Vingt-septième session

Compte rendu analytique de la 559e séance

Tenue au Siège, à New York, le lundi 10 juin 2002, à 10 heures

Présidente:Mme Acar (Vice-Présidente)

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques combinés de la Belgique

En l’absence de M me  Abaka, M me  Acar, Vice-Présidente, assume la présidence.

La séance est ouverte à 10 h 15.

Examen des rapports présentés par les États partiesconformément à l’article 18 de la Conventionsur l’élimination de toutes les formesde discrimination à l’égard des femmes (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiquescombinés de la Belgique (CEDAW/C/BEL/3 et 4, CEDAW/PSWG/2002/CRP.1/Add.1 et CRP.2)

Sur invitation de la Présidente, les membres de la délégation belge prennent place à la table du Comité.

M. de Ruyt (Belgique) dit que la Belgique présente une structure fédérale conformément à laquelle les responsabilités pour les différentes questions sont réparties entre les autorités fédérales et d’autres autorités nationales, mais qu’il n’existe pas de hiérarchie entre elles. Cela leur laisse une certaine mesure d’autonomie et permet d’adapter des politiques et les actions de près aux besoins et aux désirs de leurs mandants. Les troisième et quatrième rapports périodiques sont le résultat de la coopération entre toutes ces autorités.

Toutes les autorités en question attachent une grande valeur aux droits de l’homme en général et aux droits des femmes en particulier, car ils représentent le symbole d’une société démocratique. Il existe des domaines où beaucoup a été accompli, mais il en existe également d’autres où l’on peut encore progresser, et l’orateur se félicite du rôle joué par le Comité dans l’identification des faiblesses.

La Belgique a levé sa réserve concernant l’article 7 de la Convention et a commencé une procédure analogue concernant l’article 15. De même, elle a amorcé la procédure de ratification du Protocole facultatif à la Convention, que la Belgique était parmi les premiers pays à signer. Comme le Protocole facultatif couvre des questions qui relèvent d’une série d’autorités fédérales et nationales, il faut la ratification par les parlements fédéraux et régionaux et par les communautés françaises et flamandes; cela se passera une fois que ces organismes auront signifié leur accord. Le pays est également en train d’entériner l’amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention (concernant le calendrier des séances).

Bien que sa constitution contienne un article garantissant l’égalité qui donne implicitement aux hommes et aux femmes les mêmes droits, la Belgique a été désireuse d’introduire une référence explicite à cet effet, ce qui a été réalisé en février 2002. Cet amendement constitutionnel permettra plus facilement de saisir les tribunaux des cas de discrimination, apporte une légitimité additionnelle aux mesures positives, confère sans équivoque aux hommes et aux femmes des droits et libertés identiques et encourage un accès égal aux fonctions élues et aux postes de responsabilité publique.

Le Parlement belge est en train d’examiner un projet de loi antidiscrimination complet et entend interdire la discrimination fondée sur le sexe, la race, la couleur, la descendance, l’origine nationale ou ethnique, l’orientation sexuelle, le patrimoine, l’âge, la croyance religieuse ou philosophique, la santé actuelle ou future, le handicap et les caractéristiques physiques. Cette loi sera appliquée par le biais du droit civil (par exemple des ordres de mettre fin à des pratiques discriminatoires et l’élimination des dispositions discriminatoires dans les contrats) et le droit pénal (y compris des peines plus dures pour harcèlement ou les coups et blessures motivés par la discrimination). Le Gouvernement entend également habiliter les syndicats et les associations des droits de l’homme à intenter des actions en justice dans les cas de discrimination.

De même, le Gouvernement entend charger un organisme public à créer, de la défense de l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. La création de cet organisme a pour objet de rendre la politique en faveur de l’égalité plus visible grâce à la collecte de statistiques, à la coordination des responsabilités et des ressources, à l’élaboration de recommandations à l’intention des autorités et à l’information du public. Afin que les efforts des autorités fédérales et des autres autorités nationales en faveur de l’égalité soient compatibles, on a mis en place une conférence intergouvernementale dont les délibérations mettent l’accent sur quatre sujets prioritaires : prévenir la violence à l’encontre des femmes, donner aux hommes et aux femmes le même accès aux nouvelles technologies de l’information et de la communication, associer les femmes à la prise de décisions et concilier la vie familiale et professionnelle.

