Session extraordinaire

Compte rendu analytique de la 580e séance

Tenue au Siège, à New York, le mercredi 14 août 2002, à 10 heures

Président :Mme Abaka

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Quatrième et cinquième rapports périodiques du Yémen

La séance est ouverte à 10 h 15.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Quatrième et cinquième rapports périodiques du Yémen (CEDAW/C/YEM/4-5; CEDAW/PSWG/2002/EXC/ CRP.1/Add.11 et CRP.2/Add.2)

À l’invitation de la Présidente, M me  Kaid (Yémen) et M. Al-Shahab (Yémen) prennent place à la table du Comité.

En introduction aux quatrième et cinquième rapports périodiques du Yémen (CEDAW/C/YEM/4-5), M me Kaid déclare que le Yémen a progressé à pas de géant ces 30 dernières années, et notamment depuis l’unification du pays, en 1990 : en effet, un régime politique démocratique et multipartite a été instauré, et, grâce au droit à la liberté d’expression désormais établi, de nombreuses organisations sont nées dans la société civile – y compris des groupes qui se consacrent à la promotion des questions féminines.

Conformément à la Constitution, l’État garantit à tous les citoyens l’égalité des chances dans les domaines politique, social et culturel. Et par « tous les citoyens », il faut entendre aussi bien les hommes que les femmes. Le Gouvernement yéménite a adopté toute une série de mesures visant à l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, à la promotion de leur émancipation et au renforcement de leur statut; il s’agit globalement d’une politique nationale de la femme. Le Gouvernement a récemment élargi la composition de la « Commission nationale de la femme » – instrument institutionnel qui supervise l’application de la Convention et du Programme d’action de Beijing; désormais, cette commission est également composée de représentants de l’ensemble des ministères et d’autres organes gouvernementaux, ainsi que de représentants de la société civile. La Commission nationale de la Femme a procédé à un examen de la législation yéménite – y compris le Code pénal – et présenté des propositions en vue de modifier les dispositions législatives discriminatoires à l’égard des femmes. Les questions d’égalité entre les sexes ont été prises en considération dans le cadre de la Politique nationale de la Population pour la période 2001-2005.

Aux termes de l’article 30 de la Constitution yéménite, l’État a l’obligation de d’assurer le bien-être des mères et des enfants, ainsi que celui des adolescents et de la jeunesse en général. À cet effet, le gouvernement a créé le « Fonds de protection sociale », qui verse des allocations mensuelles aux veuves et aux mères chefs de famille, entre autres catégories. Parmi les autres initiatives visant à répondre aux besoins des catégories les plus vulnérables, il faut citer la promulgation de la loi sur la protection et la réadaptation des personnes handicapées.

Conformément à loi électorale du pays, les femmes jouissent du droit de vote à toutes les élections ainsi que lors des référendums publics, et sont éligibles, au même titre que les hommes, à tous les postes d’élu. Lors des élections locales de février 2001, 35 femmes ont été élues au sein d’assemblées de district et provinciales. Cependant, il subsiste des obstacles sociaux et culturels à la participation des femmes à la vie politique et publique. Les femmes ne représentent encore que moins de 15 % des membres des partis politiques et ne sont pas suffisamment représentées, non plus, au niveau des structures décisionnaires des partis; il en va de même en ce qui concerne les syndicats. On ne compte qu’une femme ministre – la ministre d’État aux droits de l’homme; 97 femmes dirigent des organismes gouvernementaux, alors que l’on compte plus de 2 000 hommes à la tête de ce type d’institution. Des données précises concernant la représentation des femmes dans le corps diplomatique sont contenues dans le cinquième rapport périodique (CEDAW/C/YEM/5). Enfin, même si leur nombre augmente, les organisations non gouvernementales (les ONG) restent concentrées dans les zones urbaines.

Aux termes du paragraphe 1er de l’article 3 de la loi sur la Nationalité, la nationalité yéménite est accordée aux personnes dont le père est déjà citoyen du Yémen. Cette disposition a créé des problèmes en ce qui concernait les enfants de mère yéménite mariée à un ressortissant étranger – ces enfants ne bénéficiant pas de la nationalité de leur mère. En conséquence, le Conseil des ministres a approuvé un amendement autorisant les femmes divorcées et les veuves à transmettre leur nationalité à leurs enfants.

À l’heure actuelle, 35 % seulement des élèves de l’enseignement primaire et 26 % seulement des élèves du secondaire sont des filles. On note un taux d’abandon scolaire très élevé parmi les filles, au niveau de l’enseignement secondaire, et en particulier dans les zones rurales, où certains parents refusent de scolariser leurs filles dans des établissements mixtes. Au niveau universitaire, on compte environ 24 % d’étudiantes; mais on trouve ces jeunes femmes en majorité dans les filières littéraires, et un nombre très restreint de femmes suivent des formations professionnelles. L’accroissement du pourcentage de jeunes filles dans l’enseignement constitue une priorité pour le Gouvernement yéménite, étant donné que l’éducation est une composante majeure du développement. Les pouvoirs publics ont créé de nombreux établissements d’enseignement supplémentaires; cependant, les autorités ont du mal à suivre le taux de croissance démographique, qui est actuellement de 3,5 % par an. Afin de s’attaquer au problème du taux élevé d’analphabétisme – notamment chez les femmes rurales –, le Gouvernement yéménite a créé des centres d’alphabétisation et encouragé à utiliser les écoles existantes en tant que centres d’éducation pour adultes.

