Trente et unième session

Compte rendu analytique de la 658e séance

Tenue au Siège, à New York, le jeudi 15 juillet 2004, à 10 heures

Présidente :Mme Açar

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties en application de l’article 18de la Convention (suite)

Cinquième rapport périodique de la République dominicaine

La séance est ouverte à 10 h 20.

Examen des rapports présentés par les États parties en application de l’article 18 de la Convention (suite)

Cinquième rapport périodique de la République dominicaine (CEDAW/C/DOM/5, CEDAW/PSWG/2004/II/CRP.1/ Add.2, CEDAW/C/PSWG/2004/II/CRP.2/Add.1)

À l’invitation de la Présidente, les membres de la délégation de la République dominicaine prennent place à la table du Comité.

M me Henríquez de Sanchez Baret (République dominicaine), présentant le rapport, déclare que son pays intègre dans son processus de développement les mesures nécessaires pour parvenir à une véritable équité entre hommes et femmes, laquelle constitue la pierre angulaire d’une démocratie participative. La République dominicaine s’est engagée à respecter les droits des femmes en ratifiant la Convention en 1982 et son Protocole facultatif en juin 2001. Conformément à la demande du Comité, le cinquième rapport, qui porte sur la période 1998-2001, a été actualisé au premier trimestre 2004.

D’après l’enquête menée par la Banque centrale en 1998 sur les revenus et les dépenses des ménages de la République dominicaine, 28,7 % des ménages et 33 % des ménages aux revenus les plus faibles sont dirigés par des femmes. En régions rurales, le pourcentage de ménages dirigés par des femmes est de 22 %. Plus le ménage touche un revenu élevé, plus il est susceptible d’être dirigé par un homme. La même enquête a montré que 76 % des ménages dirigés par une femme sont à Saint-Domingue et dans les autres régions urbaines où sont concentrées les tranches de la population les plus pauvres, contre 64 % seulement des ménages dirigés par des hommes.

Le pays traverse actuellement une crise économique qui l’a contraint à signer un accord de confirmation avec le Fonds monétaires international. Les auteurs de cet accord se déclarent préoccupés de son incidence sur les groupes sociaux vulnérables, mais le texte ne contient aucune disposition visant à les protéger. Les efforts du Gouvernement en ce sens portent essentiellement sur la maîtrise de l’inflation par un encadrement du taux de change du dollar des États-Unis et des prix des produits et des services essentiels. Le Gouvernement a récemment consacré 2 % du produit intérieur brut à amortir l’impact des mesures anti-inflationnistes sur le pouvoir d’achat des particuliers. Tout en réduisant les subventions pour les services essentiels, il a maintenu la subvention accordée aux faibles revenus pour l’électricité et la subvention relative au gaz butane utilisé pour cuisiner. Toutefois, les dépenses publiques de bien-être social ont été limitées par la nécessité de procéder à des coupes pour financer la dette nationale et extérieure. Le réseau de « marchés populaires » vendant des produits alimentaires de première nécessité à faible coût a été élargi. En août 2002, le Cabinet des affaires sociales du Gouvernement a lancé une stratégie nationale de réduction de la pauvreté, conformément aux recommandations de la Commission économique pour l’Amérique latine, fixant le seuil de pauvreté à 42,09 dollars des États-Unis par habitant et par mois, comparé à un pouvoir d’achat moyen de 85,80 dollars des États-Unis par mois. D’après les estimations du Gouvernement, 12,8 % de la population, soit 1 041 569 personnes, vivent en dessous du seuil de pauvreté. Le Gouvernement, en collaboration avec le Cabinet des affaires sociales, a mis en oeuvre 17 mesures de soutien social dans les domaines de la santé, de l’alimentation et de l’aide au revenu, 24 programmes de bien-être social en matière de santé et d’éducation, d’infrastructures de base et d’eau potable et 45 programmes de réduction de la pauvreté, dont des mesures aux chapitres de la santé, de la création d’emplois et de la sécurité sociale. En janvier 2001, le Secrétariat d’État à la condition féminine (SECF) a lancé un programme visant à intégrer une dimension sexospécifique à l’action des différents organes du Gouvernement, conformément au décret présidentiel 974-01. Des services d’équité sectorielle entre les sexes ont été créés au sein de chaque Secrétariat d’État, conformément au Plan national d’équité entre hommes et femmes (PLANEG). Des actions de sensibilisation à la dimension sexospécifique ont été intégrées dans les services du secteur public. Des programmes d’assistance sociale ont été conçus à l’intention de ceux et celles qui vivent dans l’indigence, l’accent étant mis sur les femmes chefs de famille. Le SECF a joué un rôle de premier plan dans le processus ayant conduit à la promulgation de la Loi sur l’exploitation et la traite des personnes et dans la mise en œuvre du plan national de lutte contre la traite. Un centre d’accueil a été ouvert pour les femmes victimes de traite. Les handicapées, les migrantes et les femmes plus âgées ont bénéficié de programmes d’aide spécifique dans le cadre du Programme national de réduction de la pauvreté. Des allocations de 300 dollars des États-Unis par mois sont versée à 300 000 mères célibataires.

