Vingt-septième session

Compte rendu analytique de la 561e séance

Tenue au Siège, à New York, le 12 juin 2002, à 10 heures

Présidente :Mme Abaka

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (suite)

Quatrième et cinquième rapports périodiques du Danemark

La séance est ouverte à 10 h 10.

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 18 de la Conventionsur l’élimination de toutes les formesde discrimination à l’égard des femmes (suite)

Quatrième et cinquième rapports périodiques du Danemark (CEDAW/C/DEN/4; CEDAW/C/DEN/5, Add.1 et Corr.1; CEDAW/PSWG/2002/II/CRP.1/Add.2; et CEDAW/PSWG/2002/II/CRP.2/Add.1)

La Présidente invite les membres de la délégation du Danemark à prendre place à la table du Comité.

Mme Abel (Danemark) déclare que le Plan d’action adopté par la quatrième Conférence mondiale sur les femmes a fortement influencé le Gouvernement danois dans l’établissement de sa politique en matière d’équité entre les sexes. L’application de la Convention et la suite donnée au Plan d’action au niveau national ont permis de prendre en compte efficacement les préoccupations passées du Comité à l’égard de la violence contre les femmes, de la traite des femmes, du chômage et de la situation sur le marché du travail.

Avec une présence sur le marché du travail au taux de 75 % et un taux de fécondité de 1,7 enfant, les femmes danoises, grâce aux possibilités offertes en matière de garde d’enfants et autres facilités s’y rapportant, peuvent mener de front carrière et maternité. Bien que les femmes prennent la plupart des responsabilités en la matière, les jeunes hommes s’impliquent de plus en plus dans la vie de famille et dans le rôle de parents. De tels changements dans les priorités familiales ont abouti à de nouvelles alliances entre jeunes hommes et jeunes femmes ayant en commun l’objectif de créer des conditions de travail compatibles avec une vie de famille. Le Gouvernement a énoncé une série d’objectifs en faveur de la parité afin d’assurer un partenariat égal entre hommes et femmes.

Les femmes au Danemark occupent également de hautes fonctions politiques : 44 % des personnes siégeant au sein des conseils ou comités publics sont des femmes. Le Parlement danois compte quant à lui 38 % de femmes.

Depuis la préparation du cinquième rapport périodique en mai 2000, une nouvelle législation sur l’égalité entre les sexes a été adoptée, aboutissant à la création d’un ministère de l’équité entre les sexes, d’un centre de connaissances pour l’égalité entre les sexes et d’un conseil pour l’égalité entre les hommes et les femmes. Il a été invité à publier une perspective et un plan d’action annuels contenant de nombreuses priorités qui sont liées à la Convention et au Plan d’action de cette dernière. Malheureusement, depuis son ouverture, le centre des connaissances a dû cesser ses activités d’organisation financée par l’État et les continuer sous un statut de fondation privée associée à une grande université. La nouvelle législation sur l’égalité entre les sexes adopte une stratégie faisant intervenir le souci de l’égalité entre les sexes dans tous les processus de prise de décisions politiques avec intégration de la parité, action corrective et priorités spécifiques dans le but de protéger femmes et hommes de la discrimination. Le Gouvernement danois se concentre sur des questions particulières comme l’éradication de la violence contre les femmes et le trafic de femmes. Il a pris un certain nombre de mesures pour traiter ces questions.

Malgré une proportion élevée de femmes sur le marché du travail, les problèmes interdépendants que sont l’égalité des salaires, un marché de l’emploi inégalitaire et la conciliation de la vie de famille et de la vie professionnelle créent un déséquilibre persistant que le Gouvernement tente de corriger par des mécanismes existants, notamment la législation et un éventail d’initiatives pour encourager la flexibilité du marché de l’emploi.

S’agissant des minorités ethniques, le Gouvernement fait des efforts particuliers pour intégrer les femmes et les hommes appartenant à des minorités ethniques au sein du marché du travail et les lois récentes ont porté de 18 à 24 ans la limite d’âge pour le regroupement familial afin d’empêcher la pratique du mariage forcé.

S’agissant de la question des femmes et du développement, un cadre stratégique en faveur de la promotion de l’intégration de la parité et du droit des femmes a été mis à l’essai. Un fonds important a été établi pour encourager des pratiques novatrices dans le combat contre la pauvreté et en faveur de la parité.

