Nations Unies

CCPR/C/122/D/2175/2012

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

29 août 2019

Français

Original : anglais

Comité des droits de l ’ homme

Constatations adoptées par le Comité au titre de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, concernant la communication no 2175/2012 * , **

Communication présentée par :

Adelaida Kim (non représentée par un conseil)

Au nom de :

L’auteure

État partie :

Ouzbékistan

Date de la communication :

5 octobre 2009 (date de la lettre initiale)

Références :

Décision prise en application de l’article 97 du règlement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 17 juillet 2012 (non publiée sous forme de document)

Date de s constatations :

4 avril 2018

Objet :

Arrestation, déclaration de culpabilité et peine d’amende pour participation à des rassemblements pacifiques non autorisés

Question(s) de procédure :

Épuisement des recours internes ; justification des griefs ; abus du droit de présenter une communication

Question(s) de fond :

Liberté d’expression et de réunion ; procès équitable ; détention arbitraire

Article(s) du Pacte :

2 (par. 1 à 3), 9 (par.1), 12, 14 (par. 1), 18, 19 et 21

Article(s) du Protocole facultatif :

2, 3 et 5 (par. 2 b))

1.L’auteure de la communication est Adelaida Kim, de nationalité ouzbèke, née en 1951. Elle affirme que l’État partie a violé les droits qu’elle tient des articles 2 (par. 1 à 3), 9 (par. 1), 12, 14 (par. 1), 18, 19 et 21 du Pacte. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’Ouzbékistan le 28 décembre 1995. L’auteure n’est pas représentée par un conseil.

Rappel des faits présentés par l’auteure

2.1Le 6 décembre 2008, l’auteure et 10 autres personnes ont manifesté pacifiquement pour protester contre l’arbitraire dont faisaient preuve les forces de l’ordre à Tachkent dans l’exercice de leurs fonctions. La manifestation a eu lieu devant le siège du Département d’enquête du Bureau du Procureur général. À l’issue de la manifestation, tous les participants se sont dispersés d’eux-mêmes, dans le calme.

2.2Plus tard ce jour-là, tous les manifestants, y compris l’auteure, ont été appréhendés par la police à différents endroits pour « désobéissance ou résistance aux ordres légitimes de policiers », « atteinte à l’ordre public » et participation à une manifestation publique non autorisée. Les policiers ont établi des procès-verbaux d’infraction administrative et des rapports, en ouzbek, concernant l’auteure et les autres manifestants, alors qu’aucun des intéressés ne maîtrisait cette langue. Les manifestants ont tous été placés en état d’arrestation et conduits au commissariat de police du district Mirzo-Ulugbek, où ils ont été inculpés sur le fondement des articles 194 (par. 1), 195 et 201 (par. 1) du Code de la responsabilité administrative.

2.3L’auteure a déposé auprès du procureur du district de Mirzo-Ulugbek une requête demandant l’ouverture d’une procédure pénale contre les policiers qui l’avaient arrêtée. Elle faisait valoir que ces agents avaient abusé de leurs fonctions, l’avaient conduite de force au commissariat, avaient falsifié les preuves écrites puis affirmé mensongèrement devant le tribunal qu’ils avaient demandé aux manifestants de cesser leur manifestation et que ceux-ci portaient des banderoles aux inscriptions provocatrices et avaient tenté de s’enfuir en s’opposant à leurs ordres et en les insultant.

2.4Le 6 décembre 2008, le tribunal du district Mirzo-Ulugbek a déclaré l’auteure coupable sur le fondement des articles 201 (par. 1), 194 (par. 1) et 195 du Code de la responsabilité administrative et lui a infligé une amende d’un montant équivalant à 10 fois le salaire mensuel. Le 22 décembre 2008, l’auteure a fait appel de cette décision auprès du Président du tribunal de district, qui l’a déboutée le 11 février 2009. Elle dit que le tribunal a tenu plusieurs audiences avant de rejeter son appel. Bien que ces audiences lui aient été notifiées, elle n’a été autorisée à se présenter au tribunal que le 6 février 2009, en qualité de témoin dans l’affaire de deux autres participants à la manifestation. Le 18 février, elle a formé un recours en annulation auprès du tribunal municipal de Tachkent, qui l’a déboutée le 26 février 2009. Alors que l’auteure avait demandé à participer à l’audience, celle-ci ne lui a pas été notifiée et a eu lieu en son absence. Le 14 mars 2009, le tribunal municipal a rejeté la requête déposée par l’auteure au titre de la procédure de contrôle, là encore en son absence et sans notification. Se référant aux articles 320 et 321 du Code de la responsabilité administrative, le tribunal a considéré que la présence de l’auteure aux audiences concernant son recours en annulation et sa requête au titre de la procédure de contrôle était inutile. Le 3 avril 2009, l’auteure a déposé une nouvelle requête au titre de la procédure de contrôle auprès de la Cour suprême, qui l’a rejetée le 4 août 2009. Elle indique aussi qu’elle a déposé plusieurs plaintes auprès du Bureau du Procureur, de l’administration présidentielle, du Parlement et de la Cour constitutionnelle, apparemment sans résultat. Elle a également récusé devant les autorités compétentes, sans succès, les juges chargés de statuer en appel et dans le cadre de la procédure en annulation.

2.5L’auteure réfute les accusations portées contre elle et affirme que les articles 194 (par. 1), 195 et 201 (par. 1) du Code de la responsabilité administrative ne sont pas applicables dans son cas. Se référant à un commentaire du Code, elle explique que l’article 201 (par. 1) sanctionne uniquement les infractions à la procédure régissant l’organisation et la tenue de réunions, rassemblements, marches et manifestations. Premièrement, elle n’a pas organisé la manifestation en question et les tribunaux n’ont pas établi qui en était l’organisateur. Deuxièmement, la législation nationale ne prévoit pas de procédure régissant l’organisation de manifestations de masse ou de piquets. D’après le commentaire évoqué, les infractions à la procédure sont notamment le non-respect des buts, de la forme et du lieu d’une réunion ; l’atteinte à l’ordre public ; le port d’armes ; le non‑respect des ordres légitimes exigeant qu’il soit mis fin à la réunion. L’auteure indique que la manifestation ne portait pas atteinte à l’ordre public, qu’elle était pacifique, qu’elle n’a en rien perturbé les transports ni la circulation des piétons, que les manifestants ne portaient pas d’armes et qu’il ne leur a pas été ordonné de mettre fin à la manifestation. L’auteure fait en outre valoir que les articles 194 (par. 1) et 195 du Code s’appliquent aux situations de non-respect des ordres donnés pardes policiers et d’appels publics ou de diffusion d’informations visant à provoquer des actes de désobéissance publique à de tels ordres. Elle affirme qu’elle ne s’est à aucun moment opposée à son arrestation, qu’elle a obéi à tous les ordres des policiers lors de son arrestation et qu’elle n’a appelé personne à désobéir à ces ordres, qu’on ne lui a pas demandé de cesser de manifester ni de produire une pièce d’identité et que la manifestation s’est terminée pacifiquement à l’initiative des participants.

