Nations Unies

CCPR/C/EGY/5

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

18 novembre 2020

Français

Original : arabe

Anglais, arabe, espagnol et français seulement

Comité des droits de l’homme

Cinquième rapport périodique soumis par l’Égypte en application de l’article 40 du Pacte, attendu en 2004 * , **

[Date de réception : 12 novembre 2019]

Introduction

1.Fermement déterminée à collaborer avec les mécanismes internationaux de défense des droits de l’homme et à respecter ses engagements conventionnels, l’Égypte soumet le présent rapport, qui couvre la période allant de la date de présentation de son précédent rapport à fin 2019, en application de l’article 40 (par. 1) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

2.Le présent rapport rend compte des progrès que la République arabe d’Égypte a réalisés afin que toutes les personnes vivant sur son territoire ou relevant de sa compétence jouissent des droits énoncés dans le Pacte, ainsi que des modifications législatives, juridiques et administratives qu’elle a apportées pour donner effet aux dispositions du Pacte depuis la présentation de ses troisième et quatrième rapports périodiques en 2001 (CCPR/C/EGY/2001/3), et plus particulièrement depuis l’adoption de la Constitution de 2014 jusqu’en 2019.

3.Située dans un environnement régional très instable, l’Égypte a été secouée par de nombreux événements internes ces dernières années. Le 25 janvier 2011, elle a été le théâtre d’un vaste soulèvement populaire, au cours duquel les Égyptiens ont réclamé la chute du régime en place et la protection de leurs droits et libertés fondamentaux, avec pour mots d’ordre la liberté, une vie décente et la justice sociale. Profitant de cette situation, de nombreux éléments terroristes s’en sont pris aux prisons, aux tribunaux et à plusieurs établissements publics, détruisant et brûlant tout sur leur passage, notamment les dossiers et documents qui s’y trouvaient. Il s’est ensuivi une succession de changements politiques qui ont abouti à l’élection, en juin 2012, d’un président de la République issu du mouvement des Frères musulmans, avec 51,7 % de voix favorables. Toutefois, le peuple égyptien n’a pas apprécié les politiques autoritaires du Président, qui portaient atteinte à l’état de droit et s’éloignaient des objectifs de la révolution. Le Président a ainsi accaparé le pouvoir avec son mouvement et fait une déclaration constitutionnelle unilatérale dans le but de légitimer sa décision de contrôler l’appareil judiciaire, après avoir porté atteinte à l’indépendance de la justice en évinçant le Procureur général et en s’abstenant d’appliquer les décisions judiciaires exécutoires contraires aux intérêts de son régime. Ses partisans ont assiégé le siège de la Haute Cour constitutionnelle pour empêcher cette dernière d’exercer ses fonctions. De plus, le Président et son parti ont adopté un discours politique incitant à la haine et à la violence entre citoyens et encourageant la discrimination fondée sur l’affiliation politique et l’appartenance religieuse. Le Président a également créé une commission chargée d’élaborer une constitution, composée exclusivement de partisans de son mouvement politique fondé sur la religion. En dépit d’une décision de justice invalidant la formation de cette commission pour violation des règles démocratiques, le Président a promulgué le 25 décembre 2012 une constitution promouvant l’exclusion et portant atteinte de manière flagrante au pouvoir législatif constitutionnel, avant de limoger plusieurs magistrats de la Haute Cour constitutionnelle.

4.Lorsque le peuple s’est rendu compte que le Président de la République s’était écarté des objectifs de la révolution qu’il avait promis de réaliser et qu’il bafouait l’état de droit, un mouvement pacifique de protestation populaire a débuté, appelant à l’organisation d’élections présidentielles anticipées, mais les revendications populaires ont été rejetées par le Président et ses partisans, qui ont répondu à ces manifestations par la violence et l’intimidation. Face à ce rejet, près de 30 millions d’Égyptiens sont descendus dans la rue le 30 juin 2013 pour renverser le régime en place et remettre le processus révolutionnaire sur la bonne voie. Les forces nationales ont convenu d’une feuille de route destinée à reconstruire les institutions constitutionnelles, à poser les fondements d’un système démocratique et à remédier aux carences de la phase précédente. Dans ce cadre, un collectif appelé Comité des 50, composé de membres représentant toutes les catégories de la société égyptienne, a été formé et chargé de réviser la Constitution. Il a élaboré un projet de Constitution qui a été soumis à un référendum et adopté par 98,1 % des votants.

5.La Constitution a été adoptée le 18 janvier 2014 et des élections présidentielles ont ensuite été organisées à la mi-mai 2014, conformément au deuxième objectif de la feuille de route. Ces élections ont abouti à la victoire du Président actuel, élu à 96,91 % des voix. Fin 2015, le dernier objectif a été concrétisé par l’élection des membres de la Chambre des représentants. Les élections présidentielles et législatives ont eu lieu en présence d’observateurs issus de nombreuses organisations de la société civile, de l’Union africaine et d’un certain nombre d’organisations régionales et internationales, qui ont unanimement considéré que le scrutin était conforme aux critères de transparence, d’impartialité et d’intégrité. Le 30 juin 2013 marque le début de la concrétisation des aspirations du peuple égyptien à construire les fondations institutionnelles d’une société démocratique respectant les droits de l’homme et les libertés fondamentales. Le Président actuel a été réélu en avril 2018 avec 97,08 % des voix.

6.L’adoption de la Constitution de 2014 constitue un progrès qualitatif dans le sens de l’amélioration de la situation des droits de l’homme en Égypte. Elle reflète une prise de conscience, par la nation, de l’universalité et de l’indivisibilité des droits de l’homme et de la nécessité de garantir à tous les citoyens, sur un pied d’égalité, la possibilité de jouir pleinement de ces droits sans aucune discrimination, que ce soit en raison notamment de la religion, de la croyance, du sexe, de l’origine, de la race, de la couleur, de la langue, du handicap, du niveau social ou de l’appartenance politique ou géographique. La Constitution instaure un régime politique fondé sur le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Elle met l’accent sur les libertés d’opinion, d’expression, de croyance, de pratique du culte et d’accès à l’information. Elle érige également toute atteinte à la liberté personnelle ou à la vie privée en infraction imprescriptible, interdit la torture dans toutes ses formes et manifestations, incrimine toutes les formes d’esclavage et de traite des êtres humains et considère que les droits et libertés inhérents à chaque citoyen ne peuvent être ni suspendus ni limités, et qu’aucune loi relative à leur exercice ne peut les restreindre de manière à porter atteinte à leur essence et à leur fondement. La Constitution affirme le droit de réunion pacifique et d’association, ainsi que le droit de constituer des partis politiques et des syndicats et garantit à tout citoyen le droit de participer à la conduite des affaires publiques du pays. Elle garantit également le droit d’ester en justice, souligne l’indépendance du pouvoir judiciaire et consacre l’obligation d’assurer la sécurité et la sûreté des citoyens.

7.L’article 151 de la Constitution impose aux autorités législatives, judiciaires et exécutives l’application des dispositions des instruments internationaux ratifiés, à l’instar de celle des lois nationales. En conséquence, quiconque subit un préjudice imputable à la non‑application de ces dispositions peut saisir la justice. La Constitution de 2014 va encore plus loin que les précédentes, dans la mesure où son article 93 accorde un statut particulier aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés, auxquels elle reconnaît force de loi, ce dont il résulte que les droits et libertés fondamentaux énoncés par ces instruments bénéficient également de la protection prévue par la Constitution. Selon l’article 121 de la Constitution, les lois relatives aux droits et libertés énoncés par la Constitution ou complétant ses dispositions doivent être approuvées à une majorité des deux tiers des membres de la Chambre des représentants. Par conséquent, toute partie qui y a intérêt peut introduire devant la Haute Cour constitutionnelle un recours en inconstitutionnalité contre toute disposition législative contraire.

8.L’Égypte a adhéré au cours de la période considérée à plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits civils et politiques, parmi lesquels la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et ses Protocoles additionnels visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants et contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, respectivement en 2003 et 2004. Elle a retiré en 2007 sa réserve à l’article 9 (par. 2) de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, qui accorde aux femmes des droits égaux à ceux des hommes en ce qui concerne l’octroi de la nationalité aux enfants. Elle a adhéré en 2014 à la Convention arabe contre la criminalité transnationale organisée. Elle a également levé en 2015 sa réserve à l’article 21 (par. 2) de la Charte africaine sur les droits et le bien-être de l’enfant concernant l’interdiction du mariage avant l’âge de 18ans. Elle a en outre adhéré en 2019 à la Charte arabe des droits de l’homme. Au cours de la période considérée, la législation égyptienne s’est enrichie de plusieurs dispositions qui reflètent son engagement à mettre en œuvre les diverses dispositions du Pacte, dont les plus importantes seront examinées de manière détaillée infra.

9.Le rapport est divisé en deux parties, la première décrit les mesures législatives, judiciaires et administratives prises pour donner effet aux dispositions des articles 1 à 27 du Pacte et fournit des renseignements sur les événements qu’a connus l’Égypte avant 2014 en prenant soin, dans la mesure du possible, d’éviter de répéter le contenu des récents rapports présentés aux organes conventionnels, notamment le Comité contre la torture, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, le Comité des droits de l’enfant et le Comité des droits des personnes handicapées. La deuxième partie comporte des réponses détaillées aux observations du Comité à l’issue de l’examen des troisième et quatrième rapports périodiques de l’Égypte (CCPR/CO/76/EGY), ainsi que des renvois aux informations et éclaircissements déjà fournis dans la première partie. Le présent rapport a été établi conformément aux directives du Comité concernant l’élaboration des rapports périodiques que les États parties doivent présenter en application de l’article 40 (par. 1) du Pacte (CCPR/C/2009/1) et du paragraphe 16 de la résolution A/RES/68/268 de l’Assemblée générale des Nations Unies du 9 avril 2014.

I.Informations relatives à la mise en œuvre des articles duPacte

Articles 1 à 3

10.L’Égypte s’engage à respecter les dispositions des articles 1 à 4 et à garantir à toutes les personnes se trouvant sur son territoire et relevant de sa souveraineté, y compris les peuples soumis à une occupation étrangère, les droits proclamés dans le Pacte sans aucune discrimination. Elle prend également les mesures d’ordre législatif nécessaires pour donner effet à ces droits et propose, en accord avec sa Constitution et sa législation, des recours efficaces à toute personne dont les droits ou libertés reconnus dans le Pacte ont été violés. Le parquet a compétence exclusive pour enquêter, mettre en mouvement l’action publique et instruire les affaires pénales et bénéficie des garanties prévues au chapitre III, section I, de la Constitution, en tant que partie intégrante de l’ordre judiciaire, conformément aux dispositions de l’article 189 de la Constitution.

11.L’article 93 de la Constitution confère un statut particulier aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme en ces termes : « L’État s’engage à respecter les traités, accords et pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par l’Égypte, qui acquièrent force de loi dès leur publication, conformément aux conditions prescrites. », ce qui est conforme aux dispositions de l’article 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Ainsi, le devoir de l’État de respecter les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par l’Égypte constitue désormais une obligation constitutionnelle à laquelle les autorités législatives ne peuvent déroger en promulguant des lois contraires. Tout refus ou retard concernant la mise en conformité de la législation égyptienne avec les dispositions de ces instruments est constitutif de violation d’une obligation constitutionnelle allant à l’encontre des dispositions la Constitution elle-même, ainsi que la Haute Cour constitutionnelle l’a confirmé dans les affaires no 131 (39e année judiciaire, audience du 6 avril 2019) et no 114 (29e année judiciaire, audience du 14 janvier 2017). Il ressort des décisions de la Haute Cour constitutionnelle que celle-ci considère ces instruments comme des textes de référence faisant autorité quand il s’agit d’examiner et d’interpréter des droits faisant l’objet des litiges constitutionnels dont elle est saisie. Dans le cadre de son contrôle constitutionnel, elle a examiné la compatibilité de certaines dispositions législatives avec le principe selon lequel nul ne peut être emprisonné pour la seule raison qu’il n’est pas en mesure d’exécuter une obligation contractuelle, à la lumière de l’article 11 du Pacte. Elle a également affirmé le principe relatif au droit de créer des organisations de la société civile et l’interdiction de leur dissolution par décision administrative, conformément aux dispositions de l’article 22 du Pacte. Dans le cadre de leur compétence en matière de contrôle de la légalité des décisions rendues par le pouvoir exécutif et de la vérification de leur degré de conformité aux dispositions de la Constitution, des instruments internationaux et des lois pertinentes, la Haute Cour administrative et la Cour du contentieux administratif se sont référées aux dispositions du Pacte dans de nombreuses décisions.

12.Vingt-deux (22) articles de la Constitution (art. 11 à 53) garantissent l’égalité de tous en droits et devoirs et consacrent les droits et libertés, ainsi que l’égalité des chances entre hommes et femmes sans discrimination. Conformément à l’observation générale no4 du Comité, l’Égypte s’emploie à améliorer la condition sociale des femmes et à renforcer leur présence aux postes de direction, de manière à réaliser l’égalité et à assurer le droit égal des hommes et des femmes de jouir de tous leurs droits civils et politiques, comme décrit en détail dans le rapport présenté par l’Égypte au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

Article 4

13.La situation vécue par l’Égypte, notamment à cause du terrorisme qui mine sa stabilité et menace sa sécurité et celle de ses citoyens, a motivé la proclamation de l’état d’urgence. En effet, les événements tragiques qui ont secoué l’Égypte depuis 2011, menaçant sa sécurité et son intégrité et portant atteinte à sa population et aux établissements publics et privés, ont poussé les autorités à déclarer l’état d’urgence et à imposer un couvre-feu sur une partie du territoire, notamment dans certaines zones du Sinaï. En outre, bien qu’elle ait été confrontée depuis fin 2013 à une recrudescence d’attaques terroristes ciblant tout le pays, l’Égypte n’a imposé l’état d’urgence qu’après les attentats perpétrés en 2017 contre les églises de diverses provinces du pays, qui ont fait près de 200 victimes (morts et blessés) et l’a soumis à des règles constitutionnelles et à un contrôle juridictionnel « complet ». De plus, la déclaration de l’état d’urgence n’a pas entraîné la mise en œuvre de toutes les dispositions qui en découlent, ni de celles prévues par la loi régissant l’état d’urgence et toutes les procédures pénales sont soumises aux règles générales posées par la Constitution et le Code de procédure pénale. En effet, dans la pratique, l’état d’urgence a pris la forme d’un couvre-feu devant être observé à des heures précises dans la province du Nord Sinaï.

14.Du fait de son caractère exceptionnel, le recours à l’état d’urgence est strictement réglementé par la Constitution de 2014, qui a prévu des règles et procédures régissant sa proclamation, en l’assortissant d’un certain nombre de garanties et en l’autorisant uniquement dans la stricte mesure où la situation l’exige. Ainsi, le Président de la République ne peut prononcer l’état d’urgence qu’après avis du Conseil des ministres et transmission à la Chambre des représentants, laquelle doit l’approuver à la majorité de ses membres. De plus, l’état d’urgence ne peut être décrété que pour une durée déterminée n’excédant pas trois mois et ne peut être prolongé qu’une seule fois, pendant une durée similaire, sous réserve de l’approbation des deux tiers des membres de la Chambre des représentants.

15.La Haute Cour constitutionnelle a confirmé que la loi sur l’état d’urgence n’était qu’une mesure exceptionnelle destinée à soutenir l’autorité exécutive et à lui permettre de restreindre certains droits et libertés publics dans le but de faire face à des situations d’urgence menaçant la sûreté publique ou la sécurité nationale du pays, telles que la guerre, les menaces extérieures, les atteintes à la sécurité intérieure, les épidémies ou des événements similaires susceptibles de porter atteinte à la sûreté publique ou à la sécurité nationale. Il s’agit là d’une mesure exceptionnelle qui vise un objectif précis et qui ne peut être appliquée que dans des cas exceptionnels, sur la base d’une interprétation étroite des dispositions qui la régissent. La Haute Cour constitutionnelle a également prononcé l’inconstitutionnalité de l’article 1(par. 1) de la loi no162 de 1958 sur l’état d’urgence qui autorise, lorsque l’état d’urgence est décrété par le Président de la République, l’arrestation des suspects ou de quiconque représente un danger pour la sécurité et l’ordre public, ainsi que leur détention et l’émission de mandats de fouille des personnes et de perquisition de lieux, indépendamment des dispositions du Code de procédure pénale. Dans sa sentence, la Cour a mis en garde contre toute interprétation large de la loi relative à l’état d’urgence et déclaré qu’il convenait de l’appliquer de la façon la plus restrictive possible, tout en veillant à se conformer aux règles régissant l’action législative, dont la plus importante est de ne pas enfreindre les autres dispositions de la Constitution. La promulgation de la loi sur l’état d’urgence sur la base d’une disposition constitutionnelle ne signifie pas qu’il est permis de déroger à d’autres dispositions de la Constitution. Par conséquent, la mise en détention administrative ne peut être autorisée qu’en vertu d’une décision judiciaire.

16.Comme indiqué dans le rapport précédent, la loi sur l’état d’urgence ne comporte aucune disposition portant dérogation aux obligations énoncées au paragraphe 2 du même article. En effet, cette loi se conforme aux dispositions de l’observation générale no 29 du Comité, ne porte pas atteinte aux principes constitutionnels et n’apporte aucune restriction aux droits ou libertés auxquels, en vertu dudit paragraphe, il est interdit de déroger. Il convient de se reporter aux informations fournies au sujet de cet article dans le rapport précédent concernant les mesures susceptibles d’être prises pendant l’état d’urgence et les situations dans lesquelles des recours peuvent être formés.

17.Concernant la compatibilité de la législation nationale relative au terrorisme avec les droits consacrés par le Pacte, la loi no 94 de 2015 sur la lutte antiterroriste définit l’acte terroriste comme tout recours à la force, à la violence, à la menace ou à la terreur à l’intérieur du pays ou à l’étranger, dans le but de porter atteinte à l’ordre public, mettre en danger la sûreté et la sécurité de la société ou ses intérêts, porter préjudice aux personnes, les terroriser et mettre en danger leur vie ou leur liberté ou porter atteinte à leurs droits publics ou privés, à leur sécurité ou à d’autres droits et libertés garantis par la Constitution et la loi, mettre en danger l’unité nationale, la paix sociale ou la sécurité nationale, causer des dommages à l’environnement, aux ressources naturelles, au patrimoine, aux deniers, installations et propriétés publics ou privés, ou entraîner leur occupation ou leur appropriation, empêcher les autorités publiques ou les instances juridictionnelles, les services publics, les entités locales, les lieux de culte, les hôpitaux, les institutions ou établissements éducatifs, les missions diplomatiques ou consulaires, les organisations et institutions régionales et internationales opérant en Égypte d’exercer tout ou une partie de leurs activités ou entraver ou gêner l’exercice de celles-ci et faire obstacle à l’application de l’une quelconque des dispositions de la Constitution, des lois ou règlements ; ainsi que tout comportement visant à commettre l’un des actes visés à l’alinéa 1 du même article, à préparer de tels actes ou à inciter à les commettre, en causant des dommages aux systèmes de communication et d’information, aux systèmes financiers ou bancaires, à l’économie nationale, aux stocks de sécurité d’énergie, de marchandises, de denrées alimentaires et d’eau ou aux services sanitaires en situation de catastrophe ou de crise.

18.Selon la loi sur la lutte antiterroriste, les droits protégés et garantis par la Constitution et la loi restent applicables sans restriction et le Code de procédure pénale constitue la loi commune régissant les procédures pénales en cas de mise en accusation pour acte terroriste. Certaines de ces procédures sont prévues par la loi sur la lutte antiterroriste, notamment par son article 44 qui accorde à titre gratuit aux personnes accusées d’actes terroristes le droit d’interjeter appel de la décision de placement en détention provisoire, ou de sa prolongation, devant la juridiction compétente. L’article 45 de la même loi interdit de fouiller une personne accusée d’acte terroriste sans décision de justice dûment motivée. L’article 46 du même texte interdit de surveiller et d’enregistrer les conversations et les messages, d’enregistrer ou de prendre des photos des lieux privés ou de les diffuser sur les réseaux de communication et d’information ou sur les sites Web sans un mandat de justice dûment motivé, délivré conformément aux procédures établies à cette fin.

19.Afin d’établir un juste équilibre entre la lutte contre la menace terroriste et la sauvegarde des droits et libertés, les pouvoirs conférés aux autorités chargées de l’application des lois et de la lutte contre le terrorisme ne peuvent s’exercer que dans les cas où de telles infractions sont commises et dans le respect de règles de procédure spécifiques préservant le cadre général de la légalité des procédures et garantissant la protection des droits et libertés des citoyens. Les procédures relatives aux droits et libertés sont soumises au contrôle et au suivi du pouvoir judiciaire (parquet), qui bénéficie de pouvoirs spéciaux pour mener à bien sa mission, dans le cadre des règles spécifiques prévues par les articles 40, 41 et 42 de la loi sur la lutte antiterroriste. Ainsi, la loi accorde aux autorités chargées de recueillir des éléments de preuve le droit de placer en détention provisoire des suspects impliqués dans des actes terroristes pour une période pouvant aller jusqu’à quatorze jours, renouvelable une fois, sous la surveillance et le contrôle du ministère public, sur la base d’une décision judiciaire motivée et conformément à un certain nombre de règles, parmi lesquelles la nécessité d’informer toute personne placée en détention des motifs de son arrestation, de son droit de communiquer avec ses proches et de la possibilité d’avoir accès à un avocat. Toutes les déclarations de tels suspects ont en outre vocation à être consignées dans un procès-verbal dressé à cet effet.

20.Le Gouvernement a récemment présenté à la Chambre des représentants des propositions d’amendements du Code de procédure pénale en vue d’une mise en conformité avec les dispositions constitutionnelles, allant dans le sens d’un renforcement du rôle et des pouvoirs de la défense aux stades de la collecte des preuves, de l’enquête préliminaire et des poursuites pénales. Des dispositions relatives à la protection des témoins et des victimes et au règlement des litiges en ligne ont également été proposées.