Mme Lykke Thomsen (Danemark), parlant au nom du Gouvernement autonome du Groenland, souligne que la législation qui reflète les changements dans la société groenlandaise a permis à la situation et aux conditions d’égalité entre les sexes de continuer à s’améliorer. Une nouvelle législation a été élaborée pour remplacer les anciennes lois datant d’avant la formation du Gouvernement autonome. Une proposition de loi vise à mettre en avant les responsabilités et les obligations des services publics en matière d’égalité de traitement entre hommes et femmes et de la parité dans l’emploi. Elle devrait inclure l’intégration et l’action corrective et souligner l’engagement du Parlement groenlandais. Le Gouvernement autonome est également conscient de la nécessité d’un équilibre entre vie de famille et vie professionnelle et participe activement aux efforts faits dans les pays nordiques pour lutter contre la violence à l’égard des femmes.

Les données les plus récentes concernant l’emploi, qui datent de 1996, indiquent que les deux tiers des employés gouvernementaux et municipaux, particulièrement dans les secteurs de la santé, de l’éducation et des affaires sociales sont des femmes. Alors que les hommes détiennent la majorité des emplois les mieux rémunérés, au sein du Gouvernement lui-même, 6 des 12 postes de vice-ministre sont occupés par des femmes.

L’éducation et le renforcement des capacités sont essentiels pour assurer l’égalité des chances sur le marché du travail. Des statistiques indiquent de manière encourageante que pour la période 2000-2001, un nombre croissant de femmes poursuivent des études à tous les niveaux.

Mme Winther Poulsen (Danemark), qui représente le Ministère de la santé et des affaires sociales des îles Féroé indique qu’en 1994, le Parlement des îles Féroé a adopté une législation en faveur de l’égalité entre hommes et femmes aux îles Féroé, destinée à renforcer l’égalité entre les sexes dans les domaines du travail, de l’éducation et de la culture. Cependant, aucune statistique officielle n’est disponible concernant le respect de cette loi. Plus récemment, en 2001, une loi sur les congés de maternité introduisant le financement public de ces derniers a été adoptée. Elle est considérée comme un progrès important pour les femmes en matière d’emploi mais il y a encore des améliorations à apporter s’agissant de la représentation des femmes dans la vie politique et à des postes de direction.

Parmi les autres mesures adoptées depuis 1990, on peut citer la mise en place d’un centre de crise et l’élaboration d’un programme nordique sur les femmes et la violence. Aucune poursuite pénale n’a été engagée devant les tribunaux et on ne rapporte aucune affaire de trafic de femmes. Jusqu’à une époque récente, peu de cas était fait des problèmes d’inceste, mais les autorités ont commencé à poursuivre de telles affaires.

Elle conclut en assurant que le Ministère chargé de la question de l’égalité entre les sexes des îles Féroé apportera des informations plus précises sur la question lorsque le Danemark soumettra son sixième rapport périodique en 2004.

La Présidente remercie la délégation pour ses rapports ainsi que pour les réponses détaillées apportées au Comité. Il est particulièrement gratifiant de constater l’implication des organisations non gouvernementales dans le processus de préparation des rapports périodiques soumis par le Gouvernement danois tout comme il est particulièrement gratifiant de voir que la Convention est appliquée parallèlement au Plan d’action.

S’exprimant à titre personnel, elle déclare que le Danemark est un modèle s’agissant des questions relatives à la promotion de la femme et que par conséquent l’évolution au Danemark sur la question est extrêmement intéressante. Le Comité est certain que le dialogue constructif avec le Danemark aura un effet stimulant sur les autres États parties qui s’efforcent de parvenir à l’égalité entre hommes et femmes.

M. Melander se réjouit de la participation de représentants du Groenland et des îles Féroé et attend beaucoup des informations relatives à l’application de la Convention dans ces régions.

Il a l’impression que le Danemark est constitué de deux sociétés, un premier groupe constitué des citoyens danois et des immigrés venus des pays d’Europe occidentale, pour qui la question de la discrimination est considérée comme un problème mineur et un autre groupe, composé apparemment de réfugiés et de demandeurs d’asile contre lesquels les médias semblent avoir adopté un ton hostile. M. Melander se pose des questions sur les mesures prises pour décourager les demandeurs d’asile et pour reconduire les réfugiés et demande s’il est humain de forcer les femmes à regagner leur pays d’origine où elles risquent de se retrouver face à des individus ou à un système qui les avait déjà traitées de façon injuste.

