NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/LTU/CO/219 janvier 2009

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTUREQuarante et unième sessionGenève, 3-21 novembre 2008

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité contre la torture

LITUANIE

1.Le Comité contre la torture a examiné le deuxième rapport périodique de la Lituanie (CAT/C/LTU/2) à ses 838e et 841e séances (CAT/C/SR.838 et 841), les 4 et 5 novembre 2008, et a adopté à sa 857e séance, (CAT/C/SR.857), les observations finales ci-après.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport périodique de la Lituanie et les renseignements qu’il contient et exprime à l’État partie ses remerciements pour les réponses apportées dans le cadre de la procédure de suivi. Il remercie également l’État partie de ses réponses écrites détaillées à la liste des questions à traiter (CAT/C/LTU/Q/2/Add.1), qui ont apporté un complément d’information sur les mesures législatives, administratives, judiciaires et autres adoptées en vue de prévenir les actes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le Comité salue en outre les efforts constructifs faits par la délégation pluridisciplinaire de l’État pour apporter des renseignements et des explications supplémentaires au cours du dialogue.

B. Aspects positifs

3.Le Comité note avec satisfaction que pendant la période écoulée depuis l’examen du premier rapport périodique l’État partie a ratifié le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, le 5 août 2004, et a adhéré au Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, le 5 août 2004.

4.Le Comité note avec satisfaction les efforts déployés par l’État partie pour procéder à la réforme de sa législation, de ses politiques et de ses procédures afin de garantir une meilleure protection des droits de l’homme, notamment du droit de ne pas être soumis à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, en particulier:

a)La loi sur l’égalité de traitement, entrée en vigueur le 1er janvier 2005, qui vise à garantir la mise en œuvre des droits fondamentaux énoncés dans la Constitution et à interdire toute discrimination directe ou indirecte fondée sur l’âge, l’orientation sexuelle, le handicap, l’origine raciale ou ethnique, la religion ou la conviction;

b)La loi de 2007 portant modification de la loi sur l’égalité de traitement, qui incorpore les dispositions de la Directive du Conseil de l’Europe 2000/43/CE, en date du 29 juin 2000, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique;

c)Le Code de conduite des fonctionnaires du Département pénitentiaire et des établissements qui en relèvent et le Code d’éthique à l’intention des fonctionnaires de la police lituanienne adopté en 2004 par l’ordonnance no 347 du Commissaire général de la police.

d)Le concept du régime de probation, en 2007, et le plan de mesures visant à mettre en œuvre ce concept;

e)La stratégie sur la santé mentale adoptée par le Seimas le 3 avril 2007 et l’adoption par le Gouvernement, le 18 juin 2008, du programme de mise en œuvre de la stratégie sur la santé mentale pour 2008-2010;

C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Définition de la torture

5.Le Comité prend note de la déclaration de l’État partie qui affirme qu’en vertu du Code pénal lituanien tous les actes qui peuvent être qualifiés de «torture» au sens de l’article premier de la Convention sont punissables, ainsi que de l’explication donnée par la délégation à ce sujet. Toutefois il est préoccupé de ce que l’État partie n’ait pas incorporé dans sa législation nationale le crime de torture tel qu’il est défini à l’article premier de la Convention. Le Comité regrette aussi de ne pas avoir eu de renseignements permettant de déterminer si des faits constitutifs de l’infraction de torture, qui sont punissables en vertu d’autres dispositions du Code pénal, peuvent dans certains cas être prescrits. Il est d’avis que les actes de torture sont imprescriptibles (art. 1eret 4).

L’État partie devrait prévoir expressément dans sa législation l’incrimination de torture et adopter une définition de la torture qui couvre tous les éléments figurant à l’article premier de la Convention. Le Comité considère qu’en énonçant le crime de torture, en le définissant conformément à la Convention et en l’érigeant en une infraction distincte des autres, les États parties feront directement avancer la réalisation de l’objectif fondamental de la Convention, qui est de prévenir les actes de torture, notamment en appelant l’attention de tous, y compris des auteurs de tels faits, des victimes et du grand public, sur la gravité particulière de ce crime et en augmentant l’effet dissuasif de l’interdiction elle-même. Le Comité recommande à l’État partie de revoir les règles et les dispositions relatives à la prescription de façon à les rendre entièrement conformes à ses obligations en vertu de la Convention, afin que les actes de torture ainsi que les tentatives de torture et tout acte, commis par toute personne, qui constitue une complicité ou une participation à l’acte de torture, comme il est établi à l’article premier de la C onvention, puissent faire l’objet d’une enquête et que les responsables puissent être poursuivis et punis sans qu’il y ait prescription.

