Session extraordinaire

Compte rendu analytique de la 576e séance

Tenue au Siège, à New York, le vendredi 9 août 2002 à 15 heures

Président :Mme Abaka

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième rapport périodique de l’Ouganda

Le séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième rapport périodique de l’Ouganda (CEDAW/C/UGA/3, CEDAW/PSWG/2002/EXC/CRP.1/Add.10 et CEDAW/PSWG/2002/3XC/CRP.1/Add.10)

À l’invitation de la présidente M me Bakoru prend place à la table du Comite.

Articles 7 à 9

M me Kwaku dit que le règlement relatif aux passeports est discriminatoire, non seulement à l’égard des femmes mariées qui ont des enfants, qui doivent obtenir le consentement écrit de leur mari, mais aussi à l’égard des femmes qui sont séparées, divorcées et veuves. Elle demande dans combien de temps l’amendement qu’il est prévu d’apporter à cette loi et dont il est fait état dans les réponses écrites (CEDAW/PSWG/2002/EXC/CRP.2/Add.10) entrera en vigueur. En ce qui concerne la loi dite « Uganda Citizenship and Imigration Control Act (3/1999) » qui a été récemment modifiée, elle voudrait connaître la nature des autres conditions mises par le Citizenship and Imigration Board à l’obtention d’un passeport et elle espère qu’elles n’ont rien de discriminatoire.

M me Kapalata dit que si l’Ouganda a fait bien mieux que beaucoup de ses voisins dans l’application de l’article 8, la situation n’est pas entièrement satisfaisante, notamment en ce qui concerne la représentation des femmes dans le service diplomatique 17 ans après la ratification de la Convention par l’Ouganda. Les pouvoirs publics sont de toute évidence résolus à progresser dans la lutte contre le sexisme, lutte à laquelle le Président apporte tout son soutien, mais, de peur que cet enthousiasme vienne à faiblir avec un changement de gouvernement et parce que cet enthousiasme n’est pas totalement partagé par tous les Ougandais, il est important de mettre en place un système de nature à maintenir partout dans le pays cette volonté de refus du sexisme.

M me Corti félicite le Gouvernement et les organisations non gouvernementales de ce qu’ils ont fait pour accroître le nombre de femmes dans les postes de responsabilités. Comme il s’agit d’un domaine dans lequel il n’est pas facile aux femmes de prendre pied, elle demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour mobiliser les femmes en vue de maintenir, voire d’accroître, le pourcentage de quota visé.

M me Goonesekere, se référant à la possibilité de contester la constitutionalité du règlement relatif aux passeports devant les tribunaux, dit qu’il ne s’agit pas là d’une loi, mais d’un règlement administratif. Tel est le cas dans un grand nombre de pays qui ont hérité du droit britannique, de sorte qu’elle recommande aux autorités ougandaises de s’employer, avec le concours du Ministère compétent, à faire adopter des textes portant suppression de ce règlement discriminatoire. Elle aimerait connaître les possibilités que pourraient avoir les associations d’aide judiciaire mentionnées par la délégation de saisir les tribunaux d’affaires à titre expérimental et d’aider ainsi les femmes qui souhaitent mettre en cause le système.

M me Manalo, se référant à l’article 8, félicite la délégation pour la Constitution de 1995, qui donne aux femmes la possibilité de représenter leur Gouvernement au niveau international et de travailler dans des organisations internationales. Toutefois, il est dit dans le rapport que leurs obligations ménagères et familiales empêchent un grand nombre de femmes d’accepter des postes à l’étranger et d’envisager ainsi de faire carrière dans le service diplomatique. Cela revient à confirmer que les femmes sont prisonnières de leurs obligations familiales. Au lieu d’en faire état comme justification, il faudrait se saisir du problème et s’employer à le résoudre.

