Nations Unies

CED/C/ALB/Q/1/Add.1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

8 mars 2018

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des disparitions forcées

Quatorzième session

22 mai-1er juin 2018

Point 6 de l’ordre du jour provisoire

Examen des rapports des États parties à la Convention

Liste de points concernant le rapport soumis par l’Albanie en application du paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention

Additif

Réponses de l’Albanie à la liste de points *

[Date de réception : 5 mars 2018]

Introduction

1.La République d’Albanie a ratifié la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées par la loi no 9802 du 13 septembre 2007. Dans cette loi, l’Albanie déclare qu’elle reconnaît la compétence du Comité des disparitions forcéespour recevoir et examiner des communications présentées par des personnes ou au nom de personnes relevant de sa juridiction qui se plaignent d’être victimes d’une violation, par l’État albanais, des dispositions de ladite Convention (art. 31 de la Convention). Elle déclare aussi qu’elle reconnaît la compétence du Comité des disparitions forcées pour recevoir et examiner des communications par lesquelles un État partie prétend qu’un autre État partie ne s’acquitte pas de ses obligations au titre de la Convention (art. 32).

2.En application de l’article 29 de la Convention, la République d’Albanie soumet au Comité des disparitions forcées le deuxième rapport sur les mesures qu’elle a prises pour donner effet à ses obligations au titre de la Convention.

3.La République d’Albanie considère le processus de préparation et de communication du rapport à la fois comme un moyen de garantir le respect des obligations internationales et comme une occasion d’évaluer et de présenter la situation des droits de l’homme aux fins de l’adoption des dispositions légales nécessaires et de la mise en œuvre de la Convention.

4.Le rapport a été élaboré conformément aux Directives du Comité sur les disparitions forcées concernant la forme et le contenu des rapports. En application des directives, le rapport s’accompagne du document de base commun présenté en 2012, qui a été établi selon les directives harmonisées pour l’établissement de rapports devant être soumis au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Le rapport a été élaboré conformément à la résolution A/68/268 sur la préparation des rapports des États parties, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 avril 2014.

5.Le Ministère des affaires étrangères, qui est l’institution chargée de préparer les rapports nationaux sur les droits de l’homme, a fourni des informations aux institutions compétentes aux fins de l’établissement du présent rapport.

6.Le rapport national sur la mise en œuvre de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées a été adopté par décision du Conseil des ministres.

7.Le rapport contient des informations sur le cadre juridique et le cadre institutionnel général régissant les activités relatives à l’interdiction de disparition forcée, ainsi que des informations sur les mesures devant être prises aux fins de l’application des articles 1 à 25 de la Convention.

8.Le respect et la protection des droits de l’homme comptant au nombre de leurs priorités, les institutions albanaises sont déterminées à s’acquitter des obligations internationales découlant des conventions relatives aux droits de l’homme. En vertu du décret no 112 du Premier Ministre daté du 5 mars 2014 portant création du groupe de travail interinstitutions chargé de rédiger les rapports concernant les conventions internationales relatives aux droits de l’homme et de participer à leur examen, le Ministère des affaires étrangères coordonne le processus d’élaboration des rapports nationaux sur la mise en œuvre des conventions relatives aux droits de l’homme, notamment le rapport au titre de la présente convention, en coopération avec des institutions publiques et des organismes indépendants.

Cadre juridique général de l’interdiction de la disparition forcée

9.L’Albanie est déterminée à constamment améliorer les normes relatives à la protection et au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Elle donne, dans ce cadre et conformément à ses obligations internationales, la priorité à l’amélioration de sa législation interne. La Constitution albanaise, les accords internationaux ratifiés intégrés à l’ordre juridique interne, les lois, les actes normatifs du Conseil des ministres ainsi que les actes subsidiaires garantissent la réalisation concrète des droits de l’homme. La législation albanaise, qui est systématiquement améliorée et enrichie, garantit la prévention de la disparition forcée, comme le veut la Convention.

Instruments internationaux relatifs à la disparition forcée

10.La République d’Albanie est partie à toutes les conventions internationales relatives aux droits de l’homme conclues sous l’égide de l’ONU ainsi qu’à un certain nombre d’autres instruments internationaux, ce qui témoigne de sa volonté d’honorer ses engagements internationaux dans le domaine des droits de l’homme. Les instruments internationaux auxquels elle est partie contenant des dispositions spécifiques qui concernent, directement ou indirectement, la prévention des disparitions forcées et qui sont inscrites dans la législation pénale, sont les suivants :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ratifiée par la loi no 8137 du 31 juillet 1996), en particulier les dispositions sur le droit à la vie, sur l’interdiction de la torture et sur le droit à la liberté et à la sûreté) ; ses Protocoles additionnels (Protocoles 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 11, 12, 13, 14). S’agissant de la peine de mort, l’Albanie a adopté la loi no 9639 du 9 novembre 2006 intitulée « Ratification du Protocole no 13 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales relative à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances ». Elle doit être éliminée par suite de ce qui suit ;

Pacte international relatif aux droits civils et politiques :

Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (auquel l’Albanie a adhéré par la loi no 9725 du 7 mai 2007) ;

Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort (auquel l’Albanie a adhéré par la loi no 9726 du 7 mai 2007) ;

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (à laquelle l’Albanie a adhéré par la loi no 7727 du 30 juin 1993) :

Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture (ratifié par la loi no 9094 du 3 juillet 2003), sur la mise en place de Mécanismes nationaux de prévention de la torture ;

Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (à laquelle l’Albanie a adhéré par la loi no 8135 du 31 juillet 1996) ;

Statut de Rome de la Cour pénale internationale (ratifiée par la loi no 8984 du 23 décembre 2002) ;

Convention européenne d’extradition et deux Protocoles additionnels (ratifiée par la loi no 8322 du 4 avril 1998) ;

Convention du Conseil de l’Europe sur la transmission des procédures répressives (ratifiée par la loi no 8497 du 10 juin 1999) ;

Convention du Conseil de l’Europe sur l’entraide judiciaire en matière pénale (ratifiée par la loi no 8498 du 10 juin 1999) ;

Convention du Conseil de l’Europe sur le transfèrement des personnes condamnées (ratifiée par la loi no 8499 du 10 juin 1999) ;

Convention de Genève de 1949 et ses Protocoles additionnels ;

Les autorités albanaises ont mis en place un mécanisme de coopération efficace avec le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Ce Comité a effectué 10 visites de suivi en Albanie.

La Convention dans l’ordre juridique interne

11.En Albanie, le droit international bénéficie d’un statut privilégié par rapport au droit interne ; à ce titre, la Convention prime la législation nationale. L’obligation de l’État albanais de respecter le droit international est inscrite dans la Constitution, dont l’article 122 dispose que tout accord international ratifié devient partie intégrante du droit interne après avoir été publié au Journal officiel. Ce même article précise que les dispositions du droit international sont directement applicables, sauf lorsque leur exécution nécessite la promulgation d’une loi. Les accords internationaux qui ont été ratifiés prévalent en cas de conflit avec les lois nationales, de même que les normes publiées par les organisations internationales lorsque l’application directe de ces normes émises par l’organisation est expressément prévue dans l’accord d’adhésion à cette organisation ratifié par la République d’Albanie.

12.En se fondant sur les règles et les principes relatifs à l’application de normes juridiques, on peut conclure que les justiciables ne peuvent requérir l’application des articles de la Convention que lorsque leur mise en œuvre est prévue par la législation en vigueur et ne nécessite pas l’établissement de mécanismes internes. Compte tenu des obligations découlant de la Convention, lorsqu’un de ses articles exige l’adoption de dispositions juridiques internes ou l’établissement de mécanismes nationaux de mise en œuvre (en l’absence de mécanismes appropriés) pour l’application des normes et dispositions de la Convention, l’Albanie garantit la qualification d’infraction de la « disparition forcée » dans le Code pénal ainsi que dans d’autres dispositions juridiques. Il importe de souligner que, en vertu de l’article 122 de la Constitution, cette Convention fait partie intégrante de l’ordre juridique interne, mais que toutes ses dispositions ne sont pas exécutables telles qu’elles. Il est nécessaire, pour assurer l’application des dispositions en vertu de cet article, de recenser les dispositions de la Convention qui peuvent être appliquées directement en droit interne et celles dont l’application doit, en pratique, donner lieu à l’adoption de mesures particulières. Il est possible de conclure, sur la base d’un examen général de la législation en vigueur que certaines des dispositions de la Convention sont appliquées directement ou indirectement dans la législation nationale.

Cadre institutionnel (autorités judiciaires, institutions, mécanismes nationaux) de la protection et de la promotion des droits de l’homme

13.La Constitution albanaise consacre le principe de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Le pouvoir judiciaire est exercé par la Cour suprême, les cours d’appel et les tribunaux de première instance, établis par la loi. La Cour constitutionnelle garantit le respect de la Constitution et en donne l’interprétation finale. Elle joue aussi un rôle important dans la protection des droits de l’homme, car elle statue en dernier ressort dans les recours formés par des personnes physiques pour violation de leurs droits constitutionnels à une procédure régulière, lorsque tous les moyens de recours légaux ont été épuisés.

14.Un cadre légal global a été adopté pour l’organisation et le fonctionnement du pouvoir judiciaire afin de garantir la protection des droits de l’homme et l’application du droit interne. Les juridictions compétentes sont les suivantes : les tribunaux de district, les cours d’appel, la Cour suprême, la Cour constitutionnelle, le Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves, les tribunaux militaires et le tribunal administratif. Les autorités judiciaires compétentes pour traiter les questions relatives au contenu de la Convention sont la Cour constitutionnelle, la Cour suprême, les tribunaux de district et le Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves. Ce dernier connaît des affaires relevant du droit pénal, y compris les infractions de disparition forcée.

15.Le Code de procédure pénale dispose que les cours et les tribunaux sont les organes chargés de rendre la justice. S’agissant des « juridictions pénales », les juridictions compétentes sont les tribunaux correctionnels de première instance, les cours d’appel et la Cour suprême. Le Tribunal de première instance appelé à juger les infractions graves est entré en fonctions en 2004 ; son rôle est de lutter contre les crimes graves et le crime organisé et de les juger avec impartialité et efficacité. Il exerce sa compétence territoriale sur l’ensemble du territoire albanais et est saisi de diverses infractions prévues par le Code pénal, y compris lorsqu’il s’agit d’entités relevant du tribunal militaire. Le tribunal militaire est compétent pour juger les soldats, les prisonniers de guerre et tout autre personne accusée d’une infraction au regard du Code pénal militaire ou d’autres dispositions légales, à l’exception des cas relevant de la compétence du Tribunal de première instance appelée à juger les infractions graves et de la Cour suprême.

16.En vertu de la Constitution, le parquet exerce les poursuites pénales et représente l’État devant les tribunaux. La loi no 8737 du 12 février 2001 sur l’organisation et le fonctionnement du ministère public de la République d’Albanie (telle que modifiée) dispose que : « Le parquet exerce les poursuites pénales et représente l’État devant les tribunaux ; il garantit et supervise l’exécution des condamnations pénales et s’acquitte d’autres tâches prévues par la loi. Les magistrats du parquet exercent leur action en accord avec la Constitution et la loi et dans les limites des pouvoirs qui leur sont conférés, en respectant pleinement les principes d’une procédure équitable et régulière et de la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Le parquet est une structure centralisée, dirigée par le Procureur général. Il regroupe le Bureau du Procureur général, le Conseil des procureurs et les bureaux des procureurs de la République. ».

17.La police d’État a pour mission de maintenir l’ordre et la sécurité publics et de garantir l’application de la loi en application de la Constitution et des traités internationaux, tout en protégeant les droits de l’homme et les libertés fondamentales. L’exécution de cette mission, en particulier à l’égard des personnes privées de liberté, sous surveillance, arrêtées et retenues dans les locaux de la police, est liée au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales et est régie par ces derniers ainsi que par la loi. Les fonctions de la police d’État consistent à : a) protéger la vie des citoyens et assurer leur sécurité ainsi que celle de leurs biens ; b) maintenir l’ordre et la sécurité publics ; c) prévenir et détecter les infractions pénales et enquêter sur ces dernières et leurs auteurs conformément à la législation et aux règles de procédure pénale ; d) organiser des campagnes d’information et de sensibilisation en vue de prévenir les infractions et les délits et de renforcer la collaboration avec le public ; e) exercer ces fonctions dans le respect de la loi.

18.Le Bureau du Médiateur est un organe constitutionnel indépendant chargé de protéger les droits, libertés et intérêts légitimes des personnes qui peuvent faire l’objet d’actes illégaux ou irréguliers d’organes de l’administration publique, ou de tiers agissant pour leur compte, ou du défaut d’agir de ceux-ci. Il assure, au titre de la Convention contre la torture et de son Protocole facultatif, la fonction de mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, garantit l’exercice de cette activité de prévention et assure une surveillance sous diverses formes. La loi sur les droits et le traitement des personnes privées de liberté prévoit que le Mécanisme national de prévention surveille l’application de la législation en matière de droits de l’homme, exerce ses activités en tant qu’organe distinct, sous la direction du Médiateur. Il soumet ses recommandations aux autorités compétentes aux fins de l’amélioration des conditions de vie et du traitement des détenus. Les modifications apportées à la loi no 155/14 relative au Bureau du Médiateur donnent lieu à l’établissement du Mécanisme national de prévention en tant que section distincte du Bureau du Médiateur. Ce dernier exerce les fonctions de mécanisme national de prévention conformément à la Constitution et aux traités internationaux ratifiés par la législation interne de la République d’Albanie.