Institution nationale pour la promotion des droits de l ’ homme

6.Le Comité note qu’il existe en Lituanie des médiateurs, notamment un Médiateur désigné par le Seimas. Toutefois, il regrette de ne pas avoir reçu de renseignement sur le nombre de plaintes dénonçant des mauvais traitements ou des tortures reçues par le Médiateur du Seimas, sur le nombre d’enquêtes qu’il a pu mener, le nombre d’affaires qui ont abouti à un procès et le résultat des procès, notamment la nature des peines prononcées et les indemnisations offertes aux victimes le cas échéant. Le Comité regrette également le manque d’informations sur les ressources humaines et financières allouées au Médiateur (art. 2).

L’État partie devrait prendre des mesures appropriées pour garantir le bon fonctionnement de l’institution du Médiateur, notamment en lui allouant les ressources humaines et financières requises. L’État partie devrait faire figurer dans son prochain rapport périodique de plus amples renseignements sur les dossiers ouverts pour mauvais traitements perpétrés par des fonctionnaires de police et d’autres agents de l’État ou les cas qui ont fait l’objet d’une enquête. L’État partie est encouragé à demander l’accréditation auprès du Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion des droits de l’homme pour garantir que le bureau du Médiateur soit conforme aux principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris, annexe à la résolution 48/134 de l’Assemblée générale), notamment en ce qui concerne son indépendance.

Garanties fondamentales

7.Le Comité prend note de l’adoption par le Ministre de la santé de l’ordonnance no V‑8 de 2004 portant réglementation des objectifs et des fonctions des postes médicaux dans les centres de détention. Il note toutefois avec préoccupation que cette ordonnance peut ne pas donner aux détenus le droit de demander à être examiné par le médecin de leur choix et le droit d’être effectivement examiné, et regrette de ne pas avoir eu de renseignements sur le nombre de médecins qui travaillent actuellement dans les lieux de détention et sur les modalités permettant de faire en sorte que les détenus puissent avoir accès à un médecin (art. 2 et 16).

L’État partie devrait prendre des mesures effectives pour faire en sorte que tous les détenus bénéficient dans la pratique des garanties fondamentales prévues par la loi, y compris du droit de consulter un médecin. Le Comité recommande à l’État partie de donner de plus amples renseignements sur le nombre de médecins qui travaillent actuellement dans les centres de détention et sur les modalités permettant de garantir que tous les détenus aient bien accès à un médecin.

Demandeurs d’asile

8.Le Comité accueille avec satisfaction les renseignements donnés par la délégation, qui a expliqué que la loi sur le statut juridique des étrangers (loi sur les étrangers) avait été modifiée en novembre 2006 et que désormais les demandeurs d’asile n’étaient plus placés en détention, même ceux qui entraient ou séjournaient illégalement dans le pays. Le Comité note que l’État partie assure une visite médicale obligatoire aux demandeurs d’asile nouvellement arrivés dès qu’ils entrent dans la structure d’hébergement du Centre d’enregistrement des étrangers à Padrade, mais il s’inquiète de ce qu’aucun mécanisme n’est en place pour identifier les personnes qui ont des besoins particuliers et les éventuelles victimes de torture ou de mauvais traitements. Le Comité s’inquiète également de ce que tous les demandeurs d’asile, y compris les femmes seules ou les femmes avec enfants, et les demandeurs d’asile traumatisés soient hébergés dans le même bâtiment (art. 2 et 16).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour offrir des conditions d’accueil appropriées aux demandeurs d’asile ayant des besoins particuliers, comme les femmes seules ou les femmes avec enfants, ainsi que les demandeurs d’asile traumatisés, en aménageant des lieux d’hébergement séparés. Il  recommande également de dispenser au personnel médical, aux travailleurs sociaux dans les centres d’accueil et à toutes les autres personnes qui participent à la procédure de détermination du statut de réfugié une formation approfondie et de veiller à ce qu’ils soient sensibilisés à la question de la torture et des mauvais traitements afin d’identifier rapidement les victimes et de pouvoir les adresser aux services médicaux et psychosociaux appropriés.