Mme Manalo espère que le prochain rapport de l’Ouganda montrera de manière concrète que l’étroite coordination entre les ministères compétents a pu générer des lois, règlements, infrastructures, programmes et assistance physique pour résoudre le problème et que les femmes pourront, elles aussi, faire carrière dans le service diplomatique. Mais, outre le service diplomatique et les secrétariats des organisations du système des Nation Unies, il y a aussi des organismes créés en vertu de traités, comme CEDAW, dans lesquels des Ougandaises qualifiées pourraient entrer. Il faudrait faire preuve d’une plus grande créativité dans la préparation des femmes à l’exercice de fonctions dans de telles instances.

M me Bakoru (Ouganda) indique que l’Ouganda compte deux ambassadrices-une aux États-Unis et une en Éthiopie et qu’une jeune femme estCChef du protocole. Ces femmes occupent leurs postes en leur nom propre et non pas, comme on l’a laissé entendre, pour suivre leur mari, et le personnel des affaires étrangères reçoit une formation en matière d’égalité des sexes. Elle voudrait elle aussi voir des Ougandaises dans des organismes des Nations Unies créés en vertu de traités, mais elle tient à rappeler à cet égard qu’une femme de son pays a été candidate à un siège du Comité CEDAW, mais qu’elle n’a pas été élue et elle engage ses membres à voter pour sa prochaine candidate.

Une façon de continuer à remplir le quota de femmes dans les instances décisionnelles est de faire en sorte qu’elles reçoivent l’instruction nécessaire, ce qui, à son tour, dépend du niveau d’instruction de leurs parents. L’instruction est donc le creuset d’où émergera la masse critique de femmes capables de lutter à armes égales contre les hommes à tous les niveaux et dans tous les domaines. Les Ougandaises sont, comme elle l’a déjà dit, libres de contester devant les tribunaux la constitutionalité du règlement administratif sur les passeports, question qui relève du Ministère de l’intérieur, avec lequel Mme Bakoru aura des entretiens à ce sujet à son retour dans son pays.

Il n’y a pas encore en Ouganda de système national d’identification des citoyens ougandais, mais en vue du tout prochain recensement, pour lequel le certificat de naissance sera important, son propre ministère est en train de mettre au point, dans le cadre de la loi sur la sécurité sociale, un système d’identification. C’est un système qui n’a rien de discriminatoire : ni les hommes ni les femmes ne peuvent obtenir un passeport sans présenter un bulletin de naissance, ce qui est exigé aussi pour l’admission à l’université. Le projet modèle mis en place en 2000 dans certains districts a été étendu à l’ensemble du pays et on espère que les femmes pourront plus facilement obtenir, après le recensement, les papiers nécessaires pour voyager.

Articles 10 à 14

M me Achmad dit son admiration pour les réalisations prometteuses de l’Ouganda, et surtout pour sa Constitution et son appareil juridique. Il faut toutefois maintenir l’effort en matière d’éducation. Beaucoup a certes été fait pour épurer la formation des enseignants, les livres de classes et les programmes de tout sexisme, mais elle se demande dans quelle mesure les autorités régionales et locales s’assurent que le contenu du programme national type est, lui aussi, marqué par le refus du sexisme.

Une formation de type non académique est assurée aux législateurs et aux personnels de la police, notamment à ceux qui sont chargés de la protection des femmes. Mais d’autre groupes cibles, comme les dirigeants politiques, tireraient eux aussi profit de ce type de formation et, par souci de continuité, il reste encore beaucoup de lois à adopter pour étayer la Constitution. La fonction publique ainsi que d’autres ministères qui pourraient ne pas être assez sensibles à la problématique des sexes constituent d’autres groupes cibles.

La formation et la constitution de groupes d’éveil des sensibilités seront d’une importance capitale pour la lutte contre le sexisme dans les comites gouvernementaux, les syndicats, les organisations non gouvernementales, y compris celles des femmes, et les associations professionnelles et sociales des femmes ainsi que pour le personnel chargé de construire une société d’égalité des sexes. Tout ce monde doit recevoir une formation et un enseignement qui mettent l’accent sur l’objectif d’éradication de la discrimination entre sexes dans l’intérêt de tous, et pas seulement dans celui des femmes. En ce qui concerne les mesures temporaires spéciales, il ne faudrait pas y voir une fin en soi : elles ont pour but de remédier à la discrimination.

