NATIONS UNIES

CAT

Convention contre

la torture et autres peines

ou traitements cruels,

inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/34/Add.184 mars 2005

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Troisième rapport périodique des États parties devant être soumis en 2000

Additif

Autriche *

[30 juin 2003]

TABLE DES MATIÈRES

Paragraphes Page

I.REMARQUES GÉNÉRALES1 − 53

II.INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LES NOUVELLES MESURES ET LES FAITS NOUVEAUX, EXPOSÉES DANSL’ORDRE DES ARTICLES DE LA CONVENTION6 − 574

III.COMPLÉMENT D’INFORMATION DEMANDÉ PAR LECOMITÉ58 − 7614

I. REMARQUES GÉNÉRALES

1.Les présents troisième et quatrième rapports périodiques soumis par l’Autriche en application de l’article 19 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants font suite aux deux premiers rapports qu’elle a présentés. Conformément aux principes directeurs du Comité contre la torture concernant la rédaction de ces rapports, seules les nouvelles mesures prises et les faits nouveaux survenus depuis que l’Autriche a présenté son deuxième rapport périodique sont exposés ici. Les parties 2 et 3 du présent rapport contiennent les renseignements que le Comité contre la torture avait demandés ainsi que des informations relatives à la suite donnée par l’Autriche aux recommandations qu’il avait formulées après avoir examiné son dernier rapport.

2.L’attachement à la protection et à la promotion des droits de l’homme et des libertés fondamentales a toujours été un des principes fondamentaux de la politique intérieure et étrangère de l’Autriche. L’interdiction de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qui est un des éléments essentiels des droits de l’homme, est donc particulièrement pertinente à cet égard.

3.Dès qu’il a été possible de le faire, c’est-à-dire le 4 novembre 2000, l’Autriche et 24 autres États ont signé le Protocole no 12 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Convention européenne des droits de l’homme) relatif à l’interdiction de toute forme de discrimination, faisant ainsi le premier pas important vers l’entrée en vigueur rapide de cet instrument. L’Autriche a également signé le Protocole no 13 à cette Convention, relatif à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances, le 3 mai  2002, soit le jour de son ouverture à la signature. Ayant aboli la peine de mort, y compris en temps de guerre et de crise, dès 1968 (Journal officiel no 73/1968), elle n’a pas eu à modifier sa Constitution. L’abolition totale de la peine capitale dans toute l’Europe est un objectif de politique étrangère que l’Autriche poursuit depuis longtemps et qui va au‑delà des buts du Protocole no 6 à la Convention européenne. C’est pourquoi cette dernière a d’emblée soutenu l’initiative que la Suède a lancée à l’issue de la Conférence des Ministres tenue les 3 et 4 novembre 2000 à Rome en faveur de l’abolition totale de la peine de mort dans le cadre du Conseil de l’Europe.

4.C’est à Vienne que se trouve l’Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes, qui a pour principal objet de recueillir et de fournir des données objectives, fiables et comparables au niveau européen sur les phénomènes du racisme, de la xénophobie et de l’antisémitisme. L’Autriche apporte aux travaux de l’Observatoire un appui financier d’un montant supérieur aux contributions usuelles et aide le Point focal national mis en place par l’Observatoire en lui fournissant des données et des renseignements. Certains cas de traitements inhumains ou dégradants sont motivés par des considérations racistes, xénophobes ou antisémites, les travaux de l’Observatoire apportent aussi une contribution majeure à la lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

5.Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) a effectué sa troisième visite en Autriche du 19 au 30 septembre 1999. Son rapport de mission (CPT/Inf (2001) 8) et la réponse du Gouvernement autrichien ont été publiés à la demande de l’Autriche. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) a effectué sa deuxième visite en Autriche du 27 au 29 mars 2000 et publié son deuxième rapport accompagné des commentaires du Gouvernement (CRI (2001) 3).

II. INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LES NOUVELLES MESURES ET LES FAITS NOUVEAUX, EXPOSÉES DANS L’ORDRE DES ARTICLES DE LA CONVENTION

Articles premier et 4

6.L’Autriche tient beaucoup à faire remarquer que tous les actes pouvant être qualifiés de «torture» au sens de l’article premier de la Convention figuraient dans son Code pénal avant même qu’elle ne ratifie la Convention et étaient passibles de sanctions judiciaires diverses compte tenu de la gravité de l’infraction.

7.L’Autriche a un système de droit pénal positif complexe et très différencié dans lequel tous les actes intentionnels du type mentionné au paragraphe 1 de l’article premier de la Convention constituent une des infractions pénales suivantes, définies par le Code pénal autrichien:

Article 83: Le fait de causer un dommage corporel à autrui ou de porter atteinte à sa santé, y compris une douleur physique ou une souffrance mentale ainsi qu’un (simple) mauvais traitement;

Article 84: Le fait de causer un dommage corporel grave à autrui ou de porter gravement atteinte à sa santé (par exemple, en occasionnant une grande souffrance);

Article 85: Le fait de causer un dommage corporel à autrui ou de porter atteinte à sa santé avec de graves conséquences à long terme, par exemple lorsque l’infraction entraîne une longue et grande souffrance;

Article 86: Le fait de causer à autrui un dommage corporel entraînant la mort;

Article 87: Le fait de causer volontairement un dommage corporel grave (lorsque l’auteur veut causer un dommage physique grave à autrui ou porter gravement atteinte à sa santé);

Article 313: Le fait que l’un quelconque des actes énumérés ci-dessus a été commis par un agent public dans l’exercice de ses fonctions, la peine encourue étant alors une fois et demie celle qui est normalement prévue;

Article 312: Le fait pour un agent public de maltraiter ou de négliger un prisonnier, notamment de ne pas respecter l’obligation qui lui incombe de veiller sur celui-ci, portant de ce fait intentionnellement atteinte à sa santé;

Article 75: Le meurtre (tout homicide volontaire d’un être humain, y compris les cas où l’auteur sait que le décès de la victime est possible et assume ce risque).

