Nations Unies

CERD/C/ECU/CO/23-24/Add.1

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

2 janvier 2019

Français

Original : espagnol

Anglais, espagnol et français seulement

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant le rapport valant vingt‑troisième et vingt‑quatrième rapports périodiques de l’Équateur *

Additif

Renseignements reçus de l’Équateur au sujet de la suite donnée aux observations finales

[Date de réception : 14 décembre 2018]

I.Introduction

1.Le 15 septembre 2017, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a adopté ses observations finales concernant les vingt‑troisième et vingt‑quatrième rapports périodiques de l’Équateur. Au paragraphe 40 de ce document, le Comité a demandé à l’État équatorien de lui fournir des renseignements sur la suite donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 13 (J ustice auto chtone et justice ordinaire) et 20 (D éfenseurs des droits de l’homme) et à l’alinéa c) du paragraphe 32 (M obilité des personnes). À cette fin, l’Équateur communique dans le présent rapport les informations demandées par le Comité.

II.Renseignements concernant l’application des recommandations

Recommandation no 13. Le Comité renouvelle la recommandation qu’il avait déjà faite (CERD/C/ECU/CO/20-22, par. 19), tendant à accélérer le processus d’adoption de l’avant-projet de loi sur la coordination et la coopération entre la justice ordinaire et la justice autochtone, dont l’Assemblée nationale est saisie.

2.En ce qui concerne la loi sur la coordination et la coopération entre la justice ordinaire et la justice autochtone, la Commission permanente spécialisée de la justice et de la structure de l’État, de l’Assemblée nationale, a fait savoir que lors de sa séance du 9 août 2012, elle avait demandé au Conseil d’administration législative de l’Assemblée nationale de se saisir de cette loi pour consultation avant adoption.

3.Le 5 octobre 2012, le Secrétaire général de l’Assemblée nationale a communiqué à la Commission permanente spécialisée de la justice et de la structure de l’État la décision du Conseil d’administration législative du 3 octobre 2012, par laquelle il a demandé à l’Assemblée nationale d’analyser cette demande de consultation préalable en séance plénière et de rendre ses conclusions à son sujet.

4.Selon les informations fournies par le Secrétariat général de l’Assemblée nationale dans sa communication no SAN-2018-1117 du 10 juillet 2018, à ce jour, l’Assemblée nationale ne s’est pas encore prononcée en séance plénière sur cette question.

Recommandation no 20. Bien que la Constitution reconnaisse à tous les citoyens, dans des conditions d’égalité, le droit de s’associer, de se réunir et de manifester librement et volontairement, le Comité constate que les défenseurs des droits de l’homme et des organisations autochtones continuent d’être visés par des attaques et des menaces. Dans de nombreux cas, les attaques et arrestations se sont produites dans le contexte de conflits liés à l’exploitation des ressources naturelles. Le Comité note avec inquiétude que, souvent, les protestations entraînent l’ouverture de poursuites pénales contre les militants pour des infractions telles que terrorisme, sabotage, violence et résistance ou paralysation des services publics, qui aboutissent à de lourdes condamnations et peines, disproportionnées par rapport à la gravité des faits (art. 5 b)).

5.Dans le cadre de la politique de dialogue engagée par le Gouvernement, des remises de peine ont été accordées à sept reprises en 2017 et 2018 à des dirigeants et militants autochtones qui avaient fait l’objet de poursuites avant la nomination du Gouvernement actuel. Ainsi, en vertu du décret no 32 du 14 juin 2017, la grâce présidentielle a été accordée à M. Meza Saltos Patricio Marcelo et, en vertu du décret no 51 du 23 juin 2017, elle a aussi été accordée à M. Guamán Cuvi Elvis Javier, M. Pilatasig Quishpe Segundo Santiago, M. Tubón Guano José Rodrigo et M. De La Cruz Sánchez José Manuel, qui avaient été condamnés par le tribunal des garanties pénales du canton de Pastaza pour faits de violence et de résistance, infraction qualifiée pénalement et réprimée par l’article 283 du Code pénal. Ces grâces présidentielles ont été recommandées par le Ministère de la justice, des droits de l’homme et du culte dans les communications no MJDHC‑MJDHC‑2017‑0282‑OF du 13 juin 2017 et no MJDHC‑MJDHC‑2017‑0307‑OF du 21 juin 2017, dans lesquelles sont exposés en détails les motifs de cette demande.