2.6L’auteure dit qu’elle a épuisé tous les recours internes disponibles utiles.

2.7Le 6 octobre 2011, l’auteure a demandé à l’État partie le remboursement des dépenses qu’elle avait encourues ainsi que le versement d’une indemnité en réparation du préjudice moral subi, conformément à la législation nationale.

Teneur de la plainte

3.1L’auteure soutient que son arrestation était arbitraire et a constitué une violation des droits qu’elle tient de l’article 9 (par. 1) du Pacte. Elle affirme que la manifestation était de nature pacifique et qu’à aucun moment on ne lui avait demandé d’y mettre fin. Par conséquent, son arrestation n’était pas conforme à la loi et était injustifiée. Selon les articles 285 à 287 du Code de la responsabilité administrative, l’arrestation administrative est autorisée lorsqu’il s’agit d’empêcher la commission d’une infraction et si l’intéressé ne peut pas être identifié au moment de l’arrestation. L’auteure dit que la police n’avait aucun motif légal pour arrêter les manifestants, qui étaient en possession de pièces d’identité et défilaient pacifiquement, ni pour les conduire au commissariat. De plus, son arrestation n’a pas été consignée.

3.2L’auteure affirme également que l’État partie, en la déclarant, à tort, coupable d’infraction aux articles 194 (par. 1), 195 et 201 (par. 1) du Code de la responsabilité administrative et en lui infligeant une amende, a violé les droits qui lui sont garantis aux articles 19 et 21 du Pacte. Elle avance en outre qu’elle a été déclarée coupable sur la base d’un commentaire et non d’une loi. Elle ajoute que le commentaire en question contredit les articles 29 et 33 de la Constitution et les normes internationales dans la mesure où il subordonne la tenue d’une réunion à l’obtention préalable d’une autorisation écrite.

3.3L’auteure affirme en outre qu’il y a eu violation du droit à un recours utile que lui garantit l’article 2 (par. 3) du Pacte. Se référant aux articles 36 et 271 du Code de la responsabilité administrative, elle explique qu’une accusation administrative peut être formulée dans un délai de deux mois maximum après la commission de l’infraction et qu’une procédure ouverte doit être close à l’expiration de ce délai. Selon l’article 320 (par. 3) du Code, les décisions rendues en matière administrative entrent en vigueur dès que le tribunal saisi du recours en annulation a statué. L’auteure avance que deux mois s’étaient écoulés depuis les événements du 6 décembre 2008 lorsque le tribunal de district a rejeté son appel, le 11 février 2009. Par conséquent, il aurait dû avoir été mis fin à la procédure administrative le 6 février 2009 au plus tard. En ne mettant pas fin à la procédure, les juridictions nationales ont bafoué les droits que l’article 2 (par. 1 et 3 a)) du Pacte garantit à l’auteure.

3.4Sans se référer à des dispositions précises du Pacte, l’auteure fait état de plusieurs irrégularités de procédure commises au cours de la procédure administrative. Elle souligne en particulier que le tribunal de première instance ne l’a pas autorisée à citer des témoins, à étudier le dossier et à être représentée par un avocat ; que ses requêtes à cet égard n’ont pas été consignées dans les notes d’audience ; que des observateurs internationaux et des représentants de médias n’ont pas été autorisés à assister à l’audience ; que les rapports à charge de la police ont été établis en ouzbek, langue qu’elle ne maîtrisait pas, et qu’on ne lui avait pas fourni de traduction en russe. Elle affirme de plus que la cour d’appel n’a pas tenu d’audience sur son recours, alors qu’elle avait été interrogée une fois par le tribunal en qualité de témoin dans le cadre d’une procédure administrative concernant un autre manifestant. Elle affirme également que les notes d’audience ont été falsifiées et qu’elle n’a pas été autorisée à les photocopier. Ses requêtes demandant à citer des témoins qui pouvaient confirmer les nombreux vices de procédure ont été rejetées. En outre, les audiences concernant son appel et son recours en annulation, ainsi que l’audience au titre de la procédure de contrôle, le 14 mars 2009, se sont déroulées en son absence alors que l’auteure avait demandé à y assister, et elle n’a pas été dûment informée de leur tenue, en violation de la loi. L’auteure fait valoir que les articles 320 et 321 du Code de la responsabilité administrative ne prévoient pas que les audiences dans le cadre d’un recours en annulation ou de la procédure de contrôle puissent se tenir en l’absence de l’intéressé. Enfin, elle affirme que la procédure devant la Cour suprême a été extrêmement longue puisque près de quatre mois se sont écoulés avant que celle-ci examine sa demande de contrôle.

Observations de l’État partie sur la recevabilité

4.1Par une note verbale en date du 12 septembre 2012, l’État partie a fait part de ses observations concernant la recevabilité. Il affirme que l’auteure n’a pas épuisé les recours internes puisque son appel n’a pas été examiné par la Cour suprême et qu’elle n’a pas saisi celle-ci des griefs qu’elle soulève devant le Comité. La Cour suprême n’a pas examiné la teneur de ses plaintes et ne l’a pas empêchée de faire appel. De plus, l’auteure a invoqué devant les tribunaux nationaux des dispositions non pas du Pacte mais de la législation nationale. Les arguments juridiques et les renseignements factuels soumis par l’auteure ne sont pas suffisants pour que le Comité examine ses griefs. Quant au fond, ses arguments portent sur l’appréciation des faits et des éléments de preuve et l’interprétation du droit effectuées par les tribunaux nationaux ; l’auteure n’a pas montré en quoi l’appréciation effectuée par les tribunaux nationaux avait conduit à une violation du Pacte ni qu’elle était arbitraire et constituait un déni de justice. L’auteure attend du Comité qu’il agisse comme une quatrième instance et procède à une nouvelle appréciation de ses griefs. De surcroît, elle emploie des termes excessifs à l’égard des autorités nationales, abusant de son droit de soumettre une communication. L’État partie affirme également que les allégations de l’auteure concernant les procédures judiciaires ne sont pas fondées.

4.2À la lumière de ce qui précède, l’État partie dit que la communication de l’auteure devrait être déclarée irrecevable pour défaut de fondement.

Commentaires de l’auteure sur les observations de l’État partie sur la recevabilité

5.1Le 12 octobre 2012, l’auteure a contesté les observations de l’État partie au motif qu’elles n’étaient pas fondées. Elle souligne qu’elle a saisi la Cour suprême au titre de la procédure de contrôle le 13 avril 2009 et le 20 juillet 2009, alléguant des violations des droits qui lui sont garantis par le Pacte. Le 4 août 2009, la Cour suprême a rejeté ses requêtes. L’auteure ajoute qu’elle a établi sa communication conformément aux dispositions de l’article 5 (par. 2) du Protocole facultatif et qu’elle n’ignore pas que le Comité ne peut pas, en général, revoir l’appréciation des faits et des éléments de preuve effectuée par les juridictions nationales ni l’interprétation de la législation nationale, sauf si ces appréciation et interprétation ont été arbitraires ou ont représenté un déni de justice.