Article 5

21.Il convient de se reporter aux informations figurant aux paragraphes 6, 7 et 11 du présent rapport, selon lesquelles la Constitution égyptienne élève les dispositions du Pacte, en tant qu’instrument international relatif aux droits de l’homme, au rang de règle constitutionnelle, ce qui le place au sommet de la hiérarchie des normes. Par conséquent, toute partie y ayant intérêt peut introduire un recours en inconstitutionnalité contre toute disposition législative, antérieure ou postérieure au Pacte, si elle enfreint les dispositions de ce dernier. En outre, le Pacte fait partie intégrante du droit interne depuis son entrée en vigueur et toutes les autorités nationales sont tenues d’appliquer ses dispositions. Toute personne victime de violation de l’un des droits énoncés par le Pacte a le droit d’ester en justice à ce titre et d’obtenir une indemnisation.

Article 6

22.L’Égypte affirme que le droit à la vie est un droit suprême indérogeable, inhérent à toute personne humaine et sur lequel se fondent tous les autres droits et libertés, comme indiqué dans son précédent rapport présenté au Comité. À cet égard, il bénéficie dans le système juridique égyptien d’une protection pleine et entière, afin de veiller à ce que nul n’en soit arbitrairement privé, quelles que soient les circonstances.

23.À l’instar de nombreux autres pays du monde, la loi autorise l’application de la peine de mort s’agissant des crimes les plus graves et les plus odieux, comme l’homicide volontaire, délibéré et prémédité, l’empoisonnement et les actes de terrorisme et d’espionnage, conformément aux dispositions de l’article 6 (par. 2). Cette sanction est assortie de garanties instituant un équilibre entre le droit de la société à la dissuasion publique et le droit des personnes à la vie, ainsi que de l’obligation d’appliquer toutes les règles d’un procès équitable et le droit du condamné de ne pas subir de maltraitances ou de traitements cruels, conformément au paragraphe 16 de l’observation générale no 36 du Comité. L’état psychologique et les croyances des condamnés doivent également être pris en compte avant l’exécution de la sentence. L’état d’urgence ne déroge en aucune façon aux garanties entourant l’application de la peine de mort, comme indiqué aux paragraphes 15, 16 et 18 du présent rapport.

24.L’Égypte a adopté la vision figurant dans le document publié le 16septembre 2019 par les Nations Unies sous la cote (A/73/1004). À cet égard, elle considère que la peine de mort relève de la juridiction et de la législation nationale, ainsi que de l’exercice du droit souverain des États d’élaborer leur propre système de justice pénale, dont l’application repose sur plusieurs facteurs déterminants qui trouvent leur source dans la culture et les traditions sociales. De ce fait, la décision relative à l’abolition de la peine de mort ou à l’institution d’un moratoire concernant son application ne peut être prise qu’à l’issue d’une série de consultations menées à l’échelle interne d’un pays, complétées par une analyse de ses conséquences sur les droits des victimes et de leurs familles, ainsi que par un examen de son incidence sur la prévalence des crimes les plus graves et le droit de la communauté de vivre en paix et en sécurité.

25.En ce qui concerne les règles et dispositions réglementaires régissant l’usage de la force et des armes à feu, les forces de l’ordre appliquent les normes internationales relatives aux règles d’engagement progressif utilisées lors de la poursuite de criminels et de suspects et respectent les normes internationales relatives à l’usage de la force. À cet égard, le Ministère de l’intérieur a pris plusieurs mesures, parmi lesquelles les suivantes : l’application progressive des mécanismes prévus par la loi, notamment à travers l’allongement de la durée séparant les avertissements adressés aux contrevenants au moyen de lances à eau actionnées par intermittence et le recours à d’autres types de mesures uniquement après épuisement de la négociation, sur ordre d’officiers supérieurs de sûreté ; le traitement spécial des femmes, des enfants et des personnes âgées ; la formation des forces de maintien de l’ordre à la protection des installations et aux opérations antiémeute au moyen de fumigènes et de diffuseurs de poivre noir ; la diffusion de périodiques et d’instructions permanentes concernant les mesures à prendre pour protéger les droits de l’homme au cours des opérations de maintien de l’ordre et l’organisation de séminaires à l’intention des officiers visant à renforcer leurs connaissances juridiques, s’agissant de leurs obligations et du recours licite à la force conformément aux normes internationales. À l’Académie de police, les recrues reçoivent une formation incluant la simulation de certaines situations (garde à vue, arrestation, fouille, expulsion, traitement des prisonniers). La formation porte également sur les mécanismes permettant de sécuriser les manifestations pacifiques et de faire face aux émeutes, aux sit-in et aux perturbations des services publics ou aux atteintes à la sûreté, dans le respect des droits de l’homme, incluant une formation aux moyens d’enquête modernes, le renvoi devant le parquet de toute allégation de recours excessif à la force pour enquête et l’adoption par les organes de contrôle du Ministère de l’intérieur de mesures disciplinaires appropriées.

26.Conformément au décret présidentiel no 314 de 2017 relatif à la mise en place d’un dispositif central unifié de dépôt de plaintes à l’échelle de l’ensemble du pays, le Ministère de l’intérieur a mis au point un système électronique permettant d’examiner et d’analyser les plaintes et communications relatifs aux domaines d’activité des services du Ministère, afin d’identifier les différents manquements aux droits de l’homme et d’en tirer les conséquences. Toutes les situations sont examinées et toute violation avérée de la loi fait l’objet de sanctions disciplinaires immédiates et de poursuites pénales, en particulier en ce qui concerne l’usage excessif et injustifié de la force ou l’utilisation abusive ou illicite d’armes à feu.

27.Concernant les mesures visant à prévenir les disparitions forcées, la Constitution et la législation consacrent diverses garanties et prévoient l’adoption de mesures visant à faire en sorte qu’aucune personne, en aucun cas, ne soit victime de disparition forcée. Concernant les droits et garanties constitutionnels, les mécanismes institués pour inspecter les prisons et les lieux de détention, les dispositifs de plaintes relatives aux allégations de disparitions forcées, ainsi que les voies de recours disponibles, il convient de se reporter aux informations fournies dans le présent rapport au sujet des mesures prises pour donner effet aux articles 9 et 10.

28.Les enquêtes menées par le parquet − en tant qu’autorité judiciaire indépendante − montrent que la plupart des cas allégués concernent un certain nombre de personnes ayant volontairement rejoint des groupes terroristes ou émigré illégalement à l’étranger pour échapper à une vengeance, changer de religion, se marier sans le consentement des parents ou pour d’autres raisons sociales. Ces enquêtes ont également montré que certaines de ces personnes étaient déjà détenues ou en attente d’être jugées pour des infractions pénales. Il convient de noter, cependant, que l’Égypte compte environ 100 millions d’habitants, ce qui rend impossible le traçage de chaque citoyen, d’autant que la liberté de circulation, de résidence et d’immigration est garantie par l’article 62 de la Constitution, qui dispose qu’aucun citoyen ne peut être expulsé du territoire de l’État ou empêché d’y retourner, et précise également que l’interdiction de quitter le territoire de l’État, l’assignation à résidence ou l’interdiction de séjourner en un lieu donné, ne saurait être prononcée que sur la base d’une décision de justice motivée, pendant une durée précise et dans les cas prévus par la loi. Le Gouvernement entend poursuivre sa pleine coopération avec le Groupe de travail sur les disparitions forcées et répondre rapidement aux demandes de renseignements du Groupe. À cet égard, les responsables gouvernementaux continuent également d’organiser des rencontres avec le Groupe de travail en marge de ses sessions. Cette collaboration a abouti au règlement de 412 cas entre 2015 et le 12 septembre 2019.

Article 7

29.Il convient de se reporter au rapport périodique présenté par l’Égypte au Comité contre la torture. La Constitution de 2014 (art. 51 et 52) affirme que tout être humain a droit à la dignité, qu’il est interdit d’y porter atteinte et que l’État s’engage à la respecter et à la protéger. Les dispositions constitutionnelles érigent en outre la torture, sous toutes ses formes et manifestations, en crime imprescriptible. Le Code pénal se fonde sur une approche législative bien établie en la matière, à savoir la graduation et la proportionnalité des sanctions aux incriminations, via les différentes qualifications de la torture et des peines correspondantes, de sorte que celles-ci soient à la mesure de la gravité de chaque atteinte à un droit protégé. La mise en jeu de la responsabilité pénale dans le cadre de l’administration de la justice implique en effet de proportionner les peines en fonction de la gravité des infractions, conformément au paragraphe 4 de l’observation générale no 20 du Comité.

30.La loi incrimine toutes les formes de torture (art. 126, 129, 375 bis et 375 bis a)) infligées à une personne pour en obtenir des renseignements ou des aveux, la punir d’un acte qu’elle aurait commis, l’intimider ou faire pression sur elle ou pour tout autre motif fondé sur une quelconque forme de discrimination. Les articles 117, 127 et 280 incriminent toutes les formes de traitements inhumains ou dégradants infligés par un agent de la fonction publique à des citoyens, notamment les agressions physiques, quelle que soit leur nature, verbales ou à connotation sexuelle, lorsqu’elles portent atteinte à l’honneur de citoyens ou leur causent des souffrances physiques.

31.L’article 40 du Code pénal pose également une règle générale selon laquelle est considéré comme complice d’une infraction − dont la torture − quiconque incite à la commettre ou s’entend avec autrui pour la commettre ou ayant aidé son auteur à accomplir des activités de préparation, de facilitation ou d’accomplissement de l’infraction. Conformément aux dispositions de l’article 41, le complice encourt la même peine que celle applicable à l’auteur principal.

32.Conformément au paragraphe 13 de l’observation générale no 20 du Comité, l’article 55 de la Constitution de 2014 affirme que tout propos dont il s’avère qu’il a été obtenu sous la torture, l’intimidation, la contrainte, la pression physique ou psychologique ou la menace, ou encore dans l’une des conditions précitées, est nul et non avenu, tel que confirmé par l’article 302 du Code de procédure pénale. La jurisprudence de la Cour de cassation égyptienne consacre souvent ce principe, soulignant que l’invocation d’ordres émanant d’un supérieur ne peut justifier la torture et que l’obéissance aux supérieurs ne peut aller jusqu’à la perpétration d’une infraction.

33.L’Égypte reconnaît que des actes isolés de torture peuvent se produire sur son territoire, mais tient à affirmer que de telles violations ne reflètent en aucun cas sa propre politique ou sa position sur la question. Cela est confirmé par les enquêtes ouvertes depuis début 2014 jusqu’au 10avril 2019, qui ont abouti à la mise en examen de membre des forces de police dans 30cas de torture, 66cas de recours à des actes de cruauté et 215cas de mauvais traitements. Ces enquêtes et procès ont abouti à 70condamnations pénales, à 156classements et à 85affaires en cours. En outre, 344procédures disciplinaires ont été engagées contre des membres des forces de police impliqués dans des actes ne relevant pas de la torture ou de mauvais traitements ou ayant fait l’objet de condamnations pénales, dont 207 ont abouti à des sanctions disciplinaires.

34.Conformément au paragraphe 3 de l’observation générale no 20 du Comité, la loi sur l’état d’urgence n’autorise aucune dérogation aux dispositions de la Constitution ou de la législation et n’apporte de restriction à aucun des droits ou libertés auxquels il est interdit de déroger. Par conséquent, aucune forme de torture ne peut être justifiée en aucun cas, comme indiqué aux paragraphes 15, 16 et 18 du présent rapport.

35.En ce qui concerne les méthodes de rééducation et les mesures visant à interdire les châtiments corporels dans les écoles et autres établissements d’enseignement, plusieurs arrêtés ministériels ont été adoptés, dont le plus récent est l’arrêté no 287 du 19 septembre 2016 relatif au Code de discipline scolaire, qui vise à renforcer les valeurs de tolérance et de respect mutuel entre élèves et enseignants, à déterminer les mesures à prendre pour faire face à la conduite des élèves et à les éduquer sans avoir recours aux châtiments corporels, à renforcer le rôle des travailleurs sociaux dans la lutte contre les comportements préjudiciables des élèves au sein des établissements scolaires, notamment la violence en milieu scolaire, à surveiller et à assurer le suivi des situations à risque auxquelles sont exposés les élèves et à y remédier, à recueillir les plaintes faisant état de violences physique ou psychologique infligées aux élèves en milieu scolaire et à prendre les mesures juridiques nécessaires pour les prévenir.

36.S’agissant de la réglementation des expérimentations menées sur les êtres humains, l’article 60 de la Constitution de 2014 dispose ce qui suit : « Le corps humain est inviolable et toute agression, tout avilissement ou toute mutilation sont des infractions punissable par la loi. Le trafic d’organes est interdit, ainsi que toute expérimentation médicale ou scientifique menée sans le libre consentement dûment enregistré de la personne concernée, conformément aux principes établis dans le domaine de la science médicale, tel que prévu par la loi. ». Afin de donner effet à cette disposition constitutionnelle, le Gouvernement a élaboré un projet de loi sur les essais cliniques, actuellement en discussion à la Chambre des représentants.

Article 8

37.Reconnaissant la traite des êtres humains comme une forme contemporaine d’esclavage et tenant compte de la gravité de ce phénomène, qui constitue une violation des droits de l’homme à la liberté, à la sécurité et à la dignité, l’Égypte a adhéré en 2003 à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et au Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Elle a également adhéré en 2014 à la Convention arabe contre la criminalité transnationale organisée. Confirmant cette démarche, l’article 89 de la Constitution de 2014 dispose ce qui suit : « Sont interdites toutes les formes d’esclavage, d’asservissement, d’oppression et d’exploitation forcée des personnes, le commerce du sexe et les autres formes de traite des êtres humains, qui sont toutes constitutives d’infractions selon la loi. ».

38.Afin d’honorer les engagements découlant des instruments internationaux, la loi no 64 de 2010 sur la lutte contre la traite des êtres humains a été promulguée, incriminant toutes les formes contemporaines d’esclavage. Selon ce texte, l’auteur de telles infractions est quiconque vend, achète, transporte, offre ou héberge une personne physique, à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, en usant de tout moyen, tel que la force, la menace, l’enlèvement, la tromperie, l’abus d’autorité, ou encore une situation de vulnérabilité ou de besoin pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins de toute forme d’exploitation, notamment l’exploitation sexuelle ou l’exploitation des enfants dans le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la mendicité ou le prélèvement d’organes.

39.La loi accorde une protection spéciale aux victimes de la traite des personnes, en proclamant l’irrecevabilité de leur consentement à une quelconque exploitation. Elle octroie aussi une protection renforcée aux enfants et aux personnes frappées d’incapacité juridique, en considérant que l’infraction de vente est établie, dans ces cas, indépendamment du recours aux moyens précités pour la réaliser. De même, le consentement d’un tuteur n’a aucune valeur dans tous les cas de figure. Une protection spéciale des victimes est également prévue par la loi, qui leur consacre un chapitre spécifique intitulé « Protection des victimes ». Elles sont exemptées de toute poursuite et exonérées de toute responsabilité pénale et civile pour toute infraction commise du fait de leur situation de victime ou liée à une telle situation. La loi proclame également la pleine jouissance de leurs droits et libertés par les victimes, ajoutant que celles-ci doivent être identifiées et classées par groupe d’âge et nationalité au cours des différentes étapes de collecte des preuves, d’investigation et de poursuite, afin de les protéger contre les auteurs de la traite.

40.En outre, la loi garantit aux victimes le droit à l’intégrité physique, psychologique et morale, ainsi que le droit de préserver leur vie privée et leur identité, le droit d’accéder aux voies de recours administratives et judiciaires pertinentes et d’être informées de l’existence de ces procédures, le droit d’être entendues et le droit à la prise en compte de leurs intérêts à tous les stades du procès pénal, outre le droit à une assistance juridique et à un avocat à tous les stades de l’enquête et du procès. La loi impose aux tribunaux l’adoption de mesures de protection des victimes et des témoins, afin de s’assurer qu’ils ne font l’objet d’aucune pression et que leur identité est préservée. La loi insiste sur la mise en place de conditions propices permettant d’aider les victimes et de leur assurer une prise en charge médicale, psychologique, éducative et sociale en vue de leur réinsertion sociale, dans le respect de la liberté et de la dignité humaine, ainsi que sur le rapatriement sûr et rapide des étrangers et des résidents temporaires vers leur pays d’origine. De plus, la loi prévoit la mise à disposition des victimes de lieux d’hébergement adéquats, totalement indépendants de ceux destinés aux délinquants, afin qu’elles puissent s’entretenir avec leur famille, leurs avocats et les représentants des autorités compétentes.

41.La loi impose aux missions diplomatiques égyptiennes à l’étranger de fournir toute l’aide possible aux victimes égyptiennes de la traite des personnes, en coordination avec les autorités compétentes des pays tiers, afin d’assurer leur retour sûr et rapide en Égypte. L’Égypte applique la réciprocité en ce qui concerne la coordination avec les autorités compétentes de pays tiers, le but étant de faciliter le rapatriement sûr et rapide des victimes étrangères vers leur pays d’origine. La loi prévoit également la collaboration des instances judiciaires et des forces de police chargées de réprimer et de punir la traite des personnes avec leurs homologues étrangers, dans le cadre des accords bilatéraux ou multilatéraux en vigueur en Égypte, ou conformément au principe de réciprocité.

42.La loi impose des peines sévères à toutes les parties impliquées dans des infractions de traite des êtres humains, allant de la réclusion à terme à l’emprisonnement à vie, ainsi qu’une amende pouvant aller jusqu’à 500 000 livres égyptiennes. Ainsi, 9 condamnations pour délit de traite d’êtres humains ont été prononcées entre mars 2018 et février 2019, les peines prononcées variant entre la réclusion criminelle à perpétuité et l’amende maximale prévue. Conformément à la Constitution, aux instruments internationaux et à la législation, le pouvoir exécutif a pris de nombreuses mesures pour lutter contre cette infraction, incluant la formation et la sensibilisation des responsables de l’application des lois à la prévention de la traite des personnes.

43.Afin de sauvegarder l’intégrité physique des personnes et lutter contre le trafic d’organes humains, l’article 60 de la Constitution de 2014 interdit d’en faire commerce. L’article 61 dispose que le don d’organes et de tissus est une offrande de vie et que toute personne a le droit de faire don de ses organes, de son vivant ou après son décès, sous réserve d’un accord ou d’un testament dûment enregistré. L’État s’engage à mettre en place une instance chargée des règles relatives au don d’organes et à leur transplantation, conformément à la loi. Cette disposition a été confirmée par la loi no 5 de 2010 sur la greffe d’organes humains, qui fixe les règles de transplantation d’organes humains de façon à préserver les droits de toutes les parties et à réprimer toute violation. L’apport le plus important de cette loi consiste en l’adoption de règles strictes et objectives régissant la transplantation, parmi lesquelles la possibilité d’y recourir uniquement si elle représente le seul moyen de préserver la vie du receveur, l’obligation de veiller à ce que son usage n’entraîne pas de problèmes de filiation, à ce que tout don d’organe soit effectué sans contrepartie et avec le consentement écrit du donneur et l’interdiction de toute transplantation d’organes humains ou d’une partie du corps d’un donneur décédé à un receveur vivant, sauf en cas de souhait clairement exprimé avant son décès par le donneur.

44.La loi impose un contrôle strict des établissements qui pratiquent les transplantations et greffes d’organes et prévoit la création d’une commission supérieure de prélèvement d’organes humains, dont la mission consiste à recenser les établissements de transplantation autorisées, à vérifier s’ils satisfont aux critères d’agrément prévus et à les soumettre à une surveillance et à un contrôle continus. Le prélèvement d’organes doit être approuvé par un comité médical dont aucun des membres ne participe à l’opération et le prélèvement d’un organe sur une personne décédée ne peut se faire qu’après constat du décès. Le caractère réel, constant et irréversible de la mort doit avoir été confirmé par consensus des membres du comité. La loi no 142 de 2017, modifiant certaines dispositions de la loi précitée, prévoit des peines sévères en cas de violation de ces dispositions, allant de la réclusion criminelle à l’emprisonnement à perpétuité et/ou une amende allant de 500 000 à 2 millions de livres, selon la gravité de l’infraction.

45.Le Gouvernement a pris plusieurs mesures destinées à protéger les intérêts des employés de maison et à s’assurer que nul ne soit soumis à une quelconque forme de travail forcé ou obligatoire, via l’adoption d’un contrat-type établissant une relation équilibrée entre chaque employé et le chef de famille. Sont également appliqués aux employés de maison des critères d’évaluation de leurs compétences et acquis professionnels en vue de la délivrance d’un certificat professionnel ayant vocation à être mentionné sur leur carte d’identité nationale. Ils ont également la possibilité de bénéficier d’une assurance sociale et de former des syndicats pour défendre leurs droits et intérêts, conformément aux dispositions de l’article 2 de la loi no 213 de 2017 sur les organisations syndicales de travailleurs. Un projet de loi réglementant l’emploi domestique est en cours d’élaboration par le Gouvernement, incluant notamment des dispositions relatives à la formation, aux horaires de travail, aux congés, à la rémunération, aux assurances, aux mécanismes d’inspection des logements et aux modalités de traitement des plaintes, ainsi que d’autres dispositions tenant compte des intérêts des employés de maison et de la spécificité de ce type d’emploi dans le cadre de la relation avec les employeurs.

