Trente-sixième session

Compte rendu analytique de la 754e séance

Tenue au Siège, à New York, le vendredi 18 août 2006, à 15 heures

Présidente:Mme Belmihoub-Zerdani (Vice-Présidente)

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport initial et d euxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques combinés du Cap-Vert (suite)

En l’absence de Mme Manalo, Mme Belmihoub-Zerdani, Vice-Présidente, prend la présidence.

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport initial et deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques combinés du Cap-Vert (suite) (CEDAW/C/CPV/1-6; CEDAW/C/ C PV/Q/6 et Add.1)

1. À l ’ invitation de la Présidente, les membres de la délégation du Cap-Vert prennent place à la table du Comité.

Articles 7 et 8 (suite)

2.Mme  Lima (Cap-Vert) fait savoir qu’il ne se pose aucun problème en ce qui concerne le droit de vote et que la représentation des femmes dans l’administration gouvernementale s’est améliorée. Le problème tient au nombre de femmes élues au Parlement et aux administrations locales. Bien que beaucoup de femmes fassent campagne pour leur parti, rares sont celles qui paraissent disposées à se présenter aux élections en dépit des subventions qui sont versées conformément au Code électoral aux partis politiques dont les listes comportent au moins 25 pour cent de candidates. L’Institut pour la promotion de la femme a essayé de travailler avec les dirigeants des partis politiques, mais il reste encore à faire, peut-être en introduisant des quotas. En outre, si les femmes hésitent parfois à se présenter aux élections, c’est parce que, trop fréquemment, elles sont invitées à faire acte de candidature à la dernière minute, trop tard pour quelles puissent prendre les dispositions nécessaires au foyer étant donné qu’au Cap-Vert, les hommes ne participent pas aux tâches familiales. Si la règle selon laquelle les listes des partis politiques doivent comporter une certaine proportion de femmes est consacrée par la loi, il faudra mettre en place des mécanismes pour la faire respecter. Les femmes qui ont été élues ont le devoir d’user de leur pouvoir politique pour améliorer la situation des autres femmes; le fait que des femmes soient parlementaires et ministres constitue un signal positif pour les autres femmes.

3.S’agissant des municipalités, il n’y a dans le pays qu’une seule femme maire, mais des 17 candidats à cette fonction, 5 étaient des femmes. Dans la carrière diplomatique, 32,5 pour cent des postes sont occupés par des femmes, dont deux sont ambassadeurs et deux chargées d’affaires.

Article 10

4.Mme  Simms félicite la délégation du Cap-Vert des résultats obtenus, spécialement dans le domaine de l’enseignement primaire, mais souligne la nécessité de veiller à ce que les filles et les femmes ne soient pas, du fait de leur pauvreté, laissées pour compte dans le domaine de l’enseignement. Bien que l’argent rapatrié par les travailleurs à l’étranger permette à un grand nombre de familles pauvres de subsister juste au-dessus du seuil de pauvreté, une femme qui doit élever seule sa famille doit fréquemment garder les aînées à la maison plutôt que de les envoyer à l’école pour qu’elles s’occupent de leurs frères et sœurs plus jeunes. Il faut que le mécanisme national rassemble des statistiques et coopère avec le Ministère et avec les ONG pour éviter que les filles soient ainsi privées de la possibilité de suivre des études, et il doit également collaborer avec les institutions chargées de l’enseignement public pour combattre les idées stéréotypées qui prévalent encore.

5.M.  Flinterman félicite lui aussi la délégation du Cap-Vert des réalisations obtenues dans le pays dans le domaine de l’enseignement. Le Cap-Vert, s’il veut éliminer les idées stéréotypées dans l’enseignement, devra poursuivre ses programmes de sensibilisation des enseignants à la problématique hommes-femmes et s’attacher systématiquement à nommer des femmes à la tête des établissements scolaires. M. Flinterman souhaiterait savoir quel est le taux d’abandons scolaires des filles au niveau secondaire et quelles sont les mesures adoptées par le gouvernement pour encourager les filles à opter pour des matières et des programmes de formation qui ne sont pas généralement considérés comme féminins. Il est préoccupé par le fait que les filles enceintes sont temporairement exclues de l’école, ce qui peut apparaître comme une punition, et aimerait savoir quelles sont les mesures, par exemple par le biais de l’éducation sexuelle à l’école, que le gouvernement envisage d’adopter pour éviter les grossesses chez les adolescentes. Enfin, il faudrait envisager la possibilité d’exempter les filles enceintes de la règle qui, au Cap-Vert, interdit rigoureusement aux enfants de redoubler une classe plus d’une fois.