Non-refoulement

9.Le Comité note que l’article 130 de la loi sur les étrangers interdit le refoulement dans les cas où il y a des motifs sérieux de croire que l’intéressé sera soumis à la torture ou à un traitement cruel, inhumain ou dégradant mais il note avec préoccupation que le principe du non‑refoulement ne s’applique pas à l’égard d’un étranger qui, pour des raisons sérieuses, constitue une menace pour la sécurité de la République de Lituanie ou a été condamné par un jugement exécutoire pour une infraction sérieuse ou grave et qui représente une menace pour la population (art. 3).

L’État partie devrait veiller à respecter intégralement les dispositions de l’article 3 de la Convention et faire en sorte que la situation des individus placés sous sa juridiction soit examinée en tenant compte de toutes les considérations pertinentes par les autorités compétentes et qu’ils bénéficient d’un traitement équitable à tous les stades de la procédure, ce qui comprend la possibilité de faire réviser de façon effective, indépendante et impartiale les décisions d’expulsion, de renvoi ou d’extradition.

À ce sujet, l’État partie devrait veiller à ce que les autorités judiciaires et administratives compétentes procèdent à un examen approfondi et exhaustif , avant de rendre un arrêté d’expulsion, dans tous les cas où un étranger est entré ou séjourne illégalement en Lituanie, même dans le cas où l’individu peut représenter une menace pour la sécurité, afin de s’assurer que l’intéressé ne risque pas d’être soumis à la torture ou à un traitement ou une peine cruel, inhumain ou dégradant dans le pays où il serait renvoyé.

Formation

10.Le Comité relève avec satisfaction l’adoption du Programme de développement du système de la police dont l’objectif est notamment de créer un système de gestion intégré pour la sélection, la formation, l’amélioration des compétences et le recyclage des membres de la police, ainsi que du plan de mesures de 2007 pour la mise en œuvre du Programme de développement. Il note également les renseignements détaillés apportés par l’État partie sur les programmes et les cours de formation à l’intention des agents des forces de l’ordre, des personnels pénitentiaires, des gardes frontière, des agents des services des migrations, des agents des départements chargés d’inspecter les établissements pénitentiaires, des spécialistes des soins de santé et des psychologues, etc. Il regrette toutefois le peu de renseignements donnés sur le suivi et l’évaluation de ces programmes de formation et l’absence d’informations sur les résultats de la formation dispensée à tous les agents compétents, notamment aux agents des forces de l’ordre, aux personnels pénitentiaires et aux gardes frontière, et sur l’utilité de ces programmes pour réduire le nombre de cas de torture et de mauvais traitement (art. 10).

L’État partie devrait développer plus avant les programmes de formation pour faire en sorte que tous les agents des forces de l’ordre, les personnels pénitentiaires et les gardes frontière connaissent bien les dispositions de la Convention, et sachent qu’aucun manquement ne sera toléré, que toute violation donnera lieu à une enquête et que son auteur sera poursuivi. Tous les personnels devraient recevoir une formation spéciale afin d’apprendre à détecter les signes de torture et de mauvais traitement. Le Comité recommande que le Protocole d’Istanbul (Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants) fasse partie intégrante de la formation des médecins et qu’il soit traduit en lituanien. Il recommande en outre à l’État partie d’élaborer et d’appliquer une méthode pour évaluer l’efficacité des programmes de formation et d’enseignement ainsi que leur incidence sur la réduction du nombre de cas de torture, de violence et de mauvais traitement.

Détention provisoire

11.Le Comité prend note des changements qui ont été introduits dans la réglementation juridique du fonctionnement des locaux de détention de la police, notamment l’adoption en mai 2007 du Règlement intérieur des locaux de détention des établissements de la police territoriale et le Manuel de sécurité et d’entretien des locaux de détention des établissements de la police territoriale. Il prend note également de la loi sur l’exécution de la détention qui entrera en vigueur au 1er avril 2009 et qui énonce les conditions de détention dans les quartiers de détention provisoire et contient une interdiction claire et directe de soumettre toute personne en détention à la torture ou à un traitement cruel ou dégradant. Le Comité reste préoccupé toutefois par les informations faisant état de la durée prolongée de la détention provisoire et de la détention administrative, qu’il s’agisse de mineurs ou d’adultes, et s’inquiète du risque élevé de mauvais traitement que cette détention comporte; il regrette que des mesures de substitution à l’emprisonnement ne soient pas utilisées (art. 2, 11 et 16).

