Trente-huitième session

Compte rendu analytique de la 790e séance

Tenue au Siège, à New York, le mardi 29 mai 2007, à 15 heures

Président e:Mme Šimonović

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États Parties conformément à l’article 18de la Convention (suite)

Rapport unique (valant rapport initial et deuxième rapport périodique ) du Niger (suite)

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports présentés par les États Parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport unique (valant rapport initial et deuxième rapport périodique) du Niger(suite) (CEDAW/C/ NER /1 et 2 , CEDAW/C/ NER / Q/ 2 et Add.1 )

À l’invitation de la Présidente, les membres de la délégation du Niger prennent place à la table du Comité.

Articles 6, 7 et 8

Mme  Ousmane (Niger) dit que le Gouvernement nigérien a signé l’Accord multilatéral régional de lutte contre la traite des enfants en juillet 2005 et mis en place des programmes de formation visant à prévenir cette traite à l’intention des fonctionnaires chargés de policer les frontières.

M .  Adama (Niger) indique que le pays est utilisé pour le transit des stupéfiants et des personnes mais n’est ni la source ni la destination de ces personnes. Le Gouvernement a adopté des lois visant à prévenir l’exploitation et la traite des personnes. Il a de plus ratifié la Convention contre la criminalité transnationale organisée en 2002 et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, en 2005. Le Ministère de la justice a rappelé aux tribunaux les dispositions de la loi interne applicables à la poursuite des infractions criminelles liées à la traite des personnes, notamment celles qui sont commises par un individu qui n’est pas citoyen nigérien. Les dispositions en question ont donné des résultats positifs. En outre, l’article 10 de la Constitution garantit le plein développement de la personne et le paragraphe 2 de son article 19 protège les jeunes de l’exploitation et de l’abandon.

Mme Abdourhaman (Niger) ajoute que le Ministère du développement social, de la population, du progrès de la femme et de la protection de l’enfant participe activement aux efforts internationaux déployés pour enrayer le problème de la traite des femmes et des enfants. Il a été par ailleurs créé une Commission nationale des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Mme Kako (Niger), se référant à l’article 7, déclare que tous les êtres humains sont nés égaux et libres et que tous les citoyens jouissent sur un pied d’égalité du droit d’invoquer les conventions que le Niger a ratifiées.

M. Mahamane (Niger) fait observer que le Gouvernement a adopté une loi sur les quotas en raison du faible niveau de représentation des femmes aux postes électifs ou nominatifs. La Constitution réaffirme les droits égaux des hommes et des femmes en matière d’emploi. Les femmes ont la possibilité d’occuper des postes d’autorité; 9 000 des 32 000 fonctionnaires sont des femmes. La délégation reconnaît certes que la représentation des femmes doit s’améliorer, mais il n’y a pas de discrimination à l’encontre des femmes dans la fonction publique, qui cherche à employer des fonctionnaires qualifiés, quel que soit le sexe du candidat. Les hommes et les femmes se présentent aux mêmes concours d’entrée dans la fonction publique. S’agissant du rôle que les femmes jouent dans la définition des politiques publiques, le Gouvernement a entrepris un processus de décentralisation et a établi plus de 200 administrations locales. Les femmes sont bien représentées à ce niveau et jouent donc un rôle important dans l’élaboration des politiques gouvernementales, Au niveau de l’administration centrale, les hommes et les femmes ont les mêmes possibilités et les femmes sont à même de participer à la formulation des politiques.

Article 9

M me Coker-Appiah fait remarquer qu’il serait utile de connaître les mesures que le Gouvernement envisage de prendre pour permettre aux maris non nigériens de femmes nigériennes d’acquérir la nationalité de leur femme.

Mme Saiga dit qu’il convient de préciser si les femmes sont en mesure de solliciter un passeport sans l’autorisation du mari et si les enfants nés d’une femme nigérienne et d’un mari étranger sont en mesure d’acquérir la nationalité de la mère.

Mme Ousmane (Niger) répond que tous les enfants nés de mères nigériennes peuvent demander la nationalité de la mère quelle que soit la nationalité du père. En revanche, si un mari étranger souhaite acquérir la nationalité de sa femme, les autorités doivent procéder à certaines enquêtes.