6.Mme  Saiga souhaiterait avoir des chiffres concernant les taux d’abandons scolaires au niveau primaire et savoir si la règle qui interdit plus d’un redoublement s’applique également à ce niveau. Il est dit dans le rapport que les enfants qui échouent deux fois aux examens scolaires doivent abandonner le système public et fréquenter une école privée mais, comme rares sont les parents qui peuvent financer une éducation privée, cela signifie sans doute la fin des études pour ces enfants, ce qui explique peut-être le taux élevé d’analphabétisme qui prévaut au Cap-Vert. Il est évidemment important de prévenir les grossesses chez les adolescentes, mais Mme Saiga souhaiterait savoir quelles sont les politiques élaborées par le gouvernement pour permettre aux filles intéressées de poursuivre leurs études.

7.Mme  Šimonović demande en outre quelles sont les prestations et l’appui dont peuvent bénéficier les mères adolescentes pendant leur absence de l’école et pourquoi 60 pour cent d’entre elles seulement peuvent poursuivre leurs études après l’accouchement. Elle souhaiterait également avoir des informations plus détaillées sur la réalisation des aspects concernant l’enseignement des Objectifs du Millénaire pour le développement et sur la date à laquelle il est envisagé de réduire l’écart entre filles et garçons au niveau secondaire et au niveau supérieur.

8.Mme  Lima répond qu’il n’y a pas d’écart entre filles et garçons dans l’enseignement secondaire.

9.Mme  Rodrigues (Cap-Vert) fait observer que le Plan national d’action reflète la nécessité de dispenser une éducation et une formation aux femmes chefs de ménage qui n’ont pas accès à l’éducation formelle. Dans le cadre du programme élaboré pour pouvoir avoir accès au microcrédit, ces femmes reçoivent une formation pour les familiariser avec la vie des affaires et leur permettre de tirer le plus grand parti possible des crédits accordés. Le programme d’alphabétisation du Département de l’éducation comporte des quotas pour les femmes rurales, à l’intention desquelles ont été organisés des programmes d’alphabétisation fonctionnelle, notamment pour les familiariser avec l’emploi des pesticides si elles travaillent dans l’agriculture. L’éducation technique est une nouvelle option dont les avantages ne sont pas pleinement compris, surtout par les filles. Il a été adopté un certain nombre de mesures dans ce domaine, et il a ainsi été décidé de réserver aux filles 80 pour cent des places disponibles dans les résidences pour élèves de l’enseignement technique, mais ce quota n’est actuellement pas atteint, faute de candidates. Pour ce qui est des taux d’abandons scolaires, ils sont plus élevés pour les garçons que pour les filles au niveau secondaire et il a été prévu d’entreprendre une étude pour identifier les raisons de cet état de choses. Une étude doit aussi être entreprise au sujet de l’impact des grossesses et de la suspension de la fréquentation scolaire sur la vie et l’éducation des filles intéressées.

10.Mme  Lima (Cap-Vert) dit que les fonds rapatriés par les travailleurs à l’étranger ne sont qu’un moyen parmi d’autres de combattre la pauvreté. Le microcrédit est très important aussi, et des crédits sont fréquemment offerts dans le cadre de programmes qui comportent également des composantes d’alphabétisation et de formation professionnelle. Ces programmes sont particulièrement axés sur les femmes chefs de ménage.

11.La population reconnaît la nécessité de veiller à ce que les filles fréquentent l’école, et les familles ne gardent pas les filles à la maison pour qu’elles aident aux tâches familiales comme c’est le cas dans certains pays. Pour encourager les filles à suivre des études techniques, un pourcentage élevé des chambres disponibles est réservé aux filles. La pratique consistant à suspendre temporairement la fréquentation scolaire des filles enceintes a fait l’objet d’un vif débat au sein du gouvernement et de la société. Au Cap-Vert, les élèves du secondaire sont autorisés à redoubler une classe s’ils échouent aux examens. Précédemment, les filles enceintes devaient suspendre leurs études perdaient un an. Si les filles enceintes doivent suspendre leurs études, c’est pour leur donner l’occasion de les reprendre plus tard sans perdre un an et aussi pour préserver un certain climat dans le contexte scolaire. Si une fille enceinte ne veut pas quitter l’école, elle n’est pas obligée de le faire mais, étant donné les circonstances, cela est jugé préférable. Depuis que cette mesure a été instituée, beaucoup de filles enceintes ont suspendu leurs études jusqu’à l’accouchement puis les ont reprises. Le gouvernement tient à faire en sorte que les filles qui tombent enceintes ne quittent pas le système scolaire et que la suspension des études motivée par une grossesse ne soit pas considérée comme un échec. Jusqu’à la huitième année d’études, il n’y a pas d’abandons ni de limites quant au nombre de fois qu’un élève peut redoubler une classe. Après la huitième année d’études, les élèves ne peuvent pas échouer plus de deux fois aux examens. Beaucoup de ceux qui, ayant déjà redoublé une classe, ne sont pas autorisés à poursuivre leurs études suivent des cours du soir ou fréquentent une école privée. Des cours d’alphabétisation sont dispensés aux adultes qui le souhaitent. Il n’existe pas d’écart entre filles et garçons dans le secteur de l’éducation. Le troisième Objectif du Millénaire pour le développement a été atteint à tous les niveaux de l’éducation.

