à l’égard des femmes

Quarante-troisième session

Compte rendu analytique de la 884e séance

Tenue au Palais des Nations, à Genève, le mercredi4 février 2009, à 10 heures

Présidente  :Mme Gabr

puis :Mme Neubauer (Vice-Présidente)

puis :Mme Gabr (Présidente)

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties en application de l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport unique valant quatri ème à six ième rapports périodiques du Rwanda

La séance est ouverte à 10 heures.

Examen des rapports présentés par les États parties en application de l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport unique valant quatrième à sixième rapports périodiques du Rwanda (CEDAW/C/ RWA / 6 , CEDAW/C/ RWA /Q / 6 et  Add.1)

À l’invitation de la Présidente, les membres de l a délégation d u Rwanda pren nent place à la table du Comité.

M me Mujawamariya (Rwanda), introduisant le rapport unique valant quatrième à sixième rapports périodiques du Rwanda (CEDAW/C/RWA/6) et illustrant sa présentation à l’aide de diapositives numérisées, dit que le Rwanda, pays situé en Afrique de l’Est, a une population estimée à 9,3 millions d’habitants, dont 47,8 % d’hommes et 52,2 % de femmes. La politique de discrimination et d’exclusion ethniques et régionales appliquée après l’indépendance en 1962 a atteint un point culminant en avril 1994 avec un génocide qui a endeuillé le pays et coûté la vie à plus d’un million de victimes et dont les conséquences pour les Rwandaises ont été graves et durables. En juillet 1994, un gouvernement d’unité nationale a été mis en place, composé du Front patriotique rwandais et de partis politiques qui n’avaient pas participé au génocide, afin de ménager une période de transition devant aboutir à un gouvernement élu par le peuple et permettre de faire face aux tâches difficiles de reconstruction et de réconciliation. Le gouvernement de transition et le peuple rwandais ont fait face à des défis immenses : maladies, déplacement interne, traumatismes et nécessité d’assurer les besoins des groupes vulnérables dont les veuves, les orphelins et les rescapés du génocide, qui se trouvaient sans abri et sans ressources.

Le rapport qui fait l’objet du présent débat est le premier à être présenté au Comité depuis le génocide, à l’exception du rapport oral de 1996. Le Gouvernement est entièrement acquis à l’autonomisation des femmes et à la promotion de leur participation socio-économique et politique à la vie nationale. Il a en effet la conviction que le pays ne pourra progresser si les femmes ne sont pas incluses dans tous les domaines d’un futur Rwanda voulu comme uni, démocratique et prospère.

Aux termes de la Constitution de 2003, tout citoyen a droit à l’éducation. L’enseignement primaire est obligatoire et gratuit dans les écoles publiques, sans discrimination entre les sexes. Le plan national de développement « Vision 2020 » vise un taux d’alphabétisation de 85 % d’ici à 2015, qui devra atteindre 100 % en 2020. Des programmes scolaires révisés, sensibles aux sexospécificités, ont récemment été introduits. La Constitution consacre par ailleurs le principe « À travail égal, salaire égal », et toute forme de discrimination en matière d’emploi est interdite dans le secteur public.

Dans le domaine de la santé, les Rwandais, d’une manière générale, ont connaissance d’une méthode au moins de planification familiale, mais n’y font toujours que peu appel. Les taux de mortalité maternelle demeurent élevés mais sont tombés de 1 071 pour 100 000 naissances vivantes en 2000 à 750 en 2005. On compte que cette baisse se poursuivra. Les femmes reçoivent pour la plupart des soins prénataux d’une manière ou d’une autre mais nombre des naissances ont lieu à la maison, notamment dans les zones rurales, en dépit du fait que 85 % de la population bénéficie des prestations de sécurité sociale et d’une assurance-maladie. La mortalité infantile demeure elle aussi élevée, avec un taux de 107 décès pour 1 000 en 2000; ce taux est tombé à 86 % en 2005. Près de 99 % de la population a connaissance du mode de transmission du VIH/sida et d’une méthode au moins de prévention. Le sida a désormais la réputation d’être une maladie de femmes car les femmes sont plus souvent séropositives que les hommes. Les autres maladies sexuellement transmissibles sont moins connues de la population.

