Vingt-sixième session

Compte rendu analytique de la 552e séance

Tenue au Siège, à New York, le mardi 4 juin 2002, à 15 heures

Présidente:Mme Abaka

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties au titre de l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques de la Zambie (suite)

La séance est ouverte à 15 h 10.

Examen des rapports présentés par les États partiesau titre de l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiquesde la Zambie (suite) (CEDAW/C/ZAM/3 et 4, CEDAW/PSWG/2002/II/CRP.1/Add.5 et CEDAW/PSWG/2002/II/CRP.2/Add.4)

Sur l’invitation de la Présidente, la délégation de la Zambie prend place à la table du Comité.

M me  Sinkala (Zambie), répondant aux questions des membres du Comité au sujet de l’éducation, signale que les objectifs de la Zambie dans ce domaine comprennent l’augmentation de la fréquentation scolaire et des taux de rétention et de réussite scolaires, notamment chez les enfants vulnérables, et l’amélioration des résultats scolaires. Les programmes de sensibilisation aux spécificités sexuelles ont en fait entraîné des changements dans la politique du Gouvernement. On note, par exemple, que le nombre de filles fréquentant l’école est passé du tiers à la moitié de la population étudiante totale. En outre, un programme de réintégration après la grossesse est à l’étude et des initiatives sont en cours afin de mieux adapter le matériel et les méthodes pédagogiques aux sexospécificités et de créer un environnement scolaire plus accueillant pour les filles en éliminant les stéréotypes et en encourageant les filles à étudier les mathématiques et les sciences. Des classes non mixtes ont été mises sur pied afin de favoriser chez les filles la confiance et l’estime de soi. Les garçons et les filles sont encouragés à étudier toutes les matières sans restriction. De plus, les meilleurs instituts techniques ont ouvert leurs portes aux filles. Globalement, le nombre de filles inscrites à l’école secondaire a atteint le niveau le plus élevé jamais enregistré.

Différentes raisons expliquent le fait que les filles enfantent avant l’âge de 19 ans, notamment une faible estime de soi, les attentes de la société (ou leurs propres attentes) à l’égard du mariage, en particulier en zone rurale, l’absence de modèles de comportement féminins, surtout en zone rurale, des problèmes de survie et de subsistance (le VIH/sida fait que souvent les enfants deviennent chefs de ménage), la pression des pairs, la pauvreté ou l’expérimentation. Le Programme pour la promotion de l’éducation des filles (PAGE) et les programmes de lutte contre le VIH/sida mis sur pied par le Gouvernement s’adressent spécifiquement aux filles. Grâce à ces programmes, les filles sont beaucoup mieux informées sur la sexualité et le VIH/sida, ce qui les aide à s’affirmer et, partant, à refuser d’avoir des relations sexuelles. Dans le cadre de ces programmes, le Gouvernement a élaboré de la documentation destinée aux élèves et aux enseignants sur le VIH/sida. Il a revitalisé les programmes d’un enfant à l’autre et les clubs antisida à l’école au sein desquels les enfants se partagent l’information entre eux. Enfin, il a publié et diffusé des informations sur des modèles de réussite féminine dans le pays. Le Ministère de l’éducation collabore avec des partenaires, notamment des organisations non gouvernementales, pour trouver des solutions aux problèmes liés à la grossesse chez les adolescentes et au mariage précoce. Les écoles de missionnaires, notamment, ont initialement opposé une forte résistance à la politique de réintégration des mères adolescentes à l’école, mais le Gouvernement a publié des directives pour faciliter la mise en œuvre du programme.

En réponse à une autre question, elle signale que le taux national d’abandon variait entre 30 % et 45 %, selon qu’il s’agisse des écoles primaires ou des écoles secondaires.

