Trentième session

Compte rendu analytique de la 640e séance

Tenue au Siège, à New York, le mercredi 21 janvier 2004, à 15 heures

Présidente :Mme Acar

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties au titre de l’article 18 de la Convention (suite)

Cinquième rapport périodique de l’Allemagne (suite)

La séance est ouverte à 15 h 10.

Examen des rapports présentés par les États parties au titre de l’article 18 de la Convention (suite)

Cinquième rapport périodique de l’Allemagne (CEDAW/C/DEU/5; CEDAW/PSWG/2004/1/ CRP.1/Add.3 et CRP.2/Add.5)

1.Sur l’invitation de la Présidente, la délégation de l’Allemagne prend place à la table du Comité.

2.Mme Thienlenhaus (Allemagne), abordant les questions relatives à l’article 9 de la Convention, note que les statistiques sur la participation des femmes à la vie publique dans chaque Land individuel ne figurent pas dans le rapport, mais qu’il lui sera possible de les obtenir auprès du centre informatique pour les femmes à Berlin, où se trouve une base de données contenant l’information pertinente. Un nombre beaucoup moins élevé de femmes que d’hommes travaillent dans le secteur public, en particulier au sein du corps diplomatique. Cependant, l’engagement du Ministère allemand des affaires étrangères dans le cadre du quatrième Programme d’action communautaire sur l’égalité des chances entre les hommes et les femmes (1996-2000) en vue d’accroître le nombre de femmes diplomates a commencé à produire des résultats. En effet, les femmes représentent maintenant 50 % des nouveaux candidats et quatre femmes sont chefs de division adjoints. L’aspect mobilité des postes diplomatiques présente des difficultés tant pour les hommes que pour les femmes parce que leurs conjoints ne sont pas toujours prêts à sacrifier leur carrière.

3.Il est difficile de donner une idée précise de la participation des femmes dans les organes politiques, car la composition d’un certain nombre de ces organes est déterminée par le Gouvernement fédéral. Conformément à la loi fédérale sur les nominations dans les organes, lorsqu’un poste devient vacant dans un organe politique (comité administratif, consultatif ou de recherche, par exemple), le Gouvernement doit proposer deux candidats de compétence égale, des deux sexes, pour combler le poste vacant. Un complément d’information sur l’application de cette loi figure dans un rapport présenté au Bundestag. Enfin, en ce qui concerne l’importance accordée à l’intégration d’une perspective sexospécifique au niveau communautaire, elle signale que les commissaires à l’égalité dans les Länder sont chargés de prendre des mesures à cet égard. Une formation spécialisée est disponible.

4.Mme Ferrer Gómez rappelle que, dans ses observations finales et ses recommandations sur le rapport précédent de l’Allemagne, le Comité s’était déclaré préoccupé par la situation de l’emploi des femmes, en particulier par l’écart salarial entre les femmes et les hommes, le pourcentage élevé de femmes travaillant à temps partiel et le grand nombre de femmes au chômage, ce qui traduisait la persistance de la discrimination à l’égard des femmes sur le marché du travail. Malheureusement, ces problèmes ne semblent pas avoir été résolus. Il n’est toujours pas possible pour les femmes de concilier entièrement responsabilités familiales et responsabilités professionnelles et, malgré une augmentation du nombre de femmes travaillant à temps partiel durant la période considérée, il s’agit généralement d’un travail domestique et peu rémunéré. Les femmes travaillant à temps partiel ne peuvent envisager de cotiser à un régime de pension personnel et demeurent donc financièrement dépendantes de leurs époux. À cet égard, la représentante demande des précisions sur les avantages éventuels qu’apporteraient aux femmes les deux lois relatives aux services modernes du marché du travail adoptées en janvier 2003. Enfin, elle s’inquiète également des conséquences qu’aura sur les femmes le nouveau système d’assurance chômage qui entrera en vigueur en 2005 : l’obligation d’accepter le premier emploi offert limitera gravement leurs perspectives d’emploi.