Le Rwanda a fait de gros progrès vers la parité en matière de représentation politique. La Constitution dispose que 30 % au moins des fonctions de décision à tous niveaux doivent être confiées à des femmes. À l’heure actuelle, les femmes représentent 56,2 % des parlementaires, 36 % des membres du Gouvernement, 50 % des juges de la Cour suprême; 40 % occupent des fonctions au niveau des administrations locales. Afin d’accroître la participation des femmes à l’économie, le Gouvernement a, entre autres mesures, établi le Fonds de garantie, qui offre des prêts aux petites entreprises. En outre, la Chambre des femmes chefs d’entreprises a créé une association d’épargne et de crédit pour les femmes. La stratégie adoptée par le Gouvernement comporte également une formation dispensée aux femmes en matière d’activités génératrices de revenus.

Les mécanismes nationaux du progrès des femmes comprennent le Ministère « du genre » (de la condition féminine) et de la promotion de la famille, qu’elle-même dirige, le Secrétariat consacré au suivi de la Conférence de Beijing, qui contrôle l’exécution du Programme d’action de Beijing, le Conseil national des femmes, une organisation locale, l’Office de l’Ombudsman et le Bureau de suivi des questions féminines. Un Observatoire « du genre » (de la condition féminine) a également été créé. La Constitution de 2003 est soucieuse de l’égalité entre les sexes, et nombre de dispositions législatives discriminatoires touchant le mariage et la famille, la nationalité et la propriété foncière ont été amendées. En 2004, une politique nationale de la condition féminine a été adoptée. Elle comporte des mesures sexospécifiques en matière de budgétisation, par lesquelles il est demandé à son ministère d’examiner tous les budgets sectoraux du point de vue de leurs effets sur les femmes avant de les transmettre au Ministère de l’économie et des finances.

La pauvreté constitue, avec les effets persistants du génocide, l’un des grands obstacles au progrès des femmes. Toute contrainte, toutefois, s’accompagne de possibilités. La volonté politique du Gouvernement, qui est déterminé à éliminer la discrimination à l’égard des femmes à tous les échelons de la société rwandaise, est présente. Au nombre des efforts actuellement déployés, il convient de citer l’instauration d’un cadre juridique sensibilisé aux droits de la femme, l’initiative de budgétisation sexospécifique et l’établissement d’un cadre institutionnel solide, dont la Cour suprême, qui a réalisé la parité entre les sexes, la décentralisation des services publics, la responsabilisation à tous les niveaux et l’action concrète engagée afin de promouvoir les femmes à des positions de décision et cela même dans le secteur privé.

La stratégie pour la marche à suivre prévoit le renforcement des mécanismes de suivi et d’évaluation et l’adoption de plans de développement prenant en considération l’intégration d’une perspective sexospécifique dans tous les programmes et projets de développement et assurant des activités de sensibilisation relatives à l’élimination des stéréotypes et coutumes discriminatoires. De surcroît, et étant donné le grand nombre de femmes victimes et rescapées du génocide, les poursuites des auteurs de ces crimes doivent être diligentées. La violence sexiste est une autre question d’importance : il existe déjà quatre refuges mis à la disposition des victimes de la violence dans le foyer; il est prévu d’en ouvrir d’autres comme de présenter un projet de loi au Parlement à ce sujet. Il conviendra de renforcer les comités de lutte contre la violence sexiste organisés au niveau communautaire et de créer un institut d’enseignement supérieur, ayant pour vocation de former les futurs dirigeants.

Articles 1 à 6

M me  Šimonović félicite le Rwanda du niveau élevé de la représentation des femmes au Parlement. Il est regrettable que les représentants des organisations non gouvernementales n’aient pas pu assister à la présentation du rapport en raison de problèmes de visa. Elle souhaiterait en effet être mieux informée de leur participation à l’établissement du rapport. Il est de bonne pratique de soumettre celui-ci au Parlement avant sa présentation, accompagné des observations finales. Elle aimerait également savoir où en est le processus d’adoption du Protocole facultatif à la Convention.