M me Kwaku demande si, sur les trois cycles d’études, les autorités ougandaises ne pourraient pas envisager d’assurer, si cela n’est pas encore fait, la gratuité du primaire et du secondaire et si, à ces deux niveaux, l’enseignement est obligatoire. Il est alarmant de constater que deux enfants sur cinq sont parents à l’age de 19 ans. Si l’enseignement était obligatoire dans le primaire et le secondaire, cela contribuerait à réduire le nombre de grossesses chez les adolescentes.

Mme Kwaku veut savoir pourquoi le projet de politique nationale de l’emploi n’a pas encore été adopté, s’il a au moins été déposé et ce qu’il est prévu de faire concernant cette politique et les dispositifs qui s’y rapportent. Si, comme on peut le supposer, les employées de maisons représentent la majeure partie de la main-d’œuvre féminine, l’absence de protection de leurs droits de travailleuses représente une très grave lacune dans la législation du travail. Mme Kwaku voudrait savoir aussi si le Gouvernement envisage l’adoption de textes législatifs concernant le harcèlement sexuel au travail.

Ce n’est pas seulement de mesures bien plus drastiques que des mesures de sensibilisation dont on a besoin pour en finir avec le fléau que représentent les grossesses d’adolescentes; ce qu’il faut, c’est faire appliquer les dispositions du paragraphe 3 de l’article 33 de la Constitution interdisant les lois et coutumes qui portent atteinte à la dignité de la femme. Enfin, Mme Kwaku aimerait recevoir des informations concernant le nombre et le pourcentage de femmes qui bénéficient du Youth Enterprise Scheme (YES), dont le rôle est de créer des emplois pour les nouveaux diplômés.

M me Gabr félicite l’Ouganda des montants budgétaires prévus pour l’enseignement et dit être convaincue, elle aussi, que l’éducation est d’une importance capitale pour le développement et la promotion de la femme sur le continent africain. Elle se dit encouragée d’apprendre, d’après les réponses apportées à la liste de questions posées par le Comité (CEDAW/PSWG/2002/EXC/CRP.2/Add.10), que le taux global de prévalence du VIH/sida a continué à baisser, revenant de 6,8 % en 1999 à 6,1 % en 2000, mais elle serait curieuse de savoir quels programmes ont été envisagés concernant d’autres questions relatives à la santé qui touchent les femmes, en particulier les questions de planification familiale. Elle aimerait trouver dans le prochain rapport des éléments d’information faisant état d’un plus grand intérêt du Gouvernement pour la réalisation de projets relatifs à l’avortement et à la situation des adolescentes au regard de la santé.

Il est clair que l’Ouganda a la volonté politique de résoudre les problèmes d’emploi. Pourtant, Mme Gabr, africaine elle-même, dit qu’il faut aussi que les pays de la région aient des orientations et des programmes clairs fondés sur la recherche scientifique. Il faut donner plus d’importance aux problèmes propres aux zones rurales et à l’adoption de mesures relatives à l’emploi des femmes, surtout après la reconstruction économique du pays étant donné qu ce sont les femmes qui ont le plus souffert du ralentissement économique. Elle remarque que les femmes qui travaillent dans le secteur non structuré n’ont pas de protection sociale ni aucune forme de filet de sécurité sociale. Il faut absolument, dit-elle pour conclure, que les femmes puissent accéder au marché du travail sur un pied d’égalité avec les hommes.

