Trente-septième session

Compte rendu analytique de la 761e séance (Chambre A)

Tenue au Siège, à New York, le jeudi 18 janvier 2007, à 10 heures

Présidente :Mme Gabr (Vice-Présidente)

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Deuxième et troisième rapports périodiques combinés de l’Inde.

La séance est ouverte à 10 heures.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Deuxième et troisième rapports périodiques combinés de l’Inde (CEDAW/C/IND/2-3; CEDAW/C/IND/Q/3 et CEDAW/C/IND/Q/3/Add.1)

Sur invitation de la Présidente, la délégation de l’Inde prend place à la table du Comité.

Mme Singh (Inde), présentant les deuxième et troisième rapports périodiques combinés de l’Inde (CEDAW/C/IND/2-3), dit que le rapport a été rédigé avec le concours du Comité interministériel du Département pour le Développement de la femme et de l’enfant et les gouvernements des États et a été largement diffusé par l’intermédiaire du site Web du Département. Son gouvernement fait de son mieux pour répondre aux défis posés par la taille de l’Inde et la diversité de son énorme population. Les groupes de presse et la société civile jouent également un rôle clef dans la diffusion de l’information sur les problèmes propres aux femmes.

La Constitution garantit l’égalité des droits aux femmes. Ces droits se sont considérablement accrus à la faveur d’amendements à la Constitution, de lois et de mesures préventives, de décisions de justice ainsi que d’initiatives de la part des médias et d’organisations de la société civile. Les plans quinquennaux reflètent la volonté de ce pays de mettre les femmes sur un pied d’égalité dans le domaine du développement et de la gouvernance. La loi sur le droit à l’information de 2005 intitulée Right to Information Act met en avant la transparence et la responsabilisation au niveau du gouvernement et instaure des mécanismes de contrôle des décisions gouvernementales. La transparence et la responsabilisation en matière de promotion des droits des femmes ont également été consolidées par la décentralisation et la délégation de pouvoirs aux institutions locales.

Le pouvoir judiciaire est farouchement indépendant et les tribunaux, en particulier la Cour suprême, ont confirmé les droits des femmes. Les tribunaux se sont penchés sur les questions d’enregistrement obligatoire du mariage, de harcèlement sexuel, de protection en cas de mariage hors caste et de maintien des droits des femmes musulmanes divorcées. La Cour suprême a estimé nécessaire de donner suite aux allégations d’agressions sexuelles simplement sur la foi des témoignages des victimes et, s’agissant des viols, a étendu la notion d’absence de consentement au consentement obtenu par tromperie ou par de fausses promesses de mariage. À la suite des émeutes au Gujarat, la Cour a débouté un certain nombre d’acquittements, a ordonné le réexamen de milliers de cas et en a transféré certains à l’extérieur du Gujarat. Le problème de la protection des témoins, qui s’est posé après les troubles au Gujarat, est toujours entre les mains de la Cour. Celle-ci est également saisie d’une supplique portant sur le trafic de femmes.

Au titre de l’article 142 de la Constitution, la Cour suprême jouit de vastes pouvoirs et a évoqué les obligations qui incombent au Gouvernement sur le plan international, en vertu de la Convention et du Programme d’action de Beijing, d’établir des directives au sujet du harcèlement sexuel sur les lieux de travail et de soutenir le droit à la propriété pour les femmes vivant dans les tribus. Les femmes peuvent en appeler à la Cour par le moyen de requêtes individuelles ou collectives; ce genre de requête a permis à la Cour d’articuler des droits tels que le droit à l’alimentation, à la santé et à l’éducation qui entrent dans la catégorie générale de droit à la vie.

Le Parlement surveille constamment la conformité des lois et des orientations politiques et examine les lois. Le National Minimum Common Programme, garantissant un minimum à tous les citoyens, illustre le désir du Gouvernement de confier des responsabilités aux femmes. Une nouvelle loi sur le harcèlement sexuel est à l’étude. Les textes législatifs récents comprennent la loi intitulée Domestic Violence Act, qui prévoit des recours civils pour prévenir la violence domestique et pour protéger et aider les victimes; et la loi amendée sur les droits de succession intitulée Hindu Succession Act, qui accorde aux veuves et aux fil-les le droit d’hériter des biens de leurs ancêtres, y compris des terres agricoles. L’engagement du Gouvernement vis-à-vis des fillettes sera encore plus évident lorsqu’aura été créée une Commission pour la protection des droits de l’enfant. Le fléau que constitue l’infanticide des filles est également l’objet de réflexion.

Les 73e et 74e amendements à la Constitution ont débouché sur la responsabilisation politique des femmes grâce à leur participation au Panchayat Raj, système de gouvernance local qui vise à promouvoir la démocratie populaire. La re-présentation des femmes dans les instances locales a dépassé le quota obligatoire de 33 %. Aujourd’hui, plus d’un million de femmes prennent part aux décisions politiques dans les communautés. Une partie du quota de sièges réservés aux femmes est aussi affectée aux femmes appartenant aux castes et tribus répertoriées, y compris les postes de présidente. L’accent est mis sur les groupes d’assistance mutuelle, la formation et l’édification des capacités en vue de développer la participation des femmes et la coordination entre groupes de femmes. Ces efforts, par exemple, permettront de réinsérer les femmes qui vivent de la récupération de déchets, activité actuellement prohibée.

La législation existante sur le trafic sera amendée pour protéger les victimes et infliger des peines plus sévères aux instigateurs. Des consultations ont lieu afin de faire passer une loi qui actualisera le Plan d’action national en vigueur et réintégrera les victimes dans la société. Un plan global de réinsertion sera inclus dans le onzième Plan quinquennal. Dans le but de résoudre le problème du trafic de femmes transfrontalier et d’assurer un rapatriement rapide des victimes, le Gouvernement indien a demandé à l’UNICEF (Fonds des Nations Unies pour l’enfance) d’évaluer la situation actuelle des enfants soumis à un trafic entre l’Inde et le Bangladesh.