S’agissant de la place occupée par la Convention dans l’ordre juridique interne, le Programme d’action de Beijing est considéré comme l’élément clef du cadre mis en place pour le progrès des femmes. Il s’agit là pourtant d’un document de politique générale et non d’un instrument juridiquement contraignant sur le plan international. Si la Convention est directement applicable en droit interne, elle se demande alors pourquoi il n’est signalé aucun cas à l’occasion desquels elle aurait été invoquée. Cela donnerait à penser que les magistrats doivent être mieux informés à son égard. Elle s’interroge également sur le maintien de dispositions discriminatoires dans le Code de la famille et le Code de commerce par exemple, qui ne sont pas alignés sur la Constitution, si vraiment la Convention l’emporte sur le droit interne. Il est tout aussi important que soient adoptées des lois interdisant spécifiquement la discrimination.

M me  Popescu demande des informations précises sur les mesures visant à faire participer les femmes aux poursuites des auteurs du génocide, que ce soit devant les tribunaux spéciaux ou les juridictions gacaca. Elle s’enquiert également des garanties d’égalité offertes dans l’administration de la justice aux femmes victimes de violences sexistes et des mesures visant à protéger les victimes et les témoins. Il serait bon de fournir davantage d’informations sur les moyens par lesquels un appui durable est fourni aux femmes et fillettes marquées par des traumatismes ou ayant subi des coups et blessures ou des pertes diverses. Elle aimerait recevoir des précisions sur la situation des enfants soldats et savoir si l’on s’occupe de manière adéquate de la réadaptation et de la réinsertion des anciennes filles soldats dans la société. Le Comité des droits de l’enfant a indiqué qu’il était possible que des enfants venant des camps de réfugiés du Rwanda soient enlevés pour devenir soldats dans la République démocratique du Congo; elle souhaiterait en savoir davantage sur cette situation.

L’oratrice demande des précisions sur le fonctionnement des mécanismes nationaux consacrés aux femmes et aimerait savoir s’ils bénéficient d’un financement et de ressources humaines à la hauteur de leurs objectifs, qui sont ambitieux. La relation entre les institutions de promotion des femmes doit être clarifiée : il semblerait en effet que la Convention doive être rendue plus visible. Elle se demande, par ailleurs, de quelle manière des institutions telles que l’Observatoire du genre, la Commission nationale des droits de l'homme et l’Office de l’Ombudsman assurent la cohérence de leurs travaux.

Pour ce qui est de Vision 2020, elle demande si l’élément relatif à la condition féminine de ce plan de développement prévoit l’intégration des questions sexospécifiques par secteurs ou s’il envisage l’élaboration d’une stratégie visant spécifiquement les femmes. Enfin, elle souhaite savoir s’il est prévu d’adopter une législation définissant et interdisant expressément la discrimination à l’égard des femmes, conformément à l’article premier de la Convention.

M me  Patten, évoquant les mesures temporaires spéciales prévues à l’article 4, exprime son appréciation du système de quotas, qui a conduit à une représentation politique si élevée des femmes. Elle demande des précisions sur le dialogue mené avec le secteur privé et si celui-ci applique également ces mesures. Lorsque l’on cherche à instaurer un environnement favorable à l’égalité de fait, l’adoption de mesures temporaires spéciales dans les domaines de l’éducation, de l’emploi et du recrutement peut être extrêmement utile. L’action doit également viser les pratiques culturelles et les stéréotypes discriminatoires. Il serait important de recevoir des données sur le nombre de femmes qui bénéficient des programmes de crédit et de prêt, et sur l’impact de ceux-ci. En dernier lieu, elle demande si le Gouvernement a envisagé d’adopter des mesures temporaires spéciales à l’intention des femmes qui font l’objet de formes multiples de discrimination.