6.En outre, par le décret no 56 du 4 juillet 2018, le Président de la République a accordé la grâce présidentielle à M. Tomás Felipe Jimpikit Tserempm, qui avait été condamné pour «  paralysation d’un service public », infraction qualifiée pénalement et sanctionnée par l’article 346 du Code pénal, et, par le décret no 530 du 3 octobre 2018, il a accordé la grâce présidentielle à M. Pepe Luis Acacho González, qui avait été condamné pour atteinte à la libre circulation, infraction qualifiée pénalement et sanctionnée par l’article 129 de l’ancien Code pénal en vigueur au moment des faits.

7.En outre, par le décret exécutif no 193 (Journal officiel no 109 du 27 octobre 2017), abrogeant le décret exécutif no 16 du 4 juin 2013, le Président de la République a adopté le Règlement relatif à l’octroi de la personnalité juridique aux organisations sociales, qui vise non seulement à garantir le droit de s’associer, de se réunir et de manifester librement et volontairement, mais aussi à réguler, simplifier et rationaliser les obligations en matière d’octroi, par les autorités compétentes, de la personnalité juridique aux organisations sociales de citoyens qui en font la demande expresse. Le règlement redéfinit comme suit les conditions justifiant la dissolution d’une organisation sociale : « 1) si elle s’éloigne des buts et des objectifs pour lesquelles elle a été créée ; 2) si le nombre de membres est inférieur au seuil fixé dans le présent Règlement ; 3) si le délai fixé dans ses statuts est écoulé ; 4) si elle se livre à des activités politiques partisanes, réservées aux partis et mouvements politiques inscrits au Conseil électoral national ; 5) si elle se livre à des activités illicites ou ne respecte pas les obligations qui lui incombent en vertu de la Constitution, de la loi ou du présent Règlement ; et 6) pour tout autre motif prévu dans ses statuts ».

8.Conformément à la neuvième disposition transitoire de la loi organique relative aux conseils nationaux pour l’égalité, dans laquelle il était demandé au Bureau du Défenseur du peuple de présenter une proposition de loi prévoyant et structurant le système de promotion et de protection des droits, le Bureau du Défenseur du peuple a présenté en 2015, à l’Assemblée nationale, un projet de loi relative au système de promotion et de protection des droits.

9.Sur la base de ce qui précède, le Conseil d’administration législative a décidé, dans sa décision no CAL-2017-2019-343, du 23 mai 2018, d’unifier ce projet de loi avec le projet de loi homonyme présenté par l’ancienne députée Marisol Peñafiel, pour que les deux instruments soient examinés par la Commission permanente spécialisée des droits collectifs de l’Assemblée nationale.

10.Ce projet de loi fusionné a pour objet d’établir la structure, l’organisation et le fonctionnement du système de promotion et de protection des droits individuels et des intérêts des personnes et des groupes de personnes, ainsi que des droits collectifs des communes, des communautés, des peuples et des nationalités ; de définir le mandat et les responsabilités des organes y relatifs ; et de définir des mécanismes de coordination entre les différents niveaux de l’administration sur la base des principes du développement et du « bien vivre », afin de favoriser la promotion et la protection des droits énoncés dans la Constitution et dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. Le projet de loi est en cours d’examen devant la Commission permanente spécialisée des droits collectifs, conformément à la communication no AN-CDCCI-S-255 du 9 juillet 2018 du rapporteur de la Commission.

11.En outre, dans sa décision no 057-DPE-CGAJ-2018, le Bureau du Défenseur du peuple a adopté le Règlement relatif à la création et au fonctionnement des conseils de défenseurs des droits de l’homme et de la nature au sein du Bureau du Défenseur du peuple, publié au Journal officiel no 293 du 27 juillet 2018.

12.Ces conseils de défenseurs, créés au niveau tant provincial que national, ont pour mandat notamment d’élaborer des propositions visant à améliorer les mécanismes de promotion et de protection des droits de l’homme et de la nature du Bureau du Défenseur du peuple, de signaler les violations des droits de l’homme et de la nature et de contribuer à la détection des violations des droits de l’homme, des droits collectifs et des droits de la nature et des formes de violation systématique et de suivre la situation des défenseurs des droits.