Article 11

12.Mme  Patten souhaiterait avoir des informations détaillées concernant la situation de fait des femmes sur le marché du travail ainsi que l’application des lois et décrets visant à protéger les droits des femmes. Elle souhaiterait savoir s’il existe un Ministère du travail et, dans l’affirmative, si celui-ci s’emploie à promouvoir l’égalité entre les sexes. Par ailleurs, il serait utile de savoir s’il a été institué une Inspection du travail pour surveiller les conditions de travail dans le secteur privé, quelles sont les mesures adoptées pour faire connaître aux femmes les lois qui visent à les mettre à l’abri de la discrimination au travail et s’il existe des juridictions spécialisées dans les conflits du travail. Si de telles juridictions existent effectivement, il serait intéressant de d’avoir des données sur les affaires introduites par des femmes. Le rapport est muet sur les questions des harcèlements sexuels au travail et des différences de rémunération, et il conviendrait de savoir ce qu’est la situation à cet égard, en particulier dans le secteur privé. Par ailleurs, Mme Patten se demande si le gouvernement envisage de mettre en place des systèmes d’évaluation professionnelle exempts de considérations de sexe et si le principe d’égalité de rémunération pour un travail égal et un travail de valeur égale est appliqué. Enfin, le Comité souhaiterait avoir des informations au sujet des mesures adoptées pour garantir l’égalité d’accès des femmes à la formation professionnelle et aux services de placement et pour promouvoir l’accès des femmes à des postes de responsabilité exigeant de hautes qualifications, en particulier dans les secteurs dont elles sont habituellement absentes.

13.Mme  Arocha Domínguez demande s’il a été entrepris au Cap-Vert des études de l’impact des investissements dans le tourisme sur l’emploi des femmes. Il serait bon de savoir à quelles activités du secteur du tourisme sont employées les femmes et si celles-ci sont désavantagées par rapport aux hommes. Il conviendrait aussi d’avoir des renseignements sur la formation dispensée aux femmes pour faciliter leur intégration à toutes les activités relevant du secteur du tourisme.

14.S’agissant de la politique d’ouverture aux investissements dans l’industrie légère suivie au Cap-Vert, il ressort de l’expérience que la plupart de ces investissements se dirigent vers le secteur des textiles, particulièrement dans des entreprises de fabrication appartenant à des sociétés de marque de pays développés. Les femmes qui travaillent dans ces établissements sont fréquemment exploitées. Il serait bon de savoir si le gouvernement a adopté des mesures appropriées pour éliminer ces abus.

15.Mme  Coker-Appiah se dit étonnée par le fait qu’en dépit des garanties consacrées par la Constitution du Cap-Vert concernant la création pour les femmes de conditions de travail de nature à leur permettre de s’acquitter plus facilement de leurs responsabilités maternelles et familiales, il existe des différences entre ce qui concerne les prestations de maternité versés dans les secteurs public et privé. Les femmes qui travaillent dans le secteur public bénéficient de congés pour des visites de soins prénatals, mais tel n’est pas le cas dans le secteur privé. Les fonctionnaires de sexe féminin bénéficient de 60 jours de congé de maternité rémunéré, tandis que la durée de ce congé n’est que de 45 jours pour les femmes qui travaillent dans le secteur privé. Il serait bon d’avoir une explication de la différence qui caractérise les prestations en vigueur dans les secteurs public et privé. En outre, les femmes qui travaillent dans le secteur public ont droit à six jours de congé lorsqu’elles se marient, tandis que la durée de congé n’est que de trois jours dans le secteur privé. Il serait bon de savoir si les femmes qui travaillent dans le secteur non structuré sont couvertes par le même régime de sécurité sociale.