Article 9

46.Les constitutions égyptiennes successives ont consacré les garanties fondamentales du droit à la liberté et à la sécurité individuelles en s’inspirant des normes internationales en la matière. De même, les articles 54 et 55 de la Constitution de 2014 disposent qu’en-dehors des cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté, fouillé, détenu ou subir une quelconque restriction de sa liberté, sauf en vertu d’une décision de justice dûment motivée faisant suite à une enquête. Toute personne dont la liberté est restreinte doit être informée, sans délai, des raisons de cette mesure, être avertie par écrit de ses droits et immédiatement autorisée à contacter ses proches et son avocat, dès la phase de collecte des preuves et à tous les stades de l’enquête et du procès. Les officiers de police judiciaire sont en outre tenus de faire comparaître les prévenus, après interrogatoire, devant les organes chargés de l’instruction, à savoir le ministère public ou le juge d’instruction, dans les vingt-quatre heures suivant l’arrestation aux fins de les interroger et de prendre une décision, étant précisé que l’interrogatoire ne peut commencer qu’en présence d’un avocat. Si un prévenu n’a pas d’avocat, un conseil lui est désigné pour assurer sa défense et toute l’aide nécessaire est fournie aux personnes handicapées. Toute personne dont la liberté est restreinte, de même que tout tiers, peut intenter un recours devant les tribunaux, lesquels doivent se prononcer dans les sept jours à ce sujet. À défaut et au-delà de ce délai, toute personne détenue est immédiatement relâchée. En tout état de cause, il est interdit de juger une personne détenue pour des infractions passibles d’emprisonnement hors de la présence d’un avocat mandaté ou commis d’office.

47.Afin de promouvoir la liberté et la sécurité individuelles, ainsi que d’autres droits de l’homme et libertés fondamentales, l’article 99 de la Constitution dispose ce qui suit : « Toute atteinte à la liberté personnelle ou à la vie privée des citoyens et autres droits et libertés publics garantis par la Constitution et la loi est une infraction imprescriptible au pénal comme au civil. La victime peut engager une action pénale en citation directe. L’État garantit une juste indemnisation aux victimes. Le Conseil national des droits de l’homme peut rapporter au Procureur général toute violation de ces droits et se porter partie civile à la demande de la personne plaignante, de la manière prescrite par la loi. ».

48.Conformément à l’observation générale no8 du Comité, la législation comporte de nombreuses dispositions garantissant la mise en œuvre des droits à la liberté et à la sécurité individuelles inscrits dans la Constitution. En effet, l’article 22 du Code de procédure place les officiers de la police judiciaire sous la direction et le contrôle du Procureur général dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions. Le Procureur général peut exiger l’ouverture d’une enquête auprès des autorités compétentes au sujet de tout officier de police judiciaire reconnu coupable d’un manquement à ses devoirs ou de négligence et lancer une procédure disciplinaire à son encontre, sans préjudice des poursuites pénales susceptibles d’être engagées par ailleurs. L’article 34 impose à tout officier de police judiciaire, en cas de flagrant délit d’une infraction passible d’un emprisonnement supérieur à trois mois, d’arrêter tout suspect présent sur les lieux lorsqu’il existe suffisamment de preuves pour l’inculper.

49.L’article 36 du même Code met également à la charge des officiers de police judiciaire l’obligation de recueillir immédiatement la déposition d’une personne accusée en état d’arrestation. Si celle-ci ne parvient pas à prouver son innocence, l’officier doit la déférer dans les vingt-quatre heures au procureur compétent, qui est tenu de l’interroger dans un délai de vingt-quatre heures, au terme duquel il ordonne sa mise en détention ou sa libération. Les directives judiciaires réglementant les activités des membres du parquet imposent au personnel des permanences de nuit quotidiennes, ainsi qu’une permanence jour et nuit les fins de semaine et les jours fériés. En outre, l’article 40 du Code interdit toute arrestation ou détention d’une personne, sauf en vertu d’un mandat délivré par les autorités compétentes et dans les conditions prévues par la loi, en exigeant de traiter chaque individu dans le respect dû à sa dignité d’être humain, avec interdiction de lui infliger un quelconque sévices physique ou psychologique. De même, l’article 41 interdit d’incarcérer une personne dans des lieux autres que ceux prévus à cet effet, impose aux directeurs d’établissements pénitentiaires de vérifier l’existence d’un mandat de dépôt signé par l’autorité compétente avant d’accueillir quiconque et de ne pas maintenir une personne en détention au-delà de la date indiquée sur ledit mandat.

50.L’article 139 fait obligation d’informer immédiatement toute personne arrêtée ou placée en détention provisoire des motifs de cette mesure, ainsi que de son droit de prendre contact avec la personne de son choix et de solliciter l’assistance d’un avocat. L’article 42 accorde aux membres du parquet et aux procureurs et substituts de procureurs près les tribunaux de première instance et les Cours d’appel le droit de visiter les établissements pénitentiaires situés dans le ressort de leur juridiction pour s’assurer que nul n’y est détenu illégalement, ainsi que de consulter et obtenir copie des registres, mandats d’arrêt et de dépôt, de s’entretenir avec tout détenu et de recueillir ses plaintes. Pour sa part, l’article 43 accorde à tous les détenus le droit de déposer une plainte écrite ou orale auprès du directeur de l’établissement et de demander que celle-ci soit transmise au parquet compétent. Le directeur doit, sans tarder, accepter les plaintes et les transmettre au parquet après les avoir consignées dans le registre des plaintes. Il fait également obligation à quiconque apprend qu’une personne est détenue illégalement ou en un lieu non destiné à cet effet d’en aviser un membre du parquet, lequel, dès réception de cette information, doit immédiatement se rendre au lieu indiqué et ouvrir une enquête à ce sujet. Les articles 124 et 125 disposent pour leur part que sauf en cas de flagrant délit ou lorsqu’il existe des motifs sérieux de croire que des preuves pourraient être perdues, le juge d’instruction ne peut interroger un suspect ou le confronter à d’autres suspects avant que son avocat, s’il en a un, ait été invité à assister à l’interrogatoire ou à la confrontation. S’il n’a pas d’avocat, le juge d’instruction doit lui en désigner un d’office et l’autoriser à prendre connaissance des faits la veille de l’interrogatoire et, en aucun cas, l’accusé ne doit être séparé de son conseil au cours de cette procédure.

51.La loi no 145 de 2006 portant modification du Code de procédure pénale a introduit de nouvelles règles en matière de détention provisoire et posé les conditions nécessaires à leur application concernant certaines infractions, de même qu’elle a fixé la durée de cette mesure, variable en fonction de la nature de l’infraction. En effet, la durée de la détention provisoire ne peut dépasser, au stade de l’enquête préliminaire et au cours de toute les étapes d’un procès pénal, le tiers de la durée maximale de la peine privative de liberté, soit six mois en cas de délit, dix-huit mois en cas de crime et deux ans si la peine prévue pour l’infraction est la réclusion à perpétuité ou la peine capitale. La loi exige que les ordonnances de placement en détention provisoire soient délivrées par une autorité ayant compétence à cet effet et précise les voies de recours possibles en la matière. Elle prévoit également des solutions alternatives visant à réduire le recours à la détention provisoire, en permettant de la remplacer par d’autres mesures, comme l’obligation mise à la charge de l’accusé de ne pas quitter son domicile ou son lieu de résidence, de se présenter à des moments déterminés dans les locaux de la police ou de ne pas se rendre en des lieux déterminés. En outre, le ministère public doit publier les verdicts de non-lieu ou d’abandon des poursuites aux journaux officiels, aux frais de l’État, afin d’innocenter définitivement les personnes ayant fait l’objet d’une détention provisoire et veiller à ce qu’elles soient indemnisées pour le préjudice causé par la détention.

52.Compte tenu des graves attaques terroristes subies par l’Égypte, de la complexité des enquêtes judiciaires dont elles font l’objet, du nombre élevé de suspects impliqués et de leurs interconnexions avec d’autres entités internes et externes, la loi no83 de 2013 portant modification du Code de procédure pénale a été promulguée pour permettre à la Cour de cassation et aux tribunaux chargés de ces affaires − et non au parquet − d’ordonner la détention préventive des accusés précédemment condamnés à mort ou à l’emprisonnement à perpétuité, et ce, pendant une durée de quarante-cinq jours renouvelable, indépendamment des durées précitées. Il s’agit dans ce cas d’une détention avant jugement qui peut durer tout le temps nécessaire à l’examen des éléments de preuve contre les accusés dans ce type de procès, afin de permettre à la défense de s’exprimer et d’auditionner les témoins à charge et à décharge, dont le nombre a pu atteindre plus de 800personnes dans certaines affaires. Dans le système juridique égyptien, les règles de procédure pénale applicables aux Égyptiens sont identiques à celles applicables aux étrangers, lesquels jouissent même de droits plus étendus liés à leurextranéité.

53.S’agissant des règles de détention en service psychiatrique, l’article 24 de la loi relative à la protection des personnes atteintes de troubles mentaux dispose que dès le prononcé, par le parquet ou le tribunal, d’une mesure de placement en établissement psychiatrique, le Conseil régional de la santé mentale forme une commission composée de trois médecins choisis parmi ses membres pour examiner l’état psychologique et mental du détenu, conformément à la décision du ministère public ou au jugement. Un rapport d’évaluation de l’état psychologique et mental de l’intéressé est ensuite adressé à l’autorité judiciaire, dans les délais impartis par la décision des autorités judiciaires. L’article 25 dispose qu’il ne peut être mis fin à l’hospitalisation ni accorder au patient une autorisation de suivre un traitement médical sans l’accord de l’autorité judiciaire ayant ordonné son placement. Le patient hospitalisé bénéficie, en vertu de décisions ou d’ordonnances judiciaires, de tous les droits reconnus aux malades. L’article 26 autorise le directeur de l’établissement à transférer, sous escorte policière, un détenu malade vers des hôpitaux spécialisés.

54.Afin de donner effet à l’article 54 de la Constitution, le Gouvernement a soumis une proposition d’amendement du Code de procédure pénale à la Chambre des représentants, relative à l’indemnisation de la détention provisoire et introduisant notamment des critères d’éligibilité et des procédures d’indemnisation, ainsi que des modalités de détermination du montant de celle-ci, en vue de couvrir le préjudice à la fois moral et matériel directement subi par toute personne ayant fait l’objet d’une restriction de liberté.

55.Concernant les garanties relatives à la compatibilité de la législation antiterroriste avec les droits garantis par le Pacte, il convient de se reporter aux paragraphes 17 à 19 du présent rapport.

Article 10

56.Les constitutions égyptiennes successives ont érigé en règle le principe du traitement humain de toute personne privée de liberté. La législation comporte en outre de nombreuses garanties reflétant les règles et principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus. Ces garanties commencent par l’obligation de mentionner toute information relative aux admissions et aux transferts sur les registres d’écrou et les dossiers des détenus. L’article 5 de la loi no396 de 1956 régissant les établissements pénitentiaires dispose notamment que nul ne peut être emprisonné en l’absence d’un mandat écrit délivré par une autorité compétente et que nul ne peut être maintenu en détention au-delà de la date indiquée sur le mandat. L’article 6 impose au directeur de chaque établissement pénitentiaire ou au fonctionnaire désigné à cette fin de prendre possession, avant l’admission d’un détenu, d’une copie de l’ordonnance de mise en détention après apposition de sa signature sur l’accusé de réception. De son côté, l’article 7 fait obligation de fournir aux détenus une copie de l’ordonnance de mise en détention et de leurs dossiers individuels en cas de transfert vers un autre établissement. Pour sa part, l’article 8 exige qu’un résumé de l’ordonnance de mise en détention soit inscrit sur le registre d’écrou des détenus, en présence de l’agent ayant exécuté le mandat d’amener qui doit y apposer sa signature. L’article 75, tel que modifié par la loi no106 de 2015, souligne que chaque établissement pénitentiaire doit disposer de plusieurs registres, tenus par le chef de l’établissement qui en assure la gestion, le contrôle et la mise à jour. L’article 85, tel que modifié par la même loi, autorise le Procureur général et ses substituts à visiter à tout moment la plupart des établissements pénitentiaires situés dans le ressort de leur juridiction.

57.Pour ce qui est de l’accès des détenus aux soins de santé, l’article 33 de la même loi dispose que chaque prison centrale ou établissement pénitentiaire doit disposer des services d’un ou plusieurs médecins, dont au moins un résidant sur place. L’article 33 bis impose aux établissements publics et universitaires de santé de soigner les détenus malades. Pour sa part, l’article 36 dispose qu’en cas de diagnostic d’une maladie engageant le pronostic vital d’un détenu ou totalement invalidante par un médecin pénitentiaire, ce dernier doit en informer le directeur des services de santé de l’établissement afin de soumettre le détenu concerné à un examen, mené conjointement avec un médecin légiste, en vue de se prononcer sur sa libération. Une décision de mise en liberté peut alors être prise par l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire, sur approbation du Procureur général. Le décret d’application de la loi prévoit également d’autres dispositions garantissant le droit d’accès des détenus aux soins de santé. L’article 24 insiste sur la responsabilité du médecin en ce qui concerne l’administration de soins de santé aux détenus et la prévention contre les maladies infectieuses, le contrôle de quantité et de la qualité des aliments, des vêtements et de la literie, ainsi que la vérification de la propreté des ateliers et dortoirs et de l’ensemble de l’établissement. L’article 27 met à la charge du médecin pénitentiaire l’obligation d’examiner chaque détenu dès son admission, ainsi que celle d’examiner quotidiennement tous les détenus malades et, si nécessaire, d’ordonner le transfert de ceux qui se plaignent de leur santé vers l’hôpital de la prison, outre l’obligation de rendre visite chaque jour aux détenus mis à l’isolement. L’article 31 dispose également que si le médecin estime que la santé d’un détenu risque d’être affectée par une mise à l’isolement, par une tâche donnée ou par la nature de celle-ci, il doit en aviser par écrit le chef de l’établissement, qui doit se conformer à cet avis médical. L’article 34 bis confirme le droit de tout détenu soumis à l’obligation de travailler de demander une dispense pour des raisons médicales.

58.Concernant le droit des détenus aux visites et à la correspondance, l’article 38 de la loi pénitentiaire accorde à toute personne condamnée le droit d’envoyer et de recevoir du courrier et des appels téléphoniques, ainsi que celui de bénéficier de visites de ses proches deux fois par mois. Les mêmes droits sont accordés aux personnes en détention provisoire. L’administration pénitentiaire veille à ce que les visiteurs soient bien traités et à ce que des salles d’attente et des zones de visite appropriées soient prévues. Selon l’article 40 de la même loi, le Procureur général, l’avocat général et l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire ou son représentant sont habilités, le cas échéant, à accorder aux détenus le droit de recevoir la visite de leurs proches hors des horaires habituels de visite. Le texte d’application de la loi précitée garantit le droit des détenus aux visites. L’article 60 accorde à toute personne condamnée à une peine d’emprisonnement correctionnel ou placée en détention provisoire le droit de correspondre à tout moment avec ses proches et de recevoir des visites tous les jours de la semaine, sauf le vendredi et les jours fériés. L’article 64 accorde à toute personne condamnée à une peine privative de liberté le droit d’envoyer quatre (4) lettres par mois, à compter de la date de commencement d’exécution de la peine, ainsi que le droit de recevoir tout courrier qui lui est destiné. Il accorde également aux proches des détenus le droit de leur rendre visite tous les quinze jours, cette possibilité commençant à courir un mois après le commencement d’exécution de la peine. L’article 64 bis autorise également les personnes condamnées ou en détention provisoire à téléphoner pendant une durée maximale de 3 minutes deux fois par mois, à compter de la date à laquelle elles sont autorisées à recevoir des visites. Toutes ces dispositions sont conformes au paragraphe 3 de l’observation générale no 9 du Comité. L’article 38 bis de la loi pénitentiaire habilite également l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire à autoriser les représentants des ambassades et consulats à rendre visite aux détenus originaires des États qu’ils représentent ou dont ils défendent les intérêts et à leur apporter toute l’assistance nécessaire, sous réserve de réciprocité.

59.L’article 13 de la même loi dispose que les détenus doivent être répartis en au moins trois catégories, chacune devant en outre bénéficier de conditions de vie et de traitement adéquates. L’article 82 bis du règlement intérieur des établissements pénitentiaires impose, dans chaque prison, la mise en place d’une commission présidée par le directeur de l’établissement ou son représentant, choisi parmi les agents pénitentiaires, composée d’un surveillant pénitentiaire, d’un agent d’exécution des peines, d’un agent de détention, d’un médecin et d’un travailleur social. Cette commission a pour mission de classer les détenus en fonction de divers paramètres, à savoir la nature de l’infraction pour laquelle ils ont été condamnés, la durée de leurs peines respectives, leurs antécédents judiciaires et leur degré de dangerosité, ainsi que leur âge, leur état de santé et leur statut socioculturel, conformément aux dispositions de l’article 2 (par. 2) de l’observation générale no 9 du Comité.

60.Concernant les conditions de détention des mineurs, l’article 112 de la loi no 12 de 1996 portant promulgation du Code de l’enfantinterdit de détenir ou d’emprisonner en un même lieu un enfant avec des adultes, les conditions de détention devant être déterminées selon l’âge, le sexe et la nature du délit. Tout fonctionnaire public ou agent chargé d’une mission d’intérêt général qui place en détention ou emprisonne en un même lieu un mineur en compagnie d’un ou de plusieurs adultes est passible d’un emprisonnement de trois mois à deux ans et/ou d’une amende de 1 000 à 5 000 livres. Le règlement intérieur des établissements pénitentiaires pour mineurs impose la présence d’un travailleur social 24 heures sur 24, afin d’assurer la prise en charge des mineurs placés en centres sociaux spécialisés, ainsi que le suivi de leur situation et le signalement de tout abus aux autorités concernées. Un dispositif de surveillance visuelle est en outre installé pour prévenir tout acte répréhensible et en punir le ou les auteurs, le cas échéant.

61.Pour ce qui est des sanctions disciplinaires applicables aux détenus, aucune n’inclut de châtiments corporels et l’article 43 de la loi pénitentiaire les limite à ce qui suit : a) l’avertissement ; b) la privation de tout ou partie des privilèges accordés, pendant une durée maximale de trente jours ; c) le sursis à exécution de la décision de passage de la personne détenue à une catégorie supérieure, pendant une durée n’excédant pas six mois s’agissant des détenus condamnés à une peine d’emprisonnement à temps et pouvant aller jusqu’à une année concernant les détenus condamnés à la réclusion à perpétuité ou à des peines aggravées : d) la rétrogradation de la personne détenue dans une catégorie inférieure, pendant une durée n’excédant pas six mois s’agissant des détenus condamnés à une peine d’emprisonnement à temps et pouvant aller jusqu’à une année concernant les détenus condamnés à la réclusion à perpétuité ou à des peines aggravées ; e) la mise à l’isolement cellulaire pendant une période n’excédant pas trente jours ; et f) la détention dans une cellule sous haute surveillance pendant une période n’excédant pas six mois s’agissant des détenus âgés de 18 à 60 ans.

62.L’article 44 de la même loi autorise également l’autorité compétente, à savoir le directeur d’établissement, à appliquer les sanctions suivantes : a)l’avertissement ; b)la privation d’une partie des privilèges prévus au profit de la catégorie à laquelle appartient le détenu ; c)le sursis à exécution de la décision de passage de la personne détenue à une catégorie supérieure, pendant une durée n’excédant pas trois mois s’agissant des détenus condamnés à la réclusion à perpétuité ou à des peines aggravées et pouvant aller jusqu’à un mois concernant les détenus condamnés à une peine d’emprisonnement à temps ou à une peine d’emprisonnement assortie de travaux ; et d)la mise à l’isolement cellulaire pendant une durée maximale de quinze jours. Ces peines s’appliquent après information du détenu quant aux manquements qui lui sont reprochés, audition de ses déclarations et octroi de toutes les garanties de la défense. Les décisions rendues par le directeur de l’établissement pénitentiaire sont ensuite définitives. Les autres sanctions ne peuvent être imposées que par l’adjoint du Ministre de l’intérieur chargé de l’administration pénitentiaire, à la demande du directeur de l’établissement, sur la base d’un procès-verbal mentionnant les déclarations du détenu, le plaidoyer de la défense et les témoignages.

63.Le même texte définit les règles à observer lors de l’application des sanctions. Ainsi, selon son article 45 : « Toutes les sanctions prononcées contre les détenus doivent être consignées dans des registres prévus à cet effet. ». L’article 46 impose au chef de chaque établissement pénitentiaire d’informer immédiatement l’adjoint du Ministre chargé de l’administration pénitentiaire, le directeur de la sécurité et le ministère public de toute agitation, insurrection collective ou grève de la faim menée par des prisonniers, ainsi que de toutes les mesures prises par l’administration pénitentiaire à ce sujet. L’article 47 dispose que l’exécution de toute sanction disciplinaire prononcée conformément à la présente loi ne peut avoir lieu au-delà de la date prévue pour la libération du détenu, telle que fixée par une décision de justice. Aux termes de l’article 48 : « En matière de discipline, les personnes placées en détention provisoire bénéficient du même traitement que celui réservé aux personnes condamnées à une peine d’emprisonnement à temps, sauf pour ce qui est de leur transfert vers une prison de haute sécurité, qui ne peut leur être imposé à titre de sanction. ».

64.La mise à l’isolement, en tant que sanction disciplinaire, est exceptionnelle et limitée dans le temps. La loi entoure de plusieurs garanties le recours à une telle mesure, qui est considérée comme la sanction disciplinaire la plus sévère susceptible d’être imposée à un détenu. Ainsi, seul le directeur de l’établissement peut imposer cette sanction à un détenu en cas de manquement grave de sa part aux obligations mises à sa charge par la loi pénitentiaire et ses textes d’application, notification des accusations portées contre lui et octroi de la possibilité de se défendre. La décision de mise à l’isolement susceptible d’être prononcée par l’administration pénitentiaire peut aller jusqu’à quinze jours, sans dépasser trente jours au total. Conformément aux dispositions de l’article 45 de la loi pénitentiaire, les sanctions disciplinaires doivent être consignées dans un registre spécial, qui peut être consulté par les magistrats et les membres du parquet lors de l’inspection des prisons. Conformément aux dispositions de l’article 39 de la même loi, l’isolement cellulaire ne peut être invoqué comme prétexte pour empêcher un détenu de s’entretenir avec son avocat. Conformément aux dispositions de l’article 31 du règlement intérieur des établissements pénitentiaires, la sanction doit être levée si le médecin estime que la santé du détenu est affectée par sa mise à l’isolement. Le médecin doit en effet informer par écrit le chef de l’établissement pénitentiaire de l’état du détenu et lui enjoindre d’adopter des mesures destinées à y remédier, auxquelles il doit alors recourir. En outre, tout détenu mis à l’isolement peut porter plainte contre toute violation de ses droits et former un recours devant la justice administrative, conformément à la législation en vigueur.

