NATIONS

UNIES

CERD

Convention internationale

sur l'élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.

GÉNÉRALE

CERD/C/SR.1544

24 février 2003

Original : FRANÇAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante et unième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1544e SÉANCE

tenue au Palais des Nations, à Genève,le lundi 19 août 2002, à 15 heures

Président : M. DIACONU

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Sixième à quatorzième rapports périodiques du Botswana

Projet de conclusions du Comité concernant les treizième et quatorzième rapports périodiques du Canada

_______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l’une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d’édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

La séance est ouverte à 15 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Sixième à quatorzième rapports périodiques du Botswana (CERD/C/407/Add.1 )

Sur l’invitation du Président, la délégation botswanaise prend place à la table du Comité.

M. NTWAAGAE (Botswana) présente ses excuses au Comité, au nom de son pays, pour le retard accumulé dans la présentation de ses rapports périodiques et s’engage à ce qu’à l’avenir, les rapports biennaux du Botswana soient tous présentés dans les délais voulus.

M. Ntwaagae indique que le Botswana est une société non raciale qui ne tolère pas la discrimination raciale. Il rappelle que le pays a été confronté pendant de longues années aux régimes racistes en vigueur en Afrique du Sud, dans le sud‑ouest africain et dans l’ex‑Rhodésie et qu’il s’est toujours efforcé de dûment garantir la normalité des relations entre les races. Le Botswana a prouvé son engagement en faveur de la paix et de la stabilité en Afrique australe, comme en témoigne sa participation aux conférences mondiales contre le racisme de 1978 et 1983 et à celle de Durban (Afrique du Sud) en 2001.

Le Botswana a proclamé le principe de l’égalité de tous devant la loi et assure une protection égale à tous contre toutes les formes de discrimination, y compris la discrimination raciale. L’article 15 de la Constitution botswanaise interdit la discrimination raciale et le Code pénal, qui sanctionne les infractions commises en la matière, stipule que la discrimination «vise tout traitement défavorable ou distinct réservé à une personne pour des motifs fondés sur la couleur, la race, la nationalité ou la croyance». L’article 12 de la Constitution garantit également la liberté d’expression, laquelle comprend la liberté de la presse, comme indiqué au paragraphe 15 du rapport. M. Ntwaagae ajoute que plusieurs textes législatifs garantissent la jouissance et la protection des différents droits civils consacrés à l’article 5 de la Convention, et que la législation nationale reconnaît et protège les droits économiques, sociaux et culturels.

S’agissant de l’application de l’article 6 de la Convention, M. Ntwaagae signale que les articles 92 et 94 du Code pénal prévoient des sanctions contre «quiconque profère des paroles ou publie des écrits exprimant ou manifestant haine, moquerie ou mépris envers une personne ou un groupe de personnes uniquement ou principalement pour des motifs fondés sur la race, l’appartenance à une tribu, le lieu d’origine, la couleur ou la croyance». Ainsi, neuf procédures ont été ouvertes en 2000 pour infraction à ces articles du Code pénal, sept en 1999 et cinq en 1998.

M. PILLAI (Rapporteur pour le Botswana) se félicite que le Comité ait enfin l’occasion, après 18 ans d’attente, de dialoguer à nouveau avec l’État partie. Il regrette le très important retard accusé par celui-ci dans la présentation de ses rapports, retard d’autant plus surprenant que le Botswana a toujours donné l’image d’un pays politiquement stable et démocratique et qu’il a été l’un des premiers à adhérer à la Convention et parmi les plus fermes opposants à l’apartheid. Il prend bonne note de son adhésion aux idéaux de la Convention et aux travaux du Comité ainsi que de son engagement à présenter désormais ses rapports biennaux dans les délais impartis.

