dont l’article 14 interdit toute restriction des droits relatifs au travail fondée notamment sur le sexe, la race, l’origine ethnique, la langue ou la religion. Les étrangers et les apatrides se trouvant au Bélarus sont égaux devant la loi, indépendamment de leur origine, appartenance ethnique, sexe, langue et convictions religieuses. En vertu de la loi sur les minorités nationales, tous les citoyens du Bélarus bénéficient d’une protection égale de l’État. Enfin, la loi sur la presse et les autres médias interdit l’emploi des médias pour fomenter l’intolérance et la discorde ethniques, raciales ou religieuses.

5.Le Bélarus a respecté ses engagements au titre de la Convention en mettant en place un cadre juridique réprimant diverses infractions à caractère raciste. Le Code pénal dispose en particulier que le fait qu’une infraction soit dictée par la haine raciale, ethnique ou religieuse constitue une circonstance aggravante, que les atteintes graves à la personne commises au motif de l’appartenance raciale, nationale ou ethnique sont passibles de peines pouvant aller jusqu’à la réclusion à vie et la peine de mort et que l’incitation à la haine raciale est punie d’une peine privative de liberté pouvant atteindre 12 ans.

6.Le droit de demander satisfaction ou réparation juste et adéquate devant les tribunaux en cas de dommage est garanti et peut être invoqué aussi bien en cas de préjudice matériel que de préjudice moral. Les citoyens sont égaux devant la loi et l’action pénale s’exerce sur la base de ce principe, indépendamment de l’origine, de l’appartenance raciale ou ethnique ou du sexe, entre autres.

7.L’article 16 de la Constitution dispose que toutes les religions sont égales devant la loi. Le rapport de la population à la religion s’est radicalement modifié comme le montre l’enquête sociologique qui a fait apparaître qu’en 1989, 22 % des personnes interrogées se disaient croyantes, mais que cette proportion était passée à 37,5 % en 1998. Le nombre de communautés religieuses a presque triplé entre 1989 et 2002 pour atteindre 2 825. Cette évolution a rendu nécessaire l’adoption, en 2002, de la loi sur la liberté de conscience et les organisations religieuses, qui établit le droit de chacun à la liberté de conscience et de religion, ainsi que le droit à l’égalité de toutes les religions devant la loi.

8.Les communautés ethniques font partie intégrante du peuple bélarussien et les relations entre les communautés sociales, ethniques et autres se fondent sur les principes de l’égalité devant la loi et du respect des droits et intérêts de chaque communauté (art. 14 de la Constitution); l’État veille à préserver le patrimoine historique et culturel et le libre épanouissement des cultures de toutes les communautés ethniques vivant en République du Bélarus (art. 15). La loi sur les minorités nationales garantit l’égalité aux personnes appartenant à une minorité indépendamment de l’ancienneté de leur présence dans le pays, en particulier dans les domaines économique, social et culturel. Il existe actuellement 122 organisations représentatives des 24 minorités nationales, dont certaines publient des journaux et des magazines culturels. L’enseignement des langues et de la culture des minorités est assuré dans deux écoles où l’enseignement est dispensé en polonais, dans deux autres où il se fait en lituanien et dans 65 écoles fréquentées les jours de repos par près de 5 000 personnes d’une douzaine de nationalités différentes.

9.Aux termes de la loi sur la culture, l’objectif déclaré de l’État est de faire renaître et de développer la culture nationale bélarussienne et les cultures des communautés ethniques vivant au Bélarus, et les crédits nécessaires à cette fin sont prélevés sur les budgets de nationaux et locaux; des subventions sont en outre accordées à la publication de livres sur les minorités nationales qui vivent au Bélarus. Le Conseil de coordination pour les affaires communautaires et ethniques, mis en place en 1998, a pour mission de promouvoir la réalisation des droits des citoyens bélarussiens des divers groupes ethniques; il se compose de responsables d’associations ethniques et culturelles et de représentants des ministères compétents. Enfin, il convient de souligner qu’aucun parti politique fondé sur le principe de l’appartenance ethnique ou ayant exclusivement des objectifs ethniques n’est actuellement enregistré au Bélarus.

10.On constate, à l’analyse, que les manifestations de racisme, de xénophobie et d’intolérance qui se produisent dans le pays sont imputables à des influences extérieures et non pas à des problèmes internes. En 1998‑1999, le journal Slavyanskaya Gazeta, qui avait publié des articles incitant à la haine ethnique et religieuse, a été interdit à la suite d’une procédure régulière et a cessé d’exister. Au cours de la période 1998‑2002, des actes de vandalisme ont été commis dans des cimetières juifs de plusieurs villes, mais aussi dans des cimetières où reposaient des personnes non juives. Dans toutes ces affaires, la justice a immédiatement réagi en prenant les mesures nécessaires.

