Vingt-quatrième session

Compte rendu analytique de la 491e séance

Tenue au Siège, à New York, le jeudi 18 janvier 2001, à 15 heures

Présidente:Mme Abaka

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport initial de la République du Kazakhstan (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports présentés par les États partiesconformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport initial de la République du Kazakhstan(suite) (CEDAW/C/KAZ/1)

À l’invitation de la Présidente, les membres de la délégation du Kazakhstan reprennent place à la table du Comité.

La Présidente invite le Comité à poursuivre l’examen du rapport initial de la République du Kazakhstan.

Article 2

M. Melander note que le rapport indique (au paragraphe 46) que, conformément au nouveau Code pénal, il est interdit de condamner une femme à la peine capitale ou à une peine d’emprisonnement à perpétuité, ce qui signifie implicitement qu’un homme peut être condamné à la peine de mort. L’orateur se demande si, dans le cadre de la législation kazakhe, il serait possible d’invoquer les dispositions de l’article 2 de la Convention en vue de supprimer la peine capitale.

M me  Achmad apprécie l’abondance des données statistiques fournies – lesquelles montrent bien la nécessité d’une nouvelle conceptualisation du statut de la femme. Pour prendre un exemple, il n’est pas mentionné, dans les objectifs de la Commission nationale de la famille et de la femme, instaurée par le Président, de nécessité de parvenir à l’égalité entre les deux sexes; d’autre part, les questions concernant les femmes sont souvent englobées dans d’autres préoccupations – par exemple, les questions touchant à la jeunesse, au tourisme ou au sport. Comme l’a déjà déclaré Mme Schöpp-Schilling, une réforme est nécessaire afin de rendre le statut de la femme comparable à celui de l’homme, et de veiller au traitement des questions d’égalité entre les sexes et de justice, dans ce domaine.

M me  Shin se félicite des dispositions du nouveau Code pénal, qui accordent davantage de droits aux victimes d’agressions sexuelles; cependant, elle met également en garde les autorités kazakhes contre le fait que la possibilité de règlement à l’amiable permette aux auteurs de ces crimes d’échapper à des poursuites judiciaires, et soumette éventuellement les victimes à des risques de menaces ou de pressions.

Article 3

M me  Gaspard partage les préoccupations de Mme Schöpp-Schilling, dans le contexte des articles 2 et 3, au sujet de la préférence sexuelle lesbienne, et se demande, par ailleurs, si les autorités kazakhes envisagent des mesures visant à traiter la question de la prépondérance du masculin dans la formulation des textes juridiques.

M me  Corti se demande s’il est possible de se procurer le texte du décret présidentiel portant création de la Commission de la famille et de la femme, afin de pouvoir constater si ce texte parle précisément d’égalité entre les hommes et les femmes; d’autre part, Mme Corti demande des informations à propos du budget de cette commission, étant donné l’importance d’un financement approprié pour atteindre les objectifs fixés.

Article 4

M me  Gaspard demande si les garanties constitutionnelles suffisent véritablement à assurer l’égalité entre les hommes et les femmes (paragraphe 53 du rapport), et quelles mesures pourront être prises en vue de prévenir, voire de sanctionner, toute discrimination d’ordre sexuel dans les offres d’emploi du secteur privé.

M me  Livingstone Raday déclare que l’action de promotion des femmes ne devrait pas être exclusivement axée sur des domaines annexes, tels que le crédit ou les industries légères; cette action doit également garantir la représentation des femmes dans tous les secteurs sur une base d’égalité avec les hommes – et ce, aussi bien dans le secteur public que dans le privé, afin de permettre une intégration à long terme des femmes dans l’ensemble de la société.