L’État partie devrait prendre les mesures voulues pour réduire encore la durée de la garde à vue et de la détention avant inculpation, et concevoir et appliquer des mesures de substitution à l’emprisonnement, comme la probation, la médiation, le travail d’intérêt général ou les peines avec sursis.

Conditions de détention

12.Le Comité est préoccupé par le fait que, malgré les mesures prises par l’État partie pour améliorer les conditions de détention, notamment dans le contexte du Programme de rénovation des établissements de détention et d’amélioration des conditions de vie des détenus (2004), le surpeuplement des lieux de détention n’a pas disparu, en particulier dans les quartiers de détention avant jugement et dans le service hospitalier des institutions pénitentiaires. Le Comité note que les conditions de détention se sont considérablement améliorées ces dernières années mais il est préoccupé par la situation générale dans certaines prisons et quartiers de détention avant jugement, notamment par l’insuffisance des infrastructures et l’absence d’hygiène. De plus, le Comité donne acte de la mise en œuvre de programmes de prévention de la violence dans les centres de détention mais il est préoccupé par la violence qui règne entre les détenus et par l’absence de données statistiques ventilées en fonction d’indicateurs précis permettant de déterminer plus facilement les causes profondes de la violence et de concevoir des stratégies de prévention et de réduction des cas de violence (art. 11 et 16).

Le Comité recommande à l’État partie:

a) De poursuivre ses efforts pour réduire le surpeuplement des établissements pénitentiaires, notamment dans les quartiers de détention avant jugement et dans le service hospitalier des établissements pénitentiaires, par exemple en recourant à des peines de substitution à l’emprisonnement et en augmentant les ressources budgétaires allouées pour développer et rénover l’infrastructure des prisons et des autres lieux de détention;

b) De prendre des mesures effectives pour améliorer encore les conditions de vie dans les centres de détention, notamment dans les prisons et les quartiers de détention avant jugement;

c) De prendre des mesures concrètes pour surveiller systématiquement et effectivement tous les lieux de détention;

d) De surveiller les cas de violence entre les détenus et de les analyser afin d’en dégager les causes profondes et d’élaborer des stratégies de prévention appropriées, et de communiquer au Comité des données ventilées selon des indicateurs appropriés .

Utilisation excessive de la force et mauvais traitements

13.Le Comité est préoccupé par les nombreuses allégations faisant état d’une utilisation excessive de la force et de mauvais traitements de la part des forces de l’ordre et par le faible nombre de condamnations prononcées dans de telles affaires. Il regrette en outre l’absence de données statistiques sur les plaintes, les poursuites et les condamnations pour utilisation excessive de la force et mauvais traitements de la part de membres de forces de l’ordre (art. 4, 12 et 16).

L’État partie devrait prendre des mesures efficaces pour signifier clairement et sans ambiguïté à tous les échelons de la hiérarchie policière que la torture, les mauvais traitements et une utilisation excessive de la force sont inacceptables, y compris en faisant appliquer le Code d’éthique de la police lituanienne de 2004, et veiller à ce que les membres des forces de l’ordre ne recourent à la force qu’en cas de stricte nécessité et dans la mesure exigée par l’exercice de leurs fonction s . Rappela nt le paragraphe 2 de l’article  4 de la Convention, le Comité souligne que l’État partie doit appliquer des sanctions qui soient à la mesure de l’infraction commise et il encourage l’État partie à collecter des statistiques sur les sanctions disciplinaires prononcées .

Ouverture rapide d’enquêtes approfondies et impartiales

14.Le Comité regrette le manque d’informations sur le système qui est en place pour permettre d’examiner les plaintes individuelles relatives aux fautes commises par des policiers dans l’exercice de leurs fonctions et il est préoccupé par le nombre de plaintes dénonçant l’utilisation de la force et les mauvais traitements de la part de membres des forces de l’ordre, par le petit nombre d’enquêtes menées dans ces affaires et par le nombre très faible de condamnations prononcées dans les affaires ayant donné lieu à une enquête (art. 12 et 16).