Le taux de mortalité maternelle élevé est imputable, en partie, au manque d’accès des femmes aux soins prénatals dans les zones rurales les plus reculées, ainsi qu’au faible nombre de naissances assistées par des professionnels. En outre, la majorité du personnel médical est constituée par des hommes – ce qui dissuade les femmes de se faire traiter. Le taux de fécondité très élevé (5,8 enfants par femme) reflète l’insuffisance des services de planification familiale; la « couverture contraceptive » de la population n’est que de 21 %. Les mutilations génitales des femmes restent rares – excepté dans les régions côtières. Toutefois, le Gouvernement yéménite est profondément préoccupé par ce type de pratique et l’a interdit dans tous les centres de santé publique.

Le Yémen, qui fait partie des pays les moins développés de la planète, a été classé 133e sur 160 pays dans le Human Development Report 2001. Le produit intérieur brut par habitant est inférieur à 300 dollars par an, et quelque 23 % de la population yéménite vivent en dessous du seuil de pauvreté – en partie en raison du mouvement de restructuration économique entamé vers le milieu des années 1990. Afin de répondre à ces problèmes, le Gouvernement du Yémen met en œuvre des programmes de réduction de la pauvreté, de création d’emplois et de développement des ressources humaines – y compris des initiatives visant spécifiquement les femmes. L’Agence de développement des petites entreprises et le Fonds de développement social accordent des prêts et une assistance technique afin de soutenir une activité génératrice de richesses.

Près de 75 % de la population vit en zone rurale. Au Yémen, la femme rurale consacre en moyenne 16 heures par jour au travail agricole et aux tâches ménagères. Les femmes produisent les denrées alimentaires nécessaires à leur famille, tandis que les hommes assurent les revenus monétaires de la famille. Du fait de cette division du travail, on peut dire que les femmes sont exclues de l’économie monétaire, et que leur travail n’est pas valorisé. Afin de rehausser la condition des femmes rurales, le Gouvernement a créé un « Département de développement des femmes rurales » au sein du ministère de l’Agriculture.

La Loi sur le statut personnel, telle qu’elle a été amendée en 1998, contenait un certain nombre de dispositions discriminatoires à l’égard des femmes – notamment en matière de mariage. Des ONG féminines ont fait campagne en faveur de la révision de ces dispositions. Par ailleurs, la « Charia », c’est-à-dire la Loi islamique, garantit aux femmes les droits d’héritage et de propriété.

Le Gouvernement yéménite reconnaît l’importance de la sensibilisation de l’opinion à la Convention, notamment afin de garantir une information totale des femmes au sujet de leurs droits. Dès lors, les autorités yéménites ont organisé un certain nombre de symposiums au sujet de la Convention et conclu un accord préliminaire avec plusieurs ONG s’occupant de la condition de la femme en vue de la distribution du texte de la Convention à l’ensemble des femmes du pays. La « Commission nationale de la femme » considère la Convention non seulement comme le fondement des programmes qu’elle met en œuvre, mais aussi comme un critère d’évaluation, par rapport auquel on peut mesurer les progrès accomplis dans le sens de l’amélioration de la condition de la femme, au Yémen.

La Présidente déclare que l’exposé oral de Mme Kaid, intéressant et détaillé, nous a offert un tableau très clair de la situation des femmes yéménites. La Présidente se félicite en particulier des efforts du gouvernement yéménite dans le sens d’une meilleure application de l’article 9 de la Convention.

Articles 1 à 6

M me Gabr déclare que, ayant adhéré à la Convention, l’État partie qu’est le Yémen devrait veiller à ce que cet instrument soit incorporé dans la législation nationale. Le Comité est conscient des spécificités de la société yéménite; il comprend les efforts encore nécessaires à l’amélioration de la condition de la femme au Yémen et se félicite des progrès accomplis dans le sens de cet objectif, ces deux dernières décennies. Prenant acte du fait que le retard encore important de la condition de la femme constitue un obstacle au développement du pays, Mme Gabr demande de quelle manière le Gouvernement yéménite envisage d’intégrer l’émancipation de la femme aux politiques de développement. Au sujet de la Commission nationale de la femme, Mme Gabr demande quelle est la nature spécifique de l’action entreprise par cette instance en vue de garantir la révision des lois discriminatoires à l’égard des femmes; l’oratrice demande également si des ONG féminines participent à ces efforts, et si des initiatives ont été prises en vue d’éduquer la société civile au sujet de la nécessité de réformes législatives. Il serait également intéressant de savoir de quelle manière l’État partie procède à une sensibilisation aux questions féminines dans les zones rurales, où une grande partie de la population est analphabète. Au sujet des femmes rurales, précisément, il convient de développer l’information sur leurs problèmes spécifiques et au sujet des programmes gouvernementaux visant à résoudre ces problèmes.

M me Achmad félicite la Commission nationale de la femme pour les efforts qu’elle déploie, et demande de quelle manière l’appareil d’État aborde les problèmes des femmes rurales, des femmes pauvres, analphabètes, handicapées, âgées ou réfugiées. Il importe non seulement de créer des comités ou commissions spécifiques pour traiter les problèmes de chacune de ces catégories, mais aussi de lutter contre les stéréotypes et les pratiques traditionnelles préjudiciables aux femmes à tous les niveaux de l’éducation (notamment dans le cadre de l’éducation parentale), ainsi que dans les médias. Dans ce domaine, les mécanismes nationaux doivent avoir un caractère durable; Mme Achmad demande, par conséquent, s’il existe des plans d’amélioration des structures organisationnelles et du fonctionnement de l’appareil national, et de quelle manière sont garanties des relations de travail efficaces avec le gouvernement central et les pouvoirs locaux, avec les ONG, ou encore avec les dirigeants communautaires et religieux. Il importe également de procéder à des réformes en matière légale et juridique, et de mettre en œuvre des politiques et programmes d’égalité entre les sexes.