19.Le Commissaire à la protection contre la discrimination est une instance importante qui a été créée et opère en vertu de la loi no 10221 du 4 février 2010 relative à la protection contre la discrimination. Cette loi reconnaît à chacun les droits suivants : a) égalité devant la loi et égale protection de la loi ; b) égalité des chances, exercice et jouissance des droits et libertés, participation à la vie publique ; c) protection efficace contre la discrimination et contre toute conduite encourageant la discrimination.

Informations sur les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations présentées par le Comité des disparitions forcées sur différents points

Recommandation II. Définition et criminalisation de la disparition forcée (art. 1er à 7)

20.En ce qui concerne la garantie des droits de l’homme et les cas dans lesquels ils peuvent faire l’objet de restrictions, la Constitution albanaise dispose que :

Article 15 − Les droits et libertés fondamentaux de la personne humaine sont indivisibles, inaliénables et inviolables et constituent le socle de l’ordre juridique. La Constitution fait obligation à toutes les institutions et à tous les pouvoirs publics, dans l’exercice de leurs fonctions, de respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales et de concourir à leur réalisation ;

Article 17 − Toute restriction aux droits et libertés inscrits dans la Constitution doit être réalisée dans le strict cadre de la loi, dans l’intérêt public ou aux fins de la protection d’autres individus. Ces restrictions ne peuvent en aucun cas porter atteinte aux fondements de ces droits et de ces libertés ni dépasser les limites fixées par la Convention européenne des droits de l’homme ;

Article 25 − Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;

Article 27 − Nul ne peut être privé de liberté, sauf dans les cas et selon les procédures prévues par la loi.

21.La Constitution albanaise dispose que des mesures extraordinaires peuvent être imposées en cas de guerre, d’état d’urgence ou de catastrophe naturelle, et pour aussi longtemps que les circonstances l’exigent. Les principes de fonctionnement des organismes publics et l’ampleur des restrictions des libertés et droits fondamentaux autorisées dans ces situations appelant des mesures extraordinaires sont fixés par la loi, de même que les modes d’indemnisation du préjudice causé par ces restrictions. Les mesures extraordinaires prises dans ces situations doivent être proportionnelles au niveau de risque et avoir pour objectif de rétablir les conditions normales de fonctionnement de l’État dans les plus brefs délais. La Constitution comporte des dispositions concernant la protection de la vie, l’égalité devant la loi, de non-discrimination et de non-limitation des libertés et des droits fondamentaux, l’interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, les droits politiques, les droits économiques et sociaux en temps de guerre.

22.Il n’existe en Albanie aucune loi visant à réglementer ou à justifier la violation des droits des personnes arrêtées ou détenues en temps de guerre ou de déstabilisation politique qui, dès lors, pourraient justifier ou autoriser la disparition forcée, l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté, de torture ou de traitements inhumains ou dégradants. De fait, les dispositions de la législation en vigueur s’appliquent dans tous ces cas. La loi no 108/2015 sur la police d’État dispose, au paragraphe 3 de l’article 4, que le statut de la police d’État ne change pas même en cas de guerre, d’état d’urgence ou de catastrophe naturelle. Le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales est donc, en vertu de cette loi, l’un des principes de base régissant les activités de la police d’État. La loi prévoit les mesures nécessaires au maintien de l’ordre public et de la sécurité.

23.S’agissant de l’article 5 de la Convention qui érige la pratique de la disparition en crime contre l’humanité, le Code pénal qualifie la « disparition forcée » de crime contre l’humanité et doit être puni en conséquence. Il dispose expressément, à l’article 74 que, la pratique généralisée et systématique de la disparition forcée étant un crime contre l’humanité :

Le meurtre, la disparition forcée, le massacre, la réduction en esclavage, l’internement, la déportation ou le transfert forcé, ainsi que tout acte de torture ou tout traitement inhumain commis en application d’un plan prémédité ou de manière systématique à l’encontre d’un groupe de civils pour des motifs d’ordre politique, idéologique, racial, ethnique ou religieux, sont passibles d’une peine pouvant aller de quinze ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité.

24.S’agissant des infractions pénales couvertes par les dispositions de l’article 3 de la Convention, aucune modification n’a été apportée aux dispositions de la législation pénale interne énoncées dans le rapport soumis par l’Albanie. Il est précisé au paragraphe 53 de ce rapport que le droit pénal prévoit plusieurs infractions dont la définition est similaire à celle de la disparition forcée, sans toutefois indiquer que les agissements considérés sont imputables à des agents de l’État ou à des personnes ou des groupes de personnes agissant avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État. Comme indiqué précédemment, l’Albanie n’est partie à aucune affaire faisant intervenir ce type d’infraction.

25.S’agissant de la conformité de la législation albanaise à l’article 6 de la Convention concernant la responsabilité pénale, le Code pénal énonce un certain nombre d’infractions commises par une personne dans l’exercice de ses fonctions publiques. Le Code pénal dispose, en particulier, qu’est tenu pour pénalement responsable de la disparition forcée, et est passible d’une peine de trois à sept ans de prison en application de l’article 109/c, le supérieur qui :

a)Savait que des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle commettaient ou allaient commettre un crime de disparition forcée, ou a négligé délibérément de tenir compte d’informations qui l’indiquaient clairement ;

b)Exerçait sa responsabilité et son contrôle sur les activités auxquelles le crime de disparition forcée était lié ; ou

c)Ne prenait pas toutes les mesures nécessaires et raisonnables relevant de sa compétence pour empêcher la personne autorisant, soutenant et approuvant l’approbation forcée ou punissant cette personne, ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins de poursuites pénales.

26.Sur la base de ce qui précède, la législation albanaise définit les principes de responsabilité pénale conformément au droit international applicable.

27.Ainsi qu’indiqué au paragraphe 61 du rapport soumis par l’Albanie, le Code pénal prévoit la pénalisation de différents types d’infraction et de délit, ainsi que les sanctions correspondantes, commis par des représentants de l’État ou des services publics, sachant toutefois que :

Article 21Exercice d’un droit ou accomplissement d’un devoir

Nul ne peut être tenu responsable d’une action menée dans le cadre de l’exercice de ses droits ou de l’accomplissement d’un devoir imposé par la loi ou par un ordre émanant d’une autorité compétente, à moins que cet ordre ne soit manifestement contraire à la légalité.

Toute personne donnant un ordre qui n’est pas conforme à la loi et entraîne la commission d’une infraction pénale est tenue responsable de ladite infraction.

Article 250Commission d’actes arbitraires

Un représentant de l’État ou des services publics qui, dans le cadre de ses fonctions, commet un acte ou donne des ordres arbitraires pouvant porter atteinte à la liberté des citoyens est passible d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à sept ans.

Article 251Manquement à l’obligation de prendre des mesures pour remédier à l’illégalité

Toute personne responsable d’une fonction ou d’un service public qui manque à l’obligation qui lui est faite, dès qu’elle a connaissance d’une situation d’illégalité, de prendre des mesures ou de demander à une personne compétente d’agir pour remédier à l’absence de conformité à la loi d’un acte arbitraire commis dans le cadre de sa fonction ou de son service et portant atteinte à la liberté de citoyens, est passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans.

28.S’agissant des circonstances aggravantes, la législation albanaise considère que le fait qu’un acte soit commis par un représentant de l’État ou de services publics est une circonstance aggravante ; le Code pénal qualifie de circonstance aggravante notamment le fait que l’infraction commise constitue un abus de pouvoir dans l’exercice de fonctions publiques ou de services religieux.

29.S’agissant des informations requises en cas de coopération ou de participation à la commission d’une disparition forcée et à la responsabilité de chaque collaborateur, le Code pénal dispose ce qui suit :

Article 25Définition de la complicité

La complicité est un accord conclu entre deux ou plusieurs personnes en vue de commettre une infraction.

Article 26Complices

Les complices à une infraction pénale sont les organisateurs, les exécutants les instigateurs indicateurs et les aides. Les organisateurs sont ceux qui organisent et gèrent les activités entrant dans le cadre de l’infraction. Les exécutants sont ceux qui commettent directement ces actes. Les instigateurs sont les personnes qui ont incité les complices à commettre l’infraction. Les aides sont celles qui ont aidé à commettre l’infraction en fournissant conseils, instructions ou moyens, en supprimant des obstacles, en promettant d’effacer la trace des auteurs ou de cacher des objets liés à l’infraction.

Article 27Responsabilité des complices

Les organisateurs, les instigateurs et les aides sont responsables de l’infraction commise au même titre que les exécutants.

Le tribunal, auquel il appartient de déterminer la peine des collaborateurs, doit évaluer leur degré de participation et le rôle qu’ils ont joué dans l’infraction.

30.S’agissant de la possibilité pour un subordonné de refuser légalement d’exécuter un ordre de disparition forcée et les recours offerts audit subordonné, il importe de noter que le respect de la légalité est l’un des principes énoncés dans le Code des procédures administratives et est donc inscrit dans le cadre juridique. Les organismes publics doivent, de ce fait, exercer leurs activités conformément aux dispositions de la Constitution de la République d’Albanie, des accords internationaux ratifiés et de la législation albanaise dans les limites de leurs compétences et aux fins pour lesquelles ces dernières leur ont été attribuées. Le droit ou les intérêts légitimes d’une partie ne peuvent pas être remis en cause par une action administrative à moins que la loi n’en dispose ainsi et que cette action soit menée suivant un processus juridique régulier.

31.La loi no 108/2015 sur la police d’État dispose ce qui suit :

Article 86Obligation d’exécuter l’ordre

1.Les fonctionnaires de police sont tenus d’exécuter tous les ordres conformes à la loi qui leur sont donnés par une personne occupant une fonction ou un rang supérieur.

2.Lorsqu’un fonctionnaire de police a des raisons de penser que l’ordre qui lui est donné n’est pas conforme à la loi, il doit sans délai en informer son supérieur et, le cas échéant, lui demander par écrit de lui soumettre cet ordre également par écrit. Le supérieur à qui il est demandé, verbalement ou par écrit, de soumettre son ordre par écrit est dans l’obligation de s’exécuter.

3.Si la non-exécution de l’ordre donné, en attendant la confirmation écrite demandée conformément au paragraphe 2 du présent article, est susceptible de mettre en danger la vie d’une tierce personne, le fonctionnaire de police doit exécuter l’ordre.

4.Lorsque le fonctionnaire de police ayant suivi la procédure définie dans le présent article continue de penser que l’ordre qui lui a été donné n’est pas conforme à la loi, il doit :

a)Contester l’ordre en question, sauf dans le cas prévu au paragraphe 3 du présent article ;

b)En informer immédiatement l’officier de police dont dépend directement le supérieur ayant donné l’ordre, en précisant les mesures qu’il a prises en application du présent article.

5.Les procédures relatives à la communication, à la transmission et au traitement de l’ordre sont définies dans le Règlement de la police.

32.La loi no 10032 du 11 décembre 2008 sur la police pénitentiaire, telle que modifiée, dispose également ce qui suit :

Article 9Rapports établis par la hiérarchie et les fonctions

1.Les agents de police pénitentiaire sont tenus d’exécuter les ordres donnés par leurs supérieurs, chacun selon ses fonctions et, à fonction égale, selon son rang hiérarchique. Les ordres doivent être donnés en fonction du poste occupé et dans le respect de la loi et de la dignité de l’individu auquel ils s’adressent.

2.En l’absence d’un supérieur direct, en situation d’urgence et lorsqu’il n’est pas possible de communiquer avec les officiers de rang supérieur, l’agent ayant le rang hiérarchique le plus élevé est en droit de donner un ordre à un agent de même rang ou de rang inférieur.

Article 10Exécution de l’ordre

1.L’agent de la police pénitentiaire est tenu d’exécuter tout ordre qui lui est donné par un supérieur, sauf s’il estime, sur la base d’éléments probants, que cet ordre est contraire à la loi.

2.Si l’agent de la police pénitentiaire a des raisons de penser que l’ordre verbal qui lui a été donné est contraire à la loi, il doit immédiatement en avertir son supérieur et demander que cet ordre lui soit communiqué par écrit.

3.Si la non-exécution de cet ordre, en attendant l’ordre écrit, conformément au paragraphe 2 du présent article, est susceptible de mettre en danger la vie d’une tierce personne, l’agent de la police pénitentiaire doit exécuter l’ordre.

4.Si l’agent de la police pénitentiaire ayant suivi la procédure définie aux paragraphes 2 et 3 du présent article continue d’avoir des motifs de penser que l’ordre qui lui a été donné n’est pas conforme à la loi, il doit contester l’ordre en question et en informer immédiatement le supérieur de l’officier qui a émis l’ordre, ainsi que les mesures qu’il a prises.

5.Dans tous les cas, quel que soit l’ordre donné, sont tenus pour responsables l’agent qui a donné l’ordre et l’agent qui a exécuté l’ordre, si ce dernier n’a pas respecté les dispositions du présent article. Il existe de ce fait un motif d’engager une procédure disciplinaire à leur encontre.