D’après l’enquête de la Banque centrale, 42,8 % des femmes âgées de plus de 10 ans travaillent, contre 68,4 % des hommes. Les femmes représentent 39,14 % des employés permanents à temps plein, et 30,3 % de ceux et celles qui sont employés dans le secteur informel. Trois pour cent seulement des femmes au travail le sont dans le secteur agricole, contre 20 % dans l’industrie. Les femmes gagnent entre 61 et 76 % de moins que les hommes, selon leur niveau d’instruction. Depuis 2003, près de la moitié de la main-d’œuvre employée dans le tourisme est de sexe féminin. Le SECF a convenu avec le Programme de crédit pour les micros, petites et moyennes entreprises (PROMIPYME), de fournir prêts et assistance technique à un large éventail de petites sociétés.

Les autorités combattent le travail des enfants dans le cadre d’une initiative conjointe entre le Ministère du Travail des États-Unis d’Amérique et le Secrétariat d’État à l’éducation et à l’emploi de la République dominicaine, aux termes des décrets législatifs no 144-97 et 566-01.

Le Code de procédure pénale, le Code pénal et le Code civil sont en cours de réforme en vue de garantir l’équité entre les sexes. Divers concepts font actuellement l’objet de travaux, notamment ceux du genre, de la violence conjugale et du harcèlement sexuel.

Le SECF compte 52 bureaux provinciaux et municipaux pour les femmes, sans compter les bureaux chargés de l’équité entre les sexes au sein des différents ministères et départements Gouvernementaux. Il participe également à la mise en œuvre de la loi no°24-97 sur la violence conjugale en dispensant une formation de sensibilisation dans la police et auprès des procureurs de la République et en fournissant des abris, ainsi que cinq centres spécialisés destinés aux femmes victimes de violences conjugales. Entre août 2000 et décembre 2003, l’équipe technique du SECF et la police ont eu à connaître de 74 159 affaires de violence conjugale.

Le SECF a également coordonné l’action du comité de soutien interinstitutionnel pour les migrantes. Au niveau provincial et municipal, on dénombre sept réseaux locaux de prévention de la traite des personnes et d’aide aux victimes.

La République dominicaine a entrepris d’intégrer une dimension sexospécifique aux matières et aux programmes scolaires, aux programmes de formation des maîtres et au plan national décennal de développement de l’éducation.

Dans le secteur de la santé, il existe un plan national de réduction de la mortalité maternelle et infantile, qui comprend un programme de dépistage du cancer du col de l’utérus et de l’utérus. Depuis 2002, un programme de prévention et de prise en charge des grossesses chez les adolescentes défavorisées est mis en œuvre dans sept régions du pays, dans le cadre de la campagne nationale de lutte contre la pauvreté. La situation des femmes vivant en régions rurales est suivie par le service « Femmes dans l’agriculture » au sein du Ministère de l’agriculture, qui veille à ce que les politiques agricoles publiques intègrent une dimension sexospécifique. Ce même service a financé des initiatives de formation et de soutien destinés aux femmes produisant et commercialisant des produits agricoles. Le SECF a organisé 12 réunions régionales avec des femmes vivant en régions rurales et des associations féminines pour recenser les problèmes et les éléments de solutions possibles dans les domaines de la santé, de l’éducation, de l’environnement, de la participation politique et de l’emploi. L’information recueillie pourrait servir à concevoir des politiques et être versée à la base de données pour le recensement agricole.

Articles 1 à 6

M me Ferrer Gómez réclame un complément d’information, surtout sous forme de tableaux, au sujet des cas de meurtres de femmes mentionnés au paragraphe 3.3.1 du rapport. Les propositions de réforme du Code pénal semblent très raisonnables. Toutefois, la législation sur la violence contre les femmes, plus précisément la loi no 24-97, ne semble pas correspondre à la définition de la violence sexiste contenue dans la Convention de Belém Do Pará, ce qui donne à penser qu’il semble y avoir une contradiction entre la norme internationale contraignante pour l’État partie et le droit national. Elle demande ce que font les pouvoirs publics pour réformer la disposition pénale en vertu de laquelle une peine pénale pour viol peut faire l’objet d’un sursis si l’auteur de l’infraction a épousé la victime, s’interrogeant par ailleurs sur la question de savoir pourquoi l’inceste n’est pas érigé en infraction pénale. De plus, la réponse du Gouvernement à la liste de questions soulevées par le groupe de travail présession (CEDAW/PSWG/2004/II/CRP.2/Add.1) ne contient aucune évaluation des avantages pour la population de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté.