M me Açar déclare que, si des réformes sont effectivement nécessaires sur le plan juridique, l’égalité devant la loi n’est qu’un point de départ. La Constitution yéménite n’établit aucune distinction entre les hommes et les femmes; en revanche, la loi sur le statut personnel a un caractère inégalitaire et n’est conforme ni à la Constitution du Yémen ni à la Convention. Le Yémen n’est pas le seul pays confronté à ce problème; dans de nombreux pays, la Constitution n’a qu’un impact mineur sur la vie quotidienne des femmes. Au contraire, les lois sont un véritable moteur d’évolution et de développement sociaux, en particulier en ce qui concerne la sphère privée. Les efforts du Gouvernement yéménite dans le sens de l’émancipation de la femme dans la vie publique sont certes très louables; mais la réalité au niveau mondial montre bien que, sans une évolution parallèle de la vie familiale – notamment en ce qui concerne les femmes mariées –, seul un petit nombre, très symbolique, de femmes accèdera à des postes de responsabilité; et, sans cette évolution au niveau de la vie privée, la Convention ne sera pas totalement appliquée.

D’autre part, Mme Açar souligne que les lois doivent être également appliquées. Elle se dit préoccupée par l’attitude de passivité révélée par la déclaration selon laquelle aucune proposition d’amendement de l’article 40 de la loi sur le statut personnel n’a été faite, au Yémen, dans la mesure où cela n’a pas provoqué de réaction sociale importante, et où, de toute manière, cet article va tomber en désuétude du fait du développement de l’éducation, de l’entrée des femmes sur le marché du travail et de l’existence de programmes de défense de la condition de la femme (CEDAW/PSWG/2002/EXC/CRP.2/Add.2, par. 10). Le Gouvernement yéménite devrait être plus actif en matière d’application de la Convention dans tous les secteurs touchant à la vie des femmes.

Le taux élevé d’abandon scolaire des filles, dû à des pratiques sociales discriminatoires, constitue un obstacle majeur au développement national et à l’égalité entre les sexes. La solution réside dans l’élaboration de programmes très clairs de promotion de la femme, dans une lutte déterminée contre les stéréotypes fondés sur le sexe des personnes, dans l’application des lois existantes et la mise en place des forces qui permettront l’acceptation de nouvelles lois par l’opinion publique. Mme Açar requiert enfin des informations sur le degré de coopération entre le gouvernement et les ONG, ainsi que sur toute campagne visant à réaliser les objectifs mentionnés.

M me Shin déclare qu’en tant que citoyenne de la République de Corée, elle comprend les problèmes d’un pays divisé, et espère que le Yémen sera désormais en mesure de consacrer ses efforts au développement du pays, plutôt que de gaspiller des ressources qui ne sont pas si importantes en en consacrant une partie à des dépenses de défense peu nécessaires. Mme Shin se félicite de la franchise du Gouvernement yéménite lorsqu’il reconnaît qu’il existe une discrimination à l’égard des femmes dans le pays, car c’est là la première étape du processus d’éradication de cette discrimination.

Par ailleurs, elle se déclare préoccupée par l’article 232 du Code pénal, aux termes duquel un mari qui surprend son épouse ou toute autre femme en train de commettre un adultère, et qui assassine la femme et son partenaire, n’est pas accusé de meurtre; Mme Shin est également préoccupée par l’article 52 du Code pénal yéménite, qui fixe le « prix » du meurtre d’une femme à 50 % seulement de celui d’un homme, ainsi que par les dispositions hautement discriminatoires de la loi sur le statut personnel et de ses amendements. Elle considère qu’il serait également recommandable de modifier la loi sur la sécurité sociale, qui autorise les femmes à prendre leur retraite plus tôt que les hommes, ainsi que la Loi sur la nationalité.

Les réponses aux questions soulevées dans la liste de problèmes en suspens au Yémen indiquent que la violence à l’égard des femmes n’est pas considérée comme un problème, et que les études ou enquêtes à ce sujet restent très limitées (CEDAW/PSWG/2002/EXC/CRP.2/Add.2, par. 19). Et pourtant, ce type de violence – et notamment la violence familiale – constitue bel et bien une forme de discrimination à l’égard des femmes. Mme Shin espère, par conséquent, que le Gouvernement yéménite traitera ce problème en commanditant des recherches, en élaborant des politiques et des programmes, en appliquant des lois pertinentes et en créant une formation visant à sensibiliser à ce problème la police, la justice et l’opinion publique; dans ce domaine, la recommandation générale no 19 du Comité préconise une approche globale du problème de la violence à l’égard des femmes.

Par ailleurs, le nombre important de viols, de crimes d’honneur et de mutilations génitales des femmes est également très préoccupant. Le Ministère de la Santé a interdit que l’on procède à ce type de mutilation dans des établissements de santé publics; il serait utile de connaître la peine encourue pour toute violation de cette interdiction, ainsi que le nombre de poursuites engagées et de condamnations prononcées depuis la publication du nouveau décret.