Le Comité recommande à l’État partie:

a) De renforcer les mesures prises pour que toutes les allégations de torture ou de mauvais traitements par des agents des forces de l’ordre fassent sans délai l’objet d’enquêtes approfondies impartiales et efficaces. En particulier, ces enquêtes devraient être menées non pas par la police ou sous l a responsabilité de celle ‑ci , mais par un organe indépendant. C oncernant les affaires dans lesquelles il existe de fortes présomptions que la plainte pour torture ou mauvais traitements est fondée, l’auteur présumé de ces actes devrait en principe être suspendu de ses fonctions ou muté pendant la durée de l’enquête, en particulier s’il risque de faire obstruction à l’enquête;

b) De veiller à ce que les auteurs de ces actes soient traduits en justice et que ceux qui sont reconnus coupables soient condamnés à des peines appropriées afin de mettre un terme à l’impunité des membres des forces de l’ordre qui ont violé la Convention.

Brutalités à l’encontre de conscrits

15.Le Comité prend note des informations données par la délégation, mais il reste préoccupé par les allégations faisant état de brutalités commises à l’encontre de conscrits dans l’armée (art. 16).

L’État partie devrait veiller à ce que toutes les allégations de mauvais traitements à l’encontre de conscrits dans l’armée fassent sans délai l’objet d’enquêtes impartiales et approfondies et à ce que les auteurs de ces mauvais traitements soient poursuivis en justice et condamnés à des peines appropriées. À ce propos , l’État partie devrait veiller à ce que toutes les plaintes déposées contre des militaires soient examinées par un organe indépendant et impartial. L’État partie est invité à donner des informations détaillées sur les mesures effectivement prises pour prévenir et combattre de tels actes.

Indemnisation et réadaptation

16.Le Comité prend note de l’adoption de la loi sur l’indemnisation des dommages résultant de crimes violents et de la création du Fonds pour les victimes de crimes, mais il regrette l’insuffisance des informations apportées sur le nombre de victimes de torture ou de mauvais traitements qui auraient été indemnisées et sur les montants accordés, ainsi que l’absence d’informations sur les traitements, les services de réadaptation sociale et les autres formes d’assistance, y compris les services de réadaptation médicale et psychosociale, proposés à ces victimes. Le Comité regrette en outre l’absence de programme visant spécifiquement à protéger les droits des victimes de torture ou de mauvais traitements (art. 14).

L’État partie devrait intensifier ses efforts en ce qui concerne l’indemnisation, la réparation et la réadaptation , afin d’accorder réparation aux victimes, de leur assurer une indemnisation équitable et adéquate et de leur donner accès aux moyens nécessaires à la réadaptation la plus complète possible. Il devrait mettre en place un programme spécifique d’assistance aux victimes de tortures et de mauvais traitements. En outre, il devrait faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur tout programme de réparation ainsi que sur le traitement des traumatismes et les autres formes de réadaptation offertes aux victimes de torture et de mauvais traitements, et indiquer si des ressources suffisantes ont été allouées pour le bon fonctionnement de ces programmes. L’État partie est invité à adopter l’amendement à la loi sur l’indemnisation des dommages résultant de crimes violents, proposé au Seimas le 31 octobre 2007.

17.Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des poursuites et des condamnations des auteurs de crimes contre l’humanité, y compris d’actes de torture possibles, commis pendant l’occupation nazie et l’occupation soviétique. Il est également préoccupé par l’absence de renseignements sur les mesures de réadaptation et autres offertes aux victimes (art. 12 et 14).

Le Comité considère que le fait de ne pas poursuivre les responsables et le fait de ne pas assurer une réadaptation adéquate sont des éléments constitutifs d’un manquement de la part de l’État partie, qui ne s’acquitte pas entièrement de l’obligation imposée dans la C onvention de prévenir la torture et les mauvais traitements, notamment par l’éducation et la réadaptation. L’État partie devrait veiller à ce que tous les actes de ce type fassent sans délai l’objet d’une enquête impartiale et approfondie et que leurs auteurs soient traduits en justice et condamnés à des peines appropriées, qui soient à la mesure de la gravité de leurs actes, et d’offrir des moyens de réadaptation aux victimes, ainsi que de prendre des mesures pour empêcher l’impunité

Interdiction d’invoquer à titre de preuve des déclarations obtenues sous la torture

18.Le Comité se déclare préoccupé de ce que l’État partie n’ait pas de législation uniforme garantissant que toute déclaration dont il est établi qu’elle a été obtenue par la torture ne soit pas invoquée comme preuve dans une procédure quelle qu’elle soit, conformément à l’article 15 de la Convention.