8.Par conséquent et compte tenu aussi de certaines dispositions générales énoncées par le Code pénal (par exemple, art. 7 − intention, art. 12 − fait d’inciter autrui à commettre une infraction pénale ou de l’aider à commettre une infraction pénale, art. 15 − tentative), tous les actes que la Convention qualifie d’actes de torture et qui, comme tels, sont passibles de sanctions sont aussi punissables en Autriche, indépendamment des motifs énoncés au paragraphe 1 de l’article premier, et sans qu’il soit non plus nécessaire que la douleur ou les souffrances infligées soient aiguës. La définition de la torture est donc, dans un certain sens, plus large dans le Code pénal autrichien que dans la Convention.

9.La recommandation du Comité contre la torture relative à la répression de la torture (A/55/44, par. 50) est donc pleinement respectée par le droit pénal autrichien, et le fait que la définition de l’infraction dans le Code pénal autrichien diffère de la définition énoncée au paragraphe 1 de l’article premier de la Convention n’y change rien; cette différence tient simplement au fait que, d’une manière générale, la loi autrichienne vise un plus grand nombre d’actes criminels que la Convention.

10.La Convention ne fait pas obligation aux États parties de transposer textuellement la définition de la torture dans leur droit interne; l’absence d’une telle obligation ressort clairement de l’emploi du terme «infractions» au pluriel au paragraphe 1 de l’article 4. La façon dont l’obligation internationale d’incriminer un acte est transposée dans le droit interne et l’établissement des définitions correspondantes, dans leurs grandes lignes ou dans leur détail, sont laissés à la discrétion de chaque État partie – comme c’est le cas pour beaucoup d’autres obligations analogues découlant d’accords internationaux – et les définitions des comportements visés doivent être adaptées au système et structures judiciaires des États concernés.

Articles 10 et 16

11.Depuis la présentation du deuxième rapport périodique, les dispositions juridiques régissant l’intervention des forces de police autrichiennes ont été élaborées plus avant et la prise en considération des questions relatives aux droits de l’homme est devenue une pratique bien établie des forces de police et un élément essentiel pour garantir la qualité de leur travail.

12.Le Ministère fédéral de l’intérieur continue d’appliquer les mesures adoptées pour former les forces de police aux questions relatives aux droits de l’homme et combattre la discrimination. Les droits de l’homme sont enseignés dès la formation initiale, en particulier dans le cadre des cours consacrés au droit constitutionnel, au travail en prison, à la rhétorique (situations de conflit) et à la loi sur la police de sécurité, mais aussi pendant le cours de psychologie appliquée. L’éducation aux droits de l’homme est bien ancrée dans les cursus de formation. Une importance particulière est attachée à la Convention européenne des droits de l’homme et à son article 3. De même, dans le cadre des cours de déontologie, les membres des forces de police apprennent à apprécier et à analyser leur image professionnelle, leurs valeurs et leur rôle dans la société, ainsi que les causes et la gestion des conflits. Simultanément, une formation pratique en matière de droits de l’homme est dispensée, qui porte en particulier sur le traitement des étrangers, le règlement des conflits, la sécurité, la liberté et le phénomène des migrations.

13.En outre, divers stages de formation et projets ont été organisés pour examiner de manière approfondie des questions traitant des droits fondamentaux des minorités ethniques et de la tolérance à leur égard. En 1998 et 1999, une «Semaine des droits de l’homme» a été organisée, avec suivi, à l’intention des membres de la force publique, à laquelle ont été associés des conférenciers internes et des experts d’organisations non gouvernementales (ONG) comme Amnesty International et Caritas. L’objectif était que les participants puissent transmettre les connaissances acquises à leurs collègues (effet boule de neige).

14.La «Semaine des droits de l’homme 2000», projet conjoint du Conseil de l’Europe et du Ministère fédéral de l’intérieur, s’est tenue du 28 octobre au 4 novembre 2000. Outre qu’elle proposait des stages de formation, elle visait à sensibiliser davantage les agents de la force publique aux questions relatives aux droits de l’homme. L’accent a été mis en particulier sur la commémoration du cinquantième anniversaire de la Convention européenne des droits de l’homme. Les forces de sécurité ont participé à des conférences dans toute l’Autriche. Les résultats des études et projets, en particulier ceux qui avaient trait au «maintien de l’ordre dans une société démocratique», ont été présentés à une grande conférence nationale, au cours de laquelle plusieurs ONG ont eu l’occasion de faire connaître leurs activités.

15.Pendant «l’Année des droits de l’homme 2000», le Ministère de l’intérieur a également mené, en collaboration avec des ONG, le projet «PAVEMENT», qui avait pour objectif de trouver des moyens innovants pour la mise en œuvre efficace de l’article 13 du Traité instituant la Communauté européenne par les prestataires de service public, les forces de sécurité étant prises en exemple. Ce projet national s’inscrivait dans le cadre d’un projet transnational de la Commission européenne dans lequel l’Italie, la France, l’Espagne et l’Allemagne étaient partenaires. Il visait essentiellement à trouver les moyens d’empêcher les policiers d’avoir un comportement discriminatoire et à leur faire prendre conscience que la police est la garante de l’application de l’article 13 du Traité instituant la Communauté européenne, ainsi qu’à élaborer un cadre pluridimensionnel permettant de débattre de la question de la police et de la discrimination.

16.Depuis l’automne 1999, un stage de formation de deux semestres intitulé «Mission des forces de police dans une société multiculturelle» est organisé par le Centre culturel et linguistique international et l’association Verband Wiener Volksbildung, en coopération avec le Ministère de l’intérieur. Ce stage, qui vise à mieux apprendre aux policiers comment se comporter avec les migrants, s’adresse aux membres des forces de police de la Direction de la police fédérale à Vienne, qui sont souvent en contact avec des migrants. Il fait aujourd’hui partie du cursus de l’École de police, qui relève du Ministère de l’intérieur.