M. Pillai rappelle que le Botswana est l’un des plus grands pays du continent africain et aussi l’un des moins peuplés, et qu’en raison de conditions défavorables, 80 % de la population occupe 20 % des terres. Depuis son indépendance, et plus particulièrement depuis la découverte de mines de diamants, le Botswana a connu un rythme de croissance exceptionnel : avec un PNB annuel de 3 300 dollars par habitant, le pays a été classé par l’ONU dans la catégorie des pays à revenu moyen. Néanmoins, et malgré les investissements considérables effectués par le Gouvernement dans les domaines de la santé, de l’éducation et des programmes d’aide sociale, les fruits de la croissance n’ont pas bénéficié à tous, puisque environ la moitié de la population du Botswana vit en dessous du seuil officiel de pauvreté.

Le Botswana a instauré une démocratie non raciale et tous les citoyens y jouissent des mêmes droits. La Constitution établit un gouvernement de type républicain dirigé par le Président. L’Assemblée nationale est composée de 46 membres qui oeuvrent en consultation avec les 15 membres de la Chambre des chefs pour toutes les questions qui ont trait aux coutumes et aux traditions. Cette chambre des chefs est composée de huit chefs représentant les huit principales tribus du pays, et quatre membres élus par et parmi les «sous-chefs» dans quatre districts, qui élisent à leur tour trois autres membres politiquement indépendants.

M. Pillai note que la Constitution botswanaise interdit toute discrimination fondée sur la race, l’appartenance à une tribu, le lieu d’origine, l’opinion politique, la couleur ou la croyance, et prévoit des voies de recours à l’intention des personnes qui estiment avoir été victimes d’une violation de leurs droits. Il constate toutefois avec regret que le rapport périodique de l’État partie ne contient aucune information concrète et ne donne aucune indication sur la nature des dispositions juridiques et constitutionnelles en vigueur et sur leur degré d’application. De plus, le rapport ne dit rien de la composition ethnique de la population, se contentant d’affirmer qu’elle est «relativement homogène, ce qui n’empêche pas une grande diversité linguistique et culturelle». L’absence de données démographiques désagrégées est un handicap majeur pour apprécier dans quelle mesure les différents groupes ethniques ont tiré profit des nombreux programmes mis en œuvre pour assurer le développement socioéconomique de la population. À cet égard, M. Pillai attire l’attention de la délégation sur le paragraphe 8 des Principes directeurs du Comité concernant la forme et la teneur des rapports présentés par les États parties (CERD/C/70/Rev.5), selon lequel «si l’on veut suivre les progrès accomplis dans l’élimination de la discrimination fondée sur la race, la couleur, l’ascendance et l’origine nationale ou ethnique, des indications doivent être données sur le nombre de personnes qui pourraient être traitées de façon moins favorable sur la base de ces caractéristiques. Les États qui ne recueillent pas d’informations sur ces caractéristiques dans leurs recensements sont donc priés de fournir des renseignements sur les langues maternelles en tant qu’indicateurs de différences ethniques, ainsi que tous renseignements sur la race, la couleur, l’ascendance et l’origine nationale ou ethnique tirés d’enquêtes sociales. En l’absence de données d’information chiffrées, il faudrait fournir une description qualitative des caractéristiques ethniques de la population». M. Pillai souhaiterait que l’État partie se conforme à l’avenir à ces principes, même si celui-ci avait indiqué, lors de la présentation de son précédent rapport périodique, en 1983, avoir cessé de ventiler la population en termes d’appartenance ethnique, dans le but, notamment, de décourager l’ethnocentrisme parmi les différentes ethnies et d’encourager le processus de construction nationale. À ce propos, il aimerait savoir comment il concilie cette position avec la disposition constitutionnelle établissant une chambre des chefs, distincte de l’Assemblée nationale.