M me  Mujawamariya (Rwanda) fait observer que tous les accords internationaux auxquels le Rwanda est partie l’emportent sur toutes les lois internes à l’exception de la Constitution. L’on ne dispose pas actuellement de données statistiques sur le nombre de cas à l’occasion desquels la Convention a été invoquée devant les tribunaux; elles seront fournies en temps opportun. La Constitution interdit la discrimination; l’adoption d’une loi distincte prévoyant l’interdiction de la discrimination ferait par ailleurs double emploi avec les dispositions de la loi sur la violence fondée sur le sexe. Quelques dispositions discriminatoires demeurent bien dans le Code de commerce, qui est en cours de modification; entre-temps, le Gouvernement a fait la preuve de sa ferme volonté de promouvoir la participation des femmes à la vie économique. Quant à la relation entre le Secrétariat consacré au suivi de la Conférence de Beijing et la Convention, cette dernière a force constitutionnelle et prévaut. La Convention est perçue comme un moyen important de montrer que les décisions nationales prises en matière d’autonomisation des femmes sont appuyées au niveau international.

S’agissant du concours prêté par des organisations de la société civile à l’établissement du rapport, il est regrettable qu’aucune organisation non gouvernementale (ONG) n’ait été invitée par le Comité à participer à l’examen du rapport; en l’occurrence, les ONG n’ont pas été en mesure de réunir les moyens voulus pour leur déplacement.

Les femmes sont activement présentes dans les tribunaux et participent activement aux poursuites engagées contre les auteurs du génocide. Sur 11 procureurs généraux, sept sont des femmes; le Secrétaire exécutif des juridictions g acaca et plus de 50 % de leurs magistrats sont des femmes. Les femmes sont de plus en plus présentes dans l’appareil judiciaire car on considère qu’elles sont moins faciles à corrompre que les hommes. Les victimes et témoins de viols et violences comparaissant devant les juridictions gacaca peuvent déposer dans une chambre spéciale dans laquelle ils ne peuvent être vus par l’accusé; leur voix est même modifiée lorsque la protection des témoins l’exige. Un appui à long terme est fourni aux victimes par le Fonds des rescapés du génocide, un organisme gouvernemental, et l’Association des veuves du génocide (AVEGA), une organisation non gouvernementale qui fournit une assistance médicale sur une base continue, des conseils et un abri aux rescapés, une attention spéciale étant accordée aux questions touchant les femmes.

Le Rwanda n’est pas en état de guerre et le pays ne compte pas d’enfants soldats. Le Gouvernement a contesté le rapport des Nations Unies affirmant qu’ils sont présents – ce qui est contraire à la réalité des faits. Les anciennes filles soldats, qui sont maintenant des jeunes femmes, ne sont pas exclues des programmes de relèvement et de réinsertion; elles ont reçu l’éducation et les soins médicaux auxquels elles ont droit au même titre que les garçons. Les enfants actuellement présents dans des camps situés au Rwanda sont des réfugiés de pays voisins, tels que la République démocratique du Congo. Ils ont toujours accès à l’enseignement offert par le Gouvernement, et leurs droits sont respectés.

Le Gouvernement rwandais reconnaît que la participation des femmes à la vie économique est cruciale pour le développement et que le pays ne peut progresser si elles restent à la traîne. Ce sont les femmes qui sont majoritairement les victimes de la pauvreté. Une fois leur situation mieux assise, le PNB suivra. De par le Code de commerce révisé, les femmes n’ont plus besoin de l’autorisation de leur mari pour contracter un emprunt. Le secteur privé s’est rendu compte également que la participation des femmes était indispensable à son développement, ce qui a été à l’origine de la mise en place de la Chambre des femmes chefs d’entreprises : il s’agit là d’une association qui offre aux femmes des emprunts destinés au financement de petites entreprises. En 2008, les femmes ont représenté 40 % des bénéficiaires du Fonds de garantie, ce qui est un faible pourcentage par rapport au nombre de femmes vivant en deçà du seuil de pauvreté.