M me Tavares da Silva déclare que les images et valeurs stéréotypées liées au sexe de la personne constituent l’obstacle majeur à l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, au Yémen. Il existe un écart important entre la Constitution et la législation. Les amendements aux lois existantes ne vont pas toujours assez loin : ainsi, à l’heure actuelle, si les femmes divorcées et les veuves de ressortissants étrangers peuvent transmettre effectivement leur nationalité à leurs enfants, il n’en est pas de même d’autres catégories de femmes. Mme Da Silva se demande également quelles mesures ont été prises au sujet des propositions d’amendement à la Loi sur le statut personnel.

Certaines dispositions discriminatoires ne sont pas même remises en cause; il est dit que les hommes et les femmes jouissent des mêmes droits aux termes de la Constitution, mais, en fait, il n’en est rien en cas de divorce ou d’adultère. De plus, le Gouvernement yéménite affirme qu’il n’y a pas de contradiction fondamentale entre l’article 40 de la loi sur le statut personnel et la Convention – un article qui stipule que la femme n’a pas le droit de sortir du domicile familial sans autorisation de son mari. Or, une telle disposition est incompatible avec le principe de l’égalité dans le mariage, avec le droit fondamental de tout être humain de circuler librement, ou encore avec le droit de toute femme d’organiser sa vie comme elle l’entend. D’autre part, les mariages précoces, susceptibles de conduire à des grossesses également précoces et répétées, ainsi que la polygamie, sont également des pratiques discriminatoires à l’égard des femmes.

L’argument selon lequel il n’est pas nécessaire de modifier la loi du fait que l’absence d’action, dans ce domaine, ne provoque aucun mouvement social important est inacceptable; la loi a également une fonction pédagogique et d’avant-garde, et toute législation injuste est inacceptable, qu’il y ait eu ou non des recours pour la contester. De la même manière, le point de vue selon lequel les droits des hommes et ceux des femmes diffèrent en raison de la fonction différente des hommes et des femmes ne tient pas compte du fait que les droits sont inhérents à tout être humain, alors que la fonction sociale des uns et des autres est imposée par la société et la culture ambiantes; en cas de conflit entre droits et devoirs, ce sont les droits qui prédominent. D’une manière générale, le gouvernement yéménite semble réticent à tout changement. Pour prendre un exemple, il est dit, dans le cinquième rapport, qu’une femme n’est pas limitée à ses rôles de mère et de ménagère (CEDAW/C/YEM/5, p. 21); il n’en reste pas moins que la maternité – comme la paternité – est un rôle spécifiquement réservé à l’un des deux sexes, alors que les tâches ménagères, elles, peuvent être partagées par les hommes et les femmes.

M me Kaid (Yémen) précise que les ONG n’existent dans le pays que depuis le début des années 1990; par conséquent, d’une manière générale, elles sont encore faibles – et cela est vrai particulièrement en zone rurale – mal structurées, et ont des capacités limitées, ainsi que des objectifs mal définis. Le Gouvernement yéménite s’efforce de créer un climat propice à l’action des ONG en tant qu’instrument de développement économique et social, notamment dans le contexte mondial de privatisation des entreprises et de ralentissement économique.

La Commission nationale de la femme a révisé 57 lois pour les mettre en conformité avec la Convention, et a également formulé un certain nombre de recommandations qui ont servi de base à divers projets de loi du gouvernement. En conséquence, plusieurs lois, dont la loi sur la nationalité et la loi sur le statut personnel, ont été amendées. Toutefois, les attitudes traditionnelles et les coutumes de la société yéménite reflètent souvent une résistance à l’application de la Convention. Aujourd’hui, cependant, l’opinion publique comprend mieux les problèmes des femmes que par le passé; le gouvernement s’efforce d’obtenir le soutien des ONG et de la société civile en général, de promouvoir l’élection des femmes à différents postes et de veiller à l’équilibre entre les sexes dans les projets et programmes sectoriels et autres – dont certains seront spécifiquement en faveur des femmes rurales.

La participation des femmes à la société civile, au gouvernement et à la vie politique s’est considérablement accrue; cependant, il reste encore beaucoup à faire. L’objectif n’est pas d’obtenir un nombre symbolique de femmes élues; il s’agit plutôt d’accomplir d’authentiques progrès en ce qui concerne la mise en œuvre du « Programme d’action de Beijing » et de la Convention. Les décideurs ont été invités à organiser des sessions d’information en vue d’encourager les femmes à être candidates à des postes de responsabilité.

L’analphabétisme des hommes et des femmes est un obstacle majeur au développement des zones rurales. Des campagnes et des études sont menées en vue de sensibiliser la population à l’importance du maintien de la scolarisation des jeunes filles, de manière à leur permettre d’avoir un emploi ultérieurement et de prendre des décisions aussi bien pour elles-mêmes que pour leur famille. L’objectif est que, d’ici à 2015, 80 % des jeunes filles yéménites aient suivi jusqu’à terme un enseignement fondamental.

En ce qui concerne l’âge de la retraite, Mme Kaid souligne que de nombreuses femmes prennent effectivement leur retraite plus tôt que les hommes, mais que cela n’est pas nécessairement une mauvaise chose, car bon nombre d’entre elles, en effet, peuvent souhaiter partir à la retraite autour de 55 ans.

