Trente-troisième session

Compte rendu analytique de la 690e séance

Tenue au Siège, à New York, le vendredi 8 juillet 2005, à 15 heures

Présidente :Mme Manolo(Vice-Présidente)

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième, quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques du Guyana (suite)

En l’absence de Mme Manolo, Mme Pimentel, Vice-Présidente, prend la présidence.

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième, quatrième, cinquième et sixième rapports combinés du Guyana (suite) (CEDAW/C/GUY/3-6; CEDAW/PSWG/2005/II/ CRP.1/Add.5 et CRP.2/Add.5)

À l’invitation de la Présidente, la délégation du Guyana prend place à la table du Comité.

Articles 10 à 14 (suite)

Mme Dairiam note que la section 17 des réponses fournies par le Guyana à la liste des problèmes et questions (CEDAW/PSWG/2005/II/CRP.2/Add.5) dit que le Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté ne s’adresse pas spécifiquement aux femmes pauvres, mais que le Bureau de la condition féminine entreprendra des initiatives axées sur les stratégies identifiées dans le document. Il est également dit dans les réponses que les programmes visant directement à réduire la pauvreté relevant de la responsabilité du Ministère des finances ne sont pas spécifiquement orientés vers les femmes (sect. 18). Bien que certaines des dispositions relatives au « filet de sécurité » s’adressent aux femmes, elles sont essentiellement des mesures palliatives. Vu la haute incidence de la pauvreté parmi les femmes et les ménages ayant une femme à leur tête au Guyana, elle est anxieuse de connaître les progrès accomplis par le Bureau de la condition féminine en matière d’intégration de la parité entre les sexes dans les principaux programmes de réduction de la pauvreté et quelles sont les instances chargées de mettre en oeuvre les stratégies sexospécifiques élaborées par le Bureau. Sans données ventilées par sexe, il est difficile de savoir si les femmes bénéficient vraiment des programmes de lutte contre la pauvreté.

Mme Khan dit qu’il est inquiétant que le taux de participation des femmes à la main-d’oeuvre n’ait pas augmenté au cours de la dernière décennie ou plus. Vu le grand nombre de femmes chefs de famille vivant dans la pauvreté, elle se demande si les femmes subviennent à leurs besoins et aux besoins de leur famille principalement par le biais d’emplois occasionnels ou de travail au noir. Le Guyana, qui a de riches ressources naturelles et bénéficie de conditions macroéconomiques stables, est bien placé pour s’attaquer à la réduction de la pauvreté, mais si les principales causes de la pauvreté ne sont pas examinées, les stratégies élaborées risquent d’être inappropriées. Elle se demande si la pauvreté est considérée principalement comme un manque de revenu ou, plus fondamentalement, comme un manque de moyens de subsistance durables.

La situation prévalant actuellement au Guyana en ce qui concerne le VIH/sida, dans le groupe d’âge de 15 à 34 ans où il y a plus de femmes que d’hommes affectés, semble devenir la tendance mondiale. Ce déséquilibre met en lumière la nécessité d’élaborer des stratégies sexospécifiques appropriées. Les organisations non gouvernementales oeuvrant en faveur des victimes du VIH/sida sont souvent mentionnées, mais elle aimerait être assurée que le gouvernement participe directement aux travaux. Elle apprécierait également des éclaircissements sur les lois concernant les congés de maternité dans les secteurs public et privé au Guyana.

Mme Tavares da Silva dit que les informations concernant le VIH/sida fournies dans les réponses à la liste de problèmes et questions (CEDAW/PSWG/2005/II/CRP.2/Add.5) peignent un tableau tragique : les femmes deviennent de plus en plus vulnérables à l’infection – 5 femmes contre 1 homme ont des chances de devenir séropositives – du fait que leur accès limité aux moyens de subsistance les rend impuissantes dans leurs relations. De plus, il semble que les campagnes de sensibilisation ont simplement pour but d’enseigner aux femmes comment se protéger alors qu’elles devraient également apprendre aux hommes à être des partenaires responsables et à résoudre un problème qu’ils ont créé en grande partie. Une attitude semblable semble prévaloir en ce qui concerne l’approche adoptée en matière de prostitution : les actes de prostitution ont été criminalisés mais non ceux des clients ou des proxénètes. Dans ce cas également, les hommes sont largement responsables et devraient assumer la responsabilité de trouver une solution au problème. Certains pays ont adopté des méthodes novatrices en vue de changer les attitudes; par exemple, le Canada a créé les « Schools for Johns » (Écoles pour les michetons).