M me  Schöpp-Schilling déclare qu’il semble assez évident que les garanties constitutionnelles ne sont pas suffisantes, et que les stéréotypes anciens contribuent encore à limiter le rôle des femmes. Elle se demande quelles sont les mesures prises en vue d’éduquer les dirigeants politiques et la population dans son ensemble au sujet des dispositions de l’article 4; elle demande également des informations sur les garanties juridiques visant à instaurer l’égalité des chances pour les femmes, et souligne la nécessité de mesures temporaires spéciales visant à accélérer l’instauration d’une égalité de fait entre les hommes et les femmes. De telles mesures doivent viser, par exemple, à donner la préférence à une femme qualifiée, pour tel ou tel poste, afin de corriger le déséquilibre actuel entre les sexes. La disposition prévoyant ce type de mesures temporaires spéciales est capitale en termes d’application de la Convention; le processus d’application devrait comporter des objectifs et un calendrier précis, et prévoir un traitement préférentiel en faveur des femmes à égalité de qualifications, ainsi qu’une représentation plus importante des femmes dans les disciplines qui ne leur sont pas traditionnellement ouvertes. Les autorités doivent avoir conscience de ce que le déficit de progrès des femmes aurait des conséquences à long terme pour l’économie kazakhe.

M me  Achmad constate qu’en dépit de leur niveau d’éducation relativement élevé, les femmes sont encore sous-représentées sur le marché du travail et en politique. Elle souligne elle aussi la nécessité de mesures temporaires spéciales en vue d’assurer une avancée importante de l’égalité des femmes.

Article 5

M me  Tavares da Silva fait observer que le Kazakhstan a accompli des progrès dans le sens de l’égalité entre les sexes. Se référant plus précisément au paragraphe 73 du rapport, qui semble déplorer la perte d’influence de l’État dans les secteurs médiatique, culturel et éducatif, elle souligne l’importance de la liberté d’expression; mais, en ce qui concerne l’éducation, elle considère que l’État doit absolument jouer un rôle en vue de sensibiliser les jeunes, à l’école, sur ces questions d’égalité. Des progrès pourraient être également accomplis par la suppression de toute formulation sexiste dans les textes de loi et le discours politique en général; de l’avis de Mme Tavares da Silva, les techniques clefs pour améliorer la condition de la femme sont une plus grande information, des campagnes de sensibilisation, une meilleure formation des enseignants, et, enfin, un débat public. L’un des dangers de la persistance des stéréotypes affirmant la supériorité d’un sexe sur l’autre est la violence à l’égard des femmes; à cet égard, l’oratrice espère que le prochain rapport fournira davantage d’informations sur ce type de violence.

M me  Ferrer-Gómez constate que le rapport ne fait guère référence à d’éventuels programmes ou campagnes d’éducation de l’opinion publique qui permettraient de mettre en lumière les problèmes de progrès de la femme, d’éliminer les stéréotypes et de modifier les points de vue socioculturels. La présentation orale faisait, certes, référence à un programme d’études sur les questions d’égalité entre les sexes; mais Mme Ferrer-Gómez se demande à quel niveau ce programme va être enseigné, et quelle formation recevront les enseignants dans ce cadre. Elle souligne également que, par le biais de consultations, le Gouvernement kazakh pourrait tenter d’influer sur les journalistes et les médias en général afin de les sensibiliser davantage à ces questions, et afin qu’à leur tour, les médias éduquent le public dans ce domaine. Par ailleurs, elle se demande si le projet de loi visant à éliminer la discrimination sexuelle dans la publicité, et discuté en 2000 (par. 73 du rapport), a été finalement approuvé, et quels progrès ont été éventuellement accomplis en matière de lutte contre les stéréotypes qui font de la femme un objet sexuel dans la publicité.

M me  Manalo déclare que, si la traite des femmes est bel et bien interdite, les informations dont elle dispose indiquent qu’environ 1 % de la population féminine est touchée par ce type de trafic, et que l’on compte beaucoup plus de femmes que d’hommes parmi les migrants internationaux – ce qui accroît encore la vulnérabilité des femmes. Mme Manalo se demande, par conséquent, dans quelle mesure le Gouvernement kazakh prend ce problème au sérieux, et si, concrètement, des mesures ont été prises pour lutter contre la traite des femmes. Elle demande également si le Kazakhstan a signé la Convention récente des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, ainsi que son protocole, visant à prévenir, à éliminer et à sanctionner la traite des femmes et des enfants.

Article 7

M me  Ferrer-Gómez demande si l’on pourrait obtenir davantage d’informations sur le « Parti de la régénération du Kazakhstan » – notamment le nombre de ses adhérents, son influence réelle, ses activités et son programme politique.

