Observations finales concernant le deuxième rapport périodique de la République arabe syrienne

Additif

Renseignements reçus de la République arabe syrienne au sujet de la suite donnée aux observations finales *

[Date de réception : 19 janvier 2016]

Conformément aux recommandations formulées par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes en date du 4 juillet 2014, dans lesquelles il a demandé au Gouvernement syrien de fournir, dans un délai d’un an, des informations écrites sur les mesures prises pour appliquer les recommandations figurant aux paragraphes 14 a) et b), 16, 27 c) et d) et 30 c), on trouvera dans le présent rapport les observations ci-après :

I.Paragraphe 14 a) des observations finales

Le Comité a recommandé de relancer les négociations de paix et de garantir la participation véritable et sans exclusive des femmes de différentes opinions politiques à toutes les étapes du processus de paix et à toutes les initiatives de reconstruction ainsi qu’aux processus de justice transitionnelle, en particulier au niveau de la prise de décisions et dans les instances nationales et locales et, à cette fin, d’adopter des mesures temporaires spéciales telles que les quotas, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention, et d’élaborer des programmes de renforcement des capacités à l’intention des femmes qui souhaitent participer aux processus de paix, de reconstruction et de justice transitionnelle.

La Commission syrienne des affaires familiales et de la population, en collaboration avec l’Assemblée du peuple, a mené une étude sur le système des quotas, qui s’est conclue par la formulation de plusieurs recommandations, les plus importantes étant l’élaboration d’une stratégie nationale opérationnelle pour élargir la participation des femmes aux assemblées élues et aux postes exécutifs par le renforcement de leurs capacités et de leur autonomie et l’élimination des obstacles sociaux dans tous les domaines et la révision des dispositions de loi discriminatoires, ainsi que par l’action de toutes les parties concernées.

a)Au niveau de la Commission syrienne des affaires familiales et de la population

La Commission a commencé à prendre un ensemble de mesures en collaboration avec plusieurs entités nationales (gouvernementales et civiles) afin de donner suite à la recommandation. C’est ainsi qu’elle s’emploie à :

Arrêter les statistiques exactes relatives au taux de participation des femmes dans toutes les assemblées élues et organes exécutifs publics et élaborer des études à cet égard pour cerner avec exactitude l’évolution de la participation des femmes à la vie publique, notamment dans le contexte actuel.

Organiser des ateliers de travail pour appuyer et encourager les syndicats, les fédérations et les associations (toutes les organisations de la société civile) à créer les conditions propices à la promotion des femmes dans les organes supérieurs et les conseils d’administration.

Renforcer les capacités des femmes en matière de prise de décision et d’expression de leur opinion, mais aussi développer leurs connaissances et qualifications administratives à travers leur participation à des projets de développement et des programmes de formation et de perfectionnement administratif.

Œuvrer, de concert avec le Gouvernement, à renforcer les capacités de direction des femmes et, ainsi, leur permettre d’occuper des fonctions de direction dans toutes les institutions.

Encourager (avec la participation du Gouvernement et des organisations de la société civile) la création d’organisations non gouvernementales qui s’attachent à promouvoir le rôle des femmes dans la société et à surmonter tous les obstacles qui empêchent leur promotion sociale. Le rassemblement « Les Syriennes femmes de paix », qui a été mis en place en collaboration avec le Ministère des affaires sociales et la Commission syrienne des affaires familiales et de la population, est un premier pas dans cette voie.

Encourager les femmes à s’intégrer davantage dans la vie publique en collaboration avec les organes nationaux d’information qui devront assurer une couverture médiatique plus large et jeter la lumière sur le rôle de plus en plus important que jouent les Syriennes dans la vie nationale. La Commission syrienne des affaires familiales et de la population appuie un programme télévisé qui met essentiellement l’accent sur la promotion du rôle de la femme dans la société, tandis que l’Union des femmes parraine des programmes radiophoniques et télévisés similaires.