Mme Shadick (Guyana) dit que, dans le domaine de l’éducation, toutes les disparités existant actuellement favorisent les femmes. Les filles ont un taux d’abandon inférieur à celui des garçons et 61 % des étudiants des universités sont des femmes. Le Guyana offre un enseignement élémentaire et secondaire gratuit et une formation gratuite aux enseignants et aux infirmiers, les droits d’inscription dans les universités sont peu élevés et le gouvernement accorde des prêts d’études. Traditionnellement, les taux d’alphabétisation au Guyana sont élevés, bien que l’analphabétisme fonctionnel puisse représenter un problème pour certains types d’emploi.

Il n’existe aucune discrimination légale en matière de demande d’emploi. À l’heure actuelle, il y a plus de femmes que d’hommes employés dans la fonction publique; les femmes sont moins représentées dans les postes de rang supérieur, mais la situation évoluera sûrement du fait que les femmes représentent 52 % des cadres moyens. Dans l’ensemble du pays, les femmes font la plupart des travaux non rémunérés aussi bien à l’intérieur qu’en dehors du foyer. Le Cabinet examine actuellement la possibilité de faire participer les chefs de famille au système d’assurance national afin de permettre aux femmes travaillant au foyer d’avoir droit aux prestations.

En réponse aux questions touchant la manière dont les femmes bénéficient des programmes de lutte contre la pauvreté, elle fait observer qu’avant de soumettre le Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté aux donateurs, des consultations ont été tenues dans l’ensemble du pays, y compris dans les régions rurales et l’arrière-pays, auxquelles la majorité des participants ont été des femmes qui ont soulevé les questions qu’elles considéraient les plus importantes à leur égard. Par exemple, dans les communautés amérindiennes, alors que les hommes chassent et pêchent, les femmes cultivent les récoltes et elles ont demandé que les transports soient améliorés pour leur permettre de transporter plus facilement leurs produits aux marchés. Un autre exemple est la décision, dont ont directement bénéficié les ménages ayant une femme pour chef de famille, de fournir des uniformes scolaires aux enfants des familles ne pouvant pas se permettre de les acheter. Une fois en place, les programmes de réduction de la pauvreté ont été évalués à intervalles dans chaque région, tâche à laquelle les femmes ont largement participé. Une évaluation a été entreprise en 2003 et les observations faites par les communautés sont mises en oeuvre; une autre série d’évaluations a eu lieu en 2005 et les questions soulevées sont actuellement rassemblées. En conséquence, bien que des montants spécifiques ne soient pas affectés aux femmes dans le budget, les programmes sont conçus pour répondre aux besoins qu’elles expriment.

Pour certains ménages, les envois de fonds de l’étranger représentent une source de revenus lorsque les hommes émigrent pour trouver du travail, ce qui est un phénomène courant au Guyana. En ce qui concerne les congés de maternité, toute personne salariée contribue au système d’assurance national et chaque salariée enceinte a droit à 13 semaines de congé de maternité à plein salaire et peut prendre plus de temps à mi-salaire. Il a été fait observer que le Guyana est un pays stable sur le plan macroéconomique. Cela est vrai mais a également eu un coût considérable : le pays paie une lourde dette extérieure et les ressources disponibles pour les programmes sociaux ne sont pas élevées. Les contraintes budgétaires expliquent aussi la pauvreté des données ventilées par sexe, bien que des progrès aient été accomplis à cet égard dans le questionnaire du recensement.