Mme Ferrer Gómez se déclare préoccupée de constater que, si une médiation est ordonnée dans les affaires judiciaires faisant intervenir un acte de violence à l’égard d’une femme, les poursuites peuvent être interrompues, laissant les auteurs libres de frapper à nouveau. Notant que l’objectif principal de la Convention n’est pas simplement l’équité mais l’égalité, liée au concept de justice sociale, elle demande si l’évaluation du Plan national d’équité entre hommes et femmes a été terminée comme prévu en juin 2004 et si des modifications ont été envisagées. Elle aimerait également savoir ce que le Gouvernement compte faire pour protéger les femmes soumises à l’esclavage sexuel par des réseaux de trafiquants internationaux — par exemple, en poursuivant les trafiquants ou en concluant des accords de coopération avec d’autres pays.

M me Coker-Appiah indique avoir lu dans le rapport (CEDAW/C/DOM/5, sect. 3.3.3) que l’une des principales fonctions de la Commission nationale de prévention de la violence conjugale consiste à surveiller l’application de la législation contre la violence, les lois nos 24-97 et 14-94. Or, l’on sait aussi (rapport, sect. 3.3.2) que l’on manque de structures spécialisées de prise en charge des victimes de violence conjugale autres que celles offertes par les organisations non gouvernementales, ainsi que de foyers sûrs pour accueillir les victimes. Elle aimerait avoir des informations sur les mesures prises par le Gouvernement pour remédier à cette situation, contribuer au financement d’organismes privés oeuvrant dans ce domaine; elle voudrait enfin connaître le pourcentage du budget national total et du budget de la santé affecté au problème de la violence conjugale. Il conviendrait de fournir, dans le prochain rapport, des statistiques et des informations sur l’incidence des divers programmes dans le domaine.

M me Gnacadja note que la réforme des codes civil et pénal semble avoir maintenu un certain nombre de dispositions discriminatoires. La réponse du Gouvernement à la question 20 de la liste de points (CEDAW/PSWG/2004/II/CRP.1/Add.2) ne dit rien des cinq commissariats de police spécialement consacrés à la protection des femmes contre la violence conjugale; elle s’interroge sur le rôle et l’efficacité des brigades de protection des femmes mises sur pied dans certaines villes (rapport, sect. 3.2). Par ailleurs, les statistiques promises dans la réponse à la question 21 de la liste de points n’ont pas été fournies, ce qu’il convient de faire oralement à présent.

M me Achmad déclare que l’évaluation par le Gouvernement de la Plate-forme d’action de Beijing (rapport, sect. 3.5.1) faisait état du fait que les choses n’avaient guère évolué pour améliorer la condition féminine ou modifier les pratiques et les stéréotypes sexistes. Les réponses aux questions 18 et 19 de la liste de points ont montré que la situation n’est pas très satisfaisante s’agissant de la représentation des femmes dans les médias, lesquels devraient plutôt contribuer à faire évoluer les mentalités et à sensibiliser. Les personnes employées dans les médias ont manifestement besoin d’être formées aux questions d’égalité entre les sexes. Elle demande si le Gouvernement compte étudier l’incidence des activités décrites dans les réponses 18 et 19 et s’il a fait quoi que ce soit pour favoriser une prise de conscience au sein de la communauté des professionnels des médias, proposé des prix ou autres incitations pour promouvoir la mise en place de programmes faisant état des avantages de l’égalité entre hommes et femmes.

M me  Gaspard déclare que, normalement, lorsqu’un plan national utilise le terme d’« équité » plutôt que celui d’«égalité », on peut penser que les pouvoirs publics ne sont pas entièrement déterminés à promouvoir une véritable égalité entre les sexes. Elle aimerait savoir combien il y a de femmes dans les prisons surpeuplées, quels sont les motifs de leur incarcération et quelles sont les mesures prises pour faciliter leur réinsertion. Il serait intéressant de connaître les difficultés rencontrées dans le cadre de l’application des mesures temporaires spéciales prévues à l’article 4, paragraphe 1, comme le quota électoral.