11.Au cours de la période allant de l’établissement du dernier rapport périodique à mars 2003, les services chargés de l’application des lois du Bélarus ont enquêté sur deux affaires pénales tombant sous le coup de l’article 130 du Code pénal (incitation à la haine ou à la discorde raciale, ethnique ou religieuse) et ont déféré leurs auteurs à la justice, tandis qu’en 2000 une personne a été condamnée à une peine de prison avec sursis au titre de l’article 71 du Code pénal de 1960. À l’issue d’une action pénale engagée le 11 mars 2002, des membres d’un groupe de skinheads ont été reconnus coupables d’agressions à l’encontre de réfugiés de pays asiatiques et africains étudiant à la faculté de médecine de Vitebsk et ont été condamnés à diverses peines de prison, que la Cour suprême a confirmées en 2003. À la suite de cette affaire et à l’initiative du Comité des affaires religieuses et ethniques, les pouvoirs locaux et les organes judiciaires ont élaboré de concert tout un ensemble de mesures de prévention.

12.Le 15 novembre 2001, le Procureur du district de Svisloch a adressé au président du Comité exécutif de ce district une requête visant une directive en vertu de laquelle les Roms ne pouvaient être employés par les chefs d’exploitations agricoles qu’avec l’autorisation du Département des affaires intérieures, ce qui limitait indûment les droits de citoyens au motif de l’origine ethnique et constituait une infraction à la Constitution et au Code du travail. Il a été fait droit à la requête et la directive en cause a été abrogée.

13.Un recueil des instruments internationaux et des lois bélarussiennes se rapportant à la protection des droits des minorités nationales a été publié en 1999, puis complété et réédité en 2004, et largement diffusé. En outre, les questions relatives aux relations internationales et interethniques et à la prévention de la discrimination font partie des programmes d’enseignement à tous les niveaux.

14.M. TANG (Rapporteur pour le Bélarus) note avec satisfaction que le Bélarus a adopté une série de lois pour combattre la discrimination, dont: la loi sur la nationalité, qui garantit l’attribution de la nationalité bélarussienne à toute personne résidant de manière permanente sur le territoire depuis 1991; la loi sur la liberté de conscience et les organisations religieuses, qui réprime toute restriction au droit d’exercer sa religion; la loi sur les minorités nationales, dont l’article 3 interdit toute restriction directe ou indirecte des droits des citoyens et tout privilège fondé sur l’appartenance à une minorité ethnique, alors que son article 12 dispose que tous les citoyens de la République du Bélarus, quelle que soit leur nationalité, bénéficient d’une protection égale de l’État; la loi sur la presse et les autres médias, qui interdit l’emploi des médias pour fomenter l’intolérance et la discorde ethniques, raciales ou religieuses. En outre, le Code pénal entré en vigueur le 1er janvier 2001 punit les infractions dictées par la haine ou la discorde raciale, ethnique ou religieuse, et le Code du travail punit toute restriction des droits relatifs au travail au motif de la race ou de l’origine ethnique.

15.Au sujet de l’affaire décrite au paragraphe 106 du rapport à l’examen, M. Tang souhaite savoir ce que les autorités entendent faire pour retrouver M. Ryakhov inculpé en vertu de l’article 130 du Code pénal pour avoir qualifié d’«individu d’origine ethnique criminelle» M. Shapiro, président par intérim du tribunal central de district. Il souhaite aussi savoir si des directives tendant à restreindre indûment les droits des Roms en matière d’emploi ont été adoptées dans d’autres districts du pays ou s’il s’agit là d’un cas propre au district de Svisloch.

16.Par ailleurs, il serait intéressant de savoir quel est le pourcentage de représentants appartenant aux divers groupes ethniques au sein des institutions politiques centrales et locales, sachant qu’en droit bélarussien, l’appartenance ethnique ne peut avoir d’effet sur l’exercice du droit d’être élu aux organes du pouvoir exécutif de l’État et que seul un quart des citoyens semblent estimer que l’appartenance ethnique d’un homme politique a de l’importance. Il demande en outre quel rôle les 116 associations publiques créées par des groupes nationaux ou ethniques jouent dans la sauvegarde des droits légitimes des minorités ethniques.

