Vingt-deuxième session

Compte rendu analytique de la 461e séance

Tenue au Siège, à New York, le vendredi 28 janvier 2000, à 15 heures

Président :Mme Kim Yung-chung (Vice-Présidente)

puis :Mme González (Présidente)

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties au titre de l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième rapport périodique du Bélarus (suite)

En l’absence de Mme González, Mme Kim Yung-chung, Vice-Présidente, assume la présidence.

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports présentés par les États parties au titre de l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième rapport périodique du Bélarus (suite) (CEDAW/C/BLR/3)

1. Sur l’invitation de la Présidente, M me Sergeeva et M me Chutkova (Bélarus) prennent place à la table du Comité.

2.M me Cartwright souhaite que l’État Partie, dans son prochain rapport, fournisse le libellé exact des dispositions de la Constitution concernant les droits des femmes, afin que le Comité puisse mieux juger dans quelle mesure elles correspondent aux conditions de la Convention. Elle est préoccupée par le fait que la Constitution pourrait n’interdire que la discrimination directe et, partant, ne pas formuler de principes d’action contre la discrimination de facto. Il serait également utile d’obtenir plus de précisions sur le libellé des dispositions législatives pertinentes.

3.Les nombreuses mesures conservatoires de la législation bélarussienne qui interdisent aux femmes de travailler dans des conditions dangereuses ou dans des emplois exigeants physiquement sont une bonne intention, mais elles ont eu comme effet d’exacerber le chômage chez les femmes. Beaucoup de femmes retirées de leurs emplois pour leur propre protection auraient pourtant préféré les garder.

4.La violence à l’égard des femmes compte parmi les principaux domaines critiques. Le Bélarus est loin d’être le seul pays à devoir se préoccuper de ce problème et, en ce sens, il pourrait apprendre de l’expérience d’autres pays. Il serait utile d’en savoir plus sur les dispositions du code pénal et de la politique judiciaire relatives à la violence à l’égard des femmes, ainsi que sur les mesures envisagées par le Gouvernement pour modifier la loi pénale à cet égard.

5.Elle aimerait savoir, en général, dans quelle mesure les femmes ont facilement accès aux tribunaux. Il serait intéressant de savoir comment les juges sont choisis et en fonction de quelles qualifications et s’ils sont formés pour traiter des questions relatives aux femmes, telles que le viol, la violence et la discrimination dans l’emploi.

6.M me Corti estime que, dès l’instant où la pauvreté semble être un des problèmes les plus graves de l’État partie et que la transition semble causer plus de problèmes aux femmes qu’aux hommes, il n’y a rien d’étonnant à ce qu’on assiste à un accroissement sensible de la prostitution. Elle aimerait connaître la stratégie à long terme du Gouvernement pour lutter contre la pauvreté. Pour permettre au Comité de comprendre cette stratégie dans le contexte, elle souhaiterait obtenir des précisions sur la stratégie économique globale du Gouvernement, autrement dit, elle voudrait savoir s’il a l’intention de reprendre le contrôle de l’État sur des sociétés récemment privatisées ou d’aller de l’avant progressivement vers une économie de marché. Le niveau d’inflation et les politiques du Gouvernement visant à régler le problème de l’érosion des pensions en raison de l’inflation sont pertinents à cet égard.

7.En ce qui concerne le chômage, elle souhaiterait recevoir des précisions sur les types de contrats de travail existants, la répartition des emplois entre les secteurs public et privé et entre les grandes et petites entreprises, ainsi que sur le rôle des syndicats dans les négociations collectives. Elle souhaiterait également en savoir davantage sur la politique globale du Gouvernement sur la lutte contre le chômage. En particulier, cette politique s’étend-elle à la promotion du travail à temps partiel et des horaires mobiles?

8.Elle se demande si la position de l’État partie à l’égard de la maternité ne serait pas surprotectrice. S’il en coûte trop cher aux employeurs, il pourrait être plus difficile pour les femmes de trouver un emploi.

9.Bien qu’elle se réjouisse du fait que les conditions d’enregistrement des organisations non gouvernementales aient été assouplies, elle estime que le Gouvernement doit faire davantage pour sensibiliser la société civile et faire participer les femmes à une discussion sur les problèmes qui les touchent.

10.Elle souhaiterait savoir quels sont les organes d’information au Bélarus et si le Gouvernement a pris des mesures pour collaborer avec les médias dans la lutte contre les stéréotypes sexistes et la diffusion des informations au sujet de la Convention.