La question de la violence familiale exige très clairement que l’on développe les études à ce sujet. Jusqu’à présent, il est apparu que les coutumes et les attitudes traditionnelles des Yéménites empêchaient les femmes de se rendre dans un poste de police pour porter plainte; certes, le phénomène de la violence familiale existe, mais n’est pas si répandu dans la mesure où la tradition veut aussi que les hommes et les femmes se respectent mutuellement. La Commission nationale de la Femme collabore actuellement avec 11 organisations à un programme parrainé par « Oxfam » et visant à lutter contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes – y compris la violence familiale ou conjugale. Si elle n’est pas encore en mesure d’étudier ce problème dans toute sa dimension en raison de l’absence de données statistiques pertinentes, la Commission nationale s’en préoccupe et procède actuellement à des études en vue de mieux comprendre la nature et l’ampleur de ce phénomène. À noter que la « Charia » (la loi islamique) autorise les femmes à répudier leur époux et à demander le divorce si elles ne sont pas satisfaites de leur mariage.

Bien que la pratique de la circoncision féminine ne soit pas très répandue, elle reste critiquable – même à cette échelle restreinte. Outre les mesures déjà prises par l’État pour combattre cette pratique, la Commission nationale de la femme entreprend des campagnes de sensibilisation afin d’éduquer la population et de l’informer des effets nocifs d’une telle pratique; la Commission prévoit la disparition progressive de cette pratique de la circoncision féminine. Elle précise également que le viol n’existe pas dans la société yéménite.

En ce qui concerne la loi sur la nationalité, les autorités compétentes ont évoqué la possibilité d’appliquer le principe de réciprocité dans le cas de femmes yéménites mariées à des ressortissants d’autres pays arabes – principe par lequel elles seraient autorisées à transmettre leur nationalité à leurs enfants si leur époux y consent. Avec l’évolution de la société dans ce domaine, on assiste également à un changement progressif de la mentalité des responsables du pays.

Par ailleurs, la Commission nationale de la femme s’efforce de supprimer, dans le Code pénal, l’inégalité entre les hommes et les femmes en matière de sanction de l’adultère. L’adultère reste un délit au regard de la Charia (loi islamique); mais il faut aujourd’hui sensibiliser les hommes au caractère inéquitable de sanctions plus sévères pour les femmes en cas d’adultère.

En ce qui concerne les mariages précoces, Mme Kaid déclare que l’âge moyen du mariage, pour une femme yéménite, est de 20 ans – alors qu’il est de 22 ans pour les hommes. Les mariages à un jeune âge sont un phénomène qui existe dans les zones rurales; mais, même dans ces régions, le phénomène n’est pas très répandu. Les campagnes de sensibilisation et d’éducation de l’opinion à propos des dangers d’une telle pratique vont permettre de la marginaliser davantage encore, de manière progressive. Les programmes de planification familiale et d’autres activités du ministère de la Santé encouragent de plus grands espacements entre les naissances; l’allaitement au sein est également considéré comme un facteur d’espacement dans ce domaine, et est donc encouragé de la même manière.

Il y a une réelle difficulté à faire évoluer les rôles traditionnels des hommes et des femmes – ce qui signifie que cette évolution ne pourra se faire que très progressivement. Des efforts sont nécessaires en vue de modifier la société au niveau structurel, et ce, avec le concours des médias, de programmes éducatifs et grâce à un travail de communication avec les pays voisins.

Articles 7 à 9

M me Gaspard demande quelles initiatives sont prises en vue d’encourager les femmes à exercer leur droit de vote. La participation des femmes aux processus politiques est une condition préalable à l’exercice, par les citoyennes, de l’ensemble de leurs droits; et pourtant, 27 % seulement des personnes inscrites sur les listes électorales pour les élections récentes sont des femmes. Mme Gaspard demande également si le nombre peu élevé de femmes candidates à des postes d’élus, à tous les niveaux, et le faible pourcentage de femmes effectivement élues peuvent s’expliquer par une résistance profonde des hommes vis-à-vis de l’élection de femmes. Il semble donc que seules des mesures « positives », telles que l’instauration de quotas, pourront garantir la présence d’un nombre suffisant de femmes sur les listes électorales et, de ce fait, la défense des intérêts des femmes.

M me Kaid (Yémen) déclare que la Constitution yéménite n’interdit nullement aux femmes de participer à la vie politique, et que la loi électorale garantit l’égalité des droits des hommes et des femmes dans ce domaine. Les obstacles à une participation pleine et entière des femmes à la vie politique trouvent plutôt leur origine dans les attitudes traditionnelles de la société; il y a effectivement une certaine résistance, de la part des hommes, vis-à-vis du fait que les femmes puissent jouer un rôle à un niveau décisionnaire. La Commission nationale de la femme mène, à ce sujet, des campagnes de sensibilisation et met en place différents types d’aide aux femmes candidates; mais le nombre de femmes qui participent aux activités politiques reste faible, y compris dans les zones urbaines (cette participation étant quasiment inexistante en zone rurale). La Commission nationale de la femme intervient également auprès des dirigeants de tous les grands partis politiques pour leur demander d’encourager les femmes à voter et à se présenter aux élections. De son côté, le gouvernement s’efforce de recruter, de promouvoir ou de nommer davantage de femmes à des postes de responsabilité – en fonction de leurs qualifications et de leurs compétences –, d’établir des quotas en ce qui concerne la présence de femmes à ces postes (et ce, en dépit d’une certaine opposition de la société yéménite – notamment dans les zones rurales), et, enfin, d’encourager le plus grand nombre de femmes possible à participer aux processus démocratiques en tant que candidates à des fonctions politiques.