17.La délégation pourrait indiquer s’il est vrai, comme l’avancent des sources dignes de foi, que certaines mesures du Gouvernement central enfreignent, dans la région de Nesvizh, les dispositions constitutionnelles et législatives garantissant la liberté de religion. Pareillement, des informations complémentaires sur le démantèlement de bâtiments appartenant à l’Église orthodoxe autocéphale, dans un village de la province de Grodno, dénoncé par Human Rights Watch dans son rapport de 2003, seraient les bienvenues; il faudrait en particulier savoir si la police a effectivement arrêté puis jeté en prison certains disciples.

18.M. Tang fait observer que l’absence de dénonciation de cas de discrimination raciale ne permet pas d’affirmer, comme l’État partie le fait dans le rapport à l’examen, que le Bélarus en est exempt, à preuve les informations fournies parle Service d’information antiracisme(ARIS) selon lesquelles les Roms feraient l’objet de discrimination à l’école ainsi que dans le domaine du logement et de l’emploi et ne bénéficieraient d’aucune assistance juridique. La délégation pourrait apporter un complément d’information à ce sujet.

19.Les principes consacrés dans la Convention font partie intégrante de la formation du personnel chargé de l’application des lois et la question des droits de l’homme a été inscrite au programme de l’Université d’État du Bélarus, ce dont on ne peut que se féliciter, mais il serait souhaitable d’enseigner également cette matière dans le primaire et le secondaire.

20.Même s’il faut saluer le fait que, contrairement à qui s’est passé dans certaines autres républiques de l’ex‑Union soviétique, au Bélarus les mouvements nationalistes extrémistes et agressifs ne sont pas parvenus à exercer une influence significative sur la population, la délégation pourrait apporter des précisions sur les cas isolés d’antisémitisme qui, selon certaines sources, seraient le fait de l’Église orthodoxe russe ainsi que sur la montée des discriminations observée au Bélarus.

21.M. VALENCIA RODRIGUEZ souligne qu’il importe, dans un souci de prévention, que les autorités restent vigilantes face à la recrudescence d’actes de discrimination à l’égard de membres de minorités ethniques commis par des groupes de skinheads, pour la plupart d’origine russe.

22.Il serait utile de savoir quels groupes de population souhaitant entrer sur le territoire bélarussien sont retenus aux frontières du pays, quelles raisons les ont poussés à émigrer vers le Bélarus et si les 21 apatrides accueillis sur le territoire jouissent de leurs droits fondamentaux, notamment en matière d’accès au travail, à la santé, au logement et aux prestations sociales.

23.M. Valencia Rodriguez voudrait en outre savoir si certains des groupes nationaux que comptent le pays ont la possibilité de suivre un enseignement dans leur langue, et pour quelle raison dans la grande majorité des cas les membres des groupes ethniques ne parlent pas leur propre langue, et si ce n’est pas précisément en raison de la prédominance du russe et du bélarussien.

24.Même s’il existe dans la législation bélarussienne de nombreuses dispositions – tant dans le Code pénal que dans la loi sur la presse, la loi sur les partis politiques ou la loi sur les associations publiques – qui permettent d’affirmer que l’État partie met en œuvre les dispositions de l’article 4 de la Convention, il serait préférable que toutes ces dispositions soient regroupées dans un seul instrument juridique, ce qui permettrait de mieux les connaître et de mieux les faire appliquer.

25.L’État partie devrait également prendre en considération les conclusions du Comité des droits de l’enfant relatives à la nationalité des enfants nés hors du territoire du Bélarus et dont l’un des parents réside dans le pays.

26.On ne peut que se féliciter de l’interdiction par le Code du travail de toute discrimination en matière d’accès à l’emploi fondée sur le sexe, la race, l’origine ethnique, la langue ou autre, mais il serait utile de savoir si des plaintes ont été déposées pour ce motif et si des mesures ont été prises pour en sanctionner les auteurs.

27.Les étrangers et les apatrides séjournant temporairement au Bélarus n’ont le droit de mener des activités professionnelles que sous réserve d’y être autorisés par le Ministère du travail et de la protection sociale, ce qui est préoccupant car certains groupes nationaux ou ethniques risquent de faire l’objet de restrictions ou de préférences par rapport à d’autres. Il faudrait à ce propos savoir si le chômage touche davantage certains groupes minoritaires, en particulier les femmes issues de ces groupes, quelles mesures ont été prises pour faire baisser le taux particulièrement élevé de chômage au sein de la population réfugiée et si, parallèlement à l’action pénale engagée contre l’auteur d’un acte de discrimination, des poursuites civiles sont intentées pour que la personne lésée obtienne réparation.