5.2L’auteure ajoute qu’elle a montré que les juridictions nationales avaient apprécié les éléments de preuve et interprété la législation en l’espèce de façon arbitraire. Elle souligne qu’elle n’a jamais demandé au Comité de faire office de quatrième instance mais qu’elle a exercé son droit de présenter une communication conformément aux articles 1er et 2 du Protocole facultatif. Elle reconnaît le caractère émotionnel, mais non excessif, des termes employés dans sa communication et prétend que l’État partie use de cet argument pour empêcher le Comité d’examiner celle-ci. Elle rappelle qu’il a fallu quatre mois à la Cour suprême pour examiner sa requête au titre de la procédure de contrôle. En conséquence, le dépôt d’un nouveau recours devant la Cour aurait été très long et aurait pu lui faire dépasser le délai de cinq ans fixé par le Comité à l’article 96 c) de son règlement intérieur pour la présentation d’une communication individuelle. L’auteure a soumis sa communication conformément aux dispositions de cet article et n’a donc pas abusé de son droit de présenter une communication. Elle fait en outre valoir qu’il serait inutile de contester de nouveau la décision de la Cour suprême en date du 4 août 2009 auprès du Président de la Cour étant donné que celui-ci n’a rendu aucune décision sur des requêtes individuelles depuis 2006.

Observations de l’État partie sur le fond

6.1Le 22 janvier 2013, l’État partie a fait part de ses observations sur le fond. Il note que les autorités chargées de faire appliquer la loi ont soigneusement examiné la communication de l’auteure et qu’il fonde ses observations sur l’appréciation qu’elles en ont faite. Il réitère ses observations concernant la recevabilité et argue que l’auteure n’a pas montré en quoi les droits qui lui sont garantis aux articles 9, 19 et 21 du Pacte ont été bafoués par les autorités et les juridictions nationales. Il souligne que la législation nationale garantit les droits énoncés dans le Pacte à tous les citoyens et prévoit des recours judiciaires et extrajudiciaires. Le droit à un recours est consacré à l’article 44 de la Constitution et dans la loi relative aux requêtes des citoyens. En Ouzbékistan, les citoyens ont le droit de soumettre une requête lorsqu’ils sont fondés à le faire. L’auteure a bénéficié de recours utiles. Ses griefs ont été dûment examinés par les autorités et les juridictions nationales, qui les ont rejetés pour défaut de fondement.

6.2L’État partie rappelle en outre que les juridictions ont considéré que l’auteure n’avait pas été arrêtée ni détenue arbitrairement. Les tribunaux ont examiné tous les éléments de preuve à leur disposition, tels que le procès-verbal d’infraction administrative et les rapports de police, qui confirmaient que l’auteure avait participé dans un lieu public à un rassemblement non autorisé, qu’elle avait insulté des policiers et désobéi à leurs ordres lui enjoignant de cesser d’enfreindre la loi et que, en présence d’un témoin, elle avait refusé de signer le procès-verbal d’infraction administrative ou de s’expliquer par écrit. Conformément à l’article 33 de la Constitution, les autorités nationales ne peuvent interrompre ou interdire un rassemblement que pour des raisons de sécurité justifiées. Cette disposition est conforme à l’article 21 du Pacte. Les arguments de l’auteure qui affirme que la manifestation n’a pas été interrompue ni interdite et qu’elle avait simplement participé à une manifestation pacifique n’ont pas été confirmés. Les tribunaux nationaux ont examiné avec objectivité et de manière approfondie l’affaire administrative de l’auteure, établi les circonstances de l’espèce et apprécié les actes de l’auteure en se fondant sur les éléments de preuve dont ils disposaient. C’est après avoir dûment considéré les circonstances aggravantes et atténuantes qu’ils ont décidé de la peine, qui est proportionnée à l’infraction commise. Le Bureau du Procureur général n’a pas trouvé de motif pour contester les décisions des tribunaux. Dans ces circonstances, l’État partie conclut que la communication de l’auteur devrait être rejetée pour défaut de fondement.

Commentaires de l’auteure sur les observations de l’État partie concernant le fond

7.1Le 15 mars 2013, l’auteure a fait part de ses commentaires sur les observations de l’État partie concernant le fond. Elle formule une nouvelle fois l’intégralité de ses griefs, faisant valoir qu’elle a produit suffisamment d’éléments pour prouver que les juridictions nationales ont agi de façon arbitraire et ne lui ont pas rendu justice. Le fait que sa communication a été examinée par les autorités de l’État partie chargées de faire appliquer la loi montre que l’examen manque d’indépendance. L’auteure affirme que la décision d’interdire un rassemblement appartient aux khokims (gouverneurs locaux) et non à la police, et que l’État partie n’a communiqué aucune décision émanant de telles autorités. Le caractère pacifique du rassemblement est confirmé par des médias électroniques et ressort également des pourvois formés par deux autres personnes,K. et B., qui avaient participé à ce rassemblement. En ce qui concerne les éléments qui, selon l’État partie, prouveraient sa culpabilité, l’auteure affirme qu’ils se limitent à un certain nombre de rapports établis en langue ouzbèke par des policiers. Elle fait observer qu’aucun de ces policiers n’était présent au rassemblement et qu’elle ne maîtrise pas la langue ouzbèke. Ses demandes tendant à ce que les documents soient traduits en russe ont été rejetées et elle a donc refusé d’apposer sa signature au procès-verbal. Les requêtes par lesquelles elle a demandé de pouvoir citer des témoins ont également été rejetées. Dans ces conditions, l’auteure récuse l’argument de l’État partie, selon qui son affaire a été examinée de façon exhaustive, objective et approfondie.

7.2L’auteure fait valoir que la législation nationale ne prévoit pas de procédure pour solliciter une autorisation préalable à l’organisation ou à la tenue d’un rassemblement public. À défaut, c’est un commentaire à l’article 201 (par. 1) du Code de la responsabilité administrative qui sert généralement de directive. S’agissant de ce commentaire, l’auteure affirme que seul l’organisateur du rassemblement peut être tenu pour responsable sur le fondement de l’article 201 (par. 1) du Code. L’enquête n’ayant pas prouvé qu’elle avait organisé le rassemblement, le fait de l’avoir sanctionnée parce qu’elle n’aurait pas obtenu d’autorisation préalable est illégal. L’auteure affirme aussi que l’obligation d’obtenir une autorisation préalable est contraire au droit international. Elle renvoie aux Lignes directrices de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur la liberté de réunion pacifique, selon lesquelles « [t]oute pratique n’étant pas expressément interdite par la loi devrait donc être présumée autorisée et les personnes désirant se réunir ne devraient pas être tenues d’obtenir une autorisation préalable » (p. 8). L’auteure ajoute que les personnes qui participent à un rassemblement peuvent être tenues pour responsables sur le fondement de l’article 201 (par. 1) du Code uniquement si elles enfreignent la procédure régissant la conduite du rassemblement en ne respectant pas les buts, la forme et le lieu du rassemblement, en attentant à l’ordre public, en portant des armes ou en n’obéissant pas aux ordres légitimes leur enjoignant de mettre fin au rassemblement. Elle réaffirme que la manifestation s’est déroulée pacifiquement dans un lieu public, que les manifestants n’ont pas perturbé la circulation des piétons ni les transports publics, qu’ils n’ont pas porté atteinte à l’ordre public, par exemple en criant des slogans, en proférant des insultes ou en se battant, qu’ils ne portaient pas d’armes et qu’ils se sont dispersés de leur propre initiative, sans l’intervention des autorités. Par conséquent, l’arrestation de l’auteure par la police a constitué une violation de l’article 21 du Pacte.