33.Nous précisons ici, s’agissant de l’article 1, que la législation albanaise considère la disparition forcée comme une infraction pénale en vertu des articles 74 et 109 c) du Code pénal, sur la base de la définition énoncée dans la Déclaration de 1992 relative à la protection de toutes les personnes contre la disparition forcée, qui condamne cet acte et prévoit des peines adaptées à l’extrême gravité de l’infraction. S’agissant des délais de prescription des poursuites pénales en Albanie, les conditions d’extinction des poursuites, des peines et des cas de non-exécution sont définies dans le chapitre VIII de la section générale du Code pénal. Par suite des modifications apportées à l’ensemble des mesures juridiques dans le cadre de la réforme de la justice, l’article 66 du Code pénal impose l’obligation découlant de l’article 8 de la Convention, qui dispose qu’un État partie appliquant un régime de prescription à la disparition forcée doit prendre les mesures nécessaires pour que le délai de prescription de l’action pénale soit de longue durée et proportionné à l’extrême gravité de ce crime. L’article 66, tel que modifié comme indiqué précédemment, double le délai de prescription de toutes les infractions pénales, en particulier les plus graves et celles qui relèvent del’article 109/c. L’article 67 du Code pénal dispose que le régime de prescription ne peut pas s’appliquer aux poursuites de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, comme indiqué au chapitre I du Code qui est spécialement consacré aux crimes contre l’humanité.

34.S’agissant de l’article 1 de la Convention, qui garantit le droit de ne pas être soumis à une disparition forcée en état de guerre ou de menace de guerre, etc., la loi no 108/2014 sur la police d’État dispose que la police d’État a pour fonctions de :

a)Protéger la vie des citoyens et assurer leur sécurité ainsi que celle de leurs biens ;

b)Prévenir et détecter les infractions pénales et enquêter sur ces infractions et leurs auteurs, conformément à la législation et aux règles de procédure pénale.

35.La loi précise que le statut de la police d’État ne change pas même en cas de guerre, d’état d’urgence ou de catastrophe naturelle. Il importe de mentionner ici la période de graves troubles de l’ordre public survenue en 1997, durant laquelle les organes de la police d’État ont pris toutes les mesures nécessaires pour s’acquitter de leur mission et de leurs fonctions, notamment en protégeant la vie et la sécurité des citoyens ainsi que celle de leurs biens, malgré la difficulté de la situation.

36.S’agissant de l’article 2 de la Convention, la loi no 144/2013 modifiant la loi no 7895 du 27 janvier 1995 intitulée Code pénal de la République d’Albanie, qui complète l’article 109/b du Code par l’article 109/c, fait de la disparition forcée une infraction pénale distincte. Elle définit cette dernière de manière pleinement conforme à la définition de l’article 2 de la Convention, en prenant en compte ses différents éléments.

37.S’agissant de l’article 4 de la Convention, le droit pénal albanais prévoit des poursuites et des mesures de lutte en cas de disparition forcée, qu’il définit comme une infraction pénale au même titre que la torture, la privation de liberté et autres infractions similaires. L’article 109/c du Code pénal albanais (tel que modifié par la loi de 2013) définit la disparition forcée en ces termes :

Une disparition forcée, par suite d’une arrestation, de la détention, de l’enlèvement ou de tout autre forme de privation de liberté d’une personne par des agents de l’État ou par des personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la privant de l’aide dont elle a besoin et la soustrayant à la protection de la loi est passible d’une peine allant de sept à quinze ans d’emprisonnement. Lorsque ladite infraction est commise à l’encontre de mineurs, de femmes enceintes ou de personnes qui, pour une raison quelconque, ne peuvent se protéger, ou lorsqu’elle s’accompagne de souffrances physiques graves, infligées avec l’aide de complices, à plusieurs personnes ou à plusieurs reprises, elle est passible d’une peine allant de dix à vingt ans d’emprisonnement. Lorsque ladite infraction entraîne la mort de la personne, elle est passible d’une peine pouvant aller de trente ans d’emprisonnement à la réclusion à perpétuité.

38.S’agissant de l’article 7 de la Convention, le paragraphe c)de l’article 109 du Code pénal définit les peines applicables aux personnes coupables d’une infraction de disparition forcée, conformément aux normes internationales et compte tenu des dangers et des conséquences de cette infraction. Il énonce les peines correspondant aux infractions décrites à chaque paragraphe, qui vont de cinq ans de prison à la réclusion à perpétuité. Il importe de noter, à cet égard, qu’aucun cas de disparition forcée n’a été enregistré depuis 2015 sur le territoire de la République d’Albanie.

Recommandation III. Procédure judiciaire et coopération en matière pénale (art. 8 à 15)

39.S’agissant du délai de prescription de l’action pénale concernant une disparition forcée et des mesures devant être prises par l’État pour que le délai soit de longue durée et proportionné à l’extrême gravité de ce crime, l’article 66 du Code pénal dispose que le délai de prescription doit être calculé à partir du moment auquel l’infraction est commise (dans ce cas la date de la disparition forcée) jusqu’à la date à laquelle l’auteur de l’acte est poursuivi en tant que défendeur. S’agissant des poursuites pénales, l’article 67 du Code pénal dispose que le régime de prescription ne s’applique pas aux crimes de guerre et aux crimes contre l’humanité, catégories d’infractions qui comprennent la disparition forcée :

Article 67 Non-application du délai de prescription dans le cadre des poursuites pénales

Aucun délai de prescription ne s’applique aux crimes de guerre et aux crimes contre l’humanité.

S’agissant de l’application de l’article 109/c aux infractions commises avant l’adoption de cette disposition, les articles 2 et 3 des principes généraux du droit pénal disposent que la loi s’applique de manière rétroactive, mais qu’aucune peine ne peut être imposée pour des actes autres que ceux interdits par la loi.

Article 2Aucune peine ne peut être imposée pour des actes autres que ceux interdits par la loi

Nul ne peut être puni pour une infraction qui n’est pas explicitement considérée par la loi comme une infraction ou un délit.

Nul ne peut être condamné à une peine dont le type et l’ampleur ne sont pas prévues par la loi.

Article 3Application du droit pénal dans le temps

Nul ne peut être condamné à une peine au titre une infraction qui, selon la loi en vigueur à la date à laquelle elle a été commise, ne constituait pas une infraction pénale.

L’adoption d’une nouvelle loi dépénalisant d’une infraction a un effet rétroactif. Si une personne a été condamnée pour une telle infraction mais n’a pas commencé à exécuter sa peine, celle-ci n’est pas exécutée : si elle a commencé à exécuter sa peine, celle-ci prend fin. Lorsque la loi en vigueur à la date à laquelle l’infraction pénale a été commise est modifiée à une date ultérieure, c’est la loi dont les dispositions sont les plus favorables à l’auteur de l’infraction pénale qui doit être appliquée.

40.S’agissant de l’établissement de la compétence en matière de disparition forcée, et de la conformité de la législation albanaise à la Convention en ce domaine, l’article 6 du Code pénal dispose que la législation de la République d’Albanie s’applique non seulement aux infractions commises par des Albanais sur le territoire albanais, mais aussi aux infractions commises par des Albanais sur le territoire d’un autre État, lorsque l’infraction en question est punissable dans les deux États, à moins qu’une décision définitive n’ait déjà été rendue par un tribunal étranger. Aux fins de cet article, les personnes possédant une seconde nationalité sont également considérées comme des citoyens albanais. Les dispositions de la Convention sont donc applicables puisque la disparition forcée est considérée comme une infraction pénale en vertu du Code, qui détermine les juridictions compétentes pour juger les personnes qui en sont accusées, quelle que soit la nationalité de l’auteur de l’infraction et le territoire sur lequel l’infraction a été commise. En vertu de l’article 5 du Code pénal, aux fins de l’application de la législation pénale, le territoire de la République d’Albanie comprend l’espace terrestre, les eaux intérieures et la mer territoriale de même que l’espace aérien s’étendant au-dessus de l’espace terrestre, des eaux intérieures et de la mer territoriale, ainsi que tous les espaces placés sous la souveraineté de l’État albanais, comme les lieux d’implantation des missions diplomatiques et consulaires albanaises, les bateaux battant pavillon albanais, les navires appartenant à la marine albanaise, ainsi que les avions civils et militaires où qu’ils se situent dans le monde. Conformément à l’article 7 du Code pénal, la législation pénale albanaise s’applique aux citoyens étrangers qui commettent une infraction sur le territoire de la République d’Albanie. Elle s’applique également, en vertu de la disposition de compétence universelle énoncée à l’article7/a, aux citoyens étrangers qui se rendent coupables, en dehors du territoire de la République d’Albanie, de l’un des crimes suivants à l’encontre des intérêts de l’État albanais ou d’un citoyen albanais : a) crime contre l’humanité ; b) crimes de guerre ; c) génocide ; d) crimes à visée terroriste ; e) torture ; f) financement du terrorisme. Le Code pénal de la République d’Albanie s’applique en outre à tous les citoyens étrangers qui se rendent coupables, en dehors du territoire de la République d’Albanie, de l’une des infractions pour lesquelles des lois spéciales ou des accords internationaux auxquels l’Albanie est partie prévoient l’applicabilité de la législation albanaise.

41.L’article 8 du Code pénal dispose que, lorsqu’une infraction est commise par un apatride sur le territoire albanais ou en dehors de ce territoire, les dispositions des articles 7 et 7/a du Code s’appliquent.

42.L’article 9 du Code pénal dispose que les dispositions du Code sont également applicables aux infractions pénales commises à l’encontre de personnes jouissant d’une protection internationale. Sauf exception prévue par les traités internationaux ratifiés par l’Albanie, une personne jouissant d’une protection internationale s’entend :

a)De tout chef d’État, y compris chaque membre d’un organe collégial remplissant, en vertu de la constitution de l’État considéré, les fonctions de chef d’État, de tout chef de gouvernement et de tout ministre des affaires étrangères, lorsque cette personne se trouve dans un État étranger, ainsi que des membres de sa famille qui l’accompagnent ;

b)De tout représentant ou fonctionnaire d’un État ou de tout représentant ou agent d’une organisation intergouvernementale qui, à la date et sur le lieu de la commission de l’infraction contre sa personne, ses locaux officiels, son domicile privé ou ses moyens de transport, a droit, conformément au droit international, à une protection spéciale contre toute atteinte à sa personne, sa liberté ou sa dignité, et à celles des membres de sa famille.

43.Sachant que, en vertu du Code pénal, la disparition forcée est considérée comme une infraction pénale, les personnes précitées ne bénéficient pas de l’immunité, si elles se rendent coupables de cette infraction.

44.En vertu du Code de procédure pénale, les autorités militaires sont chargées des enquêtes et des poursuites menées contre les personnes accusées d’avoir commis une disparition forcée et de déterminer la juridiction qui est compétente pour juger ce crime lorsque les accusés sont des militaires. La législation interne dispose toutefois que les autorités militaires n’ont pas compétence pour enquêter et pour poursuivre les personnes accusées d’un acte de disparition forcée, la responsabilité de ces activités incombant au procureur. Ce dernier engage les poursuites pénales et représente l’État durant le procès, dirige et supervise les enquêtes préliminaires ainsi que les activités de la police judiciaire, poursuit toute enquête qui peut être jugée nécessaire, prend les mesures requises pour assurer et superviser l’exécution des décisions pénales, et coopère dans le domaine judiciaire avec les autorités étrangères, conformément aux règles énoncées dans le Code de procédure pénale. Conformément à l’article 14 du Code pénal militaire, tout soldat commettant une infraction pénale non prévue dans ce code est tenu responsable en vertu des dispositions du Code pénal (civil). Par conséquent, lorsqu’une infraction de disparition forcée est commise par un soldat, le tribunal ordinaire est compétent pour connaître de l’infraction. Les pouvoirs du tribunal militaire sont abolis par la loi no 9911 du 5 mai 2008.

45.En ce qui concerne les dispositions des articles 12 et 18 de la Convention concernant le droit de toute personne se disant victime d’une disparition forcée à en référer aux autorités compétentes, il importe de noter que le Code de procédure pénale garantit le droit de la victime, sous réserve que le délai de prescription soit respecté :

Article 9/aDroits de la partie victime de l’infraction pénale

(modifié par la loi no 35/2017 du 30 mars 2017)

1.Durant les poursuites pénales, la victime jouit des droits prévus par le Code.

2.Les organes publics doivent veiller à ce que les victimes de l’infraction soient traitées avec respect et dignité et soient à l’abri de toute violation lorsqu’ils exercent les droits prévus par le Code.

Article 58Droits de la partie victime de l’infraction pénale

(modifié par insertion du paragraphe 3 en vertu de la loi no 8813 du 13 juin 2002, et par la loi no 35/2017 du 30 mars 2017). La partie victime a le droit :

a)De poursuivre l’auteur de l’infraction ;

b)De recevoir des soins médicaux, une aide psychologique, des conseils et autres services assurés par les autorités, les organisations ou les institutions chargées d’aider les victimes d’infractions ;

c)De communiquer dans sa propre langue et bénéficier des services d’un interprète, d’un interprète en langue des signes ou, dans le cas des personnes souffrant de troubles de l’audition ou de la parole, d’une personne facilitant les communications ;

d)De nommer un avocat et, le cas échéant, de bénéficier d’une aide juridictionnelle gratuite, conformément à la législation en vigueur ;

e)D’être tenue informée de l’avancement des poursuites, et de prendre connaissance des actes de preuve, sans préjudice du principe de la confidentialité des enquêtes ;

f)De demander des preuves et de déposer de nouvelles demandes devant l’autorité chargée de la procédure ;

g)D’être informée de l’arrestation de l’accusé et de sa libération, aux conditions énoncées ici ;

h)D’être informée de la décision de ne pas lancer la procédure ou d’ordonner un non-lieu, ou de l’ouverture et de la conclusion du procès ;

i)D’introduire un recours devant un tribunal contre la décision du procureur de ne pas engager les poursuites ou contre la décision du procureur ou du juge de l’audience préliminaire de lever l’accusation ou de déclarer un non-lieu ;

j)De demander à être dédommagé du préjudice et de se constituer en tant que partie civile dans une procédure pénale ;

k)D’être dispensée, dans les conditions prévues par la loi, des frais d’obtention des actes et des frais de justice au titre du dépôt d’une requête concernant le statut de la victime de l’infraction ;

l)D’être convoquée à l’audience préliminaire et à la première audience ;

m)D’être entendue par la Cour, même si aucune des parties ne lui a demandé de témoigner ;

n)D’exercer d’autres droits prévus par le Code.