Un plan concerté de prévention de la violence à l’encontre des femmes a été adopté en mai 2000; il est le résultat de la coordination entre les autorités fédérales et les autres autorités nationales et vise à créer un cadre pour l’intégration d’une perspective sexospécifique, l’information et l’évaluation des politiques et des objectifs. Il met l’accent sur la prévention de la violence familiale et sur la lutte contre la traite des êtres humains et l’exploitation sexuelle. Après son adoption, on a lancé une campagne de sensibilisation du public sous un seul slogan, mais qui comprend des activités différentes déterminées par les autorités locales. L’amélioration des installations destinées aux victimes et la collecte de statistiques figurent parmi les mesures prises. Une loi promulguée le 13 avril 1995 relative à la traite des êtres humains donne une protection étendue aux femmes disposées à témoigner devant la justice contre leur agresseur, mais le nombre de celles qui le font dans la pratique est encore trop faible.

Les autorités fédérales, les régions et les communautés du pays donnent à l’égalité des chances un rôle majeur dans leur politique de l’emploi. Un plan national en faveur de l’emploi introduit en 2002 met l’accent sur trois groupes présentant de faible taux d’emploi : les travailleurs plus âgés, les femmes et les travailleurs peu qualifiés. Dans le cas des femmes, il ne s’agit pas seulement d’augmenter les taux d’emploi, mais aussi la qualité des emplois; par conséquent on s’efforce d’améliorer l’aptitude des femmes à trouver un emploi. Parmi les mesures prises à cet égard, on peut citer les allocations destinées à encourager les mères célibataires au chômage pendant de longues périodes, à retourner au travail, l’introduction d’heures de travail souples, l’élargissement des services de garde d’enfants et la formation professionnelle, en particulier aux nouvelles technologies, où l’on peut aider les femmes à entrer dans des domaines qui étaient traditionnellement l’apanage des hommes. On se soucie également de garantir un salaire égal pour un travail de valeur égale et ce souci est reflété dans les efforts en faveur du classement et de l’évaluation des emplois en dehors de toute considération de sexe, et dans l’achèvement d’une série d’études sur la question.

La santé des femmes a également retenu l’attention des autorités fédérales et régionales, et des communautés, l’accent étant mis sur le dépistage gratuit du cancer du sein.

Le Programme d’action de la Conférence mondiale sur les femmes de Beijing a servi à obtenir l’engagement des gouvernements du pays en faveur de la présentation régulière de rapports d’activité à leurs parlements (dans le cas des gouvernements fédéral et flamand) et de l’intégration d’une perspective sexospécifique et de l’évaluation de l’impact sur les femmes (dans le cas de la Flandre). Les ministres du Gouvernement fédéral se sont engagés à adopter des stratégies en faveur de l’égalité des chances dans leur domaine de compétence, accompagnées de la supervision par des évaluateurs de la fonction publique et de conseils donnés par des universitaires. L’évaluation de cet exercice après une année a révélé certains progrès, mais ils ont été lents. Il est impossible de rendre les politiques en faveur de l’égalité entre les sexes plus efficaces en l’absence de statistiques, et la collecte de données en Belgique n’est pas encore suffisamment vaste ou assez bien organisée. La même conclusion vaut pour les informations sur les affaires examinées par les tribunaux par le passé. On s’emploie à ventiler les données par sexe, en particulier en Flandre.

On a fait beaucoup pour combattre la discrimination directe à l’égard des femmes, en particulier en matière de législation. Les résultats des filles sont supérieurs à ceux des garçons à tous les niveaux de l’éducation, la présence des femmes sur le marché du travail s’est améliorée, certain progrès ont été accomplis en ce qui concerne la participation des femmes à la vie politique, et les femmes peuvent prendre leurs propres décisions concernant leur corps et leur fécondité. Toutefois, il faut toujours lutter efficacement contre la discrimination indirecte, principalement grâce à l’intégration d’une perspective sexospécifique, des mesures positives et la lutte contre les stéréotypes sexistes grâce à des campagnes de sensibilisation.

La Présidente remercie le Représentant permanent de la Belgique d’avoir présenté le rapport de son pays et se félicite des amples réponses que la délégation a fournies aux questions posées par le groupe de travail de présession. Le Comité se félicite de la levée de la réserve concernant l’article 7 de la Convention et de la levée envisagée de la réserve concernant l’article 15, ainsi que de la ratification du Protocole facultatif. La composition de la délégation témoigne du désir du pays d’engager un dialogue constructif avec le Comité. Les mesures constitutionnelles et législatives prises sont dignes d’éloges, comme le sont les efforts destinés à accroître la participation des femmes à la vie politique. Le rôle de la Belgique en tant que nation développée membre de l’Union européenne consiste à donner un exemple à imiter par d’autres.