Il est vrai que plus de femmes que d’hommes sont affectées par le VIH/sida. Outre les facteurs déjà mentionnés, le problème est aggravé dans certains segments de la population par le refus des parents d’accepter que leurs enfants sont devenus sexuellement actifs et doivent donc se protéger. L’enseignement a remédié à cette attitude. Un autre facteur est le refus des hommes d’utiliser des condoms avec leurs propres femmes. Une stratégie mise en oeuvre consiste à aider les femmes à améliorer leurs capacités personnelles de négociation. Le gouvernement ne compte pas seulement sur les organisations non gouvernementales pour mettre en oeuvre les programmes de lutte contre le VIH/sida. Le Ministère de la santé exécute lui-même de nombreux programmes; les clubs de santé qu’il a créés dans les écoles secondaires n’en sont qu’un exemple. Toutefois, le financement que les donateurs accordent aux projets exige souvent la participation d’ONG.

Jusqu’à présent, être client d’une prostituée ne représente pas un délit aux termes de la loi sur les délits sexuels, mais le gouvernement examine la situation. Cependant, comme la prostitution, le proxénétisme et le maintien d’un bordel sont considérés comme des délits. Le gouvernement a soumis un projet de loi pour faire passer de 13 à 16 ans l’âge du consentement, mais le projet est au stade des consultations et fait l’objet d’une large opposition du public.

Les amendements récemment apportés à la Constitution pour y incorporer tous les instruments des droits de l’homme auxquels le Guyana est partie, y compris la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, rendent automatiquement la Convention applicable en droit guyanien.

Mme Morvai, déclarant apprécier le dialogue constructif tenu avec la délégation guyanienne, dit que, bien qu’il soit important que les femmes reçoivent une éducation concernant leur sexualité, il est encore plus important – et cela figure au coeur de la Convention – que les hommes soient éduqués quant à l’image qu’ils ont de leur masculinité et à l’idée qu’ils se font que les femmes ne sont que des objets sexuels. Beaucoup de pratiques discriminatoires douloureuses dont souffrent les femmes découlent de la croyance qu’ont certains hommes qu’ils ont le droit acquis d’exprimer leur sexualité sans être contraints de considérer les femmes comme des personnes ayant des droits.

Mme Dairiam, tout en se félicitant du fait que, selon le rapport, le Ministère de la santé du Guyana élabore un programme traitant des questions sanitaires sexospécifiques, note que l’éventail des questions figurant sur la liste n’était pas suffisant pour être considéré holistiquement comme représentant la santé des femmes. Elle prie instamment le Gouvernement guyanien de se référer à la recommandation générale no 24 du Comité qui définit la santé des femmes et prie les États parties de traiter de tous ses aspects. Elle est heureuse de noter que le gouvernement continue d’élargir et d’améliorer son réseau sanitaire, mais aimerait avoir des données sur la couverture actuelle des installations sanitaires, le ratio de la population par installation sanitaire aux différents niveaux des soins de santé. Il est également dit que les hommes et les femmes ont un accès égal aux services de santé, mais dans la pratique les femmes y ont-elles le même accès? La situation doit être suivie de plus près. Se félicitant du plan consistant à accroître progressivement les dépenses publiques en matière de santé à 10 % du produit intérieur brut d’ici 2010, elle aimerait savoir quel est le pourcentage actuel et si l’augmentation se poursuit dans les délais prévus. Le rapport dit qu’il y a eu une réduction importante du taux de mortalité maternelle mais ne donne pas de détails; la délégation pourrait-elle fournir des statistiques? Quelles initiatives ont été prises pour régler la question? Dans quelle mesure le faible taux de prévalence d’utilisation des contraceptifs a-t-il affecté les taux de fécondité, et représente-t-il un problème?

Mme Tan demande combien de femmes rurales ont bénéficié des puits dont l’installation est décrite au paragraphe 14.12 du rapport en ce qui concerne leur accès durable à de l’eau potable et combien de puits supplémentaires seraient nécessaires pour couvrir la population rurale dans son ensemble. Cela est une question particulièrement importante du fait que le Guyana est un pays exportateur d’or et que l’extraction de l’or pollue considérablement les eaux.