28.Rien ne semble plus s’opposer à ce que le Bélarus fasse la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention puisque l’article 61 de la Constitution dispose que «chacun a le droit, conformément aux instruments internationaux ratifiés par la République du Bélarus, de s’adresser aux organisations internationales pour défendre ses droits dès lors que tous les recours internes ont été épuisés».

29.M. HERNDL aimerait savoir si le Bélarus entend ratifier l’amendement à l’article 6 de la Convention. Il demande en outre si la loi sur les associations publiques comporte une disposition analogue à l’article 23 de la loi sur la liberté de conscience et les organisations religieuses, qui prévoit la possibilité de dissoudre une organisation de ce type dans la mesure où elle mène des activités contre la paix civile, fait de la propagande pour la guerre, la haine ou la discorde ethnique, religieuse ou raciale ou porte atteinte à l’honneur et à la dignité de citoyens.

30.Il salue l’entrée en vigueur, en 2001, du nouveau Code pénal qui accorde une attention particulière à l’interdiction de toutes les formes de discrimination et à la lutte contre la xénophobie et l’intolérance, tout en regrettant que certains actes soient punis par la peine de mort.

31.Il demande si l’interdiction d’un journal qui publiait des articles incitant à la discorde et à la haine faisant suite à deux avertissements est une procédure courante et souhaite obtenir des précisions sur le projet de loi visant à prévenir et à combattre toute forme d’extrémisme. Enfin, le nombre d’apatrides, bien qu’en régression, demeure préoccupant et exige que l’État partie ratifie la Convention de 1954 relative au statut des apatrides.

32.M. AVTONOMOV demande des statistiques sur les actes d’antisémitisme au Bélarus et des informations sur les mesures prises ou envisagées pour combattre ce fléau. Il souhaite obtenir des statistiques sur la criminalité et les peines prononcées par les tribunaux. Enfin, il appelle l’attention de la délégation sur la Recommandation générale XXVII du Comité concernant la discrimination à l’égard des Roms et demande plus de renseignements sur les mesures prises pour combattre la discrimination à l’égard des Roms.

33.M. BOYD demande si la délégation peut confirmer ou infirmer les informations communiquées par des organisations non gouvernementales selon lesquelles la communauté juive serait victime d’un nombre croissant d’actes antisémites, des sites Internet bélarussiens se livreraient à une propagande néonazie et des juifs éprouveraient des difficultés à obtenir l’appui des pouvoirs publics pour ouvrir des écoles et créer des journaux.

34.M. de GOUTTES dit que la législation contre le racisme semble complète mais se demande si elle interdit et réprime les actes de discrimination commis par des groupes privés. Si l’État partie évoque des manifestations isolées d’antisémitisme (notamment la profanation de cimetières et la publication d’articles antisémites), il ne fournit guère d’informations sur la nature et la gravité des sanctions pénales prononcées contre les auteurs de tels actes et le type de réparations offertes aux victimes. La délégation pourrait remédier à cette lacune et indiquer le nombre de plaintes enregistrées et de jugements prononcés afin de mesurer l’ampleur du phénomène xénophobe et antisémite. Le petit nombre de plaintes enregistrées pourrait être dû au fait que les victimes ne sont pas informées de leurs droits par l’État partie. Par ailleurs, il serait utile d’avoir des informations sur les efforts déployés par le Gouvernement pour renforcer l’indépendance des institutions judiciaires et améliorer la formation des juges.

35.S’agissant de l’application de l’article 5 de la Convention, M. de Gouttes dit avoir reçu des informations faisant état d’actes de violence commis par des skinheads et des membres de groupes ultranationalistes contre des étrangers et des membres de minorités ethniques. En outre la xénophobie et le nationalisme seraient exploités par certaines forces politiques nationales, y compris l’Église orthodoxe russe, et des organisations non gouvernementales œuvrant dans le domaine des droits de l’homme seraient exposées à des mesures d’intimidation et à des actes de harcèlement. Il serait intéressant d’avoir le point de vue de la délégation sur ces allégations.

36.Des éclaircissements au sujet de la fermeture, en février 2004 à Minsk, de l’Institut humanitaire international qui était doté d’un Département sur l’histoire et la civilisation juives, seraient également souhaitables.

