Trente-sixième session

Compte rendu analytique de la 748e séance (groupe B)

Tenue au Siège, à New York, le mardi 15 août 2006, à 15 heures

Présidente :Mme Manalo

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Synthèse des deuxième et troisième rapports périodiques de la Géorgie (suite)

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports présentés par les États partiesconformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Synthèse des deuxième et troisième rapportspériodiques de la Géorgie (suite) (CEDAW/C/GEO/2 et 3; CEDAW/C/GEO/Q/3 et Add.1)

Sur l’invitation de la Présidente, les membres de la délégation géorgienne prennent place à la table du Comité.

M. Flinterman, notant avec satisfaction les progrès réalisés en faveur de l’élimination des stéréotypes dans l’éducation avec l’adoption, en septembre 2006, de manuels scolaires tenant compte des différences entre les sexes, pour les élèves de l’enseignement primaire, rappelle que le Gouvernement géorgien a été prié de fournir des informations détaillées sur les autres manuels qui auraient pu être réexaminés et révisé au-delà du niveau primaire. La délégation géorgienne a souligné que, pour la Géorgie, la révision des manuels destinés aux élèves de l’enseignement primaire constituait déjà un progrès important. Il serait toutefois intéressant de savoir dans quel délai d’autres mesures seront prises pour réformer l’ensemble du système de l’enseignement.

Au paragraphe 96 du rapport (CEDAW/C/GEO/2 et 3, le tableau 6, qui présente une ventilation par sexe des disciplines choisies par les étudiants de l’enseignement supérieur, montre que les étudiantes optent surtout pour les études classiques, ce qui indique des convictions profondément ancrées sur le rôle attribué respectivement aux hommes et aux femmes dans la société. M. Flinterman demande des informations sur les mesures envisagées par le Gouvernement pour encourager les jeunes filles et les femmes à s’orienter vers des métiers qui, jusqu’à présent, semblent réservés aux garçons et aux hommes, notamment dans les transports, les communications, l’agriculture, l’industrie et la construction.

M. Flinterman appelle l’attention sur un rapport statistique, intitulé « Les femmes et les hommes en Géorgie » (<http://www.parliament.ge/files/670_11253_998318_W&M–Eng.pdf>), publié par le Gouvernement géorgien avec, notamment, la collaboration du Programme des Nations Unies pour le développement, qui montre que les femmes sont majoritaires à tous les niveaux d’enseignement. Si les femmes sont majoritaires parmi les enseignants, on comprend mal pourquoi il paraît si difficile d’éliminer les stéréotypes dans les manuels des niveaux secondaire et supérieur.

Enfin, il serait intéressant de connaître l’état d’avancement de l’initiative en faveur de la maternité sans risques en Géorgie, et de savoir si elle est ou non passée sous la direction du Gouvernement géorgien. Cette question mérite une attention soutenue car la promotion de la maternité sans risques a son importance pour l’application de l’article 10 de la Convention.

M me  Arocha Domínguez note que le rapport et les réponses de la délégation géorgienne ainsi que les informations fournies par les organisations non gouvernementales décrivent une situation économique difficile. Selon la délégation, le Gouvernement connaît mal la situation du marché du travail. Il appartient pourtant à l’État de se préoccuper de cette situation, conformément à l’article 11 de la Convention. S’il n’a pas d’informations sur le marché de l’emploi, on ne voit pas comment le Gouvernement géorgien pourrait appliquer le principe de l’égalité de l’homme et de la femme dans le domaine de l’emploi.

Il est indiqué, au paragraphe 18 des réponses, que l’étude sur l’emploi qui doit être terminée au début de 2007 présentera des statistiques ventilées par sexe. Le Comité a besoin de connaître le pourcentage de femmes employ♪0es dans chaque secteur d’activité et les mesures qui sont prises pour mettre en application l’article 11 de la Convention. Il faudrait établir des comparaisons entre les zones urbaines et les zones rurales, et entre les diverses minorités ethniques.