L’oratrice, évoquant la question des liens entre les institutions nationales des droits de l'homme et l’autonomisation des femmes, dit que son ministère, le Ministère du genre et de la promotion de la famille, fait partie du Cabinet du Premier Ministre. Il compte une unité de l’intégration des femmes et une unité de l’autonomisation économique. Il coordonne par ailleurs l’élément relatif à la condition féminine des programmes de tous les autres ministères afin de bien vérifier qu’ils traitent de tous les aspects se rapportant aux femmes et qu’ils sont responsables des résultats. L’Observatoire du genre est un organe indépendant qui fait également partie du Cabinet du Premier Ministre; le Secrétariat consacré au suivi de la Conférence de Beijing est attaché au Ministère du genre et de la promotion de la famille. Son propre ministère est membre du Comité national pour les droits de l’homme, qui supervise la politique et les institutions nationales dans ce domaine.

Les progrès réalisés dans la mise en œuvre de Vision 2020 font actuellement l’objet d’une évaluation, y compris l’élément relatif à la condition féminine. Au nombre des réalisations du plan d’action pour 2008, figurent la mise en opération de l’Observatoire du genre, l’établissement du Conseil national des femmes, la dispensation d’une formation et la révision des dispositions législatives discriminatoires. Les hommes eux-mêmes sont devenus sensibles à la dimension sexospécifique en ce qu’ils sont désormais conscients des avantages que représente l’autodétermination des femmes et qu’ils commencent à appuyer ces évolutions. La stratégie visant à faire participer les femmes à la prise de décisions implique tous les niveaux, du niveau local aux niveaux les plus élevés. Outre les mesures temporaires spéciales telles que les quotas de représentation appliqués aux femmes pour les postes élus, les mesures à long terme ont porté sur l’offre aux filles de plus larges possibilités en matière d’enseignement, dont l’organisation de cours de soutien spéciaux qui les préparent aux examens nationaux. On compte 18 établissements d’enseignement supérieur dans lesquels les femmes sont en mesure de poursuivre leurs études grâce à des cours du soir, pour lesquels le Gouvernement fournit le transport.

La Présidente, prenant la parole en tant que membre du Comité, fait remarquer que le Comité n’a pas invité les organisations non gouvernementales (ONG) à participer à ses sessions. Les représentants de ces organisations peuvent s’adresser au Secrétariat pour prendre la parole lors des réunions informelles que le Comité organise avec les ONG, puis solliciter un visa du pays hôte.

L’élimination des stéréotypes féminins discriminatoires à l’égard des femmes a quelque peu progressé mais il faudra déployer de nouveaux efforts – modifications des programmes scolaires, coopération avec les organes des droits de l'homme, les organisations de la société civile, les médias et les organisations régionales et internationales. Des efforts louables ont déjà été entrepris pour éliminer la violence sexiste par l’adoption de lois appropriées, mais le Ministère doit engager une action plus ferme. Elle souhaiterait disposer de davantage d’informations sur une éventuelle coopération entre les pays de la région touchant les pratiques permettant de traiter de la violence dans le foyer de la manière la plus efficace. Le mariage précoce est une autre pratique préjudiciable aux femmes, encore que, récemment, des progrès aient été réalisés dans la lutte contre cette pratique.

M me  Murillo de la Vega demande si des mesures ont été prises pour réduire l’écart entre les sexes dans le corps professoral aux niveaux secondaires et universitaires, qui compte 83 % d’hommes. Elle se demande si les lois relatives au génocide traitent spécifiquement de la violence à l’égard des femmes et, dans l’affirmative, si les survivantes reçoivent une indemnisation de leurs agresseurs.

M me  Amori voudrait des précisions sur l’état d’avancement du processus d’adoption du projet de loi sur la traite des personnes, que le Code pénal n’aborde pas. Elle s’enquiert des mesures prises pour protéger les femmes réfugiées, les demandeuses d’asile et autres groupes vulnérables de la traite pratiquée aux fins d’exploitation sexuelle et du travail forcé, et pour aider les victimes en cette période préalable à l’adoption du projet de loi. La délégation a bien déclaré devant le Comité qu’il n’y avait pas d’enfants rwandais dans les camps de réfugiés : elle n’en voudrait pas moins savoir si la traite des enfants demeure préoccupante. Il lui serait de même utile de savoir dans quelle mesure l’action entreprise pour empêcher les femmes conduites à la prostitution du fait de leur pauvreté donne des résultats dans les districts, et si les femmes réfugiées, les demandeuses d’asile et les femmes rurales bénéficient des programmes existants. En dernier lieu, elle demande que des commentaires soient présentés au sujet des observations finales du Comité des droits de l’enfant, qui font état d’un nombre croissant de victimes de l’exploitation sexuelle et de la pornographie mettant en scène des enfants – qu’il s’agisse de filles, d’orphelins ou d’enfants abandonnés.