5.Mme Khan, tout en reconnaissant la diminution généralisée du chômage survenue durant la période considérée, fait observer que les femmes étaient toujours défavorisées. Même si davantage de femmes travaillent, en tant que groupe, leur situation ne s’est pas vraiment améliorée, car la plupart des nouveaux emplois sont des emplois à temps partiel. Comme la rareté des emplois à plein temps pose un problème en Allemagne, elle se demande si des mesures politiques, en particulier des mesures spéciales temporaires en vertu de l’article 4 de la Convention, ont été prises pour améliorer l’accès des femmes aux emplois à plein temps. Comme il semble que les femmes choisissent de travailler à temps partiel à cause de leurs responsabilités familiales, elle voudrait savoir si des mesures ont été prises pour accroître la disponibilité de garderies abordables et de bonne qualité, ainsi que pour sensibiliser les hommes à la possibilité de prendre un congé de paternité. Le Comité apprécierait également toute information sur les mesures prises pour réduire l’écart salarial entre les femmes et les hommes.

6.En ce qui concerne la situation des travailleuses migrantes, elle a cru comprendre que leur permis de séjour était subordonné à leur permis de travail et que si leur situation d’emploi changeait, elles étaient obligées de faire une nouvelle demande de permis. Cet état de fait était inquiétant, car il pouvait éventuellement encourager l’exploitation. Enfin, elle se demande si les dispositions de la loi fondamentale de la République fédérale d’Allemagne s’appliquaient à tous les contrats de travail, y compris ceux conclus entre des parties privées, et elle aimerait tout particulièrement savoir si les travailleuses domestiques employées dans des foyers de diplomates étaient couvertes par ces dispositions.

7.Mme Tavares da Silva se demande si le Gouvernement allemand avait envisagé l’introduction de mesures complémentaires contraignantes pour éliminer la discrimination sur le marché du travail dans le cas où les résultats obtenus suite à l’accord visant à promouvoir l’égalité des chances des femmes et des hommes dans l’industrie privée ne seraient pas satisfaisants. En ce qui concerne les réformes profondes entreprises par le Gouvernement fédéral afin de relancer l’économie et de moderniser les systèmes sociaux, elle se demande dans quelle mesure la législature a tenu compte de l’impact possible de ces réformes sur la population féminine lors de la rédaction de la législation pertinente. Enfin, elle fait observer que la législation de l’Union européenne et les traités sont souvent cités comme base juridique des politiques et programmes sur l’égalité des sexes en Allemagne et se demande pourquoi on n’invoquait pas plus souvent les dispositions de la Convention.

8.Mme Shin, se référant au nombre croissant de femmes travaillant à temps partiel ou occupant les soi-disant «mini» emplois, demande si le Gouvernement allemand était pleinement conscient de l’impact négatif de cette tendance sur les régimes de pension des femmes. Ces conséquences ont-elles été évaluées, et des mesures ont-elles été envisagées pour obvier à la dépendance des femmes par rapport à leurs conjoints? Dans la mesure où le partage des soins aux enfants est concerné, elle estime que des activités de sensibilisation seules ne sont pas suffisantes. Des incitations financières sont nécessaires pour encourager les pères à prendre un congé parental. La délégation devrait indiquer si des mesures ont été prises à cet égard.

9.Mme Saiga dit qu’elle n’est pas certaine d’avoir compris le concept du congé parental conjoint et demande si, dans le cadre de ce système, les deux parents étaient en mesure de prendre un congé en même temps et, dans l’affirmative, de quelle façon les prestations étaient-elles versées. Le Comité demande également des précisions sur les prix accordés aux entreprises qui mettent en œuvre des mesures favorables à la famille.

10.M. Flinterman dit qu’il souhaiterait obtenir une indication de la pertinence de l’intégration de la perspective sexospécifique dans le contexte de la restructuration de l’État providence.

11.Mme Riemann-Hanewinckel (Allemagne) signale, en ce qui concerne l’emploi des femmes, qu’une enquête a démontré que les salaires des femmes et des hommes étaient plus ou moins égaux jusqu’à l’âge de 30 ans. L’écart de salaires devient plus évident lorsque les femmes commencent à avoir des enfants et cessent de travailler pour en prendre soin. Au sujet du travail à temps partiel, elle reconnaît que les hommes et les femmes jouissent maintenant d’un droit statutaire au travail à temps partiel, mais elle fait remarquer que les femmes exercent ce droit plus souvent que les hommes, bien que leurs motifs semblent différents : dans les Länder, à l’ouest, les prestations pour les soins aux enfants de moins de 3 ans sont insuffisantes, tandis que dans l’est du pays, l’absence d’emplois à plein temps force les femmes à accepter un emploi à temps partiel.