16.M.  Pires (Cap-Vert) déclare que le Ministère du travail, de l’emploi et de la solidarité comporte une Inspection générale du travail chargée de suivre le respect de la législation du travail dans les secteurs public et privé. Le Ministère des finances a lui aussi une inspection générale qui surveille le respect de la législation dans le secteur public. Le principe "à travail égal, salaire égal" est appliqué au Cap-Vert. Il a été organisé des programmes de formation professionnelle à l’intention des femmes de 15 à 24 ans qui travaillent dans l’industrie du tourisme, et une formation est offerte aussi aux femmes qui travaillent dans les autres secteurs.

17.Mme  Lima (Cap-Vert), en réponse à la question posée par Mme Patten, précise que le cadre législatif en général ne soulève pas de problèmes, que la discrimination a généralement été éliminée et que le Ministère du travail, l’Inspection générale du travail et les syndicats suivent de très près le respect des droits des travailleurs. Il existe en outre un tribunal du travail qui fonctionne très bien en comparaison du passé. Il se peut néanmoins qu’il faille encourager le Ministère du travail à s’attacher davantage à la promotion de l’égalité entre les sexes pour susciter une prise de conscience accrue des problèmes qui se posent dans ce domaine.

18.En ce qui concerne la formation professionnelle, les programmes offerts sont aujourd’hui extrêmement diversifiés et de plus en plus de jeunes femmes reçoivent une formation dans des métiers comme l’électricité, la plomberie ou le froid et la réfrigération. Le gouvernement ne considère pas qu’il y ait une discrimination quelconque en ce qui concerne l’accès à la formation, les femmes ayant, généralement parlant, les mêmes possibilités à cet égard que les hommes. S’il existe des contraintes, peut-être imputables à la disponibilité effective de programmes de formation, le gouvernement devra s’attacher à les éliminer. Un grand nombre de jeunes femmes poursuivent leurs études au niveau universitaire, peut-être encore plus que de jeunes hommes. Aucune limite n’est imposée en ce qui concerne la possibilité pour les femmes de suivre des études scientifiques et technologiques, mais Mme Lima convient qu’il faudrait sans doute faire figurer des données plus précises à ce sujet dans les futurs rapports.

19.Aussi bien le Ministère que l’Inspection du travail s’attachent à diffuser systématiquement des informations concernant les droits des travailleurs. Depuis la récente révision du Code pénal, les harcèlements sexuels sont passibles de sanctions, mais l’on ne dispose pas d’informations concernant les affaires ayant pu être introduites à ce sujet. Il s’agit là d’un autre domaine dans lequel les efforts devront être poursuivis.

20.D’une manière générale, le versement d’une rémunération égale pour un travail égal est garanti. Il subsiste certaines différences entre ce qui concerne les taux de rémunération des hommes et des femmes, surtout dans les régions rurales et périurbaines, mais le Ministère du travail a commencé à les identifier et à les éliminer. La situation à cet égard est également suivie par les syndicats.

21.S’agissant des prestations sociales, la seule différence entre les secteurs public et privé est la durée du congé de maternité. Dans le secteur public, la durée de ce congé est de 60 jours, mais de 45 seulement dans le secteur privé. Par le passé, cependant, ce congé n’était que de 30 jours, de sorte que, tout au moins, la différence s’amenuise. Dans le contexte de la révision du Code du travail, l’on envisage d’éliminer cette différence. Il n’existe aucune différence en ce qui concerne les allocations de maternité.

22.Le droit aux prestations est garanti dans les secteurs aussi bien privé que public. Dans le secteur non structuré, il a également été établi un régime de sécurité sociale pour les travailleurs indépendants. Les travailleurs indépendants ne sont pas tous affiliés, mais le droit existe. Un projet de loi tendant à garantir les prestations de sécurité sociale aux travailleurs domestiques est actuellement à l’étude.

23.Le tourisme constitue le principal moteur de développement économique. L’industrie légère joue un rôle moins important car, au Cap-Vert, les facteurs de production, y compris le travail, coûtent plus cher que dans d’autres pays de la région. En fait, plusieurs usines de textiles ont dû fermer leurs portes précisément pour cette raison.

Article 12

24.Mme  Dairiam relève que, comme le Cap-Vert est un archipel, il se peut que certains secteurs de la population éprouvent des difficultés à accéder aux services de santé de base, et elle se demande si le gouvernement suit la situation pour veiller à ce que les groupes les plus vulnérables, comme les femmes rurales, aient véritablement accès aux services de santé. Comme il est dit dans le rapport que les coûts des soins de santé sont couverts partiellement ou intégralement au moyen du budget de l’État, il conviendra de savoir quels sont les éléments qui déterminent si un service est gratuit ou subventionné.

