Vingt-deuxième session

Compte rendu analytique de la 451e séance

Tenue au Siège, à New York, le vendredi 21 janvier 2000, à 15 heures

Présidente:Mme González

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport initial du Myanmar (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports présentés par les États partiesconformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport initial du Myanmar (suite)

À l’invitation de la Présidente, la délégation du Myanmar prend place à la table du Comité.

Article 5

M me  Ferrer dit qu’il est difficile d’assurer l’exercice effectif des droits des femmes sur un pied d’égalité avec les hommes à tous les niveaux de la société dans un pays où coexistent plus de 135 groupes ethniques et plusieurs religions. Il ressort clairement de l’information communiquée par le Gouvernement du Myanmar que les attitudes discriminatoires à l’égard des femmes sont très répandues dans le pays. L’adoption de lois en faveur de l’égalité des droits ne suffit pas; la pratique importe davantage.

Le rapport mentionne des textes de lois qui ont bénéficié en particulier aux mères; il conviendrait que le Gouvernement fournisse de plus amples renseignements à leur sujet. Le rapport montre clairement que les filles et les femmes restent très confinées dans les rôles féminins traditionnels. L’existence de concours de beauté accordant aux lauréates d’importants avantages comme l’attribution de bourses d’étude est également discriminatoire, et il faudrait redoubler d’efforts pour venir à bout de ce genre de pratiques. L’oratrice s’interroge sur les initiatives prises par le Comité national de la condition de la femme en réponse à ces problèmes et sur le rôle joué par les médias dans la diffusion d’une image plus appropriée des femmes; elle se demande si une éducation sexuelle est dispensée pour que les femmes puissent exercer leurs droits en matière de sexualité et de procréation.

M me  Ryel, se référant à l’information communiquée par le rapport sur les femmes qui purgent des peines de prison, sollicite des informations détaillées, notamment le nombre de détenues, le type de crimes pour lesquels elles ont été emprisonnées, le ratio hommes/femmes au sein de la population carcérale, l’existence ou non d’établissements pénitentiaires distincts pour les femmes et la nature des « privilèges » accordés aux détenues dont le rapport fait état. L’oratrice souhaite également savoir dans quelles circonstances les détenues sont condamnées à des peines de travaux forcés ainsi que le nombre de femmes condamnées à la peine capitale chaque année.

Article 6

M me  Hazelle signale que le rapport offre de très nombreuses informations sur la législation relative aux droits des femmes mais qu’il donne peu d’indications sur l’application de cette législation et sur son incidence pratique sur la vie des femmes et des enfants. L’État qui présente le rapport devrait fournir de plus amples détails sur les activités du Comité national de la condition de la femme, en particulier l’action de ses sous-comités sur la situation des fillettes et la violence à l’égard des femmes. De même, il est difficile, faute de données statistiques, d’évaluer l’incidence des diverses activités décrites dans le rapport.

L’oratrice apprécierait un complément d’information sur l’Équipe de travail sur la traite des femmes et des enfants, mise en place en août 1998, ainsi que sur l’incidence de la traite et les résultats obtenus dans certains cas particuliers; elle souhaiterait savoir si une formation est dispensée aux policiers pour les sensibiliser davantage au problème. L’oratrice demande des précisions sur deux activités mentionnées dans le rapport : une étude de référence sur la violence conjugale et un stage de formation à la collecte de données sur la protection des femmes contre la violence.

M me  Khan fait remarquer que l’État partie doit affronter un certain nombre de problèmes qui aggravent le phénomène de la traite des femmes : la pauvreté, le déplacement des personnes dans le pays, les camps de réfugiés, les rébellions militaires, les longues frontières et les conflits avec les pays voisins pour le contrôle des frontières. Elle souhaite en savoir davantage sur les éventuelles mesures prises dans la pratique pour enrayer la traite des femmes le long des frontières du Myanmar avec ses cinq États voisins et, en particulier, sur la manière dont les pouvoirs publics imposent l’interdiction de traverser les frontières aux femmes âgées de 16 à 25 ans non accompagnées d’un tuteur légal alors même que tant de familles sont séparées. L’État partie devrait donner de plus amples détails sur les mesures prises par le Ministère de l’immigration et de la population pour contrôler les flux migratoires entrants et sortants en vue d’enrayer la traite des femmes, de même que sur la coordination assurée à cette fin avec le Ministère du progrès des zones frontalières, des ethnies nationales et des questions de développement et avec l’Équipe de travail sur la traite des femmes et des enfants. L’oratrice demande si cette équipe de travail est dirigée par une femme et si elle gère des abris à l’intention des victimes de viol. Il serait également utile d’obtenir des informations sur le nombre de personnes condamnées pour viol ou traite de femmes en vertu du Code pénal; sur l’implication de membres des forces armées dans des affaires d’exploitation sexuelle et la procédure suivie le cas échéant; et sur le nombre de travailleuses du sexe, notamment des estimations sur le nombre de victimes de la traite au Myanmar et dans les pays voisins. L’oratrice souhaite savoir si les victimes de la traite sont passibles de sanctions pour s’être livrées à la prostitution et si une aide psychologique gratuite leur est offerte. Enfin, elle demande si le Myanmar prévoit de ratifier la Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui de 1949 qu’il a, à ce jour, seulement signée.