M me  Gaspard déclare que le manque d’influence des femmes dans les sphères sociale, culturelle et politique constitue inévitablement un déficit en matière d’égalité véritable entre les sexes. Le pourcentage de femmes au sein du Gouvernement et au Parlement est faible – même s’il correspond à peu près à la moyenne mondiale (laquelle est elle-même beaucoup trop basse); à cet égard, Mme Gaspard note que les organisations non gouvernementales souhaitent que l’on fixe des quotas pour la représentation des femmes à des postes d’élus. Elle juge ces quotas nécessaires même s’ils font l’objet d’une opposition importante; mais, en même temps, Mme Gaspard met en garde contre une conception qui ferait de ces quotas un plafond en termes de participation des femmes. Les quotas devraient être plutôt considérés comme un moyen de progresser dans le sens de l’égalité totale entre les hommes et les femmes. Dans le cadre de la présentation orale, les représentants du Kazakhstan ont indiqué que plus de 600 femmes participaient aux administrations locales et municipales. Mais Mme Gaspard se demande quel pourcentage cela représente par rapport au nombre total de responsables locaux et municipaux. Les pouvoirs locaux sont l’institution démocratique fondamentale du Kazakhstan, et les femmes exerçant des responsabilités à ce niveau constituent un modèle pour les jeunes filles et les femmes dans leur ensemble. Par conséquent, Mme Gaspard demande des statistiques plus complètes en ce qui concerne le nombre de représentantes aux niveaux des instances locales et nationales.

M me  Myakayaka-Manzini déclare qu’en dépit du principe énoncé à l’article 33 de la Constitution kazakhe, on n’est pas encore parvenu, au Kazakhstan, à une représentation égale des femmes. Il semble que davantage de femmes agissent au sein d’organisations non gouvernementales que dans le cadre des institutions gouvernementales : à cet égard, l’oratrice constate que 11 % seulement des parlementaires et 3 % seulement des membres du Gouvernement sont des femmes. Dans sa présentation orale, la déléguée du Kazakhstan a fait référence au système des quotas; étant donné la nécessité évidente de mesures spécifiques dans ce sens, Mme Myakayaka-Manzini demande quelles mesures sont effectivement envisagées et souhaite savoir si des organisations non gouvernementales et les femmes elles-mêmes prennent part à ce processus.

M me  Tavares da Silva déclare que les données fournies en liaison avec l’article 7 de la Convention font que l’on se demande si les garanties offertes par la Constitution du Kazakhstan sont suffisantes pour assurer effectivement l’égalité entre les femmes et les hommes. Aux niveaux les plus élevés de la fonction publique, les femmes sont plutôt rares, et, sur les 11 partis politiques officiellement enregistrés dans le pays, quatre de ces formations ne présentent aucune femme sur leurs listes, et six ne comptent aucune femme parmi les élus des circonscriptions qu’ils administrent. Dès lors, on peut avancer l’hypothèse que, sur le plan strictement légal, les femmes bénéficient de l’égalité des chances, mais qu’il n’y a pas égalité effective avec les hommes dans le domaine politique.

Article 9

M me  Kwaku fait observer que, si les exigences du paragraphe 1 de l’article 9 ont été totalement satisfaites, en revanche le rapport ne dit rien au sujet du paragraphe 2. À cet égard, Mme Kwaku demande confirmation du fait que les femmes ont le même droit que les hommes à transmettre leur nationalité à leurs enfants.

Article 10

M me  Feng Cui se félicite des progrès accomplis en matière de développement de l’éducation des jeunes filles dans l’enseignement secondaire et supérieur. Mais elle formule un certain nombre de réserves. Tout d’abord, le rapport ne dit pas s’il y a ou s’il est envisagé une révision des manuels scolaires dans le sens de l’élimination des stéréotypes attachés au sexe des personnes. En deuxième lieu, la représentante du Kazakhstan a déclaré, dans sa présentation orale, que des cours relatifs aux questions d’égalité entre les sexes seraient instaurés dans l’enseignement secondaire et supérieur. Mme Feng Cui demande des précisions sur ces deux premiers points. Enfin, en troisième lieu, elle se demande pour quelles raisons le Kazakhstan a pris l’initiative de créer des écoles non mixtes.