Il constate la fermeture du Centre des connaissances et l’abolition du Conseil chargé de l’égalité des races et il demande des explications à propos de ces décisions.

Mme Corti craint que certaines des mesures prises sous le nouveau gouvernement élu en novembre 2001 ne constituent un retour en arrière. Elle se demande en particulier pourquoi le Centre des connaissances pour l’égalité entre les sexes a été fermé malgré ses réalisations, particulièrement ses études sur la situation des immigrants et des femmes appartenant à des minorités ethniques.

Comme M. Melander, elle voudrait avoir de plus amples détails sur la situation des migrantes, des demandeuses d’asile et des réfugiées. Elle souhaite savoir quels sont les termes régissant l’octroi et le renouvellement des permis de résidence pour ces femmes, elle s’interroge sur la politique d’intégration du pays et elle souhaite savoir si la législation récente pour lutter contre le mariage forcé est suffisante.

Mme Goonesekere note avec satisfaction que le rapport périodique du Danemark est accompagné des réactions des organisations non gouvernementales. Elle s’étonne que, d’après les rapports périodiques antérieurs du pays et les rapports actuellement examinés par le Comité, la Constitution danoise ne contient aucune disposition particulière interdisant la discrimination contre les femmes pas plus que d’obligations de non-discrimination. La question est traitée au moyen de législations spécifiques, ce qui risque d’être préjudiciable aux engagements pris par le Danemark et d’avoir des conséquences pratiques, puisque l’information fournie laisse penser que l’égalité est en bonne voie dans le secteur public, mais qu’il n’est guère question du secteur privé. On constate des différences considérables en matière d’égalité. Par exemple, malgré le grand nombre de femmes universitaires, seulement 6 % des professeurs sont des femmes. L’incorporation de la Convention dans la législation danoise aiderait à redresser cette situation.

Elle se félicite du dépôt d’un nouveau projet de loi pour lutter contre le trafic de femmes, mais s’étonne que la peine encourue en pareil cas soit seulement de huit ans d’emprisonnement. Dans la mesure où on peut dire que le trafic de femmes est une forme d’esclavage moderne, cela semble bien peu. Des cas de violence à l’encontre de femmes étrangères sont mentionnés dans le rapport et elle y voit une relation possible avec le trafic.

L’importance accordée à l’égalité des droits des femmes lors de l’élaboration de la politique du développement est louable car elle est l’expression de l’importance donnée au droit des femmes à la santé et à l’éducation. Cependant, le Comité avait déjà constaté que les femmes représentaient la catégorie la plus durement touchée par les exigences macroéconomiques des institutions financières internationales et que l’évaluation de l’impact de ces politiques sur les femmes ne recevait pas une attention suffisante. Elle demande si des mesures ont été prises pour que la politique d’aide au développement du Danemark soit prise en compte dans l’égalité entre les sexes.

Mme Shin se félicite également de l’intégration des réactions des organisations non gouvernementales dans le rapport périodique danois; elle y voit là un signe de confiance et de transparence.

Le rapport aborde le problème de la violence en le reliant à l’article 12 de la Convention qui traite de la question de la santé, mais il semblerait plus pertinent de l’examiner à la lumière de l’article 5, qui traite des stéréotypes. Il faut se féliciter du Plan d’action national de lutte contre la violence à l’encontre des femmes, il est bon que le Gouvernement considère que ce phénomène est une conséquence de la domination masculine (et qu’il fallait donc s’occuper des préjugés latents) et que des politiques à l’égard des individus perpétrant ces violences s’imposaient, comme par exemple l’interdiction de paraître et l’obligation de séances d’orientation. Toutefois, dans le cadre de l’élaboration de mesures destinées à faire évoluer les mentalités, il est nécessaire de se poser la question de savoir pourquoi les individus commettent ces violences et comment ces comportements peuvent être modifiés. Bien que le groupe de travail de présession ait demandé davantage d’informations à la délégation, celle-ci a fourni peu de statistiques sur le nombre d’individus traduits en justice et reconnus coupables.

Il convient de se demander si, dans une société dominée par les technologies de l’information, les femmes sont exposées à de nouvelles formes de violence, comment le Danemark a été touché par le développement de la pornographie sur Internet et du spam à l’échelle mondiale et enfin si du harcèlement en ligne à l’encontre de femmes avait été constaté. Mme Shin souhaite savoir si des mesures ont été prises à l’encontre de ce phénomène.