M me  Gaspard félicite la Belgique d’avoir été l’un des premiers pays du monde à introduire des mesures préférentielles en matière d’emploi, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention. Toutefois, elle a des questions à poser sur plusieurs sujets. La première concerne l’article 7. La Belgique a retiré sa réserve, mais l’oratrice se demande si toutes les incompatibilités ont été éliminées. Le rapport dit que l’article 60 de la Constitution, qui stipulait que les pouvoirs du Roi pouvaient être passés uniquement à la descendance masculine, a été modifié, mais ne précise pas si l’article 58 de la Constitution, qui stipule que le fils du Roi, ou Prince héritier, est nommé sénateur à l’âge de 18 ans, a été modifié ou abrogé. La deuxième concerne l’article 2 de la Convention. La Cour de cassation a confirmé que la discrimination fondée sur le sexe était inconstitutionnelle, et l’oratrice voudrait savoir si les demandeurs peuvent se réclamer directement de l’article 2 de la Convention auprès des tribunaux.

La question suivante concerne la législation de l’Union européenne. L’oratrice fait observer que la Belgique accorde une grande attention aux directives de l’Union européenne relatives à l’égalité des droits, mais par le passé, ces directives ont été essentiellement limitées au domaine de l’emploi. Au contraire, la Convention a une portée beaucoup plus vaste, et l’oratrice se demande si la Belgique se tourne vers la Convention pour orienter les mesures nécessaires et si elle a informé ses fonctionnaires de son existence, puisque la Convention a été ratifiée par tous les États membres de l’Union européenne.

Dans le contexte du rapport précédent de la Belgique, le Comité a exprimé son inquiétude à l’égard de la possibilité que l’existence de si nombreux mécanismes de promotion des droits des femmes puisse poser un risque de doubles emplois. L’oratrice se demande si la délégation est à même de fournir des détails supplémentaires sur les modalités de coordination entre ces mécanismes. Elle souhaite également obtenir des détails additionnels sur les activités de promotion des droits de l’homme menées par la Belgique dans les pays en développement. S’agissant de l’article 4 de la Convention, elle souhaite obtenir des statistiques additionnelles concernant les mesures spéciales prises dans les secteurs public et privé pour accroître la représentation des femmes. Sa dernière question concerne l’article 6 de la Convention. Une loi de 1995 a dépénalisé le proxénétisme. L’oratrice voudrait savoir si cela signifie qu’un homme peut forcer les membres de sa famille à se prostituer sans risquer d’être poursuivi. Elle se demande également si les statistiques relatives à la prostitution, qui datent de 1998, demeurent valables ou si la situation a évolué.

M me  Corti se félicite des progrès accomplis par la Belgique vers la réalisation de l’égalité des droits des femmes. Elle voudrait savoir de quelle manière, et jusqu’à quel point, des organisations non gouvernementales ont participé à l’élaboration du rapport, et plus généralement, quel rôle elles jouent dans la promotion des droits des femmes.

Elle rend hommage au Gouvernement pour les nombreuses mesures positives qu’il a prises en faveur des femmes et voudrait savoir si ces mesures ont été inspirées par le paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention. Existe-t-il une politique nationale spécifique qui prévoit des mesures temporaires spéciales pour améliorer la situation des femmes?

Le rapport décrit les politiques des communautés séparément et ne donne aucune explication concernant la question de savoir si ces politiques sont coordonnées et de quelle manière. En outre, il ne présente aucune comparaison entre les différents systèmes, ni une analyse de leur efficacité relative. Il ne contient pas non plus de données statistiques comparatives.

De manière générale, le rapport met l’accent surtout sur les politiques plutôt que sur les résultats de celles-ci. Par exemple, il n’est pas nécessaire d’expliquer les notions de discrimination directe et indirecte, mais il serait utile de connaître les conséquences de ces types de discrimination.

M me  Goonesekere se demande pourquoi la Constitution ne se réfère pas à la discrimination en fonction de certaines catégories, y compris le sexe.

La réponse à la question 8 de la liste des observations donne à penser que la jurisprudence belge en matière d’égalité porte surtout sur l’emploi. L’oratrice se demande s’il existe une jurisprudence pour d’autres aspects de la discrimination, et si elle a été rassemblée et diffusée. En outre, elle voudrait savoir si les lois relatives au harcèlement sexuel se limitent à l’emploi ou couvrent également d’autres domaines.

Elle pose des questions concernant le mécanisme d’application de la garantie constitutionnelle des droits économiques et sociaux, disposition inhabituelle et digne d’éloges. Elle voudrait également savoir si le Gouvernement a créé ou entend créer une commission des droits de l’homme chargée de l’application des droits protégés par la Constitution.