65.Il convient de noter que la loi pénitentiaire et ses textes d’application établissent une distinction entre la mise à l’isolement − solitary confinement − en tant que sanction disciplinaire, telle que décrite ci-dessus, et le maintien d’un détenu en cellule individuelle en tant que modalité d’hébergement appliquée pour des raisons particulières tenant à son état de santé ou à son âge avancé, afin qu’il puisse faire l’objet d’un suivi et bénéficier de toutes les prestations de services dont il a besoin, des meilleurs soins de santé et de conditions de vie améliorées. Le placement en cellule individuelle n’est donc pas considéré comme une sanction disciplinaire et ne porte pas atteinte aux droits des détenus concernés, qui continuent de bénéficier de tous leurs droits et des mêmes services que ceux dispensés à tous les autres détenus.

66.Concernant les règles régissant le traitement et la séparation des personnes placées en détention provisoire des personnes condamnées et conformément à l’obligation posée par l’article 96 de la Constitution de protéger les prévenus, ainsi qu’aux dispositions de l’article 1 (par. 2) de l’observation générale no 9 du Comité, l’article 14 de la loi pénitentiaire dispose que les prévenus en détention provisoire doivent être placés dans des locaux séparés de ceux dans lesquels se trouvent les personnes condamnées et autorisés à séjourner dans une cellule meublée. La loi prévoit également un traitement distinct des prévenus et des condamnés, en accordant divers privilèges aux premiers.

67.Le Ministère de l’intérieur a pris une série de mesures visant la réinsertion des prisonniers, dont l’aménagement de locaux au profit de ceux inscrits aux différents cycles de l’enseignement en vue d’instaurer un environnement propice à l’étude, complété par la mise à disposition de manuels et de fournitures scolaires destinés à ces différents cycles, ainsi qu’au profit des détenus bénéficiant de cours d’alphabétisation. Il a également formé des jurys destinés à évaluer les épreuves spéciales organisées au sein des établissements pénitentiaires, en collaboration avec le Ministère de l’éducation et de l’enseignement technique, les facultés et les instituts. Il coordonne également son action avec celle de l’Académie des recherches islamiques et les directions des Awkafs, en vue d’organiser des séminaires mensuels dans les prisons ; de même qu’avec les différents évêchés et patriarcats régionaux, dans le but de désigner des prêtres chargés de dispenser des cours d’instruction religieuse aux détenus de confession chrétienne et de célébrer des offices religieux à leur intention. En outre, deux écoles secondaires dispensant une formation technique, situées à proximité des prisons d’Al-Minya et de Gamasa, ont ouvert leurs portes en 2018/19 et accueilli depuis cette date 7 289 élèves détenus de tous niveaux. D’autre part, des pensions et aides d’une valeur totale de 298 371 034 livres ont été octroyées à 66 391 familles et enfants de détenus entre 2015 et mars 2019. En outre, 47 337 bourses d’études, d’un montant 19 606 560 livres, ont été octroyées aux enfants de prisonniers au cours de la même période. Des programmes de réinsertion des détenus ont été mis en place pour assurer leur formation à divers métiers, ainsi qu’une rémunération leur permettant de subvenir aux besoins de leur famille et d’initier des projets productifs à leur libération. Les bibliothèques des établissements pénitentiaires ont été enrichies de 95 947 ouvrages.

68.Les établissements pénitentiaires et les centres de protection sociale offrent divers programmes et services de réinsertion aux détenus mineurs, ainsi que des soins de santé. Ces établissements disposent d’infirmeries où les mineurs bénéficient d’examens médicaux périodiques et reçoivent les traitements dont ils ont besoin, des salles isolées étant prévues pour le traitement des maladies infectieuses. Des services éducatifs sont également proposés aux élèves détenus et des examens organisés sous la supervision des jurys formés en collaboration avec le Ministère de l’éducation ou avec les districts scolaires dont relèvent les écoles partenaires. L’État prend en charge les frais de scolarité et le coût des fournitures scolaires et assure aux jeunes placés en établissements pénitentiaires et centres de protection sociale une formation aux métiers de l’artisanat dès qu’ils atteignent l’âge légal prescrit à cette fin, afin de faciliter leur insertion sur le marché du travail une fois leur peine purgée. Des activités sociales, religieuses, sportives, culturelles et récréatives sont également proposées aux mineurs afin d’orienter leur comportement vers la conformité aux valeurs et traditions sociales. Ces activités incluent des concours et compétitions, des visites de sites archéologiques et récréatifs, la fourniture quotidienne de journaux, magazines hebdomadaires, livres et autres publications, ainsi que la possibilité de s’adonner aux passe-temps de leur choix.

69.L’article 56 de la Constitution soumet les prisons et autres lieux de détention au contrôle de la justice, comme le confirment l’article 42 du Code de procédure pénale, l’article 85 de la loi pénitentiaire et l’article 27 de la loi sur l’autorité judiciaire. En effet, les magistrats du siège et du parquet, en tant qu’instances indépendantes, sont chargés de superviser et d’inspecter les prisons et autres lieux de détention, ainsi que les établissements correctionnels et pénitentiaires, de veiller à l’application des lois et au prononcé des sanctions adéquates en cas d’irrespect, de recevoir les plaintes des prisonniers et d’examiner tous les dossiers et registres pénitentiaires. Les articles 1747 à 1750 des directives judiciaire régissant le fonctionnement du parquet imposent aux avocats généraux auprès des tribunaux de grande instance, ou à leurs représentants, ainsi qu’aux présidents des tribunaux correctionnels, d’inspecter les prisons générales et les prisons centrales placées sous leur juridiction au moins une fois par mois sans préavis, de consulter les registres pénitentiaires, de vérifier la légalité des mandats d’arrêt et de dépôt et de recevoir toute plainte émanant des détenus. Depuis 2017, les juges et procureurs ont effectué 124 visites auprès des prisons.

70.Le Conseil national des droits de l’homme a été créé en 2003 en tant que mécanisme national indépendant chargé de promouvoir et de protéger les droits de l’homme, conformément à la Constitution et aux instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par l’Égypte. Conformément aux dispositions de l’article 3 de la loi relative à sa création, le Conseil est habilité à recevoir les plaintes et à les examiner, puis à transmettre celles qu’il juge fondées aux autorités compétentes, à les traiter en collaboration avec lesdites autorités et à diffuser et promouvoir la culture des droits de l’homme parmi les citoyens. Conformément à l’article 214 de la Constitution, aux Principes de Paris relatifs aux institutions nationales des droits de l’homme et aux propositions et recommandations du Conseil national lui-même, le texte de création de cette instance a été modifié par la loi no 197 de 2017 dans le sens de l’affirmation de son indépendance au cours de l’accomplissement de ses missions, de la détermination de ses modalités de constitution et de fonctionnement, de son autonomie budgétaire et de l’octroi au profit de ses membres du droit de visiter les prisons et autres lieux de détention afin de s’assurer que les prisonniers sont bien traités et jouissent pleinement de leurs droits, incluant la rédaction d’un rapport à l’issue de chaque visite, assorti d’observations et de recommandations. La Commission des droits de l’homme de la Chambre des représentants se rend également régulièrement dans les prisons. De 2017 jusqu’à la date d’achèvement du présent rapport, la Commission et les institutions nationales des droits de l’homme ont effectué 12 visites auprès des établissements pénitentiaires.

71.Afin de garantir l’accès des détenus à des voies de recours, la loi accorde à toute personne le droit de porter plainte, chaque doléance devant en outre faire l’objet d’une enquête rapide et impartiale. La loi assure également la protection des plaignants et des témoins contre tous mauvais traitements ou intimidation, sachant que l’article 25 du Code de procédure pénale, tel que modifié, autorise quiconque ayant eu connaissance d’une infraction à la signaler au ministère public ou à un officier de police judiciaire. L’article 43 affirme le droit de quiconque apprend qu’une personne est détenue illégalement ou en un lieu non destiné à cet effet de porter plainte auprès du ministère public. Pour sa part, l’article 26 met à la charge de tout fonctionnaire ou agent public l’obligation de signaler toute infraction dont il a eu connaissance dans le cadre de l’exercice de ses fonctions ou en raison de celles-ci. Au cours de la période considérée, de nombreuses modifications législatives ont été apportées afin d’assurer la protection des droits de l’homme sous tous leurs aspects et de veiller à ce que toutes les personnes privées de liberté soient traitées avec humanité.

72.Il convient d’ajouter à ce qui précède les dispositions du Code de procédure pénale qui imposent aux organes chargés de l’instruction d’enquêter sur toute infraction qualifiée de crime, conformément aux dispositions de la loi. De plus, bien que la loi n’impose pas l’ouverture d’une enquête au sujet des infractions constitutives de délits ou de contraventions, cette obligation est posée par les directives judiciaires régissant le fonctionnement du parquet et concerne toutes les infractions (contraventions, délits et crimes) impliquant des officiers de police lorsqu’elles sont commises dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions ou en raison de celles-ci, ou si elles portent sur des incidents ayant eu lieu dans les prisons. En cas de plainte contre un agent pénitentiaire, les mêmes instructions imposent aux membres du parquet de se rendre sur le lieu de détention pour procéder sans délai à une enquête.

73.Un département des droits de l’homme chargé de recevoir les plaintes, communications et rapports relatifs aux droits de l’homme a été créé et rattaché au Bureau du Procureur général par la décision no 2034 de 2017. Les plaintes sont examinées et étudiées et celles dont le bien-fondé est établi font l’objet d’une enquête et sont transmises à tous les parquets compétents pour qu’ils prennent les mesures nécessaires, après soumission au Procureur général. Le Département assure également le suivi de toutes les affaires relatives aux droits de l’homme instruites par le parquet. De sa création à septembre 2019, le Département a reçu 2 249 communications, dont 662 émanant d’organismes gouvernementaux, 765 de citoyens par l’intermédiaire des réseaux sociaux, 174 du Conseil national des droits de l’homme, 515 du Conseil national de l’enfance et de la maternité, 61 reçues directement par le département et 72 en provenance des parquets territorialement compétents. Quelque 1 986 communications ont fait l’objet d’un examen et d’une enquête et 263 sont en cours d’examen.

74.Le Ministère de l’intérieur a également créé une direction des droits de l’homme chargée de veiller au respect des lois, de la Constitution et des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme par les officiers et agents dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions, ainsi que de recevoir les plaintes des citoyens concernant toute allégation de violation des droits de l’homme. À son tour, cette direction a mis en place un bureau des droits de l’homme dans chaque poste de police et l’a chargé de superviser les services des forces de l’ordre, de vérifier que les citoyens sont bien traités par les officiers et agents, ainsi que de recevoir les plaintes et de prendre des mesures rapides pour les résoudre.

75.En vue de sensibiliser les forces de l’ordre à la culture des droits de l’homme via la formation et l’éducation, l’enseignement de ces disciplines fait désormais partie intégrante des programmes de l’Académie de police, en tant que matières de base faisant l’objet d’un examen obligatoire, le but étant d’assurer un ancrage de ces valeurs parmi les élèves. Un « Diplôme en droits de l’homme et relations communautaires » a en outre été créé au niveau du cycle d’études supérieures de l’Académie. Un cours intitulé « droits de l’homme − enseignement approfondi » fait également partie des matières obligatoires enseignées dans le cadre des cursus diplômants de l’Académie. Les élèves de l’Académie ont soutenu 41 thèses de doctorat en matière de droits de l’homme, 14 autres thèses sont en cours de rédaction et 104 mémoires de recherche ont été élaborés dans ce domaine par les élèves officiers. Le Ministère de l’intérieur a également publié des brochures de vulgarisation des droits de l’homme, qu’il a diffusées auprès des agents et officiers de police. De 2015 à 2018, le Ministère a aussi organisé 139 sessions de formation spécialisées à l’intention des officiers, traitant de tous les aspects relatifs aux droits de l’homme, ainsi que 2 796 sessions de formation à l’intention des agents et du personnel civil du Ministère visant le renforcement de leurs capacités en sciences humaines et sociales, incluant des conférences spécialisées dans le domaine des droits de l’homme. En outre, 462 conférences portant sur les différentes questions relatives aux droits de l’homme ont également été organisées. Des sessions de formation ont également été organisées à l’intention des officiers et du personnel des établissements pénitentiaires et des centres de protection sociale concernant le traitement des détenus, des mineurs et des femmes en détention, sachant que 100 sessions de ce type ont été organisées de 2016 à 2019. De plus, un protocole de coopération entre la Direction des droits de l’homme du Ministère de l’intérieur et le Conseil national des droits de l’homme a été signé en mars 2017, dans le cadre duquel 10 sessions de formation aux droits de l’homme au cours des opérations de police ont été organisées à l’intention de 300 officiers des postes et commissariats de police, afin de les familiariser avec les obligations posées par la Constitution, les lois et les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. De même, un Institut de recherche criminelle et de formation a été créé en 2015 auprès du ministère public. Dès sa création, cet établissement a organisé des sessions de formation de base et spécialisées portant sur les garanties procédurales applicables lors des investigations relatives à tous les types d’infractions, dont ont bénéficié 1 180 personnes de 2017 à ce jour.

76.Le Gouvernement a élaboré un plan visant à créer, rénover et agrandir les établissements pénitentiaires afin de pallier la surpopulation carcérale, conformément aux recommandations du ministère public, de la Commission des droits de l’homme de la Chambre des représentants et du Conseil national des droits de l’homme, le but étant de préserver la dignité et la santé des prisonniers. Il a également réaménagé les cellules pour améliorer la santé des détenus, tout en continuant à agir dans le sens d’une réduction de la population carcérale au moyen de différents dispositifs.

77.Il résulte de ce qui précède que le système juridique égyptien comporte des normes, règlements et instructions régissant le traitement des personnes privées de liberté qui, dans leur ensemble, reflètent les Règles minima pour le traitement des détenus et l’Ensemble des Principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement, dans la mesure où ces textes visent à prévenir toutes les formes de torture et de mauvais traitements, tout en veillant à ce que les prisons et autres lieux de détention, ainsi que les établissements correctionnels et pénitentiaires, fassent l’objet de surveillance et d’inspections.

Article 11

78.Aucune disposition de la législation égyptienne ne permet d’emprisonner une personne pour la seule raison qu’elle n’est pas en mesure d’exécuter une obligation contractuelle. Aucune sanction n’est en effet prévue en cas de manquement à une obligation contractuelle, sauf si cette défaillance s’accompagne de fraude ou de dol ou prend la forme d’une autre infraction, comme l’abus de confiance ou le vol, conformément à l’article 11 du Pacte. La Haute Cour constitutionnelle a confirmé dans plusieurs arrêts la compatibilité de la législation nationale avec les dispositions de cet article. En outre, l’Égypte a adhéré en 2019 à la Charte arabe des droits de l’homme, dont l’article 18 reprend le même principe.

Article 12

79.Fondées sur la conviction que les libertés de circulation et de résidence sont des droits universels dont l’exercice doit être garanti à tous les citoyens, dont la restriction ne peut être envisagée que pour des motifs légitimes et dont la violation constitue une atteinte à la liberté individuelle des citoyens, les constitutions égyptiennes successives se sont efforcées de veiller à la protection de ces libertés. Ainsi, l’article 62 de la Constitution de 2014 dispose que la liberté de circulation, de résidence et de migration est garantie et qu’aucun citoyen ne peut être expulsé du territoire de l’État ou empêché d’y retourner. L’interdiction de quitter le territoire de l’État, l’assignation à résidence et l’interdiction de résider en un lieu déterminé ne peuvent être ordonnées qu’en vertu d’une décision de justice dûment motivée, pendant une durée limitée et dans les circonstances prévues par la loi. Pour sa part, l’article 63 de la Constitution interdit le déplacement forcé et arbitraire de citoyens dans toutes ses formes et manifestations, la violation de cette disposition étant considérée comme une infraction imprescriptible. L’article 91 accorde l’asile politique à tout étranger persécuté pour avoir défendu les intérêts des peuples, les droits de l’homme, la paix ou la justice et interdit l’extradition des réfugiés politiques.

80.En application de l’interdiction posée par l’article 62 de la Constitution, le législateur égyptien a promulgué la loi no 97 de 2015 modifiant la loi sur l’enrichissement illicite et la loi no 175 de 2018 sur la lutte contre la cybercriminalité, qui autorisent les services d’investigation compétents, en présence d’éléments de preuve suffisants d’une violation de leurs dispositions, à interdire la sortie du territoire d’un prévenu ou à inscrire son nom sur la liste des personnes devant être contrôlées à leur entrée en Égypte, avec préservation du droit dudit prévenu de contester une telle décision devant la juridiction compétente.

81.La Chambre des représentants examine actuellement des amendements au Code de procédure pénale proposés par le Gouvernement, qui visent à encadrer l’adoption des décisions d’interdiction de voyager en présence d’éléments de preuve suffisants d’une infraction ou d’une tentative d’infraction. Selon ces propositions, une telle interdiction devrait faire l’objet d’une décision de justice motivée, limitée dans le temps et assortie du droit de former un recours devant la juridiction compétente. En outre, elle devrait expirer au terme d’un délai de deux ans à compter de la date de la décision de justice ou par suite d’un abandon des poursuites pénales ou d’un acquittement, selon que l’un ou l’autre événement survient en premier lieu.

82.Conformément aux obligations qui lui incombent en vertu de la Convention internationale relative au statut des réfugiés de 1951, l’Égypte collabore avec le bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), qui procède à l’enregistrement des réfugiés et des demandeurs d’asile sur la base de l’accord signé en 1954 entre les deux parties. L’Égypte garantit aux réfugiés et aux demandeurs d’asile l’hébergement et la liberté de circulation. En 2018, 12 centres ont été aménagés dans diverses provinces en vue de fournir des services aux réfugiés et aux nouveaux arrivants. Le nombre total d’élèves réfugiés s’élève à 71 851, sans compter les Syriens qui ont accès aux écoles publiques dans les mêmes conditions que les Égyptiens. La collaboration avec le bureau du HCR inclut la mise à disposition de travailleurs sociaux chargés de s’occuper des enfants non accompagnés et de s’assurer qu’ils ont accès aux services de base. Actuellement, 250 000 réfugiés et demandeurs d’asile de 55 nationalités différentes sont enregistrés auprès du HCR et on compte environ 5 millions de personnes supplémentaires, dont la plupart ont fui les conflits armés dans les pays voisins, qui n’ont pas demandé l’asile dans la mesure où elles se sont bien intégrées dans la société, étant donné qu’elles ne sont pas parquées dans des camps et bénéficient gratuitement de tous les services de base offerts aux Égyptiens.

83.L’Égypte souligne qu’il est important de respecter le principe du partage de la charge que représente l’accueil des réfugiés. Elle estime que les solutions à court terme fondées sur l’assistance sont insuffisantes et qu’il convient de remédier de manière durable aux causes de ce phénomène, en privilégiant une approche globale fondée sur le développement et pas uniquement sur les questions de sécurité. Conformément à l’engagement qui est le sien au titre de la Convention de 1969 régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique et de la collaboration instituée par le Cadre de politique migratoire pour l’Afrique, l’Égypte participe à des mécanismes régionaux, tels que le Processus de Khartoum (initiative de l’Union africaine sur la traite des êtres humains et le trafic de migrants dans la Corne de l’Afrique) et le mécanisme consultatif sur la migration de la Ligue des États arabes. Elle contribue également à des actions à l’échelle internationale, comme le Sommet de La Valette et la rédaction du pacte mondial sur les réfugiés et du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières (2018).

84.Il convient de se reporter à ce qui a été indiqué dans l’introduction du présent rapport au sujet de l’adhésion de l’Égypte, au cours de la période considérée, à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et à son Protocole additionnel contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, ainsi qu’à la Convention arabe relative à la lutte contre la criminalité transnationale organisée. Conformément aux engagements internationaux qu’elle a pris au titre de ces instruments, l’Égypte a promulgué la loi no 82 de 2016 sur la lutte contre le trafic de migrants en vue de lutter contre les groupes impliqués dans de telles infractions. Le texte incrimine la création de tels groupes et la participation à leurs activités, ainsi que toutes les formes de trafic illicite de migrants. Il prévoit des peines privatives de liberté, dont le degré est fonction des circonstances de l’infraction, et protège les migrants victimes du trafic illicite en reconnaissant leur droit au retour volontaire et celui de prendre contact avec leur représentation diplomatique. La loi accorde également au Conseil national de l’enfance et de la maternité le statut de représentant légal des enfants non accompagnés dont la famille ou les représentants légaux restent introuvables. Elle impose à l’État d’adopter toute mesure appropriée visant à protéger les droits des migrants pendant les procédures d’instruction et d’enquête et de les informer de leur droit à une assistance juridique, en accordant une attention particulière aux femmes et aux enfants et en garantissant l’égalité entre Égyptiens et étrangers concernant l’exercice de tous ces droits. En outre, compte tenu de la dimension sociale des mesures de lutte contre l’immigration clandestine, la loi a porté création d’un fonds consacré à cette lutte et à la protection des migrants et des témoins.