M me Tavares da Silva déclare que, même si le rapport donne très peu d’informations concernant l’article 5, la réponse à la liste de points et l’introduction orale indiquent que des mesures ont été prises dans le domaine très vaste que couvre cet article. Concernant la prostitution et la traite des femmes, point abordé dans l’article 6 de la Convention, le rapport indique (sect. 3.6) que le Gouvernement n’a fait aucune étude sur le nombre de femmes employées dans l’industrie du sexe, même si une enquête non gouvernementale a estimé que ce chiffre a presque doublé entre 1998 et 2000. Bien que le rapport fasse état d’une plus grande acceptation sociale et d’un développement des facilités destinées aux les travailleurs du sexe, le fait est qu’il s’agit de femmes poussées par la pauvreté et par une réalité très crue à se livrer à cette activité. La réponse à la question 20 concernant les sanctions infligées aux personnes se livrant à l’exploitation de la prostitution indique que la loi ne prévoit de sanctions que pour ceux qui exploitent les mineurs de moins de 18 ans, alors que cette exploitation est contraire à l’article 6, et ce quel que soit l’âge de la victime.

La Présidente invite la délégation à répondre aux questions du Comité.

M. Mesa (République dominicaine) déclare que les statistiques demandées concernant la violence à l’égard des femmes et la violence familiale sont effectivement disponibles et qu’elles seront distribuées au Comité. On dispose de chiffres sur le nombre de cas ayant fait l’objet d’une enquête, le nombre d’homicides ou de suicides, les types de violences, l’âge des victimes et le nombre de poursuites engagées. Le nombre de plaintes déposées devant les diverses administrations traitant de violence à l’égard des femmes et de violence familiale est passé d’environ 8 000 en l’an 2000 à 10 000 en 2001, 13 000 en 2002, 8 000 en 2003 et 1 000 en mai 2004. Au cours des mêmes années, les brigades privées de protection des femmes constituées dans deux villes ont reçu environ 5 500 plaintes en 2000, 1 200 en 2001, 7 000 en 2002, 13 000 en 2003 et 4 000 en mai 2004.

Les projets de modifications du Code pénal sont actuellement devant la Chambre des Députés, qui étudie toutes les propositions de reforme soumises par le Secrétariat d’État à la condition féminine en collaboration avec une coalition d’organisations non gouvernementales. Une définition de violence conjugale pourrait être étudiée.

Le Secrétariat d’État à la condition féminine, dans le cadre de la campagne contre la violence conjugale, a parrainé une émission de radio intitulée « Connaissez vos droits », dans le but de sensibiliser hommes et femmes à ces problématiques. L’émission, qui est diffusée deux heures par semaine, aborde tous les aspects des droits de la femme et de la condition féminine et constituerait un excellent véhicule de sensibilisation du public aux dispositions de la Convention. Le Secrétariat d’État parraine également des ateliers très appréciés dispensant une formation aux questions d’équité entre les sexes, en coopération avec l’École nationale de la magistrature. Ces formations sont destinées aux juges et aux personnels de tous les niveaux du ministère public. Il existe aussi des ateliers pour le public, auquel l’on destine également des bandes dessinées spéciales, des activités et des cours communautaires dans les écoles. De 2002 à 2004 le Département de la défense contre la violence à l’égard des femmes a travaillé avec la Commission nationale pour la prévention de la violence conjugale sur les activités susceptibles de réduire la violence conjugale et la violence à l’égard des femmes : il est prévu à court terme de recourir aux réseaux régionaux et locaux pour réduire l’incidence de la violence en incitant écoles et universités, églises et associations professionnelles à développer solidarité et harmonie. Les didacticiels requis sont en cours d’élaboration au sein du Secrétariat d’État à l’éducation. En outre, les brigades de protection des femmes, rattachées à la Police nationale et mentionnées précédemment, ont été étendues à d’autres villes. Comme on le voit dans le rapport (sect. 3.3.3), un Modèle national de prise en charge et de prévention dans le domaine de la violence conjugale a été élaboré dans le cadre de l’application de la loi no 24/97. Ce modèle définit un ensemble de lignes directrices en vue d’utiliser au mieux les ressources disponibles dans les divers secteurs, l’effort étant concentré dans les domaines convenus et en favorisant la coordination entre le Secrétariat d’État à la condition féminine, le Secrétariat d’État à l’éducation, à la santé et au bien-être social, la police nationale, l’École nationale de la magistrature et la Cour suprême et leurs antennes régionales et locales. De plus, les réseaux locaux de lutte contre la violence familiale susmentionnés ont engagé des activités au niveau local. Ces réseaux, désormais constitués en divers endroits du pays à l’issue d’un projet pilote dans la capitale, sont composés de représentants régionaux et locaux des organes de la Commission nationale de prévention de la violence conjugale. Juges, enseignants, procureurs, policiers et particuliers ont bénéficié de formations inspirées d’un modèle international relatif aux questions d’égalité et violence familiale. En 2002 et 2003, 50 000 femmes ont participé à des réunions organisées pour débattre des dispositions de la loi n°24-97. Divers manuels, brochures et publications sur toutes ces activités pourront être distribués au Comité.