12.Les modifications apportées à la loi fédérale sur l’allocation pour l’éducation des enfants prévoient que les deux parents sont maintenant en mesure de prendre simultanément un congé afin d’élever leurs enfants. Ils ont également le droit d’exercer un emploi à temps partiel et, selon le revenu de la famille, ils peuvent obtenir des allocations pour l’éducation des enfants. Il faut espérer que ces incitations économiques encourageront plus de pères à prolonger leur congé parental. Elle fait observer cependant que ces derniers sont souvent réticents à quitter leur emploi parce les salaires dans le secteur privé, qui sont déterminés dans le cadre d’une convention collective, un processus auquel le Gouvernement fédéral ne participe pas, sont généralement plus élevés pour les hommes que pour les femmes.

13.Mme Thielenhaus (Allemagne) reconnaît que, bien que le principe à travail égal, salaire égal soit consacré dans la législation allemande, il n’était pas toujours observé dans les faits. Le Gouvernement fédéral a quelque influence sur le processus de convention collective et, à cet égard, il a préparé un ensemble de lignes directrices sur le salaire égal dans le cadre de stratégies utilisées par d’autres États membres de l’Union européenne. Il a également élaboré des recommandations destinées aux participants au processus de convention collective et passé en revue les traitements des employés du secteur public en vue d’éliminer toute forme de discrimination voilée. Les résultats de cette enquête seront disponibles le 31 janvier. En outre, les syndicats ont établi une liste de contrôle pour le processus de convention collective afin d’empêcher la discrimination fondée sur le sexe.

14.Pour ce qui est de l’emploi à temps partiel et des «minis» emplois, elle signale que la situation en Allemagne est différente d’est en ouest : 50 % moins de femmes travaillent à temps partiel dans l’est que dans l’ouest. En 2003, le Gouvernement fédéral a décidé de réformer le système existant des «minis» et «midis» emplois. Selon le nouveau système, les femmes occupant ce type d’emploi ont accès à une protection de sécurité sociale telle que des indemnités de maladie, et sont exemptées d’impôt sur le revenu si ce dernier est inférieur à 400 euros par mois. Leurs employeurs doivent contribuer à un régime de sécurité sociale et de pension pour leur compte. Une évaluation du Gouvernement fédéral du nouveau système des «minis» et «midis» emplois, effectuée en novembre 2003, a révélé des tendances à la fois positives et négatives : 400 000 nouveaux emplois ont été créés, mais près de 500 000 emplois à temps plein existants ont été convertis en «minis» emplois, en particulier dans l’industrie hôtelière. Dans la mesure où les emplois domestiques sont concernés, elle affirme que, dans le passé, les femmes étaient nombreuses à occuper ces emplois de façon illégale. Toutefois, des mesures ont été prises pour corriger cette situation, notamment, par l’introduction d’un allégement fiscal pour les employeurs privés et la révision des dispositions régissant l’aide domestique dans le but de pénaliser l’omission d’enregistrer les employés domestiques.

15.L’ensemble des lois et des programmes ont dû être revus pour y intégrer la perspective sexospécifique. Des chercheurs compétents ont été nommés pour effectuer ces révisions et veiller à ce que la sexospécificité soit prise en compte dans les politiques gouvernementales. Malheureusement, ce processus n’a réussi que partiellement, étant donné que bon nombre de réformes et programmes sont politiquement sensibles et exigent des négociations complexes entre le Gouvernement et le Conseil fédéral. Dans ce cas, le consensus politique a souvent priorité sur les questions techniques.