À propos de l’application de l’article 2 de la Convention, M. Pillai note qu’il est dit au paragraphe 22 du rapport que le Botswana s’assure en tout temps que les politiques qu’il adopte sont toutes pleinement conformes à l’article en question et demande à la délégation de donner des exemples précis d’examen de ce type et d’en préciser les conséquences sur la législation en vigueur. Quant aux articles 3 et 15 de la Constitution botswanaise, qui interdisent la discrimination raciale, selon le rapport, ils ne couvrent pas toutes les dimensions de la discrimination raciale envisagées dans la Convention. M. Pillai avoue de surcroît ne pas comprendre comment les dispositions de la Convention peuvent avoir pleinement effet au Botswana puisqu’il est dit dans le rapport que la Constitution du Botswana (30 septembre 1966) et les lois adoptées avant cette date ont devancé la Convention. Il demande donc des éclaircissements à la délégation botswanaise sur ce point, ainsi que sur les allégations selon lesquelles le Gouvernement botswanais n’a officiellement reconnu l’existence dans le pays que de huit tribus, à savoir les tribus de langue tswana et que seules ces tribus peuvent désigner les chefs reconnus par le Gouvernement, être représentées à la «Chambre des chefs» et jouir de droits fonciers collectifs. S’interrogeant donc sur les mesures que prend l’État partie pour préserver la pluralité démographique et culturelle du pays, il demande si le Gouvernement envisage, comme l’ont proposé diverses organisations en mai 2002, d’amender certains articles de la Constitution et autres textes législatifs pour assurer, à l’image de l’Afrique du Sud, l’égalité entre toutes les tribus du pays.

M. Pillai, rappelle que, conformément à la Recommandation générale XIII adoptée par le Comité en 1993, le respect des obligations découlant du paragraphe 1 de l’article 2 de la Convention dépend des responsables nationaux de l’application des lois et de la formation qu’ils ont reçue en la matière. D’autre part, selon le paragraphe 2 du même article, les États parties doivent adopter des mesures visant à renforcer la jouissance des droits de l’homme par certains groupes de la population. Il serait bon que le Botswana fournisse des informations sur ces points dans ses futurs rapports.

S’agissant de l’application de l’article 4 de la Convention, il ne semble pas, d’après les renseignements donnés au paragraphe 29 du rapport, que la loi sur les sociétés commerciales et la loi sur l’inscription au registre du commerce aient directement trait à la question de la discrimination raciale. M. Pillai regrette par ailleurs que l’État partie se soit contenté d’exposer les dispositions constitutionnelles et juridiques pertinentes, sans fournir de plus amples informations sur leur application, leurs effets et les sanctions encourues en cas d’infraction. Il apprécie néanmoins les quelques statistiques fournies au paragraphe 38 du rapport sur le nombre de plaintes présentées au Botswana, en relation avec des actes de discrimination raciale, mais il voudrait savoir qui étaient les victimes dans les affaires évoquées, si une tendance nette à l’augmentation du nombre de délits de ce type s’est dégagée en cinq ans et quel est le comportement de la police vis‑à‑vis des personnes arrêtées. Il souhaiterait aussi obtenir de plus amples informations sur les recours fondés sur les dispositions de l’article 5 de la Convention et sur les éventuelles réparations envisagées. En outre, étant donné que l’article 4 de la Convention condamne la diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale, M. Pillai s’étonne des propos qu’aurait tenus un haut fonctionnaire au sujet de la réinstallation des Basarwas et invite l’État partie à se pencher sérieusement sur les problèmes des Basarwas, qui préoccupent de nombreuses ONG. Il demande des éclaircissements sur la situation de ces derniers depuis qu’ils ont été dépossédés de leurs terres en vue de la constitution d’une réserve naturelle et réinstallés sur d’autres sites. Il invite par ailleurs la délégation botswanaise à fournir des précisions sur la situation des réfugiés en provenance de Namibie.