M me  Schöpp-Schilling dit qu’à l’avenir, l’État partie devrait incorporer les statistiques dans le rapport au lieu de les faire figurer dans des annexes. Malheureusement, les annexes au présent rapport n’ont pas été fournies dans toutes les langues, ainsi tous les membres n’ont-ils pas pu les consulter.

L’oratrice rend hommage à la Belgique pour le travail important accompli en ce qui concerne l’adoption de mesures temporaires spéciales et voudrait savoir jusqu’à quel point ces mesures se sont avérées efficaces dans le secteur de l’emploi. Elle a conclu d’après l’annexe qu’une augmentation d’environ 10 % a été réalisée aux échelons supérieurs du secteur public. Bien que la structure de ces mesures paraisse peu efficace et encombrante, en dernier lieu, ce sont les résultats qui comptent. Elle voudrait savoir quels sont, de l’avis de l’État partie, les principaux obstacles à l’égalité des femmes en matière d’emploi dans les secteurs public et privé, et quelles sont les mesures prises pour les surmonter.

M me  González regrette que les réponses à la liste des observations n’aient pas été traduites dans toutes les langues, et il est donc difficile, voire impossible, pour tous les membres de les lire.

Notant que la Commission de l’éthique pour les télécommunications et les services d’information a élaboré un code à l’intention des signataires de contrats et des utilisateurs de l’Internet, l’oratrice dit qu’elle espère que cette mesure aidera à éliminer l’emploi des médias électroniques et de communication pour promouvoir la vente de pornographie mettant en scène des enfants et l’exploitation sexuelle commerciale des enfants et que d’autres pays seront incités à adopter des mesures analogues.

Après le premier Congrès mondial contre l’exploitation sexuelle commerciale des enfants, tenu à Stockholm en 1996, plusieurs informations parues dans la presse internationale ont décrit des cas d’exploitation sexuelle des enfants, de traite des personnes et de prostitution forcée de garçons et de filles. L’oratrice s’intéresse à la réaction des autorités et de la société belge aux informations concernant la séquestration d’enfants à des fins sexuelles, et se demande si l’indignation publique intense s’est traduite par des mesures de la part des pouvoirs publics. En particulier, elle voudrait savoir si la Commission permanente sur la violence à l’encontre des enfants tient un registre de tels incidents, et si la plupart des victimes sont des garçons ou des filles.

Enfin, elle félicite le Gouvernement pour les programmes et les mesures significatifs qu’il a adoptés pour combattre la violence à l’encontre des femmes.

La Présidente invite la délégation à répondre aux questions posées par les membres du Comité.

M me  Paternottre (Belgique) dit que, conformément à la Constitution belge, le fils du Roi est automatiquement membre du Sénat. Bien que le texte en question n’ait pas été modifié formellement, le problème de discrimination a été réglé de facto, puisque l’expression « prince royal » a été interprétée comme désignant un enfant royal sans distinction de sexe, et une princesse est devenue sénateur.

Conformément à la législation belge, un instrument international auquel la Belgique est partie peut effectivement être invoqué auprès d’un tribunal. Toutefois, il appartient au juge de déterminer si les dispositions sont suffisamment précises pour permettre leur application en droit interne. Bien que la Convention ait été jugée directement applicable, il existe d’autres instruments pour lesquels cela n’est pas le cas.

On a posé des questions concernant l’efficacité des mesures temporaires spéciales destinées à combattre la discrimination au lieu de travail. Afin que ces mesures puissent avoir un effet, il faut que les supérieurs ou l’État acceptent de participer et les employeurs doivent être bien informés. Sur la base de son expérience, le Gouvernement belge a conclu que le meilleur moyen consistait à introduire la notion de l’égalité dans la gestion des ressources humaines dans les secteurs tant public que privé. La Belgique est en train de restructurer complètement l’administration fédérale et la question intéressante à l’examen concerne les façons d’intégrer une perspective sexospécifique dans le nouveau système.

La Constitution belge contient en fait une référence à la discrimination en stipulant que l’égalité entre les sexes est un droit fondamental.

Bien que la Belgique ne dispose pas de système national permettant de suivre la jurisprudence, il existe en fait un service administratif spécial qui suit la jurisprudence relative à la discrimination en matière d’emploi. L’Institut pour l’égalité entre les hommes et les femmes, nouvellement créé, sera chargé, entre autres, de rassembler la jurisprudence pertinente; il peut également lancer des procédures judiciaires.