7.3L’auteure dénonce une violation des droits qu’elle tient de l’article 14 (par. 1 et 5) du Pacte. Elle souligne en particulier qu’elle a été déclarée coupable sur la base de déclarations de policiers, que les tribunaux nationaux n’ont pas agi d’une manière compétente, indépendante et impartiale, que les audiences se sont tenues à huis clos et que des observateurs internationaux n’ont pas été autorisés à y assister, et que l’examen effectué par le tribunal n’était pas conforme au droit interne.

7.4L’auteure soutient que l’État partie, en l’arrêtant et en la déclarant coupable d’avoir tenu un rassemblement pacifique, a aussi violé les articles 18 (par. 1) et 19 (par. 1 et 2) du Pacte.

7.5L’auteure réaffirme que son arrestation, le 6 décembre 2008, a constitué une violation des dispositions de l’article 9 (par. 1) du Pacte. Elle affirme en outre que l’Ouzbékistan enfreint systématiquement ces dispositions. Elle a régulièrement été arrêtée par la police de Tachkent de façon arbitraire, la dernière fois le 1er mars 2013 alors qu’elle manifestait et demandait à voir le Procureur général. Elle protestait contre le comportement délictueux d’un policier envers sa fille. En conséquence de quoi, elle a été conduite au commissariat où elle a été retenue pendant quatre heures. Elle a été libérée pour raisons de santé. Elle affirme que, en règle générale, les arrestations effectuées dans de telles circonstances ne sont pas consignées et sont dissimulées sous le terme d’« invitations à un entretien », les personnes concernées faisant l’objet de menaces, de chantage et de propos injurieux.

7.6L’auteure réfute l’argument avancé par l’État partie au titre de l’article 2 (par. 3) du Pacte, à savoir qu’un système de recours utiles existe en Ouzbékistan. Elle fait valoir que les tribunaux nationaux ne sont pas indépendants puisque la séparation des pouvoirs n’existe pas dans la pratique. Bien qu’elle ait le droit de contester devant les tribunaux nationaux des actes illicites des agents de l’État, toutes ses requêtes ont été rejetées, ce qui montre qu’elle a été privée de recours utiles. L’auteure affirme en outre que ses recours devant le Bureau du Procureur n’ont pas abouti, ce qui prouve l’inefficacité de tels recours. Enfin, elle relève que l’État partie a reconnu qu’elle s’était prévalu des moyens de recours internes, alors qu’il l’avait contesté dans ses observations concernant la recevabilité.

Observations complémentaires de l’État partie

8.1Le 8 juillet 2013, l’État partie a fait part d’observations complémentaires sur le fond, réfutant les griefs de l’auteure pour défaut de fondement. Il répète que l’auteure a été déclarée coupable sur le fondement des dispositions du Code de la responsabilité administrative pour avoir participé à une manifestation non autorisée. Sa culpabilité a été établie, entre autres, sur la base des dépositions de témoins, des rapports de police, du procès-verbal de l’infraction administrative et des témoignages d’autres manifestants qui ont également été reconnus coupables. Le tribunal de district a examiné son dossier conformément aux dispositions des articles 305 à 311 du Code. Les droits de l’auteure dans la procédure lui ont été expliqués, comme le prévoit l’article 294 du Code, y compris son droit à un avocat. L’État partie ajoute que les griefs de l’auteure ont été examinés par le groupe de travail interdisciplinaire sur les droits de l’homme, présidé par le Ministre de la justice.

8.2L’État partie rappelle que, conformément à l’article 33 de la Constitution, les autorités nationales peuvent interrompre ou interdire un rassemblement uniquement pour des raisons de sécurité justifiées. Selon l’article 25 de la loi relative aux autorités étatiques locales, les khokims des régions, des districts ou des villes prennent des mesures visant à préserver l’ordre public, à combattre la criminalité, à assurer la sécurité des citoyens et protéger leurs droits et leur santé, ainsi qu’à lutter contre les catastrophes naturelles, les épidémies et d’autres situations extrêmes. Pour leur part, les policiers, dans les limites de leurs compétences, veillent à la protection des droits et des intérêts légitimes des citoyens, assurent le maintien de l’ordre public et de la sécurité et luttent contre la criminalité. Les dispositions susmentionnées sont conformes aux prescriptions de l’article 21 du Pacte.

8.3L’État partie rejette l’argument, selon lui non étayé, de l’auteure qui affirme que la manifestation n’était pas interdite et qu’il n’y a pas été mis fin, et qu’elle a pris simplement part au rassemblement, qui a duré trente minutes et était de nature pacifique. Il soutient que cet argument ne correspond pas à la réalité et que l’auteure cherche à égarer le Comité.

8.4En ce qui concerne le grief que l’auteure tire de l’article 14 du Pacte, l’État partie renvoie à l’article 273 du Code de la responsabilité administrative, soulignant que la procédure administrative peut se dérouler en ouzbek, en karakalpak ou dans une langue localement majoritaire. Les parties à la procédure qui ne maîtrisent pas la langue de la procédure ont le droit de se familiariser avec les pièces du dossier, de bénéficier de l’assistance d’un interprète et de s’adresser au tribunal dans leur langue maternelle. L’auteure n’a pas sollicité l’assistance d’un interprète lorsque le procès-verbal d’infraction administrative a été établi ni lorsque le tribunal a examiné son affaire.

8.5L’État partie affirme que les griefs de l’auteure ont été dûment appréciés et ont été jugés non fondés, comme le prouvent les pièces figurant au dossier administratif. Les décisions de justice ont été correctement étayées et rien ne justifie leur annulation ou leur modification.

8.6L’État partie relève en outre l’incohérence des arguments de l’auteure. Par exemple, celle-ci se plaint d’une violation de l’article 14 du Pacte tout en reconnaissant qu’elle a été déclarée coupable d’infraction administrative par un tribunal et a exercé son droit de contester sa peine devant des juridictions supérieures. Elle affirme aussi avoir été arrêtée plusieurs fois de façon arbitraire sans avancer la moindre preuve à ce sujet. Elle se réfère de surcroît à des dispositions juridiques qui ne sont plus en vigueur.