M me  Acar, qui se félicite également des progrès accomplis dans le domaine de l’éducation des filles et des avancées des jeunes filles, désormais présentes à tous les niveaux, se demande cependant si cette réussite sur le plan éducatif permet une amélioration du mode de vie des femmes et si ces progrès sont effectivement le meilleur moyen, pour elles, d’accéder à des situations plus satisfaisantes dans la société en général. Elle demande par ailleurs si des recherches ont été faites sur les filières d’études qui débouchent sur les meilleurs emplois, et sur le pourcentage de femmes actives dans les secteurs en question. Car, après tout, l’image de certaines catégories d’emploi peut évoluer, de manière implicite, en fonction de l’évolution des structures sociales en général et d’autres facteurs. Mme Acar demande également des informations sur le pourcentage d’étudiantes dans les universités, leur répartition selon les filières d’études, ainsi que sur les tendances notables. Si l’on ne dispose pas encore de ce type de données au Kazakhstan, il conviendrait de faire des recherches dans ce sens. D’autre part, Mme Acar se félicite de la création, à l’Université d’État d’Almaty Abay et dans d’autres établissements, d’un cursus relatif aux théories de l’égalité entre les sexes – innovation évoquée au paragraphe 74 du rapport. Ce type de cours soutient la cause de l’égalité entre les hommes et les femmes. Enfin, Mme Acar partage l’étonnement de Mme Feng Cui face à l’émergence d’établissements d’enseignement secondaire non mixtes – notamment un lycée exclusivement destiné aux jeunes filles kazakhes et turques. Or, il n’y a pas, en Turquie, de tradition d’écoles non mixtes; par conséquent, Mme Acar est très perplexe quant à l’origine de ces initiatives kazakhes.

M me  Achmad, après approbation des questions posées par ses collègues, demande s’il existe, dans les établissements d’enseignement supérieur, un enseignement consacré aux instruments internationaux de défense des droits de l’homme. Si tel n’est pas le cas, il ne peut y avoir de respect intégral des droits de l’homme au Kazakhstan.

M me  Ferrer-Gómez fait observer que, si, jusqu’en 1991, le nombre de femmes actives a été supérieur à celui des hommes, dans la période 1991-1993, le nombre de femmes actives a baissé de 500 000. Cette tendance s’est maintenue dans le secteur formel de 1995 à 1997 – même si le nombre de femmes employées dans le secteur informel (où les salaires et le statut sont inférieurs) a, au contraire, augmenté pendant cette même période. Mme Ferrer-Gómez demande un tableau actualisé de la situation dans ce domaine. Elle demande notamment quels sont les pourcentages de femmes dans la main-d’œuvre des secteurs public et privé, et dans les effectifs d’employés à temps partiel. Étant donné l’idée selon laquelle de nombreuses entreprises seraient réticentes à recruter des femmes en âge de procréer, Mme Ferrer Gómez demande également si la loi sur l’emploi offre des garanties contre ce type d’attitude, et si des sanctions sont prévues contre tout employeur ne respectant pas la réglementation dans ce domaine.

Par ailleurs, elle se dit préoccupée par le fait que, de 1994 à 1997, le nombre d’établissements préscolaires soit passé de 6 500 à 1 500, et que, en conséquence, les besoins de quelque 350 000 enfants issus de familles pour lesquelles ces établissements étaient particulièrement nécessaires n’aient plus été satisfaits. Et la situation est encore pire en zone rurale : le fait que le nombre de ce type d’établissements n’y ait plus été que de 386 en 1997 (contre 3 800 à l’origine) équivaut à leur disparition quasi totale. Mme Ferrer Gómez se demande quelles sont les raisons de cette baisse brutale et rapide. C’est pourquoi elle demande de nouveau, dans ce domaine, des informations actualisées sur le nombre d’établissements et d’enfants qui les fréquentent.