M me Tavares da Silva félicite l’Ouganda des progrès qu’il a accomplis en matière d’éducation et de santé et en particulier d’avoir adopté des mesures temporaires spéciales à cette fin. Elle n’a toutefois pas l’impression que des progrès comparables aient été réalisés dans le domaine du travail. Le rapport ne s’étend pas assez sur les niveaux de ressources mis en œuvre pour améliorer la situation de l’emploi et il en dresse un tableau sinistre, faisant ressortir l’asymétrie des conditions de travail entre les hommes et les femmes, de leurs charges respectives et de leurs heures de travail. Toujours à propos de l’article 11, il est dit dans le rapport que les femmes doivent se contenter d’un travail qui ne demande pas beaucoup de qualifications, mal rémunéré, répétitif et à forte intensité de main-d’œuvre et qu’il n’y a pas de protection sociale pour les femmes du secteur non structuré et les employées de maison. Par ailleurs, l’absence de garderies d’enfants et le harcèlement sexuel viennent aggraver encore les conditions de travail des femmes. Mme Tavares da Silva note que le Gouvernement espère, par sa politique de l’emploi, préparer l’indispensable législation du travail, mais elle voudrait savoir que d’autres moyens et, éventuellement, des mesures de discrimination positive seront adoptés pour venir à bout de problèmes d’une telle importance.

À propos de ce qui est dit dans le rapport concernant le fait que la faible participation des femmes aux activités récréatives et sportives et le peu de plaisir qu’elles y prennent seraient dus à des blocages d’ordre culturel et le fait que l’on donne aux garçons davantage de loisirs et d’espace pour jouer, Mme Tavares da Silva pense qu’il faut absolument que le Ministère de l’éducation et des sports agisse de manière à faire litière de l’idée qui veut que l’on élève les garçons et les filles dans des mondes différents et à présenter une image de leurs rôles dans les activités récréatives, d’autant que ce ministère met l’accent sur la lutte contre le sexisme.

M me Corti indique, à propos de l’article 11, que la main-d’œuvre de l’économie essentiellement agricole de l’Ouganda est, à 70 %, une main-d’œuvre de femmes, mais qu’il s’agit là d’un secteur qui n’est guère structuré. C’est pourquoi elle demande quelles mesures on envisage de prendre pour protéger toute cette main-d’œuvre. Elle voudrait savoir ce que sont les salaires dans le secteur non structuré et elle demande comment se situent les salaires des femmes par rapport à ceux des hommes, dans le secteur privé comme dans le secteur public. Y-a-t-il un salaire minimum garanti? Elle voudrait aussi des précisions concernant le fait que les divorcées ne se voient reconnaître que très peu de droits.

Sur la question de la santé, Mme Corti se demande comment, étant donné les drastiques réductions de credits prévus dans le budget pour la santé, l’Ouganda a l’intention de s’y prendre pour continuer à faire baisser le taux de prévalence du VIH/sida.

M me Bakoru (Ouganda) veut rassurer le Comité quant aux réductions de crédits prévus pour la santé, dont elle dit que cela n’aura pas d’incidences sur la poursuite de la tendance positive de la lutte contre la propagation du VIH/sida du fait que l’Ouganda n’a pas restreint sa campagne au secteur de la santé. Le problème a été abordé d’un point de vue social, économique et politique et le portefeuille de chaque ministère comprend un élément consacré à la propagation de la maladie. La situation est particulièrement encourageante du fait que les jeunes Ougandais acceptent de se soumettre à des tests et d’être prudents dans leurs relations sexuelles.

En réponse à la question de Mme Corti, Mme Bakoru dit qu’il n’y a pas de salaire minimum en Ouganda. Toutefois, le Gouvernement a recherché l’avis d’autres pays sur la question. Sa nouvelle démarche prévoit l’institution, entre employeurs et employés, d’un accord bipartite fondé sur des principes directeurs aux termes duquel les travailleurs ont toute latitude pour négocier leurs salaires avec leurs employeurs. Cet accord entre partenaires sociaux permettra aux deux parties de concevoir des instruments et des lignes d’action bénéfiques aux deux côtés de l’équation.

