Observations finales concernant le cinquième rapport périodique de Singapour *

Le Comité a examiné le cinquième rapport périodique de Singapour (CEDAW/C/SGP/5) lors de ses 1534e et 1535e réunions, le 25 octobre 2017 (voir CEDAW/C/SR.1534 et 1535). La liste des points et questions soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/SGP/Q/5 et les réponses de Singapour figurent dans le document CEDAW/C/SGP/Q/5/Add.1.

A.Introduction

Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir soumis son cinquième rapport périodique et accueille avec intérêt son rapport de suivi (CEDAW/C/SGP/CO/4/Rev.1/Add.1) et ses réponses écrites à la liste de points et de questions soulevés par le groupe de travail d’avant-session. Il salue la présentation orale faite par la délégation ainsi que les éclaircissements apportés en réponse aux questions posées oralement par le Comité durant le dialogue.

Le Comité remercie l’État partie d’avoir envoyé une délégation importante et pluridisciplinaire, qui était dirigée par M. Mohammad Faishal Bin Ibrahim Khan Surattee, Secrétaire parlementaire auprès du Ministère du développement social et familial et du Ministère de l’éducation de Singapour. La délégation comprenait également des représentants du Ministère de la main-d’œuvre, du Bureau du Procureur général, du Ministère de l’intérieur, du Conseil religieux islamique de Singapour, du Ministère du développement social et familial et de la Mission permanente de Singapour auprès de l’Office des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève. Le Comité se félicite de l’échange de vues constructif et ouvert qu’ont eu la délégation et les membres du Comité.

B.Aspects positifs

Le Comité salue les progrès réalisés depuis l’examen, en 2011, du quatrième rapport périodique (CEDAW/C/SGP/CO/4/Rev.1) de l’État partie en ce qui concerne les réformes législatives, en particulier l’adoption de :

a)La loi portant modification de la Charte de la femme, en vertu de laquelle les femmes et les hommes mariés ou divorcés de moins de 21 ans peuvent demander des mesures de protection contre la violence familiale, pour eux-mêmes et leurs enfants, en 2016 ;

b)La loi sur la protection contre le harcèlement, qui renforce la protection contre le harcèlement sur le lieu de travail et en dehors, en 2014 ;

c)La loi sur la prévention de la traite des êtres humains, incriminant la traite des personnes, en particulier des femmes et des filles, à des fins d’exploitation sexuelle, d’exploitation par le travail ou de vente d’organes, en 2014 ;

d)La loi portant modification de la loi sur l’emploi, qui étend la protection de la maternité à toute la durée de la grossesse, en 2013 ;

e)La loi relative à la protection de l’administration de la justice, au titre de laquelle le non-respect d’une ordonnance de pension alimentaire est assimilé à un refus d’obtempérer, en 2016.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié les instruments internationaux suivants, ou d’y avoir adhéré, au cours de la période écoulée depuis l’examen du rapport précédent :

a)Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, en 2015 ;

b)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2013.

Le Comité note avec satisfaction les initiatives prises par l’État partie pour promouvoir l’égalité des sexes et protéger les droits des femmes, telles que l’instauration d’un congé de paternité payé de deux semaines, la création du Comité d’action sur la diversité pour remédier à la sous-représentation des femmes dans les conseils d’administration, l’augmentation du nombre d’établissements de garde d’enfants et de soins aux personnes âgées pour aider les familles, et l’adoption d’édits religieux destinés à assurer des revenus suffisants aux femmes musulmanes et personnes à leur charge en élargissant le choix des modalités de succession.

C.Parlement

Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif dans la pleine application de la Convention (voir la Déclaration sur les liens entre le Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes et les parlementaires, adoptée à sa quarante-cinquième session, en 2010). Il invite le Parlement à prendre, conformément à son mandat, les mesures nécessaires concernant la mise en œuvre des présentes observations finales d ’ ici à la présentation du prochain rapport au titre de la Convention.

D.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Réserves

Le Comité se félicite du retrait partiel des réserves de l’État partie à l’alinéa g) de l’article 2, au paragraphe 1 de l’article 11 et aux alinéas b), d) et g) du paragraphe 1 de l’article 16 de la Convention, ainsi que des mesures prises pour mettre sa législation en conformité avec les dispositions de cette dernière. Il note toutefois avec préoccupation les réserves restantes aux alinéas a), b), c), d), e) et f) de l’article 2, et aux alinéas a), c) et h) du paragraphe 1 et au paragraphe 2 de l’article 16, qui sont contraires à l’objet et au but de la Convention et à l’obligation de l’État partie de promouvoir et de protéger les droits de toutes les femmes, y compris celles qui appartiennent à des minorités religieuses. Il est en outre préoccupé par l’absence de mesures prises en vue de retirer ses réserves au paragraphe 2 de l’article 11 de la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie de démontrer son attachement à l ’ élimination de toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes en retirant ses réserves restantes aux articles 2, 11 et 16 selon un calendrier précis, de façon à garantir la pleine applicabilité de la Convention dans l ’ État partie.