M me  Ferrer Gómez ajoute qu’il faut également se préoccuper de l’infériorité des salaires dans des secteurs tels que la santé et la sécurité sociale, les industries légères, la confection, la fourrure et la chaussure – dans lesquels les femmes représentent la majorité de la main-d’œuvre de manière écrasante (jusqu’à 80 %). Elle demande quelle action le Gouvernement kazakh envisage à ce sujet. En ce qui concerne la loi sur l’emploi, Mme Ferrer Gómez demande quel type de protection est envisagé vis-à-vis des catégories de personnes mentionnées au paragraphe 102, et quelles mesures sont prévues pour inverser la tendance actuelle. Elle note également qu’aux termes de la loi sur la protection du travail – évoquée au paragraphe 98 –, seuls les femmes et les mineurs ont l’obligation de passer une visite médicale avant d’être recrutés. Elle se demande pour quelles raisons les hommes ne sont pas soumis à cette même procédure. Par ailleurs, elle évoque le paragraphe 94 du rapport, qui fait référence à un programme des pouvoirs publics en faveur des pauvres et des sans-abri – initiative qui avait été omise dans le Programme d’action 1998-2000. Cependant, note Mme Ferrer Gómez, la pauvreté augmente au Kazakhstan, et la plupart des pauvres sont des femmes. Par conséquent, elle se demande quelle est réellement la situation à cet égard. Enfin, face à une relance bienvenue de l’économie, elle demande si les programmes de développement économique font une part à la dimension de l’égalité entre les femmes et les hommes.

M me  Corti demande – face aux effets négatifs de la mondialisation sur la condition des femmes – quelle action est envisagée en vue de réduire le taux de chômage des femmes dans le pays. Elle se demande si l’on peut y parvenir par le développement du travail à temps partiel ou encore par la réduction du temps de travail.

M. Melander déclare que, s’il y a eu effectivement des progrès encourageants quant aux dispositions de l’article 10, cela n’est pas du tout le cas en ce qui concerne l’application de l’article 11. Par conséquent, il se demande si des mesures temporaires de discrimination positive pourraient être prises conformément au paragraphe 1 de l’article 4, en vue d’améliorer la situation des femmes dans le domaine de l’emploi – où il y a, semble-t-il, certaines limitations. En ce qui concerne les travaux « lourds » – et notamment la conduite de véhicules transportant des matières lourdes –, ces activités ne sont pas autorisées pour les femmes dans de nombreux pays; toutefois, on peut se demander si une telle mesure d’interdiction contribue à l’égalité des femmes.

M me  Tavares da Silva se dit également préoccupée par le fait que les femmes doivent obligatoirement passer une visite médicale avant d’être recrutées. Un autre motif de préoccupation est le fait que, d’après le contenu du paragraphe 102 du rapport, les femmes aient été rajoutées en tant que catégorie particulière nécessitant une protection sociale, alors qu’elles faisaient déjà partie de bon nombre de catégories déjà définies lors de la présentation de la loi. Comme l’indique par ailleurs le paragraphe 95, les femmes représentent la majorité des chômeurs de longue durée, si bien que Mme Tavares da Silva se demande si c’est de cette catégorie particulière de femmes qu’il s’agit. Si c’est le cas, la mesure n’est guère appropriée du fait que les femmes constituent plus de la moitié de la population du Kazakhstan. Enfin, elle se félicite de ce que la loi répondant aux exigences du paragraphe 2 c) de l’article 11 concerne également les pères et les grands-parents – outre les mères. À cet égard, il est bon que les mères n’aient pas le monopole de la protection sociale.

M me  Livingstone Raday déclare qu’il faut lutter de manière urgente contre la discrimination à l’égard des femmes en matière d’emploi, que l’on constate encore au Kazakhstan. Les emplois les mieux rémunérés sont toujours considérés comme destinés aux hommes, même si les femmes kazakhes ont, dans l’ensemble, un niveau d’instruction plus élevé que celui des hommes. Le décret présidentiel de 1997 avait initié une politique de promotion explicite de l’égalité des hommes et des femmes sur le marché du travail; par conséquent, Mme Livingstone Raday demande s’il est possible d’inscrire cette politique dans un texte de loi, qui servirait notamment de base à des sanctions contre tout employeur pratiquant la discrimination à l’égard des femmes.