Mme Simms se réfère au rapport soumis par le Guyana à la trente-cinquième session du Comité des droits de l’enfant, qui suggère dans des termes éloquents que l’âge du consentement devait être modifié. La plupart de ceux qui ont des relations sexuelles avec des fillettes de 13 ans ne sont pas des garçons du même âge mais des hommes âgés. Il est important que toute la région de la CARICOM se débarrasse de l’exploitation sexuelle de ses enfants. Les hommes qui prétendent croire que s’ils ont des relations sexuelles avec une fille vierge, ils seront guéris des maladies sexuellement transmissibles devraient être encouragés à trouver d’autres traitements pour leurs maladies que des fillettes de 13 ans, qui ne sont pas psychologiquement prêtes à avoir des relations sexuelles. Il ne faut pas oublier non plus que les hommes violent également les garçons. Les femmes ne parviendront jamais à être des égales tant que leur corps sera troqué de plus en plus jeune. Passant à la suggestion tendant à rendre les hommes responsables de la prostitution, elle dit que les pays des Caraïbes devraient examiner la possibilité de suivre l’exemple des provinces canadiennes qui ont créé des « écoles pour les michetons », qui s’efforcent de réhabiliter les hommes arrêtés lorsqu’ils utilisent les services d’une prostituée.

Mme Coker-Appiah dit qu’au Guyana, selon le rapport, les Amérindiens vivent principalement dans les régions rurales inaccessibles, comme l’a révélé une étude réalisée par l’Association du peuple amérindien, où leurs femmes souffrent d’un certain nombre de problèmes sociaux. Quelles sont les causes des problèmes auxquels elles doivent faire face? Bénéficient-elles directement des programmes de sécurité sociale, comme l’exige le paragraphe 2 c) de l’article 14 de la Convention, et jouissent-elles d’un logement, d’un assainissement, d’une électricité, d’un approvisionnement en eau, de transports et de communications adéquats, comme le stipule le paragraphe 2 h) de l’article 14?

Mme Shadick (Guyana) dit que les hommes doivent accepter leurs responsabilités et modifier leurs attitudes. C’est pourquoi un groupe appelé « Men of Purpose » (Des hommes pour une action commune) a été créé au Guyana environ deux ans auparavant afin de s’adresser aux hommes dans les lieux où ils se rassemblent, de raisonner avec eux en vue de parvenir à leur faire changer d’attitude. Le groupe réalise des programmes télévisés avec participation téléphonique, mais de telles attitudes sont profondément ancrées et ne peuvent pas changer du jour au lendemain. Entre-temps, les femmes continuent de courir le risque de contracter des maladies mortelles et doivent recevoir immédiatement une aide. Toutefois, comme certains des programmes lancés par le Bureau de la condition féminine pour sensibiliser les femmes et les encourager à faire preuve d’un certain degré d’indépendance en se protégeant elles-mêmes se sont traduits par des actes de violence domestique, le Bureau a entrepris des négociations avec des groupes d’hommes par le biais de leurs affiliations religieuses. Il sera difficile de modifier les attitudes, particulièrement dans un pays où cohabitent des groupes culturels si divers, mais de sérieux efforts sont déployés à cet égard.

Passant à la question de l’exploitation des enfants, l’oratrice dit qu’à la suite des observations faites par le Comité des droits de l’enfant, des amendements visant à relever l’âge du consentement ont été rédigés. À la suite de discussions au niveau du comité parlementaire, il a également été décidé de modifier la loi sur les infractions pénales (Criminal Offences Act), qui ne vise que le proxénétisme de femmes, afin qu’elle traite également de la situation des garçons qui sont violés tant par des hommes que par des femmes plus âgées. Les « écoles pour michetons » créées au Canada sont une excellente idée.