M me  Regazzoli s’enquiert des mesures prises par l’État partie pour réinsérer les victimes de la traite dans la société et pour enrayer la transmission par les prostituées du syndrome immunodéficitaire acquis (sida) dans le pays et au travers de ses frontières.

M me  Corti demande à nouveau des informations sur les éventuelles mesures prises dans la pratique pour enrayer la traite des femmes, en particulier le long des frontières du Myanmar. Faisant remarquer que les amendements à la loi de 1949 sur l’élimination de la prostitution semblent très insuffisants, elle se demande si les autorités du Myanmar prévoient d’aller plus loin dans ce domaine.

M me  Manalo espère que le Gouvernement sera en mesure, dans son prochain rapport, de donner des informations détaillées sur un programme de santé mentale à l’intention des femmes victimes de viol, de la prostitution et de la traite.

Article 7

M me  Manalo demande à connaître les mesures pratiques prises par le Gouvernement pour mettre un terme à l’actuelle situation de Mme Aung San Suu Kyi, laquelle situation est contraire aux accords internationaux auxquels le Myanmar est partie et à l’engagement constitutionnel du pays d’accorder aux femmes le droit de voter et de se présenter aux élections.

M me  Feng Cui demande combien de femmes au Myanmar ont exercé leur droit constitutionnel de voter et de se présenter aux élections, et quelle est la représentation des femmes au sein des partis politiques, du Parlement, de la fonction publique et des organes de l’État comme le Conseil national pour la paix et le développement.

M me  Corti demande à connaître les incitations et les aides proposées aux femmes à l’exercice de leurs droits de voter et de se présenter aux élections ainsi que les mesures spéciales temporaires adoptées pour encourager les partis politiques à accroître le nombre de leurs candidates. Elle souhaite également savoir comment l’article 7 de la Convention est appliqué compte tenu du fait que Mme Aung San Suu Kyi, chef du parti gagnant aux élections libres, a été empêchée de prendre ses fonctions et assignée à résidence.

Le rapport déclare que les femmes ont très activement contribué aux manifestations de protestation des étudiants et des minorités ethniques au Myanmar. L’oratrice s’enquiert de ce qui est arrivé aux femmes ayant participé à ces manifestations et se demande pourquoi un certain nombre de femmes qui ont remporté des élections libres ont dû par la suite démissionner.

M me  Ryel dit que, selon des sources non gouvernementales, les femmes sont pratiquement absentes au sein du Parlement et des ministères du pays. Elle se demande si le Gouvernement y voit un problème et s’il est doté d’une stratégie pour y remédier.

M me  Goonesekere fait remarquer que le Myanmar est parvenu à mettre en place un Conseil national pour la paix et le développement en dépit des troubles et des conflits politiques. La création du Conseil semble traduire la prise de conscience que la résolution pacifique des conflits et la bonne gouvernance sont essentielles pour le développement économique et l’avancement de la société. D’un bout à l’autre du rapport, il est fait mention des traditions démocratiques égalitaires du Myanmar, inspirées du bouddhisme. La tradition bien établie de la participation des femmes à la vie publique traduit la volonté de nombre d’entre elles dans le pays de participer à la résolution des conflits et à la mise en œuvre de projets de développement pacifique. L’oratrice souhaite alors connaître les mesures prises pour associer les femmes comme Aung San Suu Kyi au processus de paix et de développement.