8.7L’État partie conclut que l’auteure n’a pas communiqué le moindre fait ou élément nouveau prouvant qu’elle n’avait pas commis l’infraction administrative reprochée, et qu’elle forme des conjectures sur le rôle et la place du pouvoir judiciaire et du pouvoir exécutif en Ouzbékistan.

Commentaires complémentaires de l’auteure sur les observations de l’État partie

9.1Le 12 août 2013, l’auteure a contesté les observations de l’État partie qui prétend qu’elle conjecture sur le rôle des pouvoirs judiciaire et exécutif en Ouzbékistan, qu’elle altère la réalité et cherche à égarer le Comité et que ses allégations indiquant qu’elle a fait l’objet de plusieurs arrestations arbitraires ne sont pas fondées. Elle ajoute qu’elle a été arrêtée arbitrairement le 13 mai 2012 après avoir, avec une autre défenseure des droits de l’homme, déposé des fleurs devant le Monument du courage à Tachkent pour commémorer les événements d’Andijan du 13 mai 2005. Toutes deux ont été arrêtées par M., responsable du département de la police du district Mirzo-Ulugbek chargé de la lutte contre le banditisme et le terrorisme. Leur arrestation n’a pas été consignée et a duré une dizaine d’heures durant lesquelles elles n’ont pas été autorisées à manger ni à se rendre aux toilettes. L’auteure a porté plainte auprès du tribunal de district contre les agissements illicites de M. Le tribunal a rejeté sa plainte le 24 mai 2013. D’après la décision du tribunal, la plainte a été rejetée pour des raisons de procédure parce que l’auteure avait refusé d’acquitter des frais de justice sans donner d’explications sur sa situation financière. On lui a donné dix jours pour le faire.

9.2L’auteure a demandé à être exonérée des frais de justice, arguant que sa seule source de revenus était sa pension de retraite. Le 14 juin 2013, le tribunal a jugé cette explication insuffisante car l’auteure n’avait pas produit d’éléments attestant la difficulté de sa situation financière. Il a donc refusé d’examiner sa plainte. Le 10 juin 2013, l’auteure a fait appel de la décision du 24 mai 2013, soutenant que, conformément à l’article 10 de la loi relative aux recours en justice contre des actes et décisions violant les droits et libertés des citoyens, des frais de justice ne pouvaient lui être imposés que si le tribunal la déboutait de son action pour des raisons de fond. Elle a également demandé le renvoi de son affaire devant un autre juge. Le 17 juin 2013, le président du tribunal de district a refusé d’examiner sa requête pour des raisons similaires. Le 24 juin 2013, l’auteure s’est pourvue auprès du tribunal municipal de Tachkent contre les décisions du 24 mai et du 14 juin 2013. Elle a soutenu que sa plainte avait été rejetée alors même qu’elle avait produit, comme on le lui avait demandé, une attestation indiquant le montant de sa pension de retraite au 10 juin 2010. Elle a réclamé en outre aux autorités compétentes la destitution du juge.

9.3L’auteure affirme que, en refusant d’examiner sa plainte dénonçant les agissements illicites de M., les tribunaux nationaux ont commis un déni de justice à son égard. Elle réaffirme qu’elle a suffisamment étayé ses autres griefs soulevés devant le Comité.

9.4Le 24 février 2015, l’auteure a formulé de nouvelles allégations au titre des articles 2, 9, 14 et 19 du Pacte. Le 8 mai 2014, l’auteure et son amie B. ont manifesté devant l’ambassade d’Ukraine à Tachkent pour exprimer leur indignation face à la répression sévissant dans l’est de l’Ukraine. L’auteure a demandé aux agents de sécurité de lui permettre de contacter le service de communication de l’ambassade et de remettre à l’Ambassadeur une banderole portant l’inscription suivante « Procès contre la junte de Kiev ». Peu après, un certain D. a arraché la banderole des mains de l’auteure, la menaçant de la conduire au poste de police si elle refusait de partir. L’auteure et B. se sont rendues au Bureau du Procureur pour porter plainte contre les agissements de D. Pendant qu’elles attendaient, elles ont vu une vingtaine de policiers pénétrer dans l’immeuble, dont un certain E. Celui-ci s’est mis à proférer des injures et a insulté publiquement l’auteure, disant qu’elle n’avait rien à faire en Ouzbékistan et devrait quitter le pays. L’auteure est rentrée chez elle. Quelques heures plus tard, elle a été appréhendée et conduite à un poste de police de district où un procès-verbal d’infraction administrative a été établi contre elle sur le fondement de l’article 201 (par. 1) du Code de la responsabilité administrative. Une audience a eu lieu dans la soirée. E. a fait irruption dans le prétoire et a crié que la peine infligée constituait un avertissement à l’endroit de l’auteure, qui devait cesser de se mêler de ce qui ne la regardait pas.

9.5Le 8 mai 2014, le tribunal de district, siégeant en formation de juge unique, a déclaré l’auteure coupable et l’a condamnée à une peine d’amende équivalant à 60 fois le salaire minimum, soit le montant de sa pension de retraite pendant deux ans et demi. Le 26 mai 2014, le tribunal municipal de Tachkent a confirmé cette décision en appel. Le 12 janvier 2015, la Cour suprême a réduit la peine d’amende à l’équivalent de trois fois le salaire minimum. L’auteure considère que le juge a été influencé par les menaces de E. et a forgé la peine qui lui a été infligée. Elle affirme en outre que le juge, en établissant qu’elle avait brandi la banderole devant le Bureau du Procureur général, s’est trompé dans l’appréciation des faits puisqu’elle avait auparavant remis cette banderole à l’Ambassadeur de l’Ukraine par l’intermédiaire de D. Elle affirme aussi que plusieurs témoins pouvaient confirmer ce fait mais que ses requêtes demandant à ce qu’ils soient entendus ont été rejetées. Elle conteste également les accusations formulées sur le fondement de l’article 201 du Code de la responsabilité administrative. Elle explique que cet article s’applique aux infractions à la procédure régissant l’organisation et la tenue de réunions, rassemblements, marches et manifestations ; or elle formait un piquet, qui n’est pas une manifestation de masse et ne relève donc pas du champ d’application de l’article 201.