L’État partie devrait veiller à ce que la législation relative aux modes de preuve s produites dans une procédure judiciaire soit rendue conform e avec l’article 15 de la Convention, de manière à exclure explicitement tout e preuve obtenu e par la torture.

Droits des groupes vulnérables et discrimination

19.Le Comité prend note d’un certain nombre de mesures adoptées par l’État partie, dont la Stratégie pour l’élaboration d’une politique relative aux minorités ethniques jusqu’en 2015, le Programme d’insertion des Roms dans la société lituanienne 2008-2010 et le Programme national de lutte contre la discrimination 2006-2008, mais il est préoccupé par les informations indiquant que les minorités ethniques, en particulier les Roms, sont victimes de mauvais traitements et de discrimination. À ce sujet, il est préoccupé par les informations selon lesquelles les mauvais traitements imputables aux forces de l’ordre, en particulier à la police, visent souvent des personnes appartenant à des minorités ethniques. Le Comité est également préoccupé par le manque d’informations sur le nombre de crimes motivés par la haine dans le pays et sur l’existence d’un système d’enregistrement et de suivi de ces crimes (art. 16).

L’État partie devrait intensifier ses efforts pour combattre la discrimination et les mauvais traitements à l’égard des minorités ethniques, en particulier des R oms, notamment en veillant à la stricte application de la législation et des règlements prévoyant des sanctions. L’État partie devrait faire en sorte que tous les actes de violence de ce type fassent sans délai l’objet d’une enquête impartiale et approfondie, que le ur s auteurs soient traduits en justice et condamnés à des peines appropriées , qui soient à la mesure de la gravité de leurs actes, que les agents des forces de l’ordre reçoivent une formation adéquate ainsi que des instructions, et que les autorités judiciaires soient sensibilisé e s au problème. L ’État partie est invité à faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur le nombre de crimes motivés par la haine et sur les mesures effectives adoptées pour prévenir et combattre de tels actes. Il prend note des informations apportées par l’État partie qui a fait savoir que le nouveau programme national de lutte contre la discrimination 2009-2011 était en cours d’élaboration et engage l’État partie à veiller à ce que les crédits budgétaires nécessaires soient dégagés pour permettre sa bonne application.

Violence dans la famille

20.Le Comité prend note des diverses mesures prises par l’État partie, dont l’approbation par le Gouvernement, le 22 décembre 2006, d’une stratégie nationale à long terme pour la réduction de la violence à l’égard des femmes et d’un plan d’application 2007-2009. Toutefois il est préoccupé par la forte prévalence de la violence à l’égard des femmes et des enfants, y compris dans la famille, et regrette que la législation nationale ne donne pas de définition de la violence dans la famille et que cette violence ne soit pas reconnue comme une infraction spécifique. Il regrette également que le nombre de centres d’accueil d’urgence, pour la plupart créés et gérés par des ONG, soit insuffisant en raison du manque de soutien financier de la part du Gouvernement. Le Comité note que la police territoriale a commencé à recueillir, compiler et analyser des données sur la violence familiale, mais il regrette qu’il n’y ait pas de statistiques sur la violence dans la famille à l’échelle de l’État et qu’aucune donnée statistique sur les plaintes, les poursuites et les condamnations dans des affaires de violence familiale n’ait été apportée (art. 1er, 2, 12 et 16).