25.Se référant à l’important programme de santé administré par l’Association cap-verdienne pour la protection de la famille sur cinq îles différentes, Mme Dairiam relève qu’en un an, l’organisation a assuré 25 examens du cervix mais aussi 14 448 examens aux ultrasons, et demande quel est l’effectif total de la population dans le contexte de laquelle ces chiffres doivent être replacés et quelle est la raison des examens aux ultrasons, s’il n’y a eu que 25 examens du cervix. L’Association perçoit-elle un droit pour ces services, et comment la qualité de ceux-ci est-elle contrôlée?

26.Troisièmement, Mme Dairiam souhaiterait savoir si l’on dispose d’informations sur le taux de mortalité maternelle, ventilé par lieu de résidence et par condition socio-économique. Se félicitant de l’assouplissement des règles régissant l’avortement, elle demande si les femmes savent qu’elles peuvent, dans certaines conditions, interrompre volontairement leur grossesse. En outre, elle souhaiterait avoir des informations sur l’incidence actuelle de l’avortement, sur le taux d’avortements illicites dans des conditions non hygiéniques et sur la contribution de ceux-ci à la mortalité féminine.

27.Enfin, Mme Dairiam voudrait avoir des renseignements concernant le taux d’utilisation des méthodes contraceptives, sur la disponibilité d’une large gamme de services contraceptifs en milieu urbain comme dans les régions rurales et sur la façon dont le gouvernement suit l’utilisation des méthodes contraceptives.

28.M.  Pires (Cap-Vert) fait savoir que l’accès aux services de santé n’est pas un problème sérieux au Cap-Vert. Il ressort d’enquêtes récentes que, pour l’ensemble du pays, il ne faut qu’une trentaine de minutes pour parvenir au dispensaire le plus proche. Il existe sur les différentes îles des hôpitaux centraux disposant de toutes les installations nécessaires, ainsi que cinq hôpitaux régionaux, des dispensaires et des cliniques de soins de santé primaires.

29.Mme  Rodrigues (Cap-Vert) ajoute que la VERDEFAM est une ONG qui travaille avec le gouvernement dans le domaine de la santé sexuelle et génésique. Dans les localités où il n’y a pas d’hôpital ou de dispensaires publics, l’ONG s’y substitue et offre les services de l’un de ses cinq centres. Certains des médecins qui travaillent avec VERDEFAM appartiennent en fait au système public. Les activités de l’Association sont contrôlées par le gouvernement et ses services est ses installations doivent être homologués. La qualité des soins peut ainsi être assurée. Les services qu’elle fournit aux adultes ne sont pas gratuits mais ne sont pas particulièrement onéreux non plus. En revanche, ils sont gratuits pour les jeunes. L’Association essaie actuellement de mettre en place un centre de santé distinct pour les jeunes.

30.En ce qui concerne l’utilisation des contraceptifs et la prévalence de leur utilisation, le gouvernement offre une gamme de plus en plus large de services de contraception, y compris par exemple le préservatif féminin. Le taux d’utilisation des méthodes contraceptives est d’environ 45 pour cent et est appelé à augmenter.

31.Mme  Lima (Cap-Vert) explique que le secteur de la santé, avec celui de l’éducation, est celui dans lequel les progrès les plus considérables ont été accomplis depuis l’accession du pays à l’indépendance. Cependant, la fourniture de soins de santé gratuits ou subventionnés devient peu à peu une opération qui est au-delà des moyens du gouvernement. Il est par conséquent envisagé de solliciter une contribution accrue du patient tout en veillant à satisfaire les besoins de ceux pour qui les soins médicaux sont vraiment hors de portée.

32.La mortalité maternelle a beaucoup diminué depuis que les soins obstétriques qualifiés ont été renforcés. À l’heure actuelle, 91 pour cent des femmes accouchent dans des maternités assistées. L’on ne dispose pas, à l’heure actuelle, de chiffres concernant les avortements. Depuis 1987, le gouvernement autorise des interruptions volontaires de grossesse jusqu’au troisième mois dans les établissements officiels de santé, mais l’on sait que des avortements continuent d’être pratiqués dans des conditions non hygiéniques en dehors de ces établissements, et le gouvernement s’emploie à éradiquer ce phénomène.