16.Le fait que les femmes ayant des enfants ne soient plus contraintes de travailler et soient exemptées de l’obligation de la mobilité géographique dans la recherche d’emploi est un exemple de succès. Une femme dont les enfants sont âgés de moins de 3 ans n’est plus forcée de travailler lorsque des services de garde adéquats ne sont pas disponibles. Les femmes ayant des enfants mais qui souhaitent travailler, ont la possibilité de le faire. Si elles estiment pouvoir travailler, par exemple, trois heures par jour, elles ont droit à l’assistance d’un travailleur social dans la recherche d’emploi, ainsi qu’à des services de garde appropriés. Ces mesures s’appliquent à toutes les femmes, y compris les femmes migrantes et les familles monoparentales, et visent à éliminer les obstacles passés à l’intégration des femmes sur le marché du travail.

17.Le Ministère fédéral de la condition féminine a également mis au point des outils sexospécifiques pour évaluer des domaines précis tels que l’éducation et la formation continue, et envisage des études dans d’autres domaines, notamment le travail à temps partiel. Elle conteste le fait que les femmes en Allemagne font face à une discrimination massive dans l’emploi et renvoie les membres du Comité aux mesures décrites dans le rapport concernant la réforme du Livre III du Code social. Le Service fédéral de l’emploi a notamment dépassé son objectif de 40 % en ce qui concerne l’intégration équilibrée des femmes sur le marché du travail, atteignant ainsi un taux de 44 %. La participation des femmes a augmenté malgré un marché du travail particulièrement anémique, et la parité entre les sexes sur le marché du travail continuera de faire l’objet d’un suivi annuel.

18.Elle reconnaît que, dans un système à cotisations déterminées, le travail à temps partiel entraîne une réduction de la pension d’une femme. Des demandes de pensions statutaires démontrent en fait que les hommes reçoivent approximativement le double du montant que reçoivent les femmes. Elle souligne, toutefois, que les réformes des pensions visent à garantir un revenu minimum de base équivalent au moins à celui de l’aide sociale. Cela représente un progrès pour les femmes qui ont un faible revenu de pension. Les chiffres actuels indiquent que le revenu total provenant de pensions statutaires et autres sources pour les hommes et les femmes est d’environ 1 100 euros et 1 000 euros, respectivement. De plus, il sera possible à l’avenir pour un homme de transférer une partie de son revenu de pension à sa femme, ce qui garantira encore davantage le revenu des femmes âgées.

19.En ce qui concerne la situation des domestiques travaillant dans des ménages de diplomates, elle dit que ces travailleuses ont bien sûr le droit d’intenter un recours devant les tribunaux si elles sont exploitées ou maltraitées, mais comme ces ménages jouissent de l’immunité diplomatique, le Gouvernement ne peut pas faire grand-chose à cet égard. À sa connaissance, il n’est pas nécessaire pour les femmes migrantes qui changent d’emploi de faire une nouvelle demande de permis de séjour ou de travail. Leur statut juridique n’est pas subordonné à un emploi en particulier.

20.En ce qui concerne l’évaluation des résultats de l’Accord visant à promouvoir l’égalité des chances entre les femmes et les hommes dans l’industrie privée, elle dit qu’une révision a été entreprise et complétée et sera publiée la semaine prochaine. L’étude qui a duré deux ans portait sur des projets concernant les entreprises qui mettent en œuvre des mesures favorables à la famille, des mesures visant à concilier les responsabilités familiales et les responsabilités professionnelles, l’encouragement des femmes à explorer différentes carrières et la promotion de l’égalité des chances pour les femmes. Ces révisions seront effectuées périodiquement à l’avenir. La Fédération allemande des syndicats a entrepris un examen semblable qui a abouti à des résultats sensiblement identiques. Une tendance semble se dessiner au sein de quelques entreprises qui font beaucoup d’efforts pour faciliter l’emploi des femmes, par exemple, en permettant des horaires de travail assouplis, le travail à domicile et l’encadrement, mais toujours très peu de possibilités de services de garde. Toutes ces informations seront fournies au Comité dès que possible.

21.Mme Morvai s’inquiète des estimations selon lesquelles plus de 200 000 femmes seraient impliquées dans la prostitution en Allemagne, ce qui laisse entendre qu’il y aurait des millions de clients, dont la plupart seraient probablement mariés. Elle se demande quel en est l’effet sur les familles de ces hommes et exprime également son inquiétude pour les femmes impliquées dans la prostitution qui s’exposent elles-mêmes aux infections et aux maladies. La délégation devrait indiquer s’il y a des campagnes de santé publique pour sensibiliser les clients potentiels au fait que la prostitution est une attaque à la dignité humaine.