Dans les paragraphes du rapport relatifs à l’application de l’article 5, l’État partie se contente de citer les diverses dispositions constitutionnelles et juridiques qui visent à satisfaire aux obligations établies dans cet article. Là encore, M. Pillai souhaiterait que dans ses rapports ultérieurs il donne des informations sur leur application, notamment pour ce qui est des droits civils et politiques. Dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels, les problèmes essentiels, selon le bilan commun de pays 2001 des Nations Unies, sont la pauvreté, l’épidémie de VIH/sida et l’environnement. M. Pillai souhaiterait donc savoir quels sont les programmes qui ont été mis en place dans le pays pour éradiquer la pauvreté et quels sont les groupes ethniques concernés. Il demande également un complément d’information sur l’étendue de l’épidémie de VIH/sida et son impact sur les différents groupes ethniques. Il se félicite que le Gouvernement botswanais ait récemment décidé de consacrer davantage de ressources budgétaires au secteur de la santé et ait pris des nombreuses initiatives dans le domaine de la protection de l’environnement. Il aimerait savoir à ce propos dans quelle mesure les questions d’environnement influent sur la jouissance des droits de l’homme par les groupes les plus touchés par la dégradation de l’environnement et ce qui est fait pour remédier à leur situation. M. Pillai demande également à la délégation botswanaise de préciser dans quelle mesure la loi sur l’Association botswanaise pour le logement a des effets positifs sur l’exercice du droit au logement pour les groupes les plus défavorisés et si ces derniers font l’objet d’une attention particulière. D’autre part, il aimerait avoir des précisions sur le degré d’utilisation des services d’enseignement par les différents groupes sociaux, sachant que le Botswana garantit l’accès de tous à une éducation primaire, secondaire et technique gratuite. Il aimerait notamment savoir si les différentes tribus ont toutes accès à l’éducation sur un pied d’égalité et si les Barsawas bénéficient d’un programme de développement économique et culturel particulier.

Il serait utile aussi, dans le cadre de l’application de l’article 7, que le Gouvernement botswanais précise dans ses rapports ultérieurs quelles ont été les mesures appropriées qu’il a adoptées pour promouvoir les buts et les principes de la Charte des Nations Unies et de la Convention, et qu’il fasse connaître au Comité le résultat des discussions dont fait actuellement l’objet le dernier document d’orientation relatif au principe de l’égalité entre les tribus dont il est question au paragraphe 45 du rapport. Enfin, l’État partie devrait fournir des informations sur la participation éventuelle d’organisations de la société civile à l’établissement du rapport et sur leur rôle dans la sensibilisation aux questions visées dans la Convention, et indiquer quelle est la publicité accordée aux conclusions du Comité.

En conclusion, M. Pillai se félicite que le Botswana continue, comme il l’indique au paragraphe 50 de son rapport à faire tout son possible pour satisfaire au mieux aux obligations qui lui incombent en vertu de la Convention.

M. SHAHI se félicite que selon le rapport, le Botswana ait développé une tradition démocratique, respecte les droits de l’homme et mette en œuvre les dispositions de la Convention, offrant ainsi un exemple de développement économique et démocratique en Afrique. Il constate néanmoins, qu’en dépit des politiques adoptées, 47 % de la population continue de vivre en dessous du seuil de pauvreté et qu’il reste encore beaucoup à faire pour éliminer toute manifestation de discrimination raciale. Certains textes législatifs, qui visent à satisfaire aux obligations établies aux articles 4 et 5 de la Convention comme la loi sur le droit au logement, ou la loi sur les associations et la loi sur les sociétés commerciales, devraient être plus explicites sur ce point comme l’État partie le reconnaît d’ailleurs lui‑même dans le rapport.

Mettant en évidence certaines lacunes du rapport, M. Shahi regrette que l’État partie n’ait pas fourni de statistiques plus détaillées sur le nombre de plaintes présentées au Botswana en relation avec des actes de discrimination raciale et de procédures ouvertes au cours de la période 1995-2000 pour propos racistes enfreignant l’article 92 du Code pénal. Il aurait été utile de savoir quelles ont été les sanctions infligées aux auteurs de ces actes. En effet toute violation des dispositions de la Convention et notamment de l’article 4 doit être punie et M. Shahi insiste sur la nécessité de décourager les délits à motivation raciste et les incitations à la haine raciale par l’imposition de peines sévères et d’amendes conséquentes.