17.Une autre mesure de formation de base visant à lutter contre la discrimination est le projet intitulé «A world of difference» de l’organisation américaine de défense des droits civils Anti‑Defamation League (ADL), qui a mis au point une méthode permettant de mieux sensibiliser le public à la discrimination. À ce jour, plus de 350 000 personnes ont participé à ce séminaire aux États-Unis. Ce programme a été appliqué avec un grand succès dans les écoles et les cours de formation continue, et en particulier dans les stages de formation et de perfectionnement destinés aux membres des forces de police et de sécurité et de l’armée. Il est également suivi par les forces armées en Allemagne.

18.Ce séminaire a en outre été adapté pour les forces de police autrichiennes et sera utilisé de diverses manières dans les programmes de formation et de perfectionnement. En expliquant mieux en quoi consiste la discrimination, question qui est très importante pour la police, il vise à rendre les policiers autrichiens plus sensibles à ce problème dans l’exercice de leurs fonctions. L’École de police, qui relève du Ministère fédéral de l’intérieur, a été chargée de mener à bien ce séminaire.

19.Les droits de l’homme et libertés fondamentales et la manière de les garantir et de leur donner effet dans la pratique juridique forment aussi un élément important de la formation professionnelle des juges et des procureurs. Le programme de perfectionnement pour juges et procureurs organisé chaque année par le Ministère fédéral de la justice, en coopération avec les présidents des quatre cours d’appel autrichiennes (Oberlandesgerichte), l’Association des juges autrichiens, l’Association des procureurs autrichiens, la section autrichienne de la Commission internationale de juristes et d’autres organisations, a été constamment étoffé dans le domaine des droits de l’homme, en particulier ces dernières années, notamment en ce qui concerne la prévention de la discrimination, du racisme et de la xénophobie.

20.De 1998 à 2000, le thème intitulé «la résolution de conflits: contribution au renforcement des droits de l’homme pour prévenir la violence» a été traité dans d’autres séminaires de formation. En 2000 et 2001, des conférences spéciales ont été consacrées à divers aspects fondamentaux de la procédure pénale ainsi qu’à l’évolution de la procédure pénale sous la poussée de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Un programme mettant davantage l’accent sur la nécessité d’approfondir l’étude de la question de la lutte contre la discrimination dans d’autres stages de formation a été élaboré en coopération avec l’Institut des droits de l’homme Ludwig-Boltzmann de Vienne et ADL.

21.Dans les prisons des tribunaux, où sont détenus les prévenus, les condamnés et les personnes faisant l’objet de mesures de détention préventive, une attention particulière est portée aux questions relatives aux droits de l’homme, à la gestion des conflits et à la prévention de la violence, en particulier dans les stages de formation et de perfectionnement destinés au personnel policier et pénitentiaire. Le Fortbildungszentrum Strafvollzug (Centre de formation à l’exécution des peines privatives de liberté), par exemple, organise des séminaires internes sur les sujets suivants: gestion des conflits et des agressions, traitement de détenus particuliers, détenus étrangers, gestion de la sécurité, intervention en cas de crise et prévention du suicide.

22.L’article 184 du Code de procédure pénale (Strafprozessordnung) et l’article 22 de la loi sur l’exécution des peines privatives de liberté (Strafvollzugsgesetz) prescrivent que les prévenus placés en détention provisoire et les condamnés qui purgent une peine doivent être traités dans le respect de leur honneur et de leur dignité humaine et qu’il convient d’empiéter le moins possible sur leur espace personnel. Conformément aux dispositions réglementaires applicables, les détenus ne doivent être soumis qu’aux restrictions qui s’imposent pour remplir l’objectif de la détention et pour maintenir la sécurité et l’ordre dans l’établissement pénitentiaire.

23.Les «Instructions au personnel des établissements pénitentiaires» du 22 décembre 1995, qui sont les instructions générales relatives aux tâches et obligations du personnel pénitentiaire établies par le Ministère fédéral de la justice, énoncent les dispositions générales suivantes sur le traitement des détenus (point 1.4):

«1)Le traitement des détenus est conforme au principe du respect de la dignité humaine, qui est indispensable à l’accomplissement des tâches. L’article 22 de la loi sur l’exécution des peines privatives de liberté et, pour les prévenus, l’article 184 du Code de procédure pénale, contiennent d’autres dispositions essentielles régissant cette question.

2)En outre, les détenus sont traités conformément aux règles de politesse qui prévalent dans la société; des exercices spéciaux visant à apprendre aux gardiens à mieux gérer leurs relations avec autrui, sur leur lieu de travail et à l’école peuvent être organisés dans les différents quartiers pénitentiaires en vue d’une meilleure compréhension.

3)Afin d’instaurer un climat de confiance propice à la discussion, qui sont des conditions préalables à l’accomplissement de leurs tâches, les agents pénitentiaires prennent au sérieux les problèmes des détenus, leur laissent le temps d’en parler et s’efforcent d’expliquer aux détenus les décisions avec lesquelles ils ne sont pas d’accord. Ils s’abstiennent de toute familiarité avec les détenus.».

Articles 11 et 16

24.En ce qui concerne l’administration des établissements pénitentiaires, on s’attache à améliorer les conditions de détention et d’hébergement, par exemple en réduisant le nombre de détenus par cellule et en créant davantage de cellules individuelles. Ces efforts sont facilités par la relative stabilité du nombre de détenus en Autriche ces dernières années.

25.Une commission d’experts mise en place par le Ministère fédéral de la justice à l’automne 2001 s’est penchée sur la réorganisation des soins aux détenus, s’agissant en particulier du traitement des détenus souffrant de troubles psychologiques manifestes et de la prévention du suicide. Elle a également pris en compte dans ses travaux les recommandations que le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants avait formulées lors de sa visite en Autriche en 1999.

26.Une attention spéciale est actuellement portée dans les prisons au traitement des détenus en situation exceptionnelle ou de crise (détenus extrêmement agressifs ou mentalement instables), qui doit faire l’objet d’une stratégie de gestion professionnelle. Les lits-cages à barreaux de métal, qui étaient utilisés jusqu’en 1999 dans certains établissements, ont été supprimés. Dans certains établissements, des cellules de sécurité capitonnées sont réservées aux détenus malades. Des directives générales en la matière sont actuellement élaborées en collaboration avec des experts psychiatres et des spécialistes étrangers.