13.Une fois ces conseils créés (24 au niveau provincial et un au niveau national), le Bureau du Défenseur du peuple a entrepris d’élaborer des principes directeurs en faveur de la protection des défenseurs des droits de l’homme et de la nature. L’objectif est de mettre en place une procédure de consignation de données sur les causes structurelles des violations des droits ainsi que sur la situation des défenseurs des droits de l’homme et de la nature.

14.Par ailleurs, dans sa décision no 073-DD-DPE-2018, le Bureau du Défenseur du peuple a exhorté publiquement le Gouvernement équatorien à appliquer les résolutions 68/237 et 69/16 de l’Assemblée générale des Nations Unies portant sur la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine. Dans sa déclaration, le Bureau du Défenseur du peuple a demandé instamment la création d’un secrétariat technique aux fins de la coordination de l’exécution d’une série de politiques, plans et programmes relatifs à la Décennie par diverses institutions de l’État.

15.En ce qui concerne la sécurité des défenseurs des droits de l’homme, le Président de la République a demandé que des stratégies soient mises en place en vue de l’exécution du mandat de l’organisation Mujeres Amazónicas Defensoras de la Selva de las Bases frente al extractivismo, sous la direction du Ministère de l’environnement et en coordination avec les institutions compétentes en la matière, comme la police nationale, qui intervient dans le cadre des stratégies de protection et de sécurité.

16.Selon le rapport de la police nationale publié dans la communication no 2018-060-P3-SZZCH-19, des actions ont été menées en application de ces stratégies, comme la détection et la dénonciation des actes de violence familiale au sein des peuples Tundayme et Shaimi en Amazonie équatorienne ; la coordination permanente en vue de la gestion efficace du portefeuille de services de la police de proximité, afin de garantir notamment la sécurité et la protection des dirigeantes, de leur famille et de la population locale en général, la promotion de l’activation des mécanismes d’alerte en cas de violence fondée sur le genre et la coordination institutionnelle en vue de la mise en place de mesures administratives de protection immédiate et d’intervention urgente de la police, compte dûment tenu des questions de genre.

17.Concernant l’accès à la justice, le Conseil de la magistrature, par l’intermédiaire de la Direction nationale de l’accès aux services de justice, mène des actions visant à préserver les droits des personnes, peuples et nationalités autochtones afin de promouvoir l’accès aux services de justice et de lever les obstacles structurels sur le plan juridique, économique, social, générationnel et culturel ainsi que les obstacles liés au genre.

18.À cet effet, dix réunions de travail sur la justice autochtone ont été organisées avec des dirigeants autochtones en 2017. Ces réunions ont notamment porté sur le manque d’intérêt de la communauté pour l’application de la méthodologie des juges de paix, la nécessité de promouvoir la participation des autochtones en organisant des séances de dialogue et en mettant en place des tables rondes afin d’aborder des cas particuliers, la mise en place de mécanismes de répartition des compétences entre la justice autochtone et la justice ordinaire, la relation entre la justice autochtone, les services de l’état civil et le registre foncier, la participation de la justice autochtone au système d’expertise, et l’élaboration, en collaboration avec l’École de la magistrature, de programmes de formation sur le pluralisme juridique et la justice autochtone.

19.Le Conseil de la magistrature a mis au point des outils à l’intention des professionnels de la justice, notamment un guide relatif à l’intégration du principe de l’interculturalisme dans la justice ordinaire, adopté dans sa décision no CJ-DG-2016-055, regroupant des informations spécialisées en vue de faciliter et de renforcer les travaux des professionnels de la justice compte tenu de la situation particulière des personnes, peuples et nationalités autochtones face à l’administration de la justice ordinaire. En ce qui concerne l’habilitation des experts participant à des procédures judiciaires, le Conseil de la magistrature a habilité onze interprètes en langues ancestrales équatoriennes (quechua, huaorani, tsafiqui, shuar) et un anthropologue, et nommé six procureurs autochtones dans les provinces suivantes : Bolívar, Guayas, Morona Santiago, Pastaza, Pichincha et Zamora Chinchipe.

20.Par ailleurs, afin de mettre davantage l’accent sur l’interculturalisme, le Ministère de l’intérieur, en tant qu’organe directeur des services de sécurité publique, s’est efforcé en 2017 et 2018 d’intégrer un plus grand nombre de personnes autochtones dans les rangs de la police nationale. Pendant cette période, 107 hommes et 119 femmes issus de peuples et de nationalités autochtones d’Amazonie ont ainsi présenté leur candidature à des postes de policiers et d’officiers.