2.L’organe chargé des poursuites informe immédiatement la victime des droits énoncés au paragraphe 1 du présent article et enregistre le fait qu’il a fourni lesdites informations.

3.Toute victime n’ayant pas capacité d’agir exerce ce droit par l’intermédiaire de son représentant légal ou de son tuteur, sauf si cela n’est pas dans l’intérêt de la victime. En cas de divergence entre les intérêts de la victime et ceux de son représentant légal ou de son tuteur, le tribunal nomme un représentant spécial, conformément aux dispositions du Code de la famille.

4.Les héritiers de la victime ont les droits prévus aux paragraphes 1, 2, 3, 4, 5 et 6 du présent article. Tout héritier mineur de la victime est représenté par son tuteur légal.

Article 58/aDroits du mineur victime

(modifié par la loi no 35/2017 du 30 mars 2017)

1.Outre les droits prévus à l’article 58 et dans d’autres dispositions du Code, ainsi que dans la législation applicable aux mineurs, un mineur a droit :

a)D’être accompagné d’une personne en qui il a confiance ;

b)Du maintien de la confidentialité de ses informations personnelles ;

c)De demander, par l’intermédiaire de son représentant, que le procès ne soit pas ouvert au public.

2.L’autorité chargée de la procédure doit prendre en compte l’âge, la personnalité et d’autres caractéristiques du mineur victime d’une infraction pénale pour éviter toute conséquence préjudiciable à son développement et à son éducation.

3.Lorsque l’âge de la victime n’est pas déterminé, mais que cette dernière peut être mineure, il y a présomption de minorité.

4.Tout mineur victime est interrogé dans les meilleurs délais par des enquêteurs spécialisés. Si cela est possible et approprié, la conversation est enregistrée par des moyens audiovisuels, ainsi qu’en dispose le Code.

Cet enregistrement peut être utilisé en tant qu’élément de preuve durant les poursuites pénales et évalué conjointement à d’autres éléments, suivant les critères énoncés au paragraphe 4 de l’article 361/a du Code. Les entretiens tenus avec des mineurs âgés de moins de 14 ans sont menés dans des locaux qui leur sont adaptés.

Article 279/aDroit de la victime à l’information

(modifié par la loi no 35 /2017 du 30 mars 2017)

1.La victime, son représentant légal ou son avocat peut, pour des raisons légitimes, demander à obtenir des informations sur l’état d’avancement des poursuites et recevoir copie des actes et des faits probants inclus dans le dossier du procureur.

Le procureur peut refuser de donner suite à cette demande lorsque :

a)L’intérêt présenté par le maintien de la confidentialité de l’enquête est supérieur à l’intérêt de la victime ;

b)L’intérêt du défendeur est supérieur à l’intérêt de la victime ;

c)La victime n’a pas encore été interrogée en tant que témoin.

2.La victime, son représentant légal son avocat peuvent demander à obtenir des informations sur la mise en place, le maintien, le remplacement ou la levée de mesures de sécurité prise à l’encontre du défendeur, à moins que la communication de ces informations mette en danger la vie ou la santé du défendeur.

46.L’article 18 de la Convention donne une importance majeure aux garanties données à la personne privée de liberté, et à l’obligation qu’a l’autorité chargée de consigner dans un registre les mesures prises au titre de la privation de liberté d’une personne. Le Code de procédure pénale dispose, par conséquent, ce qui suit :

Article 34/BDroits des personnes arrêtées et détenues

(inclus en vertu de la loi no 35/2017 du 30 mars 2017)

1.Outre les droits énoncés au paragraphe 1 de l’article 34/a du Code, (alinéa « a », « b », « c » « ç », « d », « dh » et « e »), toute personne arrêtée et détenue a le droit :

a)De communiquer avec son avocat avant le premier interrogatoire ;

b)D’être informée des actes, faits probants et raisons de son arrestation ou de sa détention ;

c)De demander qu’un membre de sa famille ou autre proche soit immédiatement informé de son arrestation. Toute personne arrêtée ou détenue de nationalité étrangère a le droit de demander la présence d’un membre du consulat ou un représentant diplomatique, et toute personne apatride ou réfugiée, a le droit de demander qu’une organisation internationale soit informée ;

d)D’obtenir immédiatement les soins médicaux nécessaires.

2.L’autorité chargée des poursuites notifie immédiatement à la personne arrêtée et détenue des droits prévus aux alinéas « a », « b », « c », « ç », « d », « dh » et « e » du paragraphe 1 de l’article 34/a du Code, et lui fournit une liste écrite de ses droits, qui doit être signée. La personne arrêtée est en droit de conserver cette liste.

Fonctions de la police judiciaire en cas d’arrestation ou de détention

(paragraphe « 1 » modifié par la loi no 8813 du 13 juin 2002) (inclusion d’une phrase supplémentaire au paragraphe 1 et d’un mot au paragraphe 4, insertion d’un paragraphe 3 et modification du paragraphe 2 conformément à la loi no 35/2017 du 30 mars 2017).

1.Tout officier ou agent de la police judiciaire ayant procédé à l’arrestation ou à la mise en détention d’une personne ou ayant pris cette personne en charge notifie immédiatement au Bureau du Procureur le lieu de l’arrestation et de la détention. Il informe la personne arrêtée ou détenue qu’elle a le droit de garder le silence, mais que si elle fait des déclarations, ses paroles pourront être utilisées contre elle lors du procès. Il l’informe aussi qu’elle a le droit d’être représentée par un avocat et de prendre immédiatement contact avec ce dernier ou, le cas échéant, de bénéficier des services d’un avocat commis d’office. La date, le lieu et le nom de l’agent de police judiciaire qui a procédé à l’arrestation ou à la détention sont inscrits dans la base de données.

2.L’officier ou agent de la police judiciaire indique sans délai à la personne arrêtée ou détenue les motifs de son arrestation et l’informe de ses droits conformément à l’article 34/b du Code à moins que les circonstances ne l’excluent.

3.Lorsque la personne arrêtée ou détenue est malade ou est mineure, le procureur peut demander qu’elle soit assignée à résidence ou dans un autre lieu placé sous surveillance. Toute personne arrêtée ou détenue n’ayant pas reçu la liste de ses droits doit obtenir cette dernière dès son arrivée au centre de détention. Si elle ne sait pas lire, cette liste lui est lue par l’un des agents présents. Cette information est consignée dans le registre signé.

4.La police judiciaire doit, avec le consentement de la personne arrêtée ou détenue, promptement informer les membres de sa famille. Lorsque la personne arrêtée ou détenue est mineure, la police judiciaire est tenue de notifier les parents ou le représentant légal de l’enfant et de se conformer aux règles du Code de la justice pour mineurs.

47.Les droits et le traitement des prisonniers sont également régis par la loi no 8328 du 16 avril 1998 sur les droits et le traitement des personnes privées de liberté, telle que modifiée. La loi no 8331/1998 relative à l’exécution des décisions pénales, telle que modifiée, prévoit l’exercice de contrôles, notamment par le procureur, ainsi que la collecte d’informations directes, l’examen des dossiers ou la réalisation de visites des établissements pénitentiaires, en la présence du responsable pertinent.

48.L’article 74/1 de la loi no 8328 du 16 avril 1998 sur les droits et le traitement des personnes privées de liberté, telle que modifiée, dispose que le Mécanisme national de prévention de la torture et d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qui a pour mission de surveiller l’application de la législation en matière de droits de l’homme, est un organe spécial placé sous la direction du Médiateur qui présente des recommandations aux autorités compétentes aux fins de l’amélioration des conditions de vie et du traitement des détenus.

49.Le nouveau Règlement général des prisons a été adopté par la décision du Conseil des ministres no 437 du 20 mai 2015. Il est adapté aux modifications apportées au système pénitentiaire dans le cadre de la réforme de la justice et garantit le respect des droits et des obligations concernant le traitement des personnes privées de liberté. Il se caractérise notamment par l’inclusion de règles particulières pour garantir la tenue et l’administration de tous les dossiers des détenus conformément aux procédures standards et d’une disposition concernant la protection des données personnelles.

50.La législation interne prévoit que tout représentant de l’État ayant commis un acte de disparition forcée ou ayant participé à un tel acte doit être relevé de ses fonctions, et l’article 42 de la loi sur la police pénitentiaire dispose de manière spécifique que tout fonctionnaire de la police pénitentiaire tenu responsable pénalement d’une infraction est relevé de ses fonctions officielles jusqu’à la fin de la procédure. Nous pouvons affirmer que, en application de la législation interne, les autorités compétentes procèdent à une enquête d’office sur les cas de disparition forcée. L’article 284 du Code de procédure pénale n’inclut pas la disparition forcée dans la liste des infractions pénales poursuivies par voie de recours, de sorte que cette infraction donne essentiellement lieu à des poursuites sur la base d’informations communiquées au Procureur et à la police, qui examinent de leur propre initiative les rapports soumis par de tierces parties.

51.S’agissant de l’article 10 de la Convention, toute personne étrangère arrêtée ou détenue parce qu’elle est soupçonnée d’avoir commis le crime de disparition forcée a le droit de recevoir une assistance de représentants consulaires. Cette personne est détenue dans une cellule de la police d’État jusqu’à l’examen et l’évaluation de cette mesure sécuritaire par le tribunal compétent.

52.Le Manuel des règles et procédures applicables aux traitements et à la détention des personnes privées de liberté dans les services de police, approuvé par l’ordonnance no 763 du 27 septembre 2011 du directeur de la police d’État indique au chapitre III, qui couvre les droits et les obligations des personnes privées de liberté, que les étrangers ont le droit de communiquer avec les représentants diplomatiques et consulaires de leur pays et, en leur absence, avec des représentants de l’État chargé d’assurer la protection des droits des ressortissants de leur pays.

53.Conformément aux obligations qui incombent aux services locaux et centraux de la police d’État aux fins de garantir les droits des personnes privées de liberté, la police d’État doit immédiatement informer la représentation diplomatique compétente de l’arrestation de la détention d’une personne de nationalité étrangère.

54.En 2016, le Gouvernement albanais a entrepris une réforme en profondeur du système de la justice, qui a débuté par l’apport de modifications importantes à la Constitution (par la loi no 76/2016), et s’est poursuivie par l’introduction de modifications dans le droit pénal. Les fonctions de procureur du parquet albanais ont de ce fait évolué.

55.Par suite de l’entrée en vigueur de la loi no 97/2016 sur l’organisation et le fonctionnement du parquet de la République d’Albanie, le procureur exerce ses fonctions de manière indépendante, ce qui garantit la poursuite d’enquêtes et la prise de décisions plus efficaces et impartiales.

56.En vertu des obligations découlant des articles 12 et 24 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le parquet mène une enquête approfondie lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une personne a été victime d’une disparition forcée.

57.Le parquet est seul compétent pour enquêter et engager un procès en ce domaine en vertu de la législation albanaise. Aucune autre autorité civile ou militaire chargée de l’application de la loi n’a pouvoir d’enquêter et de juger les affaires de disparition forcée. Ni la loi ni la Constitution ne confèrent à une institution militaire quelconque la possibilité d’obtenir cette compétence dans des situations particulières, notamment une guerre ou l’état d’urgence. Nous soulignons que le parquet est également compétent pour examiner les infractions pénales couvertes par le Code pénal militaire qui sont commises par un militaire. Nous précisons, en ce qui concerne le paragraphe 125 du rapport de l’Albanie, que l’État albanais est partie à la Convention européenne d’extradition et à deux de ses Protocoles additionnels depuis 1998.

58.Le droit pénal albanais autorise l’extradition des personnes coupables d’une disparition forcée sous réserve du respect de deux conditions énoncées à l’article 11 du Code pénal : a) l’extradition est prévue dans un accord international auquel la République d’Albanie est partie ; et b) l’infraction motivant l’extradition est punie à la fois par les lois de l’Albanie et par celles de l’État étranger. S’agissant des recours juridiques concernant la poursuite d’une enquête immédiate en cas de disparition forcée, nous précisons que le parquet est tenu de lancer sans délai une enquête, même de sa propre initiative, dès qu’il est informé de la commission d’une infraction pénale de quelque type qu’elle soit. L’infraction de disparition forcée est couverte par cette obligation en vertu des dispositions de l’article 109/c du Code pénal et par celles de l’article 74 du Code pénal, en tant que crime contre l’humanité. Le parquet doit lancer son enquête, que l’auteur de l’infraction soit étranger ou albanais et que l’acte ait été commis sur le territoire de l’Albanie ou en dehors de celui-ci en raison de la clause de compétence universelle énoncée à l’article 7 du Code pénal. S’agissant de la formation des procureurs, le parquet ne compte actuellement pas de section spéciale ni de groupe de procureurs spécialement formés pour mener des enquêtes et des poursuites en cas de disparition forcée. Conformément à la législation en vigueur, chaque parquet de district peut engager des poursuites pénales en toute indépendance, notamment dans les cas de disparition forcée. Depuis la réforme du parquet d’août 2017, les procureurs prennent leurs décisions indépendamment de leur supérieur hiérarchique et ont, en principe, compétence pour engager une enquête même au niveau de l’exécutif. Les procureurs de rang supérieur, quant à eux, ne peuvent plus ordonner à un procureur d’abandonner une affaire ou de retirer l’affaire à un procureur pour la confier à un autre. Seul le Haut Conseil du parquet a désormais ce pouvoir. La législation pénale dispose que, en cas d’urgence, les agents de la police judiciaire peuvent procéder à des perquisitions dans les lieux où des personnes disparues pourraient être détenues sans avoir besoin d’obtenir un mandat d’une autorité judiciaire.