M me  Myakayaka-Manzini désire obtenir des statistiques précises, comme le nombre de directrices générales au sein de la fonction publique et dans le monde des entreprises, ainsi que des informations sur la présence des femmes au sein du pouvoir judiciaire en qualité de juges, de magistrates, etc. Ces données sont essentielles pour évaluer la promotion de la femme.

M me  Schöpp-Schilling, se référant à l’article 7 c) de la Convention, souhaite savoir dans quelles conditions les femmes sont autorisées à créer des organisations non gouvernementales, si une procédure d’enregistrement est prévue et, le cas échéant, en quoi elle consiste.

Le rapport mentionne un certain nombre d’organisations féminines créées depuis 1991 et participant à l’appareil national de promotion de la femme. L’oratrice se demande s’il existe d’autres organisations, comme l’Association de développement des femmes du Myanmar mise en place en 1947, qui ne font pas partie de ce mécanisme national. Elle souhaite savoir si une femme sensibilisée à une question particulière, en rapport avec la Convention par exemple, peut librement mettre en place une association féminine pour militer en faveur de la Convention, et s’il existe d’éventuelles restrictions à ce type d’activités.

Tout en reconnaissant les difficultés que rencontre le Myanmar dans la collecte de données et de statistiques, l’oratrice souhaite suggérer des pistes de réflexion pour l’avenir. Elle désire, par exemple, obtenir des informations sur la représentation des femmes dans l’action des organisations non gouvernementales indépendantes et demande s’il existe d’éventuels mécanismes de discrimination, ouverts ou déguisés, susceptibles d’empêcher les femmes de se joindre à l’action de ces associations et d’y participer activement.

M me  Regazzoli s’enquiert des programmes, projets et lois de promotion de la participation des femmes à la vie politique et s’interroge sur la sincérité de ces initiatives dans un contexte où des élections remportées par une femme ont été invalidées et où une lauréate du prix Nobel de la paix s’est vue assignée à résidence. Elle souhaite savoir combien de femmes occupent des postes de haut niveau au sein du Gouvernement du Myanmar.

M me  Hazelle approuve les interventions et les questions de Mme Corti et de Mme Feng Cui.

Article 8

M me  Regazzoli sollicite des statistiques sur le nombre de femmes nommées au Ministère des affaires étrangères depuis l’organisation de la Conférence de Beijing ainsi que des informations détaillées sur les postes qu’elles occupent et les avancements qu’elles ont obtenus, et s’enquiert du nombre de femmes du Myanmar qui travaillent dans les organisations et organismes internationaux.

Article 9

M me  Goonesekere fait remarquer que le rapport n’aborde pas l’article 9, en l’occurrence la question de savoir si les femmes du Myanmar jouissent de droits égaux à ceux des hommes quant à la transmission de leur nationalité à leurs enfants ou à un conjoint étranger. Elle souhaite que l’État partie donne des informations à ce sujet.

Article 10

M me  Schöpp-Schilling dit que le droit à l’éducation est un droit fondamental, et que les femmes et les filles ne doivent pas être victimes de discrimination dans ce domaine. Le rapport et la présentation orale décrivent certains des efforts déployés au Myanmar et signalent le taux élevé d’alphabétisation du pays. Toutefois, les statistiques semblent renvoyer essentiellement aux municipalités. L’oratrice s’enquiert du taux d’alphabétisation des femmes rurales et du taux de scolarisation des fillettes dans le primaire en zones rurales.

Elle demande si l’enseignement primaire est véritablement gratuit et, dans le cas contraire, comment les crédits sont alloués à l’éducation des élèves nécessiteux, en particulier si des crédits supplémentaires sont consacrés aux fillettes ainsi qu’à leurs parents de manière à contrer la tendance à éduquer en priorité les garçons.

Elle dit qu’il serait intéressant d’examiner les conclusions de l’étude sur la poursuite de l’éducation des filles qui n’ont pas achevé leur enseignement primaire, ainsi que les éventuelles mesures et actions auxquelles cette étude a donné lieu. Toute information sur les zones rurales serait également la bienvenue, de même que sur la situation des femmes dans les universités. L’oratrice se demande si les circonstances actuelles sont à l’origine de la fermeture des écoles et des universités et si ces fermetures nuisent beaucoup plus aux femmes et aux filles. Elle demande s’il est exact que certaines universités, comme l’Université technique, imposent des critères d’admission plus stricts aux étudiantes et que l’Université forestière n’admet aucune femme.