La Commission a tout au long de l’année écoulée (du 1er août 2014 au 1er juillet 2015) élaboré des études et organisé des ateliers de travail avec toutes les parties concernées et fait des propositions concernant des projets de loi ou la modification de lois existantes (sur la pension alimentaire, l’immunité, la nationalité, etc.) touchant aux femmes et à leurs besoins.

La Commission organise régulièrement des cycles de formation et des ateliers de travail pour renforcer la sensibilisation à l’importance du rôle des femmes à tous les niveaux.

Création d’une instance de protection des femmes victimes de violence, qui est actuellement en cours d’équipement et dont on prépare les statuts. Elle devrait être opérationnelle au début de l’année prochaine.

La Commission, en collaboration avec le Geneva Institute for Human Rights, a tenu en 2010 et 2011 une série de rencontres avec des représentants de tous les ministères et des membres des forces de sécurité intérieure pour faire connaître les droits des femmes et préparer le rapport international au Comité pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

b)Au niveau de l’Assemblée du peuple

L’Assemblée du peuple a pris un ensemble de mesures pour renforcer le rôle des Syriennes dans la vie parlementaire et publique, notamment :

La création d’une commission pour examiner et développer la législation relative à la femme, de manière à éliminer tous les obstacles qui entravent la participation des femmes à la vie publique, politique, économique et sociale.

L’élargissement des missions et attributions de la Commission des droits de la femme, de la famille et de l’enfance au sein de l’Assemblée du peuple, afin qu’elle mette en place les mécanismes nécessaires qui permettront d’élargir la participation des femmes aux assemblées élues et aux administrations exécutives.

La création du Groupe des femmes parlementaires, composé des députés à l’Assemblée du peuple, qui est chargé d’œuvrer à la mise en place d’un programme de renforcement de la participation des femmes aux assemblées élues et exécutives. Ce groupe constitue une véritable instance de travail dotée de liens avec tous les organes nationaux traitant des questions de la femme, des organisations de la société civile, etc.

c)Sur le plan politique

Les partis politiques sont en général l’instrument le plus influent et le plus efficace pour les candidatures aux assemblées élues. Le Gouvernement syrien s’emploie donc, à travers ses organes exécutifs (Ministère des affaires sociales, Commission des affaires familiales et de la population et Union générale des femmes), à appuyer et encourager les partis politiques de toutes obédiences à prendre des mesures spéciales à cet égard dans le but :

D’élargir le nombre de femmes candidates aux assemblées élues.

De renforcer la représentation des femmes dans les fonctions et les instances de direction des partis, de les appuyer, de les aider et de faciliter leur action.

De créer un réseau d’appui aux candidates aux élections législatives, aux assemblées locales et à toutes les assemblées élues, ainsi qu’aux femmes élues, afin d’augmenter les taux d’autonomisation des femmes et de polarisation et de continuité de la présence féminine dans la société.

On notera à cet égard qu’après la promulgation de la loi No. 100 de 2011 sur les partis, 10 nouveaux partis ont été agréés dont deux sont dirigés par des femmes. Un troisième compte une femme vice-présidente. Les femmes constituent 25 à 35 % des membres des partis. Les statuts de ces partis insistent tous sur l’importance de l’autonomisation et de la participation des femmes à la vie politique, mais aussi de son accès à des fonctions de direction au sein de ces partis.

Dans ce cadre, la Commission des affaires familiales et de la population a publié un guide de l’autonomisation des femmes souhaitant agir au sein d’organisations de la société civile s’intéressant aux questions de la femme. Ce guide renferme les principes de justice transitionnelle, les résolutions du Conseil de sécurité concernant la femme dans les conflits armés, une analyse explicative de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et une synthèse des observations relatives à la Convention. Le guide a été étudié par les organisations précitées et diffusé à une large échelle.

L’Union générale des femmes a aussi organisé, dans la plupart des gouvernorats syriens, des ateliers de formation aux techniques de communication à l’intention de 2 500 femmes.