27.La réforme de la procédure d’enquête pénale (procédure préliminaire), qui fait l’objet de discussions depuis plusieurs années et a été élaborée par le Ministère fédéral de la justice, est entrée dans une phase concrète en avril 2001, lorsqu’un projet de loi complet a été achevé et soumis aux organes compétents pour une consultation générale. En 2002, ce projet a été révisé à la lumière des observations formulées dans le cadre de la procédure de consultation, puis soumis au Parlement au mois de juin. En raison des élections générales du 24 novembre 2002, le Parlement n’a pu examiner ce texte, qui devra donc être adopté par le nouveau gouvernement.

28.Le principal objectif de la réforme est de donner une base juridique moderne au travail d’enquête pénale, et au renforcement du rôle du ministère public, qui exerce son contrôle sur les responsables des enquêtes pénales et veille au respect de la protection juridique pendant toute la durée de l’enquête. Il vise également à améliorer la situation juridique des suspects, en étendant les droits de la défense et la protection juridique. À cette fin, le projet de loi prévoit, en particulier:

L’élargissement du droit d’examiner le dossier, qui doit en principe être communiqué au défendeur et à son conseil dès le stade de l’enquête de la police;

La mention expresse du droit qu’a le défendeur de ne pas faire de déclaration (droit de garder le silence) et, en cas d’arrestation, d’entrer en contact avec un avocat et de s’entretenir avec lui avant un interrogatoire;

Le droit du défendeur de faire appel à une personne de confiance lors de l’interrogatoire;

Le droit du défendeur de formuler des «objections» pendant l’enquête si un de ses droits individuels n’a pas été respecté;

Le droit du défendeur de contester l’utilisation de moyens de contrainte;

Le droit du défendeur d’être assisté d’un interprète s’il ne maîtrise pas suffisamment l’allemand.

29.Selon le projet de loi, l’interrogatoire du défendeur doit avoir lieu à une date qui permette, le cas échéant, à la défense de faire valoir ses droits. Un de ses articles contient des dispositions régissant le placement en détention provisoire et les conditions de détention, par exemple la séparation des prévenus et des condamnés, les contacts des détenus avec le monde extérieur, etc.

30.Le projet de loi garantit à toute personne arrêtée le droit de prendre contact avec un défenseur, de le choisir comme avocat et de s’entretenir avec lui avant un interrogatoire, et ce dans les 48 heures qui suivent son arrestation par la police. Avant de choisir son avocat, le défendeur peut s’entretenir avec un conseil, sous surveillance. Cependant, en particulier dans les enquêtes relatives à des infractions extrêmement graves et à la criminalité organisée, il arrive que les mesures de surveillance ne suffisent pas à écarter le danger immédiat de fuite ou de collusion. Dans ce cas, les entretiens avec le défenseur pourront, pendant une courte période − c’est‑à‑dire jusqu’à ce que le suspect soit écroué et au plus tard 48 heures après son arrestation − être limités au temps nécessaire pour désigner un avocat et pour une brève consultation juridique d’ordre général, au cours de laquelle une telle restriction doit être expliquée. En outre, le défendeur devrait en principe être autorisé à discuter cette question avec son avocat sans être entendu par un tiers.

31.Il faut noter que la loi en vigueur autorise déjà une personne arrêtée à demander qu’un parent et un avocat de son choix soient prévenus de l’arrestation, au moment même ou immédiatement après, mais de toute façon avant son interrogatoire (voir par. 7 de l’article 4 de la Loi constitutionnelle fédérale du 29 novembre 1988 sur la protection des libertés individuelles; art. 178 et 179-1 du Code de procédure pénale; par. 3 de l’article 36 du Code des infractions administratives (Verwaltungsstrafgesetz); par. 1-1) et 2 de l’article 8 du Règlement du Ministère fédéral de l’intérieur; Directives communes des Ministères fédéraux de l’intérieur et de la justice; et ordonnance introductive du Ministère fédéral de la justice relative à la loi de 1993 portant modification de la procédure pénale (Strafprozessänderungsgesetz)). Depuis l’adoption de la loi de 2002 portant modification du droit pénal, l’accent est davantage mis sur le droit de toute personne arrêtée de s’entretenir avec son avocat sans qu’un auxiliaire de justice ne soit présent, ce qui est également conforme au jugement que la Cour européenne des droits de l’homme a rendu le 31 janvier 2002 dans l’affaire Lanz c. Autriche. Le juge d’instruction ne peut ordonner la présence d’un auxiliaire de justice que si la détention provisoire a été ordonnée, uniquement ou partiellement, à cause du risque de collusion et si, du fait de circonstances aggravantes, il a des raisons de croire qu’une conversation entre le prévenu et son avocat entraînerait la destruction d’éléments de preuve.

32.Pour que la surveillance soit légale, elle doit nécessairement (y compris pendant les 14 premiers jours de détention) faire suite à une décision dûment motivée. La simple mention des faits étayant le soupçon de collusion qui a motivé l’arrestation est insuffisante; il doit y avoir des raisons de craindre que des éléments de preuve ne disparaissent suite aux contacts avec l’extérieur que le défendeur établirait par l’intermédiaire de son avocat. Par exemple, dans une affaire de criminalité organisée, les contacts avec l’avocat, notamment l’envoi de messages codés, peuvent servir à prévenir des complices qui n’ont pas encore été arrêtés ou d’autres membres de l’organisation criminelle.

Articles 12, 13, 14 et 16

33.Dans une ordonnance du 15 septembre 1989, le Ministère fédéral de la justice avait déjà fourni au ministère public des instructions détaillées relatives aux cas où des organes des forces de sécurité (police) sont accusés de mauvais traitements, de dommages corporels ou de traitement dégradant.

34.Cette ordonnance, qui mentionnait expressément le droit à un examen rapide et impartial de l’affaire, énoncé aux articles 13 et 16-1 de la Convention, prescrivait au ministère public d’examiner sans retard, dans le cadre d’une enquête judiciaire préliminaire, toute plainte qui ne soit pas manifestement infondée concernant tout mauvais traitement ou acte analogue commis par un policier et de garantir ainsi le droit énoncé par la Convention.