9.6L’auteure se plaint aussi d’avoir été victime d’un déni de justice, en violation de l’article 2 (par. 3) du Pacte, parce que les juridictions nationales ont, pour des raisons de formalisme, rejeté ses plaintes dénonçant les agissements illicites de E., qui constituaient une atteinte à ses droits et à la dignité de sa personne. Le 19 janvier 2015, le tribunal de district a refusé d’examiner sa plainte parce qu’elle n’avait pas acquitté les frais de justice demandés et n’avait pas étayé ses griefs. S’agissant des frais de justice, l’auteure renvoie à la décision no 140 du Cabinet des ministres en date du 3 novembre 1994 selon laquelle, en cas de plainte contre des agissements illicites d’agents de l’État, des frais de justice sont imposés aux personnes reconnues coupables lorsque le tribunal rend sa décision. Elle renvoie également à l’article 10 de la loi relative aux recours contre des actes et décisions portant atteinte aux droits et libertés de citoyens, qui prévoit que seuls les justiciables dont la requête est rejetée paient les frais de justice, lesquels sont sinon à la charge des agents visés par la plainte. En ce qui concerne les éléments de preuve disponibles, l’auteure affirme qu’elle a fourni des copies des plaintes déposées par son amie B., qui avait été témoin des événements et s’était engagée à déposer à l’audience. Elle dit que plusieurs agents de l’État ont été témoins des événements mais avaient refusé de déposer. En outre, elle a demandé au tribunal le 2 février 2015 de recueillir des éléments de preuve, conformément à l’article 61 (par. 1) du Code de procédure civile qui dispose que les personnes estimant que la fourniture de preuves risque d’être difficile ou problématique peuvent demander au tribunal, avant ou après avoir porté plainte, de réunir des éléments de preuve. Or, le 9 février 2015, le tribunal de district a refusé d’examiner sa plainte et rejeté sa demande. Par conséquent, l’auteure affirme que le tribunal n’a pas pris de mesures pour éclaircir les circonstances de sa requête, en violation de l’article 15 du Code de procédure civile. Elle a fait appel de cette décision auprès du tribunal municipal et a récusé le juge devant les autorités compétentes.

9.7L’auteure affirme en outre qu’il y a violation des articles 2 (par. 2) et 12 du Pacte du fait des dispositions juridiques obligeant les citoyens à solliciter tous les deux ans l’autorisation de quitter le pays et à payer une taxe équivalant à la moitié du salaire minimum. Elle a saisi plusieurs autorités à cet égard, sans succès.

Nouvelles observations de l’État partie

10.1Le 15 mai 2015, l’État partie a répondu brièvement aux nouvelles allégations de l’auteure concernant les événements du 8 mai 2014. Il fait valoir que les tribunaux nationaux ont examiné l’affaire de façon exhaustive et approfondie, établi les circonstances conformément aux prescriptions de la législation interne et apprécié la recevabilité des éléments de preuve. Il affirme que la culpabilité de l’auteure est étayée par le procès-verbal d’infraction administrative, un rapport, des explications et d’autres éléments. Il n’y a donc aucune raison de réexaminer les décisions de justice en question.

10.2Le 16 octobre 2015, l’État partie a réitéré ses observations précédentes concernant les événements du 8 mai 2014.

Commentaires de l’auteure sur les nouvelles observations de l’État partie

11.Le 30 juillet 2015, l’auteure a présenté de nouveaux commentaires. Elle formule une nouvelle fois ses griefs concernant la procédure relative à la manifestation du 8 mai 2014 et ajoute que, en dépit de ses requêtes, son amie B., qui a été témoin des événements, n’a jamais été invitée à déposer devant le tribunal. Elle communique le témoignage de B. et ajoute qu’un notaire a refusé d’authentifier la signature de B. pour des raisons politiques. Sa plainte dénonçant le refus du notaire ayant été rejetée par un fonctionnaire du Ministère de la justice, l’auteure a considéré que les recours internes seraient inutiles et a décidé de ne pas déposer de nouveau pourvoi. Elle conteste l’affirmation de l’État partie, selon qui les décisions du tribunal sont licites et étayées. Elle affirme que les notes d’audience du 8 mai 2014 contredisent l’argument de l’État partie qui prétend que les juridictions nationales ont examiné son affaire de façon exhaustive et approfondie. Elle souligne que, dans ces notes, elle est désignée comme étant « la contrevenante ».

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

12.1Avant d’examiner tout grief formulé dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

12.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même question n’était pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

12.3En ce qui concerne la disposition du paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité note que l’État partie conteste la recevabilité de la communication concernant la manifestation du 6 décembre 2008 au motif que l’auteure n’a pas épuisé les recours internes puisque sa plainte n’a pas été examinée par la Cour suprême et que l’auteure n’a pas saisi celle-ci des griefs qu’elle soulève devant le Comité. Le Comité prend note des observations de l’auteure, étayées par des documents justificatifs, indiquant qu’elle a déposé auprès de la Cour suprême deux requêtes au titre de la procédure de contrôle, en affirmant être victime de violation des droits qui lui sont garantis par le Pacte, et que les deux ont été rejetées. Il note également que, selon l’auteure, la procédure de contrôle devant la Cour suprême était longue et le dépôt d’une nouvelle requête aurait pu l’empêcher de saisir le Comité pour cause d’expiration du délai de cinq ans fixé à l’article 96 c) du règlement intérieur du Comité. Il prend note en outre de l’argument de l’auteure, que l’État partie n’a pas réfuté, indiquant qu’un recours devant le Président de la Cour suprême contre le rejet de sa requête par la Cour serait inutile étant donné que ce magistrat n’a pas rendu de décision sur des requêtes individuelles depuis 2006.

12.4Le Comité rappelle que les demandes de contrôle des décisions de justice qui sont devenues exécutoires et qui relèvent du pouvoir discrétionnaire d’un juge constituent un recours extraordinaire et que l’État partie doit montrer qu’il existe une chance raisonnable qu’elles offriront un recours utile dans les circonstances de l’espèce.Le Comité observe que, en l’occurrence, l’État partie n’a pas montré si, et dans combien de cas, des demandes de contrôle devant la Cour suprême ou le Président de la Cour suprême avaient abouti, en particulier dans des affaires concernant le droit à la liberté d’expression et à la liberté de réunion. En conséquence, il considère que l’État partie n’a pas montré qu’il existait une chance raisonnable qu’une requête auprès de la Cour suprême ou de son Président via la procédure de contrôle donnerait une satisfaction effective dans le cas de l’auteure. Dans ces circonstances, le Comité considère que les dispositions du paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif ne l’empêchent pas d’examiner la présente communication.

12.5Le Comité prend note du grief de l’auteure, qui affirme que les dispositions juridiques obligeant les citoyens ouzbeks à solliciter une autorisation pour quitter le pays sont contraires aux articles 2 (par. 2) et 12 du Pacte. Il prend note également de son grief de violation de l’article 18 (par. 1) du Pacte lié au fait qu’elle a été déclarée coupable d’avoir tenu un rassemblement pacifique. Néanmoins, en l’absence de toute nouvelle information pertinente à cet égard de la part de l’auteure, le Comité considère que ces griefs ne sont pas suffisamment étayés aux fins de la recevabilité et les déclare irrecevables au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.

12.6Le Comité prend note du grief que l’auteure tire de l’article 14, à savoir que les garanties d’un procès équitable ont été bafouées tout au long de la procédure administrative, en particulier du fait que le tribunal a refusé de citer des témoins à décharge, de la laisser prendre connaissance du dossier et être représentée par un avocat, que les minutes du procès étaient inexactes, que des observateurs internationaux et des représentants des médias n’ont pas été autorisés à assister à l’audience, que l’auteure n’a pas pu obtenir une traduction en russe des rapports de police et que plusieurs audiences ont été tenues en l’absence de l’intéressée. Le Comité note toutefois que l’auteure n’a pas avancé d’arguments précis à l’appui de ce grief. En l’absence de toute nouvelle information à cet égard, il considère que cette partie de la communication n’est pas suffisamment étayée aux fins de la recevabilité et la déclare irrecevable au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.