En ce qui concerne le nouveau Code du travail, les pays d’Amérique latine savent d’expérience que les règles assez libérales, qu’imposent parfois dans ce domaine le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, peuvent avoir des conséquences désastreuses pour la population pauvre, en particulier pour les femmes, qui représentent la majorité des employés du secteur non structuré. Dans un pays comme la Géorgie où il existe des couches de population extrêmement défavorisées et vulnérables, il faudrait prendre garde aux conséquences de la nouvelle réglementation pour cette population. Et, bien que le nouveau Code du travail prévoie, dans une certaine mesure, d’interdire la discrimination fondée sur le sexe, il n’est pas certain qu’il garantisse l’égalité entre les hommes et les femmes.

M me  Patten voudrait savoir si, dans la répartition professionnelle, le problème de la ségrégation a été pris en compte en Géorgie et si des efforts ont été faits pour que les femmes soient représentées à égalité avec les hommes dans les emplois hautement qualifiés et les postes de rang supérieur. Elle souhaite en savoir plus sur les mesures qui pourraient être prises pour que les femmes aient plus largement le choix d’une profession.

Les écarts entre les rémunérations, qui sont liés au problème de la pauvreté chez les femmes, touchent les secteurs public et privé. D’après des données publiées par l’Organisation internationale du Travail (OIT), le salaire mensuel des femmes représente, en moyenne, 81,8 % du salaire minimum vital. Mme Patten a pris connaissance des lois en vigueur qui ont fixé ce salaire minimum et les taux de rémunération des employés du secteur public, et elle demande s’il est envisagé de réviser cette législation, discriminatoire à l’égard des femmes, compte tenu du principe de l’égalité entre l’homme et la femme adopté par la Géorgie. Elle voudrait aussi savoir si des efforts ont été faits pour réduire ces inégalités, et quels sont les organismes chargés d’arbitrer les litiges liés aux disparités entre les rémunérations. Elle demande aussi s’il est prévu de réexaminer et de modifier le taux de rémunération des emplois occupés majoritairement par des femmes, par exemple, les emplois d’enseignante et d’infirmière, afin de revaloriser leur statut social et leurs rémunérations.

Il faudrait préciser si le nouveau Code du travail énonce le principe de l’égalité de rémunération pour un travail égal et de même nature. En effet, la Géorgie a ratifié la Convention concernant l’égalité de rémunération pour les hommes et les femmes effectuant le même travail (Convention no 100 de l’OIT). Mme Patten demande aussi s’il est prévu d’adopter des critères de qualification des emplois indépendants des considérations de sexe.

Mme Patten demande en outre si le harcèlement sexuel, notamment entre collègues, figurera dans le nouveau Code du travail. Enfin, aucune information n’a été fournie sur les femmes employées dans le secteur non structuré. Compte tenu du taux de chômage, en particulier chez les jeunes femmes, il est probable qu’elles sont très nombreuses à travailler dans ce secteur. Mme Patten voudrait savoir si le Gouvernement géorgien envisage de prendre des mesures pour favoriser et encourager l’emploi indépendant chez les femmes, soutenir les petites entreprises, leur faciliter l’accès au crédit, organiser leur formation et leur recyclage dans le domaine des technologies nouvelles, et établir des programmes d’information et de diffusion à l’intention des plus pauvres pour les informer des possibilités de commercialisation et d’accès aux technologies.

M me  Makharashvili (Géorgie) dit qu’en ce qui concerne la réforme de l’enseignement, les enseignants eux-mêmes ne sont pas préparés à tenir compte des sexospécificités. Ils ont besoin d’une formation dans ce domaine pour être en mesure de reconnaître et d’identifier les stéréotypes dans les manuels scolaires. Ces stéréotypes sont le plus souvent signalés par des organisations non gouvernementales, dont l’action pour mobiliser les pouvoirs publics est à l’origine des projets de révision des manuels du niveau élémentaire, et leur remplacement par d’autres manuels neutres sur le plan sexospécifique. À vrai dire, ce problème n’a guère retenu l’attention des enseignants. La délégation géorgienne se félicite toutefois du fait que le Ministère de l’éducation se soit penché sur la question et se dise prêt à établir des directives appropriées à l’intention des futurs auteurs et rédacteurs des nouveaux manuels. L’étape suivante démarrera probablement en 2007. Étant donné que l’élaboration de manuels scolaires est un travail de longue haleine, la révision des manuels destinés à l’enseignement secondaire et supérieur s’effectuera année par année.