37.Au sujet de l’article 7, la délégation pourrait exposer les mesures prises par le Gouvernement pour assurer la diffusion de la Convention, plus particulièrement des conclusions et recommandations du Comité, auprès du public, et indiquer si le Gouvernement envisage de faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention. Un tel geste serait un témoignage fort de la volonté du Gouvernement de mettre pleinement en œuvre la Convention.

38.M. LINDGREN ALVES demande pourquoi l’enseignement du russe et d’une autre langue étrangère est obligatoire dans les établissements scolaires du pays, alors que 80 % de la population se considèrent comme Bélarussiens. De même, il serait intéressant de savoir pourquoi la reconnaissance par un citoyen de son appartenance à un groupe ethnique particulier est assortie de l’obligation d’étudier la langue de ce groupe.

39.L’argument selon lequel les actes d’antisémitisme, en particulier les profanations de cimetières, ne seraient pas imputables à un antisémitisme latent mais aux lacunes d’éducation des jeunes, est trop simpliste et il conviendrait donc d’analyser les causes profondes de l’antisémitisme dans le pays pour pouvoir le combattre réellement.

40.Il est étonnant que le rapport périodique à l’examen ne mentionne pas les mesures prises pour assurer le suivi de la Conférence de Durban, à laquelle le Bélarus a pourtant activement participé.

41.Par ailleurs, M. Lindgren Alves aimerait savoir si le Gouvernement bélarussien entend, comme la Commission des droits de l’homme le lui a demandé dans sa résolution 2004/14, inviter le Rapporteur spécial sur la torture, le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et la Représentante spéciale du Secrétaire général concernant la situation des défenseurs des droits de l’homme à se rendre en mission dans le pays, et si le Gouvernement compte accueillir sur son territoire le Rapporteur spécial désigné en 2004 par la Commission pour étudier la situation des droits de l’homme au Bélarus.

42.M. KJAERUM regrette que le rapport à l’examen n’ait pas été rédigé en coopération avec les ONG et souhaite savoir dans quels domaines les autorités coopèrent avec les ONG et si les conclusions et observations du Comité leur sont communiquées ainsi qu’à la société civile.

43.Il demande à la délégation de confirmer ou d’infirmer les allégations émanant de diverses sources selon lesquelles il serait pratiquement impossible pour un enfant rom d’être scolarisé dans une école digne de ce nom, la quasi-totalité des Roms serait sans emploi et le Gouvernement aurait créé des zones d’habitation séparées pour les Roms, au motif que personne ne voudrait vivre dans leur voisinage. Il convient de rappeler que si l’intégration des minorités, dont les Roms, est un processus souvent long et difficile, les gouvernements sont tenus, au titre de leurs obligations en tant qu’États parties à la Convention, de s’efforcer de garantir leur intégration, notamment dans les domaines énumérés dans la Recommandation générale XXVII du Comité concernant la discrimination à l’égard des Roms.

44.Il attire l’attention des autorités sur la situation dramatique des femmes étrangères impliquées dans les réseaux de prostitution, lesquelles sont, comme souligné dans la Recommandation générale XXV du Comité, victimes d’une double discrimination – en tant que femmes et en tant qu’étrangères.

45.La délégation pourrait également indiquer si les autorités envisagent de créer une institution nationale des droits de l’homme chargée de sensibiliser le public aux questions relatives aux droits de l’homme et d’assurer le suivi de la mise en œuvre au niveau national des engagements internationaux contractés par l’État partie.

46.Mme JANUARY‑BARDILL demande un complément d’information sur la situation des réfugiés, notamment en matière d’accès aux services sociaux autres que l’emploi et à l’éducation et à la formation.

47.Elle attire l’attention de la délégation sur la situation des femmes au Bélarus, qui les place dans le groupe le plus vulnérable et défavorisé puisque, selon le rapport à l’examen, les femmes mettent deux fois plus de temps que les hommes à retrouver un emploi et que 80 % des chômeurs de longue durée sont des femmes.

48.Elle demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour lutter contre l’incitation à la haine raciale sur l’Internet.

49.M. AMIR se félicite de la qualité des informations contenues dans le rapport à l’examen et constate que le Bélarus n’a émis qu’une seule réserve à la Convention, qui ne porte pas sur ses articles essentiels mais sur l’article 17 − relatif à la signature et à la ratification de la Convention. Le bilan du Bélarus du point de vue de la mise en œuvre de la Convention est tout à fait honorable, compte tenu en particulier des 140 minorités ethniques qui vivent sur le territoire, même si certains problèmes demeurent, comme celui de la prostitution.

La séance est levée à 18 heures.

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