22.Vu l’obligation pour l’État partie en vertu de l’article 12 de la Convention de fournir des soins de santé appropriés aux femmes, le Comité souhaite savoir dans quelle mesure une formation était offerte aux professionnels de la santé dans des domaines tels que la violence conjugale et pour garantir aux femmes un accès adéquat à des soins de santé appropriés. Les professionnels de la santé devraient également être sensibilisés aux effets négatifs, tant physiques que psychologiques, de la prostitution des femmes et recevoir une formation appropriée.

23.Mme Patten se dit préoccupée par le fait que les femmes soient plus susceptibles d’abandonner un emploi à plein temps pour un emploi à temps partiel, non pas pour faire valoir leur droit mais plutôt par nécessité. Cette tendance risque de renforcer le stéréotype professionnel en fonction du sexe sur le marché du travail, où les femmes tendent à avoir des emplois peu rémunérés, des horaires abrégés et des emplois non techniques comportant peu de responsabilités. Certes, il existe des études sur la situation, mais elle se demande s’il existe aussi une stratégie qui vise à traiter ce problème et à faire davantage pour l’amélioration de la situation de l’emploi des femmes.

24.Une résistance soutenue de la part des hommes à se prévaloir de leurs droits au congé parental a eu un effet négatif sur les possibilités d’emploi et le revenu des femmes. Davantage d’efforts doivent être déployés dans les secteurs public et privé, en coopération avec les syndicats, pour encourager les hommes à partager leurs tâches et profiter pleinement de leur congé parental. En ce qui concerne la rémunération inéquitable entre les hommes et les femmes, elle prend acte de l’explication de la délégation selon laquelle ces inégalités sont souvent le résultat des conventions collectives. Il existe bien un code de pratique sur le salaire égal, mais il n’est pas contraignant. Elle se demande donc si cette situation a été examinée et si d’autres mesures ont été envisagées pour garantir une rémunération équitable aux femmes.

25.Mme Šimonović précise que tout en reconnaissant qu’il puisse y avoir une certaine résistance à fournir des statistiques basées notamment sur la race, l’appartenance ethnique et autres pour des raisons historiques, ces mesures statistiques sont courantes et largement acceptées. Elle aimerait par conséquent obtenir davantage de données ventilées par sexe ainsi que des données sur les minorités nationales, y compris les Sinti et les Roma. Des précisions sur l’incidence du mariage précoce et le taux d’abandon scolaire chez les fillettes Sinti et Roma en Allemagne seraient également appréciées. Le Comité souhaite aussi savoir si le Gouvernement a pris des mesures visant à réduire le taux d’abandon scolaire et de mariage précoce chez ces populations et à mettre sur pied des programmes destinés aux fillettes de ces groupes.

26.Mme Manalo rappelle que dans ses observations finales sur le quatrième rapport périodique de l’Allemagne, le Comité a demandé des études approfondies sur la situation des femmes et des filles et sur les mesures d’assistance destinées aux femmes dans les domaines de l’éducation, de la formation, de l’emploi, de la santé et de la protection sociale. Ces études devraient également comprendre les résidents légaux et illégaux du pays. Cette information n’a pas été fournie et devrait figurer dans le prochain rapport périodique. Dans ce contexte, elle souligne la nécessité de faire participer les organisations non gouvernementales et toutes les parties concernées à la préparation des rapports.

27.Selon Mme Gaspard, les femmes sont encore sous-représentées parmi les enseignants et les chercheurs universitaires, en particulier aux niveaux les plus élevés, où elles ne représentent que 7,1 % du total. Ce pourcentage est particulièrement inquiétant car ces femmes pourraient servir de modèles aux filles et aux étudiantes. L’État qui présente le rapport devrait fournir plus de données sur la représentation des femmes au niveau universitaire, classées par discipline, et indiquer s’il envisage des mesures concrètes, y compris des mesures spéciales temporaires, pour remédier à cette situation.