En ce qui concerne le tableau 6 du rapport, c’est pour avoir des horaires plus souples que les femmes choisissent de préférence d’exercer une profession dans les domaines de la santé, de l’enseignement et des disciplines littéraires, car elles souhaitent passer plus de temps chez elles. En Géorgie, les horaires de la plupart de ces emplois se terminent vers 14 heures, tandis que dans le secteur public et dans la plupart des entreprises privées, la journée de travail commence à 9 heures et se termine au plus tôt à 17 heures. Depuis quelques années, cependant, un nombre relativement élevé de jeunes femmes s’enrôlent dans les forces armées et la police après une campagne de recrutement menée par le Gouvernement. Vu le prestige dont jouissent les professions juridiques, il y a de nombreuses femmes parmi les avocats, en particulier, les avocats d’affaires, les juges et les procureurs. En revanche, les emplois techniques, surtout dans le bâtiment et la construction, qui n’ont pas autant de prestige, même parmi les hommes, attirent peu de femmes sans doute en raison de la pénibilité des travaux, et elles s’orientent plutôt vers l’architecture.

Dans le cadre de la présente réforme de l’enseignement, une attention spéciale est portée à l’enseignement professionnel. Après l’accession de la Géorgie à l’indépendance, les écoles professionnelles établies sous le régime soviétique ont été fermées mais le Gouvernement a décidé d’ouvrir des crédits budgétaires en vue de leur réouverture. De plus, vu la pénurie de main-d’œuvre qualifiée en Géorgie, une campagne d’information et d’incitation sera organisée pour encourager les jeunes filles à entreprendre des études techniques.

D’une façon générale, les filles bénéficient davantage de l’éducation que les garçons car elles sont plus assidues et appliquées. Elles ont été nombreuses à présenter les concours d’entrée dans l’enseignement supérieur, organisés par l’État. Ces concours ont recueilli l’approbation unanime surtout dans le contexte de la lutte contre la corruption, car l’unique critère de sélection retenu pour l’entrée à l’université est le mérite. Le Gouvernement octroie des bourses à quelque 40 000 étudiants parmi les mieux classés au concours d’entrée.

En ce qui concerne l’action du Gouvernement au titre de l’initiative pour la maternité sans risques, la représentante de la Géorgie dit que, la spécialiste des questions sanitaires de sa délégation s’étant trouvée dans l’impossibilité d’assister à la présente séance, elle enverra par e-mail, dès son retour en Géorgie, les informations précises que demande le Comité.

Les principes qui doivent régir le nouveau Code du travail ont fait l’objet de débats approfondis, et il a été décidé au niveau politique de rendre ce code le plus libéral possible. Mais, en raison du surcroît de travail que cela impose au Conseil de la condition de la femme et à certains parlementaires, le régime du congé de maternité reste sans changement. Les conditions minimales énoncées dans les dispositions du nouveau Code ont été fixées grâce à une forte mobilisation exercée par des parlementaires soucieux de la situation des femmes, car l’intention générale étant de rendre le marché du travail le plus libéral possible, toutes les décisions doivent être prises par voie de négociation entre employeurs et employés potentiels.

L’expérience des pays d’Amérique latine a été évoquée au cours des débats, ainsi que les effets négatifs que risquent d’avoir, pour l’égalité entre les hommes et les femmes, une libéralisation du type envisagé. Le Gouvernement a toutefois décidé de donner la priorité au développement économique du pays. Il faut espérer que la Géorgie parviendra à remettre en vigueur certaines garanties relatives à l’emploi ainsi que les normes de l’OIT concernant l’égalité des rémunérations des femmes et des hommes, conformément au principe « à travail égal, salaire égal ».