11.M me Khan souligne que la montée du chômage chez les femmes professionnelles, qui a accompagné la privatisation, est une préoccupation majeure. Ce facteur pourrait avoir pour effet, notamment, de décourager les jeunes femmes de poursuivre leurs études supérieures. Les femmes sont les victimes de la mondialisation des marchés dans de nombreux pays. Elle souhaite savoir s’il existe des statistiques sur les anciens postes, ou sur les niveaux d’emploi des femmes qui ont perdu leurs postes, et si les programmes de recyclage en place leur permettent de retourner sur le marché du travail au même niveau.

12.Actuellement, il semble qu’on mette l’accent sur des mesures incitant les femmes à avoir plus d’enfants et, en fait, que la législation du travail réglementé le chômage des femmes du point de vue de la protection, en particulier la protection de la maternité. Cette situation risque d’entraîner une plus grande difficulté pour les femmes à se trouver un emploi de qualité. La Convention repose essentiellement sur le fait que la législation du travail devrait viser à promouvoir l’égalité entre les sexes plutôt que le rôle maternel des femmes.

13.L’esprit d’entreprise étant appelé à jouer un rôle de plus en plus important dans l’économie du Bélarus, elle souhaite savoir s’il existe des programmes qui offrent des prêts aux entrepreneurs sans nantissement et si les femmes ont accès à ce crédit.

14.M me Chutkova (Bélarus) fait observer que le problème du chômage chez les femmes s’était quelque peu résorbé depuis la rédaction du rapport. Elle précise que le pourcentage de femmes parmi les chômeurs avait excédé 80 % à un certain point, mais qu’il s’établissait à près de 60 % actuellement. Ce pourcentage pourrait cependant être plus ou moins précis, car des études ont démontré que les femmes avaient davantage tendance que les hommes à s’inscrire aux services officiels de placement pour trouver un autre emploi.

15.La politique de lutte contre le chômage du Gouvernement comprend des programmes destinés aux chercheurs d’emploi, qui offrent, entre autres, une formation de reconversion professionnelle et une assistance dans l’acquisition de compétences en matière de gestion d’entreprise. Le Ministère du travail a mis au point un projet conjoint en collaboration avec l’Organisation internationale du Travail (OIT) qui comporte l’octroi de subventions et de microcrédits aux entrepreneurs qui souhaitent démarrer une entreprise, l’accent étant mis sur les femmes entrepreneurs.

16.En ce qui concerne les catégories de femmes considérées comme étant moins compétitives sur le marché du travail, par exemple les femmes ayant trois enfants ou plus, les mères célibataires et les femmes divorcées avec enfants, des quotas ont été fixés à certaines sociétés et industries, permettant ainsi à une femme bénéficiaire de l’assistance chômage pendant plus de six mois d’y obtenir un emploi. Depuis 1998, les entreprises qui créent des emplois pour ces catégories de demandeurs d’emploi sont indemnisées en partie des frais encourus. Les statistiques révèlent que quelque 65 000 nouveaux emplois ont été créés au cours de l’année écoulée et que la moitié d’entre eux ont été comblés par des femmes.

17.Les statistiques compilées en coopération avec la Banque mondiale à l’aide d’une nouvelle méthode de calcul de la pauvreté montrent qu’un ménage sur trois de la zone d’enquête vit sous le seuil de pauvreté redéfini. La plupart des mesures existantes de lutte contre la pauvreté sont des mesures à court terme et visent à alléger la situation tragique des pauvres au moyen d’une assistance en espèces ou en nature, y compris des prestations, des denrées alimentaires gratuites, des subventions pour les livres scolaires et autres. Le Gouvernement, en collaboration avec le Fonds monétaire international, a lancé un projet qui vise à mettre sur pied un centre qui assurerait une prestation d’assistance sociale plus étendue aux familles les plus démunies.

18.La situation désastreuse du chômage chez les femmes hautement qualifiées, qui ont été durement frappées lors de la première vague de licenciements massifs résultant de la crise économique et de la transition vers une économie de marché, s’est améliorée depuis la rédaction du troisième rapport périodique. La plupart des femmes qui sont actuellement au chômage sont parmi celles qui sont les moins instruites. Les établissements de formation et d’enseignement supérieur mettent l’accent sur les postes offrant de bonnes perspectives d’emploi et, depuis 1998, les programmes de recyclage destinés aux chômeurs tentent de faire correspondre la formation à la demande de l’employeur, autrement dit, aux emplois disponibles.