M me  Kim Yung-Chung fait remarquer qu’aucune discrimination dans l’éducation à l’égard des femmes ne ressort de la présentation orale et du rapport. Toutefois, le coût élevé de l’éducation, ajouté à l’opinion traditionnelle qui veut que les femmes n’ont pas besoin d’éducation pour s’acquitter des tâches ménagères, fait que les familles à faible revenu sont moins susceptibles d’envoyer leurs filles à l’école; l’oratrice constate également un taux d’abandons scolaire élevé. Elle souhaite pour ces raisons obtenir des statistiques de base de l’éducation, exactes et complètes.

Le projet « Éducation pour tous » finance la distribution gratuite de manuels scolaires, de vêtements et de fournitures aux élèves nécessiteux, ainsi que la rémunération des enseignants et des bourses d’enseignement. L’oratrice demande combien de filles et d’étudiantes bénéficient de ce projet. Il convient, selon elle, de communiquer des données pour chacun des deux sexes et d’y joindre les statistiques couvrant les zones reculées et les minorités ethniques.

Les programmes de formation professionnelle offerts dans le cadre du programme « Initiative pour le développement humain » semblent insister sur l’inculcation de compétences féminines traditionnelles comme la couture et la broderie. L’oratrice apprécierait des informations sur l’accès des femmes à la formation aux sciences et aux technologies modernes. Le rapport mentionne des cours informatiques et de vérification des comptes dispensés à des prix raisonnables à l’intention des jeunes filles. L’oratrice souhaiterait obtenir des précisions sur le nombre de filles qui ont bénéficié de ces cours et qui ont suivi une carrière dans ces domaines.

Même si l’égalité des chances est assurée dans l’éducation, le contenu de cette éducation demeure essentiel. L’oratrice demande si les manuels scolaires ont été révisés en vue d’en éliminer les stéréotypes sexospécifiques. Elle sollicite des statistiques sur la représentation des femmes dans la profession enseignante. Elle dit que les femmes sont généralement plus nombreuses que les hommes dans l’enseignement primaire, mais qu’il serait intéressant d’examiner les chiffres pour l’enseignement secondaire et l’enseignement supérieur. Rappelant que les femmes travaillent en outre habituellement dans les professions médicales, l’oratrice souhaite obtenir des informations sur d’autres professions comme l’architecture et l’ingénierie.

Article 11

M me  Schöpp-Schilling dit que le rapport reconnaît certes l’importance de l’article 11, mais qu’il ne fournit aucune statistique en la matière. Dans un premier temps, elle souhaiterait obtenir des chiffres approximatifs sur le nombre d’hommes et de femmes travaillant dans les secteurs informel et formel. Il conviendrait que le prochain rapport produise des statistiques si aucune n’est disponible actuellement.

L’oratrice demande si la législation du travail s’applique seulement au secteur formel et si les travailleuses du secteur informel ont droit aux congés de maternité et aux prestations de sécurité sociale.

L’égalité de salaires étant garantie dans le secteur formel, elle se demande s’il existe des mesures coercitives et si les femmes doivent saisir les tribunaux pour exiger l’égalité de salaire ou si elles peuvent faire appliquer des mesures de coercition sur le lieu de travail. Elle s’enquiert du nombre de plaintes déposées pour inégalités de salaires. Elle demande également une description des sanctions dont sont passibles les entreprises ou même les administrations publiques qui font preuve de discrimination à l’égard des femmes en matière de rémunération, d’avancement ou de recrutement.

L’oratrice est très préoccupée par l’absence d’enquête sur les budgets-temps des femmes alors même qu’elles sont supposées avoir un nombre d’heures de travail hebdomadaires supérieur à celui des hommes. Cette situation constitue également une discrimination aux termes de l’article 12, le surmenage des femmes risquant de mettre leur santé en péril. Les heures prolongées de travail des femmes sont également un problème de société qui ne pèse pas seulement sur les femmes en tant qu’individus, ce surmenage pouvant avoir des effets de long terme préjudiciables à leurs grossesses et à leurs fonctions maternelles. L’oratrice souhaiterait obtenir des informations sur d’éventuels projets du Gouvernement ou du dispositif national destinés à analyser le travail des femmes et à étudier comment faire apparaître dans la comptabilité nationale leur contribution économique au secteur informel et dans les foyers. L’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) a conduit plusieurs études pour savoir comment reconnaître la valeur difficilement mesurable de ce travail. Il existe, semble-t-il, de nombreux cas de discrimination de sorte qu’une législation visant à protéger les femmes est sans conteste indispensable.