Dans le domaine de la santé, sont ciblés les groupes à haut risque en ce qui concerne le HIV/sida, notamment les femmes enceintes, qui se voient proposer prévention et traitements. On a lancé la Mission nationale pour la santé en milieu rural, vouée à la restructuration des prestations de santé en zones rurales, basée sur l’intégration de plans de lutte contre la pandémie et la création d’une communauté sanitaire unique par district. L’un de ses objectifs premiers est de protéger la santé des femmes enceintes, d’assurer la sécurité des accouchements et la bonne santé des nouveaux-nés et d’améliorer en général la santé des femmes des campagnes. Des agents sanitaires et sociaux certifiés sont nommés sur place; on en compte actuellement 250 000.

L’éducation est un droit fondamental et un moyen d’accéder à des responsabilités. Pour favoriser l’éducation des filles, de nouvelles écoles ont été ouvertes à proximité de villes et villages, pourvues de toilettes pour filles et dispensant des bourses, du matériel scolaire gratuit et des uniformes, en particulier aux filles appartenant aux castes et tribus répertoriées et aux minorités. Un programme de repas de midi pour 120 millions d’enfants âgés de 6 à 11 ans garantit l’assiduité scolaire. Les manuels scolaires présentent les femmes sous un angle positif, les enseignants ont été sensibilisés à la problématique hommes-femmes, et les médias sont souvent à l’origine de campagnes éducatives centrées sur les fillettes. Ceci explique la nette hausse du taux d’alphabétisation chez les filles, même dans les états accusant le plus de retard en matière d’éducation.

L’emploi est un élément essentiel de la lutte contre la pauvreté. La loi intitulée National Rural Employment Guarantee Act de 2005 garantit aux ménages ruraux au moins 100 jours de travail par an pour les adultes qui acceptent des tâches manuelles non spécialisées. Au moins un tiers des emplois est réservé aux femmes, qui représentent actuellement 40 % des bénéficiaires. Des fonds d’aide sociale pour les femmes ont été créés dans le secteur dit « non organisé », et des prestations incluant soins de santé, assurance, logement, éducation, loisirs, accès à l’eau et allocations de maternité sont dispensées dans le secteur dit « organisé ». Le projet de loi sur la sécurité sociale étendrait ces avantages au secteur « non organisé ». Pour donner aux femmes les moyens d’agir et leur permettre de trouver plus facilement un emploi, le Gouvernement encourage l’ouverture d’établissements d’enseignement professionnel féminins. Plus de 90 % des groupes d’entraide dans le pays sont composés de femmes et re-posent sur des initiatives favorisant la petite épargne et le crédit. Le nombre de femmes entrepreneurs est passé de 2 % en 1971 à plus de 11 %.

Au sein du Gouvernement, des cellules sur les questions de sexospécificités ont été constituées dans 50 ministères et tous les ministères sont tenus d’allouer des ressources pour les questions ayant trait à la condition féminine. La publication « Hommes et femmes en Inde » a fourni des statistiques ventilées par sexe sur certains indicateurs. Tous les ministères ont l’obligation de fournir des données ventilées par sexe pour leurs programmes. Ces chiffres serviront de base pour établir un Indice sur le développement de la parité et l’émancipation des femmes.

S’attachant aux problèmes spécifiques soulevés par le Comité, l’intervenante dit que le Comité spécial chargé d’examiner la loi sur les pouvoirs spéciaux des forces armées (Armed Forces Special Powers Act) a rendu son rapport, que le Gouvernement est en train de décortiquer. Les incidents odieux du Gujarat se sont déroulés dans un moment d’égarement et la suite des événements a prouvé que le Gouvernement et le peuple indien en ont vraiment tiré les leçons et, preuve du véritable esprit de la nation, ont résisté aux récentes tentatives d’incitation à la violence et à la haine entre les communautés. L’oratrice rappelle également la fermeté dont a fait preuve la Cour suprême. Les efforts conjoints du gouvernement et de la société civile du Gujarat ont contribué au redressement: la situation des femmes et des enfants est maintenant prise en compte, des me-sures de confiance ont été mises en place, et le gouvernement de l’État a nommé une Commission d’enquête.

L’Inde a été frappée par de nombreux désastres nationaux dévastateurs. Après le tsunami de 2004, le Gouvernement, ayant décliné l’aide internationale, a approuvé un programme de secours et de relèvement. Des directives précises sur l’aide en cas de catastrophe ont été élaborées, qui font une large place aux femmes, reconnaissant qu’elles sont souvent plus sérieusement affectées. Les gouvernements des cinq états côtiers touchés ont ouvert des orphelinats et des refuges, et les jeunes orphelins et adolescentes ont reçu des bourses qui leur seront attribuées lorsqu’ils auront 18 ans.

Un Office national de gestion des catastrophes (National Disaster Manage-ment Authority) a été établi pour prévenir les désastres naturels, en atténuer les effets et mettre sur pied des moyens pour y faire face. La loi de 2005 Disaster Management Act prévoit la création de services de gestion des catastrophes, à la fois au niveau national et dans chaque état, et constate la particulière vulnérabilité des femmes et des enfants. Le Gouvernement indien est fier d’avoir prêté assistance au Sri Lanka quelques heures seulement après le tsunami, grâce à la marine indienne, et est également fier d’envoyer bientôt pour la première fois une unité de police entièrement féminine au Libéria dans le cadre de la Mission de l’ONU pour soulager les populations fragiles, dont les femmes et les enfants, dans des sociétés plongées dans des conflits ou venant d’en sortir.