En ce qui concerne les heures de travail, Mme Bakoru dit qu’il n’est pas réaliste de dire que les femmes peuvent faire jusqu’à 18 heures de travail dans les champs parce que le nombre d’heures où il fait assez jour pour travailler dehors est limité et que le manque d’électricité dans un grand nombre de zones rurales rend impossible le travail de nuit.

Dans le but de protéger la population active, des organisations non gouvernementales ont engagé un processus de documentation dans le cadre duquel ont été recueillies des statistiques sur la présence des femmes dans le secteur public. D’autres études sont attendues sur leur situation dans le secteur privé et le secteur non structuré. Des femmes s’emploient, sous la direction d’un personnel formé à cet effet, à recueillir des données de recherche dans les langues locales.

En ce qui concerne les stéréotypes quant aux activités récréatives de l’un et de l’autre sexe, Mme Bakoru dit ne pas très bien comprendre dans quelle mesure certaines activités ont été jugées féminines ou masculines. Les femmes du nord ont la réputation d’être sportives et c’est un fait généralement admis que les femmes ont plus d’énergie que les hommes. Force est toutefois de reconnaître que l’on a tendance, dans les premières années de l’enfance, à donner aux filles des jouets et à les tourner vers des activités qui ont à voir avec les travaux du ménage et les soins aux bébés.

Il est certes incontestable que le harcèlement sexuel au travail ne se limite pas à des cas isolés et c’est là quelque chose de particulièrement navrant quand on sait que cette pratique est courante jusque dans le ministère chargé de promouvoir la lutte contre le sexisme. Une telle situation appelle une attention urgente à tous les niveaux.

Les heures de travail sont les mêmes pour les hommes et pour les femmes. Les membres du Comité ont raison de dire qu’il faut mettre en place des filets de sécurité sociale et qu’hommes et femmes devraient pouvoir entrer sur le marché du travail sur un pied d’égalité. L’Ouganda n’est pas un pays très pauvre; en fait, il est riche en ressources minérales et naturelles. Une succession de régimes qui ont poursuivi des politiques et une gestion aberrantes ont réduit le pays dans l’état ou il se trouve actuellement. Les orientations nationales sont à revoir et on espère que l’arrivée d’une nouvelle équipe dirigeante dans le cadre de l’Union africaine aura des effets positifs.

Le pourcentage d’utilisation des services de planification familiale est passé de 1,5 % à 38 %. Le taux élevé de fécondité de l’Ouganda n’est pas dû à un manque d’accès à la planification familiale, mais plutôt à cette idée profondément ancrée dans les mentalités qu’avoir beaucoup d’enfants, c’est se garantir sécurité et bien-être. Le gouvernement va s’efforcer de promouvoir une prise de conscience des conséquences fâcheuses que cela a sur l’économie ainsi que des risques que comportent les grossesses répétées. L’avortement est illégal sauf dans le cas où il y a viol avéré ou dans le cas où l’opération est nécessaire pour protéger la santé de la femme. L’influence de la religion est forte et un large consensus sera nécessaire pour arriver à dépénaliser l’avortement.

Les Youth Entrepreneurship Schemes (YES) proposent aux jeunes diplômés une aide sous forme de microfinancement. Les femmes ont pu en bénéficier grâce à la solide réputation qu’elles se sont bâties en matière de remboursement des prêts.

Le développement et le progrès de tout pays dépendent de son investissement en ressources humaines. Formation en cours d’emploi et évaluation constante des besoins d’éducation permettront d’avoir une main-d’œuvre qualifiée et en phase avec l’évolution des techniques.