Une récente loi a préconisé l’ouverture de refuges, le pays en comptant déjà deux, ainsi qu’un abri pour femmes battues et un autre pour les victimes de violence familiale.

En 2003, le Secrétaire d’État à la condition féminine a présenté un projet sur la traite des personnes, qui a été approuvé par le Congrès et promulgué par le Président de la République sous le nom de « Loi sur la traite et le trafic d’êtres humains ». Une campagne de sensibilisation à cette loi a été lancée, avec des émissions de radio, des articles de presse et la diffusion du texte auprès des organismes membres du Comité interinstitutionnel de protection des femmes migrantes (CIPROM), des réseaux locaux de soutien et de prévention et des offices provinciaux et municipaux à la condition féminine. Des mesures ont par ailleurs été prises en matière d’aide médicale et psychologique, de soutien psychologique et de formation à l’emploi. Des efforts ont également été engagés pour recueillir des informations sur les affaires de trafic et diffuser des informations dans les pays de destination. Eu égard au projet de modification du Code pénal, l’orateur note que les rubriques prévues concernent le génocide, les questions d’équité entre hommes et femmes, l’orientation sexuelle, le meurtre des femmes, la violence, les violences sexuelles, le viol, l’inceste, le trafic, les atteintes à la dignité individuelle, le harcèlement et l’abandon de famille.

M me Nivar (République dominicaine), en réponse à une question du Comité sur le rôle des médias dans la lutte contre la violence conjugale, déclare qu’un réseau de journalistes contre la violence conjugale a été mis sur pied, qui publie un grand nombre de journaux et d’articles et organise de multiples réunions, de concert avec le Secrétariat d’État à la condition féminine. Des efforts ont également été déployés pour inciter églises et médias nationaux à utiliser l’expression de « violence conjugale », ce qui n’a pas été le cas jusqu’à présent. D’autres campagnes de sensibilisation ont été organisées avec de la musique, des chansons et autres formes artistiques, de même que l’on a fait appel à l’aide de vedettes sportives. Les sanctions infligées en cas de violence à l’égard des femmes et des enfants ont été prévues dans la récente loi sur la traite et le trafic d’êtres humains. Concernant la prise en compte de la notion de violence conjugale dans les Codes pénal et civil, l’oratrice remarque que des organisations non gouvernementales, des instances publiques et des associations de la société civile ont étudié le projet de Code pénal et estimé que la violence contre les femmes n’y était pas correctement prise en compte. Toutefois, le Secrétariat d’État a fait de nouvelles propositions, qui ont bénéficié d’un large soutien. Le Secrétariat prépare également des projets de révision du Code civil. Enfin, elle note que la loi a fixé un quota de 33 % de femmes candidates au Congrès, de même qu’une proposition a été faite concernant l’introduction d’un quota identique aux niveaux municipal et local.

M me Díaz (République dominicaine), répondant à une question de Mme Gaspard sur les prisons, déclare que, même si certains des 32 établissements pénitentiaires que compte la République dominicaine sont surpeuplés, ce problème n’a pas d’incidence particulière sur les femmes, le pourcentage de prisonnières n’étant que d’une femme pour 100 hommes. L’essentiel des infractions commises par les femmes incarcérées concernent des affaires de trafic de drogues, de transport de drogues et de vol.

M me Shin, au sujet des réponses de l’État partie à la liste de points et de questions du Comité (CEDAW/PSWG/2004/II/CRP.2/Add.1) demande à la délégation de s’expliquer sur son utilisation du terme « équité » au lieu de « égalité » dans son cinquième rapport périodique. Aux dires de la réponse de l’État partie, le terme « équité » part du principe selon lequel hommes et femmes ne sont pas égaux du point de vue de leur véritable situation sociale, politique, économique et culturelle. Il peut par ailleurs exister des programmes et des mesures différents pour les hommes et pour les femmes, mais qui donneraient dans l’ensemble un équilibre juste. À son avis, si le Plan national d’équité entre les sexes de l’État partie vise effectivement un tel « équilibre juste », cette situation serait problématique dans la mesure où les articles 1 à 16 de la Convention sont entièrement fondés sur le concept d’«égalité », et non d’«équité ».