19.Plusieurs membres du Comité ont exprimé leur préoccupation devant le niveau inférieur de rémunération dans les secteurs économiques tels que la santé, l’éducation et l’agriculture dont la plupart des emplois sont occupés par des femmes. Lors des négociations annuelles sur les salaires entre les syndicats, les employeurs et le Gouvernement, les syndicats cherchent systématiquement à défendre les intérêts des travailleuses. À la fin de 1999, on a procédé à un examen des coefficients qui déterminaient le niveau des salaires dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Bien qu’aucun changement majeur ne soit intervenu, une réforme globale est en cours d’élaboration.

20.M me Sergeeva (Bélarus) estime que la croissance des entreprises, notamment des petites et moyennes entreprises, joue un rôle important dans la transition vers une économie de marché en ce sens qu’elle crée de l’emploi et contribue à la stabilité sociale. Le Gouvernement a créé un nouveau ministère et divers autres organismes pour contribuer à ce processus. En 1999, le Président de la République a décidé de mettre sur pied un Conseil des entreprises, dont la présidence est actuellement assumée par une femme. Il est composé de représentants issus de toutes les couches de la société. Il existe aussi des plans annuels pour soutenir le secteur privé, ainsi que des fonds d’appui aux entreprises qui assurent à ces dernières un financement à long terme sans intérêt. Deux programmes importants permettant de contrôler la transition vers une économie de marché ont été mis en œuvre et un nombre considérable d’entreprises d’État ont été privatisées. Certaines erreurs ont été commises dans le processus de privatisation, mais le Gouvernement a essayé de tirer parti de l’expérience des pays voisins.

21.M me Taya, se référant aux informations fournies par des organisations non gouvernementales sur le nombre de femmes incarcérées et les délits pour lesquels elles ont été condamnées, estime que les dispositions spéciales prévoyant des sentences indulgentes à l’égard des femmes vont à l’encontre de l’égalité entre les sexes et tendent à renforcer les stéréotypes sexistes. Des circonstances atténuantes devraient être prises en compte sans égard au sexe de la personne condamnée.

22.Des mesures législatives particulières devraient être adoptées afin d’apporter une solution aux problèmes de la violence conjugale et de l’exploitation sexuelle. Des programmes de formation portant sur ces problèmes devraient être mis en place à l’intention des juges et des magistrats.

23.M me Goonesekere souligne la nécessité d’établir des structures décisionnelles ouvertes et pluralistes et ce, alors que le Bélarus s’achemine vers l’économie de marché. Les gouvernements ne peuvent agir seuls, c’est pourquoi le rôle de la société civile et du secteur privé est crucial dans le développement économique.

24.Elle demande quelles mesures ont été prises pour intégrer la Convention et le Programme d’action de Beijing aux politiques gouvernementales pour amener le Gouvernement à tenir compte du fait que l’intégration des femmes au développement implique qu’elles soient reconnues en tant qu’individus ayant des droits et la capacité d’appliquer ces droits. Le rapport a reconnu que les problèmes de discrimination ne découlent pas des textes législatifs en soi, mais de leur application. Le Gouvernement devrait apporter des précisions sur les mesures prises pour veiller à ce que les droits des femmes soient appliqués et sur les recours juridiques mis à leur disposition à cette fin.

25.En ce qui concerne la loi de l’État partie sur le viol, elle note que le viol est défini comme une relation sexuelle « contre la volonté » de la victime. Dans de nombreux pays, une telle définition pénalise les femmes parce qu’elle prescrit l’usage de la force et de la violence. Le viol devrait plutôt être défini comme une relation sexuelle « sans le consentement » de la victime. Le rapport fait aussi référence au viol d’une personne mineure « commis sciemment », ce qui laisse entendre que l’auteur n’est pas tenu responsable s’il ignorait que la victime était mineure au moment des faits. Elle espère que la législation pertinente sera réexaminée.

26.Des programmes d’éducation sur la violence à l’égard des femmes ont été offerts, mais, apparemment, seules des jeunes femmes y auraient participé. Elle se demande pourquoi. Des mesures ont-elles été prises pour faire en sorte que les hommes participent également? Enfin, elle demande quelles mesures ont été prises pour permettre aux femmes handicapées de jouir de l’égalité des chances dans l’éducation et dans la vie en général.

27.M me Feng Cui, se référant à une discussion antérieure sur les contrats d’emploi, demande quelles sont les situations dans lesquelles les travailleuses ne peuvent être licenciées. En l’absence de dispositions à cet effet, il sera très difficile d’empêcher la discrimination à l’égard des femmes.