Cadre constitutionnel et législatif

Le Comité note que l’État partie maintient sa position selon laquelle le principe de l’égalité de tous devant la loi est consacré au paragraphe 1 de l’article 12 de la Constitution, et qu’il englobe et implique le principe de non-discrimination. Il se redit néanmoins préoccupé par l’absence, dans la législation de l’État partie, d’une définition spécifique de la discrimination à l’égard des femmes conforme à l’article premier de la Convention, compte tenu, en particulier, de la décision de la Cour d’appel du 28 octobre 2014, selon laquelle la Constitution n’interdit la discrimination qu’aux motifs explicitement énumérés au paragraphe 2 de l’article 12, à savoir si elle est fondée sur la religion, la race, l’ascendance ou le lieu de naissance, excluant par conséquent l’interdiction de la discrimination fondée sur le sexe ou le genre.

Le Comité rappelle ses recommandations antérieures ( CEDAW/C/SGP/CO/3 , par. 14 et CEDAW/C/SGP/CO/4/Rev.1 , par. 12) et exhorte l ’ État partie à incorporer dans sa Constitution ou toute autre loi pertinente une définition et une interdiction de la discrimination à l ’ égard des femmes sous toutes ses formes, telle qu ’ énoncée à l ’ article premier de la Convention, englobant la discrimination directe et indirecte, dans les domaines public et privé, ainsi que les formes croisées de discrimination.

Mécanisme national de promotion de la femme

Le Comité se félicite de la création d’un comité interministériel dont le secrétariat est assuré par le Bureau chargé de l’épanouissement de la femme du Ministère du développement social et familial, qui a pour mission de coordonner l’application de la Convention dans l’État partie. Il est néanmoins préoccupé par le manque d’informations sur les mesures concrètes prises par le comité interministériel pour appliquer la Convention et les recommandations antérieures du Comité, et sur les mécanismes de contrôle mis en place pour suivre les progrès de cette application et veiller à ce que les lois, politiques et programmes de tous les ministères et organes législatifs soient élaborés et mis en œuvre dans un souci systématique d’égalité des sexes.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures concrètes nécessaires pour que son mécanisme national  :

a) Adopte, avec la participation active de la société civile, un plan d ’ action concret visant à mettre en œuvre la Convention et les recommandations du Comité afin de réaliser l ’ égalité des sexes de manière effective et complète et dans le respect des droits de l ’ homme  ;

b) Améliore la collecte de données ventilées par sexe, âge, appartenance ethnique et nationalité, afin de recenser les domaines précis dans lesquels les femmes continuent d ’ être sous-représentées ou désavantagées et d ’ évaluer l ’ effet des mesures adoptées  ;

c) Intègre systématiquement une démarche antisexiste dans l ’ élaboration et la mise en œuvre de l ’ ensemble des lois, politiques et programmes de tous les ministères et organes législatifs.

Institution nationale de défense des droits de l’homme

Le Comité déplore l’absence de progrès réalisés dans l’application de sa précédente recommandation relative à la création d’une institution nationale indépendante de défense des droits de l’homme dans un délai clairement défini, et demeure préoccupé par le fait qu’un organe gouvernemental comme le comité interministériel des droits de l’homme ne saurait remplacer une telle institution, compte tenu de son manque d’indépendance.

Le Comité recommande ( v oir CEDAW/C/SGP/CO/4/Rev.1 , par. 36 ) une nouvelle fois à l ’ État partie de créer, dans un délai clairement défini, une institution nationale indépendante de défense des droits de l ’ homme, conformément aux Principes de Paris, pourvue d ’ un vaste mandat de promotion et de défense des droits des femmes et de l ’ égalité des sexes.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité constate que l’État partie réaffirme qu’il n’a pas besoin de prendre de mesures temporaires spéciales, car il applique le principe de l’avancement au mérite et de l’égalité des chances pour les femmes et les hommes. Il est préoccupé par le fait que l’État partie a une compréhension limitée de la nature et de la signification des mesures temporaires spéciales visées par la Convention et qu’il affirme que de telles mesures sont inutiles et mal perçues par les femmes, en dépit de l’absence d’égalité réelle entre les femmes et les hommes dans plusieurs domaines de la Convention, notamment la vie publique et politique et l’emploi. Comme indiqué dans sa recommandation générale no 25 de 2004 sur les mesures temporaires spéciales, le Comité souligne que celles-ci sont prises aux fins de la réalisation de l’objectif particulier qui consiste à créer un environnement propice pour aboutir à l’égalité de résultats, et que le principe de l’avancement au mérite est compatible avec l’objectif des mesures temporaires spéciales, à savoir atteindre une représentation équilibrée des sexes.