M me  Chutikul, notant que la pauvreté a été avancée comme étant la raison essentielle de la prostitution, serait désireuse d’avoir des précisions sur la stratégie mise en place pour réduire la pauvreté, notamment sur les mesures ayant abouti. Elle souhaiterait recevoir davantage d’informations sur les dispositions figurant dans le projet de loi sur la traite et savoir si la définition que le projet donne de la traite correspond à celle qui est donnée dans le Protocole de Palerme. La prostitution est illégale; il est donc important de connaître le rôle de la police lorsqu’elle y fait face. Elle demande s’il existe une unité de la police spécialisée dans les questions touchant les femmes et les enfants, si la police compte des femmes policières, et comment les prostituées mineures et les clients de prostituées sont traités.

Mme Neubauer, Vice-Présidente, prend la présidence.

M me  Mujawamariya (Rwanda) fait remarquer que sa délégation a convenu qu’une action ferme s’imposait si l’on voulait atteindre les objectifs visés touchant la violence à l’égard des femmes, à laquelle devaient prendre part toutes les parties intéressées. Le Rwanda est désormais membre de la Commission de l’Afrique de l’Est, qu’il préside actuellement, et a placé les questions se rapportant aux femmes au premier rang de l’ordre du jour durant sa présidence. En ce qui concerne l’inégalité entre les sexes dans le personnel enseignant des écoles secondaires et des universités, il est à noter que les femmes sont majoritairement présentes au niveau primaire. Toutefois, les femmes rwandaises qui sont titulaires de diplômes supérieurs ne semblent pas, pour la plupart, intéressées par l’enseignement. Pour les femmes, l’accès à l’éducation est intervenu 40 ans après celui des hommes de sorte qu’elles n’ont pas encore rattrapé leur retard dans ce domaine.

Pour ce qui est de la traite des personnes, elle explique qu’aucune poursuite n’a encore été engagée, encore qu’un projet de loi soit actuellement devant le Parlement. La Police nationale est à la tête d’un comité directeur sur la prévention de la traite, organisé sous les auspices du Président. Les mesures prises pour protéger les victimes comprennent une assistance dispensée aux anciennes professionnelles du sexe par le biais d’activités génératrices de recettes et l’établissement d’un fonds autorenouvelable, lequel fournit un financement qui aide les petites entreprises à démarrer.

Elle affirme à nouveau qu’il n’y a pas d’enfants soldats au Rwanda. Pour la plupart, les personnes qui demandent un asile sont des réfugiés économiques venus du Burundi, pays limitrophe. Ces réfugiés traversent fréquemment la frontière et sont cause d’insécurité dans le pays en raison des activités criminelles qui leur sont imputées. En ce qui concerne la prostitution, les femmes aussi bien que leurs clients enfreignent la loi et courent le risque d’être arrêtés. Elle oppose également un démenti aux affirmations touchant l’exploitation sexuelle des enfants et la pornographie impliquant des enfants, activités qui relèvent de son ministère.

Pour 2006, les chiffres montrent que, au niveau de l’université publique, sur 16 193 étudiants, 4 850 étaient des femmes. Dans l’université privée, les femmes constituent 10 615 des 20 966 étudiants, soit un peu plus de 50 %. La plupart des femmes fréquentent des établissements privés; ceux-ci offrent des cours du soir, ce qui leur permet de poursuivre leurs études tout en assumant leurs responsabilités familiales et professionnelles.