En réponse à la question de savoir si la Zambie avait réalisé ses objectifs en matière d’éducation, elle signale que la Zambie n’avait réalisé qu’une partie de ses objectifs mais qu’elle espérait accroître l’accès aux écoles, en particulier pour les enfants vulnérables. À cette fin, le Gouvernement a mis sur pied des écoles communautaires à l’intention des enfants pauvres et des orphelins, notamment dans les zones rurales, mais surtout dans les zones rurales où ce sont les grands-parents qui prennent soin des enfants dont les parents sont victimes du VIH/sida. L’Initiative de radio interactive permet aux enfants difficiles à atteindre, par exemple les enfants des rues, de bénéficier d’un enseignement, généralement d’une durée de 30 minutes par jour. Un autre programme offre aux enfants qui ne peuvent acquitter les frais de scolarité, dont 65 % sont des filles, la possibilité de recevoir une éducation. La scolarité est offerte aux enfants ayant des besoins éducatifs spéciaux dans 8 des 72 écoles de district du pays.

L’objectif visant à attribuer 25 % des bourses d’études aux étudiantes universitaires n’a pas été pleinement réalisé parce que les femmes ne représentent actuellement que 20 % de la clientèle universitaire. Des efforts sont déployés pour amener les filles au niveau le plus élevé de l’école secondaire et leur permettre ainsi d’être sélectionnées pour les études universitaires. Enfin, elle note que les femmes représentent 43,5 % de la population analphabète totale en Zambie.

M me  Nkole (Zambie) mentionne la création récente du Conseil national contre le sida. Elle ajoute qu’il s’agit d’un conseil intersectoriel qui ne relève d’aucun ministère particulier. Elle ajoute que les femmes sont plus gravement touchées que quiconque par le VIH/sida. En effet, en plus d’être victimes, elles doivent prodiguer des soins aux maris, aux enfants et aux autres membres de la famille.

Répondant à la question concernant les soins postnatals, elle fait observer que les hôpitaux publics n’hébergent les femmes que 24 heures après l’accouchement, tandis que les hôpitaux privés, en règle générale, font un suivi de leur état de santé pendant 72 heures. Des examens de santé postnatals sont offerts aux femmes six semaines après l’accouchement dans des cliniques où elles peuvent aussi demander des consultations de suivi avec des infirmières ou des sages-femmes, généralement quand elles amènent leurs enfants pour des soins médicaux.

M me  Kwaku, se référant aux articles 15 et 16, demande instamment au Gouvernement zambien d’accélérer ses efforts en vue de remplacer le droit coutumier sur le mariage par une législation nationale uniforme. Notant que le rapport n’indique rien sur les femmes handicapées, elle souhaite que le prochain rapport de l’État partie fournisse des informations à cet égard.

La Présidente, se référant au paragraphe 25 de la réponse de l’État partie à la liste des questions (CEDAW/PSWG/2002/II/CRP.2/Add.4) concernant la polygamie, demande si un homme a déjà été poursuivi en vertu de la législation pour avoir épousé une deuxième femme et, dans l’affirmative, quelle a été la sentence.

M me  González se dit préoccupée par le fait que le droit coutumier ait préséance sur la loi dans de nombreux cas, ce qui a des effets préjudiciables sur le droit de la famille. En outre, il ne semble pas y avoir de plans ou de programmes gouvernementaux pour remédier à la situation. À la fin de son rapport, l’État partie reconnaît la nécessité de l’éducation et de la réorientation sociale pour ce faire, mais rien n’indique qu’il ait entrepris une action. Les femmes zambiennes ne peuvent plus être confinées à un statut inférieur ni souffrir de problèmes de santé en raison de l’irresponsabilité des hommes.

M me  Nkole (Zambie) fait remarquer que la difficulté de codifier le droit coutumier des 73 groupes ethniques était l’une des raisons pour laquelle la loi devait régir le mariage. Le mariage en vertu du droit coutumier est considéré comme légal. Dans les sociétés patrilinéaires, en particulier, la polygamie est acceptée comme normale, pour autant qu’une demande en mariage et une dot soient annoncées. Au sujet des femmes handicapées, elle note que la législation telle que modifié en 1996 met un accent particulier sur les femmes handicapées. Elle assure le Comité que des informations à cet égard seront fournies dans le cinquième rapport périodique de la Zambie.

Enfin, répondant à la Présidente, elle signale que des hommes sont en fait poursuivis en vertu de la loi, mais que les témoignages sont généralement entendus à huis clos. Dans ces cas, la deuxième femme n’est pas légalement reconnue comme une épouse. Elle se rappelle un cas où une sentence d’emprisonnement a été rendue.