28.Elle note des différences dans les niveaux de travail à temps partiel entre les femmes de l’est et de l’ouest de l’Allemagne. Bien que la délégation ait laissé entendre que de nombreuses femmes préféraient le travail à temps partiel, elle constate, selon sa propre expérience par rapport à d’autres pays, que les femmes dans la plupart des cas aimeraient mieux un travail à plein temps mais n’en trouvent pas. Elle se demande si d’autres statistiques sont disponibles sur la question de savoir si les femmes travaillent à temps partiel par choix ou par nécessité. Le Comité se préoccupe également de l’effet que peuvent avoir sur les pensions des femmes les niveaux élevés de travail à temps partiel et les interruptions dans leur vie active, par exemple, pour une grossesse ou l’éducation des enfants. Elle demande donc s’il existe un mécanisme pour le suivi de la situation des femmes âgées dont plusieurs sont susceptibles de vivre dans la pauvreté.

29.Mme Riemann-Hanewinckel (Allemagne) dit qu’en ce qui concerne la question de la prostitution, le Gouvernement n’a pas l’intention d’interdire la prostitution parce que ce genre d’initiative n’a jamais réussi. Elle souligne que les femmes qui se livrent à la prostitution le font par choix, sont reconnues par la loi comme travailleuses autonomes ou salariées, font partie d’une association professionnelle, ont accès aux soins de santé et aux conseils professionnels et doivent périodiquement passer un examen médical. Une grande majorité de la population en Allemagne appuie la légalisation de la prostitution. Il s’agit bien entendu d’une situation bien différente de la situation internationale en ce qui concerne le problème du trafic des femmes, où elles sont forcées de se prostituer. Ces femmes ont besoin de soutien et de protection afin d’échapper à leur destin, et son gouvernement, de concert avec la communauté internationale, déploie tous les efforts possibles pour éliminer ces pratiques.

30.Mme Augstein (Allemagne) dit que le Gouvernement a adopté des mesures visant à créer un milieu de travail qui n’expose pas les prostituées à la criminalité et qui leur offre une couverture médicale grâce au système d’assurance santé d’État.

31.Mme Thielenhaus (Allemagne) dit que les résultats de l’étude sur les immigrantes n’ont été communiqués que tout récemment. Un rapport détaillé, s’étalant sur une période de deux ans, fait état des questions relatives aux préoccupations quotidiennes des jeunes femmes, telles que la vie de famille, la religion, l’estime de soi et les systèmes d’appui, ainsi que des questions concernant les personnes plus âgées. Une analyse des résultats de l’étude sera présentée prochainement au Comité. Le Bureau fédéral de placement porte un vif intérêt à l’intégration des immigrantes sur le marché du travail, et ses initiatives devraient améliorer la situation dans ce domaine.

32.L’augmentation du nombre d’emplois à temps partiel est due en grande partie au fait que la participation générale des femmes au marché du travail a augmenté considérablement au cours de la dernière décennie et, dans certains cas, le travail à temps partiel est perçu comme la première étape de l’accès à un emploi à plein temps. Des statistiques officielles ont été compilées sur l’impact du travail à temps partiel. En ce qui concerne la pauvreté, la situation s’est améliorée pour les femmes âgées, tandis que la proportion des ménages dont les mères sont chefs de famille ayant besoin d’une assistance sociale a en fait augmenté. Les prestations spéciales comprennent les allocations pour enfant à charge, les allégements fiscaux, le placement prioritaire dans les garderies et les centres de formation à l’emploi. Enfin, la proportion des professeurs féminins dans les établissements d’enseignement supérieur s’élève à 11,9 % et celle des enseignantes est passée à 32,4 % en 2002, à la suite d’un certain nombre de mesures d’incitation à la recherche. Plusieurs universités et instituts de recherche ont pris part à des études sur la femme et d’autres détails seront fournis dans des rapports ultérieurs.

Articles 15 et 16

33.Mme Šimonović, se référant à la loi portant réforme du droit de la filiation, demande pour quelle raison les parents uniques n’ont pas la liberté de choisir le nom patronymique de leurs enfants.