Le Comité rappelle ses recommandations antérieures ( CEDAW/C/SGP/CO/3 , par. 20 et CEDAW/C/SGP/CO/4/Rev.1 , par. 20), et prie l ’ État partie  :

a) De sensibiliser toutes les autorités concernées à la notion de mesures temporaires spéciales qui figure au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention, telle que développée dans la recommandation générale n o 25 du Comité sur les mesures temporaires spéciales, de 2004, dans laquelle il est notamment précisé que ces mesures visent à accélérer la réalisation de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, et à encourager l’évolution structurelle, sociale et culturelle nécessaire pour éliminer les formes passées et présentes de discrimination à l’égard des femmes ;

b) De prendre des mesures temporaires spéciales, telles que visées par la recommandation générale n o 25 du Comité, de 2004, comme l’organisation de programmes de solidarité ou d’assistance, la promotion du recrutement, de l’embauche et de la promotion ciblés, la définition d’objectifs chiffrés assortis de délais et l’instauration de quotas dans les domaines où les femmes continuent d’être sous-représentées ou désavantagées, notamment dans la vie publique et politique et l’emploi.

Stéréotypes et pratiques discriminatoires

Le Comité se félicite des mesures adoptées par l’État partie pour encourager les pères à s’affranchir des rôles et stéréotypes traditionnels et à assumer davantage leurs responsabilités en tant que parents. Il reste toutefois préoccupé par la survivance de stéréotypes discriminatoires selon lesquels les femmes assument le rôle de parent-soignant principal, y compris à l’égard des personnes âgées, et par la persistance de la notion de « chef de famille », reflet d’une conception hiérarchique de la famille.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) De renforcer les mesures tendant à accroître la disponibilité et l ’ accessibilité de services professionnels d ’ aide à la personne pour permettre aux femmes d ’ accéder à d ’ autres rôles que celui d ’ aidante familiale et de lutter contre les stéréotypes discriminatoires sur les rôles des femmes et des hommes dans la famille et dans la société  ;

b) De supprimer la notion de « chef de famille » des politiques et des procédures de prise de décisions, comme l ’ a déjà recommandé le Comité ( CEDAW/C/SGP/CO/4/Rev.1 , par. 22 b) ) , et de continuer à prendre des initiatives tendant à instaurer des partenariats égalitaires et à promouvoir le partage des responsabilités au sein de la famille.

Violences sexistes à l’égard des femmes

Le Comité accueille avec satisfaction les mesures prises par l’État partie pour renforcer la protection juridique des femmes contre la violence sexiste, notamment la modification en 2016 de la Charte de la femme. Toutefois, il demeure préoccupé par :

a)L’absence de statistiques sur toutes les formes de violence sexiste à l’égard des femmes, ventilées par âge, nationalité et nature de la relation entre la victime et l’auteur des faits, sur le nombre de plaintes reçues, d’enquêtes diligentées, de poursuites engagées et de condamnations ainsi que sur les peines prononcées contre les responsables ;

b)Le fait que le nombre des cas signalés de violence sexiste à l’égard des femmes, en particulier de violence familiale et sexuelle, est bien en-dessous de la réalité en raison de la stigmatisation des victimes et de la méconnaissance du phénomène de la violence sexiste par la population en général ainsi que par les membres des forces de l’ordre ;

c)Le fait qu’aucune réforme législative n’a été engagée depuis le dernier examen du rapport en 2011 afin d’incriminer la violence familiale et le viol conjugal et de faire en sorte que la définition du viol englobe tout acte sexuel non consenti ;

d)La charge excessivement lourde de la preuve incombant à la femme mariée ou divorcée qui sollicite la délivrance d’une ordonnance de protection personnelle pour des raisons de violence conjugale ou familiale, et le fait que les femmes non mariées ne peuvent pas soumettre de demande d’ordonnance de protection personnelle pour violence au sein du couple ;

e)Le fait que les châtiments corporels sont encore autorisés par l’article 89 du Code pénal, l’article 64 de la Charte de la femme et les sections 27 (Agrément des foyers) et 24 (Foyer de l’État) du Règlement relatif aux enfants et aux jeunes.

Rappelant sa recommandation générale n o  35 (2017) sur la violence sexiste à l ’ égard des femmes, portant actualisation de la recommandation générale n o  19 (1992) sur la violence à l’égard des femmes, ainsi que les recommandations formulées dans ses précédentes observations finales ( CEDAW/C/SGP/CO/4/Rev.1 , par. 24), le Comité engage l’État partie à :

a) Recueillir systématiquement des données sur la violence sexiste à l ’ égard des femmes, ventilées par âge, nationalité et nature de la relation entre la victime et l ’ auteur des faits, sur le nombre de plaintes reçues pour ce type d ’ acte, d ’ enquêtes diligentées, de poursuites engagées et de condamnations ainsi que sur le type de peines prononcées contre les responsables  ;

b) Mettre en place des cours obligatoires et réguliers de formation continue destinés aux magistrats, aux avocats et aux membres des forces de l ’ ordre, y compris au personnel médico-légal, ainsi qu ’ aux législateurs et aux professionnels de la santé, afin de doter ces personnes des moyens d ’ appliquer rigoureusement les dispositions applicables de la législation pénale dans les affaires de violence sexiste à l ’ égard des femmes et de traiter les victimes d ’ une manière tenant compte des différences entre les sexes  ;