II.Paragraphe 16 des observations finales

Le Ministère de la justice a adressé ses observations au Ministère des affaires étrangères et de l’immigration en date du 24 février 2014 dans un document destiné aux organisations internationales, dans lequel il indique que rien ne s’oppose au retrait des réserves à l’article 2 de la Convention, à la suite de la modification de plusieurs articles du Code pénal relatifs à des infractions portant atteinte à la morale publique, qui a été publié dans le décret No. 1 de 2011.

Quant aux dispositions du paragraphe 4 de l’article 15 de la Convention, elles ne sont pas contraires à la législation syrienne sur la femme. On notera à cet égard ce qui suit :

La législation syrienne accorde à la femme célibataire la pleine liberté de voyager et de se déplacer à l’intérieur et à l’extérieur du territoire de la République arabe syrienne sans le consentement de qui que ce soit.

La femme mariée a le droit de se déplacer et de voyager à l’intérieur et à l’extérieur du territoire de la République arabe syrienne sans le consentement de son époux.

La femme mariée a le droit de voyager à l’intérieur du territoire de la République arabe syrienne sans le consentement de son époux.

La femme mariée n’a pas le droit de se déplacer et de voyager en compagnie de ses enfants à l’extérieur du territoire de la République arabe syrienne sans le consentement de son époux, car il faut préserver l’intérêt des enfants dont le tuteur est responsable là où ils se trouvent.

On notera que compte tenu des circonstances particulières que traverse le pays, et pour préserver la vie des enfants, la justice syrienne accorde à la mère une tutelle légale provisoire sur ses enfants en l’absence du père, ce qui lui permet de voyager en leur compagnie à l’intérieur et à l’extérieur du territoire syrien sans le consentement de leur tuteur légal. Compte tenu de l’absence de l’époux, la justice a délivré entre 2012 et 2014 des centaines de décisions provisoires de tutelle aux mères syriennes. L’Union générale des femmes syriennes a également proposé de modifier un paragraphe de l’article 276 du Code de la nationalité de 1969, de façon à octroyer la nationalité syrienne aux enfants d’une mère syrienne. Ce projet de modification est en cours d’examen par les autorités compétentes.

S’agissant de la liberté d’établissement de la femme mariée, elle est régie par la loi relative au statut personnel No. 59 de 1953 modifiée par la loi No. 34 de 1975 (articles 56 à 70), ainsi que par la Constitution syrienne de 2012, qui dispose que la famille est le noyau de la société et que la loi protège son entité et renforce les liens familiaux. La Constitution précise en outre que l’État protège et encourage le mariage et œuvre à éliminer tous les obstacles qui l’entravent et menacent la cohésion familiale.

On notera que la loi relative au statut personnel accorde à la femme le droit d’inscrire dans le contrat de mariage toute condition qu’elle juge nécessaire en ce qui concerne le logement, les voyages, les biens matériels et autres, ainsi que le droit de divorcer sans le consentement de son époux.

III.Paragraphe 27 c) et d) des observations finales

La législation syrienne punit la violence sexiste sous toutes ses formes, notamment les violences faites aux femmes et aux enfants et prévoit des sanctions pénales à l’encontre des auteurs.

Les forces armées, de police et de sécurité appliquent ces lois, qui les habilitent à assurer la sécurité du pays contre toute agression. Elles leur font obligation de veiller à l’ordre et à la sécurité publics et à la protection des citoyens contre toute atteinte à la vie et à l’intégrité des personnes, ainsi qu’aux biens, et de rendre compte de leur conduite aussi bien à leur hiérarchie qu’à la justice conformément au Code de justice militaire qui inflige de lourdes sanctions à ceux qui en enfreignent les dispositions.

Les membres de l’armée et des services de sécurité intérieure étudient dès leur entrée en service nombre de lois relatives à la protection des droits de l’homme et au droit international humanitaire. En outre, le Ministère de l’intérieur a organisé plusieurs cycles de formation à l’intention de plus de 400 officiers des forces de sécurité intérieure qui ont porté sur les droits de l’homme. Des formateurs du Ministère de l’intérieur ont également été conviés à suivre une formation sur les droits de l’homme.