34.Mme Gnancadja s’étonne du fait que le rapport ne donne aucune information sur l’application de l’article 15. Comme on l’a vu dans des rapports précédents, en dépit du fait que les femmes et les hommes continuent d’obtenir un traitement égal en matière de capacité juridique et de choix du lieu de résidence, il serait bon que les États parties fournissent un minimum d’informations sur chacun des articles dans les rapports ultérieurs. Le Comité aimerait savoir comment les dispositions de l’article 15 sont garanties en ce qui concerne les femmes d’origine étrangère.

35.La délégation devrait expliquer dans quelle mesure les dispositions de l’article 16 s’apparentent à la législation interne. Par exemple, les articles 13 et 14 du code civil allemand stipulent qu’un mariage entre deux étrangers contracté en Allemagne doit être enregistré dans le pays d’origine des conjoints. Elle demande si cette disposition est facultative ou obligatoire, et qu’elles sont les conséquences dans les cas où les lois étrangères sont incompatibles avec la législation allemande. Enfin, en ce qui concerne la persécution sexiste, l’État qui présente le rapport devrait indiquer si les mesures de suivi ont établi un lien entre les mariages forcés et ce type de persécution.

36.Mme Belmihoub-Zerdani demande si la législation allemande sur le mariage prévoit un contrat général lorsque le mariage est contracté et, si tel est le cas, s’il existe un modèle de contrat, quelle est la situation des époux en cas de divorce et comment la pauvreté est répartie entre les conjoints. L’État qui présente le rapport devrait également expliquer comment la richesse est répartie entre les hommes et les femmes en Allemagne, si l’Allemagne a rempli les engagements qu’elle a pris à la Conférence de Beijing en vue de fournir des ressources pour la promotion du développement économique et social et si ces fonds financent des projets destinés aux femmes.

37.Mme Patten félicite le Gouvernement pour les nombreuses lois promulguées depuis 1998 et pour le travail qu’il a accompli dans le domaine de la réforme du droit de la famille. Elle demande dans quelle mesure les Allemandes sont conscientes des droits et avantages qu’elles ont acquis grâce à ces importantes réformes et si le Ministère de la famille a une stratégie globale pour diffuser l’information et sensibiliser l’opinion publique aux droits du mariage et de la famille, ou une stratégie plus précise visant les femmes migrantes.

38.En ce qui concerne la loi sur l’entraide juridique de 1998, le Comité souhaite savoir s’il existe d’autres lois sur l’assistance juridique, quels sont les critères permettant d’obtenir une telle assistance et si elle est largement disponible dans le domaine du droit de la famille. La délégation devrait fournir des données sur le nombre de femmes, y compris les femmes migrantes, qui ont obtenu une assistance juridique et indiquer si le Ministère de la famille s’est penché sur l’augmentation de l’incidence de la violence liée au mariage forcé. En conclusion, elle demande dans quelle mesure les tribunaux font une interprétation libérale des demandes visant à élargir les obligations alimentaires pour les enfants au-delà des limites imposées par le statut.

39.Mme Gaspard demande quelles mesures ont été prises en vue de fournir aux jeunes femmes les informations leur permettant d’éviter les mariages forcés.

40.Mme Augstein (Allemagne) dit que pour éviter la répétition, d’autant plus que la situation n’a pas changé depuis le rapport précédent, aucune information n’a été ajoutée au présent rapport sur l’application de l’article 15 de la Convention. Le mariage forcé est naturellement contraire à la loi et tout mariage contracté dans ces conditions est considéré non valable. Toutefois, les filles concernées par une telle situation présentent rarement leur cas devant les tribunaux. Il apparaît clairement que des données complémentaires au sujet du mariage forcé seront nécessaires, bien que celui-ci ait été intégré dans la récente enquête du Gouvernement sur la violence contre les femmes. Les résultats de l’enquête auprès des communautés d’immigrants ont révélé que la plupart des jeunes femmes respectaient les valeurs culturelles que leurs parents leur avaient inculquées, mais très peu acceptaient de faire un mariage arrangé. En revanche, elles étaient peu nombreuses à demander conseil à des organismes gouvernementaux chargés des questions de conflit familial. Le Gouvernement fédéral concentre ses efforts sur l’éducation et la formation de travailleurs sociaux et d’intervenants auprès des jeunes dans ce domaine. Certaines jeunes filles préfèrent s’enfuir de chez elles plutôt que d’accepter un mariage arrangé, et ont donc besoin de soutien.