M me  Hazelle demande si le nouveau Conseil national contre le sida est une organisation non gouvernementale. Elle souhaiterait une description de son mandat et de la manière dont il est financé. Bien qu’elle comprenne bien son caractère multisectoriel, elle estime qu’il devrait y avoir une quelconque responsabilité au niveau ministériel et se demande si le Gouvernement y est représenté ou s’il y joue un rôle.

M me  Manalo signale que l’absence d’implication gouvernementale au sein du Conseil national contre le sida la préoccupe aussi et demande comment les activités multisectorielles du Conseil sont coordonnées. Elle est également profondément préoccupée par l’observation de Mme Nkole selon laquelle les femmes étaient plus touchées par l’épidémie du sida en tant que soignantes que victimes. Elle espère que l’infection chez les femmes est prise tout aussi au sérieux qu’elle l’est chez les hommes.

M me  Acar fait remarquer qu’on n’avait pas répondu à sa question précédente au titre de l’article 7, à savoir si le Président de la Zambie était autorisé par la loi à nommer huit femmes comme membres du Parlement et s’il avait effectivement procédé à ces nominations. Elle aimerait savoir comment le Gouvernement entend remplir son engagement et faire en sorte que les femmes occupent 30 % des postes décisionnels.

M. Melander souligne que, lors de la séance précédente, il avait demandé des précisions sur les sanctions prévues en cas de violence contre des femmes et il aimerait bien avoir une réponse.

M me  Saiga s’interroge sur le pourcentage des mariages en vertu du droit coutumier et de la loi, respectivement. Se référant aux questions posées antérieurement par les autres membres du Comité, elle se demande dans quelle mesure la proposition concernant la Commission de développement de la législation était exhaustive.

M me  Shin souligne qu’elle ne voyait pas très bien si le plan d’action national en faveur des femmes de la Zambie comprenait des programmes de lutte contre la violence à l’égard des femmes. Elle fait observer que la politique nationale relative aux sexospécificités avait été rédigée en 2000. Comme il y a maintenant un nouveau gouvernement, elle souhaiterait savoir si cette politique ou un plan d’action national comparable en faveur des femmes était en vigueur. Si tel est le cas, quel est le calendrier de mise en œuvre du plan d’action? Couvre-t-il tous les domaines de préoccupation des femmes?

La Présidente se dit profondément préoccupée devant le problème du meurtre de femmes âgées sans défense, parfois par des membres de leur propre famille. Elle demande à Mme Nkole de prier instamment son gouvernement de prendre des mesures en vue d’éliminer immédiatement cette pratique.

M me  Livingston Raday souligne la nécessité d’une législation conçue spécifiquement pour protéger les femmes. La réponse donnée aux questions précédentes sur ce sujet tendait à se concentrer sur la difficulté d’appliquer les lois. Elle aimerait savoir s’il existe des mesures d’application explicites concernant chacune des questions examinées. Tout en reconnaissant que les lois ne suffisaient pas, elle estime néanmoins qu’elles représentent un début et qu’elles sont essentielles à l’application des politiques. La législation est l’expression première de la volonté politique d’appliquer la notion d’égalité. Les lois sont également un outil permettant d’éduquer les fonctionnaires concernés et le grand public. Elle demande s’il existe des dispositions juridiques expresses sur l’éducation du public et la lutte contre la discrimination à l’égard des femmes.

M me  Schöpp-Schilling souligne que, malgré les efforts déployés par le Gouvernement de la Zambie, beaucoup reste à faire. Les femmes sont désavantagées par rapport aux hommes à tous les égards. Notant que l’article 23 de la Constitution permet une allocation préférentielle des ressources, elle demande instamment au Gouvernement d’utiliser cette prérogative pour entreprendre une initiative nationale d’envergure. Sans l’allocation préférentielle des ressources et la réforme juridique, le pays ne sera pas en mesure d’atteindre de sitôt un développement durable.

M me  Kapalata ne voit pas très bien si la Zambie a pris des mesures visant à appliquer le système de quotas pour favoriser l’élection de femmes.