Le onzième Plan quinquennal de l’Inde s’efforcera tout spécialement de créer un environnement permettant aux femmes de prendre des responsabilités. Pour atteindre cet objectif, le Gouvernement continuera à travailler en collaboration avec la société civile, notamment avec les organisations non gouvernementales. Dans ce contexte, l’oratrice est heureuse d’informer le Comité que la Convention a été traduite en hindi, langue nationale, et que trois États l’ont traduite dans leurs langues régionales respectives. Une version simplifiée dans différentes langues indiennes est en préparation et sera largement diffusée. Des efforts sont en cours aussi pour adapter à la situation en Inde les paramètres proposés par le Fonds de développement des Nations Unies pour les femmes (UNIFEM).

Articles 1 à 6

Mme Halperin-Kaddari dit que la déclaration de l’État partie en rapport avec les articles 5 a) et 16 b) de la Convention, évoquant sa politique de non-ingérence dans les affaires propres d’une Communauté sans que cette dernière en ait pris l’initiative ou n’y ait consenti, va à l’encontre de la Convention. Il est clair qu’il existe en Inde, autour du mariage et du divorce, des circonstances liées à des facteurs culturels et traditionnels, qui sont patriarcales et portent atteinte aux droits des femmes. Le Comité estime que les réserves émises par rapport à l’article 16 évoquant des raisons nationales, traditionnelles, religieuses ou culturelles sont incompatibles avec la Convention. Il est irréaliste qu’un État partie attende des propositions de changement de la part de communautés minoritaires; c’est au Gouvernement de donner l’impulsion. L’intervenante appelle donc l’État partie à revenir sur sa déclaration.

M Flinterman, constatant, au vu des réponses écrites de la délégation, que le Gouvernement est en train d’examiner le Protocole facultatif à la Convention, demande si l’État partie compte le ratifier, et si oui, quand. Il se demande si les femmes des castes et tribus répertoriées ont accès aux recours juridiques conformément à l’article 2 c) de la Convention, en particulier à l’aide juridique, et s’il existe des mécanismes assurant et contrôlant l’application de la Convention par les gouvernements, au niveau national et dans les états. Puisque la Convention n’est pas directement applicable par les tribunaux, les juges sont obligés de s’en remettre aux dispositions relatives à l’égalité figurant dans la Constitution. L’orateur demande, par conséquent, davantage d’informations sur les garanties de traitement équitable de la part des autorités de l’État et s’enquiert de l’existence éventuelle d’une loi générale sur l’égalité entre les sexes qui interdirait la discrimination sexiste, tant dans le domaine public que privé.

En référence à la réponse écrite à la question 29 de la liste dressée par le Comité, l’orateur se déclare préoccupé par le fait que les dispositions antidiscriminatoires contenues dans la Constitution ne sont pas aussi étendues que celles qui figurent dans l’article 1 de la Convention. Il note les efforts déployés par l’État partie pour répondre aux besoins des réfugiés et des demandeurs d’asile sur son territoire, y compris des catégories vulnérables comme les femmes, mais prie instamment l’État de devenir partie aux instruments internationaux pertinents, tels que la Convention de 1951 sur le statut des réfugiés et son Protocole de 1967, qui protègent les droits des réfugiés et des demandeurs d’asile.

Mme Dairiam dit que, bien que des réformes législatives aient amélioré la situation des femmes, il faut multiplier les efforts pour que ces lois soient effectivement appliquées. Le rapport cite les multiples raisons pour lesquelles elles ne sont pas suivies d’effet, ainsi que les tentatives du Gouvernement pour surmonter le problème, mais, insiste l’intervenante, il faut analyser les causes de cette absence de progrès et trouver des remèdes.

Il subsiste des vides juridiques, décelés par des organes comme la Commission nationale pour les femmes. Les agressions sexuelles demeurent un sujet préoccupant. La loi proposée pour enrayer la violence communautaire doit fournir des garanties contre les actions ou omissions commises par l’État lui-même et prendre en compte de nouveaux types de crimes comme les crimes sexuels ou sexistes de masse, et prévoir le dédommagement des victimes de violences communautaires. Il conviendrait d’amender le Code pénal pour résoudre le problème de l’intimidation des témoins. Dans l’ensemble, l’État partie doit redoubler d’efforts pour créer un environnement propice à l’émancipation des femmes, en mettant en place des mesures spéciales comme les quotas.

Mme Saiga demande si un nouveau plan d’action pour mettre en œuvre la Politique nationale d’autonomisation des femmes a été rédigé, pour remplacer le dixième Plan quinquennal (2002-2007), qui arrive à expiration. Dans quels délais le Gouvernement « envisage-t-il sérieusement » de renforcer les pouvoirs des Commissions pour les femmes au niveau national et au niveau des États, comme l’a préconisé le Comité ?

Mme Neubauer se soucie de ce que le mandat de la Commission Nationale pour les femmes se concentre sur les droits inscrits dans la Constitution du pays, sans se référer précisément aux dispositions des traités internationaux sur les droits de l’homme. Il conviendrait que la délégation apporte des détails sur l’enquête diligentée par la Commission sur les plaintes individuelles de femmes pour déni de droits, en particulier lorsqu’il y a invocation spécifique de la Convention. Elle devrait indiquer également si la Commission est autorisée à intervenir dans les secteurs public et privé et quels sont les changements prévus pour encourager la coopération systématique entre la Commission nationale et les commissions des États.

Mme Pimentel se réjouit de la récente promulgation d’une loi sur la violence domestique et remarque que le Gouvernement admet que la violence toujours plus grande qui s’exerce contre les femmes est une autre manifestation du statut d’inégalité et d’infériorité des femmes dans la société indienne. Pour permettre la réalisation effective des droits des femmes, il faut sans plus tarder élaborer et coordonner un plan d’ensemble de lutte contre la violence à l’égard des femmes. Quelles sont les mesures adoptées pour combattre les stéréotypes négatifs et empêcher les crimes et atrocités contre les dalit, les femmes des tribus et autres femmes vulnérables ?