Elle reconnaît que les services de santé au Guyana ne sont pas adéquats et doivent être améliorés, mais elle souligne que des progrès ont été réalisés tous les ans. En 2004, les allocations budgétaires à la santé ont représenté 7 % du produit intérieur brut et 8 % en 2005; en 2010, elles devraient être de 10 %. Passant à la question du ratio entre la population et les installations sanitaires, elle dit que les installations sanitaires du Guyana ne sont pas distribuées selon ce critère du fait que de nombreuses régions sont peu peuplées. Elles sont plutôt créées par localités. La forme la plus simple d’installation sanitaire – la hutte sanitaire – est gérée par une personne de la communauté intéressée qui a reçu une formation lui permettant d’exécuter des tâches médicales simples. De nombreuses zones de l’arrière-pays sont affectées par le paludisme et des moustiquaires sont actuellement distribuées à tous les ménages de ces zones. Des centres de santé financés par le gouvernement dispensent gratuitement des antirétroviraux qui sont même fabriqués au Guyana, mais seulement aux adultes. Le Gouvernement américain a entre-temps fait don d’antirétroviraux pour les enfants.

Depuis la préparation du rapport, près de trois ans auparavant, et depuis que le remboursement de la dette du pays a diminué, le Guyana alloue une plus grande proportion de son revenu aux services sociaux. En 2004, le Guyana se trouvait au cinquième rang pour ce qui est de l’accès de sa population à l’eau potable. L’oratrice ne peut pas dire combien de puits supplémentaires sont nécessaires. Au Guyana, tous les enfants ont accès à l’enseignement primaire et plus de 80 % ont accès à l’enseignement secondaire. Des dortoirs sont disponibles pour les enfants qui vivent loin de l’école. Au cours des 12 dernières années, le gouvernement a construit plus de 800 écoles et en a rénové et élargi d’autres.

La Banque interaméricaine pour le développement a fourni un financement au Programme d’électrification des régions non desservies (Unserved Areas Electrification Programme) du Guyana, mais le gouvernement reconnaissant que ces fonds ne couvriraient que 30 000 des 50 000 ménages sans électricité, a récemment approuvé le financement pour les 20 000 ménages encore non desservis. À la fin de 2006, chaque ménage au Guyana aura l’électricité. Le Guyana n’a qu’un seul fournisseur d’électricité qui a été privatisé deux ans auparavant et à nouveau nationalisé; depuis que le gouvernement est le seul propriétaire, la fourniture d’électricité s’est améliorée au point où les coupures de courant, qui étaient chose courante, sont maintenant rares. Le gouvernement a installé des radios à ondes courtes dans tous les villages éloignés et un nombre croissant de Guyaniens utilisent actuellement des téléphones portables.

Articles 15 et 16

Mme Tan, notant que la délégation a déclaré que le Cabinet guyanien examinait actuellement la loi portant création d’un tribunal familial, demande quels sont ses principaux commentaires. Dans ses réponses à la liste de questions, l’État partie dit que la loi avait pour but de créer un nouveau régime chargé de traiter des questions familiales et que des règles de procédure judiciaire devront être rédigées afin de donner effet à la loi. Quelles mesures sont prévues pour assurer l’application des dispositions du projet de loi une fois qu’il sera devenu loi? Notant que, selon le rapport, qu’elles travaillent ou non, les épouses ne disposent toujours pas des mêmes droits en matière de partage des biens et que dans la liste des réponses aux questions il est dit qu’il n’est prévu aucun amendement à la loi relative au patrimoine des personnes mariées, elle demande s’il est probable qu’un tel amendement sera approuvé et s’il incorporerait la quantification de la contribution de la femme à la famille et au foyer.

Mme Coker-Appiah note que le rapport dit que l’application des lois existantes continue de poser de sérieux problèmes et demande quels sont ces problèmes et que fait le gouvernement pour y remédier. Les femmes doivent bénéficier de structures accessibles et d’un coût abordable qui leur permettent de faire valoir leurs droits et le seul avocat qui s’est rendu dans l’arrière-pays pour fournir une aide juridique à la population n’était clairement pas suffisant pour la large population du Guyana. Le gouvernement prévoit-il de mettre en place une législation en vue de fournir une aide et des services juridiques gratuits, particulièrement aux femmes indigentes, et existe-t-il des programmes spéciaux concernant les droits des femmes visant les organes judiciaires et les organes chargés du respect des lois?