28.Le rapport indique que les femmes recevant un diplôme d’une école de formation professionnelle ont de plus en plus de difficulté à obtenir un emploi, ce qui signifie qu’un nombre croissant de femmes sont au chômage. Elle se demande si cette situation résulte d’une discrimination à l’égard des femmes ou est due au fait que les écoles n’adaptent pas leurs programmes scolaires en fonction des besoins changeants du marché du travail. Le Gouvernement devrait préciser quelles mesures il entend prendre pour remédier à la situation et s’il a établi un objectif précis au sujet du taux de rengagement des femmes au chômage.

29.M me Abaka compatit avec le Gouvernement et le peuple du Bélarus dans leur difficile transition vers une économie de marché. Elle se demande si la privatisation, qui a certainement un impact sur le secteur social, affecte aussi le secteur de la santé. Cette situation pourrait avoir des effets défavorables sur l’accès aux services de santé de qualité, particulièrement dans un pays où la pauvreté est très répandue.

30.En ce qui concerne les programmes de lutte contre l’instabilité du mariage, elle demande si des recherches ont été effectuées afin de déterminer les causes de la désintégration de la famille. Dans la négative, il y a tout lieu de craindre qu’on ne traite que les symptômes du problème plutôt que ses causes profondes.

31.Selon certaines informations, les services de santé, notamment ceux destinés aux femmes, se seraient détériorés à cause de la situation économique. C’est pourquoi on envisage de revoir les politiques en matière de santé. Elle demande quelles mesures ont été prévues pour améliorer la santé génésique. Les mesures actuelles ne semblent viser que les femmes enceintes, ce qui, à son avis, est sans doute très important, mais la santé génésique englobe aussi les besoins des femmes préménopausées et ménopausées.

32.Au Bélarus, les méthodes modernes de contraception ne sont pas utilisées d’une manière générale, la raison étant, selon certaines sources, leur coût élevé. Par conséquent, les gens ordinaires n’y ont pas accès. Compte tenu de l’absence de contraceptifs, combinée à une politique d’avortement très libérale, plus de 40 % de toutes les grossesses se terminent par un avortement. Il s’agit d’une situation très grave, car des avortements répétés nuisent à la santé des femmes. Malgré les difficultés économiques actuelles, les hommes comme les femmes devraient pouvoir bénéficier d’un meilleur accès à des contraceptifs abordables, de sorte que l’avortement ne soit pas utilisé comme une méthode de contraception.

33.Il se dégage clairement du rapport, et d’autres sources également, que de nombreuses femmes travaillent dans l’industrie vestimentaire au Bélarus. Soulignant que de nombreux produits chimiques nocifs utilisés dans cette industrie sont tout particulièrement dangereux pour les femmes enceintes, elle souhaite savoir si le Gouvernement a mis en place une politique sur la santé au travail.

34.Il ressort du rapport que 75 % des femmes qui donnent naissance au Bélarus doivent subir une césarienne parce qu’elles sont considérées comme étant trop faibles pour accoucher de façon naturelle. Le rapport fait état aussi d’indemnités accordées aux femmes qui ont plus de cinq enfants. Elle demande si les femmes reçoivent les conseils appropriés sur les conséquences qu’entraînent des césariennes répétées sur leur santé, compte tenu du fait que, pour obtenir une indemnité, elles pourraient risquer de mettre leur vie en péril.

35.En ce qui concerne le grand nombre de détenues, elle fait observer que, selon rapport, la plupart des femmes incarcérées pour des crimes violents avaient elles-mêmes été victimes de violence conjugale. Elle demande si ces femmes avaient subi des examens psychiatriques avant ou pendant leur procès et si elles pouvaient recevoir des services de consultation et des traitements psychiatriques une fois incarcérées.

36.L’accident de Tchernobyl a entraîné, entre autres conséquences, l’impossibilité pour 10 % des femmes d’allaiter leurs nourrissons à cause de la contamination. Elle souhaite savoir s’il existe des programmes spéciaux s’adressant à ces nourrissons.

37. M me González assume la présidence.

38.M me Sergeeva estime que la manière dont sa délégation a fait référence aux crimes couverts dans le code criminel semble témoigner d’une certaine partialité. L’ancien et le nouveau codes ont tous les deux incorporé toute une gamme de crimes à l’égard des femmes en plus du viol, tels que l’avortement illégal, l’atteinte à la pudeur, les relations sexuelles avec une personne mineure, les actes de nature sexuelle sous la contrainte et, dans un autre domaine, le refus d’engager une femme enceinte ou une mère allaitante. Pour la première fois, le nouveau code a établi une responsabilité à l’égard de certains crimes, tels que le trafic de personnes, le recrutement de personnes à des fins d’exploitation et la violation des droits égaux des citoyens.