Mme Singh (Inde), répondant aux questions adressées à sa délégation, dit que, malgré l’absence de loi centrale sur l’enregistrement obligatoire des mariages, les lois des états rendant obligatoire cet enregistrement sont appliquées dans les États de Goa, Andhra Pradesh, Maharashtra, Karnataka et Himachal Pradesh. En outre, diverses communautés possèdent leurs propres lois imposant l’enregistrement des mariages, dans le but notamment d’interdire le mariage des mineurs. Toute loi centrale devra, cependant, se fonder sur des initiatives issues des communautés. C’est un problème complexe qui exige réflexion.

L’oratrice confirme devant le Comité que l’Inde possède un système de contrôles qui fait partie intégrante de son fonctionnement démocratique, assorti d’une assistance et de recours juridiques au service de tous les citoyens. Néanmoins, le Protocole facultatif étant optionnel, la position du Gouvernement à ce sujet reste inchangée et aucune date ne peut être fixée quant à son adoption.

Le Gouvernement indien tente par la concertation de combler l’écart avéré entre la protection des droits des femmes telle qu’elle est prévue par la législation et telle qu’elle existe dans les faits en Inde. L’ensemble du cadre légal du pays, tout autant que les initiatives et programmes consacrés à l’avancement des femmes, cherchent à éliminer les disparités entre les situations des femmes dans les différentes régions, castes et religions. Un grand nombre de questions ont été posées sur les femmes des zones rurales qui pâtissent de la mondialisation. À cet égard, elle aimerait citer les 73e et 74e amendements à la Constitution qui s’intéressent aux femmes vivant en marge et dans les campagnes. Un autre point positif est qu’on s’attend à ce que 40 % des bénéficiaires du nouveau projet qui garantit 100 jours de travail par an soient des femmes. L’intervenante est également heureuse d’annoncer que le mouvement de microcrédit s’enorgueillit d’environ 2,2 millions de groupes d’assistance mutuelle, dont 90 % uniquement féminins.

La Commission nationale pour les femmes est un organe statutaire créé par le Parlement. Il prévoit des mécanismes alternatifs pour résoudre les conflits par le biais des Lok Adalats (tribunaux populaires), supervise des programmes d’initiation à la législation et contribue de façon notoire à la promulgation de lois concernant les femmes. Cet organisme a également pouvoir d’instruire les plain-tes pour atrocités et violations des droits de l’homme, par exemple les affaires de violence domestique, harcèlement sexuel, meurtre pour obtenir la dot, torture, abandon du domicile conjugal, bigamie et viol.

En 2005 seulement, la Commission nationale a reçu plus de 10 000 plaintes individuelles. Les décisions sont arrêtées au cas par cas. Les différends familiaux peuvent souvent se résoudre par une assistance psychologique, et la Com-mission intervient dans les cas où la police est défaillante. Pour les crimes graves, des enquêtes permettent de procéder à l’interrogation de témoins et à la recherche de preuves, qui conduisent immanquablement à des mesures disciplinaires. L’oratrice tient à souligner que la Commission traite des problèmes de toutes les femmes, quelle que soit leur religion ou leur caste.

M. Vahnavati (Inde) dit que la laïcité et la liberté religieuse sont des aspects fondamentaux de la Constitution du pays rédigée en 1950 sur fond de violence religieuse. On ne peut remettre en question l’unité de l’Inde dans la diversité et les communautés ont le droit de gérer leurs propres institutions. Le Gouverne-ment, pour sa part, ne peut imposer de changement sans qu’un mouvement ne naisse de la communauté. L’intervenant note avec plaisir que les femmes, main-tenant plus instruites, sont de plus en plus au fait de leurs droits. Dans le procès de Danial Latifi, la Cour suprême a défendu le droit pour une femme musulmane de réclamer à son mari divorcé une pension, même au-delà de l’iddat (la période de trois mois suivant le divorce). En tout cas, sous l’action des médias, les mentalités commencent à évoluer.

M. Vahnavati aimerait attirer l’attention du Comité sur la création par le Parlement du pays d’un Bureau national des services juridiques (National Legal Ser-vices Authority), sous la houlette d’un juge en poste à la Cour suprême. Des pro-grammes d’initiation au système légal visent à sensibiliser les catégories sociales défavorisées sur leurs droits. L’orateur constate avec satisfaction que les femmes ont de plus en plus recours à l’assistance juridique qui est offerte. Quant à savoir si la Convention peut être invoquée directement dans les tribunaux du pays, on a estimé jusqu’à présent qu’elle n’avait pas à être appliquée, à moins qu’un traité international soit incorporé dans la législation nationale. Toutefois, depuis 1993, une série de jugements de la Cour suprême se sont réclamés spécifiquement de la Convention, comme dans l’affaire qui opposa Madhu Kishwar à l’Union indienne et le procès Seema contre Ashwini Kumar auxquels font allusion les rapports de synthèse. Les articles 14, 19 et 21 de la Constitution servent de base légale pour la lutte contre la discrimination dans le secteur privé.

En réponse à la question sur les demandeurs d’asile, il faut savoir que l’Inde est confrontée au problème de personnes arrivant de pays voisins, pas nécessairement pour obtenir l’asile, mais dans l’espoir d’une vie meilleure. La protection des témoins a été un problème dans les procès liés aux émeutes du Gujarat, les victimes modifiant leur témoignage pour obtenir des acquittements. Le dossier a été renvoyé à la Cour suprême, et des forces de sécurité de l’État central ont reçu l’ordre de protéger les témoins, car la police de l’État du Gujarat ne suscite guère de confiance. Fait significatif, la Cour Suprême a souligné la nécessité d’un plan de protection des témoins qui couvre le pays tout entier.

S’il est vrai que les progrès pour promouvoir les femmes ont été freinés par l’analphabétisme et l’insuffisance des ressources, il n’en demeure pas moins que l’autonomisation des femmes passe par le savoir. À ce propos, la Commission nationale des droits de l’homme joue un rôle dynamique. À l’initiative de la Commission, par exemple, le dossier de Best Bakery a été réouvert et l’affaire s’est conclue par des poursuites judiciaires.