M me Morvai demande si les stratégies de médiation et de réconciliation sont utilisées dans les affaires de violence conjugale ou si le contrevenant est tenu responsable, conformément à la Recommandation générale n° 19 du Comité sur la violence à l’égard des femmes. Sur un point connexe, elle a entendu dire que les victimes de violence conjugale sont tenues de payer leur certificat médical. Si tel est le cas, elle exhorte l’État partie à modifier ses pratiques. En République dominicaine, la prostitution est considérée comme normale par l’opinion publique, à un point qu’elle n’a constaté dans nul autre État partie. Elle s’enquiert de l’effet de la prostitution sur les familles et déclare que, si le Gouvernement estime la prostitution normale, elle se demande dans quelle mesure elle peut prendre au sérieux l’engagement pris par l’État partie à l’égard de la dignité des femmes.

M. Flinterman, notant que l’État partie avait qualifié sa ratification du Protocole facultatif à la Convention de mesure temporaire spéciale, s’interroge sur la question de savoir s’il a bien saisi le sens de l’article 4, paragraphe 1, de la Convention relatif à l’adoption de mesures temporaires spéciales. Il relève l’obligation faite à l’État partie de diffuser le Protocole facultatif et s’enquiert des mesures prises pour faire connaître le Protocole facultatif à la profession juridique, au pouvoir judiciaire, aux associations féminines et aux organisations de défense des droits de l’homme.

M me Gabr déclare qu’elle apprécierait de bénéficier d’informations complémentaires sur le projet de modification au Code civil et demande à quel moment le texte révisé entrera en vigueur. Elle note également que l’adhésion de l’État partie à un certain nombre d’instruments internationaux de protection des droits de l’homme aurait une incidence sur la modification envisagée. Elle aimerait connaître les modes de financement des mécanismes de garantie des droits des femmes mis en place par la République dominicaine. En ce qui se rapporte à la lutte contre la pauvreté et contre la pauvreté des femmes en particulier, elle s’inquiète de l’accent mis sur l’assistance plutôt que sur le partenariat et espère que l’État partie pourra fournir des informations sur la participation des femmes elles-mêmes.

M me Šimonović se demande si la Constitution de l’État partie et son Plan national d’équité entre les sexes font explicitement référence à l’égalité entre hommes et femmes ou si l’on y parle plutôt d’ « équité entre les sexes ». Il est extrêmement important d’utiliser la bonne terminologie pour assurer la protection des droits de la femme.

M me Patten, notant que les lois électorales de l’État partie contiennent une disposition relative aux quotas électoraux, se demande si la Constitution contient une disposition relative aux mesures temporaires, comme cela est prévu à l’Article 4, paragraphe 1, de la Convention. Si tel est le cas, elle aimerait connaître le libellé exact de cette disposition, afin que le Comité puisse en établir la conformité avec la Convention. À cet égard, elle renvoie l’État partie à la Recommandation générale no°25 du Comité, qui précise la signification de l’article 4, paragraphe 1. Outre les quotas électoraux, les mesures temporaires spéciales pourraient inclure des mesures législatives, exécutives et administratives ou des instruments ou des pratiques réglementaires, comme des programmes de communication et de soutien, l’affectation ou la réaffectation de ressources, le traitement préférentiel et des actions ciblées de recrutement et de promotion.

M me Balcácer (République dominicaine) déclare que son pays est conscient du fait que l’égalité est l’objectif de la Convention. De plus, la Constitution de la République dominicaine a établi le principe de l’égalité, en stipulant que tous les êtres humains sont pleinement égaux devant la loi. Toutefois, il ne saurait y avoir d’égalité sans équité, ce qui renvoie à la nécessité de mettre en œuvre des mesures, des politiques et des programmes visant à compenser les différences issues des discriminations dont les femmes ont toujours été victimes. Étant donné que les réalités socio-économiques, politiques et culturelles de la vie des hommes et des femmes sont différentes, l’incidence des politiques publiques sera également différente. C’est la raison pour laquelle le cinquième rapport périodique de la République dominicaine et la réponse de la délégation à la liste de points et de questions du Comité ont souligné la nécessité de mettre en œuvre des politiques d’équité pour parvenir à une justice de « compensation » pour les femmes. Le Plan national d’équité entre les sexes a donc été conçu pour être mis en œuvre dans tous les secteurs et domaines de la vie nationale, sur la base du principe sous-jacent de l’équité. Les progrès ont été lents, essentiellement du fait de la résistance culturelle. Toutefois, le Secrétariat d’État à la condition féminine a travaillé sans relâche dans les divers secteurs pour en assurer l’application.