35.Informé que ces plaintes faisaient en général d’abord l’objet d’une enquête menée par les services de sécurité mis en cause, et que le ministère public n’était souvent informé que plusieurs semaines après le dépôt de la plainte, le Ministère fédéral de la justice a publié une autre ordonnance soulignant que cette pratique était contraire à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

36.Le Ministère fédéral de la justice a donc, par ordonnance du 30 septembre 1999, annulé l’ordonnance de 1989 et demandé au ministère public de mener des enquêtes judiciaires préliminaires pour faire la lumière sur toute allégation de mauvais traitement visant un policier. Sont également visés les cas dans lesquels, bien qu’aucun reproche concret n’ait été formulé, il existe des soupçons de mauvais traitement, par exemple après le transfert du défendeur à la prison ou pendant son interrogatoire par un juge d’instruction. Dans un tel cas, il est indispensable d’établir un dossier détaillé sur toutes les accusations de mauvais traitements ou de blessures, s’il y a lieu. En cas de blessures visibles ou autres signes, l’opinion d’un expert est requise pour déterminer la cause des dommages corporels.

37.Afin d’aligner les mesures relatives aux forces de sécurité sur l’ordonnance du Ministère fédéral de la justice, le Ministère fédéral de l’intérieur a demandé, par ordonnance du 10 novembre 2000, à tous les services de sécurité et de police de signaler sans retard au procureur compétent, si possible dans les 24 heures, toute accusation de mauvais traitement portée contre un policier. En outre, les responsables de la police ont reçu pour instruction de se borner, dans ce genre d’affaires, à documenter l’accusation et à prendre les mesures indispensables à la préservation des éléments de preuve.

38.Au début de 2001, le Ministère fédéral de la justice a publié une ordonnance dans laquelle il donnait également instruction aux directeurs d’établissements pénitentiaires de veiller, en cas d’accusation de mauvais traitements infligés à un détenu ou de signe faisant craindre ce type de problème, à ce que les services compétents du parquet soient informés, les procédures susmentionnées s’appliquant ensuite.

39.En ce qui concerne les prisons où sont exécutées les peines privatives de liberté, les mesures de détention préventive et les détentions provisoires, la loi de 2001 sur l’exécution des peines (Strafvollzugsgesetznovelle) a été modifiée pour créer cinq commissions de recours régionales (Vollzugskammern), composées d’un juge président, d’un directeur de prison ou d’un agent pénitentiaire expérimenté et d’un troisième membre (en général, un autre juge). Ces commissions statuent sur les plaintes formulées par les détenus contre des directeurs de prison ou contre leurs décisions ou leurs ordres.

40.La mise en place de ces «tribunaux» indépendants dans le secteur de l’administration pénitentiaire s’est traduite par une meilleure protection des droits des prévenus, des condamnés et des personnes placées en détention préventive.

41.Créé par ordonnance du Ministère fédéral de l’intérieur, puis confirmé par la loi sur la police, dont l’article 15 a) a rang de norme constitutionnelle, un conseil consultatif indépendant pour les droits de l’homme (Menschenrechtsbeirat) a été mis en place au Ministère de l’intérieur en juin 1999. Sa réunion constitutive s’est tenue le 5 juillet 1999.

42.Le Conseil consultatif des droits de l’homme conseille le Ministère fédéral de l’intérieur sur les questions ayant trait aux droits de l’homme et lui soumet des propositions pour améliorer la situation. Il est également chargé de surveiller et de contrôler les activités de la police et des autres autorités relevant du Ministère fédéral de l’intérieur, ainsi que des organismes dotés d’un pouvoir administratif et coercitif dans le contexte de la protection des droits de l’homme. Il est autorisé à se rendre dans tous les services de police et dans tout lieu où celle‑ci exerce un pouvoir administratif et coercitif ainsi qu’à vérifier les conditions de détention dans les postes ou locaux de la police. Cette dernière tâche est effectuée par des commissions composées de plusieurs experts dirigées par un spécialiste des droits de l’homme.

43.Les attributions du Conseil consultatif des droits de l’homme vont donc au‑delà de la recommandation du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants: le Conseil n’a pas pour unique activité de vérifier que les détenus sont traités dans le respect de leur dignité humaine (art. 3 de la Convention européenne des droits de l’homme) mais, selon les priorités qu’il a lui‑même définies, il a aussi pour tâche d’examiner toutes les questions relatives aux droits de l’homme dans le cadre de l’ensemble des activités des forces de police.

44.Les membres du Conseil consultatif des droits de l’homme sont indépendants et sont nommés pour trois ans. Le premier mandat étant échu, de nouveaux membres ont été nommés le 23 juillet 2002. Cinq organisations non gouvernementales (ONG) sont aussi représentées au Conseil. Ces recommandations, dûment motivées sont communiquées au Ministère fédéral de l’intérieur et publiées dans le rapport sur la sécurité que le Gouvernement fédéral présente chaque année aux deux chambres du Parlement autrichien (Conseil national et Conseil fédéral), conformément à l’article 93 de la loi sur la police.

45.Depuis 2001, le Conseil consultatif des droits de l’homme a élaboré et publié des rapports complets sur divers sujets (questions relatives aux droits fondamentaux des femmes détenues par les forces de police, informations aux détenus et soins médicaux pour les détenus) et a formulé de nombreuses recommandations. En 2001, ses commissions ont effectué 425 inspections auprès des services de police, dont 66 visites de centres de détention (auparavant appelés prisons de la police). Dans 11 cas, elles ont examiné, sous l’angle de la protection des droits de l’homme, les activités des services de police dans des contextes ou des lieux où ils exercent une autorité administrative (manifestations, descentes de police, etc.).

46.En ce qui concerne le décès tragique du ressortissant nigérian Marcus Omofuma pendant son expulsion le 1er mai 1999, les observations ci‑après sont formulées concernant les articles 12 à 14 de la Convention.