Articles 10 à 14

M me Schöpp-Schilling fait observer que les programmes de quotas visant à garantir une certaine participation des femmes à la vie politique et publique ont effectivement donné des résultats positifs dans un certain nombre de pays. Elle demande quel est le temps nécessaire à une ratification effective du Protocole facultatif, et demande également des mesures appropriées pour garantir la ratification, par le Yémen, de l’amendement au paragraphe 1er de l’article 20 de la Convention. Elle se félicite de l’ampleur des réformes législatives récemment entreprises, et invite le gouvernement yéménite à apporter, dans son prochain rapport, des précisions au sujet des lois visées par les réformes.

Mme Schöpp-Schilling fait également observer que les mesures temporaires spéciales mentionnées au paragraphe 1er de l’article 4 de la Convention équivalent à instaurer une préférence en faveur des femmes afin de corriger les inégalités passées ou actuelles, et d’accélérer l’instauration d’une égalité de fait; elle souligne qu’à cet égard, un quota de 15 à 20 % de femmes dans la composition des conseils locaux serait approprié. Par ailleurs, elle demande un état des lieux en ce qui concerne la mise en œuvre des programmes gouvernementaux en matière d’éducation des jeunes filles et des femmes; elle demande également si, dans ce domaine, des objectifs numériques ont été fixés, et si une aide de la communauté internationale a été requise. Elle demande enfin quelle est la position du gouvernement yéménite sur la question des « crimes d’honneur »; affirmant que l’adultère ne devrait en aucun cas être sanctionné par la peine de mort, Mme Schöpp-Schilling demande instamment aux autorités yéménites d’entreprendre, dans ce domaine, une campagne de sensibilisation ainsi qu’une réforme législative.

M me Feng Cui se félicite de la nouvelle approche du Gouvernement yéménite en matière de politique agricole et alimentaire, et demande si les exigences de la Convention dans ces domaines ont été prises en considération lors de l’élaboration des politiques en question. Elle demande également davantage d’informations spécifiques sur la nature des objectifs à moyen et long terme du gouvernement yéménite, et préconise des conseils sur la meilleure manière de déterminer si les objectifs stratégiques ont été ou non atteints. Elle fait encore observer que, s’il n’y a pas d’obstacles, sur le plan juridique, au plein exercice de leurs droits par les femmes, il subsiste de nombreuses difficultés, dues à des facteurs culturels et aux traditions, en matière d’accès des femmes au crédit, aux soins de santé, au divorce – entre autres domaines –, et demande quelles mesures sont prises en vue de résoudre ces problèmes. Mme Feng Cui demande enfin davantage d’informations sur les services gouvernementaux chargés de garantir la protection des femmes rurales.

M me Abaka – s’exprimant à titre personnel – fait observer que l’acceptation d’un âge minimum de 15 ans pour le mariage a de graves conséquences pour la santé des jeunes filles concernées, dans la mesure où leurs capacités procréatives ne sont pas encore, dans de nombreux cas, assez développées pour faire parvenir le fœtus à terme, et où ces jeunes filles s’exposent donc au risque de fausses couches pouvant mettre leur vie en danger, ou à d’autres complications liées à la grossesse. Mme Abaka invite également le Gouvernement yéménite à ne pas considérer la question du sida exclusivement comme un problème de santé et à prendre en compte également ses aspects plus généraux, liés au sexe et au développement des personnes; elle propose la création d’une commission nationale du sida, qui serait composée de représentants de l’ensemble des acteurs concernés, y compris de hauts fonctionnaires des finances, de la planification et de la défense. Elle souligne encore le fait que les mariages précoces contribuent à des taux élevés de mortalité maternelle et infantile, et recommande, par conséquent, que des mesures appropriées soient prises en vue d’élever l’âge minimum officiel pour le mariage, et d’interdire, au niveau légal, dans les plus brefs délais, les mutilations génitales des femmes.

M me Achmad se félicite du caractère exhaustif de l’analyse, par le Gouvernement yéménite, de la situation des femmes rurales, et demande s’il existe au Yémen des centres d’étude des femmes ou des instituts de recherche spécialisés permettant de contribuer à l’émancipation des femmes. Étant donné le temps de travail très élevé des femmes rurales et le fait que celles-ci utilisent souvent des instruments ou machines très rudimentaires, Mme Achmad demande si des efforts sont déployés afin de fournir à ces femmes les technologies appropriées et de leur faciliter ainsi la tâche, ou encore afin de les aider à la maîtrise de leurs revenus. Elle demande également quelles mesures sont prises en vue d’encourager les hommes et les femmes ruraux à partager les tâches domestiques, et d’aider les femmes rurales qui sont chefs de famille. Elle demande enfin si le Yémen reçoit une aide de l’un des organes des Nations Unies en matière de programmes destinés aux femmes rurales.

M me Hazelle demande des exemples spécifiques en matière de mise en œuvre et de résultats des programmes éducatifs mentionnés dans les rapports et les réponses aux listes de questions établies, car elle se dit préoccupée par l’information communiquée dans le cadre de la présentation orale, et selon laquelle des parents obligent leurs filles à quitter l’école à l’issue de la 4e ou de la 5e année de scolarité, en raison d’un climat socioculturel hostile aux écoles mixtes. Mme Hazelle se dit tout particulièrement intéressée par des informations complémentaires sur l’action du Gouvernement yéménite pour remédier à ce problème, et souhaite savoir également si des programmes de sensibilisation de l’opinion ont été mis en œuvre en vue de s’opposer à cette démarche des parents. Elle fait observer que les structures mêmes du système éducatif yéménite constituent des obstacles majeurs à l’éducation des filles. Même si le Gouvernement yéménite reconnaît l’importance de l’éducation dans le processus de réduction de la pauvreté, les autorités agissent-elles suffisamment en vue de sensibiliser l’opinion ou d’élaborer des programmes de création d’établissements scolaires alternatifs, permettant d’assurer l’éducation continue des filles?