39.L’indulgence à l’égard des femmes en matière de responsabilité criminelle, à la fois dans l’établissement de la responsabilité et dans la sentence est un aspect intéressant. Depuis l’époque de l’ex-Union soviétique, le Gouvernement du Bélarus a adopté une politique humaine à l’égard de la prise en compte de l’égalité entre les sexes en matière pénale. Avant 1994, le code criminel stipulait que la peine de mort ne pouvait s’appliquer aux femmes enceintes. En 1994, cette disposition a été modifiée afin d’inclure les femmes qui étaient enceintes au moment du délit, de la sentence ou de l’exécution de la sentence. En 1996, l’article 22 a été modifié à nouveau pour réglementer la peine de mort prononcée contre des personnes de moins de 18 ans et des femmes. Le nouveau code pénal va encore plus loin en stipulant que la prison à vie, en tant qu’alternative à la peine de mort, ne sera pas applicable aux femmes. Le nouveau code prévoit également que la peine de mort ne pourra être applicable aux hommes âgés de plus de 65 ans au moment du prononcé de la sentence.

40.Il existe aussi des distinctions entre les formes d’emprisonnement. Les hommes et les femmes sont détenus dans des prisons distinctes et les régimes y sont différents, des conditions plus strictes ne s’appliquant qu’à certaines prisons pour hommes.

41.La grossesse pourra être considérée comme une circonstance atténuante dans le prononcé de la sentence dans certaines affaires pénales moins graves. Un autre article du nouveau code pénal prévoit qu’une sentence de moins de cinq ans pourra, dans le cas d’une femme enceinte ou de la mère d’un enfant de moins de 3 ans, être reportée jusqu’à ce que l’enfant atteigne l’âge de 3 ans. Dans certains cas, la sentence pourrait même être levée, en fonction du comportement de la femme pendant la période intermédiaire.

42.Certaines préoccupations ont été exprimées au sujet du processus de dénationalisation et de privatisation et de ses répercussions éventuelles sur le système de santé. En vertu de la nouvelle législation, les établissements de santé font partie de la catégorie des institutions qui ne peuvent faire l’objet de privatisation. Des domaines prioritaires concernant la privatisation ont aussi été établis et les domaines liés à la santé y sont exclus. Quelques entreprises privées en rapport avec la santé, telles que les pharmacies et les hôpitaux, ont été créées, mais elles ne relèvent pas du processus de privatisation et sont couvertes par différentes législations.

43.M me Chutkova (Bélarus) fait observer que les services de santé privés ne comptent que pour 2 % de tous les services de santé. La vaste majorité des services sont encore fournis gratuitement par l’État. Toutefois, il existe des problèmes de financement majeurs dans le secteur de la santé et 70 % seulement des besoins réels sont comblés. Certains hôpitaux ne disposent même pas du matériel adéquat pour leurs patients.

44.En ce qui concerne la santé génésique, selon les données de 1998 du Ministère de la santé, la césarienne est pratiquée dans 15 % de tous les accouchements. Toutefois, le nombre d’avortements est très élevé, et cette situation a un certain impact sur la nécessité de recourir à la césarienne. En 1992, le Ministère de la santé a décidé d’encourager les femmes à consulter dès le début de la grossesse en leur offrant des incitations sous forme de services gratuits. De ce fait, plusieurs autres problèmes de santé non associés directement à la grossesse ont été décelés. On a donc décidé d’accorder une attention spéciale aux femmes de moins de 38 ans en âge d’avoir des enfants en leur offrant la possibilité de passer des examens médicaux semestriels et en leur procurant des services de contraception. En conséquence, 50 % des femmes de ce groupe d’âge utilisent la contraception par comparaison à 30 % de l’ensemble des femmes.

45.La représentante partage les préoccupations du Comité à l’égard de la législation du travail. Elle déplore le fait que de nombreux articles du nouveau code du travail perpétuent l’attitude protectrice à l’égard des femmes enceintes ou des mères plutôt que de garantir leurs droits en tant que travailleuses et leur compétitivité sur le marché du travail. Certaines nouvelles dispositions ont été mises de l’avant durant le processus de rédaction, telles que le droit des femmes ayant de jeunes enfants à refuser le travail de nuit ou le travail posté, mais le texte final a malheureusement été rédigé quelque peu différemment. Toutefois, le nouveau code représente quand même une amélioration par rapport au précédent, et les avantages offerts aux femmes en ce qui concerne leur rôle dans la reproduction sont tout à fait justifiés et doivent être maintenus. Le nouveau code fait référence aux parents et à leurs responsabilités familiales, ce qui indique que la politique relative aux sexospécificités commence à prendre forme.