M .  Adama (Niger) ajoute que, de par la loi, tous les enfants nés de femmes nigériennes sont habilités à acquérir la nationalité de la mère. La législation ne précise pas si un étranger marié à une nigérienne peut demander à acquérir la nationalité de sa femme ; il est toutefois possible pour un mari étranger de demander à être naturalisé. Il n’y a pas de raison pour qu’un mari étranger ne puisse demander la nationalité de sa femme puisque dans le cas contraire – étrangère mariée à un Nigérien – la femme peut demander à acquérir la nationalité de son mari. Les Nigériennes sont libres de demander un passeport sans l’autorisation de leur mari, et les enfants ont le droit de figurer à la fois sur le passeport de la mère et celui du père.

Article 10

Mme Tavares da Silva note que, en dépit des progrès réalisés en matière d’éducation, les projets du Gouvernement visant à réaliser l’enseignement primaire universel ne se sont pas pleinement matérialisés et qu’il ressort du rapport initial et du deuxième rapport périodique que la participation des femmes à l’enseignement supérieur est faible. Il serait intéressant de savoir si le Gouvernement envisage d’autres mesures pour traiter de ces problèmes et si les parents qui n’envoient pas leur fille à l’école, comme ils y sont tenus, sont punis.

Mme Arucha Dominguez fait remarquer que la fréquentation des filles au niveau du primaire demeure inférieure à celle des garçons encore qu’il soit évident que certains progrès aient été réalisés. Il serait utile de savoir quels projets ont été envisagés pour élever la scolarisation des filles au niveau de l’enseignement primaire et pour les retenir à l’école à ce niveau là.

Mme Simms relève que, selon une pratique établie, les femmes assurent l’éducation des filles et les hommes assurent l’éducation des garçons. Il semble particulièrement problématique pour les filles d’intégrer des secteurs qui ne sont traditionnellement pas liés aux femmes si elles sont sous l’influence de leur mère et non de celle de leur père. Elle souhaite savoir de quelle manière le Gouvernement envisage de prévenir ce genre de stéréotype sexiste; il est en effet important pour les enfants d’être élevés par les deux parents et orientés par eux deux. Il serait également utile de avoir de quelle manière le Gouvernement pourra faire évoluer les programmes scolaires pour faire face à ce problème.

M. Flinterman demande comment le Gouvernement envisage de réaliser l’enseignement primaire universel conformément aux objectifs du Millénaire pour le développement. Il convient d’apporter des précisions sur les moyens que le Gouvernement pourra mettre en œuvre pour faire évoluer la perception selon laquelle ce sont les femmes qui doivent être chargées de l’éducation des filles. Au paragraphe 8.4 du rapport valant rapport initial et deuxième rapport périodique, il est déclaré que les demandes de bourse présentées par les filles et les garçons sont traitées sur un pied d’égalité par la Commission nationale d’orientation et d’attribution des bourses et le Comité des bourses. Dans ce cas toutefois, le Gouvernement pourrait envisager la possibilité d’adopter des mesures temporaires spéciales pour faciliter l’accès des filles aux bourses. Il serait intéressant de savoir comment le Gouvernement envisage d’améliorer les taux d’inscription des femmes au niveau de l’enseignement supérieur.

Mme Saiga dit que des éclaircissements seraient souhaitable sur le point de savoir si le Gouvernement a adopté une législation qui oblige les parents à envoyer leurs filles à l’école primaire et s’il a prévu des mesures coercitives à l’encontre des parents qui ne respectent pas cette disposition. Il convient par ailleurs de fournir davantage d’informations sur l’obligation qu’ont les parents de rembourser les écoles de l’intégralité du coût de l’éducation des filles qui se sont mariées en cours de scolarité.

Mme Ousmane (Niger) dit que le sort des filles est liées à celui de leur mère; l’allégement des tâches domestiques et l’indépendance financière accrue des femmes libèrent les filles en ce que l’on compte moins sur elles pour ces tâches et qu’elles sont ainsi en mesure de se rendre à l’école et de ne pas l’abandonner.