21.Afin de favoriser l’interculturalisme au sein de l’institution, le Ministère de l’intérieur a organisé, dans le cadre de la procédure de recrutement des nouveaux policiers, qui s’est déroulée du 9 au 13 avril 2018, une séance d’information sur l’interculturalisme et la présence et l’importance des peuples et des nationalités en Équateur. Cette séance a été organisée à l’intention de 2 619 candidats dans les locaux du Groupe d’intervention et de secours de la police de Pusuquí, dans la province de Pichincha.

22.La Direction des droits de l’homme et de l’égalité femmes-hommes du Ministère de l’intérieur a collaboré avec des techniciens chargés du système informatique intégré de la police nationale de l’Équateur afin de mettre en place une enquête et une base de données sur l’appartenance ethnique basée sur l’auto-identification pour que 47 652 policiers puissent déclarer leur appartenance à une nationalité ou à un peuple autochtone, afro‑équatorien ou montubio, l’objectif étant de prendre des mesures d’action positive au sein de l’institution. En février 2018, 45 935 policiers s’étaient enregistrés dans le système : 2 156 s’étaient identifiés comme afro-équatoriens, 815 comme autochtones et 647 comme montubios.

23.En application des articles 57 et 171 de la Constitution, qui reconnaissent et garantissent aux communes, communautés, peuples et nationalités autochtones le droit d’exercer des fonctions juridictionnelles sur leur propre territoire en se fondant sur leurs traditions ancestrales et leurs propres règles de droit, le Ministère de l’intérieur et la police nationale ont élaboré une directive définissant les actions et les mécanismes de collaboration, de coordination et de coopération policière avec les communes, les communautés et les nationalités autochtones applicables aux actions et aux interventions policières sur le terrain, dans le respect des droits et des garanties énoncés dans la Constitution et dans les instruments internationaux. Cette directive devrait être adoptée et publiée pendant l’année en cours et devrait permettre à 86 policiers et formateurs dans le domaine des droits de l’homme, qui ont reçu une formation les 3 et 4 décembre 2018, de transmettre leurs connaissances à tout le personnel de police au niveau national dans le cadre du programme complet de formation continue de 2019.

24.En 2017, en coordination avec la Direction nationale de la formation de la police nationale, le Ministère de l’intérieur a intégré au programme de formation continue des cours consacrés notamment aux droits collectifs, au règlement relatif à l’usage progressif de la force, aux protocoles à suivre et aux actions à mener auprès des groupes prioritaires, aux procédures stratégiques de la police de proximité et aux normes internationales relatives aux droits de l’homme (études de cas d’arrêts de la Cour interaméricaine des droits de l’homme), afin d’aborder la question de l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. En 2017, 44 174 policiers ont bénéficié de ces formations.

25.En outre, un séminaire sur les droits collectifs des peuples et des nationalités autochtones, montubios et afro-équatoriens a été organisé du 8 au 11 mai 2018, à l’intention de 38 policiers, pour une durée totale de 40 heures de formation.

Recommandation n o 32. Le Comité prend note de la législation équatorienne progressiste sur la mobilité des personnes, salue l’adoption récente de la réglementation et la fermeture du centre de détention Hotel Carrión, et félicite l’État partie pour les nombreuses campagnes de sensibilisation sur le travail domestique décent et le harcèlement à l’école. Toutefois, le C omité est préoccupé par  : a)  la discrimination, la stigmatisation, les préjugés et les stéréotypes au xquels se heurtent les migrants  ; b)  les obstacles administratifs qui entravent l’accès de nombreux migrants, notamment des demandeurs d’asile et des réfugiés, aux soins de santé, à l’éducation, à l’emploi, au programme de soutien familial ou à l a prime de développement humain  ; c)  les retards intervenus dans l’enregistrement des réfugiés et la délivrance des documents d’identité qui sont ensuite nécessaires pour avoir accès aux services publ ics et aux prestations sociales  ; d)  la discrimination et le harcèlement dont sont victimes des garçons et des filles à l’école du fait de leur nationalité ou de leur statut de réfugié, qui conduisent souvent à l’aband on scolaire  ; e)  les conditions de travail précaires et discriminatoires de nombreuses femmes réfugiées  ; et f) l’absence de règlement d’application concernant la procédure de détermination de l’apatridie régie par la loi organique relative à la mobilité des personnes (art. 2 et  5). Le Comité note également l’absence d’informations de l’État partie sur la discrimination et le racisme dont les migra nts sont souvent victimes (art.  1 er , 2 et  5).