Mme Tavares da Silva attire l’attention sur la place faite à l’article 5 de la Convention et note que le rapport périodique du Danemark est très riche en informations sur la parité et sur les domaines prioritaires dans ce contexte, mais qu’il contient en revanche beaucoup moins d’informations sur le changement des mentalités, par exemple au moyen de campagnes d’information menées dans les médias et dans les écoles. Parmi les informations fournies sur les mesures prises au regard des différents articles de la Convention, le rapport périodique a tendance à énumérer les mesures, sans donner beaucoup de détails sur les résultats. S’agissant de l’article 6 de la Convention, elle note que le Ministre de la parité souhaite renforcer la coopération avec les femmes appartenant à des minorités ethniques mais le rapport ne donne guère de détails. S’agissant des articles 6 et 9, le rapport mentionne le Comité de l’intégration et de la position juridique des femmes étrangères au Danemark. Le Danemark avait présenté son deuxième rapport d’activité en 1998 et proposé diverses mesures mais rien n’indiquait les programmes en cours fin 1999. L’étude sur les femmes et les enfants appartenant à des minorités ethniques dans les centres de crise entreprise par le Ministère des affaires sociales en 1996 avait donné des résultats en 1999, mais le rapport périodique ne précise pas la suite qui a été donnée. La même chose est vraie à propos du Comité intersectoriel pour l’enfance, ayant pour mission d’élaborer un plan de lutte contre les abus sexuels (inceste).

Il faut se féliciter de la nouvelle proposition de loi et du plan d’action visant à lutter contre le trafic de femmes, mais l’affirmation selon laquelle le trafic est punissable sous certaines circonstances est inquiétante. On peut se demander quelles sont les circonstances où le trafic de femmes n’est pas punissable, étant donné qu’il s’agit de l’achat et de la vente d’êtres humains et d’une violation des droits de l’homme. Comme dans d’autres cas, le rapport périodique énumère des initiatives, sans indiquer les résultats. Des précisions ont été apportées oralement, mais il faut espérer que le prochain rapport du Danemark en fournira davantage.

Étant donné le nombre de ministères impliqués dans les questions concernant les femmes, on peut se demander si une coordination est prévue.

Mme Abel (Danemark) suggère que les réponses aux questions du Comité soient groupées de façon à gagner du temps.

Mme Clausen (Danemark), répondant aux questions de M. Melander sur la situation des femmes immigrées, précise que la loi danoise sur les étrangers serait prise en compte en cas de rapatriement. Elle vient d’être amendée et l’amendement doit entrer en vigueur le 1er juillet 2002. Pour ce qui est de la situation spécifique des femmes originaires de Bosnie et du Kosovo qui sont arrivées dans les années 90, ce sont les dispositifs existants de 1983 qui s’appliquent. Beaucoup de ces femmes jouissent du statut de réfugié conféré par la Convention de Genève de 1951 applicable. Bien d’autres se voient octroyer de facto le statut de réfugié hors du cadre de la Convention de 1951. La loi sur les étrangers est parfaitement égalitaire et s’applique de manière identique aux hommes et aux femmes.

En ce qu concerne les femmes qui ont été violées ou qui risquent de se retrouver face à leurs agresseurs, celles qui jouissent du statut de réfugié en vertu de la Convention de Genève de 1951 ne peuvent être rapatriées. Celles jouissant du statut de réfugié de facto ne risquent pas le rapatriement si les autorités estiment qu’une telle mesure n’est pas appropriée. Après le 1er juillet 2002, la Convention de 1951 s’appliquera comme avant, mais le statut de réfugié de facto n’existera plus. Cela ne signifie pas que le statut de réfugié ne peut être acquis qu’en vertu de la Convention. Un nouveau statut d’« individu protégé » sera en effet introduit. Aux termes de la loi telle qu’amendée, le Danemark continuera à s’acquitter de ses engagements internationaux découlant par exemple de la Convention contre la torture ou autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants, puisque des individus risquant la peine de mort, la torture ou des peines ou traitements inhumains ne seront pas rapatriés. Les demandeurs d’asile qui subjectivement redoutent la torture ou le viol, lorsqu’ils sont arrivés sur le territoire danois, mais dont le pays d’origine a évolué, ne recevraient pas automatiquement un permis de séjour, mais peuvent toujours prétendre au statut de réfugié en vertu de la Convention de Genève de 1951; ils peuvent aussi bénéficier du statut d’individu protégé si les autorités de leur pays ne sont pas en mesure de protéger les victimes potentielles.