Mme Maguizou (Niger) ajoute que le droit à l’éducation est proclamé dans la Constitution; les filles et les garçons possèdent le droit à éducation sur un pied d’égalité et de par la loi. En pratique toutefois, les facteurs .économiques, sociaux et culturels entravent l’accès des filles à l’éducation. Il est nécessaire de construire davantage d’écoles et de former davantage de professeurs pour qu’il y ait suffisamment de place dans les écoles et que tous les enfants en âge de suivre l’école primaire puissent le faire. Au Niger, pays caractérisé par une faible densité de population répartie sur de vastes étendues, les facteurs géographiques tels que la distance à parcourir jusqu’à l’école doivent également être pris en considération. La mise en route d’activités de développement telles que la création de points d’eau dans les villages ou de projets générateurs de recettes libérera les filles des tâches domestiques (soins des enfants et portage de l’eau) et leur permettra d’aller à l’école tandis que des programmes de tutorat aideront celles qui ont pris du retard à rester scolarisées.

Le Ministère de l’éducation a élaboré un guide à l’intention des professeurs dans le but d’éliminer le sexisme et les stéréotypes sexistes des manuels scolaires, ce qui contribuera à empêcher que ces attitudes ne se perpétuent dans la société. À l’avenir, les budgets devront prendre en compte la scolarisation des filles. En 2000, 29,2 % des filles ont été scolarisées; ce taux s’est élevé à 34 % en 2007. Le Gouvernement déploie tous ses efforts pour atteindre l’objectif de la parité entre les filles et les garçons au niveau de l’enseignement primaire d’ici à en 2015 et ce en dépit de maigres ressources.

Les parents qui n’envoient pas leurs enfants à l’école, généralement pour des raisons tenant à la pauvreté, ne sont pas sanctionnés. En revanche, un système de stimulants a été mis en place selon lequel les familles qui ne sont pas délinquantes à cet égard peuvent bénéficier de microcrédit. Les taux de scolarisation des filles au niveau secondaire sont faibles car nombre d’elles ne possèdent pas les qualifications académiques requises. Ces chiffres ne s’élèveront pas aussi longtemps que le niveau de l’enseignement fondamental destiné aux filles se sera pas amélioré.

Article 11

Mme Patten demande si l’examen des lois et règlements auquel procède actuellement le Ministère de la justice s’étend aux règlements généraux concernant la fonction publique, y compris ceux qui permettent la discrimination à l’encontre des femmes en matière de statut matrimonial, de congé de maternité et d’avantages sociaux. Elle souhaiterait en savoir davantage sur les efforts que déploie le Gouvernement pour mettre en œuvre le Code du travail et sur les mesures prises pour renforcer les inspecteurs du travail. En dernier lieu, il serait nécessaire de disposer de davantage d’informations sur les éventuelles possibilités offertes aux femmes travaillant dans le secteur informel et tous avantages sociaux dont elles peuvent bénéficier.

Mme Halperin-Kaddari serait intéressée de savoir s’il existe des cas précis dans lesquels des travailleuses enceintes ont été renvoyées et si le congé de maternité est payé. L’interdiction du travail de nuit figurant au paragraphe 9.2.3 du rapport est contraire à la Convention; elle se demande si des mesures sont élaborées pour l’abolir et si l’interdiction s’applique aussi bien aux secteurs privés que public. Enfin, elle souhaiterait recevoir des données sur les femmes qui travaillent dans le secteur gouvernemental.

M . Mahamane (Niger) répond que le droit au travail est proclamé dans la Constitution, dont aucune des dispositions n’est contraire à l’article 11 de la Convention; toutefois, leur interprétation peut désavantager les femmes. Par exemple, l’exigence selon laquelle une femme doit comparaître devant un juge pour prouver qu’elle est le chef de la famille afin de bénéficier des prestations familiales ne signifie qu’on désire l’empêcher d’exercer ce droit mais lui impose bel et bien un fardeau inégal. Dans les règlements amendés concernant la fonction publique qui ont déjà été adoptés par le Conseil des ministres et qui seront présentés au Parlement dans un avenir proche, la section sur les prestations familiales a été revue de manière à éliminer cette exigence discriminatoire. L’Organisation internationale du Travail prête également une assistance à la révision du Code du travail afin d’adapter celui-ci à un nouvel environnement dans lequel chaque travailleur est apprécié et pris en compte.