Le paragraphe 44 du rapport indique que les entreprises employant des femmes subissent une perte de productivité en raison du coût des charges de sécurité sociale. Par conséquent, l’oratrice demande si cela signifie que les cotisations patronales et salariales en matière de sécurité sociale sont plus élevées pour les femmes que pour les hommes, et, dans l’affirmative, si l’on a envisagé d’uniformiser le niveau de ces contributions afin de supprimer ce frein à l’emploi des femmes. Par ailleurs, elle demande si l’allocation unique de naissance mentionnée au paragraphe 56 est incluse dans l’allocation de maternité évoquée au paragraphe 109, ou si elle vient s’y ajouter. Mme Livingstone Raday se demande également si le projet de remboursement aux employeurs de cette allocation unique de naissance a été mis en œuvre.

Le paragraphe 57 du rapport indique que le calcul et le versement de l’aide sociale aux familles avec enfants ont été délégués aux pouvoirs locaux. L’oratrice demande si cette aide est payée intégralement ou seulement en partie dans le cadre des budgets des collectivités locales, et si toutes les régions reçoivent les mêmes subventions dans ce domaine. Elle souhaite enfin savoir si l’aide et les primes spéciales accordées aux femmes ayant 10 enfants ou plus sont destinées à atténuer la pauvreté ou à inciter les femmes à avoir un grand nombre d’enfants. Dans cette deuxième hypothèse, Mme Livingstone Raday se demande quelle pourrait être la cohérence d’une telle politique nataliste par rapport au principe, énoncé par les pouvoirs publics, d’une participation active des femmes à la collectivité, à égalité avec les hommes.

M me  Achmad demande si le Gouvernement kazakh mène une politique de coopération avec les syndicats en vue de résoudre les problèmes d’emploi – notamment en liaison avec le principe de parité hommes-femmes, et, si tel n’est pas encore le cas, si les pouvoirs publics envisagent une telle coopération à l’avenir.

M me  Manalo fait observer que la situation de l’emploi des femmes, au Kazakhstan, reflète un schéma très classique, par lequel la probabilité de recrutement d’une femme est inversement proportionnelle à l’importance du poste. S’il n’est pas prévu de mesures temporaires spéciales pour remédier à cette situation, Mme Manalo se demande quels autres types de mesures pourraient être envisagés. Le paragraphe 102 du rapport indique que les catégories vulnérables – dont les femmes – bénéficient de garanties supplémentaires en matière d’emploi. Mais le classement des femmes au sein des « catégories vulnérables » est contraire à l’esprit de la Convention et de l’approche de défense des droits de l’être humain. Mme Manalo considère qu’il n’y a aucune raison de ne pas permettre aux femmes d’être candidates, à égalité avec les hommes, aux emplois disponibles sur le marché du travail, étant donné qu’elles ont un niveau d’instruction plus élevé. Le rapport ne fournit aucune preuve d’efficacité de ce système de classement des femmes en tant que « catégorie vulnérable » quant à l’amélioration de leurs chances d’emploi. Par ailleurs, l’encouragement très prononcé à la maternité est également contraire à l’objectif d’emploi des femmes.

M me  González demande quelle est la nature de l’action gouvernementale en vue de remédier à la baisse de l’emploi des femmes, due au coût des charges de sécurité sociale. Elle apprécierait toute information sur des mesures spéciales destinées à améliorer la condition des femmes âgées. D’autre part, elle espère que les revenus générés par les nouveaux gisements de pétrole – découverts récemment – contribueront à la réduction du taux de pauvreté, qui est très élevé au Kazakhstan.

Article 12

M me  Ferrer Gómez demande davantage d’informations au sujet de l’inégalité entre les hommes et les femmes en matière de planification familiale – situation qui a des effets négatifs sur la santé des mères et des enfants. Elle est préoccupée par la consommation importante de tabac et d’alcool dans le pays – y compris chez les enfants –, et demande quelles mesures sont prises en vue d’inverser cette tendance, aussi bien chez les adultes que chez les jeunes. Mme Ferrer Gómez souhaite également des informations sur toute mesure d’éducation sexuelle visant à réduire l’importance des maladies sexuellement transmissibles. Par ailleurs, les chiffres des avortements ont chuté ces dernières années, au Kazakhstan, mais cela reste un problème de santé assez sérieux. L’oratrice se demande si des mesures sont prises en vue de développer l’accès à la contraception et aux informations liées à la planification familiale. Il est urgent de prendre des mesures en vue de réduire le taux de mortalité maternelle, qui est élevé. Mme Ferrer Gómez note qu’au Kazakhstan, un tiers des femmes enceintes ne bénéficient pas de soins prénatals en début de grossesse, et que ce pourcentage augmente encore; elle demande des explications au sujet de ce phénomène, et, en particulier, si le coût des soins prénatals est prohibitif pour de nombreuses femmes.