Quoique le harcèlement sexuel soit présent dans d’autres aspects de la vie quotidienne, la loi relative au harcèlement sexuel cible le secteur de l’emploi, public et privé, car le harcèlement sexuel est le plus fréquent au lieu de travail. Un nouveau projet de loi ayant une portée beaucoup plus large vise à combattre la violence au lieu de travail et englobe à la fois le harcèlement sexuel et la violence physique.

Le Conseil sur l’égalité des chances des hommes et des femmes est un organe consultatif; il n’est donc pas habilité à examiner des plaintes. Toutefois, des organisations et des individus peuvent attirer son attention sur des cas ou des exemples de discrimination; par la suite, le Conseil émet un avis.

L’oratrice a noté que les informations statistiques devraient être intégrées dans le rapport.

La pornographie mettant en scène des enfants et l’exploitation sexuelle commerciale des enfants sont des questions importantes et extrêmement délicates en Belgique. Depuis les événements atroces qui ont été évoqués, il existe une forte volonté politique et populaire de faire face au problème. À l’époque, il existait déjà certaines mesures, et d’autres ont été prises depuis lors. La responsabilité pour la surveillance de l’Internet était répartie entre plusieurs organisations, mais désormais, il y aura un mécanisme central. En outre, la Belgique est en train de ratifier le Protocole facultatif à la Convention sur les droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

M me  Verzele (Belgique) dit que le Gouvernement belge tient compte de la Convention en proposant des initiatives et en évoluant la politique des pouvoirs publics, et la Ministre pour l’égalité des chances se sert à la fois de la Convention et du Programme d’action de Beijing en formulant des mesures.

S’agissant de la coordination, il est important de se rappeler que la Belgique est un État fédéral composé d’entités fédérales dont chacune jouit d’une autonomie totale : il n’existe pas de relation hiérarchique entre elles.

En 1990, la Belgique a promulgué une loi relative à la coopération internationale qui donne force de loi au principe de l’égalité des droits et des chances entre les hommes et les femmes et garantit que l’équilibrage des droits et des chances fait partie intégrante de cette coopération. Conformément à cette loi, toutes les activités de coopération internationale menées par la Belgique doivent bénéficier de l’intégration d’une perspective sexospécifique.

Comme ses rapports sont généralement volumineux, le Gouvernement a préféré fournir des statistiques qui couvrent l’ensemble du pays; si le Comité le souhaite, il pourrait présenter à l’avenir des statistiques portant également sur les communautés et les régions.

Le Gouvernement a tenu compte des vues des organisations non gouvernementales. Bien que celles-ci n’aient pas été directement associées à l’élaboration du rapport, celui-ci a été basé sur la suite donnée par les associations belges de défense des droits des femmes à la Déclaration et au Programme d’action de Beijing. En outre, des ONG belges ont participé à la quatrième Conférence mondiale sur les femmes et à l’examen quinquennal du Programme d’action de Beijing. Depuis 2001, le Gouvernement a alloué 25 000 euros à deux fédérations d’associations de femmes en vue d’assurer un dialogue entre le Gouvernement et les associations de défense des droits des femmes qui assurent le suivi de la Conférence de Beijing. Au surplus, et la Chambre des représentants et le Sénat ont des commissions consultatives qui cherchent à obtenir les vues des ONG.

Le système de quotas employé en Belgique pour améliorer la situation des femmes repose effectivement sur la Convention. Le pays a utilisé traditionnellement un système de quotas pour les affaires communautaires et linguistiques; il a donc été facile de s’accommoder de l’idée de quotas. La France, qui adopte une approche plus universaliste, l’a acceptée plus difficilement.

Bien que le proxénétisme demeure une infraction pénale, la Belgique a éliminé certaines sanctions contre les prostituées elles-mêmes. L’oratrice ne dispose pas de chiffres concernant la montée récente de la prostitution, mais reconnaît qu’elle est troublante. Malheureusement, malgré l’existence de lois, les prostituées craignent souvent de dénoncer ceux qui les exploitent.

M me  Franken (Belgique) dit que la juridiction des mécanismes pour la région de Flandre et la communauté flamande chevauche sur certains points avec celle des mécanismes fédéraux; mais dans des domaines comme la santé, l’éducation et la protection sociale, les régions ont juridiction exclusive. Il pourrait bien sembler que les règles de l’Union européenne concernant l’égalité des chances en matière d’emploi priment, mais le département de l’oratrice accorde la priorité au Programme d’action de Beijing et à la Convention. Le département a été créé en 1995 et a déjà achevé un cycle de programmation qui a mis l’accent sur l’intégration d’une perspective sexospécifique. Pour la période 1994-2004, cela continuera, mais on ajoutera des activités concernant les femmes et la prise de décisions et la réconciliation des responsabilités professionnelles et familiales.