Quant à la mise en œuvre du Code du travail, les personnes qui contreviennent à ses dispositions sont punies en vertu de la loi. Chacune des huit régions du pays dispose d’un département du travail qui procède régulièrement à des inspections pour vérifier le respect du Code. Les retards intervenus dans le versement des pensions par le Fonds national des pensions sont le résultat de certains problèmes d’administration et n’ont rien à voir avec le sexe. L’accès égal aux prestations sociales et à l’assurance maladie pour tous les membres de la fonction publique sera mis en œuvre prochainement.

Mme  Ousmane (Niger) explique que le fait de renvoyer une femme alors qu’elle est en congé de maternité constituerait une violation flagrante du Code du travail qui donnerait lieu à des poursuites. À sa connaissance, de tels incidents ne représentent que des cas isolés, dans lesquels d’ailleurs il a été porté plainte.

Article 12

Pour M me Pimentel, le rapport dépeint un tableau sombre de l’accès aux soins de santé. Elle demande s’il existe des projets précis visant à fournir des soins aux femmes âgées ou handicapées. Elle demande également des précisions concernant la création de nouvelles sources de revenus pour les personnes qui pratiquent les mutilations génitales féminines.

Mme Dairiam demande quel est le calendrier de mise en œuvre de la loi sur la santé de la procréation. S’agissant des faibles taux de recours aux produits contraceptifs, il serait intéressant de savoir les résultats qu’a donnés la distribution gratuite de produits contraceptifs et dans quelle mesure il existe des obstacles à caractère culturel qui entravent leur utilisation.

Il convient de fournir davantage d’informations sur la manière dont il est fait face aux besoins de santé des jeunes gens, notamment à la lumière des taux élevés de grossesse chez les adolescentes et de mariage précoce. Des données figurant sur l’incidence de la fistule obstétrique et l’accès au traitement sont nécessaires. Elle souhaiterait connaître le calendrier de l’adoption de la loi modifiant l’âge minimum du mariage et savoir si les filles que l’on fait sortir de l’école ont la possibilité de réintégrer le système éducatif.

Mme  Ousmane (Niger) explique que nul n’est oublié ou marginalisé dans la société nigérienne. Le Ministère de la solidarité et de l’action sociale prend en compte les besoins particuliers des personnes âgées et handicapées. Le Gouvernement a également signé la Convention des Nations Unies sur le handicap.

Le Gouvernement n’ignore pas que les mutilations génitales féminines persistent mais adopte une politique de tolérance zéro à cet égard. Les chiffres les plus récents font état d’une diminution du nombre de cas. Son ministère œuvre activement avec les organisations non gouvernementales pour faire œuvre de sensibilisation et fournir des programmes de redressement et de formation à de nouvelles compétences en ce qui concerne les personnes qui pratiquent ces mutilations. Des programmes sont également prévus pour sensibiliser la population aux problèmes associés au mariage précoce. Le Gouvernement fournit des soins aux femmes qui souffrent d’une fistule obstétrique.