D’autre part, bien que de nombreuses ONG se soient fait l’écho des revendications des Basarwas (ou Sanes ou Bochimans), le rapport n’en fait absolument pas mention. D’après ces mêmes organisations, le nombre de Basarwas, peuple installé dans la région du désert de Kalahari depuis des milliers d’années, s’élevait encore à 3 ou 4 000 quelques années auparavant. Il n’en resterait plus que 50 dans cette région et quelques centaines d’autres ont été réinstallés dans d’autres régions du pays par le Gouvernement. M. Shahi estime que les Basarwas devraient être considérés comme un peuple autochtone et qu’à ce titre, le Comité devrait veiller à ce qu’ils aient accès à la propriété foncière et à ce qu’ils jouissent de tous les droits prévus à l’article 5 de la Convention. Il évoque également les pressions que le Gouvernement botswanais exercerait sur les quelque quarante ou cinquante Basarwas restants, qui vivent de la chasse et de la cueillette, pour qu’ils s’en aillent. Ces derniers n’auraient plus désormais de quoi répondre à leurs besoins essentiels. Il importe donc que le Gouvernement botswanais entame un processus de consultation avec les Basarwas pour déterminer leur avenir et autorise tous les déplacés à retourner vivre dans leur habitat traditionnel dans le Kalahari.

En conclusion, M. Shahi se félicite de la présence de la délégation botswanaise devant le Comité et de la position éminente qu’occupe l’État partie en tant qu’exemple de démocratie respectueuse des droits de l’homme.

M. SICILIANOS rappelle que le Botswana a depuis longtemps fait preuve de son engagement contre la discrimination raciale, notamment durant la période de l’apartheid. Or, selon certaines informations, la Cour suprême botswanaise aurait qualifié de discriminatoires les lois sur les chefs et sur les terres tribales et les articles 77 à 79 de la Constitution et aurait invité le Gouvernement à revoir les chapitres et articles pertinents de la Constitution botswanaise. M. Sicilianos aimerait donc connaître les intentions du Gouvernement à ce sujet.

M. THIAM se félicite que le Comité ait pu renouer le dialogue avec le Botswana mais fait toutefois remarquer que le rapport présenté par l’État partie n’a pas été rédigé conformément aux Principes directeurs du Comité. Il suggère donc à l’État partie de demander l’assistance du Comité pour la rédaction de son rapport suivant afin de fournir des informations à la mesure des efforts déployés par le pays en matière de droits de l’homme.

M. Thiam regrette également que le rapport ne donne pas d’informations sur la composition de la population, ce qui empêche le Comité d’apprécier la qualité des mesures prises par l’État partie pour tenter d’éliminer la discrimination raciale. Le rapport se contentant d’indiquer que le tswana – la langue nationale – est parlé par plus de 96 % de la population, il voudrait savoir combien le pays compte d’ethnies, d’étrangers, de réfugiés ou d’apatrides et quelles mesures de protection sont prises en faveur des minorités nationales.

M. Thiam demande en outre des précisions sur la nature du régime politique botswanais. S’agit-il d’un régime parlementaire ou présidentiel? Il estime qu’il serait utile de connaître les rôles respectifs des trois pouvoirs dans le pays et leurs relations sachant que selon le rapport, le Président de la République est également membre du Parlement. De plus, comme le rapport fait état d’une Assemblée nationale et d’une Chambre des chefs traditionnels, il souhaiterait d’une part, savoir si le Parlement est bicaméral et d’autre part, quelles sont les relations existant entre les deux chambres. S’agissant du pouvoir judiciaire, il comprend que le droit coutumier et le droit écrit puissent coexister en Afrique, mais se demande comment le Botswana parvient à concilier ces deux systèmes de droit. Il demande également des éclaircissements sur le nombre de degrés de juridiction que compte le système judiciaire botswanais et sur l’exercice des voies de recours. En l’occurrence, comment passe‑t‑on du tribunal traditionnel au tribunal du système de droit écrit en cas de plainte? M. Thiam aimerait aussi connaître la place de la Convention dans l’ordre juridique interne du Botswana et savoir notamment si la primauté de la Convention est assurée et si ses dispositions peuvent être directement invoquées par les citoyens. Par ailleurs, il souhaiterait savoir si le Botswana est doté d’une institution analogue à celle de l’ombudsman.