12.7Le Comité prend note en outre des observations de l’État partie selon lesquelles l’auteure a abusé de son droit de présenter une communication en usant de termes excessifs dans sa communication. Il prend note de l’argument de l’auteure, qui affirme que sa communication était rédigée dans des termes non pas excessifs mais émotionnels et qu’elle s’est conformée à toutes les conditions requises pour soumettre une communication au Comité. Dans ces circonstances, et compte tenu du contenu du dossier, le Comité considère qu’il n’est pas empêché par l’article 3 du Protocole facultatif d’examiner la présente communication.

12.8Le Comité note que l’auteure affirme que l’État partie a manqué à ses obligations au titre des paragraphes 1 et 2 de l’article 2 du Pacte car il n’a pas protégé les droits qu’elle tient des articles 19 et 21, n’a pas adopté de mesures qui auraient permis de donner effet à ces droits et ne lui a pas offert de recours utile. Le Comité note que l’auteure affirme également être victime d’une violation des droits qu’elle tient des articles 19 et 21, lus isolément. Il rappelle sa jurisprudence, dont il ressort que les dispositions de l’article 2 du Pacte, qui énoncent une obligation générale à l’intention des États parties, ne peuvent pas être invoquées isolément dans une communication présentée en vertu du Protocole facultatif. Il considère en conséquence que les griefs que l’auteure tire des paragraphes 1 et 2 de l’article 2 du Pacte sont irrecevables au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.

12.9Enfin, le Comité considère que l’auteure a suffisamment étayé, aux fins de la recevabilité, ses griefs de violation des articles 9 (par. 1), 19 et 21,lus conjointement avec l’article 2 (par. 3)du Pacte, et il procède à leur examen quant au fond.

Examen au fond

13.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations que lui ont communiquées les parties.

13.2Le Comité prend note du grief de l’auteure, qui affirme qu’il y a eu violation des droits qu’elle tient des articles 19 et 21 du Pacte car elle a été arrêtée, déclarée coupable sur le fondement de l’article 201 (par. 1) du Code de la responsabilité administrative et condamnée à une peine d’amende pour avoir participé à des manifestations pacifiques le 6 décembre 2008 et le 8 mai 2014. Le Comité observe que la seconde de ces manifestations rassemblait seulement deux participants, dont l’auteure. Il observe aussi que l’auteure a été déclarée coupable de n’avoir pas respecté la procédure régissant l’organisation et la tenue de manifestations de masse, notamment parce qu’elle avait participé à une manifestation organisée sans autorisation préalable des autorités locales. Il considère que les autorités de l’État partie ont restreint le droit de l’auteure à la liberté d’expression et à la liberté de réunion, qui sont protégées par les articles 19 (par. 2) et 21 du Pacte. Par conséquent, il doit vérifier si ces restrictions sont ou non justifiables au regard de l’article 19 (par. 3) et de la seconde phrase de l’article 21 du Pacte.

13.3Le Comité renvoie au paragraphe 2 de son observation générale no 34 (2011) sur la liberté d’opinion et la liberté d’expression, dans lequel il dit que la liberté d’opinion et la liberté d’expression sont des conditions indispensables au développement complet de l’individu. Ces libertés sont essentielles pour toute société et constituent le fondement de toute société libre et démocratique. Le Comité rappelle que le paragraphe 3 de l’article 19 du Pacte n’autorise certaines restrictions que si elles sont expressément fixées par la loi et nécessaires : a) au respect des droits ou de la réputation d’autrui ; et b) à la sauvegarde de la sécurité nationale, de l’ordre public ou de la santé ou de la moralité publiques. Les restrictions à l’exercice de ces libertés doivent répondre aux critères stricts de nécessité et de proportionnalité. Elles doivent être appliquées exclusivement aux fins pour lesquelles elles ont été prescrites et doivent être en rapport direct avec l’objectif spécifique qui les inspire. Le Comité rappelle également qu’il incombe à l’État partie de montrer que les restrictions imposées aux droits garantis à l’article 19 du Pacte étaient en l’espèce nécessaires et justifiées. Enfin, le Comité rappelle que les restrictions à la liberté d’expression ne doivent pas avoir une portée trop large, c’est-à-dire qu’elles doivent constituer le moyen le moins perturbateur parmi ceux qui pourraient permettre d’obtenir le résultat recherché et elles doivent être proportionnées à l’intérêt à protéger.

13.4Le Comité rappelle que le droit de réunion pacifique, garanti par l’article 21 du Pacte, est un droit de l’homme fondamental qui est essentiel à l’expression publique des points de vue et opinions de chacun et indispensable dans une société démocratique. Ce droit suppose la possibilité d’organiser une réunion pacifique dans un lieu public, et d’y participer. Les organisateurs d’une réunion ont en règle générale le droit de choisir un lieu qui soit à portée de vue et d’ouïe du public ciblé, et l’exercice de ce droit ne peut faire l’objet que des seules restrictions : a) imposées conformément à la loi ; et b) nécessaires dans une société démocratique, dans l’intérêt de la sécurité nationale ou de la sûreté publique, de l’ordre public ou pour protéger la santé ou la moralité publiques ou les droits et libertés d’autrui. Lorsqu’ils imposent des restrictions au droit de réunion des particuliers afin de concilier ce droit avec l’intérêt général, les États parties doivent chercher à faciliter l’exercice de ce droit et non s’employer à le restreindre par des moyens qui ne sont ni nécessaires ni proportionnés. L’État partie est donc tenu de justifier la limitation du droit garanti à l’article 21 du Pacte.

13.5En l’espèce, le Comité prend note du grief de l’auteure, selon qui les restrictions qui lui ont été imposées n’étaient pas prévues par la loi puisque : a) il n’existe pas en Ouzbékistan de procédure officielle régissant l’organisation et la tenue de manifestations de masse, notamment l’obtention d’une autorisation préalable ; et b) si le paragraphe 1 de l’article 201 du Code de la responsabilité administrative a trait à l’organisation de manifestations de masse, il n’a pas été établi que l’auteure avait organisé la première manifestation et il n’est donc pas légal de la sanctionner parce qu’elle n’a pas obtenu d’autorisation préalable. Le Comité note en outre que l’auteure fait valoir que l’obligation d’obtenir une autorisation préalable est contraire aux articles 19 et 21 du Pacte. Il prend note également du grief de l’auteure qui affirme que l’article 201 (par.1) du Code de la responsabilité administrative n’est pas applicable à la manifestation tenue en 2014, celle-ci n’étant pas une manifestation de masse mais un piquet formé par deux participants seulement.