59.Les procédures de perquisition d’urgence exigent la soumission d’un justificatif au procureur dans un délai de quarante-huit heures. L’article 240 du Code de procédure pénale dispose que les personnes soupçonnées d’avoir commis un acte de disparition forcée sont relevées de leurs fonctions par mesure de sécurité lorsque leur maintien en fonction peut être dangereux et inciter à commettre des infractions pénales analogues ou d’autres infractions graves.

Recommandation IV. Mesures de prévention des disparitions forcées (art. 16 à 23)

60.S’agissant de l’article 17 de la Convention, toutes les personnes arrêtées ou détenues par la police judiciaire parce qu’elles sont présumées avoir commis un acte de disparition forcée ou avoir été complices d’un tel acte ou parce qu’elles sont soupçonnées d’une autre infraction, qu’elles soient de nationalité albanaise ou étrangère ou encore apatrides sont détenues dans des lieux de privation de liberté officiellement reconnus.

61.En attendant que l’instance judiciaire examine la mesure de sécurité et prenne une décision en la matière, les personnes arrêtées ou détenues demeurent dans les cellules de la direction locale de la police ou d’un commissariat.

62.Ces lieux sont officiellement communiqués au Bureau du Procureur général et au Bureau du procureur du district judiciaire, au Bureau du Médiateur, et aux organisations de la société civile assurant la protection des droits de l’homme et, plus particulièrement, des droits des personnes privées de liberté, notamment :

Le Comité Helsinki albanais ;

L’Institut européen de Tirana ;

Le Centre albanais de réadaptation pour les victimes de traumatismes de torture ;

Center for Human Rights in Democracy ;

L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, la mission d’assistance de la Communauté européenne à la police albanaise, International Criminal Investigative Training Assistance Program (ICITAP) ;

Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT), etc.

63.Une fois que la décision d’incarcération est prise, les personnes arrêtées ou détenues sont transférées dans des établissements pénitentiaires qui relèvent du Ministère de la justice. La Constitution de la République, le Code de procédure pénale, la loi sur la police d’État définissent et garantissent les droits reconnus par la loi des personnes privées de liberté, en vertu duquel, le détenu à notamment le droit :

De choisir un avocat et de bénéficier des services d’un avocat ;

De recevoir des visites, de faire l’objet de contrôles et de bénéficier d’une assistance médicale ;

D’être avisé et informé de ses droits ;

D’informer et d’alerter des membres de sa famille, des proches ou toute autre personne de son choix ;

D’informer un représentant diplomatique de l’État dont il est citoyen et d’avoir des réunions avec ce représentant ;

De soumettre des demandes ou des plaintes lorsqu’il se trouve dans les locaux de la police.

64.Les agents de la police judiciaire qui procèdent à une arrestation ou à une détention doivent immédiatement informer la personne privée de liberté qu’elle a le droit d’être représentée par un avocat, qu’elle a le droit de garder le silence, mais que si elle fait des déclarations, ses paroles pourront être utilisées contre elle dans une cour de justice, etc. Les avocats de la défense ont la possibilité d’être présents lors de l’arrestation ou de la mise en détention et de se réunir avec leurs clients à tout moment dans les lieux de détention en l’absence de tout témoin.

65.Le droit de bénéficier d’une visite et d’un examen médical est assuré, et est systématiquement respecté dans les faits. Les personnes privées de liberté passent une visite médicale de contrôle organisée par le personnel médical de la direction locale de la police dès le début de leur détention et au plus tard dans les douze heures, qu’elles soient ou non malades et qu’elles aient ou non besoin d’une assistance médicale.

66.Ces examens médicaux sont enregistrés dans les dossiers pertinents. L’approbation, l’offre et la garantie de soins médicaux sont inscrites dans le Manuel des règles et procédures applicables aux traitements et à la détention des personnes privées de liberté dans les services de police. Ce manuel a été approuvé par le Directeur général de la police d’État par l’ordonnance no 763 du 27 novembre 2011.

67.La législation interne (loi sur la police d’État et Code de procédure pénale) et le Manuel mentionné précédemment disposent qu’il est obligatoire d’informer la famille ou toute autre personne désignée par la personne privée de liberté lorsque cette dernière est mineure ou, dans le cas d’un adulte, lorsqu’elle le demande. Le Ministère des affaires étrangères et la représentation diplomatique pertinente doivent être immédiatement informés de l’arrestation de toute personne étrangère. Les cellules de la police d’État font l’objet de visites d’inspection du Bureau du Médiateur, des organisations de la société civile protégeant le respect des droits de l’homme, de membres du parquet qui est chargé de l’enquête ainsi que de nombreuses autres organisations de la Communauté européenne et des Nations Unies assurant la protection des droits de l’homme.

68.La police d’État autorise les administrations locales, les organisations non gouvernementales et les organisations sans but lucratif ainsi que les organisations internationales à procéder à des visites et à des inspections systématiques des locaux dans lesquels les personnes sont détenues, à examiner les traitements dont elles font l’objet et à s’assurer du respect des conditions et des droits prévus par la loi.

69.Plusieurs accords ont été établis et signés à cette fin avec des organisations non gouvernementales et des organisations à but non lucratif :

Accord de coopération entre la police d’État et European Institute of Tirana ;

Accord de coopération entre la police d’État et le Comité Helsinki albanais ;

Accord de coopération entre la police d’État et le Centre albanais de réadaptation pour les victimes de traumatismes ou de torture ;

Accord de coopération entre la police d’État et Center for Human Rights in Democracy.

70.Conformément au décret no 158 du 12 avril 2012 sur la réforme des registres des données des personnes amenées dans les directions de la police ou dans les commissariats, la police d’État ouvre et tient des registres spéciaux dans lesquels elle consigne les informations sur les personnes détenues dans des cellules.

71.Ces registres sont placés dans les archives de la police, administrés par le personnel compétent et, une fois dûment remplis et clos, archivés conformément aux règles et procédures établies à cette fin.

72.En application des dispositions de l’article 103 de la loi sur la police d’État concernant les données relatives aux personnes escortées, arrêtées ou détenues par la police, le directeur général de la police a donné l’ordre de mettre en place et de maintenir un registre électronique (système ADAM). Ce registre, qui contient les données relatives aux personnes escortées, arrêtées et détenues par la police, est utilisé par tous les services de police depuis 2010. Les informations entrées couvrent tous les faits survenus depuis le début de la privation de liberté, les actions menées dans les lieux de détention, les services de santé assurés, les réunions avec les avocats, les réunions avec les représentants du Bureau du Médiateur, des organisations non gouvernementales ou des organisations sans but lucratif, la mesure de sécurité prise par le tribunal et le transfert dans l’établissement pénitentiaire.

73.S’agissant de l’article 18 de la Convention, le Code de procédure pénale ainsi que le Manuel des règles et procédures applicables aux traitements et à la détention des personnes privées de liberté dans les services de police définissent et garantissent le droit de ces personnes d’être informées de leurs droits dès le début de la privation de liberté.

74.À cette fin, sur ordre spécial du directeur général de la police d’État, une liste des droits des personnes privées de liberté a été établie. Cette liste, qui se présente sous la forme d’une déclaration, est donnée dès son arrestation à la personne privée de liberté qui doit en signer deux exemplaires après en avoir pris connaissance.

75.L’un de ces exemplaires est conservé par la personne privée de liberté tandis que le second est archivé par le responsable du lieu de détention. Les membres de la famille, les proches ou autres personnes désignées par la personne privée de liberté sont aussi informés du lieu où se trouve cette dernière, de son état de santé, des services d’avocat dont elle bénéficie, etc.

76.L’avocat de la défense prend lui aussi connaissance de tous les actes consignés dans le dossier des poursuites pénales, rencontre son client et s’entretient avec lui en l’absence de toute autre personne. Le Code pénal de la République d’Albanie dispose, entre autres, que la « torture » est une infraction pénale, qui s’entend de tous les actes ou omissions commis par des représentants de la loi pour obtenir des informations sur des affaires pénales, se caractérisant par des actes de violence, des mauvais traitements et des tortures. La police d’État veille, en émettant des actes administratifs et en assurant un suivi systématique des activités des fonctionnaires de police, à ce que ces derniers s’acquittent de leurs fonctions conformément à la loi sans recourir à la force sauf lorsque la situation et les procédures juridiques le prévoient, et interdit catégoriquement tout recours à des actes de violence physique ou psychologique ou tout autre mauvais traitement physique de personnes en vue d’obtenir des informations et des déclarations concernant la commission, ou non, de diverses infractions pénales.

77.La réforme du système de la justice a donné lieu à une innovation importante, à savoir l’inclusion du concept de victime dans le droit procédural pénal. Les modifications apportées de ce fait au Code de procédure pénale ont permis de réglementer et d’améliorer la situation de la victime. L’article 9/c du Code pénal (modifié par la loi no 35/2017) dispose que les institutions publiques doivent veiller à ce que les victimes d’une infraction soient traitées avec respect de manière à préserver leur dignité, et protégées de nouveaux sévices lorsqu’elles exercent les droits que leur confère le Code.

78.Les articles 58 et suivants du Code de procédure pénale énoncent un certain nombre de droits procéduraux et fondamentaux pouvant être exercés par les victimes d’une infraction. Le Code de la justice pour mineurs entré en vigueur le 1er janvier 2018, complète de surcroît le cadre juridique conformément aux Conventions de l’ONU en visant à garantir le respect d’autres règles et normes internationales, entre autres pour protéger les mineurs victimes d’infractions. La loi prévoit aussi des mesures concrètes de protection des témoins. Ces mesures s’appliquant aux crimes graves, elles couvrent de fait les témoins de disparitions forcées.

79.La Direction générale des prisons est l’institution responsable de l’organisation, de l’exécution et du contrôle des peines d’emprisonnement ainsi que des décisions d’isolement carcéral à l’échelle du système.

80.La Direction prend des mesures appropriées pour assurer le respect des règles concernant l’organisation et le fonctionnement des établissements pénitentiaires, conformément à la législation nationale et aux normes internationales en matière de droits de l’homme. Les informations concernant les personnes privées de liberté sont compilées, enregistrées et tenues à jour. La section des archives judiciaires de ces établissements a principalement pour mission d’assurer la tenue à jour, la compilation et le classement des dossiers des prisonniers, ainsi que leur enregistrement. L’article 11 du Règlement général des prisons approuvé par la décision no 437 du 20 mai 2015 du Conseil des ministres dispose que, lors de l’arrivée des détenus ou des condamnés dans l’établissement pénitentiaire, ce dernier doit vérifier l’identité et l’exactitude des documents d’incarcération. Une fois cette vérification accomplie, il procède à l’établissement du procès-verbal des formalités d’écrou, des documents soumis et de l’inventaire des affaires personnelles du détenu ou du condamné. Le dossier indique la date et l’heure de réception. L’officier de police judiciaire et le procureur qui a ordonné l’exécution de la décision pénale sont immédiatement informés de tout doute concernant l’identité d’un détenu ou d’un condamné ou de l’existence de disparités entre les informations figurant dans les documents présentés.

81.Le personnel de l’établissement inscrit les détenus avant jugement et les condamnés dans le registre de base. L’article 17 du Règlement général des prisons prévoit la tenue d’un registre préliminaire des personnes privées de liberté dans lequel sont consignées les informations prévues au paragraphe 3 de l’article 17 de la Convention. Chaque établissement pénitentiaire doit tenir un tel registre, dans lequel sont consignées les informations suivantes :

Identité complète du détenu ou du condamné (nom, prénom, paternité, date et lieu de naissance, lieu de résidence, membres de la famille avec lesquels il peut entretenir des contacts, etc.) ;

Informations sur l’infraction commise (nature de l’infraction commise, sentence, tribunal qui a rendu la décision, numéro et date de la décision, lieu et date de l’arrestation, date de l’ordre d’exécution rendue par le procureur, décision du tribunal modifiant une décision précédente ou influant sur son exécution, amnistie, grâce, etc.) ;

Date et lieu d’admission et de libération. En cas de décès du détenu ou du condamné, la date, le lieu et l’heure du décès, la cause du décès, une copie de l’acte de décès et les coordonnées de la personne ou de l’autorité à qui la dépouille est remise sont consignés dans le registre.

82.En vertu du Règlement général des prisons, les établissements pénitentiaires doivent établir les registres suivants : a) registre de base des personnes condamnées ; b) registre général des détenus ; c) dossier personnel du prisonnier ; d) dossier psychosocial ; e) dossier médical ; f) registre des demandes et des plaintes ; g) registre des mesures disciplinaires ; h) registre des aménagements préalables à la libération ; i) registre des permis des prisonniers ; j) registre des événements graves ; k) registre des réductions de peine ; l) registre des visites médicales ; m) registre des activités journalières ; n) registre des emplois.

83.Durant la période considérée, aucun cas de non-enregistrement de personnes privées de liberté dans les registres des prisons n’a été signalé. La Direction générale procède à des inspections pour s’assurer de la bonne tenue des dossiers des prisonniers. La Direction des prisons assure également des formations pluridisciplinaires du personnel portant, notamment, sur les questions de l’application de la loi dans les établissements pénitentiaires.