46.L’OIT et la communauté internationale ont insisté sur le fait que les femmes devraient être seules en mesure de décider si elles acceptent de travailler dans des conditions difficiles. La liste des emplois interdits aux femmes en raison de conditions de travail dangereuses ou difficiles existe toujours et devrait être maintenue jusqu’à ce que les attitudes des femmes et de la société dans son ensemble changent et que les femmes soient prêtes à abandonner les avantages associés à leur statut protégé. Actuellement, les femmes qui sont licenciées en raison des conditions dangereuses ou difficiles liées à leur emploi ont l’assurance d’obtenir un autre emploi comportant des fonctions similaires ou une formation de reconversion. Toutefois, les femmes hésitent souvent à quitter leur emploi à cause des avantages dont elles bénéficient en compensation des conditions difficiles, telles qu’une rémunération plus élevée et la possibilité d’une retraite anticipée.

47.En cas de fermeture d’une entreprise, l’employeur est tenu de notifier ses employés et de leur verser de trois à six mois de salaire en compensation. Dans le cas de licenciements collectifs, les bureaux de l’emploi devraient être consultés et participer au processus de prise de décision. Dans certains cas, afin d’éviter un chômage généralisé dans une région particulière, on devrait empêcher la fermeture d’une entreprise et mettre à sa disposition des ressources provenant du Fonds d’aide à l’emploi.

48.Selon Mme Chutkova, les attitudes stéréotypées existent dans toutes les sociétés. Elle n’est pas en mesure d’affirmer que de grands progrès ont été réalisés en vue de leur élimination au Bélarus, mais elle constate que certains changements d’attitude se sont produits. Des mesures sont prises en ce qui concerne les organes d’information et un certain nombre de publications destinées aux femmes sont subventionnées par l’État. Le Centre d’information et de politique concernant la promotion de la femme au Ministère de la sécurité sociale a rassemblé un groupe de journalistes qui se réunissent lors de séminaires et de réunions périodiques afin de discuter de diverses questions liées à la vie quotidienne des femmes, particulièrement en rapport avec l’adoption du Programme d’action de Beijing. Un autre projet important, sous l’égide du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), met aussi l’accent sur les questions relatives à l’égalité des sexes. En outre, des journalistes participent à des cours de formation à l’étranger afin de perfectionner leurs connaissances sur la manière de véhiculer un point de vue plus équilibré des questions relatives à l’égalité des sexes.

49.Un centre de consultation sur l’éducation des femmes a été mis sur pied, de même qu’un centre de recherche sur les questions relatives aux femmes associé avec l’Université européenne de sciences humaines. Le centre de recherche sur les questions relatives aux femmes publie un bulletin d’information afin d’informer le grand public, ainsi que les spécialistes, des faits nouveaux intervenant au niveau de la communauté internationale, par exemple, ceux en rapport avec le Programme d’action de Beijing, lesquels ont été largement diffusés dans les médias grâce à l’initiative du PNUD. Le bulletin contient aussi des informations sur les événements organisés par des organisations non gouvernementales féminines au Bélarus. En octobre 1999, une table ronde a marqué le vingtième anniversaire de l’adoption de la Convention. Toutes les députées de l’Assemblée nationale y ont participé. Le troisième rapport périodique du Bélarus a été présenté pendant cette réunion, dont les débats ont été diffusés dans les médias.

50.La Présidente propose que la question concernant la nécessité de lutter contre les stéréotypes persistants qui ne cessent d’assigner aux femmes un rôle marginal dans le développement du pays et empêchent leur intégration soit examinée dans le contexte de la mise en œuvre de la Convention au Bélarus.

51.M me Schöpp-Schilling souligne l’importance pour l’État partie de revoir son approche conceptuelle de la question des droits des femmes. Il ne lui sera pas possible de réviser sa législation ou d’élaborer des politiques sur la seule base de la Convention. Elle l’invite également à signer et ratifier le Protocole additionnel à la Convention le plus tôt possible, de même qu’à ratifier l’amendement à l’article 20 de la Convention.

La séance est levée à 17 h 5.