Mme Singh (Inde) dit que le bilan de l’évaluation à mi-parcours du dixième Plan quinquennal et les résultats des consultations à grande échelle engagées avec la société civile seront incorporés au onzième Plan, qui doit entrer en vigueur le 1er avril 2007. Parmi les principaux thèmes de ce nouveau plan, figurent l’habilitation des femmes et le développement des enfants.

On s’empresse de diffuser la Convention et de la traduire dans les différentes langues locales. Personne ne conteste les recommandations du Comité ni les objectifs de la Convention. Le problème réside dans leur mise en œuvre dans un pays aussi vaste et divers que l’Inde. Les préoccupations du Mizoram, par exemple, sont différentes de celles du Kerala, d’où la nécessité de s’adapter à la région. Dans le nouveau Plan quinquennal l’accent sera mis sur l’importance du changement des mentalités, la formation et l’accroissement des moyens et des efforts de sensibilisation s’adresseront aux membres du Parlement, aux représentants politiques, aux fonctionnaires, aux policiers et magistrats. Recueillir des données est l’une des priorités de l’Inde; ceci permettra aux états d’appliquer sur le terrain la politique sur les femmes décidée au niveau national.

M. A. K. Srivastava (Inde) dit que le projet de loi sur la prévention et le contrôle de la violence communautaire et sur la réhabilitation des victimes n’a pas pour but d’établir de nouveaux crimes, puisque le Code pénal couvre déjà la plupart des délits en question. Il propose plutôt des mesures préventives comme le dépôt et la saisie des armes et des munitions et l’autorisation d’effectuer des fouilles et des mises en détention. Il alourdira aussi les peines pour les violences perpétrées dans le cadre communautaire.

Abordant la question des disparités entre les sexes, l’intervenant dit que le projet de loi qui nous intéresse contiendra des dispositions sur les infractions commises en particulier contre les femmes, comme les agressions sexuelles et les viols. De plus, l’organe permanent, Parliamentary Standing Committee, auquel sont transmis la plupart des projets de lois pour qu’il les étudie minutieusement avant examen et adoption par le Parlement, a récemment présenté un rap-port sur le projet de loi suggérant l’instauration d’assemblées au niveau de la région, de l’état et du pays pour mieux contrôler et encadrer les mesures de secours et de relèvement. Les rapports de synthèse ont aussi proposé que ces assemblées comportent un minimum de femmes. Le projet de loi conférera au Gouvernement central le pouvoir de donner des instructions aux gouvernements des États en cas de violence communautaire.

En ce qui concerne la protection des témoins, le projet de loi rendra illégale l’intimidation des témoins et autorisera les tribunaux à ne pas divulguer l’identité d’un témoin si celui-ci en fait la demande. Il infligera aussi des peines aux té-moins qui cessent de coopérer. En vue d’améliorer le fonctionnement de la justice pénale traitant des infractions commises à l’encontre de catégories sociales fragiles, notamment des femmes, des mesures législatives et administratives sont mises en place. Les lois, surtout celles qui concernent des crimes contre les femmes, sont constamment révisées et, si nécessaire, amendées pour être plus dissuasives.

Quant aux mesures administratives, il y a un dialogue permanent entre le Gouvernement central et les gouvernements des États. Des conférences annuel-les d’officiers de police chevronnés permettent de discuter des crimes envers les femmes et autres groupes vulnérables. Des ateliers font prendre conscience, au niveau de l’état, de la nécessité de lutter plus efficacement contre ces crimes, et un atelier national s’est tenu dernièrement sur la façon d’endiguer le trafic de femmes. De nombreux gouvernements d’États ont créé des cellules spéciales chargées des crimes contre les femmes. La proportion de femmes dans la police augmente peu à peu, et certaines mesures devraient accélérer la tendance.

Mme Singh (Inde) dit que le Gouvernement est résolu à introduire une loi qui réserverait aux femmes un tiers des sièges au Parlement et dans les législatures des États. Un projet de loi a été soumis au Parlement mais n’est pas encore passé. On espère que les représentants de la société civile, dont les organisations non gouvernementales (ONG), feront campagne pour l’adoption rapide de cette loi. Les 73e et 74e amendements constitutionnels ont institué des quotas semblables au niveau du gouvernement local, qui ont eu un impact considérable sur le fonctionnement de la démocratie à la base.

La Commission nationale pour les femmes a une présidente et six membres, toutes femmes. Les secrétaires de la Commission sont des hauts fonctionnaires du Gouvernement indien. Si le Comité le désire, des détails complémentaires pourront être fournis ultérieurement sur le personnel qui compose cette Commission. Quant à la lutte contre les stéréotypes, des programmes sont déjà en place, qui sensibilisent différents groupes, comme les officiers de police et les représentants politiques. Ces programmes seront élargis dans le cadre du onzième Plan quinquennal. Le matériel éducatif est passé à la loupe afin de gommer les stéréotypes sur les sexes. Les médias et la société civile jouent un rôle crucial car elles mettent en lumière les aspects importants de ce problème et soutiennent vivement les efforts du Gouvernement.

Des mesures correctives en faveur des groupes désavantagés sont appliquées par les gouvernements des États: par exemple, un certain nombre d’emplois est réservé aux femmes. Des progrès sont notables, mais modifier les attitudes et pratiques traditionnelles est un travail de longue haleine. Pour ce qui est de la diffusion de la Convention, son contenu a été traduit dans la langue nationale et certaines des langues régionales. Sa mise en application est supervisée par un comité interministériel qui se réunit régulièrement pour passer en revue les mesures. Des comités du même type sont prévus dans les États afin de surveiller l’exécution sur le terrain et de demander des comptes aux gouvernements des États en cas de non respect.

Enfin, il est vrai qu’il faut des mécanismes adéquats au niveau du gouvernement d’État pour donner effet à la loi intitulée Protection of Women from Domestic Violence. À cet égard, le onzième Plan quinquennal prévoit dans le détail une formation et un renforcement des capacités.