c) Réviser son Code pénal et son Code de procédure pénale afin d ’ ériger la violence familiale et le viol conjugal en infractions spécifiques et de faire en sorte que la définition du viol couvre tout acte sexuel non consenti  ;

d) Alléger la charge de la preuve incombant aux femmes mariées ou divorcées qui demandent la délivrance d ’ une ordonnance de protection personnelle, sachant que ces ordonnances ne constituent pas une décision de justice établissant la responsabilité pénale d ’ une personne mais qu ’ il s ’ agit de mesures temporaires visant à faire cesser des actes de violence  ;

e) Adopter des mesures afin que les femmes non mariées soient efficacement protégées contre la violence au sein du couple, notamment en élargissant le champ d ’ application des ordonnances de protection personnelle  ;

f) Réviser l ’ article 89 du Code pénal, l ’ article 64 de la Charte de la femme et les sections 27 (Agrément des foyers) et 24 (Foyer de l ’ État) du Règlement relatif aux enfants et aux jeunes afin d ’ interdire et d ’ éliminer les châtiments corporels infligés aux enfants, en particulier aux filles, dans tous les contextes.

Traite des personnes

Le Comité prend acte des efforts considérables déployés par l’État partie pour prévenir et combattre la traite des personnes, en particulier des femmes et des filles. Il demeure néanmoins préoccupé par le fait que l’État partie reste un pays de destination et de transit pour la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle et d’exploitation par le travail. Il est spécialement préoccupé par :

a)L’absence dans la loi relative à la prévention de la traite des personnes de définition des termes clefs liés à ce phénomène, dont le travail forcé, la tromperie et la contrainte, ce qui empêche les autorités de détecter efficacement les victimes et les responsables de la traite ;

b)Le fait que les victimes de la traite ne bénéficient pas de mesures suffisantes d’appui et de protection, notamment de possibilités de travail décent, et n’ont pas accès à des foyers d’accueil offrant des services adéquats ni à des services et des établissements de réadaptation physique et psychosociale ;

c)L’absence de législation régissant le commerce de fiancées étrangères, qui peut être lié à la traite des femmes et des filles.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) De modifier la loi sur la prévention de la traite des personnes de façon à la rendre pleinement conforme au Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants  ;

b) De continuer de renforcer les capacités des magistrats, des membres des forces de l ’ ordre et de la police des frontières, des travailleurs sociaux et du personnel médical en matière de détection et d ’ orientation précoces des victimes de la traite ainsi que dans le domaine des méthodes d ’ enquête tenant compte des différences entre les sexes  ;

c) De veiller à ce que les victimes de la traite bénéficient d ’ une protection et d ’ un soutien adaptés, notamment en créant des foyers spéciaux dotés de suffisamment de personnel qualifié pour répondre aux préoccupations et aux besoins particuliers des intéressées  ;

d) De faire en sorte que les trafiquants et les autres acteurs impliqués dans la traite soient efficacement identifiés, poursuivis et condamnés à des peines adéquates  ;

e) D ’ intensifier la coopération internationale, régionale et bilatérale avec les pays d ’ origine, de transit et de destination afin de prévenir la traite, notamment en échangeant des informations avec ces pays et en harmonisant avec eux les procédures juridiques utilisées pour poursuivre les trafiquants, en particulier avec les pays de la région.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité prend note des progrès accomplis en matière de représentation des femmes au Parlement ainsi que de l’élection en 2017 de la première Présidente de l’État partie. Il demeure toutefois préoccupé par le fait que les femmes qui se portent candidates font l’objet de clichés sexistes dans les médias et dans le monde politique et que les femmes continuent d’être sous-représentées à la tête des ministères ainsi que dans le système judiciaire, la police et la fonction diplomatique, en particulier aux postes décisionnels.

Rappelant sa précédente recommandation ( CEDAW/C/SGP/CO/4/Rev.1 , par. 28), le Comité engage l ’ État partie à  :

a) Adopter des lois et des politiques visant à promouvoir la pleine participation des femmes, sur un pied d ’ égalité avec les hommes, à la prise de décisions dans tous les domaines de la vie politique et publique, et d ’ adopter des mesures à cette fin, y compris des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à ses recommandations générales n o  25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales et n o  23 (1997) sur les femmes dans la vie politique et publique  ;

b) Multiplier les programmes de formation et de renforcement des capacités destinés aux femmes qui souhaitent entrer dans la vie politique ou dans la fonction publique et à continuer d ’ encourager les médias à veiller à ce que les candidats ou les représentants élus des deux sexes bénéficient de la même couverture, en particulier en période électorale  ;

c) Sensibiliser les hommes politiques, les journalistes, les chefs traditionnels et le grand public au fait qu ’ une participation pleine, libre et démocratique des femmes, dans des conditions d ’ égalité avec les hommes, à la vie politique et publique est indispensable si l ’ on veut effectivement appliquer la Convention et assurer la stabilité politique et le développement économique du pays.