Mme Belmihoub-Zerdani dit que le rapport contient peu d’informations sur la manière dont sont organisés les mariages, sur le consentement et les procédures suivies en cas de divorce. Existe-t-il une discrimination dans ces domaines et, en cas de divorce, les parents ont-ils une autorité égale en ce qui concerne les enfants? Le Guyana a-t-il demandé aux pays riches qui ont annoncé des contributions aux pauvres lors de la quatrième Conférence sur les femmes tenue à Beijing en 1995 de fournir un financement aux projets en faveur de la promotion de la femme? Le cas échéant, de quels pays et quel est le financement qu’il a obtenu?

Mme Bokpe-Gnacadja, en ce qui concerne l’application des articles 15 et 16, demande si le gouvernement a pris des mesures pour remédier à la stagnation qui perpétue les inégalités entre les hommes et les femmes. Que fait la Family Life Commission (Commission de la vie familiale) pour s’assurer que la rédaction du projet concernant un Tribunal familial se poursuit? Comment se fait-il qu’aucun amendement à la loi relative au patrimoine des personnes mariées n’ait été soumis à l’Assemblée nationale? Selon les réponses à la liste de questions, le Plan d’action pour la période 2006-2010 prévoit que la question d’un amendement est l’une des questions qui doivent être examinées afin de décider de la marche à suivre pour aller de l’avant, mais quand ces débats devraient-ils avoir lieu et quel en est le calendrier? Quelles mesures concrètes ont été prises à moyen terme? Un enseignement gratuit est dispensé à tous les enfants entre 5 ans et 9 mois et 15 ans et le rapport fait également référence au projet relatif à la médecine procréative et sexuelle des adolescents, mais de telles politiques ne sont pas durables si, comme le reconnaît le rapport, le gouvernement ne prend pas de mesures pour empêcher la pratique des mariages forcés et arrangés. Faire passer l’âge légal du mariage à 18 ans pour les deux sexes devrait être accompli d’un seul coup plutôt que par étapes.

Mme Šimonović dit que maintenant que la Convention est directement applicable, elle aimerait savoir quels sont les mécanismes mis en place pour modifier les lois se révélant contraires à la Convention et si, comme l’a recommandé le Comité des droits de l’enfant, le gouvernement a aboli la disposition discriminatoire de la loi sur les infractions pénales prévoyant de longues condamnations à l’emprisonnement pour les filles de plus de 16 ans ayant des relations sexuelles avec un parent plus âgé.

Mme Shadick (Guyana) confirme que le projet de loi sur le tribunal familial a été rédigé et est à l’examen, bien que les règles de procédure judiciaire qui suivent l’adoption d’une telle loi ne soient pas encore en place. La principale question relève de la juridiction et il a déjà été décidé que les juges spécialisés dans les questions familiales, telles que le divorce et les droits de propriété des femmes, seront affectés aussi bien aux magistrate’s court qu’aux instances supérieures, et que ces tribunaux devront probablement être situés dans des immeubles séparés des tribunaux dans l’intérêt des plaignants intéressés.

La loi relative au patrimoine des personnes mariées, qui s’applique aux hommes comme aux femmes, différencie entre les mariages et les unions libres, bien qu’après cinq ans ces dernières soient considérées comme conférant les mêmes droits aux deux époux. En cas de divorce, une épouse sans travail rémunéré a droit à un tiers de la propriété et une épouse salariée a droit à la moitié, disposition qui, comme le gouvernement le reconnaît, doit être modifiée. Malheureusement, de telles modifications sont généralement abandonnées en faveur de révisions urgentes des principales lois, mais elle espère que des mesures seront prises au cours de l’année. Dans tous les cas, les personnes et les groupes culturels dont les intérêts sont en jeu doivent comprendre pourquoi ces modifications sont nécessaires. La Commission nationale de la famille fait un bon travail, aidant son propre Ministère du travail, de la protection sociale et de la sécurité sociale à élaborer des programmes spécifiques de plaidoyer et de sensibilisation.

