Nations Unies

CERD/C/JPN/CO/7-9/Add.2

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

19 janvier 2017

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant le rapport du Japon valant septième à neuvième rapports périodiques

Additif

Renseignements reçus du Japon au sujet de la suite donnée aux observations finales *

[Date de réception : 5 décembre 2016]

Commentaires du Gouvernement japonais au sujet des observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD/C/JPN/CO/7-9)

Paragraphe 18

Le Comité invite instamment l’État partie à prendre immédiatement les mesures nécessaires pour :

a)Mener à leur terme les enquêtes sur les violations des droits des femmes de réconfort par l’armée japonaise et traduire en justice les responsables ;

b)Parvenir à un règlement complet, impartial et durable de la question des femmes de réconfort, prévoyant notamment la présentation d’excuses sincères et l’octroi d’une réparation appropriée à toutes les femmes de réconfort survivantes ou à leur famille ;

c)Condamner toute tentative de diffamation ou de négation des faits.

Le Gouvernement japonais juge inopportun que la question des femmes de réconfort soit abordée dans le présent rapport sur la mise en œuvre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale dans l’État partie envers la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, étant donné que la Convention ne s’applique pas aux problèmes que connaissait le Japon avant la ratification de cet instrument en 1995.

En outre, sachant que la question des femmes de réconfort continue d’influer sur les relations entre le Japon et la République de Corée, les gouvernements de ces deux pays sont convenus, lors de la réunion au sommet tenue le 2 novembre 2015, de poursuivre et d’accélérer les consultations sur ce sujet afin de parvenir le plus rapidement possible à une solution. Par la suite, des consultations bilatérales approfondies ont eu lieu entre les services diplomatiques des deux États. Le 28 décembre 2015, les Ministres des affaires étrangères du Japon et de la République de Corée ont fait une déclaration (voir pièce jointe) lors d’une conférence de presse commune. Plus tard dans la même journée, les dirigeants japonais et coréens ont, après s’être entretenus par téléphone, confirmé la teneur de la déclaration. Le Gouvernement de la République de Corée a ensuite créé, le 28 juillet 2016, une fondation dans le but de venir en aide aux anciennes femmes de réconfort. Le 31 août, le Gouvernement japonais a versé une contribution de 1 milliard de yen à cette fondation. Les gouvernements des deux pays coopéreront et continueront de donner scrupuleusement suite à la déclaration, en particulier en ce qui concerne les anciennes femmes de réconfort qui sont maintenant âgées.

C’est dans ce contexte que le Gouvernement japonais présente ses commentaires au sujet des recommandations du Comité.

En ce qui concerne le point « a) Mener à leur terme les enquêtes sur les violations des droits des femmes de réconfort par l’armée japonaise et traduire en justice les responsables », le Gouvernement japonais a réalisé une étude approfondie sur les femmes de réconfort dès le début des années 1990, lorsque la question est devenue un problème d’ordre politique entre le Japon et la République de Corée. Aux fins de cette enquête, il a été procédé 1) à des travaux de recherche et d’investigation à partir de documents détenus par des ministères et organismes compétents du Gouvernement japonais, 2) à des recherches documentaires auprès de l’Agence américaine de conservation des documents administratifs et archives nationales, et 3) à l’audition de personnes concernées, notamment d’anciens responsables militaires et directeurs de centres de réconfort, ainsi qu’à l’analyse de témoignages recueillis par le Conseil coréen. Concernant les crimes de guerre commis par des ressortissants japonais pendant la Seconde Guerre mondiale, le Gouvernement japonais est conscient de ce que la question a été examinée par 1) le Tribunal militaire international pour l’Extrême-Orient (Tokyo), 2) des tribunaux militaires établis par le commandement des forces d’occupation alliées (Tokyo), et 3) des tribunaux mis en place par les pays alliés. À titre d’exemple, dans les Antilles néerlandaises, des anciens responsables militaires ont forcé des femmes étrangères à se prostituer, allant ainsi à l’encontre des ordres de leur supérieur et enfreignant des consignes militaires selon lesquelles la femme doit être consentante. Informée de la situation, l’armée a fermé le centre de réconfort et les fonctionnaires mis en cause ont été jugés par une cour martiale après la guerre. L’un d’eux a été condamné à mort et huit autres à des peines d’emprisonnement. Le Gouvernement japonais a néanmoins beaucoup de mal à enquêter rétroactivement sur les faits propres à chaque affaire et n’envisage dès lors pas de poursuivre et de condamner les responsables.