47.Le ministère public de Korneuburg a inculpé trois policiers, soupçonnés d’avoir, le 1er mai 1999, ligoté et baillonné le détenu Marcus Omofuma avant de le porter dans l’avion pour l’expulser. Une fois dans l’avion, les policiers l’auraient attaché à son siège et ligoté de force, enroulant plusieurs fois une bande adhésive autour de sa poitrine et du dossier du siège. Ils auraient également obstrué sa bouche et une partie de sa narine droite avec plusieurs bandes adhésives enroulées autour de sa tête. Pour qu’il ne puisse pas ouvrir la bouche, ils auraient fixé sa tête à l’appuie‑tête à l’aide d’autres bandes adhésives, gênant ainsi sa respiration. Maintenu dans cette position, Marcus Omofuma est mort pendant le vol. Les policiers ont été inculpés d’actes de torture ayant entraîné la mort d’un détenu dont ils avaient la garde. Juridiquement, leur comportement a été qualifié de torture sur la personne d’un détenu, conformément au paragraphe 1 (premier cas de figure) et au paragraphe 3 (troisième cas de figure) de l’article 312 du Code pénal.

48.Au cours des enquêtes préliminaires, trois opinions d’experts ont été demandées. Alors que l’expert bulgare a estimé qu’il y avait un lien entre le décès et le traitement subi par Marcus Omofuma, l’expert autrichien a conclu que d’autres facteurs avaient aussi pu entraîner le décès. Finalement, le ministère public de Korneuburg a fondé son acte d’accusation sur l’«expertise principale» établie par un expert allemand qui, comme son homologue bulgare, a jugé que le décès résultait d’une asphyxie. Le 15 avril 2002, le tribunal régional de Korneuburg a jugé que les policiers étaient coupables et les a condamnés à huit mois d’emprisonnement pour homicide involontaire dans des circonstances particulièrement dangereuses, conformément à l’article 81‑1) du Code pénal. En vertu du paragraphe 1 de l’article 43 du Code pénal, les peines d’emprisonnement ont été assorties d’un sursis, avec trois ans de mise à l’épreuve. Les avocats de la défense et le ministère public de Korneuburg ont tous deux annoncé qu’ils interjetteraient appel. Ils n’en ont finalement rien fait et le jugement a aujourd’hui force de droit.

49.Ces procédures pénales ont été relativement longues, principalement parce qu’il fallait que la cause du décès de Markus Omofuma, qui était une des questions centrales de cette affaire, soit établie sans qu’aucun doute ne subsiste. Le ministère public a donc d’abord dû tenter de résoudre les contradictions entre les deux premières opinions d’experts, conformément aux articles 125 et 126 du Code de procédure pénale. C’est seulement lorsque cela s’est révélé impossible qu’il a pu demander une troisième opinion. Avant cette nouvelle expertise, le ministère public ne pouvait pas établir les faits ni faire sa réquisition.

50.La fille de Marcus Omofuma a interjeté appel auprès du Tribunal administratif indépendant de Vienne (Unabhängiger Verwaltungssenat), au motif que les policiers avaient directement exercé un pouvoir et une contrainte sur son père en qualité d’autorité administrative. Dans sa décision du 22 octobre 1999, le Tribunal administratif indépendant a jugé l’appel irrecevable, notamment du fait que la fille de Marcus Omofuma n’était pas habilitée à porter plainte. Saisie par la fille de Marcus Omofuma, la Cour constitutionnelle (Verfassungsgerichtshof) a annulé cette décision dans son arrêt du 6 mars 2001. Le Tribunal administratif indépendant a ensuite jugé dans sa décision du 24 janvier 2002 qu’il était illégal d’avoir baillonné Marcus Omofuma à l’aéroport de Vienne et pendant le vol, de même que de l’avoir ligoté et attaché à son siège à bord.

51.En vertu du paragraphe 1 de l’article premier de la loi sur la responsabilité administrative de la puissance publique, les autorités fédérales sont responsables, en tant que personne morale, des actes illégaux commis par leurs fonctionnaires. Toute plainte déposée par une victime est traitée au regard du droit civil général. Sauf dans les cas de règlement amiable, ces plaintes doivent être examinées selon une procédure civile normale, dans le cadre d’une action engagée auprès du tribunal régional compétent. Sont également visées les plaintes concernant un comportement illégal en vertu de la Convention contre la torture.

52.Comme il est indiqué plus haut, les plaintes des personnes qui ont subi un dommage résultant d’actions illégales commises par des fonctionnaires relèvent des dispositions du droit civil général. Cela signifie, en particulier, que toute victime d’un comportement non conforme à la Convention, et partant illégal, peut poursuivre l’État pour obtenir réparation de même que ses proches. La disposition la plus pertinente est l’article 1327 du Code civil, qui prévoit que les personnes à la charge d’une personne qui a été tuée ont droit à une indemnité pour perte de soutien de famille, qui doit être versée par l’auteur du dommage (en cas de responsabilité officielle, par la personne morale responsable). En outre, en vertu de la jurisprudence autrichienne, des «dommages pour affliction et souffrance» sont octroyés, en cas de négligence manifeste ou d’intention de la part de l’auteur du dommage, aux proches parents d’une personne qui a été tuée, même si leur santé n’a pas été affectée. Rien ne s’oppose à ce que ce précédent s’applique aussi aux cas dans lesquels un fonctionnaire a agi avec une négligence manifeste ou intentionnellement.

53.Trois ensembles de plaintes sont en cours contre l’Autriche dans l’affaire Omofuma:

a)Action relative à la succession de Marcus Omofuma avec une demande de dommages d’un montant de 100 000 euros pour affliction et souffrance. La procédure s’est déroulée sans heurts et a été menée à bien. Un jugement écrit sera rendu et signifié au premier trimestre 2003;

b)Action engagée par Franziska Mahou, fille mineure de Marcus Omofuma, qui demande 7 920 euros de dommages au titre de la perte de soutien de famille et 50 000 euros pour affliction et souffrance; action d’un montant de 10 999,54 euros engagée par la même personne pour couvrir les frais de justice de la procédure engagée auprès de la Cour administrative et du Tribunal administratif indépendant de Vienne. Ces deux actions sont traitées conjointement;

c)Action engagée par le père, la mère, le fils, la fille, la veuve, la sœur et le frère de Marcus Omofuma, qui demandent à être indemnisés à concurrence de 95 000 euros pour affliction et souffrance et attendent une déclaration confirmant la perte de soutien de famille. Cette action n’a été engagée contre les agents de la République autrichienne que le 23 octobre 2002.