Mme  Moussa (Niger) explique que le plan de développement des soins de santé pour la période 1994-2000 a permis au gouvernement d’entreprendre une politique sectorale ambitieuse en matière de santé et d’adopter des directives stratégiques pour le XXIe siècle qui visent à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Le plan s’efforce de réduire le taux de mortalité maternelle et infantile et le taux de mortalité des enfants en élargissant l’accès à des services de santé valables, en consolidant les services de santé de la procréation et en renforçant la décentralisation dans le secteur de la santé. Le gouvernement s’efforce d’atteindre les collectivités locales, notamment dans les zones rurales, en élargissant la participation communautaire aux politiques en matière de santé et grâce à une gestion améliorée de l’infrastructure des soins de santé. Le vaste territoire du Niger pose des difficultés particulières pour ce qui est d’assurer une couverture médicale efficace et un accès de qualité à des médicaments essentiels. La planification familiale est l’une des grandes priorités du plan de développement en matière de soins de santé. Le Gouvernement a alloué des fonds qui visent à élever le taux actuel de couverture contraceptive de 8,2 % à 15 % d’ici à 2010 et offert des contraceptifs gratuitement à tous les niveaux du système de soins de santé. Du personnel de santé itinérant s’est rendu dans les villages pour fournir des contraceptifs ainsi que des soins prénatals et postnatals. Le Gouvernement a adopté une loi sur la santé de la reproduction et élabore actuellement des textes visant à sa mise en œuvre. Des consultations ont été menées avant l’adoption de la loi avec tous les intervenants, notamment les chefs religieux, qui appuient la législation. La loi, qui proclame l’accès universel à la santé de la reproduction et donne aux femmes la liberté d’utiliser les méthodes de contraception les plus efficaces, permettra au Gouvernement de traiter du problème du mariage précoce qui contribue aux taux élevés de mortalité maternelle. Le Gouvernement déploie également des efforts pour améliorer les soins obstétriques, notamment en fournissant des soins médicaux gratuits aux femmes qui donnent naissance par césarienne. Les femmes ont également accès à des soins médicaux gratuits pour les enfants de moins de cinq ans sur tout le territoire national.

Articles 13 et 14

Mme  Pattenfait remarquer que selon un rapport récent, l’insécurité alimentaire structurelle est cause du fait que 32 % de la population sont sous-alimentés et que 40 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition chronique. Elle fait également état de rapports selon lesquels la sécurité alimentaire est menacée par la libéralisation du commerce agricole résultant de la privatisation des organismes et services agricoles d’État. Elle souhaiterait savoir si le Gouvernement a évalué les effets d’une telle libéralisation sur l’accès aux aliments et l’exercice par les femmes rurales de leur droit au travail. Il est nécessaire de disposer d’informations sur l’action menée pour que les femmes rurales participent aux négociations en matière commerciale. Il est suerait utile de disposer de données sur le nombre de femmes qui ont bénéficié de prêts et les conditions dans lesquelles elles les ont obtenus. Il n’apparaît pas clairement qu’elles aient dû fournir des garanties. Elle apprécierait également de recevoir des informations sur les mesures prises pour faire la liaison entre les femmes travaillant dans le secteur informel et les institutions financières de manière à faciliter l’accès des femmes au crédit.

Mme  Tan dit que les femmes nigériennes ont désespérément besoin d’un filet de sécurité sociale. Elle aimerait savoir si des mesures ont été prises pour fournir des prestations de sécurité sociale aux personnes vivant dans les zones rurales, notamment les femmes. Il serait utile de connaître les plans mis en place éventuellement pour encourager les femmes à utiliser les nouvelles technologies agricoles ou fournir des fonds aux femmes qui cherchent à le faire. Elle se demande par ailleurs si des mesures ont été prises pour faire connaître aux femmes rurales leurs droits à la terre prévus par la loi et si une assistance juridique est offerte aux femmes qui souhaitent faire valoir ces droits. Elle s’enquiert également du statut actuel de la Banque Sarraounia, la banque des femmes évoquée dans les réponses à la liste de questions, et le genre d’activités qu’elle pourra financer. Il convient de fournir des précisions sur les efforts que cette banque a faits pour établir un réseau de contacts et faciliter l’accès des femmes à des postes de responsabilité.

Mme  Dairiam demande de quel recours les femmes rurales disposent lorsque l’accès à la justice leur est refusé. Elle souhaiterait recevoir des informations sur la manière dont la politique nationale de promotion des femmes est contrôlée et sur l’étendue du programme d’alphabétisation. Le rapport dit que l’un des obstacles au plein exercice des droits des femmes est la coexistence du droit coutumier, du droit religieux et du droit civil. La délégation a également déclaré que des progrès sont réalisés. Il serait toutefois souhaitable de recevoir des précisions sur la situation sur le terrain et utile de disposer de données sur le nombre de personnes qui demandent justice au titre du droit coutumier. Elle prie instamment la délégation de rassembler de telles données, désagrégées par sexe, notamment pour les zones rurales.