84.Le traitement des informations personnelles dans le système pénitentiaire est effectué conformément aux dispositions de la loi no 9887 du 10 mars 2008 sur la protection des données personnelles. Le Règlement général des prisons adopté en 2015 vise à améliorer le respect des droits des personnes privées de liberté en garantissant la protection, le maintien et la sécurité de leurs informations personnelles. L’article 18 de ce règlement dispose que le personnel de la Direction générale des prisons et celui des établissements pénitentiaires doivent appliquer la législation en vigueur sur la protection des données personnelles, notamment les décisions ou les instructions du Commissaire chargé de la protection de ces données afin de procéder avec un degré de sécurité adéquat au traitement des informations personnelles des personnes privées de liberté au moyen des outils prévus à cet effet. Toute action ou omission allant à l’encontre de cette disposition constitue une infraction disciplinaire et est passible de sanctions conformément à la législation en vigueur régissant l’emploi du personnel.

85.L’article 19 du Règlement général des prisons dispose que les données personnelles des personnes privées de liberté doivent être traitées conformément aux exigences légales. Peuvent en prendre connaissance le Ministre de la justice, le Directeur général des prisons, le Directeur de la police, le Directeur de l’établissement pénitentiaire, le Chef de la surveillance pénitentiaire et toute autre autorité prévue par la loi ainsi que les personnes autorisées par les précédentes. Les personnes qui, dans l’exercice de leurs fonctions, ont accès à des données à caractère personnel ne peuvent en aucun cas les divulguer en dehors du cadre de leurs fonctions. Ces données ne peuvent être communiquées à autrui que dans les cas prévus par la loi.

86.Les données personnelles de chaque détenu ou condamné sont consignées dans des registres officiels certifiés. Toute personne privée de liberté, ainsi que toute personne à qui elle en donne l’autorisation, a le droit de demander au directeur de l’établissement pénitentiaire d’obtenir accès à ses données personnelles en précisant les motifs de sa demande et le type d’information auxquelles elle souhaite avoir accès. Le directeur de l’établissement pénitentiaire veille à ce que les informations ainsi communiquées ne concernent pas un autre détenu ou un autre condamné. Si l’accès à l’information est demandé par une tierce personne, cette dernière doit avoir obtenu le consentement écrit de la personne privée de liberté, sauf disposition contraire de la loi. La législation en vigueur s’applique au traitement des informations personnelles des témoins et des collaborateurs de justice. Les détenus et les condamnés peuvent déposer une plainte concernant l’application de la loi et le règlement interne. Les articles 49 et 50 de la loi no 8328 du 16 avril 1998 sur les droits et le traitement des détenus, telle que modifiée, confèrent le droit de déposer une plainte, oralement ou par écrit. Cette dernière peut être adressée au personnel de l’établissement pénitentiaire, à la Direction générale des prisons, au Ministère de la justice, au Bureau du Médiateur, à des organisations internationales, à des ONG locales et étrangères, au tribunal exécutant la décision pénale, au procureur du tribunal de district et à d’autres personnes se rendant dans l’établissement, conformément à l’article 43 de la loi. Après avoir été consignée dans un registre spécial, la demande ou la plainte est transmise au directeur de l’établissement pénitentiaire, qui charge l’employé pertinent d’y répondre et de faire part de ses conclusions au détenu. Chaque établissement doit établir et tenir à jour le registre des plaintes ou des appels des personnes privées de liberté, qui peut être établi sur support papier ou sur support électronique. La présentation et le contenu du registre, ainsi que la procédure à suivre pour répondre aux plaintes, sont décrits dans le Règlement général des prisons. Les autorités compétentes examinent les plaintes et les demandes aussitôt que possible et au plus tard un mois après leur soumission à moins qu’une date particulière n’ait été établie en application de dispositions spéciales. Le détenu a le droit de déposer une plainte auprès des plus hautes instances du système pénitentiaire et, si cette dernière n’est pas résolue par l’administration par une décision particulière, il peut s’adresser au tribunal ayant compétence dans la localité où se trouve l’établissement pénitentiaire. La loi no 114/2014 sur les droits fondamentaux dispose que les établissements publics qui refusent de fournir des informations sans motif valable sont passibles de sanctions.

87.La République d’Albanie a ratifié différents instruments internationaux ayant pour objet d’interdire la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains et dégradants, en promulguant la loi no 9453 du 15 décembre 2005 sur la ratification du Protocole no 14 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et la loi no 9094 du 3 juillet 2003 sur la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Elle a également mis en place différentes mesures législatives, administratives et judiciaires pour garantir l’interdiction de la torture, d’autres peines et traitements cruels, inhumains et dégradants, conformément à la Constitution albanaise (art. 15, 18, 25, 26, 27, 28, 43, 48). L’article 5 du Code de procédure pénale de la République d’Albanie dispose que nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements dégradants. La loi no 9397 du 12 mai 2005 sur le contrôle interne des établissements pénitentiaires, telle que modifiée, définit et régit les opérations des services pénitentiaires. La loi no 8331/1998 relative à l’exécution des décisions pénales, telle que modifiée, définit les contrôles appliqués aux actions des procureurs qui donnent lieu, notamment, à l’obtention d’informations directes et à la poursuite de vérifications en cas d’affaire ou de plainte de traitement dégradant.

88.Le Bureau du Médiateur est guidé par les principes d’impartialité, de confidentialité, de professionnalisme et d’indépendance dans l’exercice de ses activités de protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales prévues par la Constitution et la législation. Il est habilité à formuler des recommandations et à proposer des mesures en cas de violation des droits de l’homme et des libertés fondamentales par l’administration publique.

89.S’agissant du droit de la victime à obtenir réparation et à bénéficier d’un règlement prompt et équitable, le Code de procédure pénale dispose que la victime d’une infraction pénale a le droit de demander une indemnisation et de se constituer en tant que partie civile dans une procédure pénale (alinéa g) de l’article 58).

90.S’agissant du droit de la victime à obtenir réparation et à être indemnisée promptement et équitablement, le Code de procédure pénale dispose que la victime d’une infraction pénale a le droit de demander une indemnisation et de se constituer en tant que partie civile dans une procédure pénale (alinéa g) de l’article 58).

91.L’article 11 du Code pénal énonce les conditions dans lesquelles l’expulsion, la remise, la restitution ou l’extradition sont interdites, et dispose à l’alinéa c) que l’extradition est refusée s’il existe des raisons de croire que la personne réclamée sera persécutée, punie ou poursuivie pour des raisons politiques, religieuses, raciales, ethniques ou pour des considérations de nationalité.

92.S’agissant de la couverture de la loi no 121/2014 sur le droit d’asile en République d’Albanie, cette loi mentionne expressément le risque de faire l’objet d’une disparition forcée en tant que motif de non-refoulement dans le droit fil de la Convention. La loi dispose en effet ce qui suit :

Article 6Principe de non-refoulement

1.La République d’Albanie reconnaît et respecte l’obligation qu’ont les autorités de ne pas remettre, expulser ou extrader du territoire toute personne bénéficiant ou ayant sollicité le droit d’asile ou toute autre forme de protection à ce titre :

c)Vers un pays dans lequel il existe des raisons de penser que le demandeur d’asile peut être en danger ou être victime d’une disparition forcée.

Article 9 Pays tiers sûr

Le concept de pays tiers sûr n’est appliqué que lorsque les autorités compétentes sont raisonnablement convaincues que le demandeur d’asile sera traité dans le pays tiers conformément aux principes établis :

c)Il est interdit de procéder à une expulsion en cas de violation du principe de l’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants et de celui de l’interdiction de disparition forcée, tels que définis dans le droit international ;

93.S’agissant des informations demandées à l’alinéa b) du paragraphe 15 du rapport sur les possibilités de faire appel d’une décision d’expulsion, de remise, de refoulement ou d’extradition et, dans l’affirmative, sur les procédures applicables et leur effet suspensif, importe de se reporter aux dispositions des articles du Code de procédure pénale qui constitue le cadre juridique pertinent :

Article 494 sur l’application temporaire de mesures de coercition ;

Article 495 sur les arrestations par la police et les droits des personnes arrêtées ;

Article 496 concernant l’audition des personnes à l’encontre desquelles une mesure disciplinaire a été imposée par le tribunal ;

Article 497 sur l’examen de la demande d’extradition ;

Article 498 concernant la décision d’un tribunal et le droit d’une personne de faire appel de la décision du tribunal auprès de la Cour d’appel dans un délai de dix jours.

94.Code pénal :

Article 110Détention arbitraire

La détention arbitraire d’une personne constitue une infraction pénale et est passible d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à un an.

Lorsque de graves souffrances physiques sont infligées dans le cadre d’une telle détention à plusieurs personnes ou à plusieurs reprises, ledit acte est puni d’une peine d’emprisonnement allant de trois à sept ans.

Le présent article s’applique de manière générique, et ne concerne pas exclusivement les auteurs de l’infraction qui sont des agents publics. Il s’applique à tout acte de privation de liberté commis par une ou plusieurs personnes physiques, sans que ces dernières agissent nécessairement dans le cadre d’un organe de l’État ou dans l’exercice de leurs fonctions publiques.

Ainsi qu’indiqué au paragraphe 148 du rapport, aucune disposition particulière du Code pénal n’est consacrée à l’interdiction de détention arbitraire, qui fait donc l’objet d’une disposition générale. Le Code de procédure pénale comporte des dispositions établissant la durée de la détention en fonction de l’infraction pénale commise.

Article 263Détention provisoire

1.La détention provisoire cesse lorsque les conditions de mise en détention ne sont plus remplies, sans qu’il soit nécessaire de soumettre une demande au tribunal :

a)À l’issue de trois mois lorsque la personne mise en examen a commis une infraction pénale ;

b)À l’issue de six mois lorsque la personne mise en examen risque une peine inférieure ou égale à dix ans d’emprisonnement ;

c)À l’issue de douze mois lorsque la personne mise en examen risque une peine allant de dix ans d’emprisonnement au moins à la réclusion à perpétuité.

2.La détention provisoire cesse si, à compter de la date de la soumission des actes au tribunal, un jugement de culpabilité en première instance n’a pas été rendu :

a)À l’issue de deux mois lorsque la personne mise en examen a commis une infraction pénale ;

b)À l’issue de neuf mois lorsque la personne mise en examen risque une peine inférieure ou égale à dix ans d’emprisonnement ;

c)À l’issue de douze mois lorsque la personne mise en examen risque une peine allant de dix ans d’emprisonnement au moins à la réclusion à perpétuité.

3.La détention provisoire cesse si, à compter de la date du jugement de culpabilité en première instance, la Cour d’appel n’a pas rendu son jugement :

a)À l’issue de deux mois lorsque la personne mise en examen a commis une infraction pénale ;

b)À l’issue de neuf mois lorsque la personne mise en examen risque une peine inférieure ou égale à dix ans d’emprisonnement ;

c)À l’issue de six mois lorsque la personne mise en examen risque une peine inférieure ou égale à dix ans d’emprisonnement.

4.Lorsqu’une décision est rejetée par la Cour suprême et que l’affaire est renvoyée devant le Tribunal de première instance ou la Cour d’appel, et lorsque la décision est rejetée par la Cour d’appel et que l’affaire est renvoyée devant le Tribunal de première instance, les périodes indiquées reprennent, dans chaque cas, à compter de la décision de la Cour suprême ou de la Cour d’appel.

5.En cas d’évasion de la personne placée en détention provisoire, la période de détention commence à partir de la date à laquelle elle est de nouveau privée de liberté.

6.La durée totale de la période de détention provisoire, compte tenu des prolongations prévues au paragraphe 2 de l’article 264 ne peut pas dépasser :

a)Dix mois lorsque la personne mise en examen a commis une infraction pénale ;

b)Deux ans lorsque la personne mise en examen risque une peine inférieure ou égale à dix ans d’emprisonnement ;

c)Trois ans lorsque la personne mise en examen risque une peine allant de dix ans d’emprisonnement au moins à la réclusion à perpétuité.

7.Si, à l’issue de la période de détention provisoire, le procureur informe le défendeur d’un nouveau chef d’accusation pour lequel la période de détention provisoire est plus longue que celle prévue pour la première infraction, le procureur doit demander au tribunal d’ordonner une nouvelle période de détention provisoire. Le tribunal prend une décision à l’issue d’une audience de jugement durant laquelle il a entendu les parties.

8.Lorsque le nouveau chef d’accusation concerne un fait qui n’était pas connu au début de la procédure, le tribunal fixe une nouvelle période de détention qui commence à cette date. Si, toutefois, le seul changement intervenu concerne la définition juridique de l’infraction pénale, le tribunal statue sur la période de détention qui commence au début de la période initiale.

Article 268 du Code de procédure pénale Conditions d’application

1.En cas d’acquittement sur la base d’un jugement définitif, l’accusé a la possibilité de demander l’indemnisation du préjudice causé par la période qu’il a passée en détention provisoire, à moins qu’il n’ait été établi qu’il est en partie ou totalement responsable de la décision de détention provisoire ou de la non-découverte en temps opportun du fait inconnu.

2.Toute personne condamnée ayant fait l’objet d’une détention provisoire bénéficie du même droit lorsqu’il est établi par suite d’un jugement définitif que la décision de mise en détention provisoire a été prise sans que soient respectées les conditions énoncées aux articles 228 et 229.3.