Par ailleurs, l’oratrice souhaite davantage d’informations au sujet des femmes âgées kazakhes, qui constituent une population importante, et sur la manière dont elles sont prises en compte dans le cadre des programmes gouvernementaux. Elle demande enfin s’il existe des programmes de dépistage précoce du cancer des organes reproducteurs des femmes.

M me  González se déclare également préoccupée par le taux élevé d’avortements au Kazakhstan. Les droits liés au sexe et à la procréation ne se limitent pas au droit d’interruption volontaire de la grossesse; il s’agit également de permettre aux femmes et aux hommes de prendre des décisions libres et éclairées au sujet du nombre d’enfants qu’ils souhaitent et de l’espacement des naissances. Les informations et les méthodes de planification familiale devraient être plus accessibles aux femmes et aux hommes – et notamment aux adolescents. D’autre part, l’information donnée au paragraphe 131 du rapport et selon laquelle il peut y avoir jusqu’à 80 % d’enfants atteints de maladies chroniques est également préoccupante. Le rapport indique que le Kazakhstan ne produit pas d’aliments spécialement destinés aux enfants. Cependant, de nombreux pays qui ne produisent pas non plus ce type d’aliments ont recours à des produits naturels afin de réduire l’importance de la malnutrition des enfants – cela se faisant souvent avec l’aide de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

La Présidente, parlant en sa qualité d’experte, demande si le taux élevé de tabagisme des femmes provoque une augmentation du pourcentage de maladies cardiovasculaires dans la population féminine du pays.

Article 13

M me  Kwaku demande des informations spécifiques sur le droit des femmes kazakhes à obtenir des prêts bancaires, hypothécaires, et autres formes de crédit et dans quelle mesure elles exercent effectivement ce droit.

Article 14

M me  Manalo demande quelles mesures prend le Gouvernement kazakh vis-à-vis des problèmes socioéconomiques des populations rurales – notamment la malnutrition, le manque de services sociaux (y compris les soins de santé générale et procréative), le taux élevé de mortalité maternelle, ou encore les difficultés particulières des zones rurales, dues aux familles nombreuses et à des contraintes culturelles plus rigides. Étant donné les possibilités de revenus plus restreintes pour les femmes rurales, Mme Manalo demande si des initiatives relatives à l’emploi ou à l’autonomie ont été prises vis-à-vis des régions rurales.

Article 16

M me  Aouij souhaite des informations au sujet du rôle de la justice en matière de promotion des droits de la femme au Kazakhstan. Elle se demande s’il existe des femmes magistrates ou juges, si, dans ce cas, elles occupent des postes à tous les niveaux juridictionnels, et de quelle manière leur présence a pu influer sur l’exercice du droit des femmes. Les juges et juristes de sexe féminin pourraient jouer un rôle majeur en vue de développer la sensibilisation aux droits des femmes et d’interpréter les textes de loi de manière à faire avancer l’exercice de ces droits.

D’après le paragraphe 152 du rapport, il existe toujours, semble-t-il, des cas de polygamie dans la partie sud du Kazakhstan. Il serait utile de présenter un descriptif de la culture de cette région. Étant donné que la loi est censée avoir un effet dissuasif dans ce domaine, Mme Aouij se demande pour quelles raisons le phénomène de la polygamie n’a pas été inscrit dans le Code pénal de 1998 en vue de prévenir une résurgence de cette pratique traditionnelle. Elle demande enfin pour quelles raisons l’interdiction de tout avortement par la contrainte n’a pas été non plus inscrite dans le Code pénal.

La séance est levée à 16 h 55.