85.Sur la base de la loi précitée, une commission de coordination nationale a été créée en 2017 pour combattre et prévenir l’immigration illégale et le trafic d’êtres humains, coordonner les politiques, plans et programmes, ainsi que prendre en charge les migrants faisant l’objet d’un tel trafic et protéger les témoins, conformément aux obligations internationales découlant des accords internationaux bilatéraux et multilatéraux en vigueur en Égypte. Dès sa mise en place, la Commission a lancé la Stratégie nationale de lutte contre l’immigration clandestine (2016-2026), en vue de promouvoir la collaboration entre le Gouvernement et les acteurs non gouvernementaux, régionaux et internationaux concernés, de renforcer l’information ciblée et de sensibiliser le public, de mobiliser les ressources nécessaires et de renforcer le cadre législatif et les efforts destinés à combattre ce phénomène, tout en privilégiant le développement et les voies de migration régulières. La Commission a également mené plusieurs enquêtes sociales et de terrain afin d’identifier les principales province constituant les lieux de départ d’une immigration clandestine de jeunes et d’enfants non accompagnés et de mieux les cibler lors de la mise en œuvre de la Stratégie et des activités de sensibilisation communautaire menées en collaboration avec la société civile. Il convient de noter que le premier plan d’action de mise en œuvre de la stratégie a été achevé, tandis que le deuxième a été lancé en 2020. Grâce à ces efforts, aucune embarcation transportant des migrants irréguliers n’a quitté les côtes égyptiennes depuis septembre 2016.

Article 13

86.La loi no 89 de 1960 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en Égypte fixe les conditions et procédures applicables en la matière. Aux termes de cette loi, un étranger titulaire d’un permis de séjour spécial ne peut être expulsé, sauf si sa présence constitue une menace pour la sécurité intérieure ou extérieure de l’État, l’économie nationale, la santé publique, la morale publique, l’ordre public ou la tranquillité publique. Les décisions d’expulsion sont soumises à diverses règles procédurales et ne peuvent être prononcées que sur la base d’une étude de chaque cas particulier, visant à déterminer les raisons objectives et juridiques permettant de justifier leur adoption. L’intéressé est convoqué, interrogé et invité à fournir les éclaircissements nécessaires en présence d’un avocat, d’un représentant de son ambassade et d’un interprète. La décision d’expulsion est prise par le Ministre de l’intérieur après approbation d’un comité composé de représentants des organismes gouvernementaux concernés. En tout état de cause, la décision peut faire l’objet d’un recours en annulation devant le Conseil d’État. Un sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion peut également être sollicité.

Article 14

87.S’inspirant des normes convenues au niveau international, les constitutions égyptiennes successives, notamment celle de 2014, consacrent les garanties fondamentales d’un procès équitable. L’article 94 dispose ce qui suit : « La primauté de la loi est le fondement sur lequel repose l’exercice des pouvoirs au sein de L’État. L’État est soumis à la loi et l’indépendance, l’immunité et l’impartialité de la magistrature constituent des garanties fondamentales pour la protection des droits et libertés. ». L’article 184 affirme que le pouvoir judiciaire est indépendant et qu’il est exercé par les tribunaux de différents types et degrés, lesquels rendent leurs décisions conformément à la loi. La compétence des tribunaux est définie par la loi et toute ingérence dans les affaires de la justice ou les procès est une infraction imprescriptible. L’article 185 reconnaît à chaque instance ou organisme judiciaire une autonomie administrative et budgétaire. Les institutions judiciaires sont consultées au sujet des projets de loi ayant vocation à régir leurs activités. L’article 186 affirme que les magistrats sont indépendants et inamovibles, qu’ils ne sont soumis dans l’exercice de leurs fonctions qu’à l’autorité de la loi et qu’ils sont égaux en droits et en devoirs. La loi définit les conditions et modalités de nomination, de détachement, de retraite et de discipline des magistrats. L’article 189 dispose que le parquet fait partie intégrante de l’ordre judiciaire et qu’il est chargé de mener les investigations, de mettre en mouvement l’action publique et d’instruire les affaires pénales. Ses membres bénéficient de toutes les garanties d’intégrité, d’indépendance et de neutralité au cours de toutes les phases de poursuite et d’enquête. L’article 302 du Code de procédure pénale dispose que les juges statuent en toute indépendance selon leur intime conviction.

88.Le cadre constitutionnel et juridique offre de nombreuses garanties d’un procès équitable. L’article 54 de la Constitution dispose que toute personne dont la liberté est restreinte doit être informée sans délai des raisons de cette mesure, être avertie par écrit de ses droits, autorisée à contacter ses proches et son avocat immédiatement au cours de la phase de collecte des preuves et à tous les stades de l’enquête et du procès. Le même article accorde à l’accusé le droit de solliciter l’assistance d’un conseil pour le défendre au cours du procès et, s’il n’a pas mandaté un avocat, le tribunal doit lui en désigner un d’office. L’article 55 souligne que tous les propos, déclarations ou aveux obtenus sous la torture sont réputés nuls et non avenus. L’article 95 consacre le principe de l’individualisation des peines et de la non‑rétroactivité de la loi pénale. L’article 96 consacre le principe de la présomption d’innocence du prévenu jusqu’à l’établissement de sa culpabilité dans le cadre d’un procès équitable lui assurant toutes les garanties nécessaires à sa défense. L’article 97 dispose que le droit d’ester en justice est protégé et garanti au profit de tous : l’État assure aux justiciables l’accès aux organes judiciaires et veille au règlement rapide des litiges. Aucune mesure ou décision administrative n’est immunisée contre un éventuel contrôle juridictionnel. Le même article affirme que nul ne peut être soustrait à son juge naturel et que les tribunaux d’exception sont interdits. L’article 98 reconnaît les droits de la défense, notamment le droit de l’accusé et de son avocat de demander toute mesure d’enquête permettant de prouver l’innocence d’un prévenu, d’entendre les dépositions des témoins et des experts, de mener des investigations et de présenter des plaidoiries orales et écrites.

89.L’article 187 de la Constitution pose le principe du caractère public des audiences en ces termes : « Les audiences des tribunaux sont publiques, sauf si le tribunal ordonne le huis clos, pour des considérations liées à l’ordre public ou à la morale. Dans tous les cas, le verdict est prononcé en séance publique. ». Ce principe est confirmé par l’article 18 de la loi no 46 de 1972 sur le pouvoir judiciaire et par l’article 268 du Code de procédure pénale. L’article 19 de la loi sur le pouvoir judiciaire garantit le droit de bénéficier des services d’un interprète. Le Code de procédure pénale impose la tenue de plaidoiries orales devant les tribunaux, auxquels il incombe de clôturer l’instruction et de superviser l’accomplissement des procédures, d’entendre les plaidoyers à charge et à décharge et de tenir compte uniquement des éléments de preuve produits au cours des audiences.

90.La loi consacre le principe du caractère contradictoire des procédures. L’accusé doit être présent au procès et être confronté à tous les éléments de preuve retenus contre lui afin de pouvoir les réfuter ou les confirmer, le cas échéant. Le Code de procédure pénale réglemente les voies de recours contre les jugements rendus en matière pénale, qui peuvent faire l’objet d’appel ou de cassation. En matière de délits, les jugements rendus par contumace peuvent également faire l’objet d’une opposition devant le tribunal de première instance ou la cour d’appel. En matière pénale, les affaires sont jugées par un seul degré de juridiction, mais les sentences rendues par contumace peuvent être annulés en cas de comparution du prévenu et toute décision rendue en présence du prévenu peut faire l’objet d’un recours en cassation. En outre, l’article 96 de la Constitution a introduit le principe du double degré de juridiction en matière pénale.

91.En ce qui concerne l’organisation de l’Ordre des avocats, l’article 198 de la Constitution dispose ce qui suit : « La fonction d’avocat relève d’une profession libérale qui participe, avec la magistrature, à la réalisation de la justice, au renforcement de la primauté de la loi et à la garantie des droits de la défense. Elle est exercée par des avocats indépendants, ainsi que par les avocats des organismes et entreprises du secteur public et du secteur public des affaires. Conformément à la loi, les avocats bénéficient de garanties et de protections liées à l’exercice de la défense devant les tribunaux, qui s’appliquent notamment en présence des autorités chargées des investigations et de la collecte des preuves. Hormis les cas de flagrant délit, les avocats ne peuvent être détenus ou arrêtés durant l’exercice de leurs fonctions. La loi précise l’ensemble de ces dispositions. ».

92.L’article 120 de la loi sur les avocats dispose que le Barreau est une organisation professionnelle indépendante, composée d’avocats inscrits à ses différents tableaux et dotée de la personnalité juridique. L’article 121 fixe les objectifs du Barreau, qui consistent notamment à assurer le bon fonctionnement de la profession, garantir les droits des citoyens à la défense, fournir une assistance juridique aux personnes démunies, protéger les intérêts de ses membres, promouvoir l’esprit de corps des professionnels et assurer leur indépendance dans le cadre de l’accomplissement de leurs fonctions.

93.Concernant la possibilité pour les tribunaux militaires de juger des civils, l’article 204 de la Constitution dispose que la juridiction militaire est un organe judiciaire indépendant qui ne peut juger des civils que pour des infractions spécifiques liées à des attaques perpétrées contre des membres des forces armées ou des installations militaires et assimilées, conformément aux articles 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, à l’observation générale no 13 du Comité des droits de l’homme adoptée en 1984 et à son observation générale no 32 de 2007, qui autorisent à titre exceptionnel les tribunaux militaires à juger des civils. Les magistrats auprès de ces tribunaux bénéficient de la même indépendance et des mêmes immunités que celles accordées aux juges des juridictions civiles. Les prévenus bénéficient des mêmes garanties que celles applicables devant les tribunaux ordinaires concernant les droits de la défense, l’accès aux dossiers et la publicité des audiences, ainsi que la possibilité de contester les jugements rendus devant une juridiction supérieure, ce qui garantit le double degré de juridiction, outre l’application du Code pénal et du Code de procédure pénale et de diverses procédures et voies de recours devant la Cour de cassation et les juridictions militaires.

94.L’article 43 du Code pénal militaire, tel que modifié par la loi no 12 de 2014, consacre l’existence de plusieurs juridictions militaires, à savoir la Haute cour d’appel militaire, le tribunal pénal militaire, la cour d’appel militaire et le tribunal correctionnel militaire. En matière de délits, les jugements rendus par des tribunaux militaires sont désormais soumis au double degré de juridiction et les sentences émanant du tribunal correctionnel militaire peuvent faire l’objet d’un appel devant la cour d’appel militaire. La même loi prévoit la possibilité de contester les jugements rendus par le tribunal correctionnel militaire devant la Haute cour d’appel militaire, laquelle est compétente pour examiner les recours formés par le parquet militaire ou la personne condamnée, de même qu’elle autorise les recours en révision des jugements prononcés par tous les tribunaux militaires.

Article 15

95.Les articles 95 et 96 de la Constitution de 2014 consacrent le principe selon lequel nul ne peut être condamné pour des actions ou omissions non constitutives d’infractions au regard de la loi au moment de leur réalisation, le principe de non-rétroactivité de la loi pénale et le principe selon lequel tout accusé est présumé innocent tant qu’il n’a pas été déclaré coupable à l’issue d’un procès équitable lui assurant toutes les garanties de la défense. Le Code pénal consacre le principe, prescrivant l’application de la loi la plus favorable à l’accusé si elle a été promulguée après la commission de l’infraction et avant le prononcé d’un jugement définitif, complété par l’interdiction d’infliger à l’accusé une peine plus lourde que celle prévue par la loi ou une peine à laquelle il n’a pas été condamné. Les personnes traduites devant les tribunaux militaires bénéficient des mêmes garanties de procès équitable que celles qui leur sont accordées devant les tribunaux ordinaires. Les principes fondamentaux énoncés par cet article sont intimement liés à celui de la légalité pénale et continuent à s’appliquer même en cas de proclamation de l’état d’urgence ou en toute autre circonstance.

Article 16

96.Concernant la capacité juridique et le moment de son acquisition, il convient de se reporter au précédent rapport soumis par l’Égypte au Comité.

97.La législation égyptienne comporte des dispositions visant à ce que les enfants nés en Égypte ou à l’étranger soient reconnus, enregistrés à la naissance et dotés de documents d’identité personnels. Les articles 6 et 80 de la Constitution disposent que la nationalité est accordée aux personnes nées d’un père égyptien ou d’une mère égyptienne, dont la loi assure et organise la reconnaissance juridique et la délivrance de documents officiels mentionnant cette qualité. Le Code civil promulgué par la loi no 143 de 1994 prévoit une procédure complète de déclaration et d’enregistrement des naissances et de délivrance d’une carte d’identité personnelle. Il confie aux services d’état civil le soin d’établir une base de données nationale des citoyens. Un registre spécial est affecté à chaque citoyen, identifié par un numéro national unique attribué dès la naissance, valable tout au long de la vie et ne pouvant être réattribué à une autre personne, même après le décès du titulaire initial. Selon le Code civil, tous les organismes gouvernementaux doivent identifier les citoyens par leur numéro d’identification personnel.

98.Le Code civil précise que les personnes habilitées à procéder à la déclaration de naissance sont le père, la mère à condition de prouver la relation conjugale et les responsables d’hôpitaux, d’établissements pénitentiaires, de centres de quarantaine et de tout autre lieu où peut avoir lieu une naissance. La déclaration de naissance peut également être effectuée par les parents ou beaux-parents jusqu’au deuxième degré s’ils ont assisté à l’accouchement. Le Code civil impose à tout médecin ou praticien agréé l’obligation de délivrer un certificat de naissance confirmant l’accouchement pratiqué, comportant la date de la naissance, le nom de la mère biologique et le sexe de l’enfant. Le Code exige que toute naissance soit déclarée dans les quinze jours. En cas d’abandon de nouveau-né dont les parents sont inconnus, la loi impose de le remettre immédiatement à une institution apte à le recueillir, au commissariat de police du lieu de découverte de l’enfant, ou encore au maire ou au chef de village. Si l’un des parents reconnaît la paternité ou la maternité de l’enfant, il doit s’adresser au commissariat de police du lieu où le nouveau-né a été trouvé.

99.Le Code civile confie le soin aux bureaux de santé de recevoir et d’enregistrer les déclarations de naissance et de décès des ressortissants égyptiens et étrangers survenus en Égypte et de les transmettre au bureau d’enregistrement de l’état civil, lequel est chargé d’inscrire les actes de naissance sur un registre spécial et de délivrer des actes de naissance et de décès, des cartes d’identité personnelles, ainsi que des attestations relatives à tous les faits d’état civil. Le Code accorde à toute personne le droit d’obtenir une attestation officielle comportant les données la concernant ou concernant sa filiation, ses enfants ou conjoints et permet aux autorités judiciaires de demander une attestation officielle de tout fait d’état civil. Il atteste également l’authenticité des événements d’état civil inscrits dans les registres des services compétents, sauf s’il est prouvé qu’ils ont été annulés, invalidés ou modifiés par une décision de justice. Les organismes gouvernementaux et les organisations non gouvernementales doivent se référer aux données consignées dans les registres des services d’état civil pour tout ce qui concerne les questions relatives à des faits de cette nature.

100.Le Code civil impose à tout citoyen âgé de 16 ans de solliciter du bureau d’enregistrement de l’état civil le plus proche de son lieu de résidence la délivrance d’une carte d’identité personnelle dans les six mois suivant la date à laquelle il atteint cet âge. Ce document atteste l’authenticité des données qui y figurent et les organismes gouvernementaux, au même titre que les organisations non gouvernementales, doivent s’y fier pour vérifier l’identité de leur propriétaire. Afin de garantir ce droit aux Égyptiens vivant hors du pays, le Code civil impose l’obligation de déclarer les naissances survenues à l’étranger ou au cours d’un voyage dans les trois mois qui suivent la date de l’événement ou de l’arrivée dans le pays étranger. La déclaration doit être faite par les personnes qui en sont chargées et transmise au consulat égyptien de l’État où la naissance a eu lieu ou au bureau d’enregistrement de l’état civil dédié aux citoyens vivant à l’étranger. Le Code civil reconnaît tout enregistrement d’un fait d’état civil survenu dans un pays étranger concernant un citoyen égyptien s’il a été enregistré conformément aux lois de l’État de résidence, pour autant qu’elles n’entrent pas en conflit avec les lois nationales. Toute demande de délivrance d’une carte d’identité personnelle ou d’un duplicata, ainsi que toute modification ou renouvellement de ce document, peut être effectué par les citoyens vivant à l’étranger auprès des consulats égyptiens ou, à défaut, auprès du bureau d’enregistrement de l’état civil dédié aux citoyens vivant à l’étranger.

Article 17

101.Considérant que la vie privée des citoyens est inviolable et que le droit à la vie privée fait partie intégrante de la liberté personnelle, la Constitution de 2014 a adopté une approche progressiste par rapport aux textes précédents, en renforçant la protection de la vie privée des citoyens, auparavant encadrée par le Code de procédure pénale (comme indiqué dans le précédent rapport), via son intégration parmi les valeurs bénéficiant d’une garantie constitutionnelle. En effet, l’article 54 de la Constitution dispose ce qui suit : « La liberté personnelle est un droit naturel inviolable. À l’exception des cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté, fouillé, détenu, ou privé de liberté, qu’en vertu d’une décision de justice dûment motivée, rendue sur la base d’une enquête… ». Pour sa part, l’article 57 énonce ce qui suit : « La vie privée est sanctuarisée et inviolable. Les correspondances postales, télégraphiques et électroniques, les conversations téléphoniques ou autres moyens de communication sont inviolables, leur confidentialité est garantie et ils ne peuvent être confisqués, consultés ou surveillés que sur la base d’une décision de justice dûment motivée, pendant une durée déterminée et dans les cas prévus par la loi… ». Quant à l’article 58, il dispose ce qui suit : « Le domicile est inviolable. Sauf en cas de danger ou d’appel au secours, aucun accès, aucune perquisition, surveillance ou mise sur écoute ne peut être effectuée que sur la base d’une décision de justice dûment motivée précisant le lieu, le moment et le but de cette mesure, conformément aux conditions définies et de la manière prescrite par la loi. Les occupants d’un domicile doivent être prévenus avant l’accès à leur seuil ou avant une perquisition et être en mesure de consulter l’ordonnance judiciaire autorisant d’y procéder. ».

102.La Haute Cour constitutionnelle exerce son contrôle à la lumière de ces dispositions, afin de s’assurer que les lois ne portent pas atteinte à la liberté personnelle et à la vie privée des citoyens. La jurisprudence de la Cour de cassation, suivie en cela par les tribunaux pénaux, a établi que les perquisitions devaient être effectuées de manière à ne pas porter atteinte à la dignité humaine et ne pas être entachées d’abus de pouvoir ou d’arbitraire. Afin de préserver la dignité des femmes lors des perquisitions, l’article 46 du Code de procédure pénale impose que ces procédures soient menées par des femmes désignées par un officier de police judiciaire.

103.La protection des données personnelles à l’ère numérique étant un droit fondamental de la personne humaine en rapport avec la préservation de la vie privée, comme énoncé par l’article 57 de la Constitution, le Gouvernement a élaboré un projet de loi sur la protection des données personnelles, actuellement en cours d’examen par la Chambre des représentants.

104.Concernant les voies de recours à la disposition des victimes en cas de violation des droits protégés par cet article, il convient de se reporter aux informations présentées aux paragraphes 64 et 69 à 74 du présent rapport.

Article 18

105.Les constitutions successives, à commencer par celle de 1923, ont toutes consacré le principe de la liberté de croyance, de même que la liberté d’exercice des cultes et d’édification de lieux de culte. Ainsi, les articles 3, 53 et 64 de la Constitution de 2014 disposent que les principes religieux des Égyptiens de confession chrétienne ou juive sont les principales sources de la législation régissant leur statut personnel, leurs affaires religieuses et le choix de leurs dirigeants spirituels. Ces articles énoncent également que les citoyens sont égaux devant la loi ainsi qu’en droits, libertés et devoirs publics, sans discrimination de religion ou de croyance. Ils proclament que la liberté de croyance est absolue et que la liberté de la pratique religieuse et l’édification de lieux de culte destinés aux fidèles des religions célestes sont des droits réglementés par la loi. L’article 235 a imposé à la Chambre des représentants, lors de sa première session suivant l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution, d’adopter une loi destinée à organiser la construction et la rénovation des églises, garantissant de ce fait aux chrétiens la liberté de pratiquer leur culte.

106.La loi no 80 de 2016 relative à la construction et à la restauration des églises a été promulguée en application de l’article 235 de la Constitution, confirmant le droit des Égyptiens de confession chrétienne de construire et de restaurer leurs édifices religieux afin d’y pratiquer librement leur culte. La nouvelle législation fixe pour la première fois les règles et procédures d’obtention de permis pour tous travaux de construction ou de rénovation d’une église. La loi prévoit également les moyens permettant de mettre un terme aux infractions administratives antérieures et de régulariser la situation des lieux de culte, en reconnaissant le statut d’église à tous les bâtiments réservés à la célébration de rites religieux construits après l’entrée en vigueur du nouveau texte, à condition que le demandeur de la régularisation soit propriétaire du bâtiment et que celui-ci soit en bon état. Jusqu’à la date d’établissement du présent rapport, 1 171 églises et bâtiments annexes y rattachés ont bénéficié d’une telle régularisation.

107.Afin de donner effet à l’obligation constitutionnelle relative à la protection de l’exercice du culte en tant que manifestation extérieure de la liberté de croyance, la Haute Cour constitutionnelle a prononcé l’inconstitutionnalité de certaines dispositions de l’article 71 de la loi no 47 de 1978 sur la fonction publique au motif qu’elles ne reconnaissaient qu’aux travailleurs de confession musulmane le droit de bénéficier d’un congé pour se rendre dans les lieux saints musulmans en vue d’accomplir le pèlerinage, sans pour autant accorder aux salariés chrétiens un congé analogue pour se rendre en pèlerinage à Jérusalem. En application de cette jurisprudence, l’article 52 de la loi sur la fonction publique et l’article 143 de son règlement d’application ont reconnu une telle possibilité aux chrétiens.