M. VALENCIA RODRIGUEZ note tout d’abord que, selon le rapport, «la population du Botswana est relativement homogène, ce qui n’empêche pas une grande diversité linguistique et culturelle». En ce qui concerne le pouvoir judiciaire, il se félicite de son indépendance. Étant donné l’existence de deux systèmes de droit, il souhaiterait avoir des précisions sur les attributions respectives des deux catégories de tribunaux et savoir notamment si les tribunaux coutumiers peuvent connaître des affaires de discrimination raciale. À propos de la place de la Convention dans la hiérarchie des normes nationales, il demande aussi si la Convention est directement applicable en droit interne botswanais et si les dispositions de la Convention peuvent être invoquées directement par les tribunaux.

Étant donné qu’il est dit au paragraphe 24 du rapport que les politiques et la pratique suivies par le Botswana sont conformes à l’alinéa e du paragraphe 1 et au paragraphe 2 de l’article 2 de la Convention, M. Valencia Rodriguez demande davantage d’informations sur les mesures qui ont été adoptées pour promouvoir l’égalité entre les groupes minoritaires et le reste de la population.

Afin d’être en mesure d’évaluer la portée des dispositions constitutionnelles et pénales du Botswana concernant les voies de recours et la sanction des actes de discrimination raciale, M. Valencia Rodriguez souhaiterait connaître la teneur exacte des articles 21, 397 et 399 du Code pénal. À propos de l’obligation énoncée à l’alinéa b de l’article 4 de la Convention, et consacrée dans diverses dispositions du droit interne botswanais, il voudrait savoir ce que risquent les organisations non enregistrées qui incitent à la haine et à la discrimination raciales, dans quelle disposition les sanctions applicables à ce type d’organisations sont énoncées et quelle sanction encourent les membres de ces organisations illégales.

Tout en se félicitant par ailleurs de l’existence de diverses normes juridiques qui protègent les droits énoncés à l’article 5 de la Convention, M. Valencia Rodriguez demande un complément d’information sur les résultats concrets de l’application de ces dispositions, notamment pour les groupes minoritaires. S’agissant de la mise en œuvre de l’article 6 de la Convention, il note avec satisfaction que la Constitution prévoit en son article 18 une protection et des voies de recours pour les personnes qui estiment avoir été victimes d’une violation. Se référant à cet égard au tableau figurant au paragraphe 38 du rapport sur le nombre de plaintes en relation avec des actes de discrimination raciale, il demande quelles ont été les décisions des tribunaux dans ces différentes affaires. Il souhaiterait également savoir quelle est la procédure à suivre pour obtenir réparation en cas de discrimination raciale.

Concernant l’application de l’article 7, M. Valencia Rodriguez salue le fait que les différents établissements scolaires sont ouverts à tous les groupes raciaux et ethniques, comme indiqué au paragraphe 39 du rapport. Il serait intéressant de savoir si ces établissements dispensent un enseignement dans la langue maternelle de ces différents groupes et promeuvent leurs valeurs culturelles propres. Enfin, comme il est question au paragraphe 42 du rapport de «groupes culturels enregistrés», il aimerait obtenir de plus amples informations sur ces groupes, notamment en ce qui concerne la représentation des minorités ethniques en leur sein et leur financement. Sont‑ils subventionnés par l’État? M. Valencia Rodriguez recommande de faire mieux connaître dans ces groupes les dispositions de la Convention. Il demande également que le rapport à l’examen et les conclusions du Comité qui en découleront soient largement diffusées dans tout le pays.

M. KJAERUM, notant la contradiction apparente dans la phrase figurant au paragraphe 6 du rapport, où il est dit que «la population du Botswana est relativement homogène, ce qui n’empêche pas une grande diversité linguistique et culturelle», demande si le Gouvernement botswanais perçoit le Botswana comme un pays homogène ou un pays multiculturel.

M. Kjaerum souhaiterait par ailleurs que la délégation décrive les liens qu’entretient le Gouvernement avec la société civile en général, et avec les représentants des groupes les plus vulnérables en particulier. Il aimerait notamment savoir si le Gouvernement botswanais a consulté les Bochimans avant de les chasser de leurs terres ancestrales du désert de Kalahari et de les contraindre à rejoindre des établissements humains où ils ne peuvent plus pratiquer ni la chasse ni la cueillette. Il ajoute qu’à long terme, ces déplacements ne sont viables que si les populations visées participent à la décision les concernant et à l’élaboration des politiques et stratégies du Gouvernement.