M me  Nkole (Zambie), répondant aux questions posées, fait observer que, bien que le Conseil national contre le sida soit un organisme intersectoriel, il était responsable devant le comité du cabinet sur le VIH/sida, dont la présidence est assumée par le Ministre de la santé. À l’égard de la question des femmes touchées par le sida, elle explique que les femmes sont désavantagées parce qu’en plus de souffrir de la maladie en soi, elles ont la charge supplémentaire de prodiguer des soins aux autres. Sur le point de la nomination des ministres par le Président, elle précise qu’il n’avait pas encore nommé de femmes à des postes ministériels. Elle est cependant confiante qu’il le fera en temps opportun.

La Présidente indique qu’elle avait cru comprendre que la question des nominations faisait référence aux parlementaires et non aux ministres.

M me  Nkole (Zambie) fait observer qu’il n’existe pas de système officiel de quotas pour la nomination des parlementaires. Que des femmes figurent sur les listes des partis politiques est une tendance positive, mais encore faudrait-il qu’elles puissent être élues.

M me  Acar demande des précisions sur la question de savoir si le système constitutionnel autorise le Président à nommer huit membres du Parlement et, dans ce cas, s’il a nommé des femmes.

M me  Nkole (Zambie), se référant à la question de la violence à l’égard des femmes, notamment le viol, précise que cet acte est une infraction pénale et que les auteurs, lorsqu’ils sont reconnus coupables, sont envoyés en prison. Toutefois, la peine maximale est relativement courte, environ sept ans, et cela doit changer. En ce qui concerne le droit coutumier, elle convient qu’il serait préférable d’avoir une loi uniforme sur le mariage. En pratique, cependant, le droit coutumier est si fort qu’il prévaut souvent et ce, même lorsqu’un mariage a été contracté en vertu de la loi sur le mariage.

M. Kapembwa (Zambie) souligne qu’une vaste initiative a été entreprise par la Commission de développement de la législation. Les questions relatives au viol et à l’application de la loi ont été examinées, mais, dans les faits, le problème réside dans l’absence de collaboration entre les organismes concernés. Un effort a été fait pour encourager la coordination, ce qui devrait améliorer grandement la situation.

M me  Nkole (Zambie), se référant à la question de savoir s’il existait un plan de mise en œuvre de la politique nationale relative aux sexospécificités adoptée en 2000, fait remarquer que la politique avait été traduite dans les sept langues principales. Le Gouvernement met actuellement l’accent sur l’éducation de la population et la tenue de consultations sur la mise en œuvre de la politique. On a demandé à chacune des neuf provinces d’indiquer comment la politique nationale devrait être mise en œuvre dans leur région particulière, compte tenu des différences considérables entre les régions. Les consultations ont été menées à bien et le processus de préparation d’un plan national de mise en œuvre est maintenant en cours.

En ce qui concerne le meurtre de femmes âgées, elle précise que les familles en Afrique avaient un profond respect pour les personnes âgées et que ces cas n’étaient pas une pratique généralisée. Dans les cas où cela s’est produit, la situation était due au fait que de nombreux jeunes gens mouraient du sida alors que des femmes âgées ne mouraient pas, pour la simple raison qu’elles n’avaient pas le sida. Comme ce sont les femmes qui prodiguent les soins et que, par conséquent, il se trouve une femme âgée parmi le peu de survivants, elle devient suspecte et est stigmatisée, la croyance voulant qu’elle pratique la sorcellerie. Bien sûr, des mesures doivent être prises pour régler le problème.

En ce qui concerne la législation pour lutter contre la violence conjugale, elle précise que certaines organisations non gouvernementales formaient des auxiliaires juridiques de façon à ce qu’elles puissent informer la population de ses droits humains et de la possibilité de poursuivre l’État dans certains cas. Des réformes juridiques sont effectivement nécessaires. Pour ce qui est du partage des ressources, elle souligne que la question n’est pas seulement celle de l’allocation de l’argent à des programmes particuliers, mais de l’incidence potentielle de ces allocations sur les femmes. Des ateliers permettront de faciliter les discussions entre des spécialistes des questions de parité entre les sexes et des experts des questions économiques pour faire en sorte que le budget réponde mieux aux préoccupations et aux besoins des femmes.

La séance est levée à 16 h 15.