Les permis de séjour à des fins de regroupement familial sont octroyés indifféremment aux hommes et aux femmes. L’amendement à la loi sur les étrangers introduira des modifications qui seront décrites dans le prochain rapport périodique. La loi interdisant les mariages forcés n’est en fait pas une loi mais un autre amendement à la loi sur les étrangers. Le Gouvernement est contre cette pratique et a relevé l’âge du regroupement familial par mariage de 18 à 24 ans considérant que, plus âgés, les individus étaient mieux à même de résister aux pressions familiales et culturelles. À l’instar de l’ensemble de la législation, cette loi s’applique de manière égalitaire.

Cependant relever l’âge pour le regroupement familial n’est pas le seul moyen de lutter contre le mariage forcé. Des mesures gouvernementales visant à assister les jeunes ont également été mises en place et le Ministère chargé des réfugiés, de l’immigration, de l’intégration et des affaires européennes dispose de fonds lui permettant de prendre des mesures contre la violence domestique et les mariages forcés. Un séminaire intitulé « Entre la tradition et les changements » a été organisé pour discuter avec des experts de la question du mariage forcé. Le Gouvernement a soutenu des organisations telles que « Le pont » chargées d’assister les femmes obligées de quitter leurs familles pour éviter un mariage forcé en leur trouvant des logements avec d’autres femmes dans la même situation. Les facilités d’intégration relèvent de la loi sur l’intégration du 1er janvier 1999, qui introduit un programme de formation de trois ans à la langue et à la culture danoises, l’accent étant mis sur la facilitation de l’accès au marché du travail. Il est prévu d’évaluer la loi en automne 2002, après trois ans de validité. En principe les cours de langue danoise devront être modifiés pour mettre davantage en lumière le lien entre cette formation et l’accès au marché du travail. Des informations seront également données sur l’égalité entre les sexes.

Les femmes ayant obtenu un permis de séjour du fait d’un mariage sont protégées par la loi et ne peuvent perdre ce permis après un divorce pour cause de violence. Les autorités ont appliqué ces dispositions à plusieurs reprises. Les rares cas de révocation du permis de séjour ont eu lieu lorsqu’il y avait des doutes concernant les preuves de violences subies. D’aucuns disent qu’il est difficile de fournir des preuves mais il est facile d’utiliser des rapports médicaux ou des rapports de police à l’appui de ces affirmations. Conscients de l’importance de ces dispositions, les services s’occupant des étrangers ont publié une brochure sur le sujet en anglais, qui est à la disposition du Comité.

Mme Abel (Danemark) souligne que la question de la violence à l’égard des femmes appartenant à des minorités ethniques a la plus haute priorité dans le Plan national de lutte contre la violence à l’égard des femmes. Le Ministère de l’égalité entre les sexes et le Ministère chargé des réfugiés, de l’immigration, de l’intégration et des affaires européennes consulteront les organisations non gouvernementales afin de trouver des solutions au problème du mariage forcé.

Mme Lehmann Nielsen (Danemark), répondant à M. Melander sur l’abolition du Conseil pour l’égalité des races, déclare qu’une loi publiée il y a seulement deux semaines a créé un Centre pour les études internationales et les droits de l’homme composé de deux établissements : l’un est chargé des études internationales et des droits de l’homme, et l’autre est chargé de promouvoir la recherche en matière de droits de l’homme en temps de paix et en temps de conflit. Il a pour mission d’aider les victimes de discrimination dans leur procès. Il traitera également la question de l’égalité des races en ayant l’avantage de s’occuper de plaintes individuelles. Deux sièges à son conseil d’administration sont réservés à des individus appartenant à des minorités ethniques.

Mme Abel (Danemark) souligne que, bien que le Centre de connaissances pour l’égalité entre les sexes ne soit plus financé par l’État, il continue à exister en tant que fondation privée rattachée à une grande université. Il existe un grand nombre d’institutions et de services chargés de la question de l’égalité des sexes. L’une des activités du Centre des connaissances était de renforcer l’intégration d’une démarche antisexiste, mais il n’est pas la seule instance à remplir ces fonctions. Le fait que le Centre des connaissances n’existe plus sous sa forme antérieure ne signifie pas qu’il n’y a pas d’institutions indépendantes traitant le problème de la parité. Son nouveau statut lui donne plus d’indépendance et les organisations ont traditionnellement au Danemark un rôle de surveillance. Le fait que le Conseil du Centre, où étaient représentées les organisations chargées des questions féminines, n’existe plus ne signifie pas que la voix de ces organisations n’est plus entendue. Le Ministère de la parité projette la mise en place d’un réseau consultatif où seraient représentées les organisations chargées des problèmes des femmes qui siégeaient au Conseil du Centre des connaissances et qui en fait auront plus d’influence qu’auparavant.