26.L’Équateur a été reconnu par le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) comme étant le pays de la région qui accueillait le plus grand nombre de réfugiés, avec 64 634 réfugiés au total, pour la plupart colombiens, selon les données communiquées par la Direction de la protection internationale du Secrétariat d’État à la mobilité humaine en octobre 2018.

27.La situation des réfugiés en Équateur répond aux exigences internationales les plus élevées : ainsi, il n’existe pas de camps de réfugiés et le pays suit une approche axée sur la personne et sur la défense des droits, respecte le principe de non-discrimination en raison du statut migratoire, le droit à la libre circulation et la non-criminalisation de la migration, et reconnaît la contribution des migrants au développement du pays, ce qui a permis à l’Équateur de se hisser au rang de pays de référence compte tenu de ses bonnes pratiques dans le domaine. Compte tenu de ce qui précède et à titre d’exemple, il convient de préciser que l’article 9 de la Constitution dispose que les étrangers se trouvant sur le territoire ont les mêmes droits et devoirs que les Équatoriens, et que l’article 40 reconnaît le droit à la migration et dispose que nul ne peut être identifié ou considéré comme en infraction avec la loi en raison de son statut migratoire.

28.En ce qui concerne les obstacles administratifs entravant l’accès à l’emploi, le Ministère du travail a reconstitué en avril 2017 le Comité de la mobilité humaine, composé d’organisations non gouvernementales fournissant des services de prise en charge des migrants, des réfugiés et des victimes de la traite, qui a défini des axes prioritaires pour garantir le droit à l’emploi, notamment la mise en place de formations, d’inspections et de partenariats stratégiques avec le Ministère des relations extérieures et de la mobilité humaine.

29.En ce qui concerne l’accès des élèves étrangers au système éducatif, l’inscription des élèves dans le système informatique se fait au moyen de leur numéro de carte d’identité (base de données du service de l’état civil, de l’identification et des cartes d’identité), de passeport ou de carte de réfugié. S’ils ne possèdent aucune de ces pièces d’identité, les candidats étrangers peuvent s’inscrire avec leurs noms et prénoms. Il n’existe donc pas d’obstacle administratif à l’accès à l’éducation et aucun frais supplémentaire n’est appliqué en raison du statut migratoire des élèves.

30.Pour les cas où les élèves ne possèdent d’autre pièce d’identité que celle de leurs parents, qui sont leurs représentants légaux, la Direction nationale de réglementation de l’éducation est en train de modifier la procédure d’inscription en ligne afin de permettre aux personnes ayant régularisé leur situation migratoire dans le pays et possédant une carte d’identité de s’inscrire. Ces modifications entreront en vigueur à compter de l’année scolaire 2019-2020 dans l’académie de Costa.

31.Conformément aux dispositions de l’article 105 de la loi organique relative à la mobilité humaine, la Direction générale de l’état civil, de l’identification et des cartes d’identité a délivré 1 909 cartes d’identité équatoriennes entre le 13 novembre 2017 et le 31 mai 2018 à des réfugiés et à des personnes ayant besoin d’une protection internationale.

32.Par ailleurs, afin de garantir l’accès au système éducatif aux élèves étrangers ne pouvant prouver leur niveau d’études ni les diplômes obtenus dans leur pays d’origine, des tests de niveau ont été mis en place, conformément à l’article 167 du règlement d’application de la loi organique relative à la mobilité humaine.

33.Pour l’année scolaire 2018-2019 dans l’académie de Costa, ces tests ont consisté en une évaluation officielle de base portant sur des matières générales étudiées dans divers pays, compte tenu des particularités liées à la situation des migrants. Les tests ont été effectués via un module informatique en ligne, ce qui a permis d’y consacrer un minimum de temps et de ressources. Le même schéma sera appliqué aux inscriptions dans l’académie de Sierra.

34.En sus de ces tests de niveau, réalisés dans le cadre du projet « Ser Estudiante en la Mitad del Mundo » (être élève en Équateur), le module de gestion de l’aide aux citoyens permettra aux 140 districts scolaires d’assurer une prise en charge efficace et de qualité des élèves.