M me Manalo déclare apprécier considérablement les mesures d’émancipation des femmes prises au Yémen. Cependant, elle n’est pas convaincue que la volonté politique ait été suffisamment forte, cohérente ou généralisée, car, sur la base des rapports périodiques, elle ne considère pas que le gouvernement yéménite ait établi la question des droits de la femme comme une absolue priorité dans le cadre du développement national. Le Comité aurait souhaité des preuves de la volonté du gouvernement yéménite de consacrer davantage de crédits et de ressources à des programmes destinés à améliorer la condition féminine.

Exprimant sa préoccupation au sujet d’informations selon lesquelles une disposition constitutionnelle garantissant la non-discrimination aurait été abrogée, Mme Manalo suggère que le Yémen entreprenne une intense campagne de sensibilisation au sujet du contenu de la Convention et des implications de la mise en oeuvre de ce texte. Certes, le Yémen s’est efforcé d’expliquer la situation des femmes par les stéréotypes culturels et les rôles traditionnels des hommes et des femmes, mais l’élimination de ces obstacles est précisément au cœur de la Convention – et plus particulièrement de l’article 5. Par conséquent, Mme Manalo forme l’espoir que le prochain rapport indiquera que le Yémen a entrepris un plan d’action national qui, par le recours aux instruments éducatifs, aux médias et à la société civile, permettra d’éliminer les stéréotypes et d’assurer la protection des droits des femmes. À cet égard, l’élaboration et la mise en œuvre d’un cadre juridique, dans des délais donnés, sont essentielles. Mme Manalo indique enfin que le gouvernement yéménite devrait envisager d’adapter le programme de mise en œuvre de ses réformes juridiques afin d’accélérer l’évolution souhaitable.

M me González déclare que le fondement de la discrimination à l’égard des femmes yéménites est la position très faible qu’elles occupent dans la structure familiale. Tant que cette inégalité subsistera, il sera très difficile, pour la société yéménite – qui maintient ainsi un statut inégal pour les hommes et les femmes –, d’évoluer. Mme Gonzalez se dit préoccupée par le fait que les idées qui sous-tendent les violations flagrantes des droits de la femme continuent à prospérer dans le cadre de la « Charia » (la loi islamique). Et pourtant, d’autres gouvernements qui appliquent tout autant la Charia ont su adopter des mesures politiques et législatives en vue d’interdire la discrimination à l’égard des femmes.

Mme Gonzalez ajoute qu’il est également préoccupant que le Code pénal yéménite autorise un individu à assassiner une femme membre de sa famille s’il la surprend « en flagrant délit ». Si l’on accepte le principe d’une sanction sévère en cas d’adultère, les peines devraient s’appliquer de la même manière aux hommes et aux femmes.

En ce qui concerne les dispositions de la loi sur le statut personnel concernant les droits d’héritage, Mme Gonzalez demande que l’on clarifie la question de la part d’héritage à laquelle les veuves et les enfants ont droit, en particulier dans les cas de polygamie.

M me Kaid (Yémen) déclare que la loi électorale devrait être révisée afin d’instaurer le principe de quotas permettant une participation accrue des femmes à la vie politique. Cependant, elle reconnaît qu’une telle évolution demandera du temps. Dans de nombreux cas, même les pays développés ne respectent pas le principe d’une représentation des femmes au sein du gouvernement à hauteur de 30 %; par conséquent, on peut comprendre que le Yémen ne soit pas en mesure d’atteindre rapidement cet objectif. En ce qui concerne la référence à la ratification du Protocole facultatif à la Convention, une demande a été soumise à la Commission nationale de la Femme, afin d’exposer intégralement les conditions nécessaires à la mise en œuvre des dispositions du Protocole. Bien qu’il n’ait pas été fixé de date précise pour la signature, l’adhésion à ce texte est imminente.

Dans le domaine de l’éducation, le Gouvernement yéménite a adopté des mesures temporaires spéciales dans le cadre de sa stratégie de réduction de la pauvreté et par le biais de mesures incitatives, en coopération avec le Programme alimentaire mondial. Une aide alimentaire a été octroyée aux familles qui maintiennent la scolarisation de leurs filles.

Le Yémen a bénéficié de l’aide de divers donateurs internationaux – y compris les gouvernements de différents pays européens et plusieurs organisations internationales non gouvernementales –, qui mettent tous l’accent sur la nécessité de respecter l’égalité entre les sexes lors de la mise en œuvre des programmes.

Il n’y a pas eu d’étude spécifique, dans les prisons, au sujet de l’étendue du phénomène des crimes d’honneur, et la délégation yéménite n’est pas non plus en mesure de fournir des données spécifiques dans ce domaine; cependant, on considère que ce phénomène n’est pas très répandu.

Le Gouvernement yéménite s’est heurté à une certaine résistance dans le cadre de ses efforts visant à relever l’âge légal du mariage. Les autorités poursuivent leur collaboration avec la société civile en vue de créer des groupes de pression et de sensibiliser davantage la population aux dangers des mariages précoces. Par ailleurs, le Gouvernement yéménite attache une grande importance à la lutte contre la propagation du virus VIH et du sida. On a dénombré 800 cas de séropositivité – dont 50 % chez des ressortissants étrangers. Avec le soutien du Fonds des Nations Unies pour la population, le Yémen élabore actuellement une stratégie nationale concernant le virus VIH et le sida.