En ce qui concerne l’écart des rémunérations, le secteur privé est à présent totalement déréglementé et l’inspection du travail est supprimée dans le nouveau Code. Le Gouvernement ne s’est donc réservé aucun moyen d’intervenir dans les relations entre employeurs et employés du secteur privé, sauf en ce qui concerne les normes minimales imposées par le Code. Dans le secteur public, le Gouvernement, en étroite collaboration avec le Parlement, a mis au point un barème de rémunérations uniforme qui garantit le même traitement à tous les fonctionnaires du même grade dans tous les ministères.

Le futur statut de l’organisme chargé de la fonction publique est actuellement à l’examen. Il pourrait être fusionné avec un bureau spécialement chargé de veiller à l’intégrité des fonctionnaires et de traiter les cas de corruption, ou bien rester un organisme distinct relevant directement du Gouvernement. Les débats sur l’uniformisation des définitions d’emploi et des qualifications requises se poursuivront durant l’automne, sans oublier que ces qualifications doivent tenir compte des sexospécificités.

Le harcèlement sexuel sur le lieu de travail est une réalité et des mesures spéciales s’imposent. Il n’en est toutefois pas question dans le Code du travail, et il est peu probable qu’il soit pris en considération dans la législation géorgienne dans un avenir proche.

On dispose de certaines statistiques concernant l’emploi des femmes dans le secteur non structuré. Par exemple, 67 % de la main-d’œuvre a le statut de travailleur indépendant, les hommes étant deux fois plus nombreux que les femmes dans cette catégorie, dans laquelle 87 % de femmes et 74 % d’hommes travaillent dans le secteur agricole, et 10 % de femmes et 12 % d’hommes, dans le secteur commercial.

Lors des premières privatisations, entre 1994 et 1999, environ 25 % des petites et moyennes entreprises étaient dirigées par des femmes, mais celles-ci ont eu des difficultés à trouver des capitaux et à rentabiliser leur activité. Des programmes financés par des organisations donatrices à l’intention des microentreprises et des petites et moyennes entreprises aident les femmes à poursuivre leurs activités. Un projet pilote de faible ampleur se met en place en Géorgie occidentale pour aider les femmes à créer leur propre affaire moyennant une aide financière sous forme de prêts et de subventions. Si ce projet donne de bons résultats, des crédits supplémentaires pourront figurer dans le prochain budget annuel.

Le Président de la Géorgie a dernièrement fixé les objectifs prioritaires nationaux dont, entre autres, le perfectionnement des compétences. Un projet en cours d’élaboration qui sera lancé en septembre prévoir le financement par le Gouvernement d’un salaire minimum et de trois mois de stage de recyclage pour 50 000 employés du secteur privé.

Articles 12 à 14

M me  Dairiam dit que, en ce qui concerne l’accès des femmes aux soins de santé primaires et secondaires, il est indiqué dans le rapport que l’accès de tous aux soins de santé est garanti par la loi. Cependant, d’après les informations dont on dispose, ce n’est manifestement pas le cas dans la pratique. Plus de 2 500 centres de soins ont été privatisés et, bien qu’il existe un système national d’assurance maladie, la prise en charge des frais médicaux est quelque peu limitée. Aussi, comme l’indique le rapport, le principal problème est lié à la capacité de paiement des patients. Selon le rapport présenté par l’Ombudsman en 1999, 55,3 % seulement des fonds affectés aux services sanitaires ont été débloqués. Mme Dairiam demande donc si l’on dispose de chiffres plus récents sur le budget de la santé et sur le montant des crédits alloués et effectivement débloqués.

Le Plan stratégique d’action pour l’éducation sur le VIH et le sida a reçu un appui technique et financier considérable de source internationale. Il serait intéressant de savoir si les programmes concernent aussi bien les zones rurales que les zones urbaines et s’ils visent les groupes plus vulnérables. Mme Dairiam voudrait savoir pour quelle raison le programme de lutte contre le VIH et le sida mobilise tant d’appui et d’aide financière; si cette aide a été sollicitée par le Gouvernement ou fournie à l’initiative des donateurs; et si le traitement des malades touchés par le VIH et le sida est considéré comme prioritaire par rapport aux services de santé de base. Elle demande aussi si le programme a été évalué du point de vue de son impact et de son accessibilité dans les zones rurales, et s’il est envisagé de mobiliser aussi efficacement l’aide internationale pour aider le pays à ouvrir plus largement l’accès aux services de santé de base, en particulier aux groupes les plus vulnérables. Enfin, elle engage instamment le Gouvernement à s’inspirer de la recommandation générale no 25 du Comité pour faire en sorte que les services de santé répondent mieux aux besoins des femmes.