Article 14

33.Mme  Tan, faisant observer que le programme d’enseignement primaire pour adultes et le programme d’éducation à distance sont d’excellentes initiatives pour remédier au faible pourcentage de filles rurales qui sont scolarisées, souhaiterait savoir quel est le niveau de participation des femmes et des filles rurales et quel type de possibilités économiques de tels programmes ont ouvertes aux femmes et aux filles rurales qui les ont suivis.

34.Mme Tan souhaiterait savoir quels sont les pourcentages respectifs de femmes des régions rurales du Cap-Vert qui travaillent dans l’agriculture et dans les pêcheries et quelle est la proportion d’entre elles qui participent aux programmes de formation pour apprendre des technologies de nature à alléger leur travail. Dans le cas de l’agriculture, elle souhaiterait savoir quel est le pourcentage de femmes rurales qui sont propriétaires de leurs propres terres et quel est le chiffre correspondant pour les hommes. Elle demande en outre quel type de garanties les femmes rurales doivent fournir lorsqu’elles sollicitent un microcrédit, quelles sont les conditions habituelles du crédit et si les banques exigent la signature ou le consentement du mari avant d’accorder un prêt à une femme.

35.Mme Tan souhaiterait également savoir quel est le degré de participation des femmes rurales aux instances de prise de décisions. Exercent-elles sur les projets de développement un contrôle suffisant pour veiller à ce que les projets qui sont organisés à leur intention aient en fait un impact sur les principales activités quotidiennes de la communauté, indépendamment de la collecte de données ventilées par sexe?

36.Mme  Patten souhaiterait savoir dans quelle mesure la Commission nationale pour l’atténuation de la pauvreté s’attache à promouvoir les possibilités économiques des femmes dans des régions rurales et l’égalité d’accès aux ressources productives et s’emploie à satisfaire les besoins essentiels des femmes dans les domaines social et éducatif et dans celui de la santé. Elle demande également si les femmes rurales participent sur un pied d’égalité avec les hommes à la conception des politiques macroéconomiques et sectorielles tendant à éradiquer la pauvreté. Il conviendrait en outre de savoir si l’on dispose de données à jour sur l’accès des femmes au microcrédit et par exemple sur le nombre de femmes qui en bénéficient en comparaison de celui des hommes. Mme Patten demande également quels sont les efforts entrepris par le gouvernement pour développer les possibilités de gain des femmes rurales, par exemple en facilitant leur accès à la propriété foncière.

37.Mme Patten demande en outre quelle est la place faite aux femmes rurales dans les activités tendant à dispenser une formation et à diffuser des informations concernant les marchés, le commerce et les ressources et quelle est l’assistance qui leur est fournie pour qu’elles puissent tirer parti de ces possibilités. Elle voudrait savoir enfin comment le gouvernement veille à ce que les femmes rurales qui travaillent dans l’agriculture aient un accès adéquat aux connaissances, aux compétences, aux services de commercialisation et aux technologies propres à promouvoir la gestion des ressources et la conservation de la biodiversité.

38.Mme  Simms fait observer qu’il n’est pas surprenant, étant donné que ce sont généralement les hommes qui contrôlent la terre au Cap-Vert, que deux fois plus d’hommes que de femmes soient propriétaires d’exploitations familiales dans les régions rurales. Elle voudrait savoir si les femmes rurales ont accès aux terres dites "terres de la Couronne" appartenant à l’État. Elle souhaiterait savoir aussi si le Programme national d’atténuation de la pauvreté tend à promouvoir le développement économique des femmes rurales, par exemple grâce à la création de coopératives.

39.Le Cap-Vert, qui est un archipel, a de ce fait une importante industrie de la pêche. En général, cependant, les femmes ne vont pas pêcher en mer et se bornent habituellement à nettoyer et à vendre les prises. Le gouvernement a-t-il adopté des mesures pour encourager les femmes à participer plus activement à l’activité du secteur des pêcheries?

40.Mme  Rodrigues (Cap-Vert) déclare que les femmes rurales de son pays sont résolues à surmonter les obstacles qui entravent leur progrès. Aussi ont-elles constitué un certain nombre d’associations et de coopératives et collaborent-elles avec le gouvernement pour mettre en œuvre des stratégies de réduction de la pauvreté.

41.Regrettablement, les femmes n’ont encore qu’un accès très limité à la terre, et les terres auxquelles elles ont effectivement accès sont situées dans des zones d’agriculture pluviale et sont par conséquent moins productives. Toutefois, des mesures ont été adoptées pour améliorer la situation. Avec l’aide du Gouvernement chinois, il a été construit au Cap-Vert un premier barrage qui facilitera beaucoup l’irrigation et la gestion des ressources hydrauliques.

