Vingt-sixième session

14 janvier-1er février 2002

Document de travail sur le Sommet mondialpour le développement durable

Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes se félicite de la décision de convoquer le Sommet mondial pour le développement durable afin de lancer de nouveaux programmes d’action concrète pour mettre en oeuvre un programme mondial clair de développement durable. Il note que ce programme est fondé sur le programme Action 21, dont le chapitre 24 met l’accent sur la contribution des femmes au développement; la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement et les initiatives apparentées; et les conventions relatives à la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement.

Dans le cadre de ses travaux, le Comité a mis l’accent sur la nécessité de veiller de toute urgence à ce que la mondialisation et les politiques de transition à l’économie de marché contribuent à améliorer la qualité de la vie des femmes qui représentent plus de 50 % de la population dans presque tous les pays. Il demande instamment que la notion de développement durable soit perçue dans une optique tenant compte de la différence entre les sexes, un développement qui privilégie le facteur humain, fondé sur l’égalité et l’équité, la participation des pouvoirs publics et de la société civile, la transparence et l’obligation de rendre des comptes en matière de gouvernance. Le Comité tient à souligner que le développement durable dans ce sens ne peut être réalisé que si les droits de l’homme sont pleinement mis en oeuvre, y compris les droits fondamentaux des femmes et les droits liés aux rapports entre les générations dans toutes les collectivités.

La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes est l’un des premiers instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme à associer droits civils et politiques et droits socioéconomiques. La Convention, la Déclaration et le Programme d’action de Beijing ainsi que la Déclaration politique et le Document final de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale doivent donc être reconnus comme des instruments importants sur les plans du droit, des politiques et des programmes qui indiquent clairement aussi les priorités devant être intégrées au développement humain durable.

Le Comité demande donc au Sommet d’intégrer le principe de l’égalité des sexes au nouveau plan d’action pour le développement durable, dans la mesure où les initiatives de développement ne tenant pas compte des différences entre les sexes sont vouées à l’échec et ne sont pas viables dans une économie mondiale de plus en plus interdépendante. Pour que le développement durable atteigne les objectifs économiques, sociaux et environnementaux, les besoins et préoccupations des femmes doivent bénéficier d’un rang de priorité égal à celui accordé à ceux des hommes. Par ailleurs, la contribution des femmes doit être reconnue, intensifiée et mise en relief dans le cadre des efforts visant à assurer le développement durable.

Il ressort des rapports présentés au Comité par les États parties que les femmes du monde entier continuent de souffrir de discrimination en raison de leur sexe. Celles-ci sont exclues, à des degrés divers, de la participation intégrale à la vie politique, sociale et économique de leur société, sur un pied d’égalité avec les hommes. Elles sont souvent défavorisées lorsqu’il s’agit de bénéficier du développement social et économique, dans les domaines de l’éducation et de l’emploi, et elles souffrent de façon disproportionnée de la pauvreté, de la malnutrition et du caractère inapproprié des soins de santé. Tous ces phénomènes sont particulièrement graves dans les zones rurales où vivent et travaillent les trois quarts environ des pauvres du monde entier.

Convaincu que le développement durable ne peut devenir réalité si l’engagement n’est pas pris d’assurer la réalisation pleine et entière des droits fondamentaux des femmes et s’il n’est pas fait en sorte que les femmes soient des partenaires égales des hommes pour la mise en oeuvre du programme de développement durable, le Comité recommande :

a)D’examiner et de résoudre, dans le cadre des programmes de lutte contre la pauvreté, le problème de la féminisation de la pauvreté et de se pencher sur la nécessité de créer des moyens d’existence durables pour les femmes des zones rurales et urbaines;

b)De considérer l’accès des femmes à des soins de santé appropriés, y compris aux soins de santé en matière de procréation, et la fourniture aux femmes et aux hommes des connaissances et des moyens pour éviter la propagation du VIH/sida comme un aspect essentiel du développement durable;

c)De considérer les femmes comme des parties prenantes qui ont une contribution importante à apporter au développement durable. La responsabilisation des femmes à tous les niveaux, à des postes de direction et de décision dans les administrations publiques et en tant que membres responsables de la société civile, doit être considérée comme un élément fondamental du développement durable;

d)D’accorder une plus grande attention à l’éducation des femmes et des filles, notamment en ce qui concerne l’accès à la formation scientifique et aux technologies modernes de l’information et de la communication, étant donné que l’investissement dans l’éducation et le renforcement des capacités des femmes et des filles sert de catalyseur pour l’amélioration des indicateurs sociaux et le développement humain dans tous les pays;

e)D’adopter et de mettre en application des dispositifs de contrôle, des lois et des politiques afin de prévenir l’incidence négative et nocive du tourisme qui, tout en étant un important secteur de croissance, débouche souvent sur l’exploitation sexuelle et le trafic des femmes et des enfants, et la violence à leur égard;

f)D’allouer des ressources pour empêcher et éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes, celle-ci constituant un grave obstacle au développement durable, à la paix et à la stabilité dans toutes les sociétés;

g)Tout en reconnaissant que l’industrie contribue à la croissance économique et à la création d’emplois, de formuler et de mettre en oeuvre des programmes d’action et des codes de conduite à l’intention des sociétés multinationales, en particulier celles qui opèrent dans les zones de promotion des investissements et des exportations. Le Comité considère également qu’il est nécessaire d’élaborer et de promouvoir de toute urgence une notion de responsabilité des entreprises vis-à-vis des travailleuses pour que ces dernières puissent bénéficier de conditions d’emploi équitables avec des garanties appropriées en matière d’hygiène du travail;

h)D’élaborer des systèmes de gestion durable des forêts de manière à tenir compte des préoccupations des femmes rurales, en reconnaissant notamment le droit des femmes à la propriété foncière;

i)De mettre au point des plans d’action pour faciliter l’accès au crédit pour les femmes à tous les niveaux et élargir les possibilités de microfinancement pour les activités entreprenariales des femmes à faible revenu;

j)D’accorder une attention particulière à la lutte contre la pauvreté des femmes âgées qui constituent la majorité de la population âgée de plus de 60 ans dans de nombreux pays;

k)De faire en sorte que les processus intergouvernementaux du système des Nations Unies encouragent des approches globales au développement par la formulation de politiques, la mise en place de structures de décision et l’adoption de modes de financement tenant compte des différences entre les sexes, en partenariat avec les gouvernements des États, les organisations régionales compétentes et la société civile. Le Comité estime que cette forme participative de programmation et de décision est essentielle pour le développement durable.