Le taux d’avortement est très élevé en Géorgie. Il serait utile d’avoir plus d’informations sur les taux de morbidité et de mortalité résultant des avortements non médicalisés, et de savoir si les avortements sont plus nombreux dans les zones urbaines, dans les zones rurales ou parmi les groupes ethniques. D’après le rapport, les informations sur la contraception sont largement disponibles grâce à l’aide internationale. Mme Dairiam demande donc des statistiques concernant l’utilisation de contraceptifs, comment s’explique le taux élevé d’avortement, et si des critères et des objectifs ont été fixés en vue de réduire le taux d’avortement.

M me  Gabr tient dûment compte du fait que la Géorgie a récemment évolué vers une économie de marché mais rappelle que l’article 13 de la Convention engage les États à prendre des mesures très précises en faveur des femmes, lesquelles représentent, parmi la population, le groupe qui a le plus souffert de cette évolution. Le rapport mentionne les efforts faits par le Gouvernement pour venir en aide à la population, mais ce n’est pas suffisant. Elle voudrait savoir ce qui peut être fait pour que cette aide soit plus efficace, en particulier, pour les femmes touchées par la délocalisation interne et pour les femmes âgées. L’adoption d’un système de quota a été évoquée, et il serait utile de connaître les intentions du Gouvernement car il serait plus rationnel de dispenser cette aide en fonction de distinctions précises, notamment aux femmes chefs de famille et aux chômeuses les plus âgées.

Il semble que le nouveau Code du travail ne soit pas adapté à la situation des femmes et que des modifications s’imposent. Une attention spéciale doit être portée aux femmes rurales, et Mme Gabr voudrait savoir quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour améliorer leur situation et pour les empêcher de migrer vers les villes où elles risquent d’être exploitées.

M me  Makharashvili (Géorgie) dit que la réforme des services de santé vise par priorité les soins de santé primaires. Le Gouvernement fournit un appui notamment financier pour les centres de soins de santé primaires : il a commencé à réparer les bâtiments, à moderniser les installations et à augmenter les salaires des agents sanitaires. Il a pour objectif d’ouvrir à tous l’accès à ces services mais cela prendra du temps. On espère que d’ici la fin de 2008, chaque région sera dotée d’un centre de soins de santé primaires.

En ce qui concerne le financement des services de santé, la représentante de la Géorgie ne dispose pas de chiffres précis sur le budget annuel qui leur est affecté mais elle les communiquera plus tard au Comité. Actuellement, tous les crédits alloués sont débloqués et dépensés au cours de l’exercice financier correspondant. Le financement de la campagne contre le VIH et le sida est assuré par les donateurs, qui ont certainement procédé à une évaluation de leurs programmes et disposeront des informations demandées. Le Gouvernement s’efforce de mobiliser des fonds pour financer les services de soins de santé primaires, notamment auprès de la Banque mondiale. Le nombre des avortements a diminué ces dernières années et des données précises seront fournies au Comité un peu plus tard.

Le nouveau Code du travail ne tient pas compte des sexospécificités car il ne vise pas particulièrement les femmes ou les hommes : il assouplit les relations professionnelles entre employeurs et employés, l’État intervenant aussi peu que possible et n’exerçant pas de contrôle ni d’inspection. Il est entendu que le Code du travail devra être modifié par la suite mais l’objectif prioritaire du Gouvernement est actuellement de dynamiser l’économie nationale. La Géorgie a besoin de gros investissements, et l’on sait qu’une réglementation libérale de l’emploi attire les investisseurs. Il a été décidé, au niveau politique, d’attirer ces investisseurs et de reporter à plus tard la prise en compte des questions spécifiquement féminines. Il faut savoir que cette décision, très difficile à prendre, ne l’a été qu’après des débats approfondis, à l’issue desquels le Code du travail a été légèrement modifié pour satisfaire aux normes internationales en vigueur.