En 1997, le gouvernement a mis en place un programme d’éducation primaire pour tous en vertu duquel quatre enfants par famille sont exemptés du paiement des frais de scolarité. De ce fait, le nombre d’enfants du primaire est passé de 2 à 6 millions. Il s’agit maintenant de construire de nouvelles salles de classe, d’améliorer le taux d’encadrement, lequel atteint, dans certaines régions, 1 pour 100, et d’améliorer la qualité de l’enseignement primaire. Plus tard viendra l’élargissement de l’accès au secondaire par l’attribution de bourses d’études. L’action engagée dans le domaine de l’éducation et ailleurs a été fortement contrariée par les ravages causés au pays par l’épidémie de VIH/sida. Il y a actuellement environ 2,5 millions d’orphelins du sida. Il n’y a pas d’allocations familiales en Ouganda, mais les allocations budgétaires de sécurité sociale sont en augmentation et il est prévu d’accroître l’aide aux catégories de population vulnérables, ce que sont, notamment, les femmes et les enfants.

M me Feng Cui dit que le Gouvernement ougandais est à féliciter des améliorations apportées à la situation des femmes des zones rurales, en particulier grâce aux très bons résultats de ses programmes d’éradication de la pauvreté. L’importance de la contribution de la population rurale à l’économie du pays donne d’autant plus d’importance à l’épuration de la politique agricole du gouvernement de tout sexisme. Mme Feng Cui demande quels sont les objectifs de la stratégie nationale pour les rurales, si un calendrier a été fixé pour leur réalisation, s’ils prévoient l’élimination des restrictions mises aux droits de propriété et de gestion foncières des femmes et s’ils assurent leur accès aux ressources et au crédit. Elle appelle l’attention sur le fait que, pour en finir avec une discrimination ancestrale contre les femmes en milieu rural, ce n’est pas seulement aux femmes, mais aussi aux hommes, qu’il faut apprendre ce que sont leurs droits d’êtres humains. Enfin, elle se dit préoccupée par le fait qu’alors que la loi relative aux administrations locales prévoit de réserver aux femmes un tiers des sièges des conseils municipaux, les femmes demeurent exclues des instances décisionnelles dans un certain nombre d’endroits.

M me Goonesekere, notant que le paiement d’une dot demeure pratique courante en Ouganda bien que cela soit interdit par la Constitution, dit que la réalisation de l’égalité de droits entre hommes et femmes dans les relations matrimoniales et familiales, de facto comme de jure, est affaire d’éducation. Les pays qui ont réussi à relever la condition de la femme et à réduire la prévalence de phénomènes aussi déplorables que les mariages d’enfants le doivent en partie à la mise en place de programmes dotés de fonds suffisants pour élargir l’accès des filles, non seulement au primaire, mais aussi au secondaire et au tertiaire.

La Présidente, prenant la parole en sa qualité d’expert, dit que le Gouvernement ougandais est à féliciter des résultats impressionnants qu’il a obtenus dans sa lutte contre le VIH/sida, mais elle se dit préoccupée par la persistance de pratiques traditionnelles comme la polygamie, le lévirat et la mutilation génitale féminine, qui risquent de réduire à néant les progrès réalisés. Le taux de mortalité maternelle élevé dû aux avortements clandestins est alarmant, c’est pourquoi elle demande instamment à l’État partie de renforcer ses programmes d’enseignement de l’aptitude à vivre et d’élargir l’accès aux méthodes de régulation des naissances, dont le taux d’utilisation n’est actuellement que de 30 %. Elle demande si les contraceptifs sont fournis gratuitement, si les méthodes modernes de contraception, comme les préservatifs, sont disponibles et si les femmes qui se font soigner dans un dispensaire pour cause de complications d’avortement sont passibles de sanctions.

La Présidente a été troublée d’apprendre que les soins hospitaliers sont devenus payants. Notant qu’un certain nombre de pays en développement ont pris une telle mesure dans le cadre de programmes de privatisation des hôpitaux préconisés par les institutions financières internationales, elle demande si tel est le cas en Ouganda et si des services comme la fourniture de l’eau et l’enlèvement des déchets continuent à être assurés gratuitement.