Au chapitre des mesures positives, elle fait référence à la loi no 12-2000 établissant des quotas de candidates à l’élection au Congrès. La loi oblige les partis politiques à faire en sorte que 33 % des candidats aux élections législatives soient des femmes, même si le nombre de femmes effectivement élues n’est pas garanti. Elle mentionne par ailleurs la loi no 13-2000 régissant l’égalité entre les sexes s’agissant des candidats aux postes de maires et de députés-maires. Lors des élections de 2003, 13 femmes ont été élues mairesses. En outre, un certain nombre de programmes, administrés par le Secrétariat d’État à la condition féminine, viennent en aide aux mères chefs de famille, qui représentent 28 % du nombre total de ménages au niveau national.

Il reste beaucoup à faire s’agissant de la lutte contre la pauvreté, mais des efforts louables ont été accomplis dans le cadre de stratégies de réduction de la pauvreté, avec des programmes d’aide et d’assistance sociales axés sur les femmes à faibles revenus. Historiquement, les femmes ont toujours eu moins de débouchés et de possibilités de gagner de l’argent; elle souligne toutefois que l’augmentation du nombre de ménages dirigés par des femmes ne doit pas nécessairement être considérée comme négative. Il s’agit plutôt d’une question de responsabilisation pour de nombreuses femmes ayant eu, pour la première fois, la possibilité de travailler, d’être financièrement indépendantes et d’exercer leur pouvoir de décision.

En réponse aux questions posées sur les travailleurs du sexe, elle explique qu’un syndicat de femmes se livrant à la prostitution a mené d’importants travaux, notamment pour faire de ce métier une activité économique respectable. Le terme de « travailleur du sexe » est utilisé par les adhérents au mouvement lui-même, par d’autres associations féminines et par le Gouvernement pour désigner les femmes se livrant à la prostitution. La prostitution est un phénomène social, ayant des répercussions locales, nationales et même internationales, dans la mesure où l’on constate un mouvement non négligeable de Dominicaines en direction d’autres régions du monde. Il conviendrait d’accorder davantage d’attention à la situation des femmes qui n’ont que peu d’autres moyens de gagner leur vie et celle de leurs familles proches et élargies. L’objectif des programmes mis en œuvre au titre de la Loi sur la traite et le trafic d’êtres humains (loi no 137-2003) consiste à sensibiliser les femmes s’étant livrées à la prostitution à l’étranger. Par divers moyens dont des cours de formation dispensés dans les missions consulaires à l’étranger, on cherche à donner à ces femmes des informations sur la protection des droits de l’homme et sur les recours juridiques disponibles. Les trafiquants eux-mêmes sont passibles de sanctions prévues par la loi.

M me Henríquez de Sánchez Baret (République dominicaine), en réponse à une question de Mme Morvai, déclare que les victimes de violence conjugale ont reçu leur certificat médical à titre totalement gracieux.

M me Balcácer (République dominicaine) présente un certain nombre de programmes dans le cadre de la stratégie de réduction de la pauvreté du Gouvernement, y compris la promotion des micro-entreprises pour la création de sources de revenus, les programmes de soutien dans les domaines de la santé et du financement de l’agriculture et la promotion de marchés populaires visant principalement des femmes chefs de famille. En outre, des crèches communales ont été ouvertes par des femmes au travail.

M me Henríquez de Sánchez Baret (République dominicaine) déclare que des programmes ont également été mis en place pour combattre les grossesses précoces et aider les familles à faibles revenus à financer la réparation et l’amélioration de leur logement.

Articles 7 à 9

M me Khan, au sujet des commentaires de conclusion du précédent rapport de la République dominicaine, déclare que le Comité a fait part de ses préoccupations au sujet de certaines politiques discriminatoires en matière de nationalité visant les Haïtiens et autres minorités. D’après la réponse de l’État partie à la liste courante de questions, certains facteurs d’origine culturelle ont fait obstacle à l’application de la Loi sur la nationalité. Elle aimerait savoir quels sont ces facteurs décisifs et demande par ailleurs des éclaircissements sur la situation des minorités dépourvues de papiers d’identité, même si elles sont nées en République dominicaine. Des rapports ont été publiés selon lesquels ces personnes nées de parents étrangers pouvaient être scolarisées jusqu’à la huitième année, mais qu’elles étaient ensuite privées de toute possibilité de formation et de recyclage du fait de leur faible niveau d’instruction. La politique dominicaine à cet égard est assimilable à un refus d’accès à l’éducation, à la citoyenneté et à un moyen de subsistance.