108.Des enseignements relatifs aux droits de l’homme et à la lutte contre la corruption sont dispensés à partir de l’année universitaire 2018/19 dans tous les collèges et instituts supérieurs, en tant que matière obligatoire conditionnant le passage d’un niveau à l’autre. Un processus d’intégration des concepts et principes des droits de l’homme dans les cursus de l’enseignement de base a également été mis au point. Ces programmes prévoient l’enseignement des droits des femmes, des droits de l’enfant, de la démocratie, de la citoyenneté, de la liberté d’opinion et de l’acceptation d’autrui. Les critères et indicateurs d’évaluation de certaines disciplines et activités ont été modifiés pour y intégrer des pratiques et règles éthiques permettant d’exprimer des opinions sans offenser autrui et d’ancrer dans les esprits et la personnalité des élèves les principes de tolérance et d’acceptation de l’autre, ainsi que pour promouvoir une pensée religieuse modérée et diffuser les valeurs morales. En outre, des activités et programmes visant à promouvoir l’application effective de ces concepts dans le système éducatif ont été exécutés, en collaboration avec des organisations internationales et non gouvernementales.

109.Afin de promouvoir les principes de tolérance et de compréhension, ainsi que le dialogue entre les religions, un certain nombre de mesures ont été prises, dont les principales consistent en la création d’un forum de la tolérance et de la modération auprès du Conseil supérieur des affaires islamiques du Ministère des biens de mainmorte (Awqafs) en vue de diffuser la culture du dialogue et du rejet de la violence, de l’intolérance, du terrorisme et de la haine religieuse ; la mise en place par Al-Azhar Al-Sharif d’un programme scolaire destiné aux différents niveaux d’enseignement enseignés en son sein, afin d’enraciner les valeurs islamiques et d’assurer une vie meilleure aux individus dans le cadre du pluralisme religieux, confessionnel et culturel et la poursuite de la collaboration entre Al-Azhar et l’Église orthodoxe égyptienne dans le cadre de l’initiative intitulée « La maison de la famille égyptienne », en vue d’affirmer les valeurs et principes de la citoyenneté pour tous, de lutter contre la discrimination et l’incitation à la violence au nom de la religion et diffuser la culture de la tolérance parmi les citoyens. En outre, l’institut Al-Azhar Al-Sharif a mis en place en 2015 un « Observatoire international » chargé de surveiller les publications des groupes pratiquant le Takfir (accusation d’irrespect de la religion adressée par des musulmans à d’autres musulmans) qui prônent la violence sur les réseaux sociaux, en vue de rectifier les idées fausses. Le Ministère des biens de mainmorte a également édité des publications traduites en plusieurs langues, dont les ouvrages intitulés « La protection des églises en islam » et « Concepts à corriger » visant à mieux faire connaître les droits de l’homme, la citoyenneté et la coexistence pacifique et à combattre les idées religieuses fondamentalistes et extrémistes. Enfin, une nouvelle initiative a été lancée pour renforcer l’enseignement de l’éducation religieuse dans les écoles sur la base d’un programme dont une partie cible les différentes croyances appelées à être enseignées séparément aux élèves en fonction de leurs religions respectives, tandis qu’une autre partie est commune à tous les élèves et consacrée aux principes de tolérance, aux valeurs humaines et aux points communs des religions révélées.

Article 19

110.Conformément aux dispositions de l’article 19 (par. 3) du Protocole, l’article 65 de la Constitution de 2014 dispose ce qui suit : « La liberté de pensée et d’opinion est garantie. Toute personne a le droit d’exprimer ses opinions oralement, par écrit, par l’image ou par tout autre moyen d’expression ou d’édition. ». Les dispositions des constitutions égyptiennes successives ont consacré cette liberté et garanti le droit des individus à exprimer toute opinion dans n’importe quel domaine, sans qu’aucune de celle-ci ne soit un motif pour engager la responsabilité de ceux qui l’ont professée ou compromettre l’exercice de leur liberté ou les discriminer, tant qu’elle reste dans le cadre de la légalité et ne porte pas atteinte à autrui ou à la société. L’article 67 garantit la liberté de la création artistique et littéraire et impose de protéger les créateurs et leurs œuvres. En effet, les poursuites visant à suspendre ou à censurer des œuvres artistiques, littéraires ou intellectuelles, ou visant leurs créateurs, ne peuvent être ordonnées que par le ministère public et les infractions commises en raison du caractère public du produit artistique, littéraire et intellectuel, ne sont pas passibles de peines privatives des libertés tant qu’elles n’incitent pas à la violence, à la discrimination entre citoyens ou à la diffamation.

111.Fondé sur la conviction du caractère essentiel de la liberté des médias en vue de l’instauration d’un système démocratique solide et afin de la protéger, de la promouvoir et de limiter les restrictions susceptibles d’empêcher la presse et les médias d’accomplir librement et en toute indépendance leur mission sociale, ainsi que d’exprimer les tendances de l’opinion publique et de contribuer à la formation de celle-ci, l’article 70 de la Constitution garantit la liberté de la presse, de l’impression et de l’édition sous format papier, audiovisuel et électronique et reconnaît aux Égyptiens, personnes physiques ou morales, publiques ou privées, le droit de posséder et de publier des journaux et de créer des médias audiovisuels et numériques. Le même article dispose que les journaux peuvent être publiés dès leur déclaration, conformément à la loi. Pour sa part, l’article 71 de la Constitution interdit la censure, la saisie, la suspension ou la fermeture de journaux et de médias, sauf en cas de guerre ou de mobilisation générale, ainsi que de recourir à des peines privatives de liberté concernant les infractions commises par voie d’organes de presse ou d’information, à l’exception des infractions d’incitation à la violence, de discrimination ou de diffamation de citoyens, en confiant à la loi le soin de fixer les peines.

112.Selon l’article 72 de la Constitution, l’État s’engage à assurer l’indépendance de tous les organes de presse et des médias dont il est propriétaire, afin de garantir leur neutralité et permettre l’expression de toutes opinions, tendances politiques et intellectuelles et intérêts sociaux, ainsi que pour assurer l’équité et l’égalité des chances s’agissant des informations destinées au public. En application de l’article 211, un Conseil suprême de régulation des médias a été créé en tant qu’instance indépendante chargée notamment de régir le fonctionnement des médias audiovisuels, d’organiser la presse écrite et numérique, de garantir l’indépendance, l’impartialité, la pluralité et la diversité, de prévenir les pratiques monopolistiques, de contrôler la légalité des sources de financement de la presse et des médias et d’élaborer les règles et normes régissant la déontologie et le professionnalisme de la presse et des autres médias. En application de l’article 212, une Autorité nationale de la presse a été créée en tant qu’instance indépendante chargée de gérer les groupes de presse appartenant à l’État, ainsi que d’assurer leur développement, de renforcer leurs moyens, de les moderniser, de garantir leur indépendance et leur impartialité et d’améliorer leurs capacités de bonne gouvernance professionnelle, administrative et économique. En application de l’article 213, une autorité nationale des médias a été créée en tant qu’instance indépendante chargée de gérer les médias audiovisuels et numériques publics, ainsi que d’assurer leur développement, de renforcer leurs moyens, de les moderniser, de garantir leur indépendance et leur impartialité et d’améliorer leurs capacités de bonne gouvernance professionnelle, administrative et économique.

113.Les lois nos 178, 179 et 180 de 2018 constituent, dans leur ensemble, les textes régissant la presse et les médias. Ils en assurent l’indépendance conformément aux dispositions de la Constitution, en autorisant leur publication sur simple déclaration et en posant le principe que les opinions des journalistes et des professionnels des médias ne doivent pas donner lieu à une mise en cause de leur responsabilité, tout en garantissant leur droit d’obtenir et de diffuser des informations sans révéler leurs sources. Ces textes interdisent en outre la confiscation, la suspension ou la fermeture des médias imprimés, électroniques ou audiovisuels, ainsi que le recours à des peines privatives de liberté en ce qui concerne les infractions commises par voie de presse ou de publication, sauf dans les cas prévus par la Constitution. Ces lois disposent également que les perquisitions dans les bureaux ou au domicile des journalistes ou professionnels des médias, pour une infraction commise par voie de presse ou de médias, ne peuvent être effectuées qu’en présence d’un membre du parquet. Elles interdisent en outre d’infliger des sanctions pénales aux journalistes ou aux professionnels des médias pour avoir critiqué un fonctionnaire, un élu ou une personne investie d’une mission publique par voie de publication ou de diffusion, sauf s’il est établi que ces critiques étaient malveillantes ou non fondées ou sans rapport avec leur fonction.

114.Afin de garantir le droit d’accès à l’information et la libre circulation de celle-ci, l’article 68 de la Constitution de 2014 dispose, pour la première fois, que les informations, données, statistiques et documents officiels appartiennent au peuple, que leur diffusion publique au moyen de diverses sources est un droit reconnu au profit de chaque citoyen et garanti par l’État, lequel s’engage à les fournir et à les rendre accessibles en toute transparence, précisant que la loi prévoit les modalités d’accès, la disponibilité et la confidentialité desdites informations, ainsi que les règles de dépôt et de conservation, outre l’existence de voies de recours si l’accès à l’information est refusé. Pour donner effet à cet article, un projet de loi réglementant le droit d’accès à l’information est actuellement en discussion à la Chambre des représentants. Ce projet repose sur la philosophie selon laquelle le droit de recevoir et de diffuser des informations est la règle, tandis que la restriction susceptible d’y être apportée est une exception qui ne doit pas être étendue, ni généralisée, au-delà des limites qui peuvent être prescrites en vue de préserver le droit à la vie privée ou d’empêcher une atteinte à la sécurité nationale.

115.Afin d’établir un équilibre entre les libertés d’opinion et d’expression, l’inviolabilité de la vie privée et le droit à la protection des données personnelles reconnus par la Constitution, la loi no 175 de 2018 relative à la lutte contre la cybercriminalité a été promulguée en vue de lutter contre l’utilisation illégale des systèmes et réseaux informatiques. Elle définit les incriminations et pose les règles, procédures et mesures à suivre par les fournisseurs de services d’accès aux services de communication et détermine leurs obligations en la matière. La loi comporte également un dispositif exhaustif de règles et procédures régissant le blocage de sites, lorsqu’il existe suffisamment d’éléments de preuve indiquant que leur contenu comporte des expressions, chiffres, images, films, matériels de propagande ou autres matériels constitutifs d’infractions au regard de la loi. Ainsi, un blocage ne peut être effectué que sur la base d’une décision de justice dûment motivée, qui doit mentionner les voies de recours existantes et l’obligation mise à la charge des services d’investigation de soumettre l’injonction de blocage à la juridiction compétente dans les vingt-quatre heures, étant précisé que la juridiction en question est tenue de rendre une décision motivée dans les soixante-douze heures de sa saisine.

Article 20

116.L’article 53 de la Constitution de 2014 érige la discrimination et l’incitation à la haine en infractions pénales, et ce, pour la première fois par rapport aux constitutions précédentes. Il impose également à l’État de prendre les mesures nécessaires à l’élimination de toutes les formes de discrimination, telles que celles prévues par l’article 161 bis a) de la loi no 126 de 2011 portant modification de certaines dispositions du Code pénal, en réprimant au moyen d’un emprisonnement et/ou d’une amende à quiconque commet un acte ou une abstention entraînant une discrimination entre des individus ou un groupe de personnes pour des considérations fondées sur le sexe, l’origine, la langue, la religion ou la croyance et portant atteinte au principe de l’égalité des chances, à la justice sociale ou à l’ordre public.

117.Conformément à cette disposition constitutionnelle, l’appel à l’élimination de toutes les formes de discrimination et d’incitation à la violence et la lutte contre les discours de haine sous toutes leurs formes ont été intégrés dans plusieurs lois, parmi lesquelles les suivantes :

La loi no 45 de 2014 relative à l’exercice des droits politiques, qui interdit toute atteinte à la vie privée des citoyens ou des candidats et à l’unité nationale, ainsi que l’utilisation, pendant les campagnes électorales, de slogans religieux incitant à la discrimination entre les citoyens ou à la haine ;

La loi no 93 de 2016 relative au syndicat des journalistes, qui invite ce dernier à élaborer une charte d’honneur englobant un code de conduite, ainsi que les principes et obligations applicables aux professionnels des médias, interdisant notamment toute activité susceptible de porter atteinte à la vie privée ou à l’honneur des personnes, l’incitation à la violence, la discrimination entre les citoyens ainsi que l’adoption ou la diffusion de discours de haine. Sur cette base, une charte d’honneur et un code de conduite des professionnels des médias ont été adoptés, reprenant les dispositions précitées ;

La loi no 180 de 2018 sur l’organisation de la presse et des médias et le Conseil suprême de régulation des médias, qui interdit aux organes de presse et d’information et aux sites Web toute publication ou diffusion de tout produit ou déclaration dont le contenu est en contradiction avec les dispositions constitutionnelles ou risquant d’inciter à la discrimination, à la violence, au racisme ou à la haine. Ce texte interdit également toute publication d’un journal, toute création d’un quelconque média ou site électronique, ou toute autorisation d’une poursuite de ces activités, lorsqu’il s’avère que celles-ci sont fondées sur une discrimination religieuse ou confessionnelle, ou encore sur une discrimination en raison du sexe, de l’origine, du sectarisme, de l’appartenance ethnique ou du chauvinisme régional. Aux termes de la même loi, l’exercice de toute activité hostile aux principes de la démocratie, ou bien secrète, ou encore incitant à la débauche, à la haine ou à la violence, au même titre que l’exercice ou l’incitation à l’exercice de toute autre activité similaire, sont strictement interdites ;

La loi no149 de 2019 relative aux activités de la société civile, qui interdit aux organisations non gouvernementales d’inciter à la discrimination entre citoyens sur la base de considérations fondées sur le sexe, l’origine, la couleur, la langue, la religion ou les croyances, au racisme ou à la haine.

Article 21

118.Étant donné que le droit de réunion constitue le fondement de l’exercice de la liberté d’expression et de la libre communication des opinions et idées, la loi no 107 de 2013 a été promulguée afin de réglementer le droit des citoyens d’organiser et de prendre part à des réunions publiques, défilés et manifestations pacifiques et d’y participer, moyennant une simple déclaration préalable. Elle accorde aux citoyens le droit d’organiser des réunions, défilés et manifestations publics, sur la base d’une déclaration indiquant l’endroit où doit se tenir la réunion ou le lieu de départ du défilé ou de la manifestation, à déposer au poste ou au commissariat de police le plus proche au moins trois jours ouvrables avant la tenue de l’événement, étant précisé que ce délai peut être prolongé, mais sans pouvoir excéder quinze jours. Le délai est réduit à vingt-quatre heures s’agissant des réunions électorales, le but étant de laisser suffisamment de temps aux structures de sécurité pour assurer la protection de la réunion, du défilé ou de la manifestation et des participants, ainsi que celle de la vie des personnes et des biens publics et privés et, le cas échéant, proposer des itinéraires alternatifs.

119.Dans le même sens, la loi impose d’indiquer dans la déclaration l’endroit où doit se tenir la réunion publique, l’itinéraire du défilé ou de la manifestation, les heures de début et de fin, ainsi que l’objet et le motif de chaque événement et les revendications et slogans ayant vocation à être scandés par les participants, afin de vérifier leur compatibilité avec la Constitution et la loi et s’assurer qu’elles ne visent pas l’incitation à la discrimination, à la haine ou à la perpétration d’infractions. Les articles 5, 6 et 7 interdisent l’organisation de réunions publiques politiques à l’intérieur des lieux de culte, de leurs cours ou de leurs annexes. Ils interdisent également aux participants à des réunions publiques, à des défilés ou à des manifestations de porter des armes, des munitions, des explosifs, des feux d’artifice, des substances incendiaires ou autres instruments ou produits susceptibles de mettre en danger les personnes, les installations ou les biens ou de leur porter préjudice. Il leur est également interdit de porter atteinte à la sécurité ou à l’ordre public ; d’interrompre les activités productives ou d’appeler à le faire ; de porter atteinte aux intérêts des citoyens ou de leur porter préjudice, de mettre leur vie en danger ou de les empêcher d’exercer leurs droits et activités ; d’intervenir dans le cours de la justice ou dans le fonctionnement des services publics ; de couper les routes, d’interrompre les voies de communication ou le trafic terrestre, maritime ou aérien ou de perturber la circulation ; de porter atteinte à la vie des personnes et aux biens publics ou privés ou de les exposer aux dangers. Toutes ces interdictions sont des mesures nécessaires au maintien de la sécurité et de l’ordre publics, ainsi qu’à la protection des droits et libertés d’autrui. Elles sont conformes aux dispositions de l’article 21 du Pacte.

120.L’article 11 de la loi impose aux forces de l’ordre de prendre les dispositions nécessaires pour sécuriser les réunions publiques, défilés ou manifestations notifiés et assurer la protection des participants, ainsi que celle de la vie des personnes et des biens publics et privés, sans pour autant porter atteinte aux objectifs poursuivis par l’événement. Si, au cours d’une réunion publique, d’un défilé ou d’une manifestation, des actes constitutifs d’infractions punies par la loi sont commis par les participants, ou que l’expression collective des opinions sort de son cadre pacifique, les forces de l’ordre en tenue officielle peuvent, selon l’article 12 de la loi et sur ordre du commandant des opérations, procéder à la dispersion de la réunion, de la manifestation ou du défilé et arrêter toute personne soupçonnée d’en être l’auteur. Le même article impose aux forces de l’ordre d’agir dans le cadre des dispositions précitées et selon les étapes suivantes : 1) demander aux participants à la réunion publique, au défilé ou à la manifestation de quitter les lieux, en procédant à plusieurs sommations audibles, afin qu’ils se dispersent. Cela implique de localiser et de sécuriser les routes qui seront empruntées par les participants lors de la dispersion ; 2) si les sommations demeurent sans effet, les forces de l’ordre procèdent à la dispersion en faisant usage de canons à eau, puis de gaz lacrymogènes et enfin de matraques. Si les moyens dont il est fait mention à l’article précédent ne suffisent pas à disperser les participants ou si ces derniers commettent des actes de violence, de vandalisme, de destruction de biens publics ou privés ou agressent les personnes ou les forces de l’ordre, l’article 13 autorise ces dernières à faire un usage graduel de la force, au moyen de grenades assourdissantes ou de fumigènes, puis de balles en caoutchouc et enfin de balles réelles. Le recours par les participants aux armes à feu autorise les forces de l’ordre à la légitime défense, mais la riposte doit être proportionnée au danger qui menace la sécurité des personnes et des biens.

121.Compte tenu de l’importance du droit de réunion en tant que composante fondamentale de la liberté d’opinion et d’expression, l’article 14 de la loi impose au Ministre de l’intérieur de mettre en place, en coordination avec le gouverneur compétent, un cordon de sécurité devant des sites stratégiques comme le siège de la présidence de la République ou des chambres législatives, le siège des organisations internationales et des missions diplomatiques, les bâtiments gouvernementaux, les installations militaires et les structures de sécurité et de contrôle, les tribunaux, les hôpitaux, les aéroports, les établissements pétroliers, les institutions éducatives, les musées, les sites archéologiques, ainsi que d’autres services publics. Il est interdit aux participants à une réunion publique, un défilé ou une manifestation de passer outre le cordon de sécurité mentionné au paragraphe précédent.

122.La Constitution de 2014 a élevé à un rang constitutionnel le droit des citoyens d’organiser des réunions, défilés et manifestations publics, ainsi que toute autre forme de protestation pacifique sur simple déclaration préalable, afin de ne pas laisser au bon vouloir du législateur le soin de décider de ses modalités d’exercice. Elle permet également l’exercice de ce droit sur simple déclaration préalable, sans nécessité d’obtenir un permis ou une autorisation. En s’inspirant de l’arrêt de la Haute Cours constitutionnelle, la loi no 14 de 2017 portant modification de l’article 10 de la loi sur les réunions publiques, les défilés et les manifestations pacifiques a été promulguée en vue de priver le Ministère de l’intérieur de son droit d’empêcher une manifestation, d’en reporter la tenue ou d’en modifier le parcours et a confié cette compétence à la justice, afin de réaliser l’égalité devant la justice entre les citoyens et l’administration. Cette modification permet également de faire appel de la décision du juge des référés, conformément aux dispositions du Code de procédure civile et commerciale.

Article 22

123.L’article 75 de la Constitution de 2014 garantit le droit des citoyens de former des associations et organisations de la société civile sur une base démocratique. Ces entités acquièrent la personnalité juridique sur simple déclaration et il est interdit aux autorités administratives de s’immiscer dans leur fonctionnement, de les dissoudre ou de dissoudre leur conseil d’administration ou leur conseil de gestion, sauf par une décision de justice. Il est également interdit de créer ou de maintenir des associations ou institutions civiles à caractère secret, militaire ou paramilitaire, ce qui est conforme aux normes internationales. La loi no 149 de 2019 régissant les activités de la société civile a été promulguée à l’issue d’une série de consultations communautaires, en vue de remédier aux insuffisances de l’ancienne loi et d’appliquer la Constitution. Cette loi accorde aux associations le droit de recevoir des fonds et subventions après notification aux autorités administratives, dont l’absence d’objection dans un délai de soixante jours vaut approbation. En outre, la loi réduit à 50 000 livres les frais maximum que doivent verser les organisations non gouvernementales étrangères pour pouvoir être actives en Égypte et porte à 25 % le quota d’étrangers pouvant adhérer à des organisations de la société civile ou siéger à leurs conseils d’administration. Elle crée également un fonds destiné à fournir une assistance technique, financière et administrative aux organisations de la société civile, tout en instituant un cadre exhaustif régissant les activités bénévoles. Cette loi ne prévoit aucune peine privative de liberté en cas de violation de l’une quelconque de ses dispositions.

124.Convaincus de l’importance du rôle des 57 000 organisations existantes dans le développement de la société, les gouverneurs ont commencé en 2017 à inviter un représentant local de l’Union régionale des organisations de la société civile à prendre part aux sessions du conseil exécutif de chaque province, afin de renforcer le dialogue avec les entités de la société civile et de coordonner la fourniture de services aux citoyens. Le Gouvernement a ajouté au projet de loi sur l’administration locale, actuellement en discussion à la Chambre des représentants, une proposition prévoyant d’inclure un représentant de l’Union régionale des organisations de la société civile parmi les membres du conseil exécutif de chaque province.