En ce qui concerne le point « b) Parvenir à un règlement complet, impartial et durable de la question des femmes de réconfort », le Gouvernement japonais s’est occupé attentivement de la question des réparations, des biens et des réclamations liées à la Seconde Guerre mondiale dans le cadre du Traité de San Francisco que le Japon a conclu avec 45 pays, dont les États-Unis, le Royaume-Uni et la France, et de traités, d’accords et d’instruments bilatéraux. Les réclamations émanant de particuliers, y compris d’anciennes femmes de réconfort ont été réglées avec les parties à ces traités, accords et instruments.

S’agissant de la République de Corée en particulier, l’Accord relatif au règlement de problèmes concernant les biens et les réclamations et à la coopération économique entre le Japon et la République de Corée dispose, au paragraphe 1 de son article II, que « le problème concernant les biens, les droits et les intérêts des deux Parties contractantes et de leurs ressortissants (y compris les personnes morales) ainsi que les réclamations existant entre les Parties contractantes et leurs ressortissants, y compris celles qui sont prévues à l’alinéa ade l’article IV du Traité de paix avec le Japon, signé à San Francisco le 8 septembre 1951, est entièrement et définitivement réglé ».

En outre, dès 1990, lorsque la question des femmes de réconfort a commencé à devenir un problème d’ordre politique, le Gouvernement japonais a entrepris de rétablir l’honneur et la dignité des anciennes femmes de réconfort étrangères et de leur venir en aide. Le 19 juillet 1995, le Gouvernement et le peuple japonais ont créé ensemble un fonds en faveur des femmes asiatiques destiné à mettre en œuvre des projets visant à apporter un soutien financier, médical et social aux anciennes femmes de réconfort. Le Gouvernement a consacré un total de 4,8 milliards de yen au fonds et le peuple, environ 600 millions.

Ce fonds a permis de verser un montant de 2 millions de yen aux anciennes femmes de réconfort en République de Corée, aux Philippines et à Taïwan qui ont été identifiées par leur gouvernement ou par les autorités compétentes et qui souhaitaient bénéficier d’une aide. Au total, 285 anciennes femmes de réconfort (211 aux Philippines, 61 en République de Corée, 13 à Taïwan) ont bénéficié de cette aide. En outre, ce fonds a également aidé à financer des services d’appui médical et social dans ces pays ou régions (3 millions de yen par personne en République de Corée et à Taïwan, 1,2 million de yen aux Philippines), la construction d’une maison de repos pour personnes âgées en Indonésie et un projet d’aide sociale visant à améliorer les conditions de vie des anciennes femmes de réconfort aux Pays-Bas. Il a ainsi permis de financer des programmes de soutien médical et social (1,122 milliard de yen au total) et de verser l’argent issu des dons du peuple japonais en guise de réparation.

Une fois l’argent versé et le soutien apporté, les Premiers Ministres en exercice (Ryutaro Hashimoto, Keizo Obuchi, Yoshiro Mori et Junichiro Koizumi) ont chacun adressé une lettre signée à chacune des anciennes femmes de réconfort pour exprimer directement leurs regrets et leurs remords (voir pièce jointe).

Bien que le fonds ait été dissous en mars 2007, le Gouvernement japonais a continué d’assurer le suivi des activités jusqu’à ce jour. Le Gouvernement japonais tient une fois encore à souligner le fait qu’il a créé le fonds en collaboration avec le peuple japonais avec le désir sincère de manifester leur bonne volonté et d’aider les anciennes femmes de réconfort dans toute la mesure possible. Il a donc fait part de son empathie envers un grand nombre d’entre elles. Les efforts déployés grâce au fonds ne devraient pas disparaître dans les annales de l’histoire.

Ainsi, dans la déclaration de fin 2015 mentionnée au paragraphe 2, les Gouvernements du Japon et de la République de Corée ont confirmé que la question des femmes de réconfort était totalement et définitivement réglée.