M. Kjaerum souhaiterait également savoir si le Botswana a créé des organismes nationaux pour faciliter l’application de la Convention conformément à la Recommandation générale XVII du Comité. Il rappelle que les commissions nationales de ce type constituent une instance au sein de laquelle les groupes minoritaires et les représentants du Gouvernement peuvent débattre de manière constructive.

Enfin, M. Kjaerum demande si l’État partie envisage de faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention.

M. LINDGREN ALVES se félicite de la reprise du dialogue avec l’État partie, interrompu en 1985. Il fait observer que le rapport à l’examen – qui traduit une méconnaissance des principes énoncés dans la Convention – aurait gagné à être rédigé en collaboration avec les ONG locales, dont les rapports sont bien plus détaillés et élogieux. On y lit en effet que le Botswana est un exemple de réussite économique, et que ce pays est l’un des rares pays d’Afrique à avoir instauré l’enseignement primaire universel. M. Lindgren Alves estime que le Botswana devrait mettre ces arguments en avant dans les rapports périodiques qu’il présente en vertu des instruments internationaux auxquels il est partie.

M. TANG regrette que le rapport ne détaille pas suffisamment les mesures prises par l’État partie pour lutter contre la discrimination raciale et ne dresse pas un bilan plus complet de la situation dans le pays. Il demande notamment à quoi ont abouti les procédures judiciaires engagées pour propos racistes mentionnées au paragraphe 38 du rapport, et si les victimes ont été dûment indemnisées.

M. Tang estime lui aussi que le Gouvernement devrait accorder davantage d’importance aux ONG présentes dans le pays et il exprime l’espoir que le Gouvernement coordonnera à l’avenir les travaux des organismes gouvernementaux et des ONG en question.

Mme JANUARY‑BARDILL fait observer qu’insister sur le caractère homogène plutôt que multiculturel de la population a pour conséquence de marginaliser les groupes minoritaires, et par la même de ne pas tenir compte de leurs besoins. C’est d’ailleurs ce qui ressort des rapports des organisations non gouvernementales, dans lesquels ces groupes disent se sentir exclus du point de vue économique et social. Citant à cet égard l’article premier de la Convention, selon lequel «l’expression “discrimination raciale” vise toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique», Mme January‑Bardill insiste sur l’importance de reconnaître l’existence de ces groupes afin d’éviter qu’ils ne fassent l’objet de discrimination.

S’agissant du contenu du rapport, Mme January‑Bardill rappelle que dans ses conclusions de 1993, le Comité s’était enquis des mesures prises pour sensibiliser la police et les fonctionnaires aux questions relatives aux droits de l’homme et avait demandé s’il était facile aux personnes qui souhaitaient obtenir réparation d’exercer des recours juridiques. Le Comité avait également demandé si le Gouvernement avait conçu un projet particulier en faveur des Basarwas. Selon Mme January‑Bardill, il aurait été judicieux que les auteurs du rapport à l’examen apportent une réponse à ces questions, et elle les invite à le faire dans le rapport périodique suivant.

M. BOSSUYT fait observer que si le tswana – la langue nationale – est parlé par 96 % des Botswanais, il ne faut pas pour autant en déduire qu’il est la langue maternelle de cette écrasante majorité de la population et que les minorités ne comptent que pour 4 % de la population.

M. Bossuyt demande des éclaircissements sur le «brassage» de la population «dans des quartiers conçus à cet effet par des urbanistes», dont il est question au paragraphe 40 du rapport.

M. THORNBERRY demande quelle est la politique de développement menée par le Gouvernement botswanais en faveur des Sanes. À cet égard, il attire l’attention de la délégation sur la Recommandation générale XXIII concernant les droits des populations autochtones adoptée par le Comité en 1997, dans laquelle celui‑ci demande aux États parties de veiller à ce que les membres des populations autochtones jouissent de droits égaux en ce qui concerne la participation effective à la vie publique et qu’aucune décision directement liée à leurs droits et à leurs intérêts ne soit prise sans leur consentement informé. Le Gouvernement botswanais s’est‑il donné comme objectif de favoriser la survie et le développement des Sanes, groupe particulièrement vulnérable? M. Thornberry demande aussi si le Gouvernement a mis en place un système éducatif qui tienne compte des réalités culturelles des différents groupes de population.