La plupart des dispositions discriminatoires ont été éliminées de la législation belge, mais le département de l’oratrice continue à collaborer avec des ONG en vue de combattre la discrimination de fait qui persiste malgré les efforts en faveur d’une prise de conscience et du changement des attitudes. Des décideurs politiques, des chercheurs et des ONG travaillent ensemble en organisant des ateliers sur des sujets spéciaux tels que le développement de statistiques ventilées par sexe. Le département de l’oratrice a également constitué un groupe de travail composé de préposés locaux à l’égalité entre les sexes venus de 60 communautés et villes de toute la région de Flandre.

M me  Adriaenssens (Belgique) dit qu’il existe des entités séparées dans le domaine de l’égalité des chances dans la communauté francophone et, à l’instar de leurs homologues en Flandre, leurs responsabilités englobent l’égalité des chances en matière d’emploi, de santé et d’éducation. La communauté française parraine des recherches universitaires sur la manière d’encourager les filles à faire des études scientifiques et sur la discrimination en matière d’emploi à l’encontre des prestataires de soins à des enfants souffrant de maladies chroniques.

M me  Feng Cui dit que le rapport mentionne des efforts en faveur de l’élimination des stéréotypes, notamment la féminisation des noms de certains métiers. Une loi connexe a été adoptée pour la communauté francophone en 1993, et elle voudrait en apprendre davantage sur la portée de son application et son efficacité. Elle voudrait également savoir si des efforts analogues ont été entrepris au sein de la communauté flamande. S’agissant des efforts dans le domaine des médias, il serait intéressant de connaître le nombre de femmes exerçant des fonctions journalistiques de haut niveau. Il serait également utile de disposer de renseignements additionnels concernant le Conseil supérieur de l’audiovisuel, y compris le nombre de femmes membres, et la question de savoir si son code de conduite est surveillé par la profession elle-même ou par un organisme extérieur.

M me  Kapalata dit que la structure complexe du système fédéral, avec ses différents niveaux d’autorité dont chacun a compétence dans une région séparée, peut sembler être un moyen de déroger à l’application de la Convention; elle voudrait en savoir davantage sur la manière dont son application est assurée dans les régions. S’agissant de l’article 6, il semble que le niveau de l’assistance offerte aux victimes de la prostitution forcée diffère en fonction du groupe ethnique; l’oratrice se demande s’il existe un cadre général pour cette assistance.

M me  Corti souhaiterait obtenir des informations supplémentaires concernant la politique en faveur de l’intégration des femmes migrantes dans la société belge, y compris des statistiques sur les mariages entre ethnies. La dernière loi relative au statut des familles des travailleurs migrants a été adoptée en 1980, et l’oratrice se demande si elle a été mise à jour. Il faut des informations additionnelles sur les droits des réfugiés au moment où ils présentent une demande d’asile, sur les nouvelles tendances concernant la migration de travailleurs venus de l’extérieur de l’Union européenne et les problèmes spécifiques posés par la xénophobie et le racisme dont souffrent les femmes migrantes.

La Présidente, parlant à titre personnel, souligne que dans le prochain rapport, il faudra présenter des statistiques additionnelles sur les femmes migrantes, qui souffrent souvent de double discrimination dans leur pays de résidence et dans leur propre communauté. Elle aimerait savoir si les femmes migrantes peuvent exercer leurs droits fondamentaux sur un pied d’égalité avec les femmes belges. Il faut également des informations supplémentaires concernant la politique en matière d’enseignement des langues aux femmes migrantes.

M me  Raday espère que la violence à l’encontre des femmes n’est pas considérée seulement comme un problème social; à ne pas la considérer comme une infraction, on limite la possibilité d’intenter des poursuites contre ses auteurs. S’agissant de la violence familiale, elle voudrait savoir s’il existe des ordonnances de protection et, dans l’affirmative, quel est le nombre émis dans chaque juridiction. Il serait également intéressant de connaître le résultat des recherches conduites concernant la politique en matière de détermination des peines dans les cas de violence à l’encontre des femmes.

En ce qui concerne la prostitution, l’oratrice voudrait savoir si la dépénalisation du proxénétisme prive les femmes de la possibilité de recourir à la police et aux tribunaux, et si cette politique s’applique également aux mineurs. Des statistiques sur le nombre de femmes travaillant comme juristes et comme juges seraient également les bienvenues.