Répondant à une question de Mme Corti sur les raisons qui ont inspiré la création d’organisations d’hommes, elle indique que bien que leurs organisations soient mieux placées pour apporter une réponse, la question de la parité n’est pas considérée au Danemark comme une lutte des seules femmes. Le dialogue est nécessaire et, loin de lutter les unes contre les autres, les organisations d’hommes et de femmes travaillent souvent ensemble. La seule source de conflit est la garde d’enfants.

Mme Axelsson (Danemark) indique que s’il est vrai que la Constitution de 1953 ne comporte aucune disposition spécifique relative à la parité, l’égalité de traitement entre hommes et femmes y est prise en compte. Les conventions internationales relatives aux droits de l’homme peuvent être appliquées, invoquées devant les tribunaux et peuvent servir de base à des lois.

S’agissant de la question sur le trafic de femmes, une nouvelle loi prévoyant une peine de prison pouvant atteindre huit ans dans le cas de trafic d’êtres humains vient d’être adoptée. Cette loi est conforme aux engagements pris par le Danemark dans le cadre de la décision du Conseil de l’Union européenne sur le trafic des êtres humains. Le Code pénal danois permet que la peine maximum soit augmentée de moitié, soit jusqu’à 12 ans de prison s’il y a des circonstances aggravantes, par exemple si la vie des victimes est mise en danger. Le Danemark est membre du Groupe spécial sur le crime organisé dans la région de la mer Baltique et a participé à des séminaires consacrés au trafic de femmes, qui ont souligné la nécessité de renforcer la coopération effective entre les pays de la région. Les ministères de la justice des pays nordiques ont également participé à l’organisation d’une campagne d’information sur le trafic, lancée par la Suède.

Le plan d’action du Gouvernement sur la violence à l’encontre des femmes montre clairement que la violence domestique est inacceptable. L’action vise également les auteurs de ces violences, qui peuvent parfois bénéficier de suspensions de peine sous la condition de suivre un traitement. Ces individus peuvent également suivre un traitement en prison. Le Gouvernement améliore son système national de statistique et joindra des statistiques mises à jour dans ce domaine à son prochain rapport.

Mme Appel (Danemark) déclare que la violence est une expression de la domination masculine. Les femmes gagnant leur indépendance économique, elles peuvent sortir des situations violentes car elles peuvent subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Le Plan d’action met davantage l’accent sur les auteurs des actes de violence dans un effort pour mettre fin au cycle de la violence. Le Gouvernement, s’agissant du trafic de femmes, a une stratégie en trois volets : protection, prévention et poursuite. Dans le contexte de la campagne d’information des pays nordiques et baltes, on privilégie maintenant les besoins des pays bénéficiaires. Lorsque le Danemark présidera l’Union européenne, il parrainera une conférence ouverte aux États membres et aux pays tiers, chargée d’aborder le problème de la protection.

Plusieurs ministères sont impliqués dans la lutte contre la pornographie. Le Code pénal, sous tutelle du Ministère de la justice, a criminalisé la possession de pornographie impliquant des enfants ainsi que la distribution de matériel pornographique à des personnes de moins de 16 ans. Des discussions ont lieu pour tenter de déterminer ce qui est « choquant » en matière d’exposition publique. Le Ministère de l’économie, par l’intermédiaire du médiateur chargé de la consommation, a demandé aux responsables des magasins de s’abstenir d’exposer du matériel pornographique à la vue des enfants. Le Ministère de la culture prend contact avec les médias et établit des codes pour le classement des films et des émissions télévisées. Si l’Internet fait qu’il est véritablement plus difficile de réglementer la pornographie, d’aucuns pensent que les filtres destinés à empêcher de paraître les sites indésirables risquent de faire plus de mal que de bien car ils risquent d’aboutir à une censure non désirée. Des recherches sont en cours sur l’effet de la pornographie sur la manière dont les enfants perçoivent les rôles des hommes et des femmes.

Enfin, s’agissant du problème de l’inceste, deux centres de connaissances ont été établis sous l’égide du Ministère des affaires sociales dont l’un offre des traitements aux enfants victimes d’abus.