Éducation

Le Comité félicite l’État partie des progrès accomplis dans l’éducation des filles et des femmes, dont témoignent leur fort taux d’alphabétisation et leur niveau élevé d’études. Il relève toutefois que les femmes demeurent sous-représentées dans les filières universitaires traditionnellement masculines, dont l’ingénierie, l’électronique et l’informatique. Il relève également avec préoccupation que l’éducation sexuelle dispensée dans les écoles publiques est fondée sur le principe de l’abstinence avant le mariage, et que peu d’informations sont diffusées sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, en particulier sur l’utilisation de la contraception et la prévention des infections sexuellement transmissibles. Le Comité est également préoccupé par le fait que cette approche restrictive engendre des stéréotypes négatifs et des attitudes discriminatoires en ce qui concerne la sexualité des adolescents.

Le Comité engage l ’ État partie à  :

a) Prendre des mesures pour encourager les filles à choisir des filières et des domaines d ’ étude inhabituels pour elles tels que l ’ ingénierie, l ’ électronique et l ’ informatique, ainsi que pour éliminer les stéréotypes hérités du passé et les obstacles structurels susceptibles de dissuader les filles de faire ce type d ’ études  ;

b) Modifier les programmes scolaires actuels afin qu ’ ils prévoient des cours de sensibilisation adaptés selon l ’ âge à la santé sexuelle et procréative, notamment aux comportements responsables en matière de sexualité et à l ’ importance des notions de consentement et de violence sexiste, et à la prévention des grossesses précoces et des maladies sexuellement transmissibles  ;

c) Lutter contre les stéréotypes négatifs et les attitudes discriminatoires en ce qui concerne la sexualité des adolescents.

Emploi

Le Comité prend note des initiatives prises par l’État partie pour aider les femmes à concilier vie professionnelle et vie privée, dont le programme WorkPro, qui prévoit des aides financières destinées à encourager les employeurs à proposer des aménagements des modalités de travail, les formules de congé parental, la création de nouvelles garderies et la possibilité pour les femmes non mariées de bénéficier d’un congé de maternité. Néanmoins, le Comité demeure préoccupé par :

a)La persistance de la ségrégation professionnelle verticale et horizontale tant dans le secteur public que dans le secteur privé ;

b)La persistance de l’écart de rémunération entre les sexes dans toutes les catégories professionnelles, sauf dans le domaine des services de secrétariat ;

c)La sous-représentation des femmes au sein des conseils d’administration même si elles ont un niveau élevé d’études et les qualifications professionnelles requises.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ adopter des mesures efficaces, notamment en offrant aux femmes une formation et en les faisant bénéficier de mesures d ’ incitation pour qu ’ elles travaillent dans des domaines traditionnellement masculins, afin de lutter contre la ségrégation professionnelle horizontale tant dans le secteur public que dans le secteur privé  ;

b) D ’ examiner systématiquement les obstacles à l ’ accès des femmes aux postes décisionnels dans le secteur public comme dans le secteur privé et d ’ adopter des mesures globales tenant compte des différences entre les sexes pour éliminer ces obstacles afin de combattre la ségrégation professionnelle verticale  ;

c) Réduire l ’ écart salarial entre hommes et femmes en revoyant régulièrement les salaires dans les secteurs où les femmes sont concentrées et en mettant en place des mécanismes efficaces de suivi et de réglementation de l ’ emploi et des pratiques de recrutement pour garantir que le principe de l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale soit respecté dans tous les secteurs  ;

d) Renforcer les mesures visant à favoriser la conciliation de la vie professionnelle avec la vie privée, notamment en allongeant la durée du congé de paternité, de façon à promouvoir le partage égal des responsabilités entre hommes et femmes, et en recueillant des données ventilées par sexe sur le recours aux aménagements des modalités de travail en vue de déterminer et d ’ accroître le nombre de femmes qui optent pour ces aménagements.

Harcèlement sexuel sur le lieu de travail

Le Comité note avec satisfaction l’adoption de la loi sur la prévention du harcèlement, en 2014, ainsi que des recommandations tripartites pour la prise en charge du harcèlement sur le lieu de travail, en 2015, l’objectif étant que les employeurs et les salariés soient mieux informés des recours prévus par la loi. Cependant, il reste préoccupé par le faible nombre d’ordonnances de protection demandées dans le cadre de la loi, en raison des coûts et des procédures contraignantes, et par le fait que les recommandations tripartites ne soient pas effectivement appliquées.

Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les victimes de harcèlement sexuel sur le lieu de travail aient accès à des procédures de plainte, des mesures de protection et des recours efficaces, notamment en examinant les facteurs qui entravent l ’ obtention des ordonnances de protection dans le cadre de la loi sur la prévention du harcèlement, et en veillant à ce que les recommandations tripartites pour la prise en charge du harcèlement sur le lieu de travail soient appliquées par tous les employeurs. Il lui recommande également de veiller à ce que toutes les plaintes donnent lieu à une enquête effective et à ce que les responsables soient poursuivis et dûment sanctionnés.