54.La législation autrichienne garantit donc, en particulier en ce qui concerne les procédures pendantes mentionnées ci‑dessus, que les conditions d’une indemnisation équitable et adéquate telle qu’elle est prévue à l’article 14 de la Convention sont pleinement respectées.

55.En ce qui concerne les mesures générales prises par la République autrichienne à la suite du décès tragique de Marcus Omofuma pour que les principes relatifs aux droits de l’homme soient respectés lors des expulsions, voir les paragraphes 64 à 67 ci‑dessous.

Article 15

56.L’article 166 du projet de loi relatif à la réforme de la procédure pénale examiné plus haut dans le contexte de l’article 11 interdit expressément que soient utilisées les déclarations d’un défendeur ou d’un témoin à charge qui ont été obtenues au moyen de la torture, de la contrainte, de la tromperie ou d’autres méthodes d’interrogatoire inadmissibles.

57.L’article 166 du projet de loi est libellé comme suit:

«Utilisation des éléments de preuve

Art. 166. Les déclarations d’un défendeur et celles des témoins et des codéfendeurs ne doivent pas être utilisées comme éléments de preuve à charge sauf contre une personne accusée d’avoir enfreint la loi en rapport avec son interrogatoire, et sont nulles (s. 281 par. 1 à 3), si elles ont été obtenues de la façon suivante:

1. À la suite d’actes de torture (art. 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, Journal officiel no591/1978, art. 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, Journal officiel no210/1958, et par. 1 de l’article premier et art. 15 de la Convention contre la torture et autres et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, Journal officiel no49211987), ou par tout autre moyen illégal de contrainte, par la menace, la tromperie, d’autres mesures affectant le libre arbitre, ou par des méthodes d’interrogatoire illégales dans la mesure où elles enfreignent les principes fondamentaux de la procédure.».

III. COMPLÉMENT D’INFORMATION DEMANDÉ PAR LE COMITÉ

58.Conformément à la demande de M. Mavrommatis, la version anglaise de la loi de 1997 sur les étrangers et de la loi de 1997 sur l’asile est annexée au présent document. La loi sur les étrangers et la loi sur l’asile sont entrées en vigueur le 1er janvier 2003 après un remaniement complet. Le Gouvernement autrichien regrette que la version anglaise actualisée de ces documents ne soit pas encore prête et transmettra les traductions dès qu’elles seront disponibles.

59.L’annexe contient également des données statistiques sur l’asile et sur les mesures prises par la Fremdenpolizei (police des étrangers) (rapport annuel pour 2001 et dernières données de juin 2002).

60.En ce qui concerne les questions soulevées aux paragraphes 49 a) et 50 a) des conclusions et recommandations du Comité (A/55/44), il convient de se reporter aux observations ci‑dessus relatives aux articles premier et 4 de la Convention.

61.En ce qui concerne les questions soulevées aux paragraphes 49 b) et c) des conclusions et recommandations du Comité (A/55/44), il convient de se reporter aux observations ci‑dessus relatives aux articles 12 et 13 de la Convention.

62.En ce qui concerne les préoccupations que le Comité a exprimées quant à la possibilité de faire obstacle aux plaintes pour violences policières en accusant le plaignant de diffamation, (par. 49 c)), il convient de faire remarquer qu’en vertu de la loi autrichienne, la diffamation (c’est‑à‑dire le fait de porter sciemment de fausses accusations contre quelqu’un) est passible de poursuites judiciaires (Offizialdelikt) et, à ce titre, assujettie au principe de légalité (en vertu duquel la poursuite d’une infraction est obligatoire). Par conséquent, toute personne − y compris un policier – est habilitée à faire part aux autorités compétentes de tout soupçon relatif à la commission d’une telle infraction.

63.Le Ministère fédéral de la justice a déjà fait, il y a quelques années, plusieurs recommandations au ministère public, lui conseillant d’examiner très attentivement la question de savoir s’il fallait engager ou maintenir des poursuites pénales et d’adopter une approche restrictive à cet égard. Cette recommandation s’est traduite par une réduction considérable du nombre d’affaires de ce type, et très peu de personnes ayant porté plainte pour mauvais traitements infligés par des membres des services de sécurité ont depuis été condamnées pour diffamation.

64.En ce qui concerne le paragraphe 49 d) des conclusions et recommandations du Comité, le Ministère fédéral de l’intérieur a pris depuis l’été 1999 de nombreuses mesures qui ont entraîné une réorganisation des procédures d’expulsion, une attention particulière étant portée aux questions relatives aux droits de l’homme.

65.Ces nouvelles règles sont, en particulier, fondées sur les critères suivants:

Seuls des agents dûment formés sont chargés des expulsions par avion;

Les agents chargés de l’expulsion prennent contact avec les étrangers en attente d’expulsion en temps utile pour les préparer psychologiquement à leur expulsion;

Chaque expulsion ou tentative d’expulsion par avion fait l’objet d’un rapport. Lorsqu’un moyen de contrainte a été employé, le rapport doit en préciser le type, l’intensité, la durée et le motif. Le déroulement de l’acte doit être décrit en détail;

L’attention est appelée en particulier sur le principe selon lequel les cris et le bruit ne justifient pas le recours à des mesures de contrainte;

Il ne faut en aucun cas recourir à des dispositifs qui obstruent le système respiratoire (bouche ou nez) pour venir à bout d’une résistance physique et faire cesser une nuisance sonore ou un comportement perturbateur susceptibles d’empêcher l’expulsion d’une personne à bord d’un avion transportant d’autres passagers;

Lorsque des moyens de contrainte sont employés, il faut veiller en particulier, à respecter le principe de proportionnalité au sens de l’article 29 de la loi sur la police et à ce que ces moyens ne portent pas atteinte à la dignité humaine de l’intéressé (art. 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales);

L’utilisation de ruban adhésif, de sparadrap ou de produits analogues est strictement interdite;

L’étranger concerné doit être examiné par un médecin, si possible immédiatement avant le vol ou dans les 24 heures précédentes;

Avant cet examen, l’autorité doit signaler au médecin tout élément significatif, en particulier de nature psychologique, ainsi que d’éventuelles tendances à un comportement agressif, et lui communiquer les données disponibles (rapport sur la compatibilité de l’état de l’étranger avec la détention, dossiers médicaux, autres formes de traitement, résultats provenant d’autres sources);

Le médecin doit mentionner, au titre d’«informations complémentaires destinées à l’accompagnateur», tout renseignement pertinent pour l’exécution de la mesure d’expulsion.