95.La loi no 9381 du 28 avril 2005 sur l’indemnisation pour emprisonnement injuste, établit, de même, des règles détaillées concernant l’octroi d’indemnisations en cas d’emprisonnement injuste, y compris par assignation à résidence, ainsi que la durée, le mode de calcul et les procédures de demande de versement desdites indemnisations. Cette loi dispose qu’une personne qui a été déclarée innocente, dont l’affaire a été rejetée par décision définitive du tribunal ou du parquet, ou qui est restée en prison au-delà de la période stipulée dans sa sentence, a droit à être indemnisée du préjudice causé. Le Code de procédure pénale tel que modifié énonce l’intégralité des droits des personnes privées de liberté à l’article 34 b) concernant la fourniture d’informations sans délai, l’accès à un avocat et la notification des membres de la famille en cas d’arrestation ou de détention (comme indiqué précédemment).

96.S’agissant des mesures prises pour garantir que toutes les informations relatives aux personnes privées de liberté sont enregistrées et à jour, la Direction générale des prisons est l’institution chargée de l’organisation, de l’application et du contrôle de l’exécution des peines d’emprisonnement ainsi que des décisions d’isolement carcéral à des fins de sécurité à l’échelle du système pénitentiaire. Elle prend les mesures qui s’imposent pour assurer le respect des règles régissant l’organisation et le fonctionnement des établissements pénitentiaires conformément aux normes nationales et internationales des droits de l’homme. Toutes les informations sur les personnes privées de liberté sont compilées, enregistrées et tenues à jour. La section des archives judiciaires des établissements pénitentiaires a principalement pour mission d’assurer la tenue à jour, la compilation et l’archivage des dossiers des prisonniers, ainsi que leur enregistrement. L’article 11 du Règlement général des prisons approuvé par la décision no 437 du 20 mai 2015 du Conseil des ministres dispose que, lors de l’arrivée des détenus ou des condamnés dans l’établissement pénitentiaire, ce dernier doit vérifier l’identité et l’exactitude des documents d’incarcération. Une fois cette vérification accomplie, il procède à l’établissement du procès-verbal des formalités d’écrou, des documents soumis et de l’inventaire des affaires personnelles du détenu ou du condamné. Le dossier indique la date et l’heure de réception. L’officier de police judiciaire et le procureur qui a ordonné l’exécution de la décision pénale sont immédiatement informés de tout doute concernant l’identité d’un détenu ou d’un condamné ou de l’existence de disparités entre les informations figurant dans les documents présentés. L’agent des services pénitentiaires en fonction enregistre la personne mise en détention provisoire ou le détenu dans le registre général. L’article 17 du Règlement général des prisons prévoit la tenue d’un registre préliminaire des personnes privées de liberté et des personnes en détention provisoire dans lequel sont consignées les informations prévues au paragraphe 3 de l’article 17 de la Convention. Chaque établissement pénitentiaire doit tenir un tel registre, dans lequel sont consignées les informations suivantes :

Identité complète du détenu provisoire ou du condamné (nom, prénom, paternité, date et lieu de naissance, lieu de résidence, membres de la famille avec lesquels il peut entretenir des contacts, etc.) ;

Informations sur l’infraction commise (nature de l’infraction commise, sentence, tribunal qui a rendu la décision, numéro et date de la décision, lieu et date de l’arrestation, date de l’ordre d’exécution rendue par le procureur, décision du tribunal modifiant une décision précédente ou influant sur son exécution, amnistie, grâce, etc.) ;

Date et lieu d’admission et de libération. En cas de décès de la personne en détention provisoire ou du condamné, la date, le lieu et l’heure du décès, la cause du décès, une copie de l’acte de décès et les coordonnées de la personne ou de l’autorité à qui la dépouille est remise sont consignés dans le registre.

97.En vertu du Règlement général des prisons, les établissements pénitentiaires doivent tenir les registres suivants : a) registre de base des détenus ; b) registre général des personnes placées en détention provisoire ; c) dossier personnel du prisonnier ; d) dossier psychosocial ; e) dossier médical ; f) registre des demandes et des plaintes ; g) registre des mesures disciplinaires ; h) registre des personnes libérées ; i) registre des permis des prisonniers ; j) registre des événements graves ; k) registre des réductions de peine ; l) registre des visites médicales ; m) registre des activités journalières ; n) registre des emplois.

98.Durant la période considérée, aucun cas de non-enregistrement de personnes privées de liberté dans les registres des prisons n’a été signalé. La Direction générale procède à des inspections pour s’assurer de la bonne tenue des dossiers des prisonniers.

99.S’agissant des lois qui pourraient prévoir des limites à l’accès à l’information des personnes privées de liberté, ainsi que la nature et la durée de ces restrictions et des mécanismes de recours en cas de refus d’informations concernant les personnes privées de liberté en temps opportun, il ressort d’un examen du cadre juridique que le traitement des données personnelles dans le système pénitentiaire est régi par les dispositions de la loi no9887 du 10 mars 2008 sur la protection des données personnelles. Le Règlement général des prisons adopté en 2015 vise à améliorer le respect des droits des personnes placées en détention provisoire et des détenus en garantissant la protection, le maintien et la sécurité de leurs informations personnelles. L’article 18 de ce règlement dispose que le personnel de la Direction générale des prisons et des établissements pénitentiaires doivent appliquer la législation en vigueur sur la protection des données personnelles, notamment les décisions ou les instructions du Commissaire chargé de la protection des données personnelles afin de procéder avec un degré de sécurité adéquat au traitement des données personnelles des personnes en détention provisoire et des prisonniers au moyen des outils prévus à cet effet. Toute action ou omission allant à l’encontre de cette disposition constitue une infraction disciplinaire et est passible de sanctions conformément à la législation en vigueur régissant l’emploi du personnel. L’article 19 du Règlement général des prisons dispose que les données personnelles des personnes en détention provisoire et des prisonniers doivent être traitées conformément aux exigences légales. Peuvent en prendre connaissance le Ministre de la justice, le Directeur général des prisons, le Directeur de la police, le Directeur de l’établissement pénitentiaire, le personnel de sécurité et toute autre autorité prévue par la loi ainsi que les personnes autorisées par les précédentes. Les personnes qui, dans l’exercice de leurs fonctions, ont accès à des données à caractère personnel ne peuvent en aucun cas les divulguer en dehors du cadre de leurs fonctions. Ces données ne peuvent être communiquées à autrui que dans les cas prévus par la loi. Les données personnelles de chaque condamné sont consignées dans des registres officiels certifiés. Toute personne en détention provisoire ou condamnée, ainsi que toute personne à qui elle en donne l’autorisation, a le droit de demander au directeur de l’établissement pénitentiaire d’obtenir accès à ses données personnelles en précisant les motifs de sa demande et le type d’information auxquelles elle souhaite avoir accès. Le directeur de l’établissement pénitentiaire veille à ce que les informations ainsi communiquées ne concernent pas une autre personne en détention provisoire ou condamnée. Si l’accès à l’information est demandé par une tierce personne, cette dernière doit avoir obtenu le consentement écrit de la personne en détention provisoire ou condamnée, sauf disposition contraire de la loi. La législation en vigueur s’applique au traitement des informations personnelles des témoins et des collaborateurs de justice. Les personnes en détention provisoire ou condamnées peuvent déposer une plainte concernant l’application de la loi et le règlement interne. Les articles 49 et 50 de la loi no8328 du 16 avril 1998 sur les droits et le traitement des détenus, tels que modifiés, confèrent le droit de déposer une plainte, oralement ou par écrit. Cette dernière peut être adressée au personnel de l’établissement pénitentiaire, à la Direction générale des prisons, au Ministère de la justice, au Bureau du Médiateur, à des organisations internationales, à des ONG locales et étrangères, au tribunal exécutant la décision pénale, au procureur du tribunal de district et à d’autres personnes se rendant dans l’établissement, conformément à l’article 43 de la loi. Après avoir été consignée dans un registre spécial, la demande ou la plainte est soumise au directeur de l’établissement pénitentiaire, qui charge l’employé pertinent d’y répondre et de faire part de ses conclusions à la personne en détention provisoire ou condamnée. Chaque établissement doit établir et tenir à jour le registre des demandes et des plaintes des personnes en détention provisoire et des condamnés, qui peut être établi sur support de papier ou sur support électronique. La présentation et le contenu du registre, ainsi que la procédure à suivre pour répondre aux plaintes, sont décrits dans le Règlement général des prisons. Les autorités compétentes examinent les plaintes et les demandes aussitôt que possible et au plus tard un mois après leur soumission à moins qu’une date particulière n’ait été établie en application de dispositions spéciales. Le détenu a le droit de déposer une plainte auprès des plus hautes instances du système pénitentiaire et, si cette dernière n’est pas résolue par l’administration par une décision particulière, il peut s’adresser au tribunal ayant compétence dans la localité où se trouve l’établissement pénitentiaire.

100.La loi no119/2014 sur le droit à l’information dispose que les établissements publics qui refusent de fournir des informations sans motif valable sont passibles de sanctions. La République d’Albanie a ratifié différents instruments internationaux ayant pour objet d’interdire la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains et dégradants, en promulguant la loi no9453 du 15 décembre 2005 sur la ratification du Protocole no14 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentaleset la loi no9094 du 3 juillet 2003 sur la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Elle a également mis en place différentes mesures législatives, administratives et judiciaires pour garantir l’interdiction de la torture, d’autres peines et traitements cruels, inhumains et dégradants, conformément à la Constitution albanaise (art. 15, 18, 25, 26, 27, 28, 43, 48). L’article 5 du Code de procédure pénale de la République d’Albanie dispose que nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements dégradants. La loi no9397 du 12 mai 2005 sur le contrôle interne des établissements pénitentiaires, telle que modifiée, définit et régit les opérations des services pénitentiaires. La loi no8331/1998 relative à l’exécution des décisions pénales, telle que modifiée, définit les contrôles appliqués aux actions des procureurs qui donnent lieu, notamment, à l’obtention d’informations directes et à la poursuite de vérifications en cas d’affaire ou de plainte de traitement dégradant. Le Bureau du Médiateur est guidé par les principes d’impartialité, de confidentialité, de professionnalisme et d’indépendance dans l’exercice de ses activités de protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales prévues par la Constitution et la législation. Il est habilité à formuler des recommandations et à proposer des mesures en cas de violation des droits de l’homme et des libertés fondamentales par l’administration publique.

101.S’agissant des mécanismes mis en place pour prévenir une privation de liberté illégale, le Code de procédure pénale dispose que nul ne peut être privé de sa liberté par une mesure de sécurité si ce n’est pour des motifs et conformément à la procédure prévus par la loi. Le chapitre V du Code pénal, qui traite de l’imposition de mesures de sécurité, fait état du droit de la personne à être informée de toute décision prise à son encontre et de son droit à faire appel.

102.S’agissant de l’offre de formations portant sur les dispositions de la Convention, nous avons été informés que la Direction des prisons assure également des formations pluridisciplinaires au personnel qui portent, notamment, sur les questions de l’application de la loi dans les établissements pénitentiaires.

103.Conscients de l’importance du processus de recherche d’informations sur les personnes disparues durant le régime dictatorial, et compte tenu du nombre de demandes présentées, de leur objet, de leur acceptation et de leur considération lors des réunions de l’Autorité, nous jugeons qu’il est raisonnable de suivre les procédures indiquées ci-après dans le but d’identifier les lieux dans lesquels les personnes ont disparu, ont été tuées par les persécuteurs du régime, ou bien sont enterrées, bien que la loi ne confère pas à cette action de l’AIFSDD un caractère prioritaire. L’AIFSDD envisage donc de poursuivre ce processus en raison du nombre considérable de demandes (21) soumises par des particuliers souhaitant prendre connaissance des dossiers sur leurs proches, obtenir des éclaircissements sur le sort des personnes disparues ou décédées en prison, ainsi que sur les personnes exécutées avec ou sans procès durant le régime communiste. L’AIFSDD examine avec soin chaque dossier et les informations correspondantes. Des activités sont aussi menées pour communiquer avec les membres de la population et les familles des personnes portées disparues, comme en témoigne la cérémonie de commémoration organisée dans le camp de Tepelenë le 30 août 2017 à l’occasion de la Journée internationale des personnes disparues. S’agissant des progrès accomplis par l’Autorité et les mesures prises pour faire la lumière sur les dossiers de l’ancien organe de sécurité de l’État, nous vous informons que, en vertu de la loi no 45/2015, quiconque a le droit d’avoir des informations sur les documents établis par ledit organe de sécurité dans le cadre d’un processus démocratique et transparent conçu de manière à protéger la personne et à promouvoir la réconciliation nationale. Ces documents, établis par le Ministère de l’intérieur de l’ancienne République populaire socialiste d’Albanie durant la période allant du 29 novembre 1944 au 2 juillet 1991, date de la constitution du Service de renseignement national, se trouvent dans les archives de la République d’Albanie. Ce faisant, l’AIFSDD :

Assure l’application en bonne et due forme de toutes les normes constitutionnelles et juridiques dans le cadre de l’organisation et de la gestion du processus ;

Favorise le développement et l’instauration d’une nouvelle culture pour toutes les catégories de personnes en quête d’informations, notamment aux fins d’activités d’éducation civique ;

Favorise le renforcement des capacités et valorise les ressources humaines de la direction en assurant périodiquement des formations professionnelles de qualité ;

Renforce le contrôle et la transparence à toutes les étapes du processus.