Elle s’accorde à penser qu’un seul avocat du Ministère chargé de couvrir l’ensemble de l’arrière-pays et de fournir une assistance juridique gratuite n’est pas suffisant mais mieux que rien; et un interne est également en cours de formation. Nombre des personnes qui consultaient cet avocat n’avaient besoin que de simples formalités administratives ou de conseils typiques sur la façon de procéder. De plus, bien que seule la ville de Georgetown ait une clinique d’aide juridique gratuite, une aide à faible coût est facilement disponible ailleurs.

Il faut bien sûr dispenser une plus large formation à l’appareil judiciaire, bien que les juges connaissent les dispositions de tous les traités relatifs aux droits de l’homme. Toutefois, le gouvernement n’a pas de juridiction directe sur les décisions de l’appareil judiciaire.

Au Guyana – qui est une ancienne colonie britannique –, seules les unions monogames sont reconnues et les mariages ne sont ni forcés ni arrangés. Il n’existe aucune inégalité dans les procédures de divorce, même dans le cas des mariages non reconnus tels que ceux des couples hindous, et les femmes ont droit à leur part des biens en cas de divorce. Le consentement des parents n’est nécessaire que dans le cas où les personnes ont moins de 18 ans et les personnes n’ayant pas atteint 18 ans peuvent demander à la Cour suprême le droit de se marier.

Elle a connaissance de la disposition de la loi sur les infractions pénales prévoyant l’emprisonnement de filles coupables de certains genres de prostitution; toutefois, les tribunaux veillent à assurer qu’elle n’est jamais appliquée. En tout état de cause, le gouvernement, en coopération avec un consultant spécial afin de mettre en place une législation modèle en matière de délits sexuels, a commencé a moderniser ses lois dans ce domaine.

Elle n’a pas connaissance de ce que son gouvernement ait demandé aux pays riches de s’acquitter des engagements qu’ils ont pris à Beijing.

Questions de suivi

Mme Morvai dit qu’elle n’a pas reçu de réponses aux questions qu’elle a posées en ce qui concerne l’impact qu’ont les femmes sur les principales décisions en matière d’économie du pays, et particulièrement les femmes rurales qui sont le plus affectées par les conditions prévalant dans l’industrie de l’or et par les problèmes mondiaux tels que le réchauffement de la planète, l’effondrement des prix du sucre et du café, etc.

Mme Shin dit qu’il est trompeur de dire que les hommes comme les femmes sont victimes de la violence domestique. En dehors du fait que quatre fois plus de femmes que d’hommes sont tuées par leur époux, le motif dans le cas des femmes est entièrement différent car elles sont généralement poussées à le faire à la suite d’une longue histoire de violence de la part de leur époux.

Mme Dairiam fait observer que, bien que la délégation prétendait que des budgets spéciaux pour les femmes n’étaient pas nécessaires dans les Documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté, la réponse écrite à la question 17 de la liste des problèmes indiquait que le gouvernement avait l’intention, dans le cadre de son Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté, de mettre en place des initiatives en faveur des femmes. Il est extrêmement important d’avoir de tels liens, pour comprendre les causes profondes de la pauvreté des femmes et de relier les programmes en faveur des femmes à la stratégie nationale de développement.

Mme Patten demande si la loi de l’Organisation internationale du Travail (OIT) interdisant la discrimination sexuelle sur le lieu de travail était appliquée et si des cas avaient été soumis aux tribunaux. Elle demande également comment les prestations de maternité sont fournies aux femmes qui travaillent à temps partiel s’il n’existe pas de législation définissant le travail à temps partiel.