Pour l’heure, le Gouvernement n’envisage pas de mesures particulières pour retenir les femmes rurales dans leurs villages. C’est un autre domaine qui retient son attention. Il existe quelques programmes relatifs au microcrédit visant principalement les zones rurales et une loi spécifique a récemment été adoptée pour doter les organismes de microcrédit d’un cadre juridique leur permettant de développer leurs activités.

M me Patten note que, dans le nouveau Code du travail, l’inspection du travail n’existe plus. Elle se demande pour quelle raison ce dispositif a été supprimé et comment, en son absence, l’application du nouveau Code pourra être contrôlée. Elle demande des informations sur les moyens dont disposent les femmes pour demander réparation lorsque leurs droits sont violés et si des sanctions sont prévues à cet égard dans le nouveau Code; combien de plaintes ont été déposées; si les femmes connaissent la législation en vigueur qui garantit leurs droits; et si elles peuvent disposer d’une assistance juridique au cas où elles porteraient plainte.

M me  Gabr voudrait savoir si la politique et les programmes du Gouvernement concernant la protection et les prestations sociales accordées aux groupes vulnérables de la population, seront expressément étendus aux femmes, en particulier aux femmes chefs de famille, aux femmes âgées et aux femmes déplacées, lorsque la situation socioéconomique de la Géorgie se sera améliorée. La question posée au sujet de l’octroi de crédits dans les zones urbaines n’a pas reçu de réponse. Les femmes se voient parfois refuser un emprunt ou un crédit en raison de la faiblesse de leur revenu, de leur faible niveau d’instruction ou de leur ignorance des démarches à accomplir.

M me  Makharashvili (Géorgie) dit que l’inspection du travail a été supprimée parce que c’était l’une des administrations les plus corrompues du Gouvernement, qui n’a jamais arbitré un conflit ou contribué à le régler, et il aurait été vain de tenter de la réformer. Le règlement des conflits du travail relève désormais des tribunaux civils qui sont compétents en matière de contrats, y compris les contrats qui constituent la base de toutes les relations professionnelles. Bien qu’il n’existe pas de statistiques officielles concernant les plaintes et les actions en justice, on sait, de source officieuse, que des femmes enceintes ou en congé de maternité ont gagné leur procès et ont été réintégrées dans leur emploi.

Les crédits sont octroyés par des banques privées qui fixent elles-mêmes les conditions à remplir pour y avoir droit. De nombreuses femmes ont bénéficié d’un microcrédit ou d’un petit prêt, et l’état des remboursements semble très satisfaisant. Cependant, si le signataire est le mari, le crédit octroyé est généralement un peu plus important.

Articles 15 et 16

M me  Shin note que l’âge légal du mariage est fixé à 18 ans mais que la mariage peut être autorisé à l’âge de 16 ans dans des cas exceptionnels. Elle aimerait en savoir plus sur ces cas exceptionnels et sur le nombre de mariages contractés par des jeunes de moins de 18 ans. Bien qu’interdit par la loi, l’enlèvement existe encore par tradition, et Mme Shin demande si des mesures ont été prises à l’encontre de cette pratique. Elle demande aussi si le stéréotype qui attribue à l’homme le rôle de soutien de famille et à la femme, celui de mère au foyer, est remis en question et si des mesures sont prises pour l’éliminer.

M me  Gabr demande des informations complémentaires sur les droits de la femme en cas de divorce, notamment en ce qui concerne les biens et la garde des enfants. Elle souhaiterait aussi plus de détails sur les rôles stéréotypés de l’homme et de la femme chez les Musulmans et dans les minorités ethniques :sur la mesure dans laquelle l’âge légal du mariage est respecté dans les communautés musulmanes; et sur la position du Gouvernement en ce qui concerne les droits des enfants jusqu’à l’âge de 18 ans. L’islam reconnaît le droit de la femme de garder son nom de naissance lorsqu’elle se marie, ainsi que certains autres droits, notamment en matière de biens, dans le cadre du mariage et du divorce. De plus, elle demande si la femme mariée à un étranger peut transmettre sa nationalité à ses enfants, et si un étranger marié à une Géorgienne prend automatiquement la nationalité géorgienne.