35.En ce qui concerne la prime de développement humain, les bénéficiaires doivent être en possession d’une carte d’identité équatorienne et être inscrits au registre social. Cependant, dans le cadre des efforts menés en vue d’aider d’autres groupes vulnérables, le Ministère de l’inclusion économique et sociale a mené, conjointement avec le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HRC), un plan pilote d’accompagnement familial selon l’approche de progression du HCR, visant à contribuer à l’amélioration de la qualité de vie et de la mobilité sociale et économique des familles équatoriennes, des réfugiés et des demandeurs d’asile en situation d’extrême vulnérabilité, et à réduire les obstacles entravant l’accès aux programmes de protection sociale du Ministère.

36.Le projet est mené dans la zone frontalière des districts de Tulcán et San Lorenzo, où les habitants ont reçu une carte d’accès prioritaire aux soins de santé préventive. En outre, le programme prévoit que des primes financées par le HCR seront versées par le Ministère de l’inclusion économique et sociale aux familles de réfugiés. Ce plan pilote devrait permettre aux familles de sortir de leur situation de vulnérabilité dans un délai de 18 mois.

37.En ce qui concerne l’enregistrement des réfugiés, conformément aux dispositions de la loi organique relative à la mobilité humaine, une nouvelle procédure d’examen de la recevabilité des demandes d’asile a été mise en place, à l’échelle nationale, dans les unités de protection internationale du Ministère des relations extérieures et de la mobilité humaine. Celle-ci est exposée en détails dans le règlement d’application de la loi organique relative à la mobilité humaine et dans la directive relative à la procédure de détermination du statut de réfugié et d’apatride en Équateur.

38.Plus précisément, conformément aux articles 16 et 17 de la directive susmentionnée, la Direction de la protection internationale doit statuer sur la recevabilité ou non d’une demande d’asile par une décision dûment motivée dans un délai de 10 jours. Conformément à l’article 83 du règlement d’application, lorsqu’une demande est jugée recevable, un certificat provisoire est remis au demandeur, ce qui lui permet d’obtenir immédiatement un visa humanitaire et, partant, de régulariser sa situation migratoire en attendant qu’une décision soit prise. Cela permet en outre aux demandeurs d’asile d’accéder aux droits et aux obligations découlant de la Constitution équatorienne et de la loi organique relative à la mobilité humaine.

39.La procédure de détermination de l’apatridie est définie aux articles 66 à 84 du chapitre XII du règlement d’application de la loi organique relative à la mobilité humaine, établissant les modalités de réception, d’examen de la recevabilité et d’enregistrement des demandes, ainsi que les documents requis, l’analyse technique à mener, l’unité responsable des démarches et les cas particuliers pouvant se présenter au cours de la procédure.

40.Pour ce qui est de la sécurité sociale, l’article 2 de la loi relative à la sécurité sociale dispose que toute personne percevant des revenus pour l’exécution de travaux ou pour la prestation de services manuels ou intellectuels, dans une relation de travail ou non, est soumise au régime général d’assurance obligatoire. Cela signifie qu’un étranger ayant un emploi rémunéré est obligatoirement affilié à la sécurité sociale par son employeur.

41.En ce qui concerne l’affiliation au régime d’assurance volontaire, toute personne majeure se trouvant en Équateur peut y adhérer, conformément à la loi susmentionnée et au règlement relatif à l’assurance, aux cotisations et à la gestion du portefeuille de l’Institut équatorien de sécurité sociale.

42.Le Ministère de la santé publique, par l’intermédiaire de la Direction des droits de l’homme, de l’égalité femmes-hommes et de l’inclusion, a constaté que des migrants rencontraient des difficultés d’accès aux services de santé et, afin d’y remédier, a entrepris d’effectuer un suivi des équipes sanitaires pour s’assurer qu’elles s’acquittaient de leur obligation de prendre en charge tout individu, sans aucune discrimination. Il convient de noter que l’accès aux services de santé proposés par le réseau des centres de santé et d’hôpitaux du Ministère de la santé publique est gratuit, ce qui garantit un accès universel aux services de santé, conformément aux dispositions de l’article 361 de la Constitution. En outre, aux fins de la création du dossier médical d’une personne qui ne possède pas de carte d’identité, l’arrêté ministériel no 00004939 prévoit, en son article 1er, alinéa 1.2, l’utilisation d’un identifiant à 17 chiffres.