M me Zoe (Ouganda) dit que l’eau se paie dans les zones urbaines et périurbaines. Les hôpitaux ont commencé à faire payer les soins en 1989 afin de financer l’achat d’autres médicaments et fournitures médicales. Le Gouvernement s’y est toutefois opposé, de sorte que la gratuité a depuis été rétablie. Les contraceptifs, y compris les préservatifs masculins et féminins, sont gratuits, mais le taux d’utilisation des préservatifs féminins est faible. Dans un pays en grande partie catholique, la question de la légalisation de l’avortement est à aborder avec prudence. Il faut pour cela que s’établisse un dialogue franc et ouvert et doter les jeunes femmes du savoir-faire nécessaire pour éviter les grossesses non désirées. Malheureusement, la réduction des fonds fournis par le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) a privé le Gouvernement ougandais des ressources nécessaires pour ses programmes d’enseignement de l’aptitude à vivre. La propagation de l’épidémie de VIH/sida a découragé la pratique du lévirat, en particulier parce que de nombreuses femmes ne font plus mystère de leur séropositivité.

Le Gouvernement ougandais consacre 26 % de son budget à l’éducation, montrant ainsi l’importance qu’il attache à ce secteur. Le fait que les Ougandaises occupent maintenant des postes de responsabilité, y compris de vice-président, dit toute la valeur de l’instruction et représente un puissant incitatif pour les filles et leur famille. D’après des études que le Gouvernement ougandais a fait faire, la pratique du paiement d’une dot par les parents de la mariée est en voie de disparition. La commercialisation lui a fait perdre son sens et Mme Zoe pense, elle aussi, qu’il faut y mettre fin.

En ce qui concerne la participation des femmes à la vie politique, elle rappelle que son gouvernement a, par l’adoption, en 1993, du National Women’s Council Statute, créé des conseils de femmes pour donner aux femmes la possibilité de prendre part à l’élaboration des politiques et à leur application. En vertu d’une récente réforme législative, les présidentes des conseils de femmes de district deviennent automatiquement membres de leur conseil local de gestion des affaires. Dans l’examen du cadre constitutionnel et législatif actuellement en cours, examen qui ne fait habituellement intervenir que des hommes, on s’efforce d’inciter les femmes à faire connaître leurs vues et leurs préoccupations.

En ce qui concerne la question sur l’accès des femmes rurales au crédit, Mme Zoé dit qu’il est inhabituel de les voir gager des emprunts sur la propriété de terres. Son organisation a engagé des négociations pour permettre l’institution d’un régime de co-propriété foncière entre l’homme et la femme. Sur la question de l’éradication de la pauvreté, elle dit que le taux de pauvreté a certes été ramené à 26 pour cent en Ouganda, mais que ce pourcentage est toujours inacceptable du fait que les personnes qui vivent encore dans la pauvreté sont en majorité des femmes et des enfants. L’importance de la population rurale dans un pays agricole comme l’Ouganda y rend absolument indispensable l’exigence d’égalité des sexes. Cela dit, il est important aussi de pourvoir à l’éducation des filles et Mme Zoé redit l’attachement de son Gouvernement à cet objectif et, d’une manière générale, à celui d’émancipation de la femme.

Articles 15 et 16

M me Kwaku demande si le Gouvernement prévoit d’adopter des dispositions législatives à part sur la violence domestique.

M me Shin dit, à propos des dispositions de la loi relative à la promulgation du Code pénal portant reconnaissance du droit des femmes mariées à une pension de subsistance que ce pourrait être là une manière de faire prendre davantage conscience aux hommes de leur obligation de subvenir aux besoins de leur femme et de leurs enfants et elle demande si des poursuites ont été engagées au pénal ou par d’autres voies de droit pour faire appliquer ces dispositions.