M me  Makharashvili (Géorgie) explique que lorsqu’une jeune fille de moins de 18 ans est enlevée en vue du mariage, l’État enregistre le mariage, à condition que les parents aient donné leur consentement et que la jeune fille soit âgée de 16 ans au moins. Les mariages entre mineurs ne sont souvent que des enlèvements consentis. D’après certaines informations, le nombre des enlèvements aurait diminué, mais on ne dispose pas de statistiques officielles sur la question car les certificats de mariage délivrés par l’État ne mentionnent pas s’il y a eu enlèvement. Leur nombre a augmenté parmi les mineurs, comme parmi les jeunes ayant atteint la majorité, ce qui s’explique par la lourde charge financière que les rites traditionnels du mariage imposent à la famille.

Le rôle stéréotypé de l’épouse en tant que mère au foyer subsiste mais la jeune génération a introduit plus d’égalité entre les filles et les garçons. Aucune mesure spéciale n’est prise pour lutter contre ce stéréotype mais l’égalité est prise en compte dans de nombreuses activités émanant du Gouvernement.

Dans les procédures de divorce, les tribunaux tendent à confier la garde des enfants à la mère. Il ne faut voir aucune malveillance à l’égard des Musulmans dans une des interventions précédentes mais, dans les zones rurales, l’accès à l’éducation est limité par les modes de penser traditionnels, et il se trouve que c’est particulièrement apparent dans les régions à forte population musulmane. Dans les régions peuplées en majorité par des Azerbaïdjanais, qui sont musulmans, on a vu des chefs de famille se rendre dans les bureaux de vote munis de cinq ou six passeports appartenant à des femmes de leur famille et voter à leur place. Ailleurs, en Géorgie, les femmes se rendent elles-mêmes dans les bureaux de vote avec leur passeport et votent directement, sans intermédiaire.

La législation géorgienne interdit d’enregistrer les mariages entre mineurs âgés de moins de 16 ans mais le Gouvernement ne peut pas rendre compte des mariages non enregistrés, et les mariages entre mineurs ne peuvent être enregistrés que lorsque les époux atteignent l’âge de 16 ans. Les formalités et procédures de mariage et de divorce sont absolument les mêmes pour tous les citoyens et dans toutes les régions, et relèvent des bureaux de l’état civil ou des tribunaux.

Un nouveau décret du Gouvernement admet la double nationalité. Les formalités de naturalisation et d’immigration sont les mêmes que dans d’autres pays. Si une femme souhaite que son enfant ait la nationalité géorgienne, il suffit qu’il naisse en Géorgie. La décision relative à la double nationalité a été prise à l’échelon présidentiel mais, cela mis à part, la législation en la matière est semblable à celle des autres pays.

M me  Shin, évoquant les statistiques publiées par le Département de statistique du Ministère du développement économique, reconnaît que l’on y trouve des données ventilées par sexe dans des domaines importants mais elle estime qu’il est nécessaire de recueillir davantage de données concernant les femmes afin que l’on puisse se représenter plus précisément la situation des femmes et le degré d’égalité entre les sexes. Aux fins de l’article 16, les données recueillies devraient indiquer le temps consacré par les femmes et par les hommes, respectivement, à l’éducation des enfants et aux tâches ménagères. Mme Shin voudrait savoir quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour que les données recueillies tiennent suffisamment compte des questions sexospécifiques.

M me  Gabr a le sentiment que certains organismes nationaux dépendent de l’appui de la communauté internationale des donateurs. Elle se demande si ces organismes ne pourraient pas être financés par le Gouvernement et par des sources de financement nationales.