Mme Shin loue les efforts déployés par le Gouvernement indien pour mettre en œuvre la Convention, tâche apparemment ardue dans un pays aussi grand et aussi peuplé. Plus spécialement, elle se réjouit des développements positifs concernant les poursuites judiciaires en cas de viol. Néanmoins, on peut parfaire la situation. L’oratrice espère qu’après réflexion, on étendra la notion de viol à tous les attouchements sexuels. Il conviendrait de se pencher également sur la question du viol conjugal, surtout que, lorsqu’il s’agit de mariage d’enfants, le viol conjugal constitue un détournement de mineur. Il faut s’attaquer au problème des sévices sexuels sur enfants en général.

L’adoption de la loi sur la violence domestique est une évolution positive, mais il faut combattre d’autres formes de violence à l’égard des femmes, telles que le meurtre pour dot, les cas de femmes brûlées vives et la chasse aux sorcières. Ce genre de crimes doit être puni, car l’impunité ne fait que perpétuer la position inférieure des femmes dans la société. En ce qui concerne la loi intitulée Prohibition of Sex Selection Act (sur l’interdiction de la sélection basée sur le sexe), il faut veiller à ce qu’elle sanctionne les médecins qui pratiquent des avortements sélectifs au détriment des filles, plutôt que les femmes, qui agissent souvent sous la pression de leur famille ou de la société. Le respect effectif des lois protégeant les femmes est vital, et il faut tout faire pour repérer les insuffisances et les pallier. L’oratrice suggère aussi d’enrayer la violence contre les femmes à toutes les étapes de leur vie en suivant le cycle de la vie et des problèmes de santé.

Il est regrettable que, malgré les demandes récurrentes du Comité, aucune information n’ait été fournie dans les rapports de synthèse sur les événements du Gujarat en 2002. Les renseignements récents sont les bienvenus, mais ne disent mot du nombre de femmes tuées, maltraitées et agressées. Il y a également des disparités entre les informations fournies par l’État partie et celles provenant d’autres sources. En outre, il convient d’intensifier les efforts pour faire triompher la justice et accorder des dommages et intérêts aux victimes. L’intervenante salue le rôle énergique de la Commission nationale des droits de l’homme à ce sujet, mais fait remarquer que c’est au Gouvernement avant tout que revient la responsabilité d’enquêter et de traduire en justice les auteurs de crimes.

Enfin, il faudrait donner au problème de la violence envers les femmes une place décisive dans le projet de loi sur la violence communautaire au lieu d’y faire simplement allusion. Il faut un message clair disant que de telles violences ne seront pas tolérées.

Mme Schöpp-Schilling se demande pourquoi le Gouvernement indien hésite à ratifier le Protocole facultatif à la Convention. Elle aimerait aussi savoir pour quelles raisons les rapports de l’État partie parviennent généralement avec retard et pourquoi, jusqu’à peu, l’information requise sur les événements au Gujarat n’a pas été transmise. Les renseignements qui ont été reçus dernièrement ont été appréciés, mais il subsiste de nombreux sujets de préoccupation. Selon certaines sources, dont la Commission nationale des droits de l’homme de l’Inde même, le nombre de victimes est bien plus élevé que celui avancé par le gouvernement de l’État du Gujarat dans ses réponses aux questions posées par l’État partie. De surcroît, on ignore l’impact que ces événements ont eu sur les femmes en particulier car les données ne sont pas ventilées par sexe. Il est décevant de constater qu’apparemment, on ne reconnaît pas les crimes spécifiques commis contre les femmes du Gujarat, ce qui s’apparente à une discrimination en vertu de l’article 1 de la Convention.

L’oratrice est satisfaite de l’action entreprise par le Gouvernement central après les événements en question, mais il n’a été fourni aucune information sur le contenu des rapports du Parliamentary Committee on Empowerment of Women ou la suite donnée par le Gouvernement central. Le Gouvernement central pourrait, conformément à la Constitution, manifester davantage d’ardeur à enquêter et poursuivre ces crimes et à réhabiliter les victimes. À ce jour, aucune donnée chiffrée n’indique combien de femmes ont été réinsérées ou relogées. Des sources indépendantes font état de plus de 5 000 familles musulmanes vivant encore dans des camps ou campements.

L’intervenante sait que les tribunaux ont été saisis de six cas de viols en rapport avec les événements au Gujarat. Elle demande ce qu’il en est de ces affaires à l’heure actuelle et aimerait savoir quels obstacles entravent le fonctionne-ment de la justice au Gujarat et comment le Gouvernement central pourrait y remédier dans le respect de la Constitution. Étant donné que la Cour suprême a ordonné la réouverture de certains dossiers liés aux incidents du Gujarat pour destruction de preuves, elle demande si les responsables de ces destructions sont appelés à comparaître et combien des dossiers qui ont été réouverts se rapportent à des femmes et à des crimes sexuels.

Le projet de loi sur la violence communautaire semble conforter la position des officiers d’État plus que celle des victimes, ce qui, à la lumière des événements du Gujarat, est surprenant. L’intervenante sollicite un complément d’information sur les femmes et filles musulmanes, en particulier sur les raisons de leur niveau d’éducation peu élevé et leur faible présence sur le marché du travail et en politique. Qu’est-ce qui est fait pour améliorer la situation ? Enfin, l’oratrice demande si le récent rapport de la Commission nationale pour les minorités, apparemment plus sensible aux sexospécificités que certains autres rapports, sera débattu au Parlement et quel sera le ministère en charge du suivi.