125.L’Égypte reconnaît que la liberté de constituer des syndicats sur une base démocratique est le meilleur moyen de permettre aux travailleurs d’exprimer leurs opinions, de défendre leurs droits et de protéger leurs intérêts en toute légalité. Les constitutions égyptiennes successives ont toujours consacré la liberté de former des syndicats professionnels. La Constitution de 2014 garantit le respect de la plupart des dispositions de la Convention (no 87) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical et de celles de la Convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, auxquelles l’Égypte a adhéré respectivement en 1954 et en 1957. L’article 76 dispose ce qui suit : « La création de syndicats et de fédérations sur une base démocratique est un droit garanti par la loi. Les syndicats ont une personnalité juridique, opèrent librement, contribuent à renforcer les capacités de leurs membres, à défendre leurs droits et à protéger leurs intérêts. L’État garantit l’indépendance des syndicats et des fédérations et leurs conseils d’administration ne peuvent être dissous que par une décision de justice. Les forces de l’ordre ne peuvent constituer de syndicats. ».

126.Pour donner effet à ce qui précède, la loi no 213 de 2017 relative aux organisations syndicales professionnelles et à la protection du droit syndical a été promulguée afin de combler les lacunes du texte précédent, à savoir la loi no 35 de 1976 sur les organisations syndicales de travailleurs, ainsi que pour se conformer aux normes internationales en la matière. Le nouveau texte confère la personnalité morale à toutes les organisations syndicales, qu’il s’agisse de comités syndicaux, de syndicats généraux ou de fédérations syndicales. Il accorde en outre aux organisations constituées sur la base de la loi précédente la possibilité de régulariser leur situation par rapport aux nouvelles dispositions. L’article 10 définit les différents types de syndicats, à savoir les comités syndicaux, les syndicats généraux et les fédérations syndicales, sans imposer de fusion entre une organisation syndicale de petite taille et une autre de taille plus importante. Les articles 4 et 21 accordent aux travailleurs le droit de fonder des syndicats, d’y adhérer ou de s’en retirer et à ceux qui exercent plus d’une profession le droit de s’affilier à plus d’une organisation syndicale.

127.Afin de garantir l’autonomie fonctionnelle des organisations syndicales, les articles 59 et 64 de la loi leur accordent une indépendance financière et administrative et ne les soumettent à aucun contrôle ni tutelle de la part des fédérations syndicales ou des comités syndicaux. L’article 7 interdit la dissolution des conseils d’administration des organisations syndicales, sauf sur la base d’une décision de justice. L’article 30 précise que l’assemblée générale des organisations syndicales, en tant qu’autorité supérieure, est habilitée à déterminer la politique générale desdites organisations et à superviser l’ensemble de leurs activités, conformément à leurs statuts. L’article 36 dispose que l’élection des conseils d’administration des organisations syndicales par leurs assemblées générales doit se dérouler sans ingérence ni supervision d’aucune autre organisation syndicale, même si elle en fait partie. Fondé sur la conviction que le droit de grève est une condition essentielle de la liberté syndicale, l’article 14 affirme le droit de toutes les organisations syndicales, à quelque échelon que ce soit, d’organiser une grève conformément à leurs statuts et sans l’approbation d’une organisation de niveau supérieur. En mai 2018, des élections syndicales ont été organisées conformément à cette loi après douze ans d’interruption, entraînant le renouvellement de 80 % des membres syndicaux des quelque 2 500 comités, dont 145 non affiliés à l’Union générale.

128.Conformément aux recommandations de l’OIT, la loi no 142 de 2019 portant modification de la loi sur les organisations syndicales de travailleurs a été promulguée. Ainsi, toutes les peines privatives de liberté ont été supprimées et il a été procédé à la réduction du nombre de travailleurs requis pour former un comité syndical (de 150 à 50), du nombre de comités syndicaux pour former un syndicat (de 15 à 10), du nombre de travailleurs pouvant créer un syndicat (de 20 000 à 15 000), du nombre de syndicats généraux nécessaires à la création d’une fédération syndicale (de 10 à 7) et du nombre de travailleurs pouvant s’affilier à des syndicats généraux (de 200 000 à 150 000).

129.Compte tenu de la nature particulière des activités médiatiques et de leur lien intrinsèque avec la liberté d’opinion et d’expression, la loi no 93 de 2016 sur le syndicat des journalistes a été promulguée afin de garantir l’indépendance de la profession, ainsi que la liberté et les droits des professionnels des médias au cours de l’accomplissement de leurs missions, l’ensemble étant formalisé dans le cadre d’un code de déontologie des médias publié par l’assemblée générale de l’Organisation syndicale nationale, garantissant le droit de la société à des médias professionnels responsables.

130.La question relative à la création des partis politiques et aux garanties dont ils bénéficient est abordée au paragraphe 170 de la deuxième partie du présent rapport.

Article 23

131.L’article 10 de la Constitution affirme que la famille est la base de la société, qu’elle est fondée sur la religion, la morale et le patriotisme et que l’État veille à sa cohésion et à sa stabilité, ainsi qu’à la consolidation de ses valeurs. L’article 11 impose à l’État d’offrir aux femmes la possibilité de concilier leurs obligations familiales avec les exigences professionnelles et d’assurer la prise en charge et la protection de la maternité, de l’enfance et des femmes les plus démunies. Conformément à ces obligations constitutionnelles et aux engagements acceptés par l’Égypte au titre des instruments internationaux qu’elle a ratifiés, la législation et les politiques nationales s’attachent à réglementer tous les aspect de la protection de la famille. La loi no 143 de 1994 sur l’état civil a ainsi été modifiée, via l’introduction d’un article 31 bis a) interdisant l’enregistrement des mariages d’enfants âgés de moins de 18 ans et réprimant quiconque enfreint cette disposition. De ce fait, la réserve formulée au sujet de l’article 21/2 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, concernant l’interdiction du mariage de mineurs âgés de moins de 18 ans, a pu être retirée en 2015.

132.Depuis 2015, l’Égypte soumet périodiquement au Conseil des droits de l’homme un rapport sur la protection de la famille, en collaboration avec un certain nombre d’États, décrivant les avancées réalisées conformément aux dispositions de l’article 23 (par. 1) du Pacte. Elle participe en outre activement aux activités du Groupe des États amis de la famille à New York et à Genève.

133.Outre les mesures législatives et exécutives prises au niveau national pour promouvoir et protéger la famille dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels, la législation relative aux droits civils et politiques assure l’égalité des droits des hommes et des femmes au regard du mariage, pendant la vie conjugale et lors de sa dissolution, conformément aux principes du droit islamique. Les lois relatives à l’emploi, telles que la loi sur la fonction publique et la loi no 12 de 2013 promulguant le Code du travail, comportent plusieurs dispositions accordant une protection spéciale aux femmes actives, en vue de les aider à concilier leurs obligations familiales avec les exigences de leur vie professionnelle et les protéger contre les discriminations dont elles peuvent faire l’objet au travail. Il convient également de citer les obligations mises à la charge de l’époux vis-à-vis de son épouse et de ses enfants par le Code du statut personnel, et ce, pendant la vie conjugale ou en cas de divorce, telles que décrites en détail dans les rapports présentés par l’Égypte au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et au Comité des droits de l’enfant, ainsi qu’aux paragraphes 154 à 156 de la deuxième partie du présent rapport.

134.D’après l’article 485 du Code de procédure pénale, lorsque l’un des conjoints est privé de liberté, l’exécution de la peine privative de liberté imposée à une femme enceinte de six mois peut être différée jusqu’à deux mois après sa délivrance. Si la grossesse est découverte pendant l’exécution de la peine, les femmes enceintes bénéficient d’un régime spécial jusqu’à l’accouchement. Aux termes de l’article 488, des époux sans antécédents judiciaires condamnés, même pour des infractions différentes, à une peine d’emprisonnement inférieure à une année ne purgent pas simultanément leur peine s’ils ont un enfant à charge âgé de moins de 15 ans. Conformément aux dispositions de l’article 68 de la loi pénitentiaire, telle que modifiée par la loi no 106 de 2015, l’exécution d’une femme enceinte condamnée à mort n’est possible que deux ans après l’accouchement. L’article 20 accorde à la mère détenue le droit de rester avec son enfant dans la crèche de la prison jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge de 4 ans et de le garder auprès d’elle en détention pendant deux ans. Si la mère ne tient pas à le garder avec elle ou s’il atteint l’âge de 2 ans, il est confié à la personne titulaire, en vertu de la loi, de la garde de l’enfant. Si cette dernière refuse de l’accueillir, il est remis à la personne suivante qui bénéficie du droit de garde. Si toutes les personnes légalement susceptibles d’assumer la garde d’un enfant refusent de le prendre en charge, le directeur de l’établissement pénitentiaire doit le placer en centre d’accueil spécialisé et en informer la mère détenue, afin que celle-ci puisse lui rendre visite régulièrement.

Article 24

135.Outre ce qui a été indiqué supra aux paragraphes 97 à 100 concernant l’enregistrement des naissances et le droit de toute personne à la reconnaissance de sa personnalité juridique et à la délivrance d’une carte d’identité, la Constitution affirme le droit de l’enfant à la non‑discrimination. L’article 80 définit l’enfant comme toute personne âgée de moins de 18 ans et proclame l’obligation de protéger les enfants et de préserver leurs droits, y compris les enfants handicapés, en particulier leur droit à un nom et à des documents d’identité, à une vaccination obligatoire gratuite, à des soins médicaux, familiaux ou dispensés par une famille de remplacement, à une nutrition de base, à un hébergement sûr, à l’éducation et au développement émotionnel et cognitif. Elle prévoit en outre la protection des enfants contre toutes les formes de violence, d’abus, de mauvais traitements et d’exploitation sexuelle et commerciale. La Constitution prévoit également l’établissement d’un système de justice destiné aux enfants victimes. Elle interdit de poursuivre pénalement les enfants ou de les placer en détention, sauf conformément à la loi et pendant la durée précisée par ses dispositions, en les faisant bénéficier d’une assistance juridique. La détention de mineurs ne peut en outre avoir lieu qu’en des lieux adéquats et séparés des adultes et l’État s’emploie à rechercher l’intérêt supérieur des enfants dans toutes les mesures prises à leur égard. Conformément aux obligations constitutionnelles, plusieurs mesures législatives et exécutives ont été prises et ont fait l’objet d’un rapport détaillé présenté par l’Égypte au Comité des droits de l’enfant, parmi lesquelles les suivantes :

a)L’article 14 du Code de l’enfance, qui impose de déclarer un nouveau-né dans les quinze jours de la naissance ;

b)L’article 111 du même texte, qui interdit d’infliger la peine de mort, l’emprisonnement à perpétuité ou des peines aggravées à un mineur âgé de moins de 18 ans au moment de l’infraction. Concernant les enfants âgés de plus de 7 ans et de moins de 12 ans reconnus coupables d’infractions constitutives de crimes ou de délits, le tribunal pour enfants est seul compétent pour en connaître et décider du placement de ces enfants en établissements de soins spécialisés ou en centres de protection sociale ;

c)La modification du Code de l’enfance dans le sens d’une réduction de l’âge des enfants pouvant être accueillis en familles de remplacement de 2 ans à 3 mois, complétée par l’instauration d’un système de placement des enfants privés de protection familiale en familles d’accueil, la création d’un réseau de garderies et d’institutions d’accueil, la mise en place d’institutions de protection sociale au profit des enfants présentant un risque de délinquance et d’un système de centres d’observation où les mineurs de moins de 15 ans ont vocation à être placés en détention provisoire sur la base d’une décision de justice, en attendant l’issue de leur procès. L’ensemble de ces mesures est complété par la mise en place de bureaux de suivi social chargés d’examiner les dossiers transmis par le ministère public, la police ou les centres d’observation, afin d’établir des programmes de traitement et de prise en charge des enfants par leur famille ;

d)La modification du Code de l’enfance pour mettre fin aux mesures pénales contre des mineurs de moins de 18ans ;

e)La modification de l’article 2 de la loi no 154 de 2004 sur la nationalité, ce qui a permis à l’Égypte de lever, en 2007, sa réserve à l’article 2 (par. 9) de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et d’accorder la nationalité égyptienne à toute personne née d’un père égyptien ou d’une mère égyptienne, ou née en Égypte de parents inconnus. En effet, les enfants trouvés sur le territoire égyptien sont présumés, jusqu’à preuve du contraire, être nés en Égypte. Toute personne ayant une nationalité étrangère en plus de la nationalité égyptienne doit informer le Ministre de l’intérieur de son souhait de renoncer à la nationalité égyptienne. Concernant les mineurs, la demande de renonciation à la nationalité doit être effectuée par son représentant légal, sa mère ou, à défaut, par celui qui en a la garde. Un mineur qui cesse d’être un ressortissant égyptien en vertu de ce qui précède peut, dans l’année qui suit sa majorité, demander à récupérer sa nationalité ;

f)L’adoption d’une circulaire par le Procureur général (no 7 de 2018) visant à rendre opérationnels les comités de protection de l’enfance et à mettre en place un système de justice pénale pour enfants. Une ligne téléphonique d’urgence reliant le ministère public au Conseil national de l’enfance et de la maternité a également été mise en place, afin de faciliter la transmissions au ministère public des signalements de maltraitance d’enfants reçus par le Conseil. Les affaires de violence à l’égard des enfants ont été confiées à la Direction générale des droits de l’homme du Bureau du Procureur général, pour qu’elle puisse enquêter sur les signalements reçus par le Conseil national de l’enfance et de la maternité, assurer l’inspection périodique des institutions de protection de l’enfance et veiller à ce qu’elles répondent effectivement aux besoins des enfants qui y résident.

Article 25

136.L’article 9 de la Constitution de 2014 affirme la nécessité de garantir l’égalité des chances de tous les citoyens, sans aucune discrimination. L’article 53 dispose que les citoyens sont égaux devant la loi ainsi qu’en droits, libertés et devoirs publics, sans discrimination fondée sur la religion, la croyance, le sexe, l’origine, la race, la couleur, la langue, le handicap, le niveau social, l’affiliation politique ou l’appartenance géographique, ou pour tout autre motif. Afin de concrétiser le droit d’accès de tous les citoyens aux services publics sur la base de l’équité, de l’égalité des chances et de la non-discrimination, les articles 17, 18, 19, 46, 78 et 79 de la Constitution s’engagent à fournir des services de sécurité sociale et à mettre en place un système complet d’assurance maladie au profit de tous les Égyptiens, ainsi qu’à garantir à chaque citoyen le droit à la santé, aux soins, à l’éducation, à un environnement sain, à un logement adéquat et sûr, à une alimentation saine et suffisante et à une eau potable. Tous ces points ont vocation à être abordés de manière détaillée dans le rapport périodique de l’Égypte, à soumettre au Comité des droits économiques, sociaux et culturels.

137.Afin de garantir le droit de vote et de candidature aux élections, en tant que liberté publique reconnue à tout citoyen afin qu’il puisse prendre part directement ou indirectement à la vie publique en choisissant ses dirigeants et ses représentants et conformément aux dispositions du paragraphe 6 de l’observation générale no 25 du Comité, l’article 87 de la Constitution reconnaît à tout citoyen le droit de voter et d’être élu et d’exprimer ses opinions par voie de référendum. La Constitution va au-delà de ces garanties en considérant la participation à la vie publique, via l’exercice de ces droits, comme un devoir national s’imposant à tous les citoyens. Elle prévoit en outre l’inscription automatique des noms des citoyens sur les listes électorales dès lors qu’ils répondent aux critères requis pour être électeurs, ainsi que la révision régulière des listes électorales, conformément à la loi, de même que l’obligation de veiller à la régularité des procédures électorales et référendaires, à leur impartialité et à leur intégrité. Elle interdit en outre l’utilisation de fonds publics, d’organismes gouvernementaux, d’établissements publics, de lieux de culte, d’établissements du secteur privé, d’organisations non gouvernementales et d’associations à des fins politiques et électorales et garantit la tenue d’élections libres et honnêtes assurant la libre expression de la volonté des électeurs. L’article 88 impose de protéger les intérêts des Égyptiens expatriés et de garantir leurs droits et libertés, ainsi que de leur permettre d’accomplir leurs devoirs publics envers l’État et la société et de contribuer au développement de la nation.

138.En ce qui concerne le cadre constitutionnel régissant les chambres parlementaires, l’article 102 dispose que la Chambre des représentants est constituée de 450 membres élus au suffrage universel direct et secret, où les femmes occupent au moins un quart des sièges. Les candidats à la Chambre des représentants doivent être Égyptiens, jouir de leurs droits civils et politiques, être titulaires d’un certificat de fin d’études du cycle de l’enseignement de base et âgés de 25 ans révolus au jour de l’ouverture des candidatures. La loi détermine les autres conditions d’éligibilité, le système électoral et le découpage des circonscriptions, en tenant compte de la représentation équitable de la population, des provinces et des électeurs.

139.Les modifications apportées à la Constitution en avril 2019 ont notamment abouti à créer un sénat. Conformément aux articles 248 et 249, les missions du Sénat consistent en des études et propositions relatives à ce qu’il estime opportun en vue de consolider la démocratie, promouvoir la paix sociale, les éléments de base de la société et ses valeurs suprêmes, les droits, libertés et devoirs publics, renforcer le système démocratique et élargir sa portée, ainsi qu’exprimer des avis au sujet des propositions de révision de la Constitution, des projets de Plans de développement économique et social, des traités de paix et d’alliance et de tous les instruments relatifs aux droits souverains. Le Sénat est également habilité à émettre des avis au sujet des divers projets de lois, y compris ceux visant à compléter la Constitution, à la demande du Président de la République ou de la Chambre des représentants, ainsi qu’au sujet des questions que peut lui transmettre le Président de la République concernant la politique générale de l’État, les relations avec les pays arabes ou la politique étrangère.

140.L’article 250 précise que le Sénat est composé d’un nombre de membres déterminé par la loi, qui ne peut être inférieur à 180, dont les deux tiers sont élus au suffrage universel direct et secret, le tiers restant étant composé de membres désignés par le Président de la République. L’article 251 fixe les critères à remplir pour se présenter aux élections sénatoriales, à savoir être de nationalité égyptienne, jouir de ses droits civils et politiques, être titulaire d’un diplôme universitaire ou d’un titre équivalent et âgé de 35 ans révolus au jour de l’ouverture des candidatures. La loi détermine les autres conditions d’éligibilité, le système électoral et le découpage des circonscriptions, en tenant compte de la représentation équitable de la population, des provinces et des électeurs.

141.Conformément à l’observation générale no 25 du Comité, une commission électorale nationale a été créée en application de l’article 208 de la Constitution, en tant qu’instance indépendante constituée uniquement de magistrats, dotée d’une compétence exclusive en matière d’organisation de référendums et d’élections présidentielles, législatives et locales, incluant l’établissement et la mise à jour des listes électorales, la proposition du découpage des circonscriptions électorales, la définition des règles de publicité et de financement des campagnes électorales, le contrôle des dépenses électorales et de leur transparence, ainsi que les mesures visant à faciliter le vote des Égyptiens vivant à l’étranger et toutes autres mesures susceptibles d’être prises au cours d’un processus électoral, de son lancement jusqu’à l’annonce des résultats. En mars 2018, la Commission nationale a supervisé les élections présidentielles, qui ont opposé deux candidats et enregistré la participation de 41,16 % d’électeurs nationaux, y compris ceux résidant à l’étranger. Le vainqueur a obtenu 97 % des suffrages exprimés. En avril 2019, la Commission nationale a assuré la supervision d’un référendum sur l’opportunité d’apporter quelques modifications à la Constitution, auquel ont participé 44,4 % d’électeurs égyptiens résidant tant en Égypte qu’à l’étranger, qui ont voté en faveur de ces modifications à une majorité de 88,8 %.

142.Concernant le cadre législatif de l’organisation des référendums, l’article 1 de la loi no 45 de 2014 encadrant l’exercice des droits politiques met à la charge de toute personnes de nationalité égyptienne, à partir de l’âge de 18 ans, l’obligation de voter lors des référendums et des élections présidentielles, parlementaires et locales. Les officiers et les membres des forces armées, actifs et de réserve, ainsi que les officiers et agents de police, ne bénéficient pas du droit de vote tout au long de leur carrière. L’article 2 désigne les personnes temporairement privées de leurs droits politiques. L’article 13 pose l’obligation d’inscrire toute personne ayant le droit d’exercer ses droits politiques sur les listes électorales. Les personnes ayant acquis la nationalité égyptienne par naturalisation ne peuvent être inscrites sur ces listes avant l’écoulement d’un délai minimal de cinq ans à compter de la date d’acquisition de la nationalité. L’article 40 exige que le scrutin se déroule sous l’entière supervision de la Commission électorale nationale et lui confie le soin de mettre en place des sous-commissions chargées de superviser les opérations de vote et de dépouillement, sous la présidence d’un membre des autorités judiciaires.

143.Selon l’article 1 de la loi no 46 de 2014 relative à la Chambre des représentants, la première formation parlementaire faisant suite à l’entrée en vigueur de la Constitution de 2014 se compose de 568 membres élus au suffrage universel direct et secret, le Président de la République étant habilité à désigner au maximum 5 % d’entre eux, conformément aux dispositions prévues par ce texte. L’article 4 prévoit le découpage des provinces en un certain nombre de circonscriptions électorales à scrutin uninominal et de 4 circonscriptions à scrutin de liste, dont 2 de 15 sièges et 2 autres de 45 sièges. La même loi exige que le nombre d’élus au scrutin uninominal dans chaque circonscription soit proportionnel au nombre d’habitants et d’électeurs, afin d’assurer une représentation équitable de la population, des provinces et des électeurs. D’après l’article 5, les listes électorales doivent inclure des candidats représentant les chrétiens, les ouvriers, les paysans, les jeunes, les personnes handicapées, les Égyptiens vivant à l’étranger et les femmes, dans le cadre de l’instauration d’une discrimination positive en leur faveur. L’article 8 fixe les critères d’éligibilité pour se présenter aux élections législatives. L’article 11 interdit la candidature des membres des forces armées, de la police, des services des renseignements généraux, de l’Instance chargée du contrôle administratif, de la magistrature et des postes ministériels, sauf s’ils démissionnent de leurs postes.