Autonomisation économique des femmes et incidences des politiques financières

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour éliminer la discrimination à l’égard des femmes dans plusieurs domaines de la vie économique, comme la modification, en 2010, de la loi sur l’impôt sur le revenu afin que les femmes mariées puissent bénéficier des exonérations fiscales. Il craint néanmoins que les politiques financières de l’État partie et ses règles en matière de publication d’informations et d’imposition applicables aux sociétés aient des incidences extraterritoriales néfastes sur la capacité d’autres États, en particulier ceux qui sont déjà à court de revenus, de mobiliser le maximum de ressources possible au profit de la réalisation des droits des femmes dans leur pays.

Conformément sa recommandation générale n o 28 (2010) concernant les obligations fondamentales des États parties découlant de l ’ article 2 de la Convention, le Comité invite l ’ État partie à réaliser des études indépendantes, participatives et périodiques des effets extraterritoriaux que ses politiques financières et ses règles en matière d ’ impôts sur les sociétés ont sur les droits des femmes et l ’ égalité réelle, en veillant à ce que ces évaluations soient menées de façon impartiale, et à publier la méthodologie utilisée et les conclusions obtenues.

Travailleuses domestiques migrantes

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour renforcer la protection des droits des travailleuses domestiques migrantes, notamment des modifications législatives visant à durcir les sanctions à l’égard des employeurs qui ne respectent pas les conditions du permis de travail, en contravention avec la loi sur l’emploi de main-d’œuvre étrangère. Il rappelle cependant ses préoccupations sur les points suivants :

a)La loi sur l’emploi, qui garantit les droits fondamentaux du travail sur des questions telles que les horaires de travail et la rémunération des congés de maladie et des congés annuels, ne s’applique pas aux employés de maison immigrés ;

b)Selon des allégations persistantes, bon nombre de travailleuses domestiques migrantes continuent d’être exploitées et maltraitées par leurs employeurs, et soumises à des pratiques comme le non-paiement du salaire, la privation d’aliments, l’absence de temps de repos suffisant, la confiscation d’articles personnels comme le téléphone mobile et le passeport, la restriction du droit de libre circulation, le refus de paiement des frais médicaux, ainsi que la violence sexuelle, physique, verbale et psychologique ;

c)Aucune mesure n’a été prise pour abroger la loi selon laquelle les travailleuses migrantes doivent se soumettre obligatoirement et régulièrement à des tests de grossesse et de dépistage des maladies sexuellement transmissibles, dont le VIH, et sont passibles d’expulsion en cas de résultat positif.

Rappelant ses recommandations antérieures ( CEDAW/C/SGP/CO/4/Rev.1 , par. 32 et CEDAW/C/SGP/CO/3 , par. 24), le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) De veiller à ce que le même niveau de protection et de prestations soit accordé aux employées de maison immigrées qu ’ aux autres travailleurs, particulièrement en ce qui concerne les congés officiels, la durée hebdomadaire maximum de travail et les journées de repos régulières, notamment en étendant l ’ application de la loi sur l ’ emploi aux employés de maison  ;

b) De réviser les critères autorisant les travailleuses domestiques migrantes à changer d ’ employeur, en particulier dans le cas où elles ont été victimes d ’ exploitation et de mauvais traitements, sans qu ’ elles soient tenues d ’ aider aux enquêtes ou de témoigner pour l ’ accusation  ;

c) D ’ abroger la loi selon laquelle les titulaires de permis de travail, y compris les travailleuses domestiques migrantes, doivent se soumettre régulièrement à des tests de grossesse et de dépistage des maladies sexuellement transmises, et sont passibles d ’ expulsion en cas de grossesse ou de diagnostic de VIH  ;

d) De ratifier la convention (n o  111) de l ’ Organisation internationale du Travail (OIT) concernant la discrimination (emploi et profession), de 1958, et la convention (n o  189) de l ’ OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques, de 2011.

Épouses étrangères

Le Comité salue l’adoption d’un permis de séjour de longue durée (Long Term Visit Pass Plus, LTVP+) en 2012, dont la période de validité est plus longue et qui permet aux conjoints étrangers de ressortissants singapouriens de travailler, après obtention d’une lettre de consentement du Ministère de la main-d’œuvre, et d’accéder aux prestations de santé. Le Comité reste cependant préoccupé par le fait que les critères d’obtention des divers titres de séjour, qui accordent chacun des droits variables, demeurent imprécis, ce qui peut entraîner un traitement arbitraire et discriminatoire. Il rappelle aussi ses préoccupations antérieures au sujet des critères imprécis et arbitraires d’obtention du statut de résident permanent par les conjoints étrangers, qui sont principalement des femmes − statut dont l’octroi continue d’être décidé au cas par cas.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ accorder le LTVP+, dont les titulaires ont le droit de travailler et d ’ accéder aux prestations de santé, à tous les conjoints étrangers de ressortissants singapouriens  ;

b) D ’ établir des critères précis pour l ’ obtention du statut de résident permanent et d ’ accorder celui-ci automatiquement à tous les conjoints étrangers qui satisfont auxdits critères.