42.En outre, les femmes des régions rurales sont les principales bénéficiaires des programmes de microcrédit, dans le cadre desquels elles reçoivent une formation dans les domaines de la fabrication et de la commercialisation. L’Association d’aide aux initiatives féminines de promotion du développement (MORABI) et l’Organisation des femmes cap-verdiennes (OMCV) ont apporté des contributions précieuses à ces projets.

43.M.  Pires (Cap-Vert) fait savoir qu’un certain nombre d’initiatives ont été lancées dans le contexte du Programme national d’atténuation de la pauvreté pour dispenser une formation professionnelle aux femmes rurales, et notamment à celles qui gèrent de petites affaires, et renforcer leurs capacités en matière de prise de décisions. De ce fait, les femmes ont pu constituer des coopératives et acheter leurs propres bâtiments de pêche. Bien que le gouvernement n’ait pas encore institué de ministère expressément chargé du microcrédit, le Ministère du travail, de l’emploi et de la solidarité a entrepris une étude de faisabilité en vue de la création d’un tel département. Ce ministère est également responsable du suivi des programmes de microcrédit administrés par des ONG.

44.Seulement 9 pour cent de la superficie terrestre du Cap-Vert se prête à l’agriculture, et il y a très peu d’agricultrices. Cependant, aussi bien le Programme de promotion de l’irrigation au goutte-à-goutte que le Programme national d’atténuation de la pauvreté mettent l’accent sur l’importance de la participation des femmes à l’activité agricole.

45.Mme  Lima (Cap-Vert), en réponse aux questions posées par Mme Simms, fait savoir qu’il n’y a pas de "terres de la Couronne" au Cap-Vert et explique qu’il est également difficile pour les hommes et pour les femmes de se procurer de la terre en raison de l’exiguïté des terres qui se prêtent aux activités agricoles. Néanmoins, 23 pour cent seulement des femmes, contre 70 pour cent des hommes, ont accès aux terres irriguées. Les efforts entrepris pour améliorer la situation dans le secteur agricole se poursuivent cependant, notamment sous forme d’un projet tendant à mettre en valeur l’eau provenant des bassins versants à des fins d’irrigation. L’amélioration des perspectives d’emploi dans les régions rurales aura pour effet de freiner l’exode rural, phénomène qui suscite des problèmes particuliers pour les femmes dans les régions périurbaines.

46.Depuis l’accession du pays à l’indépendance, le Gouvernement du Cap-Vert a adopté différentes mesures pour promouvoir la participation des femmes aux activités agricoles. En fait, l’actuel Ministre de l’environnement, de l’agriculture et des pêcheries est une femme. Des programmes de discrimination positive ont été introduits pour veiller à ce que les femmes aient accès aux programmes de microcrédit dans les secteurs de l’agriculture et des pêcheries. Au Cap-Vert, il n’est pas usuel que les femmes aillent pêcher en mer, mais certaines d’entre elles possèdent effectivement des bâtiments de pêche.

Articles 15 et 16

47.M.  Flinterman est préoccupé par l’âge minimum du mariage au Cap-Vert, qui est actuellement de 16 ans, et il appelle l’attention sur la Recommandation générale No. 21, dans laquelle le Comité a présenté un certain nombre d’arguments de fond qui conseillent de fixer l’âge minimum du mariage à 18 ans. Il exprime l’espoir que l’État partie modifiera la législation nationale en conséquence.

48.La Présidente, parlant en sa qualité de membre du Comité, rappelle qu’en vertu de la Convention relative aux droits de l’enfant, qui a été ratifiée par le Cap-Vert, l’âge de la majorité est de 18 ans. Elle s’associe par conséquent à l’espoir formulé par M. Flinterman, à savoir que l’État partie modifiera sa législation et fixera l’âge minimum du mariage à 18 ans.

49.Mme  Tan demande si la polygamie est fréquente au Cap-Vert. Quelle est la définition légale de la polygamie en droit interne et cette pratique est-elle réprimée? Dans l’affirmative, combien de personnes ont été condamnées? Il est dit dans le rapport que la polygamie n’est pas autorisée dans l’État partie mais Mme Tan craint que l’alinéa e) de l’article 1564 du Code civil, qui se borne à stipuler que l’existence d’un mariage antérieur non dissout peut être une cause d’annulation d’un deuxième mariage, crée une échappatoire juridique. Si la polygamie est effectivement tolérée, comment le système juridique interne garantit-il la satisfaction des besoins de toutes les épouses et de tous les enfants? Par ailleurs, Mme Tan souhaiterait savoir si le Gouvernement du Cap-Vert a adopté des mesures pour éduquer la population et lui faire comprendre le droit des femmes à un mariage monogame.