Mme Lehmann Nielsen (Danemark) précise que la stratégie de coopération du Danemark en matière de développement a mis l’accent sur le problème des femmes par l’intermédiaire de quatre points clefs : le lien entre la réduction de la pauvreté et la promotion de la condition de la femme; les droits de la femme, notamment le droit à la terre; la santé et l’éducation; et l’accès au microcrédit.

La Présidente, s’exprimant à titre personnel, se déclare inquiète par le fait que le Centre des connaissances pour la parité ne reçoit plus de financement public, ce qui l’obligera à consacrer une partie de son action aux activités productrices de recettes au détriment de l’assistance aux pays en développement. Par ailleurs, le fait de porter de 18 à 24 ans l’âge du mariage aux fins de regroupement familial des immigrés pour empêcher le mariage forcé tout en maintenant l’âge du mariage à 18 ans pour les citoyens danois constitue une discrimination à l’encontre des immigrés.

Mme Schöpp-Schilling dit qu’elle souhaiterait que les résultats des politiques et des programmes discutés soient davantage mis en avant dans les rapports à venir. Elle souhaiterait connaître les raisons pour lesquelles, après l’examen mené en 1999, la Convention n’a pas été mise sur la liste des conventions internationales à incorporer dans le droit national. Il serait souhaitable de savoir combien de femmes siégeaient au Comité d’incorporation, si le cas de la Convention avait été abordé et si le Ministère de la parité aura la possibilité de revenir sur la question. Le Programme d’action de Beijing est un document directif, mais les domaines prioritaires sont liés aux articles de la Convention qui est l’instrument juridique pour leur application. Il serait utile de savoir si la législation émanant des ministères techniques fait référence à la Convention.

La neutralité observée entre les hommes et les femmes dans le cadre de la loi sur les étrangers pourrait poser un problème car l’intégration de la parité exige un état des lieux exhaustif des mesures concernant les femmes, et certaines femmes ont besoin de traitements particuliers. Enfin, la question se pose de savoir si le Centre pour les études internationales et les droits de l’homme accepte les plaintes pour discrimination sexuelle.

Mme González se demande si le manque d’information sur la violence, notamment la violence domestique, tient au fait que les femmes ne signalent pas les actes de violence à leur encontre ou à l’absence de tels actes. Il est bon que le Gouvernement ait lancé le Plan d’action national de lutte contre la violence à l’égard des femmes et envisage un plan d’action sur le trafic de femmes.

Elle aimerait en outre savoir si on dispose d’informations sur les cas de pédophilie impliquant des garçons et des filles, quelles sont les peines infligées et si ces peines sont différentes des peines en cas d’inceste avec des enfants.

Mme Mancini souhaiterait savoir pourquoi le Centre de connaissances pour la parité a été fermé, quels effectifs et quels budgets sont alloués au Ministère de la parité et quelles sont les relations entre les établissements de recherche en matière de parité rattachés à des universités et les unités universitaires s’occupant de ces questions.

Il serait par ailleurs utile de connaître les résultats du plan triennal du Conseil des ministres des pays nordiques ainsi que les mesures prises face à la résurgence signalée des stéréotypes et préjugés négatifs envers les femmes.

Mme Raday aimerait avoir de plus amples informations sur l’effort égalitaire entre hommes et femmes entrepris dans le cadre de la politique de non-discrimination à l’emploi, en particulier au regard de la faible participation des femmes dans ce domaine. La Constitution et la loi sur l’égalité des traitements comportent apparemment l’une et l’autre des dispositions en ce sens. Elle aimerait savoir pourquoi le Danemark n’a pas de politique concrète d’éradication de la discrimination dans des domaines à faible participation féminine et surtout pourquoi, de l’avis du Gouvernement, les femmes, qui sont bien représentées dans la vie politique, ne le sont guère dans la fonction publique et aux postes de responsabilité.

Elle demande également pourquoi les pères célibataires n’ont pas, par principe, la garde des enfants et pourquoi l’idée de la garde partagée n’a pas été envisagée.