Mme Singh (Inde) dit que les questions de violence à l’égard des femmes sont réglées par des lois, des politiques adaptées et des services d’aide, notamment de réinsertion, de formation, de création des capacités et de sensibilisation. Les lois existantes, par exemple sur le viol, le choix du sexe et la pratique du sati, ont été affermies, ou vont l’être. Cependant, bien que la loi attribue au Gouvernement central le pouvoir d’agir, le problème est celui de l’application sur le terrain et de la prise de conscience parmi les officiers d’État. Enfin, l’oratrice est favorable à une approche qui suivrait le cycle de la vie pour aborder le problème de la violence envers les femmes.

M. Vahnavati (Inde) convient qu’il faut redéfinir la notion de viol et d’agression sexuelle de manière moins restrictive, comme l’admet la Commission nationale pour les femmes, qui s’emploie à introduire des amendements en ce sens à la Cour pénale indienne. En ce qui concerne la qualité de l’aide juridique aux victimes, s’il y a risque d’offrir du travail à des avocats désœuvrés, il existe en Inde beaucoup d’avocats de premier ordre qui se consacrent aux questions féminines et offrent leurs services sans contrepartie, à côté des amici curiae auxquels font souvent appel les tribunaux.

Les événements du Gujarat n’auraient jamais dû se produire; ce fut un moment de folie et de honte. L’intervenant félicite les ONG et les médias qui, au prix de sacrifices considérables et au péril de leur vie, ont révélé les injustices qui ont eu lieu. Dans l’affaire Best Bakery, un appel a été interjeté auprès de la Haute Cour pour s’opposer à l’acquittement prononcé en premier ressort; l’appel ayant été rejeté, un ultime appel a été fait auprès de la Cour suprême, conformément à l’article 32 de la Constitution. Reconnaissant qu’il y a des obstacles à la justice au Gujarat, la Cour suprême a ordonné que le dossier soit transféré dans l’État voisin du Maharashtra.

Elle a également réouvert plus de 2 000 dossiers qui avaient été clos parce que les parties coupables étaient introuvables; ces cas ont été réexaminés et assignés à un juge de district; certains, comme celui du viol de Bilkis Bano, ont été confiés au Bureau Central des Enquêtes. Il existe un problème constitutionnel en Inde : le maintien de l’ordre public incombe à chaque État et à la police de chaque État, et non au Gouvernement central; c’est là l’essence même du fédéralisme. Pourtant la Cour suprême a réussi à déplacer l’affaire Bilkis Bano du Gujarat au Maharashtra et en février 2007 elle examinera d’autres dossiers en rapport avec les incidents du Gujarat, avec l’aide d’amici curiae afin de statuer sur les décisions de justice à prendre. En vertu de l’article 355 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à accorder aux états l’assistance de l’Union en cas de troubles internes, mais à condition de faire preuve de doigté.

Mme Singh (Inde) dit que le onzième Plan quinquennal de l’Inde (2007-2012) comprend un train de mesures de secours et de relèvement pour les victimes de viol. En ce qui concerne les définitions, la nouvelle loi apportera des améliorations.

Articles 7 à 9

Mme Coker-Appiah fait observer que le Premier Ministre a rencontré les chefs de partis en vue de parvenir à une entente sur les amendements à la Constitution qui instaureraient un quota de sièges pour les femmes au sein du Parlement et des législatures au niveau des états, d’au moins un tiers. Elle souhaiterait savoir si on est réellement parvenu à un consensus et, si oui, quel est le calendrier prévu pour ces changements. De même, elle demande si a été réglée concrètement la question de la discrimination positive, jugée indispensable, qui amènerait au moins 30 % de femmes dans les services publics, selon les indications données dans les réponses (CEDAW/C/IND/Q/3 Add.1, p. 20). Le Comité apprécierait vivement des informations sur ces mesures et leurs effets, en se fondant sur l’évaluation de mi-mandat. Il aimerait en particulier avoir une idée du nombre de femmes bénéficiaires et des secteurs concernés, et que ces données soient ventilées par groupes minoritaires.

Mme Singh (Inde) dit que le Gouvernement a bien l’intention de proposer cette condition au Parlement et dans les législatures des états respectifs mais qu’aucun consensus n’a émergé de la rencontre du Premier Ministre. Même si, par conséquent, elle ne peut pas indiquer de date, le Gouvernement entend effectuer les modifications législatives nécessaires dès que possible. Elle ne dispose pas ici de chiffres relatifs à la représentation actuelle des femmes dans le secteur public. Mais, selon le rapport déjà cité sur les femmes et les hommes en Inde, la proportion globale de femmes dans les instances locales et organes d’état est passée de 11 % en 1981 à 18 % en 2002.

M. A. K. Srivastava (Inde) dit qu’il est difficile de parler de la représentation des femmes dans la main-d’œuvre en Inde car 93 % des emplois se trouvent dans le secteur « non organisé » ou non déclaré. Dans le secteur officiel, le niveau n’est pas satisfaisant, mais la tendance est à la hausse: la proportion est passée de 21,6 % en 1983 à 25,9 % en 1999, puis à 27,4 % en 2004. Il cite un rapport de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) d’après lequel, en Inde, la participation des femmes au monde du travail s’élèverait à 33 % en 2004.

Mme Schöpp-Schilling regrette de ne pas voir obtenu de justification concernant les retards dans la remise des rapports. Avec les rapports combinés en ce moment à l’étude, c’est la seconde fois seulement que des rapports sont rendus depuis la ratification en 1993. L’oratrice souligne ce point non pour critiquer, mais dans l’éventualité où on pourrait fournir de l’aide. Tous les États, aussi bien les petites îles que les grandes fédérations complexes comme l’Inde, sont soumis à la même obligation d’établir des rapports afin que le Comité exerce en bonne et due forme son contrôle sur tous les États parties. Sur la question du Protocole facultatif, elle craint qu’il y ait malentendu: il n’est pas question d’empiéter sur l’indépendance judiciaire des pays, mais de faciliter l’exécution de la Convention grâce à une procédure de communications et d’enquêtes. Elle ne comprend pas pourquoi l’Inde refuse de profiter d’un instrument aussi utile. Elle regrette égale-ment qu’il n’y ait pas eu de reconnaissance officielle en Inde du caractère discriminatoire du désastre au Gujarat. Le Gouvernement devrait avouer que certaines femmes ont été désignées et brutalisées dans le but de déshonorer et de détruire une communauté.