Recommandation V. Mesures d’indemnisation et de protection des enfants contre une disparition violente (art. 24 et 25)

104.S’agissant du droit de la victime d’obtenir des informations sur la poursuite de l’enquête et les résultats de cette dernière, conformément au paragraphe 2 de l’article 24 de la Convention, le Code de procédure pénale (art. 58) dispose que la victime d’une infraction pénale a le droit :

d)De demander à tout moment des informations sur l’état d’avancement de la procédure et de prendre connaissance des preuves, sans préjudice du principe du secret de l’enquête ;

f)De solliciter des éléments probants et de déposer de nouvelles demandes auprès de l’autorité chargée de la procédure ;

g)D’être informée de l’arrestation de l’accusé, et de sa libération, dans les conditions énoncées ici ;

h)D’être informée de la décision de ne pas lancer la procédure, d’ordonner un non-lieu, ou de l’ouverture et de la conclusion du procès ;

i)D’introduire un recours devant un tribunal contre la décision du procureur de ne pas engager les poursuites ou contre la décision du procureur ou du juge de l’audience préliminaire de déclarer un non-lieu.

105.S’agissant du droit de la victime à obtenir une indemnisation, l’article 58 du Code de procédure pénale dispose que la victime d’une infraction pénale a le droit :

j)De demander à être dédommagée du préjudice et de se constituer en tant que partie civile dans une procédure pénale ;

k)D’être dispensée, dans les conditions prévues par la loi, des frais d’obtention des actes et des frais de justice au titre du dépôt d’une requête concernant le statut de la victime de l’infraction. Le paragraphe 4 dispose que les héritiers de la victime ont les droits prévus aux alinéas a), d), e), f), g) et j) du paragraphe 1 du présent article. Si l’héritier de la victime est mineur, il est représenté par son représentant légal.

106.S’agissant du droit à recevoir une indemnisation, le Code de procédure pénale dispose ce qui suit :

Article 268Conditions d’application

1.En cas d’acquittement sur la base d’un jugement définitif, l’accusé a la possibilité de demander l’indemnisation du préjudice causé par la période qu’il a passée en détention provisoire, à moins qu’il n’ait été établi qu’il est en partie ou totalement responsable de la décision de détention provisoire ou de la non-découverte en temps opportun du fait inconnu.

2.Toute personne condamnée ayant fait l’objet d’une détention provisoire bénéficie du même droit lorsqu’il est établi par suite d’un jugement définitif que la décision de mise en détention provisoire a été prise sans que soient respectées les conditions énoncées aux articles 228 et 229.

107.La loi no 9381 du 28 avril 2005 sur l’indemnisation pour emprisonnement injuste, établit, de même, des règles détaillées concernant l’octroi d’indemnisations en cas d’emprisonnement injuste, y compris par assignation à résidence, ainsi que la durée, le mode de calcul et les procédures de demande de versement desdites indemnisations. Cette loi dispose qu’une personne qui a été déclarée innocente, dont l’affaire a été rejetée par décision définitive du tribunal ou du parquet, ou qui est restée en prison au-delà de la période stipulée dans sa sentence, a droit à être indemnisée du préjudice causé.

108.La disposition énoncée au dernier paragraphe de l’article 109/c du Code pénal est conforme à la disposition de l’alinéa a) de l’article 25 de la Convention concernant les mesures nécessaires pour prévenir et réprimer pénalement la soustraction d’enfant soumis à une disparition forcée ou dont le père, la mère ou le représentant légal sont soumis à une disparition forcée, ou d’enfants nés pendant la captivité de leur mère soumise à une disparition forcée. En vertu de la législation interne et des accords internationaux, l’intérêt supérieur du mineur prévaut dans chaque cas. La loi no 9695 du 19 mars 2007 relative aux procédures d’adoption et au Comité chargé de la question des adoptions stipule que le Comité a le devoir de prendre les mesures nécessaires pour éviter les cas de rejet d’adoption, l’obtention d’avantages injustes et toutes activités visant à promouvoir la traite des enfants.

109.L’Agence nationale chargée des droits et de la protection de l’enfant est un organisme central placé sous la direction du Ministère de la santé et de la protection sociale, qui a pour mission de coordonner et d’organiser les activités d’un système intégré de protection de l’enfant, notamment les interventions et l’adoption de mesures visant à prévenir la maltraitance, la privation de soins et la violence. La loi no 18/2017 relative aux droits et à la protection de l’enfant, adoptée par le Parlement le 23 février 2017 et entrée en vigueur le 9 juin 2017 a pour objet de satisfaire à l’obligation constitutionnelle de garantir le droit des enfants à bénéficier d’une protection particulière de l’État. L’objectif consiste à mettre en place un système de protection de l’enfant efficace et reposant sur une étroite coopération de différents secteurs et de conférer au système de plus amples responsabilités pour prévenir toutes les formes de violence contre les enfants et protéger ces derniers de ces violences.

110.La loi no 18/2017 relative aux droits et à la protection de l’enfant ne fait état d’aucune procédure ou condition d’indemnisation et de protection des enfants contre la disparition forcée. Elle prévoit toutefois des mesures de protection qui peuvent être appliquées par les responsables de la protection des enfants lorsqu’ils déterminent que des enfants sont exposés à des risques par suite d’actes de violence, de maltraitance, de négligence ou d’exploitation. Tout enfant qui peut avoir fait l’objet d’une disparition forcée est assuré de bénéficier de la protection conférée par la loi, d’une prise en charge par les structures pertinentes et de services, d’interventions et, si nécessaire, de mesures de protection. La première partie de la loi traite de la nature et du champ d’application des droits de l’enfant.

111.La loi no 18/2017 s’applique à :

a)Tout enfant de nationalité albanaise, sans nationalité ou de nationalité étrangère, se trouvant sur le territoire de la République d’Albanie ;

b)Tout enfant de nationalité albanaise se trouvant en dehors du territoire de la République d’Albanie.

112.Les droits conférés par cette loi se rapportent aux dispositions des articles 24 et 25 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, comme indiqué ci-après :

a)L’article 9 de la loi dispose que l’enfant a le droit de demeurer avec ses parents. Tout enfant séparé de l’un ou de ses deux parents a le droit d’obtenir des informations sur le lieu de résidence de ces derniers ou d’autres membres de sa famille, s’ils ont été arrêtés, détenus, exilés, expulsés ou s’ils sont décédés, pour quelque motif que ce soit, à moins que la communication de cette information ne nuise à son bien-être. Les parents et autres membres de la famille ont le droit de demander des informations sur le lieu de résidence de l’enfant dont ils ont été séparés par suite d’une détention, d’un emprisonnement, d’un retrait du lieu de résidence ou d’un décès durant une période de privation de liberté, à moins que la communication de cette information ne nuise au bien-être de l’enfant. Si cette information ne leur est pas donnée, les parents ou les autres membres de la famille ont le droit de saisir le tribunal qui décide si le refus d’information est motivé ou non ;

b)L’article 8 de la loi garantit le droit de l’enfant à un nom, à une nationalité et à une identité, ainsi que le droit de connaître ses parents et de préserver son identité. Il garantit le droit de l’enfant de rétablir son identité et son nom de famille, sa nationalité et ses liens familiaux conformément à la législation en vigueur, en l’absence de toute ingérence illégale. Tout enfant privé de manière illégale d’au moins l’un des aspects de son identité bénéficie de l’aide nécessaire pour rétablir cette dernière, et les institutions publiques qui en ont la charge doivent lui donner la possibilité de pratiquer sa religion, de connaître sa culture et d’utiliser sa langue d’origine. L’aide fournie consiste notamment à rechercher les parents et les membres de la famille de tout enfant réfugié ou demandeur d’asile à des fins de regroupement familial, et à enregistrer toute modification de l’identité de l’enfant, telle que son nom, sa nationalité et les droits parentaux ;

c)L’article 10 de la loi garantit le droit de l’enfant au regroupement familial. L’enfant a le droit de demander à entrer en République d’Albanie ou de sortir de son territoire dans le but de vivre avec ses parents. La demande qu’il présente à cet effet doit être traitée de manière positive, humaine et rapide et ne doit être refusée que s’il existe des motifs de soupçonner que l’entrée ou la sortie de l’enfant n’est pas dans son intérêt supérieur. Les parents d’un enfant qui a acquis la citoyenneté albanaise sont autorisés à demeurer sur le territoire albanais même s’ils ont immigré de manière illégale en Albanie ;

d)L’article 11 de la loi garantit à l’enfant le droit de quitter son lieu de résidence ou de retourner dans son pays d’origine. Le changement du lieu de résidence de l’enfant en Albanie ou son départ dans un autre pays ne peut être effectué qu’avec l’accord des deux parents. En cas de différend entre ces derniers, la décision est prise par un tribunal après consultation de l’enfant qui a été informé de la situation sociale et économique générale et des services qui peuvent être assurés dans le pays d’origine. L’enfant non accompagné d’un parent ou d’un responsable légal jouit du droit de retour dans les meilleurs délais. Le retour d’un enfant dans son pays d’origine n’a lieu que si ce retour est jugé dans son intérêt supérieur. Cet intérêt est déterminé sur la base d’une évaluation de la sécurité de l’enfant, de ses liens avec le lieu dans lequel il doit retourner et des possibilités de préserver son identité, sa nationalité, son nom et ses liens familiaux. Il dépend aussi de l’avis ou du consentement de l’enfant, selon son âge et son degré de compréhension de la situation. Les services diplomatiques de la République d’Albanie à l’étranger informent le Ministère des affaires étrangères lorsque l’enfant n’est pas accompagné, et le Ministère de la justice lorsque l’enfant est accompagné d’un seul parent ou que l’un des deux parents n’a pas consenti à son retour. Ces organes prennent les mesures nécessaires pour assurer le retour de l’enfant en Albanie, conformément aux dispositions de la loi no 9446 du 24 novembre 2005 sur la ratification de la Convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants. Le parent, la personne ayant la garde de l’enfant ou toute personne informée du départ de l’enfant doit contacter dans un délai de vingt-quatre heures l’autorité publique responsable de manière à assurer un retour rapide de l’enfant dans de bonnes conditions de sécurité. Le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant est jugé primordial dans le cadre de la prise de décisions et de mesures au sujet de l’enfant.

113.Par sa décision, no 372 du 26 avril 2017, le Conseil des ministres a adopté le Programme national pour les droits de l’enfant 2017-2020, qui a pour objet de protéger et de promouvoir de manière efficace les droits de l’enfant en République d’Albanie en appliquant les normes internationales et nationales pertinentes et en favorisant la poursuite d’une approche intégrée et inclusive des droits de l’enfant. Le Programme fournit un cadre pluridisciplinaire et systématique qui devrait être intégré dans tous les instruments, plans et activités concernant les enfants aux niveaux national et local, dans le droit fil de la Convention des Nations Unies relatives aux droits de l’enfant. Il est guidé par le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant et vise à créer un environnement favorable à son développement dans de bonnes conditions de sécurité et de santé, à son plein épanouissement physique et psychosocial, à son inclusion sociale et à sa participation active dans tous les domaines qui le concernent. Il vise aussi à garantir l’évaluation des progrès accomplis pour assurer les droits de l’enfant dans les grands domaines de l’action publique. Les principaux objectifs stratégiques sont formulés de manière à promouvoir la réalisation de ces visées.

114.Les éléments stratégiques du Programme sont : i) la poursuite d’une bonne gouvernance dans le cadre de la promotion, du respect et de la protection des droits de l’enfant ; ii) l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des enfants ; et iii) l’offre de systèmes et de services adaptés aux enfants et aux adolescents dans les domaines du développement et de l’éducation, de la justice, de la santé et de la nutrition et de la protection sociale. Le Programme suit une démarche fondée sur les droits de l’enfant, considérant que chaque enfant est un être humain unique et précieux qui a le droit non seulement de vivre et de survivre, mais aussi de s’épanouir pleinement. Les enfants peuvent exprimer leur opinion de manière à faire mieux comprendre la situation dans laquelle ils se trouvent et contribuer activement à leur vie. Ils méritent que des ressources soient affectées et que les droits prévus soient appliqués dans le but de promouvoir leur intérêt supérieur. Le Programme a pour objectif d’éliminer toutes les formes de violence à l’égard des enfants. Il faudra, pour cela, mettre en place un système de protection des enfants intégré et efficace reposant sur un cadre juridique et institutionnel nettement amélioré, et s’attaquer aux différentes formes de violence à l’égard des enfants, notamment les brimades, la violence à l’école, les déplacements, la violence dans la famille, les atteintes sexuelles, l’exploitation économique des enfants, les enfants des rues, l’insécurité de l’enfant dans l’environnement numérique, les enfants non accompagnés ou victimes de la traite, etc. Une place importante est accordée à la stratégie de prévention dans le cadre de la protection des enfants contre toutes les formes de violence, qui privilégie des programmes visant à promouvoir des manières d’élever les enfants positives et non violentes. Les principaux objectifs consistent à améliorer les mécanismes juridiques et institutionnels afin d’établir un système de protection de l’enfant intégré et efficace et d’élargir l’accès aux services de protection de l’enfance. Les diverses mesures envisagées à cette fin concernent principalement le cadre juridique, et la constitution ou le renforcement des capacités de toutes les personnes travaillant directement ou indirectement avec des enfants dans le cadre de leur formation professionnelle. Elles concernent aussi la supervision des instances qui travaillent avec les enfants, l’inspection des normes des services fournis aux enfants ainsi que les programmes visant à réduire la violence, à assurer une participation positive ou à fournir des services spécialisés aux enfants victimes de sévices sexuels, d’autres formes d’atteintes sexuelles et de maltraitance ou d’autres actes de violence graves.