50.Mme Tan voudrait avoir un complément d’information sur le point de savoir si, dans la pratique, les femmes jouissent au Cap-Vert du droit de décider librement et de façon responsable du nombre et de l’espacement de leurs enfants. En outre, elle demande si la persistance des valeurs patriarcales signifie que les femmes se sentent obligées d’avoir de très nombreux enfants ou si elles considèrent les enfants comme une possible source de revenus et si des recherches ont été entreprises à ce sujet.

51.Mme  Rodrigues (Cap-Vert) dit que, bien que la polygamie soit illégale au Cap-Vert, beaucoup d’hommes entretiennent plus d’un ménage. Ce phénomène a des conséquences négatives, surtout du fait que beaucoup de pères ne sont pas disposés à assumer la responsabilité de leurs enfants. Le gouvernement considère un tel comportement comme une manifestation de violence contre les femmes et, pour essayer de remédier à la situation, collabore avec des ONG pour éduquer les femmes, les hommes et les jeunes pour les amener à prendre conscience de leurs droits et de leurs responsabilités.

52.Mme  Lima (Cap-Vert) déclare que l’âge minimum du mariage, ainsi que l’âge de la responsabilité pénale, est de 16 ans pour les deux sexes. En conséquence, la législation pertinente n’établit aucune discrimination à l’endroit des femmes. De l’avis de Mme Lima, l’article premier de la Convention relative aux droits de l’enfant reflète un idéal concernant l’âge de la majorité tout en laissant aux États le soin de fixer leurs propres limites, de sorte que l’ordre juridique interne du Cap-Vert n’est pas contraire aux dispositions de la Convention. Néanmoins, les observations du Comité seront prises en considération dans le contexte du débat qui se poursuit au sujet de la réforme des lois.

53.L’ordre juridique interne ne prévoit que des mariages monogames. Le Code pénal ne qualifie pas expressément la bigamie d’infraction mais, en droit civil, nul n’est autorisé à contracter mariage s’il n’a pas préalablement dissout, le cas échéant, l’union préexistante. Le concubinage existe néanmoins au Cap-Vert, et ce phénomène paraît être un symptôme d’un problème structurel de caractère plus général qui affecte de nombreuses familles. Dans leur souci d’assurer leur stabilité affective et financière, les femmes tendent à nouer des relations et à avoir des enfants avec plusieurs hommes différents. Soixante-dix pour cent des enfants naissent hors mariage et, bien que le père soit légalement tenu de partager la responsabilité de subvenir aux besoins de ses enfants, il néglige fréquemment les obligations qui lui incombent en tant que parent. Il faut par conséquent s’attacher à renforcer l’efficacité du système juridique dans ce domaine et faire en sorte que les hommes soient conscients du rôle important qui leur revient au sein de la cellule familiale.

54.Le taux moyen de fécondité est tombé de six à quatre enfants par femme par suite, probablement, du fait que des informations sur les méthodes de planification de la famille sont aujourd’hui plus largement disponibles. Cependant, l’incidence des grossesses chez les adolescentes est en hausse et le nombre d’enfants des rues a augmenté aussi. En vue de s’attaquer à ces problèmes, le gouvernement a récemment créé un Ministère des affaires familiales.

55.En conclusion, Mme Lima souligne que si le Cap-Vert ne s’est pas acquitté de ses obligations en matière de présentation de rapports, c’est en raison de difficultés logistiques, et ce manquement ne doit aucunement être interprété comme une absence de volonté politique. Les conclusions et recommandations du Comité constitueront une contribution précieuse aux efforts déployés par le gouvernement du Cap-Vert pour promouvoir l’égalité entre les sexes et le progrès de la femme.

56.La Présidente félicite l’État partie de s’être enfin acquitté de ses obligations en matière de présentation de rapports et l’engage instamment à soumettre son septième rapport périodique en temps voulu. La volonté politique du gouvernement, ainsi que l’œuvre précieuse menée par les ONG, devraient ouvrir la voie à des progrès significatifs sur la voie de l’égalité entre les sexes au cours de la période sur laquelle portera le prochain rapport. Afin de faire mieux connaître la Convention au grand public, la Présidente conseille aux représentants de l’État partie d’organiser lors de leur retour dans leurs pays une conférence de presse afin de diffuser les résultats des débats qui ont eu lieu au Comité.

La séance est levée à 17 20.