En ce qui concerne le point « c) Condamner toute tentative de diffamation ou de négation des faits », le Gouvernement japonais n’a aucune intention de nier ou de banaliser la question des femmes de réconfort. Le 14 août 2015, dans son allocution prononcée à l’occasion du soixante-dixième anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Premier Ministre, M. Abe, a déclaré avec détermination que le Japon n’oublierait jamais qu’il a été porté atteinte à la dignité et à l’honneur de nombreuses femmes pendant les guerres qui ont sévi au XXe siècle et que le pays encouragerait le monde à faire du XXIe siècle une ère où les droits fondamentaux des femmes ne sont pas violés.

Annexe

Announcement by Foreign Ministers of Japan and the Republic of Korea at the Joint Press Occasion*

Foreign Minister Kishida

The Government of Japan and the Government of the Republic of Korea (ROK) have intensively discussed the issue of comfort women between Japan and the ROK at bilateral meetings including the Director-General consultations. Based on the result of such discussions, I, on behalf of the Government of Japan, state the following:

(1)The issue of comfort women, with an involvement of the Japanese military authorities at that time, was a grave affront to the honour and dignity of large numbers of women, and the Government of Japan is painfully aware of responsibilities from this perspective. As Prime Minister of Japan, Prime Minister Abe expresses anew his most sincere apologies and remorse to all the women who underwent immeasurable and painful experiences and suffered incurable physical and psychological wounds as comfort women.

(2)The Government of Japan has been sincerely dealing with this issue. Building on such experience, the Government of Japan will now take measures to heal psychological wounds of all former comfort women through its budget. To be more specific, it has been decided that the Government of the ROK establish a foundation for the purpose of providing support for the former comfort women, that its funds be contributed by the Government of Japan as a one-time contribution through its budget, and that projects for recovering the honour and dignity and healing the psychological wounds of all former comfort women be carried out under the cooperation between the Government of Japan and the Government of the ROK.

(3)While stating the above, the Government of Japan confirms that this issue is resolved finally and irreversibly with this announcement, on the premise that the Government will steadily implement the measures specified in (2) above. In addition, together with the Government of the ROK, the Government of Japan will refrain from accusing or criticizing each other regarding this issue in the international community, including at the United Nations.

Foreign Minister Yun

The Government of the Republic of Korea (ROK) and the Government of Japan have intensively discussed the issue of comfort women between the ROK and Japan at bilateral meetings including the Director-General consultations. Based on the result of such discussions, I, on behalf of the Government of the ROK, state the following:

(1)The Government of the ROK values the GOJ’s announcement and efforts made by the Government of Japan in the lead-up to the issuance of the announcement and confirms, together with the GOJ, that the issue is resolved finally and irreversibly with this announcement, on the premise that the Government of Japan will steadily implement the measures specified in 1. (2) above. The Government of the ROK will cooperate in the implementation of the Government of Japan’s measures.

(2)The Government of the ROK acknowledges the fact that the Government of Japan is concerned about the statue built in front of the Embassy of Japan in Seoul from the viewpoint of preventing any disturbance of the peace of the mission or impairment of its dignity, and will strive to solve this issue in an appropriate manner through taking measures such as consulting with related organizations about possible ways of addressing this issue.

(3)The Government of the ROK, together with the Government of Japan, will refrain from accusing or criticizing each other regarding this issue in the international community, including at the United Nations, on the premise that the Government of Japan will steadily implement the measures it announced.

Letter from Prime Minister to the former comfort women

Dear Madam,

On the occasion that the Asian Women’s Fund, in cooperation with the Government and the people of Japan, offers atonement from the Japanese people to the former wartime comfort women, I wish to express my feelings as well.

The issue of comfort women, with an involvement of the Japanese military authorities at that time, was a grave affront to the honour and dignity of large numbers of women.

As Prime Minister of Japan, I thus extend anew my most sincere apologies and remorse to all the women who underwent immeasurable and painful experiences and sufferedincurable physical and psychological wounds as comfortwomen.

We must not evade the weight of the past, nor should we evade our responsibilities for the future.

I believe that our country, painfully aware of its moral responsibility, with feelings of apology and remorse, should face up squarely to its past history and accurately convey it to future generations.

Furthermore, Japan also should take an active part in dealing with violence and other forms of injustice to the honour and dignity of women.

Finally, I pray from the bottom of my heart that each of you will find peace for the rest of your lives.

Respectfully yours,

Prime Minister of Japan