144.Dans le cadre du contrôle relatif au respect, par le législateur, de l’exigence d’une représentation équitable de la population posée par l’article 102 de la Constitution au titre du découpage des circonscriptions électorales, la Haute Cour constitutionnelle a prononcé l’inconstitutionnalité de l’article 3 du décret-loi présidentiel no 202 de 2014 concernant les circonscriptions électorales au scrutin uninominal, au motif de l’irrespect de la règle de représentation équitable de la population et des électeurs et de l’établissement d’une discrimination, du fait que le nombre de citoyens ayant vocation à être représentés par chaque membre de l’assemblée était différent d’une circonscription à l’autre, sans aucune raison objective.

145.Conformément à l’article 25 (al. c) du Pacte, l’article 14 de la Constitution consacre le droit d’accès de tous les citoyens à la fonction publique, sur la base du mérite, sans favoritisme ni intercession. Il impose à l’État de garantir les droits des fonctionnaires, de les protéger et de veiller aux conditions d’exercice de leurs missions d’intérêt général. Conformément au paragraphe 24 de l’observation générale no 25 du Comité, la loi sur la fonction publique, en tant que texte applicable à tous les employés de l’administration publique a été promulguée. Son article 1 rappelle l’exigence constitutionnelle interdisant la discrimination entre fonctionnaires pour des motifs de religion, de sexe ou pour toute autre raison. Selon l’article 12, les nominations aux emplois dans la fonction publique relèvent du Président de la République, ou de toute autre autorité désignée par ses soins, sur la base de la compétence et du mérite, sans favoritisme ni intercession, suite à la publication sur le site du Gouvernement égyptien d’informations relatives aux postes et aux compétence requises afin d’y pourvoir, conformément au principe de l’égalité des chances entre tous les citoyens. Les examens préalables aux nominations dans la fonction publique sont organisés par l’Agence centrale des affaires administratives et de la gestion, dont le Comité de sélection, supervisé par le ministre compétent, veille à ce que seuls les lauréats aux examens puissent occuper les postes ouverts. En cas d’égalité, il est tenu compte du classement des candidats afin de les départager par rapport aux critères requis. S’agissant de candidats de même grade, la priorité est accordée à celui ayant obtenu la note la plus élevée, puis à celui doté de la plus haute qualification, ensuite au plus ancien dans le grade et enfin au plus âgé. Les articles 14, 21, 29, 30 et 69 définissent les conditions de nomination, de promotion et de fin de service dans la fonction publique, sans aucune discrimination.

Article 26

146.Les constitutions égyptiennes successives se sont efforcées de consacrer le principe de l’égalité de tous les citoyens devant la loi et de l’égalité entre eux en droits et en devoirs, sans discrimination. À l’instar des constitutions précédentes, celle de 2014 ne reconnaît pas le concept de minorité et souligne dans son préambule le principe de citoyenneté et d’égalité entre tous les membres de la communauté nationale. L’article 4 dispose ce qui suit : « La souveraineté appartient au peuple, qui l’exerce et la protège. Il est la source de toute autorité et sauvegarde l’unité nationale, fondée sur les principes de l’équité, de la justice et de l’égalité des chances au profit de tous les citoyens. ». L’article 9 énonce ce qui suit : « L’État garantit l’égalité des chances entre tous les citoyens sans discrimination. ». Selon l’article 53 : « Les citoyens sont égaux devant la loi, ainsi qu’en droits, libertés et devoirs publics, sans discrimination fondée sur la religion, la croyance, le sexe, l’origine, la race, la couleur, la langue, le handicap, le niveau social, l’affiliation politique ou l’appartenance géographique, ou pour toute autre raison. ». Afin de renforcer le principe de l’égalité de tous devant la loi, le même article incrimine la discrimination et impose l’adoption de mesures destinées à éliminer toutes les formes de discrimination.

147.Dans plusieurs décisions, la Haute Cour constitutionnelle a rappelé que les constitutions égyptiennes successives, notamment la Constitution de 1923 et celle actuellement en vigueur, ont toutes consacré le principe de l’égalité devant la loi, applicable à tous les citoyens, en tant que fondement de la justice, de la liberté et de la paix sociale, son objectif étant de protéger les droits et libertés des citoyens et de lutter contre toutes les formes de discrimination entravant ou restreignant leur exercice. Il s’agit d’un principe garantissant l’égalité en matière de protection juridique, dont la portée ne se limite pas aux droits et libertés inscrits dans la Constitution, mais s’étend à ceux garantis aux citoyens par le législateur dans les limites de son pouvoir discrétionnaire, à la lumière de ce qu’il estime propre à assurer l’intérêt général. La Haute Cour estime que le principe d’égalité devant la loi suppose l’absence d’une quelconque atteinte à l’égalité de la protection juridique qui puisse être imputable à l’État, qu’il s’agisse du pouvoir législatif ou exécutif, car aucune de ces autorités n’est habilitée à imposer une différence de traitement, sauf si celle-ci est justifiée par des distinctions logiques objectivement liées aux finalités poursuivies par le projet d’acte législatif dont l’adoption est envisagée.

148.Conformément à ce qui précède, de nombreuses lois consacrent explicitement l’égalité et la non-discrimination, ainsi que l’interdiction de la discrimination pour quelque motif que ce soit. C’est notamment le cas de la loi sur la fonction publique, qui interdit la discrimination lors de l’accès aux emplois publics, comme indiqué au paragraphe 145 du présent rapport. L’article 2 de la loi no 182 de 2018 régissant les marchés publics affirme pour sa part que l’un des objectifs de ce texte consiste à promouvoir les principes de bonne gouvernance et l’application des règles de transparence, d’intégrité, de libre concurrence, d’équité, d’égalité des chances et de prévention des conflits d’intérêts. L’article 4 de la loi relative aux organisations syndicales de travailleurs et à la protection du droit syndical accorde à tous les travailleurs, sans discrimination, le droit de fonder des syndicats, d’y adhérer ou de s’en retirer. L’article 4 de la loi no 10 de 2018 sur les droits des personnes handicapées impose à l’État de protéger les droits de ces personnes tels qu’énoncés par ses dispositions ou par tout autre texte sur la base de l’égalité, sans discrimination fondée sur le handicap ou le sexe de la personne handicapée, de leur garantir une égalité effective concernant l’exercice de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales dans tous les domaines et d’éliminer tous les obstacles entravant l’exercice de leurs droits. L’article 4 de la loi sur l’organisation de la presse et des médias et le Conseil supérieur de régulation des médias interdit toute publication ou diffusion de tout produit ou déclaration dont le contenu serait susceptible d’inciter à la discrimination, à la violence, au racisme ou à la haine. L’article 13 de la loi no 181 de 2018 sur la protection du consommateur interdit l’importation, la production et la distribution de produits, ainsi que la publicité relative à ces produits, si ces activités risquent d’établir une discrimination entre citoyens, de les induire en erreur ou d’enfreindre les règles relatives à l’ordre public ou à la morale publique.

Article 27

149.À l’instar des constitutions précédentes, celle de 2014 ne reconnaît pas le concept de minorité, souligne dans son préambule le principe de la citoyenneté et de l’égalité entre les membres de la communauté nationale et incrimine toute forme de discrimination entre citoyens. Plusieurs arrêts de la Haute Cour constitutionnelle ont appliqué ce principe, comme indiqué aux paragraphes 145 à 149 du présent rapport. La Constitution accorde une grande importance à la « citoyenneté », en rapport avec l’État de droit, puisqu’elle en fait le fondement du système républicain démocratique sur lequel repose ce dernier, via la consécration de l’égalité des Égyptiens concernant leurs droits et devoirs constitutionnellement garantis.

150.Les articles 47 et 48 de la Constitution confèrent un caractère obligatoire à la préservation de l’identité culturelle égyptienne, sans distinction quant à la capacité financière ou à la situation géographique, tout en accordant une attention particulière aux régions éloignées et aux groupes les plus démunis. L’article 50 dispose que le patrimoine civilisationnel et culturel, matériel et immatériel de l’Égypte, dans toute sa diversité (pharaonique, copte et islamique), acquis au cours de périodes successives, constitue un patrimoine national et humain qu’il convient de préserver et d’entretenir, au même titre que les divers éléments culturels, architecturaux, littéraires et artistiques contemporains. Il considère également toute dégradation de l’un ou l’autre de ces éléments comme une infraction punie par la loi, tout en accordant une attention particulière à la protection des composantes de la diversité culturelle.

II.Mesures prises pour donner suite aux observations finales que le Comité a formulées à l’issue de l’examen des troisième et quatrième rapports périodiques de l’Égypte

151.La réponse à l’observation figurant au paragraphe 4 du chapitre C, relative à la valeur juridique du Pacte par rapport au droit interne, a été abordée en détail au paragraphe 11 du présent rapport.

152.La réponse à l’observation énoncée au paragraphe 6 du chapitre C concernant l’état d’urgence figure aux paragraphes 13 à 16 du présent rapport.

153.Des réponses détaillées à l’observation faite au paragraphe 7 du chapitre C, concernant l’intensification des efforts en vue d’une meilleure participation des femmes dans tous les domaines, sont fournies dans le rapport présenté par l’Égypte au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

154.En ce qui concerne l’observation formulée au paragraphe 8 du chapitre C, relative à la révision de la loi no 1 de 2000 sur les procédures judiciaires en matière de statut personnel, en ce qu’elle établit une discrimination financière à l’égard des femmes qui demandent le khul en contrepartie de l’abandon de tous leurs droits financiers, il convient de préciser que la loi proclame l’égalité entre hommes et femmes dans ce domaine, en accordant à chaque membre d’un couple le droit d’intenter une procédure de divorce pour préjudice subi par le fait de l’autre conjoint. Ainsi, l’épouse peut saisir la justice et demander le divorce pour cause de dommage causé par son époux et il lui incombe alors de prouver le préjudice par tous les moyens de preuve. En cas de divorce, l’épouse bénéficie de tous ses droits charaïques, tels que le versement de la dot (Sadaq) oudu don de consolation (Mout ’ â), la pension due au titre de la période de viduité et la restitution de ses biens matrimoniaux, bijoux (chabka) et autres présents. La loi accorde à l’épouse le droit de demander le divorce par Khul si la vie commune devient impossible, sans obligation d’apporter la preuve d’un quelconque préjudice. Cette demande n’entraîne pas la renonciation de l’épouse à son droit à la restitution de ses biens matrimoniaux, bijoux et autres présents. Elle n’éteint pas non plus le droit des enfants à une pension alimentaire, au logement, à l’éducation et aux soins de santé. L’épouse qui obtient le divorce par Khul perd son droit à la dot (Sadaq),au don de consolation (Mout ’ â) et à la pension due au titre de la période de viduité, conformément à la loi islamique, dont les principes constituent la source principale de la législation selon la Constitution. Ces dispositions s’appliquent aux musulmans, tandis que les communautés chrétiennes et juives égyptiennes sont dotées chacune d’un statut personnel propre. La Constitution garantit à toute personne le droit d’avoir ou d’adopter une religion ou une croyance de son choix qui satisfait sa conscience et lui apporte un réconfort.

155.Concernant l’observation figurant au paragraphe 9 du chapitre C, portant sur le réexamen des dispositions pénales discriminatoires qui ne traitent pas sur un pied d’égalité les hommes et les femmes au regard de l’adultère, un projet de loi garantissant aux femmes l’égalité avec les hommes en ce qui concerne les droits et les peines applicables en cas d’adultère est actuellement à l’étude.

156.La réponse à l’observation formulée au paragraphe 10 du chapitre C, concernant l’élimination de toute discrimination entre hommes et femmes en matière de transmission de la nationalité aux enfants, figure aux paragraphes 97 et 135 e) du présent rapport, qui affirment que la nationalité est désormais un droit accordé aux personnes nées d’un père égyptien ou d’une mère égyptienne, conformément aux dispositions de la Constitution de2014.

157.Il a été donné suite à l’observation énoncée au paragraphe 11 du chapitre C concernant la lutte contre la pratique des mutilations génitales féminines et la sensibilisation à ce phénomène dans les rapports présentés par l’Égypte au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et au Comité des droits de l’enfant.

158.La question évoquée à l’observation formulée au paragraphe 12 du chapitre C au sujet de la peine de mort et des garanties entourant son application a été traitée aux paragraphes 22 à 24 du présent rapport.

159.Il a été donné suite à l’observation faite au paragraphe 13 du chapitre C, concernant les enquêtes relatives aux infractions de torture et à la privation arbitraire de la vie, aux paragraphes 26,29 à 34 et 61 à 77 du présent rapport.

160.La réponse à l’observation figurant au paragraphe 14 du chapitre C, relative aux règles juridiques régissant l’arrestation, la détention provisoire et le droit d’accès à un avocat au cours de toutes les étapes des enquêtes et des procès, a été fournie de manière détaillée aux paragraphes 13 à 20, 46 à 54 et 66 du présent rapport.

161.La réponse à l’observation énoncée au paragraphe 15 du chapitre C concernant le contrôle et l’inspection des prisons et de la plupart des lieux de détention a été donné aux paragraphes 56 à 77 du présent rapport.

162.La question évoquée dans l’observation figurant au paragraphe 16 a) du chapitre C, relative à la définition du terrorisme et aux conséquences qui en découlent en termes d’augmentation du nombre d’actes passibles de la peine capitale, a été abordée aux paragraphes 17 à 20 et 22 à 24 du présent rapport.

163.La réponse à l’observation énoncée au paragraphe 16 b) du chapitre C concernant les garanties offertes aux accusés devant les tribunaux militaires a été fournie aux paragraphes 93 à 94 du présent rapport.

164.La question abordée par l’observation formulée au paragraphe 16 c) du chapitre C relative aux mesures prises au titre de la lutte contre le terrorisme a été traitée aux paragraphes 13 et 17 à 20 du présent rapport.

165.Au sujet de l’observation figurant au paragraphe 17 du chapitre C concernant la liberté de culte des bahaïs, il a été souligné dans les développements consacrés aux mesures prises pour donner effet à l’article 18 du Pacte que la liberté de croyance, de pratique religieuse et de construction de lieux de culte étaient des principes constitutionnels bien établis consacrés par les constitutions égyptiennes successives, du fait de leur liaison étroite avec la citoyenneté, considérée par l’article 1 de la Constitution de 2014 comme le fondement du système républicain démocratique, en tant que garantie reconnue à toute personne d’avoir ou d’adopter une religion ou une croyance de son choix satisfaisant sa conscience et lui apportant un réconfort. Concernant la liberté de professer et de pratiquer sa religion, elle fait l’objet des seules restrictions nécessaires à la protection de l’ordre public, de la morale publique et des droits et libertés fondamentaux d’autrui. Sur la base de ce qui précède, la Haute Cour constitutionnelle (arrêt relatif au pourvoi no153, 32eannée judiciaire, audience du 4 février 2017) a estimé que la liberté religieuse était inhérente à la personne humaine et ne pouvait être ni suspendue, ni limitée, conformément aux dispositions de l’article 92 (par. 1) de la Constitution. Elle a ajouté que cette notion signifie principalement que nul ne peut être forcé à embrasser une religion en laquelle il ne croit pas ou obligé à renoncer à une religion à laquelle il se serait converti, ou encore à proclamer son appartenance à une religion ou à faire l’apologie d’une religion au détriment des autres, en les niant, les dénigrant ou les traitant avec mépris, affirmant que toutes les religions doivent se tolérer et se respecter mutuellement. La liberté de pratique religieuse et d’édification de lieux de culte est une manifestation extérieure de la liberté de croyance, en tant que traduction de l’intériorité de la foi en actes concrets. La Constitution énonce expressément que la liberté de pratique religieuse s’applique uniquement aux adeptes des trois religions célestes (islam, christianisme, judaïsme) et confie à la loi le soin de réglementer ce droit, d’une manière ne portant pas atteinte à son essence ou à sa substance et n’imposant que les restrictions indispensables à la protection de l’ordre public et de la morale publique, conformément aux dispositions de l’article 18 (par. 3) du Pacte. Par ailleurs, dans sa décision relative au pourvoi no12780 (61eannée judiciaire, audience du 29janvier 2008), la Cour du contentieux administratif a prononcé un sursis à exécution d’une décision du Département des affaires civiles refusant de rectifier la case « religion » des certificats de naissance ou des cartes d’identité personnelles de citoyens portant par erreur la mention « bahaï » ou « sans » au niveau de cette rubrique. En se fondant sur le principe que nul ne peut être contraint d’adhérer à une religion divine, la Cour a estimé que s’il n’est fait mention dans la case « religion » des documents d’état civil d’aucune religion révélée, chacun a le droit d’obtenir une carte d’identité nationale ne mentionnant aucune affiliation religieuse ou marquée d’un signe spécifique, attestant qu’elle n’adhère à aucune des trois religions célestes. Il est accordé à ces citoyens le droit de pratiquer librement leurs rites à domicile, mais ils ne bénéficient pas du droit d’édifier des lieux de culte, qui est réservé aux trois religions reconnues en Égypte.

166.Il a été donné suite à l’observation énoncée au paragraphe 18 du chapitre C, concernant les appels à la haine raciale ou religieuse qui constituent une incitation à la discrimination, aux paragraphes 109, 116 et 117 du présent rapport.

167.Au sujet de l’observation formulée au paragraphe 19 du chapitre C relative à l’incrimination des relations sexuelles privées entre adultes consentants, il convient de signaler la promulgation de la loi no 10 de 1961 sur la lutte contre la prostitution, qui a fait suite à l’adhésion de l’Égypte à la Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui en 1959. Ladite loi incrimine tout comportement visant à inciter une personne à commettre des actes immoraux ou à se livrer à la prostitution, à l’employer, la débaucher ou la séduire à ces fins, ou à faciliter son transfert vers ou depuis l’étranger pour qu’elle soit exploitée à ces fins. La loi réprime plus sévèrement les actes commis au moyen de la ruse, de la force, de la menace ou d’un abus de pouvoir. Elle est également plus sévère si la victime est âgée de moins de 21 ans, voire de moins de 16 ans, ou si l’auteur est l’un de ses ascendants ou une personne chargée de son éducation ou de sa tutelle ou son employé de maison. La loi réprime également l’aide apportée à l’exercice d’activités de prostitution ou d’exploitation d’autrui à des fins de prostitution. La législation ne réprime donc pas les relations sexuelles privées entre adultes consentants à moins qu’elles ne soient assimilées à une forme de prostitution ou de traite des personnes.

168.Les paragraphes 75, 108 et 109 du présent rapport décrivent les mesures qui ont été prises pour donner suite à l’observation formulée au paragraphe 20 des observations finales du Comité concernant le renforcement de l’éducation aux droits de l’homme et de la prévention, par l’éducation, de toutes les manifestations d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction.

169.La question abordée dans l’observation figurant au paragraphe 21 du chapitre C, qui concerne la constitution d’organisations non gouvernementales, a été traitée aux paragraphes 123 et 124 du présent rapport.

170.Concernant l’observation formulée au paragraphe 22 du chapitre C relative à la création des partis politiques, il convient de signaler que des modifications ont été apportées à la loi no40 de 1977 sur les partis politiques par la loi no12 de 2011. Désormais, les partis politiques peuvent être créés sur simple déclaration écrite déposée auprès d’une commission indépendante chargée de l’examen et de l’analyse de ces déclarations, qui est composée uniquement de magistrats : elle est présidée par le premier substitut du Président de la Cour de cassation et composée de six juges issus de la Cour de cassation, des cours d’appel et du Conseil d’État. En l’absence d’objection de la commission, la création d’un parti politique est réputée approuvée trente jours après le dépôt de la déclaration. Si la commission émet une objection, elle doit l’adresser dans les huit jours à la Haute Cour administrativepour confirmation ou infirmation ; à défaut, l’objection est réputée inexistante. L’article 5 de la Constitution de 2014 renforce ces principes en affirmant que le pluralisme politique et le multipartisme constituent les piliers fondamentaux du système politique de l’État. L’article 74 accorde à tous les citoyens le droit de créer des partis sur simple déclaration conforme à la loi, interdit la création de partis politiques basés sur la religion ou sur une discrimination fondée sur le sexe, l’origine ou l’appartenance confessionnelle ou géographique, ou destinés à l’exercice d’activités hostiles aux principes de la démocratie, secrètes ou ayant un caractère militaire ou paramilitaire. En outre, la Constitution n’autorise la dissolution d’un parti politique que sur décision judiciaire. Il existe 92partis politiques en Égypte, dont 20 sont actuellement représentés à la Chambre des représentants.

171.En ce qui concerne l’observation formulée au paragraphe 23 du chapitre C au sujet de la large diffusion des rapports périodiques de l’État et des observations finales du Comité, il convient de signaler que les conclusions et recommandations du Comité, ainsi que ses observations générales, ont été diffusées auprès des organismes publics compétents afin qu’ils les examinent et les prennent en compte dans la mesure du possible, comme en témoignent les efforts dont il est fait mention dans le présent rapport.

Conclusion

172.Le présent rapport décrit les mesures concrètes et constantes que l’Égypte prend afin d’honorer les engagements qui sont les siens au titre du Pacte. Si elle est encore loin des objectifs à atteindre, l’Égypte poursuit ses efforts, malgré les difficultés économiques et la menace terroriste qui pèse sur la sécurité de sa population et qui entrave son action en faveur du développement. L’Égypte réaffirme sa volonté de continuer à collaborer avec les mécanismes conventionnels internationaux et régionaux en vue d’améliorer la situation des droits de l’homme dans le pays et dans le monde.

Notes