Mme Feng Cui remarque que le cinquième rapport périodique mentionne que le Code pénal a été amendé afin d’améliorer les conditions de vie des prostituées. Il serait intéressant de connaître l’ampleur de ces améliorations. Il est également indiqué que la loi réprimant le proxénétisme avait changé, et il serait intéressant de connaître la teneur de ces changements. De plus, il est indiqué qu’une prostituée peut partager son domicile légal avec un homme à condition que celui-ci ne vive pas de ses revenus au point de l’exploiter. Quel est ce point? Elle aimerait savoir s’il est possible, de l’avis du Danemark, d’établir le degré d’exploitation. Afin de protéger les femmes qui s’adonnent à la prostitution, la répression du proxénétisme doit être renforcée et non diminuée.

Le cinquième rapport périodique précise également que la traite des femmes est punissable dans certaines conditions. Faut-il en déduire qu’elle ne l’est pas dans d’autres. Les organisations non gouvernementales s’intéressent activement à cette question mais la position du Gouvernement n’est pas claire. Le Ministère de la parité a créé un groupe de travail. Or, la traite des femmes est une question d’application de la loi plus que de parité; il serait utile de connaître les mesures qui ont été prises par le Ministère de la justice, le ministère public et la police. Il serait bon de savoir combien de femmes sont victimes, combien parmi elles sont danoises ou étrangères, combien de trafiquants ont été traduits en justice et quelles ont été les peines prononcées.

Mme Achmad félicite le Gouvernement danois pour son engagement clair en faveur de la parité et se joint aux autres membres du Comité qui se sont exprimés en ce sens. Elle se félicite de l’effort de recherche et se demande si des études ont été conduites pour identifier les causes profondes de la discrimination entre les sexes. Cependant, la recherche semble avoir pour but d’empêcher la discrimination à l’avenir : elle aimerait savoir si des recherches similaires sont menées à l’égard de personnes déjà victimes. L’État partie doit garantir un traitement égal entre hommes et femmes et ce, sans une analyse de leur situation comparée. La Convention cherche l’égalité sur le fond, qui exige des changements structurels étayés sur la recherche.

Il est important de souligner que la Convention et la Déclaration et le Programme d’action de Beijing sont deux documents très différents : l’un est juridiquement contraignant, l’autre ne représente qu’une obligation morale.

Mme Acar se demande comment l’examen approfondi des exigences en matière de résidence pour les immigrants touche le statut des immigrantes prisonnières d’un mariage forcé sans bénéficier du statut de résident de manière autonome. Elle ne voit pas le lien entre la prévention du mariage forcé et le recul de l’âge du regroupement familial de 18 à 24 ans.

Elle souligne que les organisations non gouvernementales représentant les minorités ethniques sont souvent de nature patriarcale et par conséquent ne représentent pas les intérêts des femmes. Pour ménager la sensibilité des communautés, le Gouvernement danois risque de freiner l’évolution des droits des femmes.

Pour finir, elle aimerait savoir si des meurtres dits d’honneur ont été commis au Danemark, comment ces crimes ont été traités par les forces de l’ordre et par les tribunaux, et enfin si les victimes étaient des étrangères ou des Danoises conjointes d’étrangers.

Mme Lykke Thomsen (Danemark) signale que le prochain rapport comportera davantage d’informations sur la situation des femmes au Groenland et aux îles Féroé. En attendant, elle fera distribuer de la documentation sur ces pays aux membres du Comité.

Mme Axelsson (Danemark) dit qu’en 1999, le Ministère de la justice avait désigné un comité chargé d’examiner l’incorporation, au droit interne danois, des conventions relatives aux droits de l’homme, notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Convention contre la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants et la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Le Comité avait également pour mandat d’examiner d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme, notamment la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Il a terminé ses travaux en 2001 et a publié un rapport volumineux en danois avec un résumé en anglais en annexe.

Le Comité a constaté que la Convention revêtait un caractère essentiel pour la protection des droits de l’homme, sans recommander une incorporation au stade actuel. Il a considéré que le Danemark devait se limiter à l’incorporation de trois instruments, le Pacte relatif aux droits civils et politiques, la Convention contre la torture et la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale afin d’apprécier les résultats. Il a également considéré que la procédure d’audience des plaintes individuelles en vertu de la Convention sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes n’était pas encore entrée en vigueur et qu’il n’était donc pas possible de préciser la portée des responsabilités des États parties ou des droits différents. Il a signifié qu’il attendait avec impatience l’examen de la jurisprudence appropriée et qu’il serait utile de voir comment les tribunaux des autres États parties interprétaient la Convention. Enfin, il s’est déclaré conscient de l’évolution de la situation et a déclaré qu’il pourrait recommander l’incorporation à un stade ultérieur.

La séance est levée à 13 h 5.