La définition de la traite telle qu’elle figure dans le projet de loi soumis récemment au Parlement est la suivante : La traite des personnes est une pratique qui fait d’un individu un produit utilisé à des fins d’exploitation ou de transfert dans un autre lieu ou un autre pays par la fraude, la menace, l’usage de la force ou de la contrainte, un abus d’autorité, notamment avec l’intention de lui nuire ou de l’exploiter illicitement en ayant recours à des pratiques humiliantes, à la prostitution, à des pratiques illicites ou assimilables à l’esclavage, en le soumettant à des tortures ou des mauvais traitement, ou en se servant de lui comme d’un esclave domestique, et ce en abusant d’une situation de vulnérabilité due aux difficultés rencontrées par lui dans ses contacts avec l’administration, à la grossesse d’une femme chef de famille, à la maladie, à un handicap ou à d’autres problèmes pouvant faciliter la tâche de la personne qui se rend coupable de tels actes.

M me  Ameline demande si la notion de respect envers l’égalité des femmes et des hommes a directement et à un degré sensible modifié le contexte culturel lié à l’histoire du génocide et si les hommes et les femmes aident la nation à maîtriser ces souvenirs. Elle s’enquiert de l’état des recherches entreprises pour trouver les auteurs des violences et de quelle manière il est possible d’aider la jeune génération de filles à se percevoir comme des agents au service du développement et non comme des victimes.

S’agissant de la budgétisation soucieuse d’équité entre les sexes, elle demande si une part du budget de chaque institution est consacrée aux questions touchant les femmes ou si le budget est alimenté par des ressources additionnelles.

M me  Hayashi relève, en ce qui concerne l’application de la Convention et du Programme d’action de Beijing, que la Convention est un instrument juridiquement contraignant sur le plan international, et que, à ce titre, la position qu’elle occupe dans le système juridique doit faire l’objet d’un examen. Elle est curieuse de savoir si les tribunaux spéciaux et les juridictions gacaca collaborent entre elles ou se partagent la charge de travail de quelque manière que ce soit, et si les décisions du Tribunal pénal international pour le Rwanda influent sur les décisions des tribunaux internes.

M me  Gabr, Présidente, reprend la présidence.

Pour M me  Popescu, le fait que la Convention n’ait été invoquée dans aucun cas donne une indication du manque de visibilité de cet instrument dans l’ordre juridique interne. Elle souhaiterait donc en savoir davantage sur les mesures prises pour la faire connaître et fournir une formation aux membres de l’appareil judiciaire et au personnel chargé de l’application des lois. Elle demande si la loi sur la violence sexiste est déjà en vigueur et, si tel est le cas, s’enquiert des principales formes de violence qu’elle vise. Elle s’inquiète de la criminalisation de l’adultère, du concubinage, de l’avortement et de la prostitution, et demande des informations sur la situation des femmes et des filles détenues du chef de ces infractions. Elle souhaiterait par ailleurs recevoir un complément d’information sur la situation des femmes rwandaises rapatriées qui avaient été déplacées ou qui se trouvaient dans des camps de réfugiés.

M me  Šimonović demande à quel stade en est le processus de ratification du Protocole facultatif à la Convention et quelles dispositions législatives discriminatoires sont actuellement à l’examen.

M me  A r a Begum demande s’il existe des refuges mis à la disposition des victimes de la violence sexiste dans les régions rurales comme dans les villes, quels programmes de réadaptation sont offerts aux jeunes femmes victimes du génocide et de la violence, et combien sont celles qui en ont bénéficié, combien d’auteurs ont été punis et s’il existe des programmes aidant les jeunes femmes à se remettre des traumatismes subis.

M me  Rasekh souhaite savoir si la législation interne compte des lois sanctionnant ou réprimant le harcèlement sexuel.

M me  Mujawamariya (Rwanda) évoque, à titre d’exemple d’un processus de budgétisation prenant en compte la sexospécificité, le fait que, lorsque le Ministère de l’éducation prévoit de faire appel au fonds de construction scolaire pour installer des latrines, il doit montrer que lesdites latrines seront utilisables par les filles comme par les garçons. De même, un centre de santé doit prouver qu’il utilise les fonds qui lui sont alloués pour offrir des méthodes de planification familiale applicables aussi bien par les hommes que par les femmes. Par ailleurs, son ministère dispose de son propre budget de l’intégration et de l’autonomisation des femmes.