Des recherches sur les questions concernant les femmes sont en cours, et le Gouvernement yéménite reconnaît qu’il est impossible de mettre en œuvre des politiques efficaces sans études précises au préalable. L’une de ces études a été menée sur la condition des femmes détenues en prison, et l’on a pu ainsi établir que la situation de ces femmes s’était considérablement améliorée – cela ayant été confirmé par des observateurs indépendants venus du Danemark et des Pays-Bas. Par ailleurs, une autre étude – portant sur l’éducation et les femmes en zone rurale – est également en cours.

En ce qui concerne les femmes rurales, la journée de travail de 16 heures n’est pas le fait d’une disposition légale; mais, étant donné la nature de la vie quotidienne dans ces secteurs isolés, le principe de longues journées de travail pour les femmes est considéré comme une chose normale. Les stratégies destinées à améliorer les infrastructures des zones rurales devraient également contribuer à une amélioration importante de la vie quotidienne des populations locales; ces stratégies vont être intégrées au plan de développement quinquennal visant à l’éradication de la pauvreté. Le plus souvent, les femmes des zones rurales effectuent des travaux assez durs sur le plan physique et n’ont que très peu d’occasions d’acquérir de nouvelles compétences ou une spécialisation dans un domaine donné. On espère aujourd’hui que d’importantes campagnes d’information publiques permettront d’améliorer la situation de ces femmes et de les encourager à élargir leurs horizons. La stratégie d’élimination de la pauvreté doit aussi, en principe, se concentrer sur les familles dirigées par des femmes.

Le Yémen reçoit un soutien bilatéral et multilatéral en matière de développement rural – en particulier dans les « provinces » –, et la priorité est donnée aux zones les plus démunies. Très récemment, les autorités yéménites se sont entretenues avec les responsables de la Banque mondiale afin d’obtenir des subventions accrues au profit des femmes rurales.

Le Yémen reconnaît que le taux d’abandon scolaire des filles dans l’enseignement secondaire est un problème très sérieux. Plusieurs études internationales sont parvenues à la conclusion que le manque d’enseignantes et les établissements mixtes sont parmi les raisons majeures de ce phénomène. Par conséquent, on attache une grande importance au maintien d’une éducation continue pour les filles. Parallèlement à une « féminisation » du système éducatif, le Gouvernement yéménite considère qu’il importe – en particulier dans les secteurs où les traditions sont le plus profondément ancrées – de redonner confiance aux familles et de leur indiquer qu’il y a des avantages à maintenir les filles dans le système scolaire.

En réaction au commentaire sur le manque de mesures gouvernementales actives en faveur de la promotion des femmes, Mme Kaid souligne que, de tous les pays de la Péninsule arabique, le Yémen est le seul à compter une femme au sein du Gouvernement et plusieurs femmes au rang d’ambassadrices. Le gouvernement yéménite s’efforce très sérieusement d’être à la hauteur des obligations fixées par la Convention. Une nouvelle preuve de l’engagement politique du Yémen dans ce sens est l’implication personnelle du Premier Ministre en matière de promotion des droits de l’homme et d’amélioration de la condition de la femme. Le gouvernement a une vision à long terme des progrès à accomplir et a entamé la mise en œuvre de toute une série de programmes dans cette direction. L’éradication de la pauvreté, la détermination de quotas en faveur de l’accès des femmes à des postes décisionnaires et la création d’un cadre institutionnel de développement au sein du gouvernement et des organisations non gouvernementales font désormais partie des priorités.

La Charia (Loi islamique) n’interdit pas aux femmes de travailler ou ne leur impose aucune restriction dans ce domaine. Aux termes de cette loi, les femmes occupent une place d’honneur et jouissent du droit de participation à la société. Sur le plan historique, les femmes ont édifié et défendu de manière active les sociétés de la région – tout autant que les hommes; c’est une mauvaise interprétation de l’Islam que d’affirmer que la Charia s’oppose au travail des femmes et est en contradiction avec leurs droits. En ce qui concerne l’adultère, les hommes et les femmes sont sanctionnés de la même manière.

M. Al-Shahab (Yémen) déclare que, dans le cadre de la Charia, les règles et préceptes régissant l’héritage sont la volonté de Dieu. Il est faux de dire que les hommes reçoivent automatiquement une part plus importante de l’héritage que les femmes. La Charia induit des préceptes juridiques déterminant avec précision les droits des hommes et des femmes. D’une manière générale, les hommes reçoivent une part plus importante du fait que, dans le cadre de la Charia, ils ont le droit et le devoir de faire vivre leur famille tout entière, alors que les femmes, elles, n’ont pas cette obligation. Les femmes ont le droit de conserver leur part en dehors des dépenses nécessaires au ménage. De plus, les hommes ont également l’obligation d’engendrer des enfants de sexe féminin. Toutefois, il est des cas où les hommes et les femmes reçoivent des parts égales de l’héritage en question : par exemple, les fils et les filles ont droit à des parts égales des biens et avoirs légués par leur mère après son décès, et il y a également des cas dans lesquels les femmes ont droit à une part plus importante que les hommes.

En ce qui concerne l’information de l’opinion publique, le Gouvernement yéménite a entrepris un programme intensif concernant divers aspects des questions de droits de l’homme et des problèmes de santé, en adoptant différentes stratégies de communication, à cet égard.

La séance est levée à 13 heures.