M me Gonzalez se dit très préoccupée par la situation des femmes en Ouganda. Bien que des réformes législatives et des programmes soient en cours, les inégalités entre hommes et femmes persistent pour ce qui concerne l’accès à des ressources monétaires, ce qui a pour effet de contribuer à affaiblir la condition de la femme et qui est à l’origine d’une foule d’autres maux sociaux comme la violence domestique, le paiement d’une dot aux parents de la mariée, le déni de possibilités d’éducation des filles et les violations des droits fondamentaux de l’être humain à tous les niveaux de la société.

M me Goonesekere note que les tribunaux ougandais du travail appliquent les normes internationales en la matière et elle aimerait que le prochain rapport de l’Ouganda dise si les dispositions de la Convention sont appliquées de la même manière par les tribunaux ougandais de la famille. Elle pense que le Ministère de la parité des sexes, du travail et du développement social pourrait faciliter ce processus en travaillant avec le Ministère de la justice à rendre les juges plus conscients de la nécessité de se référer à la Convention dans leur interprétation du droit de la famille.

M me Schöpp-Schilling demande si le Gouvernement a l’intention de pourvoir à la ratification du Protocole facultatif et pense qu’étant donné l’intérêt que manifeste le Président pour les droits de la femme les conditions paraissent réunies pour tenter d’obtenir cette ratification durant la présente législature. Elle souhaite, par ailleurs, que les mesures appropriées soient prises pour obtenir la ratification de l’amendement apporté au premier paragraphe de l’article 20 de la Convention que l’Assemblée générale des Nations Unies vient d’adopter, amendement qui porte suppression de la limite du temps prévu pour les réunions du Comite.

M me Livingstone Raday, se référant à la question de l’écart entre la Constitution et le droit de la famille, note que le droit coutumier de la famille concernant la polygamie, l’adultère, la garde des enfants et le viol marital actuellement en vigueur paraît contrevenir à la Convention ainsi qu’à la Constitution de l’Ouganda. Perpétuant comme il fait un régime familial de type patriarcal, elle dit que le droit coutumier de la famille désavantage considérablement les femmes et est fortement impliqué dans la propagation de la pandémie de VIH/sida, à laquelle les femmes sont particulièrement exposées. Elle voudrait savoir si le Gouvernement envisage d’apporter des modifications à ce droit ou si on ne pourrait pas utiliser, comme moyen efficace d’en provoquer la réforme, la limitation des relations sexuelles avec une seule personne, point de vue partagé par 49 % de la population.

M me Bakoro (Ouganda) dit que l’écart entre la Constitution et le droit de la famille en Ouganda est, pour une large part, un legs du colonialisme; c’est seulement par un examen approfondi du code pénal et sa modification que l’on pourra arriver à le combler. Il faut absolument aussi élargir le consensus concernant la définition de la notion de viol marital.

L’Ouganda vient de ratifier le Protocole facultatif qui se rapporte à la Convention relative à l’implication des enfants dans les conflits armés et le Ministère de Mme Bakoro va coopérer avec les Ministères de la justice et des affaires étrangères en vue de faire ratifier le Protocole facultatif relatif à la CEDAW. Elle tient aussi à donner aux membres du Comite l’assurance qu’il sera fait part aux instances gouvernementales appropriées de leurs préoccupations concernant l’application de la Convention dans le domaine du droit de la famille.

Elle est tout à fait d’accord que c’est dans la famille que s’apprend le respect dû aux femmes et aux enfants et elle dit que d’ambitieux programmes psychosociaux sont nécessaires pour venir à bout des problèmes des nombreuses victimes de la violence dont l’Ouganda a été le théâtre pendant les trois dernières décennies.

En ce qui concerne le renforcement des dispositions du droit de la famille relatives au versement d’une pension de subsistance, Mme Bakoro dit que des actions ont bien été engagées au pénal contre les délinquants, mais que cela soulève un problème plus profond en ce sens que l’on ne saurait attendre une contribution de subsistance significative d’hommes qui ne gagent déjà pas assez pour échapper à la pauvreté.

La séance est levée à 17 h 30.