Elle aimerait connaître les critères d’octroi des microcrédits, en particulier aux femmes issues de minorités tenues de présenter des documents attestant de leur nationalité pour pouvoir prétendre à ces formes de crédit.

M. Flinterman demande si le projet de loi sur l’immigration a été adopté par le Congrès national depuis la soumission de la réponse à la liste de questions. Il aimerait également savoir quels changements sont prévus du fait de l’adoption du projet de loi ou si le projet de loi tient compte des besoins des travailleuses migrantes.

M me Belmihoub-Zerdani félicite le Gouvernement de la République dominicaine de la fermeté politique dont elle a fait preuve face à la situation économique et sociale et le complimente également de la manière relativement satisfaisante dont elle s’est tirée des conditions difficiles imposées en matière d’ajustement structurel et de service de la dette. Malgré de louables efforts déployés en vue de parvenir à l’égalité des sexes, il reste beaucoup à faire. Eu égard à la représentation politique, elle exhorte l’État partie à envisager l’adoption de mesures notamment législatives en vue d’affecter un nombre précis de sièges à des femmes dans les postes de décision.

Elle apprécierait également d’être tenue informée des réalisations du Forum féminin des partis politiques depuis sa création en 1999.

M me Saiga pose une question sur l’acquisition de la nationalité par les épouses étrangères mariées à des Dominicains et sur le statut des enfants nés de ces mariages, tant sur le territoire de la République dominicaine qu’à l’étranger.

Elle demande un complément d’informations sur le contenu du projet de loi sur l’immigration et l’état d’avancement de l’accord entre le Secrétariat d’État à la condition féminine et l’Organisation internationale des migrations.

M me Patten demande des détails au sujet du libellé du projet de loi sur l’immigration. Elle aimerait savoir dans quelle mesure les modifications proposées dans le projet de loi supprimeraient la discrimination à l’encontre des immigrés. Elle s’interroge également sur la question de savoir si ce texte est susceptible d’être adopté prochainement. Comme l’intervenante précédente, elle aimerait obtenir un complément d’information sur le statut des enfants nés en République dominicaine de parents haïtiens. Par ailleurs, les étrangères mariées à des Dominicains peuvent-elles conserver leur nationalité d’origine et la transmettre à leurs enfants?

Elle demande dans quelle mesure l’accord passé entre le Secrétariat d’État à l’éducation et le Conseil central des élections en vue de rationaliser les procédures d’obtention des certificats de naissance nécessaires à la scolarisation a été mis en œuvre et quelles mesures ont été prises pour veiller à ce que les groupes cibles bénéficient de cet accord.

M. Mesa (République dominicaine) déclare que le Secrétariat d’État à la condition féminine a travaillé directement avec les organismes compétents en matière de protection des migrantes à la rédaction du projet de loi. D’importants efforts de coordination sont également engagés avec le Comité interinstitutionnel de protection des femmes migrantes (CIPROM).

En vertu de la Constitution, toute personne née en République dominicaine, à l’exception des diplomates étrangers et des personnes en transit, a droit à la nationalité dominicaine. Le Secrétariat d’État à l’éducation s’efforce actuellement de mettre au point des procédures en vue de régler la question de l’accès à l’éducation.

M me Díaz (République dominicaine), en réponse à une question de Mme Saiga sur la nationalité, déclare que les étrangères mariées à des Dominicains bénéficient de la discrimination positive, dans la mesure où elles acquièrent automatiquement la nationalité dominicaine en conservant leur nationalité d’origine, contrairement aux Dominicains mariés à des étrangères. Les enfants nés en République dominicaine ont la nationalité dominicaine. Dans le cas des enfants nés à l’étranger de parents dominicains, ils ont la possibilité d’acquérir la nationalité dominicaine par simple demande au Ministère de l’Intérieur à l’âge de 16 ans.

M me Cubilete (République dominicaine) explique que des efforts sérieux ont été engagés, sur décision du Conseil électoral, pour régler le problème des personnes sans papiers leur permettant de prouver leur nationalité ou d’accéder à l’enseignement. La législation dominicaine relative aux enfants et aux adolescents garantit l’accès de tous aux services sociaux, quelle que soit leur origine ethnique.

M me Balcácer (République dominicaine) déclare, au sujet de l’octroi de crédits et des droits économiques qu’en principe, les femmes n’ont pas à présenter de preuve de nationalité pour bénéficier d’un prêt. Toutefois, pour certaines formes de crédit « informelles », dans le cadre de programmes de lutte contre la pauvreté, les organismes de financement ont souvent pour politique de demander une preuve de nationalité et de séjour pour garantir le respect des obligations en matière de remboursement.

La séance est levée à 13 heures.