Mme Coker-Appiah demande comment les lois sur la nationalité traitent des enfants nés hors du Guyana de Guyanaises mariées à des étrangers. Il n’a pas non plus été répondu à la question qu’elle a posée auparavant concernant la haute consommation d’alcool parmi les femmes amérindiennes.

Mme Shadick (Guyana) dit que les femmes ne sont généralement pas employées dans les mines d’or, bien qu’on puisse trouver certaines d’entre elles comme prostituées dans les centres miniers.

Elle assure le Comité que les Guyanaises étaient pleinement conscientes des questions telles que la chute des prix du sucre et se faisaient entendre en ce qui concerne les problèmes les affectant. Le Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté initial ne se référait pas spécifiquement aux femmes, mais comme du fait que la majorité des pauvres étaient reconnus être des femmes, elles étaient directement ciblées par l’aide à la pauvreté. Il convient de noter que la majorité des citoyens qui assistent aux sessions de planification sont des femmes.

Comparées aux hommes, les femmes ont des raisons différentes d’avoir recours à la violence domestique, mais du point de vue de la loi, l’auteur de ces actes doit toujours être puni.

Les femmes sont spécifiquement ciblées dans la formation en matière de compétences, particulièrement dans des domaines non traditionnels tels que la maçonnerie et les procédures d’appel d’offres.

Le gouvernement a reçu peu de plaintes de harcèlement sexuel sur les lieux de travail et peu de personnes ont été renvoyées pour cette raison. En général, de tels cas étaient réglés à l’amiable avec les employeurs car les femmes éprouvent de la réticence à discuter de cette question – ou de viol – ouvertement. Bien qu’il n’existe pas de définition juridique du travail à temps partiel, les droits du travail définissent la semaine normale de travail et les heures supplémentaires. Au Guyana, toutefois, toutes les femmes qui travaillent à temps partiel sont des employées de maison et des lois spécifiques leur sont appliquées. Dans les autres emplois, les femmes ont droit à un congé si nécessaire.

Les enfants nés de pères étrangers ont droit à la citoyenneté même s’ils sont nés à l’étranger, à condition que les parents vivent au Guyana.

Elle dit ne pas être au courant de la haute consommation d’alcool par les Amérindiennes. Dans le passé, il existait une loi interdisant de vendre de l’alcool aux Amérindiens, mais elle a été abolie dans la nouvelle loi concernant les Amérindiens. Les membres de ce groupe ethnique fabriquent leurs propres boissons fermentées et il n’y a eu aucun rapport d’ébriété parmi eux, bien qu’il y ait eu des cas où les hommes, cherchant à profiter de jeunes Amérindiennes qui avaient accepté des emplois sur la côte, les faisaient boire sans arrêt.

La Présidente, parlant en son nom personnel, a félicité la délégation de sa franchise en reconnaissant ce qui restait à faire. Le gouvernement doit particulièrement créer des mécanismes de suivi efficaces afin d’assurer que toutes les lois sont strictement respectées. De plus, malgré l’adoption de la loi sur la violence dans la famille en 1996, la violence contre les femmes, et particulièrement la violence sexuelle, demeure un sujet tabou. Le gouvernement devrait faire plus pour lutter contre ce phénomène et, en particulier, devrait mettre en place des programmes de sensibilisation à l’intention des juges, des avocats et des époux. Elle attire l’attention du Comité sur la recommandation no 19 traitant de cette question.

Elle met en garde contre l’utilisation du mot « équité » plutôt qu’« égalité ». Souvent, particulièrement en Amérique du Sud, le terme « équité » peut être utilisé pour signifier moins que le terme « égalité ».

Elle félicite le gouvernement pour les efforts qu’il déploie en vue d’améliorer la condition des femmes et mettre en oeuvre la Convention.

Mme Shadick (Guyana) assure le Comité que le gouvernement avait la volonté de trouver les moyens de faire ce qui doit être fait, bien que le coût soit parfois fort élevé. Elle demande instamment aux pays qui se sont engagés à verser 0,7 % de fournir des fonds au Guyana, qui les utiliserait certainement à bon escient.

La séance est levée à 17 h 15.