En 2010 et 2011, les ministères de la défense et de l’intérieur, en collaboration avec une mission du Comité international de la Croix-Rouge, ont organisé des ateliers de travail et des cycles de formation sur la diffusion de la culture du droit international humanitaire parmi les fonctionnaires chargés de l’application des lois.

La loi syrienne publiée en vertu du décret législatif No. 148 de 1949 modifié punit les auteurs de violences sexuelles. En outre, le décret législatif No. 20 de 2013 modifiant le Code pénal, punit des travaux forcés à perpétuité les auteurs d’enlèvement de personnes, qui privent celles-ci de leur liberté, à des fins politiques ou matérielles ou en vue de se venger ou encore pour des raisons ethniques ou afin d’obtenir une rançon. Les auteurs de cette infraction peuvent être condamnés à la peine capitale s’ils agressent sexuellement les victimes.

En outre, l’article 489 du Code pénal a été amendé et se lit comme suit : « Quiconque, par la violence ou la menace, contraint une personne autre que son conjoint, à avoir des relations sexuelles, est puni des travaux forcés à perpétuité. Il est puni de la peine capitale si :

La personne agressée a moins de 15 ans;

L’infraction est commise sous la menace d’une arme ».

IV.Paragraphe 30 c) des observations finales

Les violences commises contre des femmes dans des lieux placés sous l’autorité de l’État sont sanctionnées et leurs auteurs punis conformément aux lois et règlements en vigueur. De même, rien n’empêche la femme victime de violence de porter plainte auprès des organes compétents contre toute personne qui l’agresserait, conformément à l’article 3 du Code de procédure pénale.

S’agissant des violences commises dans des régions contrôlées par des groupes terroristes armés, certains cas de violence ont été constatés et documentés par diverses parties (gouvernementales, civiles, internationales). On citera notamment le phénomène du « djihad du sexe », les mariages forcés de mineures dans des camps de pays voisins, des cas de viols, de traite d’êtres humains et d’exploitation sexuelle, touchant notamment des femmes et des enfants, et des cas de commerce d’organes humains. On a aussi recensé des cas de meurtres de femmes pour des motifs divers.

Il est difficile de bien cerner de telles infractions car de nombreuses victimes refusent de porter plainte contre des membres de groupes armés pour des raisons liées à la nature même de ces infractions qui sont attentatoires à leur dignité. La peur est également une des causes du silence des victimes qui craignent la vengeance des groupes armés. Les autorités compétentes ont arrêté certains auteurs de tels actes, qui ont fait l’objet d’enquêtes et de poursuites en justice. Le Ministère des affaires sociales a pour sa part accueilli dans des foyers d’accueil les filles agressées qui se sont placées sous la protection de l’État. Quant aux auteurs, ils demeurent malheureusement hors d’atteinte tant qu’ils se trouvent dans des régions qui échappent au contrôle de l’armée syrienne.

En ce qui concerne les actes attribués à des membres de l’armée et de la sécurité, une commission d’enquête a été formée conjointement entre le Ministère de la défense et le Ministère de l’intérieur en vertu de l’ordonnance administrative du Ministère de la défense No. 11047 du 16 août 2011. Cette commission a vu ses missions renouvelées en vertu de l’ordonnance administrative No. 1187 du 1er février 2015 et a été chargée d’enquêter sur les plaintes déposées par des citoyens auprès du Ministère de l’intérieur contre des membres de l’armée et de la sécurité dans l’exercice de leurs fonctions. Les conclusions des enquêtes de la Commission sont transmises à la justice dès la clôture de celles-ci.

L’ordonnance administrative invite tous les responsables militaires et de la sécurité à accorder à la Commission toutes les facilités pour assurer le succès de ses travaux. Celle-ci poursuit son travail. Elle a déjà traité un grand nombre de plaintes et traduit les auteurs d’infractions devant les juridictions compétentes.