L’État partie devrait intensifier ses efforts pour prévenir, combattre et réprimer la violence à l’égard des femmes et des enfants, notamment dans la famille. Le Comité l’engage à allouer des ressources financières suffisantes pour assurer l’application effective de la stratégie nationale pour la réduction de la violence à l’égard des femmes et à suivre de près les résultats obtenus. L ’État partie d evrait créer une infraction pénale spécifique pour la violence dans la famille. Il est encouragé à participer directement aux programmes de réadaptation et de conseils juridique s et à veiller à ce que toutes les femmes victimes de violence dans la famille aient accès à un nombre suffisant de refuges sûrs et disposant d’un financement adéquat. L’État partie est également invité à mener des campagnes de sensibilisation à plus grande échelle à l’intention des professionnels (juges, personnels de justice , membres des forces de l’ordre et travailleurs sociaux) qui sont en contact direct avec les victimes. En outre, le Comité lui recommande d ’intensifier ses efforts pour recherche r et collecte r de s données sur la violence familiale, y compris sa prévalence, ses causes et ses conséquences.

Traite des êtres humains

21.Le Comité donne acte des mesures législatives et autres visant à lutter contre la traite des femmes et des enfants, notamment à des fins d’exploitation sexuelle comme le Programme pour la prévention et la répression de la traite des êtres humains 2005-2008, la création en 2006, au sein du Département de la police du Ministère de l’intérieur, d’un département spécialisé dans les enquêtes sur la traite des êtres humains, et la ratification en 2003 du Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Toutefois, le Comité est préoccupé par des informations persistantes faisant état d’un trafic transfrontalier de femmes à des fins d’exploitation, notamment sexuelle, et regrette que le nombre de poursuites engagées dans ce domaine soit faible. Il regrette également que l’État partie n’ait pas mis en place un mécanisme efficace pour suivre et évaluer l’ampleur et les conséquences du phénomène et pour le combattre efficacement (art. 2, 10 et 16).

L’État partie devrait continuer de prendre des mesures efficaces pour poursuivre et punir les responsables de la traite d ’êtres humains , notamment en veillant à la stricte application de la législation pertinente. Il devrait mener des campagnes nationales de sensibilisation, offrir aux victimes de la traite des programmes appropriés de soutien, de réadaptation et de réinsertion et dispenser aux agents des forces de l’ordre, aux fonctionnaires de l’immigration et à la police des frontières une formation portant sur les causes et les conséquences de la traite des personnes et des autres formes d’exploitation et sur l’incidence du phénomène.

Collecte de données

22.Le Comité note que l’État partie a apporté quelques statistiques, mais il regrette le manque de données complètes et ventilées sur les plaintes, les enquêtes, les poursuites et les condamnations dans les affaires de torture et de mauvais traitements imputés à des membres des forces de l’ordre, ainsi que sur la traite des personnes, la violence familiale et la violence sexuelle. Il regrette également le manque de statistiques sur les demandeurs d’asile et les non‑ressortissants ainsi que sur la violence entre détenus (art. 12 et 13).

L’État partie devrait mettre en place un système efficace pour recueillir toutes les données statistiques pertinentes pour le suivi de la mise en œuvre de la Convention au niveau national, notamment celles qui concernent les plaintes, les enquêtes, les poursuites et les condamnations dans les affaires de torture et de mauvais traitements, la violence entre détenus, la traite des personnes et la violence familiale ou sexuelle . Le Comité reconnaît que la collecte de données personnelles soulève des problèmes délicats et souligne que des mesures appropriées devraient être prises pour garantir la confidentialité de ces données.

23.Le Comité prend note de la déclaration de la délégation qui a indiqué que des discussions approfondies étaient en cours sur l’éventuelle ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et encourage l’État partie à ratifier le Protocole facultatif.

24.Le Comité invite l’État partie à ratifier les principaux instruments de protection des droits de l’homme des Nations Unies auxquels il n’est pas encore partie, c’est-à-dire la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Il l’invite aussi à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

25.Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de faire les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention.

26.Le Comité invite l’État partie à soumettre son document de base en suivant les instructions relatives à l’établissement du document de base commun qui figurent dans les directives harmonisées pour l’établissement des rapports, approuvées par les organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et publiées sous la cote HRI/GEN/2/Rev.5.

27.L’État partie est encouragé à diffuser largement les rapports qu’il soumet au Comité ainsi que les présentes observations finales, dans les langues appropriées, par le biais des sites Web officiels, des médias et des organisations non gouvernementales.

28.Le Comité demande à l’État partie de lui faire parvenir, dans un délai d’un an, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 7, 12, 14 et 15.

29.L’État partie est invité à soumettre son prochain rapport périodique, qui sera considéré comme le troisième, d’ici au 21 novembre 2012.

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