M me  Khan demande si la législation du travail du Myanmar est conforme à l’article 11 de la Convention ainsi qu’aux normes de l’Organisation internationale du Travail. Elle s’enquiert du statut professionnel des femmes, y compris le nombre de travailleuses et les secteurs où elles sont présentes. Le rapport, dit-elle, signale que plus de 75 % de la population vit en zones rurales, ce pourcentage s’appliquant semble-t-il aussi bien aux femmes qu’aux hommes.

L’oratrice demande si la loi de 1949 sur les salaires minima, qui doit être mise à jour, s’applique aux travailleuses du secteur informel où un grand nombre d’entre elles ne sont pas salariées mais sont, par exemple, des travailleuses indépendantes ou bien des femmes qui travaillent dans une entreprise familiale ou dans l’agriculture. Étant donné la situation au Myanmar, Mme Khan se demande s’il existe des cas de figure où les femmes, autres que les travailleuses familiales non payées, travaillent pour leur survie sans être rémunérées.

L’égalité d’accès à l’emploi passe par l’égalité d’accès à la formation, mais la majeure partie de la formation offerte aux femmes semble très dépassée même s’il existe certains programmes modernes de formation professionnelle. L’oratrice demande dans quelle langue sont dispensés les programmes de formation professionnelle et estime que l’emploi de la seule langue majoritaire du pays exclurait un grand nombre de groupes minoritaires. Elle s’informe également de la langue d’enseignement utilisée dans le primaire et le secondaire, ainsi qu’en zones rurales.

L’oratrice demande des informations détaillées sur la main-d’œuvre salariée, la main-d’œuvre non salariée et les travailleurs indépendants. Vu les nouveaux programmes de développement et de réinstallation au Myanmar, elle s’enquiert également de la politique foncière et demande si les familles reçoivent des compensations financières en échange des terres cultivables qui leur ont été retirées et si des infrastructures de base sont déjà en place dans les municipalités accueillant les populations réinstallées de sorte que les femmes puissent y trouver un emploi à leur arrivée.

M me  Taya dit qu’il faut féliciter le Myanmar pour avoir présenté son rapport initial si peu de temps après sa ratification de la Convention. Mme Taya pose plusieurs questions relatives à l’article 11 sur la pratique du travail forcé imposée comme type d’impôt payé en nature au nom de la nécessité de bâtir des infrastructures nonobstant les contraintes budgétaires. Le Comité est habilité à s’enquérir du nombre de travailleuses forcées, des types de travaux réalisés, des modalités de leur recrutement et du mode de répartition des tâches à accomplir. L’oratrice souhaite obtenir des informations sur tout texte de loi réglementant les conditions du travail forcé. Le Myanmar prévoit certes un salaire minimum, une protection sociale entre autres dispositions du Code du travail, mais l’oratrice s’interroge sur le degré d’efficacité de leur mise en œuvre dans un pays où les dépenses militaires représentent la moitié du budget national et où le travail forcé est une pratique très répandue.

M me  Cartwright dit qu’il est peu probable que les dispositions du Code du travail applicables au travail des femmes soient conformes aux normes de la Convention, ces dispositions étant en majorité vieilles de 40 à 50 ans environ. Elle souhaite savoir si le Gouvernement prévoit de revoir sa législation et, le cas échéant, à quel moment. Plusieurs rapports, notamment un rapport de l’OIT en date du 21 mai 1999, sur le travail forcé au Myanmar, indiquent que de nombreuses femmes sont obligées de travailler sans recevoir de rémunération pour les forces armées comme employées de maison, porteuses et productrices agroalimentaires. Le travail forcé constitue une violation des droits fondamentaux et est contraire à la Convention. Il entraîne d’autres formes de mauvais traitements et compromet gravement le bien-être de celles qui en sont victimes et de leurs familles. L’État partie devrait informer le Comité des mesures qu’il prévoit d’appliquer pour enrayer cette pratique.

Article 12

M me  Abaka se dit heureuse d’apprendre que les docteurs du Myanmar pratiquent la médecine traditionnelle et la médecine occidentale et que l’on fait largement appel aux sages-femmes. Ces acteurs permettent d’atteindre efficacement une part plus grande de la population. Le refus de tolérer la maltraitance des femmes et les sanctions sévères prévues dans ce domaine constituent une autre approche majeure choisie par le Gouvernement pour promouvoir la santé des femmes.