La Convention figure parmi les instruments internationaux directement applicables en droit interne, énumérés à l’article 9 de la Constitution. Elle a été traduite en Kinyarwanda, la langue locale, de manière à faciliter sa diffusion. Ses dispositions sont également respectées par le Tribunal pénal international pour le Rwanda et les juridictions gacaca.

Le Parlement n’a pas encore promulgué la loi réprimant la violence sexiste. Certaines mesures ont toutefois été prises. Le texte de la future loi traite de la violence familiale et du harcèlement sexuel. La pratique du concubinage est considérée comme une infraction pénale car elle s’accompagne habituellement d’une violation des droits du partenaire et des enfants nés de l’union. Bien que l’adultère soit lui aussi érigé en infraction, on cherche avant tout à éduquer avant de sévir. Des mesures sont par ailleurs prises pour aider les femmes à sortir de la prostitution. En vertu de la Constitution, la vie humaine commence dès la conception; l’avortement est donc une infraction puisqu’il implique un meurtre. La réinsertion des femmes réfugiées s’effectue principalement par le biais de programmes de réduction de la pauvreté; leur statut de rapatriées ne les expose à nulle forme de discrimination. Les refuges offerts aux victimes de la violence sexiste se trouvent dans les zones rurales, où cette forme de violence est la plus répandue. Ils offrent un enseignement visant à sensibiliser les femmes aux questions de sexospécificité et offrent des conseils en matière familiale aux partenaires.

M m e  Niwe m fura (Rwanda) ajoute que la société civile a participé à l’établissement du rapport. Celui-ci a été rédigé par le Ministère du genre et de la promotion de la famille avec l’aide du Secrétariat consacré au suivi de la Conférence de Beijing. Le Comité national chargé d’examiner le rapport était composé de représentants d’organisations locales, d’associations pour le progrès de la femme, des églises catholiques et protestantes et de l’Islam, de donateurs, d’organismes des Nations Unies et du secteur privé au travers de la Chambre des femmes chefs d’entreprises. Toutes les parties intéressées ont pu l’examiner avant qu’il ne soit soumis aux organes pertinents du Gouvernement.

Le Conseil des ministres a approuvé la ratification du Protocole facultatif en 2007. Le Cabinet a pris connaissance du dossier. Dans la prochaine étape, le Parlement l’examinera, puis le transmettra au Président. La Convention, au même titre que d’autres instruments internationaux importants, a été traduite en kinyarwanda et diffusée auprès des chefs de district et des membres des conseils nationaux de femmes et de jeunes.

L’écart noté entre les hommes et les femmes dans le corps professoral des universités est imputable dans une certaine mesure à l’ancien gouvernement colonial. Ce n’est qu’en 1960 que les femmes ont été autorisées à étudier des matières scientifiques et autres matières théoriques. Avant cette époque, leur éducation était limitée à la tenue d’un ménage et aux soins des enfants.

Articles 7 à 9

M me Belmihoub-Zerdani fait remarquer que le Rwanda est le premier pays au monde pour la représentation des femmes au Parlement (56 %) depuis que la Suède a perdu sa place; c’est là une réalisation dont il peut être fier. La représentation des femmes au niveau local, toutefois, n’est que de 40 %. Il faut donc que d’autres initiatives soient engagées pour que les femmes puissent assumer des fonctions de responsabilité à des niveaux de plus en plus élevés; les femmes qui occupent des fonctions de direction dans les administrations locales sont mieux placées pour défendre les intérêts féminins.

Elle souhaiterait savoir de quelle assistance internationale le Rwanda a bénéficié au titre de la mise en œuvre de la Convention et dans le but d’offrir un appui à long terme aux victimes, veuves et orphelins du génocide, que ce soit de la part de l’Organisation des Nations Unies ou d’organisations affiliées, de donateurs bilatéraux ou de l’Union africaine.

L’oratrice aimerait savoir par ailleurs si une Rwandaise mariée à un non-Rwandais transmet sa nationalité à ses enfants au même titre que les hommes.

La séance est levée à 13 h eures .