M me  Belmihoub-Zerdani rappelle que la Géorgie a ratifié la Convention en 1999 sans formuler de réserves et que la Convention devrait donc être appliquée immédiatement et sans plus d’hésitations. Pour que de réels progrès soient faits en faveur des droits des femmes, il faudrait procéder à un examen approfondi de la manière dont le Parlement pourrait légiférer et contrôles les activités nationales et, en même temps, être en mesure de donner effet à toutes les dispositions de la Convention.

M me  Makharashvili (Géorgie) dit que les statistiques publiées en 2005 reposaient sur des données recueillies en 2004. La collecte des données pour 2005 s’est achevée depuis peu mais les résultats n’ont pas encore été publiés. Les recommandations du Comité concernant la collecte seront utiles au groupe de travail chargé d’élaborer le texte des modifications à apporter à la loi sur les statistiques pour définir la nature des données à recueillir et les méthodes de collecte à utiliser. On espère qu’un premier projet de texte sera soumis au Parlement en septembre 2006. L’importance que revêtent les statistiques pour la promotion de la condition de la femme est évidente et l’on espère que le Département de statistique sera en mesure de commencer, en janvier 2007, à recueillir des données supplémentaires. Toute nouvelle recommandation du Comité concernant la nature des données que la loi sur les statistiques devrait spécifier sera accueillie avec intérêt.

En ce qui concerne l’appui financier apporté aux organismes nationaux, le plan national d’action, que le Conseil consultatif de l’égalité entre les sexes et la Commission nationale pour l’égalité entre l’homme et la femme sont en train d’élaborer, sera financé à la fois par le budget national et par des organisations internationales de donateurs qui ont déjà annoncé leurs contributions financières aux campagnes d’information et aux activités de formation. Dans le projet de plan d’action, il sera toutefois prévu d’inscrire le financement des organismes nationaux au budget national.

À propos de l’application rapide de la Convention, il est vrai que la Convention l’emporte sur la législation nationale mais, pour que la Convention soit mise en pratique, il faut que ses dispositions figurent dans la législation nationale, et c’est ce qui explique que les articles de la Convention ne sont pas encore intégralement appliqués en Géorgie. Cependant, l’Association géorgienne des jeunes juristes, qui s’est donné pour tâche de diffuser l’information sur le contenu et sur la portée de la Convention, assure gratuitement une assistance juridique aux femmes comme aux hommes. Il n’existe pas de jurisprudence relative à la Convention et les particuliers n’ont pas invoqué ses dispositions devant les tribunaux. Il serait utile que le Conseil constitutionnel rende une décision qui ferait jurisprudence sur la relation entre les dispositions de la Convention et celles de la législation nationale.

M. Flinterman rappelle que l’article 2 du Protocole facultatif stipule que les organisations féminines qui ont à se plaindre d’une violation des droits garantis par la Convention peuvent soumettre leur plainte au Comité. Cette disposition présuppose que les femmes peuvent invoquer la Convention à l’échelon national à condition que leur pays ait ratifié le Protocole facultatif. Or, la Géorgie a ratifié le Protocole, et il serait intéressant de savoir quel est le rapport entre le droit des femmes d’invoquer la Convention à l’échelon national et le rôle du Conseil constitutionnel. M. Flinterman voudrait, en particulier, savoir si les femmes peuvent invoquer la Convention devant les tribunaux de droit commun ou si elles doivent porter plainte devant le Conseil constitutionnel.

M me  Makharashvili (Géorgie) explique que le Conseil constitutionnel est la seule autorité qui puisse prescrire au Parlement de modifier la législation nationale. Si une loi est jugée discriminatoire ou doit être modifiée, la décision appartient donc au Conseil constitutionnel. La Cour suprême ne peut pas modifier les lois, elles ne peut que les appliquer. Il est regrettable que les femmes qui considèrent que leurs droits garantis par la Convention ont été violés soient obligées de recourir au Conseil constitutionnel ou au Comité. La délégation géorgienne reconnaît la nécessité de faire œuvre de sensibilisation et d’information en matière d’égalité entre l’homme et la femme en Géorgie, et que le Gouvernement doit faire davantage pour améliorer la situation des femmes.

La séance est levée à 16 h 55.