41.Les mariages contractés en Allemagne entre deux ressortissants étrangers sont, pour la plupart, une question de droit international privé. Des précisions sur la loi applicable et la répartition des biens matrimoniaux figureront dans le prochain rapport. Une femme peut décider de ne pas exiger de son ex-mari qu’il lui verse une pension alimentaire pour elle-même, mais le soutien aux enfants est obligatoire; le Gouvernement doit par ailleurs combler le manque à gagner sous une forme quelconque d’assistance sociale. Le Gouvernement fédéral informe les femmes de leurs droits en vertu de la loi sur son site Web, ainsi que par des dépliants, des brochures et autres formes de médias. L’information est disponible pour les femmes migrantes dans plusieurs langues sur des sujets tels que les possibilités en matière d’éducation, la mutilation génitale des femmes et l’incapacité. Toutes les femmes sont admissibles à une assistance juridique gratuite en fonction de leurs revenus.

42.Mme Rogall-Grothe (Allemagne), répondant à la question sur les noms patronymiques des enfants, précise que si un enfant est légitime, il reçoit les deux noms patronymiques. Si un enfant est né d’une union illégitime, les parents doivent s’entendre sur le nom, autrement, les tribunaux tranchent la question. L’enfant porte habituellement le nom du conjoint ayant la garde; dans le cas d’une garde partagée, les deux parents doivent se mettre d’accord sur le nom.

43.Mme Thielenhaus (Allemagne) fait observer qu’un rapport sur le revenu et la répartition de la richesse a été présenté au Parlement; une copie sera annexée au prochain rapport. L’Allemagne n’a pas totalement atteint son objectif d’assistance au développement fixé lors de la Conférence de Beijing, mais elle a intégré d’office une perspective sexospécifique dans son assistance. Les lignes directrices de 2003 relatives à l’intégration des questions relatives aux femmes comprennent des activités spéciales sur la main-d’œuvre féminine. Dans sa Proclamation du Millénaire, le Gouvernement fédéral a annoncé une contribution de 28 millions d’euros aux activités de développement en faveur des femmes en Afrique.

44.Selon Mme Morvai, la nouvelle loi sur la prostitution a engendré une forme particulière de violence psychologique à l’égard des femmes dont les époux sont incités à fréquenter des prostituées.

45.Mme Shin demande une copie du rapport présenté au Parlement concernant l’effet de la loi sur la prostitution.

46.La Présidente note que l’Allemagne joue un rôle de chef de file en Europe et dans le monde et que, par conséquent, ses politiques sont doublement importantes. Elle rend hommage à sa campagne en faveur d’une politique d’égalité s’appuyant sur deux axes stratégiques au niveau de l’Union européenne, et lui demande instamment de préconiser l’application de la Convention au sein des États membres et des pays candidats. Elle s’est également félicitée de la place réservée aux femmes dans ses politiques de coopération au développement.

47.Toutefois, quelques préoccupations subsistent concernant la discrimination persistante fondée sur des stéréotypes négatifs sur les femmes, notamment dans les médias, ainsi que sur les immigrants et les communautés minoritaires. La liberté de presse et les différences culturelles en sont des facteurs, mais ne doivent pas servir de prétexte. Elle prie instamment le Gouvernement de prendre des mesures énergiques pour traiter ce problème, en particulier dans les médias. Les mesures visant à protéger les femmes immigrantes et les femmes appartenant à une minorité laissent beaucoup à désirer, et des données ventilées par sexe sur leur accès à l’éducation, aux soins de santé et à l’emploi devraient figurer dans le prochain rapport. De toute évidence, l’Allemagne est très avancée au plan politique et économique. Pourtant, un décalage déroutant persiste toujours dans les attitudes et les comportements à l’égard des femmes. Elle demande instamment au Gouvernement de continuer à évaluer l’impact particulier que des pratiques telles que le travail à temps partiel ont sur les femmes. Enfin, elle se félicite du retrait de la réserve concernant l’alinéa b) de l’article 7 de la Convention au sujet du service militaire, ainsi que des nombreuses objections aux réserves auxquelles l’Allemagne a souscrit.

La séance est levée à 17 h 35.