43.Sur le terrain, des professionnels de la santé prennent en charge les cas et les besoins spécifiques liés à la mobilité humaine, assurant le suivi nécessaire et garantissant la bonne exécution des services de santé.

44.Face à l’importance des migrations de Vénézuéliens dans les zones frontalières, des mesures de prévention et de protection de la santé ont été prises, par l’intermédiaire des centres de coordination régionale en matière de santé, notamment la mise en place d’un plan d’intensification des mesures de lutte contre l’épidémie de rougeole, de diphtérie et de fièvre jaune déclarée au niveau régional, prévoyant une série de mesures de détection et de diagnostic précoces des cas soupçonnés de rougeole, la prise en charge efficace des personnes atteintes, et l’application immédiate de mesures de contrôle pour éviter les contagions et les décès, sans discrimination aucune contre les étrangers.

45.Afin de lutter contre la discrimination et les violences à l’école et de créer des espaces inclusifs et respectueux de la diversité dans le système éducatif national, le HCR et le Bureau du Défenseur du peuple ont élaboré une méthodologie visant à renforcer les capacités du personnel du Ministère de l’éducation, sur le thème « L’inclusion dans les espaces éducatifs − proposition méthodologique à l’intention des professionnels de l’éducation ». Elle est actuellement appliquée dans 85 établissements d’enseignement situés dans les zones 1, 8 et 9. Au mois de juin, une formation sera dispensée à 40 professionnels chargés de l’appui aux services d’orientation des élèves dans les districts de chaque région pour qu’ils puissent appliquer cette même méthodologie dans les établissements d’enseignement à chaque fois que des situations de discrimination se présenteront. En 2019, cette formation devrait être dispensée à tous les professionnels d’appui aux services d’orientation des élèves des districts, dans le cadre de la coopération internationale (avec l’appui du HCR).

46.En juin 2018, le Ministère des relations extérieures et de la mobilité humaine a présenté le Plan national de mobilité humaine, qui vise à aborder la politique publique de mobilité humaine selon un point de vue global, en dépassant la simple vision sectorielle et en considérant qu’il s’agit d’une responsabilité partagée entre divers acteurs et secteurs, aussi bien de la société civile et de la communauté internationale que de l’État. L’objectif est d’intégrer les principes applicables aux migrations consacrés par la Constitution, la loi organique relative à la mobilité humaine et son règlement d’application dans l’ensemble des politiques publiques ainsi que dans la politique relative à l’égalité femmes-hommes du Ministère des relations extérieures et de la mobilité humaine, qui prévoit de travailler en étroite collaboration avec les migrantes et les réfugiées tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays.

47.Quatre axes stratégiques sont définis dans ce plan, à savoir : 1) la promotion de la citoyenneté universelle et de la libre circulation des personnes au niveau international ; 2) le renforcement de la protection des droits des migrants ; 3) la création de conditions favorables à des migrations ordonnées, sûres et régulières ; et 4) la promotion de la diversité, de l’intégration et de la coexistence des migrants. Des stratégies et des mesures ont été définies en vue de mettre en œuvre les axes 2 et 4, notamment : la mise au point et le renforcement de pédagogies en faveur de l’intégration des enfants migrants dans le système éducatif équatorien et l’inclusion, dans les programmes scolaires, de la question de la mobilité humaine et de la prévention des migrations dangereuses ; la simplification des démarches administratives en vue de l’intégration des migrants dans le système éducatif à tous les niveaux ; la simplification des démarches permettant aux migrants d’accéder au système de santé ; et le renforcement de la campagne de lutte contre la discrimination et la xénophobie à tous les niveaux de l’administration, au moyen notamment de la formation des fonctionnaires.

48.Le plan prévoit que les quatre axes stratégiques doivent être mis en œuvre et promus conformément au modèle d’administration du Secrétariat d’État à la mobilité humaine, à tous les niveaux de l’administration et aux niveaux tant horizontal que vertical, pour atteindre l’ensemble des migrants.