Mme Ousmane (Niger) déclare que plusieurs mesures ont été prises pour ouvrir l’accès des femmes au crédit. Une réunion des chefs d’État et de gouvernement tenue récemment à Bamako a examiné les taux d’intérêt bancaire et les politiques de prêt pour faciliter l’accès des femmes au crédit. Il existe également des associations mutuelles qui financent les activités menées par les femmes. Elle fait état en particulier du programme spécial du Président de la République.

M. Adama (Niger) indique que les femmes ont de plus en plus accès à la propriété terrienne.

Les différends, pour la plupart, sont réglés par les tribunaux de droit coutumier, la loi stipulant qu’en de tels cas la justice est gratuite. Certains coûts toutefois peuvent être encourus lors d’affaires civiles ce qui pourrait constituer un obstacle financier à l’obtention de la justice. On envisage actuellement la possibilité de fournir une assistance juridique gratuite dans de tels cas. En attendant, une assistance juridique est fournie par les organisations non gouvernementales sous forme de dispensaires légaux. En outre, les avocats ont organisé une « caravane de la défense », composée de conseils pour la défense qui se déplacent dans tout le pays pour fournir des conseils juridiques gratuits et faciliter l’accès à la justice.

M . Mahamane (Niger)ajoute que la question de la propriété terrienne dans son pays et ailleurs en Afrique est des plus sensible, notamment pour les hommes. Le nouveau Code rural, qui donne aux femmes le droit de posséder des terres, est appliqué au travers de commissions rurales au niveau local. L’efficacité de ces commissions est toutefois limitée du fait qu’elles sont principalement administrées par des fonctionnaires qui ne sont pas toujours au fait de la situation à ce niveau. Cela étant, une action suivie est menée pour assurer la gestion des terres au niveau communautaire dans le cadre des conseils communaux qui comprennent un nombre spécifique de femmes élues.

En collaboration avec les partenaires sociaux, y compris les syndicats, le Gouvernement a créé un comité chargé d’étudier la question de l’accès au logement. Le Comité présentera au Gouvernement des propositions destinées à promouvoir l’accès à un logement décent sur tout le territoire du Niger.

Le Gouvernement se dispose à établir un plan de couverture médicale qui facilitera tout spécialement l’accès des collectivités rurales aux soins de santé. Il attache une grande importance à l’aménagement d’installations communes à même de servir les collectivités locales dans d’autres secteurs sans discrimination entre les sexes. On compte que le transfert aux communes de la responsabilité de fournir des services de base – eau, éducation et santé – qu’il est prévu d’effectuer améliorera les services et en élargira l’accès tant aux hommes qu’aux femmes. S’agissant de la sécurité sociale, le Fonds national pour la sécurité sociale est chargé de verser toutes les prestations familiales. On s’emploie actuellement, avec le concours de la Conférence interafricaine de la prévoyance sociale et la Banque mondiale à améliorer la distribution de ces allocations.

Mme Habsou (Niger) indique que son gouvernement a lancé une campagne spéciale de lutte contre la pauvreté dans les zones rurales à l’intention principalement des femmes et des jeunes afin d’alléger le fardeau que représentent les tâches domestiques pour les femmes rurales en mettant en place des infrastructures essentielles et en promouvant des activités génératrices de recettes. À ce jour, la campagne a permis notamment l’octroi de prêts représentant 1,8 milliard de francs CFA à des groupes de femmes et la distribution de plus de 2 000 vaches laitières aux femmes rurales, l’électrification de villages, l’exécution d’activités de formation et la création d’emplois pour les jeunes. Ces mesures, rendues toutes possible grâce à l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés, ont fortement amélioré la vie des femmes.

Mme Abdourhaman (Niger) relève que même en milieu urbain, l’accès aux nouvelles technologies de l’information et de la communication est assez limité du fait du niveau de développement du pays. Néanmoins, la Banque africaine de développement finance un projet multimédia qui améliorera l’accès des femmes à ces technologies. L’accès au crédit a été ouvert à tous au Niger, à la condition que le postulant présente les garanties requises. Les femmes rurales n’offrent guère de garanties pour obtenir du crédit; le Gouvernement a donc institué une campagne spéciale de lutte contre la pauvreté dans le cadre de laquelle des crédits à taux d’intérêt extrêmement faibles sont accordés sans que des garanties soient exigées. La Banque Sarraounia n’est pas encore opérationnelle mais son établissement est bien avancé.