66.En outre, les mesures ci‑après ont été prises:

Une fois par semaine, les agents doivent passer en revue avec le responsable judiciaire compétent les cas de détention en cours, examiner la légalité du maintien en détention ainsi que la légalité et l’opportunité des mesures imposées par la Fremdenpolizei; ils doivent également pouvoir prouver que ces entretiens ont eu lieu. Avant chaque expulsion ou renvoi, l’agent responsable doit s’assurer, lors d’un entretien avec l’étranger concerné qui doit être consigné par écrit, qu’aucune procédure d’asile n’est en cours;

Avant l’expulsion, le responsable judiciaire ou, dans le cas de ressortissants d’États voisins, le chef du service verse au dossier une note dans laquelle il avalise la décision d’expulsion après en avoir vérifié la légalité.

67.Grâce à des ONG comme, Volkshilfe, Caritas et SOS Menschenrechte, les détenus en attente d’expulsion sont traités sous l’angle humanitaire et social, ce qui diminue les risques de conflit et améliore les conditions de leur détention.

68.En ce qui concerne la recommandation du Comité qui figure au paragraphe 50 b), il convient de se reporter aux observations ci‑dessus relatives à l’article 10 de la Convention.

69.En ce qui concerne la recommandation figurant au paragraphe 50 c), conformément à l’article 8 de la loi sur l’asile (Asylgesetz), lu conjointement avec l’article 57 de la loi sur les étrangers (Fremdengesetz) telle que modifiée, les autorités chargées de l’asile examinent une expulsion à la lumière de l’interdiction de refoulement énoncée aux articles 2 et 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et le Protocole n° 6 y relatif. Si une demande d’asile est rejetée, une décision de droit sur la légalité du renvoi de l’étranger dans son pays d’origine est prise. Si ce renvoi est inacceptable, l’étranger se voit accorder le droit de rester en Autriche pour une période limitée, conformément à l’article 15 de la loi sur l’asile.

70.L’expulsion d’un étranger alors qu’une procédure d’asile est en cours est dans tous les cas inacceptable et interdite par la loi (par. 2 de l’article 21 de la loi sur l’asile).

71.Les agents des services chargés des demandeurs d’asile reçoivent une formation spéciale lors de divers stages de formation et de perfectionnement. Ces derniers sont dispensés, entre autres, en coopération avec les offices de protection des réfugiés suisse, allemand et autrichien (Schweizerisches Bundesamt für Flüchtlinge, Deutsches Bundesamt für Migration und Flüchtlinge (auparavant Bundesamt für die Anerkennung ausländischer Flüchtlinge)), le Bundesasylamt et le Ministère fédéral de l’intérieur et son service chargé de la loi sur l’asile (Asylrechtsabteilung). Le stage de perfectionnement de l’Office fédéral de protection des réfugiés, auquel est accordée la priorité, comprend également des séminaires sur le principe de non‑refoulement.

72.L’ordonnance sur la détention qui est entrée en vigueur en mai 1999 met l’accent sur l’obligation de traiter les détenus avec le respect dû à leur dignité humaine et avec la plus grande considération possible. Elle énonce des normes minimales pour la détention: traitement médical, usage des vêtements et autres effets personnels, bien‑être spirituel, hygiène, nourriture, emploi, exercices en plein air, etc. Le centre de détention de la police à Linz a créé une «station ouverte» où les personnes en attente d’expulsion peuvent rester hors de leur cellule et disposent d’une cuisine. Le Ministère fédéral de l’intérieur s’efforce de mettre en place d’autres «stations ouvertes» pour ces détenus, en tenant compte de la capacité des infrastructures et en s’inspirant de l’expérience menée au centre de détention de Linz.

73.À cet égard, il faut également citer le dispositif mis en place ces dernières années pour régir les relations des ONG avec les détenus en attente d’expulsion. Des contrats spéciaux sont conclus avec diverses ONG qui s’emploient à aider les autorités fédérales à s’occuper de ces personnes dans les centres de détention administrative, à améliorer les normes humanitaires et sociales applicables pendant leur détention et à réduire le risque de conflit en leur fournissant les informations nécessaires.

74.En outre, il faut mentionner la réunion intitulée «L’avenir de la détention préalable à l’expulsion», tenue les 7 et 8 juin 2001 par le Ministère fédéral de l’intérieur, à l’initiative du Coordonnateur pour les droits de l’homme. Cette réunion avait pour objet d’établir le catalogue des normes et conditions de détention.

75.Après avoir examiné les détentions, le Conseil consultatif des droits de l’homme a élaboré deux rapports complets sur les problèmes suivants: mineurs détenus en attente d’expulsion et information aux personnes détenues. Le Ministère fédéral de l’intérieur prend des mesures pour donner suite aux recommandations formulées dans ces rapports.

76.Enfin, il faut faire état du Conseil consultatif pour les questions relatives à l’asile et aux migrations, créé en 2001 en application de l’article 51 a) de la loi de 1997 sur les étrangers. Ce Conseil, qui est né de la fusion entre l’ancien Conseil consultatif pour l’intégration et le Conseil consultatif pour l’asile, est chargé de conseiller le Ministre fédéral de l’intérieur sur des questions concrètes relatives à l’asile et aux migrations et sur la délivrance de permis de séjour pour des raisons humanitaires.

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