13.6Le Comité note en outre que l’auteure explique que la manifestation de 2008 était pacifique et qu’elle a produit des éléments à l’appui de ses affirmations. Il prend aussi note de ses observations indiquant que la manifestation n’a pas troublé l’ordre public ni perturbé les transports ou la circulation des piétons, que les manifestants n’ont pas crié ni proféré d’insultes, qu’ils ne se sont pas battus et qu’ils ne portaient pas d’armes, et qu’on ne leur a pas demandé de mettre fin à leur manifestation. Il prend note des observations de l’auteure, qui affirme que la police n’était même pas présente au premier rassemblement, que les manifestants se sont dispersés d’eux-mêmes et qu’ils ont été plus tard le même jour appréhendés par la police à différents endroits pour avoir pris part à la manifestation. Le Comité note également que, d’après l’auteure, la manifestation de 2014 n’était pas une manifestation de masse mais un piquet formé par deux personnes. Il relève que l’État partie rejette les griefs de l’auteure relatifs aux deux manifestations pour défaut de fondement, renvoyant aux décisions de justice qui l’ont déclarée coupable sur la base d’un examen objectif et approfondi des éléments de preuve. S’agissant de la première manifestation, le Comité relève également que, d’après l’État partie, l’auteure n’a pas prouvé que la manifestation était pacifique, avait duré trente minutes et n’avait été ni interdite ni interrompue. Il prend note aussi de l’observation de l’État partie indiquant que la peine imposée à l’auteure était proportionnée à l’infraction commise. Il observe en outre que l’État partie renvoie à l’article 33 de la Constitution, selon lequel les autorités n’ont le droit de mettre fin à un rassemblement ou de l’interdire que pour des raisons avérées de sécurité, ce qui, selon l’État partie, est conforme à l’article 21 du Pacte.

13.7En ce qui concerne le grief que l’auteure tire de l’article 21 du Pacte, que le comportement de l’auteure ait été interdit ou non par la législation nationale, le Comité fait observer que l’État partie n’a pas montré pourquoi l’obtention d’une autorisation officielle auprès des autorités locales avant la tenue des manifestations était nécessaire dans l’intérêt de la sécurité nationale ou de la sûreté publique, de l’ordre public ou pour protéger la santé ou la moralité publiques, ou les droits et libertés d’autrui, comme le prévoit l’article 21 du Pacte, surtout dans le cas de la seconde manifestation, qui ne réunissait que deux personnes. Il considère que l’État partie n’a pas non plus montré que les restrictions imposées aux droits de l’auteure, à savoir son arrestation et l’imposition d’une amende importante, étaient nécessaires pour les motifs énoncés à l’article 21 du Pacte. En conséquence, le Comité conclut que les faits dont il a été saisi ont entraîné une violation des droits que l’auteure tient de l’article 21 du Pacte.

13.8En ce qui concerne le grief que l’auteure tire de l’article 19 du Pacte, le Comité fait observer que ni l’État partie ni les juridictions nationales n’ont invoqué la moindre raison précise, telle que la sécurité nationale, l’ordre public, la santé ou la moralité publiques, ou le respect des droits d’autrui, comme l’exigent les dispositions du paragraphe 3 de l’article 19, pour justifier la nécessité des restrictions imposées à la liberté d’expression de l’auteure. L’État partie n’a pas non plus montré que les mesures choisies − l’arrestation de l’auteure, le jugement de culpabilité et l’imposition d’une amende d’un montant équivalant à plusieurs mois de salaire alors que ses revenus se réduisaient à sa seule retraite, pour le simple fait d’avoir manifesté et exprimé ses opinions − constituaient le moyen le moins perturbateur d’obtenir le résultat recherché ou étaient proportionnées à l’intérêt à protéger. Le Comité considère que, dans les circonstances de l’espèce, il n’a pas été prouvé que les restrictions imposées à l’auteure étaient justifiées par un but légitime ou étaient nécessaires et proportionnées à ce but conformément aux conditions énoncées au paragraphe 3 de l’article 19. Il conclut donc que les droits que l’auteure tient du paragraphe 2 de l’article 19 du Pacte ont été violés.

13.9Enfin, le Comité prend note du grief que l’auteure tire du paragraphe 1 de l’article 9, à savoir que son arrestation en raison de sa participation à des manifestations pacifiques les 6 décembre 2008, 13 mai 2012 et 8 mai 2014 a été illégale et arbitraire. Il prend note de la référence faite par l’auteure aux dispositions du Code de la responsabilité administrative prévoyant que la détention administrative n’est autorisée que dans le but de prévenir la criminalité et lorsqu’une personne ne peut être identifiée. Il prend note de l’argument de l’auteure selon qui, étant donné qu’elle manifestait pacifiquement avec d’autres personnes et qu’elle avait en sa possession des documents d’identité, il n’y avait aucun motif légal pour l’arrêter. Il note également que, d’après l’auteure, il n’y a pas de procès-verbal officiel de ses arrestations à ces dates, alors qu’elle a été détenue au poste de police à chaque fois, pour une durée allant jusqu’à dix heures. Le Comité note également que l’État partie a rejeté le grief de l’auteure au motif qu’il était dénué de fondement.

13.10Le Comité rappelle que l’arrestation ou la détention à titre de sanction pour l’exercice légitime des droits garantis par le Pacte est arbitraire, y compris lorsqu’il est question de la liberté d’opinion, d’expression et de réunion. Compte tenu de ses constatations concernant la violation des droits que l’auteure tient des articles 19 et 21, et en l’absence d’explication de l’État partie quant à la nécessité de faire arrêter l’auteure dans les circonstances visées pour avoir exercé les droits que lui reconnaît le Pacte, le Comité constate également que la privation de liberté à laquelle l’auteure a été soumise était arbitraire. En conséquence, il considère que les faits susmentionnés font apparaître une violation des droits reconnus à l’auteure par le paragraphe 1 de l’article 9 du Pacte.

13.11Compte tenu de ces conclusions, le Comité n’examinera pas séparément les griefs que l’auteure tire du paragraphe 3 de l’article 2 du Pacte lu séparément.

14.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif, constate que les faits dont il est saisi font apparaître une violation par l’État partie des articles 9 (par. 1), 19 (par. 2) et 21 du Pacte.

15.Conformément au paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer à l’auteure un recours utile. Il a l’obligation d’accorder une réparation intégrale aux individus dont les droits garantis par le Pacte ont été violés. En l’espèce, l’État partie est tenu, notamment, de prendre les mesures nécessaires pour offrir une indemnisation adéquate et des mesures de satisfaction appropriées, y compris le remboursement de tous frais de justice engagés par l’auteure ainsi que des pertes non pécuniaires subies. L’État partie est également tenu de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher que des violations analogues se reproduisent.

16.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif, l’État partie a reconnu que le Comité a compétence pour déterminer s’il y a ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et une réparation exécutoire lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet aux présentes constatations. L’État partie est invité en outre à rendre celles-ci publiques et à les diffuser largement dans ses langues officielles.