Étant donné que le rapport ne permet pas de dire si des progrès ont été réalisés dans le domaine des droits de l’homme depuis le dernier examen de la situation dans le pays, M. Thornberry voudrait savoir si le Gouvernement a mis en place des séminaires en vue de susciter une réflexion des citoyens sur les principes énoncés dans la Convention.

M. YUTZIS suggère que, s’il a besoin d’aide pour l’élaboration de son rapport périodique suivant, le Gouvernement botswanais s’adresse au Comité, d’une part, et fasse appel, d’autre part, à l’assistance technique offerte par le Haut‑Commissariat aux droits de l’homme dans le cadre de son programme de services consultatifs et d’assistance technique en vue d’établir et de présenter un rapport mis à jour, rédigé conformément aux principes directeurs pertinents.

Le PRÉSIDENT dit que la délégation botswanaise sera invitée à répondre aux questions des membres du Comité à la séance suivante.

Projet de conclusions du Comité concernant les treizième et quatorzième rapports périodiques du Canada (CERD/C/320/Add.5; CERD/C/60/Misc.16/Rev.1) (document distribué en séance, en anglais seulement)

Le PRÉSIDENT invite les membres du Comité à examiner paragraphe par paragraphe le texte du projet de conclusions concernant les rapports du Canada (CERD/C/60/Misc.16/Rev.1).

Paragraphes 1 et 2

Les paragraphes 1 et 2 sont adoptés.

Paragraphe 3

Le président propose de supprimer la seconde phrase du paragraphe car la question des institutions et programmes visant à éliminer la discrimination raciale est traitée dans d’autres paragraphes.

Il en est ainsi décidé.

Le paragraphe 3, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 4

Après un échange de vues auquel participent M. THORNBERRY, M. RESHETOV, M. HERNDL (Rapporteur pour le Canada) et M. LINDGREN ALVES, le Président propose de supprimer, au début de la première phrase, les termes «with satisfaction» (avec satisfaction) ainsi que toute la fin de la dernière phrase après le mot «Convention».

Le paragraphe 4, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 5

M. ABOUL‑NASR suggère de supprimer les termes «at international and national levels» (aux niveaux international et national) après «Canada».

Le paragraphe 5, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 6

Le paragraphe 6 est adopté.

Paragraphe 7

Après un échange de vues auquel participent M. ABOUL-NASR, M. KJAERUM, M. HERNDL (Rapporteur pour le Canada), M. RESHETOV et M. THORNBERRY, le PrÉsident propose de remplacer, à la fin du paragraphe, le membre de phrase «aimed at reducing the high rate of incarceration of Aboriginals and improving their access to justice» (visant à réduire le taux élevé d’incarcération des autochtones et à améliorer leur accès à la justice) par «for their benefit» (en leur faveur).

Il en est ainsi décidé.

Le paragraphe 7, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphes 8 à 11

Les paragraphes 8 à 11 sont adoptés.

Paragraphe 12

Le Président, appuyé par M. THORNBERRY, propose de supprimer la dernière phrase du paragraphe.

Il en est ainsi décidé.

Le paragraphe 12, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 13

Le paragraphe 13 est adopté avec une modification rédactionnelle mineure.

Paragraphes 14 et 15

Les paragraphes 14 et 15 sont adoptés.

Paragraphe 16

Après un échange de vues auquel participent M. THORNBERRY, M. AMIR, M. SICILIANOS et M. SHAHI, le PRÉSIDENT propose de supprimer le début de la première phrase de sorte que le paragraphe commencerait comme suit :«The Committee expresses concern…» (Le Comité se dit préoccupé).

Il en est ainsi décidé.

Le paragraphe 16, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 17

Le paragraphe 17 est adopté.

La séance est levée à 18 heures.

-----