Articles 15 et 16

M me Belmihoub-Zerdani dit que les deux ajustements structurels intervenus au Niger ont créé des obstacles considérables au financement de projets. Quels que soient les progrès réalisés dans la promotion de l’égalité entre les sexes dans de nombreux domaines, les droits des femmes continuent à être restreints dans leur vie privée. Elle prie donc instamment la délégation de porter ses efforts sur le progrès de la situation personnelle des femmes. Elle insiste en particulier pour que la législation telle qu’amendée portant sur la question de la situation personnelle visée au titre du point 31 des réponses à la liste de questions soit mise en œuvre. Ladite législation précise que les coutumes doivent non seulement concorder avec la loi et l’ordre public mais aussi avec les dispositions des conventions auxquelles le Niger est partie.

Mme Tan fait remarquer que l’absence de consensus entre les chefs religieux sur le projet de code de la famille, qui cherche à rectifier nombre des inégalités les plus pressantes auxquelles se heurtent les femmes, constitue l’obstacle majeur à son adoption. Elle souhaite connaître la nature des objections opposées au Code et les perspectives de son adoption dans un avenir proche. Le droit applicable en cas de conflit – droit coutumier, Constitution ou conventions –, n’apparaît pas clairement. Relevant que, selon la plupart des coutumes, la mère se voit accorder la garde des fils jusqu’à ce qu’il aient atteint l’âge de la puberté et celle des filles jusqu’à leur mariage, elle se demande s’il s’agit là de la garde de l’enfant faisant suite à un divorce ou du droit des parents sur leurs enfants. Elle s’enquiert par ailleurs de la manière dont les femmes peuvent solliciter de l’aide lors d’affaires de divorce dans lesquelles la garde des enfants leur est refusée. Elle note avec préoccupation les cas de divorce par répudiation selon lequel le mari seul a le droit de mettre fin au mariage sans être tenu à des explications. Elle demande si dans de tels cas les femmes et les enfants reçoivent une pension alimentaire du mari et, dans la négative, si l’État s’occupe d’eux. Notant en outre que de nombreuses personnes au Niger ignorent qu’elles doivent faire enregistrer leur mariage, elle s’enquiert des mesures prises pour encourager cette procédure.

M . Abani (Niger) explique que la décennie qui vient de s’écouler n’a pas été facile pour son pays, qui revient à la paix et la stabilité pour la première fois depuis 1999. L’insuffisance de ressources associée à un climat hostile et la progression de la désertification ont malheureusement des répercussions sur les secteurs sociaux.

S’agissant de la question de savoir si les femmes peuvent être des chefs traditionnels, il répond qu’il n’est pas possible de modifier la coutume à tous les niveaux. La réalité nationale actuelle ne permet pas l’adoption de lois qui permettent aux femmes d’occuper de telles fonctions.

M. Adama (Niger) répond aux questions sur l’article 16 en disant que la Convention et les autres instruments internationaux ont valeur constitutionnelle suivis des lois internes puis du droit coutumier. E cas de conflit, cette hiérarchie s’appliquera.

Les effets de la répudiation sont un sujet de grave préoccupation, et elle donne certainement lieu à des abus. Toutefois, des règles religieuses très strictes régissant cette pratique sont en place. La loi en la matière est mal connue, et la plupart des juges siégeant dans les tribunaux matrimoniaux manquent d’expérience, ce qui est source de difficultés. Les juges doivent comprendre leur rôle de conciliateur dans de tels cas. Par ailleurs, l’enregistrement des mariages est devenu obligatoire.

Mme  Ousmane (Niger) déclare que le dialogue avec le Comité a été des plus précieux et a permis de mieux faire comprendre les questions qui affectent les femmes et les domaines dans lesquels il est nécessaire de progresser.

La Présidente félicite le Gouvernement du Niger de la volonté politique qu’il a manifestée de ratifier le Protocole facultatif à la Convention. Elle demande instamment le retrait de toutes les réserves qu’il a formulées de sorte que la Convention puisse être appliquée dans tous ses aspects.

La séance est levée à 1 7 h 40.