Femmes âgées

Le Comité salue l’adoption de mesures d’aide aux personnes âgées telles que le plan d’aide en faveur des personnes âgées, qui accorde des allocations trimestrielles aux 30 % de résidents singapouriens les plus pauvres, et le train de mesures en faveur de la génération des pionniers, qui accorde une indemnité forfaitaire pour soins de santé aux personnes nées avant le 31 décembre 1949. Il note cependant avec préoccupation que ces initiatives sont limitées à un groupe déterminé de personnes âgées, et ne sont pas suffisantes pour répondre aux besoins spécifiques des femmes âgées, notamment en matière d’accès aux soins de santé. Le Comité note avec préoccupation que les femmes âgées, souvent, ne disposent pas d’une épargne suffisante pour vivre, en raison des écarts de rémunération par rapport aux hommes, du manque de perspectives d’emploi et du fait qu’elles se consacrent à donner des soins, et qu’elles sont donc contraintes de continuer de travailler après l’âge de la retraite dans des emplois sous-payés et sous-qualifiés. Il est aussi préoccupé par les informations selon lesquelles les femmes âgées seraient en butte à des stéréotypes.

Se référant à son observation générale n o 27 (2010) sur les femmes âgées et la protection de leurs droits fondamentaux, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) De recueillir, d ’ analyser et de diffuser des données ventilées par âge et par sexe, de façon à évaluer la situation des femmes âgées, notamment de celles qui appartiennent à des groupes minoritaires et de celles qui souffrent d ’ un handicap, en ce qui concerne, en particulier, la pauvreté, l ’ analphabétisme, la violence, le travail non rémunéré, y compris les soins aux personnes, l ’ accès aux soins de santé, le logement, les prestations sociales et économiques et l ’ emploi  ;

b) D ’ utiliser ces données pour formuler, suivre et évaluer les lois, les politiques et les programmes, et de veiller à ce que les politiques et les mesures ciblant les femmes âgées tiennent compte de leurs besoins spécifiques  ;

c) De lutter contre les stéréotypes discriminatoires sur le rôle des femmes âgées consistant à s ’ occuper des autres, et d ’ inciter davantage d ’ hommes à assumer une part plus grande de la responsabilité des soins aux personnes âgées.

Femmes lesbiennes, bisexuelles, transgenres et intersexuées

Le Comité note avec préoccupation que les femmes lesbiennes, bisexuelles, transgenres et intersexuées sont en butte à la discrimination dans différents domaines de la vie, et que leur situation est souvent aggravée par les politiques de l’État partie, y compris sa politique relative aux médias.

Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les femmes lesbiennes, bisexuelles, transgenres et intersexuées soient protégées efficacement contre toutes les formes de discrimination dans le droit et dans la pratique, notamment en menant des campagnes d ’ éducation et d ’ information pour lutter contre les stéréotypes discriminatoires, y compris dans ses politiques relatives aux médias.

Femmes et filles réfugiées, demandeuses d’asile et apatrides

S’il prend bonne note de la position de l’État partie selon laquelle, en tant que ville-État densément peuplée de superficie restreinte, celui-ci n’est pas en mesure d’accepter des réfugiés, le Comité reste préoccupé par l’absence de législation et de procédures nationales sur l’asile et le statut de réfugié, s’agissant notamment de garantir le respect du principe de non-refoulement, et par le fait que les réfugiés et les demandeurs d’asile restent en détention jusqu’à ce qu’une solution durable soit déterminée. Il est préoccupé également par l’absence d’information officielle sur le nombre d’apatrides dans l’État partie, et par l’absence de protection prévue par la loi pour faire en sorte que les enfants nés dans l’État partie qui ne peuvent pas acquérir une autre nationalité acquièrent automatiquement la nationalité singapourienne.

Se référant à sa recommandation générale n o  32 (2014) sur les femmes et les situations de réfugiés, d ’ asile, de nationalité et d ’ apatridie, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ établir une législation et des procédures nationales sur l ’ asile et le statut de réfugié, en conformité avec les normes internationales, qui garantissent également le principe de non-refoulement  ;

b) De publier des statistiques à jour sur le nombre d ’ apatrides dans l ’ État partie, ventilées par âge, sexe, origine ethnique et autres caractéristiques pertinentes, y compris la situation de résidence  ;

c) De réviser la loi pour faire en sorte que les enfants nés à Singapour qui ne peuvent pas acquérir une autre nationalité puissent acquérir automatiquement la nationalité singapourienne  ;

d) De ratifier la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et le Protocole de 1967 s ’ y rapportant  ;

e) De ratifier la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie.