M me  Tavares da Silva dit que les mécanismes nationaux en matière d’égalité semblent être très complets, et que la volonté politique et la participation existe à tous les niveaux. Toutefois, le fait que le portefeuille de l’égalité au niveau fédéral est combiné avec celui de l’emploi et du travail suscite certaines préoccupations, car il n’est pas idéal d’associer l’égalité à une question sectorielle. La Ministre pour l’égalité des chances a surtout un rôle de coordination, mais il serait utile de savoir si elle a aussi une responsabilité de supervision ou si elle peut donner des orientations et exiger des comptes. De plus amples détails sur les organisations de femmes parmi la large gamme des ONG existantes en Belgique serait également les bienvenus.

M me  Manalo dit que les mesures d’intégration d’une perspective sexospécifique semblent mettre l’accent sur la suite donnée au Programme d’action de Beijing, et elle voudrait obtenir des informations concernant des efforts concrets en faveur de l’application de la Convention. Des informations sur l’intégration d’une perspective sexospécifique au sein des gouvernements wallon et flamand et sur le pourcentage du budget fédéral alloué à cette activité seraient également utiles. L’oratrice demande des éclaircissements concernant la définition de la discrimination fondée sur le sexe dans le projet de loi sur la discrimination dont le Parlement est actuellement saisi. Enfin, elle voudrait savoir si le public est bien informé de la Convention.

M me  Paternottre (Belgique), répondant aux questions posées, dit que l’État fédéral et les entités fédérées ont des juridictions différentes, bien qu’il existe des juridictions partagées dans certains domaines. Le système en place permet aux différentes autorités de répondre aux besoins et priorités concrets des différentes communautés et régions. Par exemple, les communautés francophones et les communautés parlant flamand abordent la féminisation des noms professionnels, des grades et des titres de manière différente. En français, on utilise la forme féminine pour les noms professionnels, alors qu’en flamand on adopte une approche plus neutre. De même, le système actuel encourage les différentes communautés à trouver les meilleures solutions dans la lutte contre la violence à l’encontre des femmes.

S’agissant de la question de l’assistance, l’oratrice dit qu’il y a des cas, comme pour la campagne contre la violence familiale, où ce sont certaines langues, plutôt que certains groupes ethniques, qui sont ciblées. Dans les autres cas, l’assistance est fournie dans un contexte plus large. S’agissant du droit à l’emploi des travailleuses migrantes, un programme visant à promouvoir, non seulement l’accès de ces femmes au marché du travail, mais également leur avancement, est en cours d’exécution. Alors qu’il ne vise pas spécifiquement les femmes, il tient compte des besoins concrets des femmes et des hommes. Dans le cadre de ce programme, l’administration de l’oratrice collabore directement avec les divers secteurs de l’économie belge, en particulier ceux qui emploient un fort pourcentage d’immigrants ou ceux où les femmes migrantes ne sont guère représentées, en vue de la prise de mesures correctives. Toutefois, la loi en cours d’élaboration dans ce domaine tiendra compte des rapports concrets entre hommes et femmes et de l’origine ethnique des travailleurs.

Pour ce qui est du rôle joué par les tribunaux dans les affaires de violence familiale, quand le rapport dit que les tribunaux ne sont pas nécessairement le meilleur moyen de régler le problème de la violence familiale, cela ne signifie nullement qu’ils soient étrangers à la question. Pour régler le problème dans son ensemble et à long terme, d’autres types de mesures, y compris la médiation, qui est pratiquée en collaboration avec les tribunaux, les mesures préventives et les mesures destinées à provoquer un changement des comportements au sein du couple, peuvent être envisagés. En fait, on a noté que l’une des raisons pour lesquelles les femmes victimes de violence familiale ne dénoncent pas ces incidents afin que des mesures puissent être prises, c’est la crainte de détruire leur famille. On pense donc qu’il est important de protéger les victimes de diverses manières. Par exemple, un juge peut autoriser la victime à quitter le domicile conjugal et à se rendre dans un centre d’accueil, ou de maintenir la famille à son domicile et rendre une ordonnance d’interdiction temporaire contre l’auteur de la violence.

Outre les mesures destinées à isoler l’agresseur, on peut envisager des mesures additionnelles, y compris l’installation d’un signal de détresse qui permet à la victime d’obtenir immédiatement l’aide de la police si l’agresseur retourne au domicile conjugal nonobstant l’ordonnance d’interdiction. En réalité, le but ultime consiste à mettre fin aux violences et à garantir que tous les intéressés aboutissent à la meilleure situation possible.