49.Par ailleurs, l’Équateur a élaboré un plan global de prise en charge et de protection des droits dans le cadre de l’accélération des flux migratoires de Vénézuéliens en Équateur, fondé sur le principe constitutionnel selon lequel toutes les personnes sont égales devant la loi et jouissent des mêmes droits, devoirs et possibilités. Ce plan est exécuté en application de la législation en vigueur et l’État continue de mettre en œuvre des politiques publiques globales visant à protéger et à garantir les droits de la population équatorienne et des migrants se trouvant sur le territoire, sans distinction de nationalité. Les lignes directrices du plan sont les suivantes :

1.Action humanitaire ;

2.Intégration, rôle de la communauté d’accueil et mesures de prévention de la discrimination et de la xénophobie et de protection contre ces phénomènes ;

3.Mesures de prévention de la traite des personnes et du trafic de migrants et de protection contre ces fléaux ;

4.Mesures de coordination et de coopération.

Mise en œuvre, planification et budget

50.Sur le plan normatif, la mobilité humaine et les droits de l’homme sont régis par des instruments internationaux et régionaux, la législation nationale et les instruments de politique publique. L’Équateur est l’un des cinq seuls pays du monde qui ont ratifié les 18 instruments internationaux fondamentaux relatifs aux droits de l’homme et a également ratifié d’autres instruments relatifs aux migrations. En outre, le pays a adopté une dizaine de textes de loi en faveur des migrants, assortis de programmes et de plans d’action en vue de leur application.

51.Afin de fournir une protection adaptée aux enfants migrants, en particulier à ceux qui sont seuls et qui ne possèdent pas de pièce d’identité, un accord‑cadre de coopération interinstitutions a été signé, le 1er octobre 2018, entre le Ministère des relations extérieures et de la mobilité humaine, le Ministère de l’intérieur et le Ministère de l’intégration économique et sociale. Ce texte a pour objectif de garantir une gestion adaptée des flux migratoires et de mettre l’accent sur les droits de l’homme des étrangers et des enfants qui viennent en Équateur, en particulier des migrants provenant des pays d’Amérique du Sud. Sur la base de cet accord, le Ministère des relations extérieures et de la mobilité humaine, le Ministère de l’intégration économique et sociale, le Ministère de l’intérieur et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) ont signé un protocole de prise en charge des enfants et de leur famille dans le cadre des migrations en Équateur. Cet instrument définit le mode d’action que les autorités compétentes doivent suivre pour coordonner leur action face aux cas de migration d’enfants et de leur famille, en particulier lorsqu’ils franchissent la frontière.

52.En matière de lutte contre la discrimination et la xénophobie, la Direction de l’insertion de la communauté étrangère du Secrétariat d’État à la mobilité humaine, avec l’appui du HCR, a mis en œuvre un programme de sensibilisation à la lutte contre la discrimination et la xénophobie auprès des jeunes dans les établissements secondaires. Cette campagne a été menée auprès de 9 062 élèves en 2016, et 6 613 élèves en 2017. L’application du programme devrait se poursuivre en 2018 dans de nouveaux établissements. On trouvera dans les paragraphes ci-après quelques exemples de campagnes de lutte contre la xénophobie.

53.Le 14 septembre 2018, dans le cadre de la semaine de la mobilité humaine, la municipalité de Cuenca a organisé un forum intitulé « No me llames extranjero » (ne m’appelle pas « l’étranger ») dans l’objectif de promouvoir la création d’espaces d’apprentissage et de réflexion sur les migrations, leurs conséquences pour le pays et la nécessité de mettre en œuvre des politiques publiques en faveur des migrants. Le forum était adressé aux migrants, aux migrants de retour dans le pays, aux réfugiés, à la société civile, aux autorités publiques et à d’autres acteurs.

54.Le 21 septembre 2018, le centre de coordination de la septième région du Ministère des relations extérieures et de la mobilité humaine, basé à Loja, en coopération avec le Réseau de la mobilité humaine de Loja, a organisé un forum sur les processus de régularisation et sur les alternatives locales pour les migrants, dans le cadre du mois de la mobilité humaine, en vue de l’intégration des migrants, des étrangers se trouvant en Équateur, des Équatoriens de retour dans le pays et des réfugiés.

55.Le Ministère des relations extérieures et de la mobilité humaine a élargi aux provinces d’Azuay, de Cañar et de Morona Santiago sa campagne de lutte contre la xénophobie menée en 2018. L’objectif est de sensibiliser les élèves du secondaire à l’importance de la non-discrimination à l’égard des citoyens nationaux et étrangers en raison de leur origine ethnique ou de leur nationalité.