L’oratrice déplore en revanche un taux de mortalité maternelle toujours très élevé. Cette situation est d’autant plus tragique que l’administration de soins préventifs appropriés peut prévenir la mortalité maternelle sans même exiger d’importantes ressources. Le Gouvernement devrait revoir ses nombreux programmes de santé maternelle pour déterminer les causes de leur inefficacité.

Les soins préventifs, dit l’oratrice, devraient notamment prévoir des méthodes sûres d’intervention en cas de grossesses non souhaitées. Les avortements non médicalisés peuvent très bien être à l’origine de certaines des causes citées de mortalité maternelle comme la sepsie, l’hémorragie et le traumatisme obstétrique. L’oratrice s’interroge sur les dispositions prévues pour les femmes et les filles enceintes victimes d’un viol ou de l’inceste dans un pays où les lois antiavortement sont si rigoureuses. Même si le Myanmar n’a formulé aucune réserve, ou presque, à l’égard de la Convention, l’oratrice pense que celui-ci éprouve des réserves tacites dont plusieurs relatives aux questions de santé.

L’abondante information communiquée par le rapport et la présentation orale au titre de l’article 12 porte presque exclusivement sur la santé maternelle. Le prochain rapport devrait fournir des informations plus complètes, y compris sous forme de statistiques, sur les domaines comme la santé des adolescentes, les causes de mortalité des femmes autres que la mortalité maternelle, les programmes de dépistage du cancer, le virus de l’immunodéficience humaine VIH/sida et le dépistage sanguin du VIH, la santé mentale des femmes et leur abus de drogue et de substances psychoactives. L’État partie devrait se reporter à la recommandation générale No 24 du Comité pour avoir une idée plus précise de l’information escomptée par celui-ci.

M me  Corti approuve la demande d’une information plus complète au titre de l’article 12 de la Convention.

M me  Schöpp-Schilling souhaiterait obtenir des informations précises sur le montant du budget de la santé et les pourcentages respectifs consacrés aux besoins des femmes et des hommes. Elle souhaite également savoir si le budget de la santé a augmenté proportionnellement à la croissance démographique et connaître la part du budget allouée à la lutte contre le VIH/sida. L’oratrice se joint aux autres membres du Comité pour insister sur le fait que l’article 12 couvre toutes les phases de la vie d’une femme et non juste ses années de fécondité.

Article 13

M me  Regazzoli fait observer que le Myanmar a déployé des efforts louables pour encourager la participation des femmes aux activités sportives. Elle demande des statistiques permettant d’établir si les femmes bénéficient d’un accès véritable au crédit, aux comptes bancaires, à la propriété, etc.

Article 14

M me  Ouedraogo dit que le rapport prétend que les femmes ont des droits identiques à ceux des hommes en zones rurales mais elle craint toutefois que cette affirmation ne soit quelque peu irréaliste dans la mesure où aucune statistique ne vient l’étayer. Le Comité s’intéresse non seulement aux normes juridiques mais également à l’accès réel des femmes rurales à l’éducation et à la formation de même qu’au crédit et à la propriété. Le Comité souhaiterait obtenir plusieurs informations relatives aux femmes rurales : taux d’analphabétisme, nombre de bénéficiaires en leurs noms propres de prêts agricoles et nombre de propriétaires de leur foyer ou de leur ferme. L’oratrice se félicite que le rapport aborde l’ensemble des huit domaines d’intérêt mentionnés à l’article 14, mais souhaite donner quelques conseils sur le type d’informations recherchées par le Comité. Par exemple, le nombre de femmes ayant bénéficié de projets de développement en zones rurales, dit-elle, est une statistique plus significative que le montant des crédits dépensés pour ces projets. Le rapport énumère plusieurs projets de développement en zones rurales, mais n’indique ni leur nature ni la manière dont ils ont profité en particulier aux femmes.

L’oratrice applaudit aux efforts d’extension du réseau de centres de santé en zones rurales et salue le recours aux sages-femmes et aux visiteurs sanitaires visant à élargir la couverture des services de santé. Toutefois, elle souhaite savoir pourquoi 30 % des accouchements ne bénéficient d’aucune intervention de personnel qualifié.