Se référant aux résultats de l’enquête destinée à évaluer l’impact de la loi de 1997 relative à la violence familiale, l’oratrice dit que la collecte de statistiques s’est heurtée à des problèmes. En 1999, 5 806 cas de violence familiale ont été signalés dans trois arrondissements en tant que violences entre partenaires ou anciens partenaires. Toutefois, cette définition n’était pas assez précise pour établir une distinction entre différents types de violences, qu’elles soient sexuelles, physiques ou morales. On est en train d’améliorer ces statistiques.

L’oratrice fournira des données ventilées par sexe sur le personnel du système judiciaire avant la fin de la session. Toutefois, elle souhaite signaler que la Belgique accorde une grande importance à la présence de femmes parmi les juges. Se référant à la participation des ONG au Conseil sur l’égalité des chances, elle dit que d’autres associations comptent un ou deux représentants, mais que les associations de femmes comptent 15 sur les 32 membres. La Belgique diffuse des informations sur la Convention simultanément avec des informations sur d’autres instruments juridiques internationaux, y compris les directives de l’Union européenne et les conventions de l’Organisation internationale du Travail. À cet égard, on envisage de créer un institut fédéral doté de plus larges pouvoirs que les institutions existantes. L’administration de l’oratrice fera partie intégrante de cette nouvelle entité et sera responsable de la collecte et de la diffusion de la jurisprudence pertinente.

M me  Verzele (Belgique) dit qu’alors que la prostitution est légale en Belgique, le fait de forcer quelqu’un à se prostituer, de vivre de la prostitution d’autrui, de maintenir une maison de prostitution ou de louer des chambres aux fins de la prostitution sont des infractions conformément à la législation belge. Toutefois, le fait de vivre avec une prostituée n’est pas punissable.

La Belgique a promulgué une loi contre la traite des êtres humains en 1995. Alors qu’il n’existe pas de politique qui cible spécifiquement des groupes ou des personnes appartenant à une nationalité donnée, on sait que la traite des êtres humains à son origine dans les pays de l’Europe orientale et on concentre l’attention sur les individus venant de cette région. Les personnes qui acceptent de porter plainte contre ceux qui profitent de la traite des êtres humains ont droit à l’asile temporaire dans des centres de réfugiés subventionnés par le Ministère de l’emploi. La Belgique soutient également le programme de rapatriement volontaire des victimes de la traite à des fins sexuelles, géré par l’Organisation internationale pour les migrations.

S’agissant de la question des femmes migrantes et réfugiées, l’oratrice note qu’en ce qui concerne l’octroi de permis de résidence, son gouvernement applique la Convention de Genève de 1951 de manière souple. Les femmes réfugiées peuvent obtenir l’asile politique en fonction de leur sexe, mais il doit y avoir un risque raisonnable de persécution. En 2000, 45 % des demandes d’asile ont été acceptées, dont 35 % concernaient des femmes. La Belgique, non seulement sanctionne la mutilation génitale, mais accorde l’asile pour cette raison. Une fois que la demande d’asile a été acceptée et le statut de réfugié accordé, les intéressés jouissent des mêmes droits que les citoyens belges. En outre, en général la Belgique applique le principe de la reconstitution des familles.

Passant au problème du racisme et de la xénophobie, l’oratrice note que la Belgique a adopté, le 30 juillet 1995, une loi destinée à punir certains actes motivés par le racisme et la xénophobie. À cet égard, la discrimination contre les étrangers au lieu de travail est également punie, conformément à la loi qui prévoit que les organisations syndicales peuvent saisir la justice de cas de discrimination flagrante. En outre, le Centre sur l’égalité des chances et l’opposition au racisme est également habilité à intenter des actions en justice au nom des victimes des actes de racisme et de xénophobie.

En matière d’emploi, il est de fait que les femmes étrangères souffrent d’une double discrimination. Toutefois, on est en train d’exécuter un projet fédéral destiné à promouvoir la participation des femmes peu qualifiées au marché du travail. Le projet ne vise pas les travailleuses migrantes en tant que telles, mais porte sur les différentes femmes d’origine étrangère et leur permet de recevoir une assistance dans leur quête d’un emploi.

Abordant la question de l’intégration d’une perspective sexospécifique, l’oratrice note que le rôle de la Ministre pour l’égalité des chances consiste à coordonner les activités, à donner des conseils et à faire du lobbying auprès des autres ministères. En 1996, la Belgique a adopté une loi concernant la suite à donner à la Conférence mondiale sur les femmes de Beijing conformément à laquelle le Gouvernement est tenu de soumettre des rapports annuels sur l’application du Programme d’action de Beijing. Cette obligation juridique concerne l’ensemble du Gouvernement qui prend très au sérieux ses responsabilités concernant l’intégration d’une perspective sexospécifique.

La séance est levée à 13 heures.