Mariage et relations familiales

S’il note que l’État partie a entrepris de modifier la loi sur l’administration du droit islamique afin d’harmoniser celle-ci avec le droit civil et de garantir des pratiques religieuses progressistes, le Comité note avec préoccupation que l’État partie maintient ses réserves aux articles 2 et 16 au motif de la protection des droits des minorités. Il note aussi avec préoccupation que :

a)Pour les mariages civils, une fille âgée de moins de 18 ans peut se marier avec le consentement de ses parents et moyennant une autorisation de mariage spéciale du Ministère des affaires sociales et familiales ;

b)En vertu de la loi sur l’administration du droit islamique, les femmes ne peuvent pas se marier sans leur wali (parent masculin le plus proche), et un kadi (représentant religieux) peut officialiser le mariage d’une fille de moins de 18 ans ayant atteint la puberté ;

c)Les hommes musulmans peuvent épouser jusqu’à quatre femmes sans le consentement des épouses existantes ;

d)Les femmes musulmanes sont tenues de présenter des éléments de preuve recevables pour demander le divorce, et leur témoignage seul est insuffisant pour prouver les motifs de divorce, tandis que les hommes musulmans peuvent répudier leur épouse unilatéralement sans aucune condition ni raison ;

e)La loi sur l’administration du droit islamique favorise les bénéficiaires masculins en matière de succession ;

f)Les articles 90 et 91 de la loi sur l’administration du droit islamique réservent aux seuls hommes les postes et les emplois clefs au sein du Bureau d’enregistrement des mariages musulmans.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ entreprendre un examen complet de la loi sur l ’ administration du droit islamique, en tenant compte de l ’ expérience d ’ autres pays ayant des origines culturelles et des normes juridiques analogues, pour donner aux femmes les mêmes droits qu ’ aux hommes en matière de mariage, de divorce et d ’ héritage. Il recommande en particulier à l ’ État partie  :

a) De supprimer les exceptions permettant aux personnes de moins de 18 ans de se marier, s ’ agissant de mariages civils ou de mariages musulmans, et de demander le plein consentement des femmes pour tous les mariages  ;

b) D ’ intensifier ses efforts pour décourager et interdire la polygamie, conformément à ses recommandations générales n o 21 sur l ’ égalité dans le mariage et les rapports familiaux, de 1994, et n o 29 sur l’article 16 de la Convention (conséquences économiques du mariage, et des liens familiaux et de leur dissolution), de 2013, ainsi qu ’ au texte commun de sa recommandation générale n o 31 et de l ’ observation générale n° 18 du Comité des droits de l ’ enfant sur les pratiques préjudiciables, de 2014  ;

c) De faire en sorte que les femmes et les hommes aient les mêmes droits au divorce, s ’ agissant notamment des motifs de divorce et du niveau de preuve exigé, et d ’ abolir le droit des hommes musulmans au divorce unilatéral (talaq)  ;

d) De garantir l ’ égalité des droits des femmes dans toutes les questions d ’ héritage, et d ’ offrir le choix en matière contentieuse entre le régime de droit religieux et le régime de droit civil  ;

e) De modifier les articles 90 et 91 de la loi sur l ’ administration du droit islamique pour ouvrir aux femmes l ’ accès aux postes et aux emplois clefs du Bureau de l ’ enregistrement des mariages musulmans.

Protocole facultatif à la Convention

Le Comité encourage l’État partie à ratifier le Protocole facultatif à la Convention.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing dans l ’ action qu ’ il mène pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

Programme de développement durable à l’horizon 2030

Le Comité invite l ’ État partie à instaurer une égalité réelle entre les hommes et les femmes, conformément aux dispositions de la Convention, dans le cadre de la mise en œuvre du programme de développement durable à l ’ horizon 2030.

Diffusion

Le Comité invite l ’ État partie à veiller à ce que les présentes observations finales soient diffusées rapidement, dans la ou les langues officielles de l ’ État partie, auprès des institutions publiques compétentes à tous les niveaux (national, régional et local) et à ce qu ’ elles soient communiquées en particulier au Gouvernement, aux ministères, au Parlement et à la magistrature, afin qu ’ ils puissent y donner pleinement suite.

Ratification d’autres instruments

Le Comité note que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme contribuerait à promouvoir l ’ exercice effectif des droits individuels et des libertés fondamentales des femmes dans tous les aspects de la vie. Dès lors, le Comité encourage l ’ État partie à ratifier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention contre la torture, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, auxquels il n ’ est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité invite l ’ État partie à communiquer, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures qu ’ il aura prises pour mettre en œuvre les recommandations énoncées à l ’ alinéa b) du paragraphe 17 (mesures temporaires spéciales) et aux alinéas a) et b) du paragraphe 21 (collecte de données et formation sur la violence sexiste à l ’ égard des femmes) ci-dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son sixième rapport en novembre 2021, en veillant à ce qu ’ il soit remis dans les délais et porte sur l ’ ensemble de la période se terminant au moment de la présentation.

Le Comité invite l ’ État partie à se conformer aux directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, dont le document de base commun et les rapports correspondant à chaque instrument (voir HRI/GEN/2/Rev.6 , chapitre  I).