Le rapport déclare que les femmes au Myanmar participent aux activités agricoles, commerciales et sociales. Le Comité souhaite évaluer la qualité de cette participation.

M me  Regzzoli prie l’État partie de convertir toutes les valeurs monétaires en une devise plus familière aux membres du Comité et de fournir des statistiques sur le nombre de femmes rurales ayant accès aux programmes énumérés à l’article 14. Elle souhaiterait également obtenir une information sur les types de travaux exécutés par les femmes rurales du Myanmar et la part qu’ils représentent en pourcentage du produit national brut.

M me  Feng Cui dit qu’elle souhaiterait de plus amples renseignements sur les mesures d’atténuation de la pauvreté des femmes rurales. Elle tient à saluer le travail accompli en zones rurales par l’Association pour la protection des mères et des enfants du Myanmar, organisation non gouvernementale bénévole.

Article 16

M me  Cartwright demande si l’âge légal du mariage fixé à 20 ans vaut aussi bien pour les hommes que pour les femmes et si cette limite est respectée. Certaines sources, dit-elle, rapportent des cas de femmes n’ayant pas encore atteint cet âge qui sont soit mariées soit traitées comme telles. À cet égard, l’oratrice conseille aux autorités du Myanmar d’examiner la recommandation générale No 21 du Comité qui insiste sur la nécessité de veiller à ce que les femmes atteignent un âge suffisamment mûr avant de se marier, non seulement pour ménager leur santé mentale mais également pour garantir qu’elles sauront s’acquitter de leurs responsabilités conjugales. Elle dit avoir entendu que des jeunes femmes sont parfois forcées de se marier avec l’auteur du viol qu’elles ont subi, et elle se demande si le Gouvernement prend des mesures pour prévenir ou interdire ces pratiques contraires aux principes fondamentaux des droits de l’homme. Elle souhaite savoir s’il existe des textes de lois sur le viol dans le mariage. Elle apprécierait de manière générale toute information concernant la législation sur le viol et l’étendu du soutien dont elle fait l’objet, notamment contre les membres des forces armées. En se référant à la recommandation générale No 19, elle s’enquiert des mesures visant à interdire les violences à l’égard des femmes, en particulier dans la famille, et à poursuivre leurs auteurs en justice. Il serait utile de savoir si le Gouvernement applique sérieusement ces mesures, si elles font l’objet d’une large publicité et si les forces de police sont incitées à les faire respecter.

M me  Aouij dit que l’information communiquée par le rapport au titre de l’article 16 est insuffisante. Elle souhaite savoir si les divers groupes ethniques du Myanmar appliquent leurs propres droits coutumiers du mariage et si les femmes disposent d’un éventuel recours en cas de non-respect de ceux-ci. L’État partie devrait indiquer s’il existe des tribunaux en zones rurales et si les femmes peuvent les saisir aisément; qui appliquent la législation sur les relations familiales; s’il existe des magistrates; et si le bouddhisme autorise la polygamie. L’oratrice demande si les conséquences du divorce, notamment la pension alimentaire et la garde des enfants, sont déterminées conformément à la Constitution de 1974, le rapport ne mentionnant aucune disposition législative ultérieure à ce sujet. En effet, depuis qu’il est devenu partie à la Convention en 1997, le Myanmar n’a pris aucune mesure d’harmonisation législative, ni avec la Convention, ni avec les valeurs de la vie moderne et de la démocratie. L’oratrice recommande instamment une réforme législative, laquelle pourrait transposer le droit coutumier lorsque cela est bénéfique. Elle estime toutefois indispensable que ces dispositions législatives soient fixées par écrit. Elle demande si la nouvelle Constitution comprendra un chapitre garantissant les droits des femmes et la non-discrimination à leur égard, et si le Comité national de la condition de la femme a proposé d’éventuels amendements ou nouveaux textes de lois sur la condition des femmes au sein de la famille.

M me  Goonesekere demande des précisions sur le fonctionnement pratique du système de propriété conjointe ainsi que sur les droits des femmes en matière d’héritage aux termes du droit coutumier qui autorise le divorce par consentement mutuel et n’oblige pas à tester. Elle se demande si ces droits sont garantis par les tribunaux civils.

M. Mra (Myanmar) remercie les membres du Comité pour leurs questions et les assure que les différentes expertes de la délégation du Myanmar leur apporteront des réponses.

La séance est levée à 17 h 10.