M. Flinterman dit que, si chaque État a le droit souverain de ne pas devenir partie au Protocole facultatif, nombre d’États de droit démocratiques l’ont en fait ratifié pour la protection supplémentaire qu’il offre. Il demande si les groupes les plus vulnérables ont accès aux services d’aide juridique. Il apparaît, à travers les récits évoquant les violences envers les femmes dalit et l’existence d’une culture d’impunité pour les délinquants, qu’il est impératif de prendre des mesures significatives pour améliorer la façon dont est administrée la justice en Inde, en apportant en particulier une assistance juridique. L’intervenant exprime sa satisfaction face au bilan de l’Inde concernant les demandeurs d’asile et les réfugiés. Toutefois, ces personnes restent très fragiles, surtout les femmes, tant que l’Inde ne ratifie pas les conventions internationales pertinentes. Il demande si le Gouvernement a l’intention de le faire.

Mme Dairiam se demande si l’attribution de pouvoirs aux femmes offre le meilleur gage d’égalité de traitement. Puisque la Constitution garantit l’égalité des sexes, elle demande comment le Gouvernement réussit à concilier ce principe avec son refus de prendre les mesures requises pour y parvenir dans chaque secteur. Le projet de loi sur la violence communautaire, tout en consolidant les pouvoirs de l’état, ne semble pas pénaliser les autorités de l’état pour fautes professionnelles ou omissions. Elle se réfère là à la destruction de preuves par des officiers de police dans certains dossiers du Gujarat. Quant à la définition des crimes violents contre les femmes, étant donné qu’il a fallu 200 ans au Gouvernement avant de reconnaître qu’il y avait un problème dans ce domaine à la Cour pénale, on ne peut pas compter sur cette cour pour juger correctement ces crimes; il faut une intervention du Gouvernement.

Mme Shin aimerait savoir si le onzième Plan quinquennal contient des dispositions sur les poursuites judiciaires à l’encontre des auteurs de crimes sexuels vis-à-vis de femmes, parce que ceci importe pour la réhabilitation des victimes. Elle demande aussi combien de femmes ont été agressées ou tuées parmi les 2 000 dossiers, et plus, réouverts suite aux événements du Gujarat.

Mme Simms reconnaît que le secteur déclaré en Inde est relativement restreint mais constate que le Gouvernement est un gros employeur et devrait donner l’exemple. Elle demande instamment l’adoption de mesures spéciales temporaires, conformément à l’article 4 de la Convention, insistant sur le fait que le mérite ne dépend pas d’une caste ou d’un sexe, mais de la capacité intellectuelle: si on donne leurs chances aux femmes, elles dépassent toujours les hommes dans l’enseignement supérieur. Elle salue la présence dans la délégation de l’Adjoint au Procureur général de l’Inde car il est capital qu’il y ait dans la magistrature des hommes et des femmes qui comprennent les problèmes des femmes. Un enseignement formel en droit doit être complété par une formation spéciale dans ce domaine; il devrait également y avoir davantage de juges femmes.

Mme Singh (Inde) affirme déplorer le retard qu’accuse l’Inde dans la remise des rapports; désormais tout sera fait pour que les rapports parviennent en temps voulu. L’Inde n’exclut pas la ratification du Protocole facultatif, mais l’intervenante ne peut aller au-delà de la position actuelle du Gouvernement sur ce sujet.

M. Vahnavati (Inde) avoue que les femmes sont particulièrement vulnérables à la violence communautaire et se charge d’étudier la possibilité de leur procurer une protection spéciale. À propos de l’accès des dalit à l’assistance juridique, des services de conseils juridiques sont mis sur pied, sur lesquels on attire l’attention dans tout le pays pour que les intouchables aient accès aux tribunaux.

La démarginalisation des femmes est un long processus qui exige la réalisation d’un subtil équilibre dans la société. Les femmes musulmanes, en particulier, hésitent à parler des injustices dont elles souffrent; l’élévation du niveau d’instruction dans la société musulmane est censée avoir des retombées positives. Quant à la définition des crimes violents, si la Cour pénale peut traiter le sujet en s’appuyant sur les dispositions actuelles, les nouvelles lois contiendront de nouvelles définitions indispensables. Des données chiffrées seront fournies sur le nombre de femmes dans la magistrature; dans les hautes juridictions de l’État il y en a un grand nombre et à la Cour suprême, jusqu’à très récemment, il y en avait une. Tous les juges reçoivent une formation adéquate, qui comprend une sensibilisation aux droits de l’homme et aux questions féminines.

M. A. K. Srivastava (Inde) dit que les fonctionnaires qui manquent à leurs devoirs sont en effet passibles de sanctions; il donne lecture d’une disposition à cet effet dans le projet de loi sur la prévention et le contrôle de la violence communautaire. À la suite des violences communautaires au Gujarat, 4 259 dossiers ont été enregistrés, dont 2 135 contenaient des inculpations. Parmi celles-ci, 67 concernaient des violences envers des femmes, et deux étaient des dossiers qui avaient été réouverts.

Mme Singh (Inde) insiste sur le fait que la loi sur la violence communautaire est encore au stade du projet et donc susceptible d’aménagements. En effet, la législation n’est jamais statique et peut toujours être modifiée. D’éventuels amendements aux lois sur le viol sont actuellement débattus, et toute suggestion constructive sera examinée. Quant à l’éventualité d’une disposition sur les pour-suites et sanctions contre les auteurs de crimes envers les femmes, elle souligne que le problème est d’ordre législatif et ne tient pas au programme, et qu’il est à l’étude, de même que d’autres points qui font l’objet de discussions.

La séance est levée à 1 h.