Nations Unies

CCPR/C/122/D/2577/2015

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

4 juin 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Constatations adoptées par le Comité au titre de l’article 5 (par. 4) du Protocole facultatif, concernant la communication no 2577/2015 * , **

Communication présentée par :

Ozoda Yakubova (représentée par un conseil, Patrick Griffith, de Freedom Now)

Au nom de :

Azamjon Formonov

État partie :

Ouzbékistan

Date de la communication :

3 septembre 2014 (date de la lettre initiale)

Références :

Décision prise en application de l’article 97 du règlement intérieur du Comité, communiquée à l’État partie le 2 mars 2015 (non publiée sous forme de document)

Date des constatations :

6 avril 2018

Objet :

Détention arbitraire ; torture ; procès non équitable d’un militant des droits de l’homme

Question(s) de procédure :

Non-épuisement des recours internes

Question(s) de fond :

Détention arbitraire, torture, procès équitable, droit à l’assistance d’un défenseur de son choix, droit de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, droit de ne pas être forcé de s’avouer coupable, immixtion illégale dans la vie privée, la famille et le domicile, liberté d’expression

Article(s) du Pacte :

2 (par. 2), 7, 9 (par. 1), 14 (par. 1, 2 et 3 b), e) et g)), 17 et 19 (par. 2)

Article(s) du Protocole facultatif :

2 et 5 (par. 2 b))

1.L’auteure de la communication est Ozoda Yakubova, de nationalité ouzbèke, née en 1979. Elle présente la communication au nom de son mari, Azamjon Formonov, de nationalité ouzbèke, né en 1978. L’auteure est représentée par un conseil, Patrick Griffith, de Freedom Now. Au moment où la communication a été soumise, M. Formonov était détenu à la prison de Jaslyk. L’auteure affirme que M. Formonov est victime de violations de l’article 7, lu seul et conjointement avec le paragraphe 2 de l’article 2, ainsi que du paragraphe 1 de l’article 9, des paragraphes 1, 2 et 3 b), e) et g) de l’article 14, de l’article 17 et du paragraphe 2 de l’article 19 du Pacte. Le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 28 septembre 1995.

Rappel des faits présentés par l’auteure

2.1Le mari de l’auteure est un militant des droits de l’homme bien connu, président de l’antenne de la Société des droits de l’homme d’Ouzbékistan pour la région de Syr-Daria, pour le compte de laquelle il suivait les procès et rédigeait des bulletins portant sur les droits de l’homme. Le 29 avril 2006, des policiers l’ont arrêté arbitrairement pour extorsion, ont perquisitionné son domicile sans mandat à 10 heures du matin puis à 14 h 30. Lorsqu’ils sont revenus une troisième fois, aux environs de 16 heures, ils ont frappé sa femme, qui était enceinte, au point qu’elle a perdu connaissance. Elle a dû passer une nuit à l’hôpital. La police a saisi tous les documents sur les droits de l’homme trouvés dans l’appartement, ainsi que l’ordinateur et l’imprimante de M. Formonov. M. Formonov a été détenu au secret pendant une semaine après son arrestation et on l’a torturé, notamment en l’asphyxiant et en le frappant, afin de lui arracher de faux aveux. Il a, par la suite, été autorisé à contacter un avocat, mais celui-ci n’a pas défendu les intérêts de son client de façon indépendante et efficace.

2.2Le 15 juin 2006, sans produire le moindre élément de preuve ni donner à M. Formonov la possibilité d’être représenté par un conseil de son choix, un juge a déclaré M. Formonov coupable et l’a condamné à une peine de neuf ans d’emprisonnement dans une prison générale. En dépit de cette décision, l’État partie a incarcéré M. Formonov à la prison de Jaslyk, prison à régime strict qui est reconnue comme la plus dure du pays. Un grand nombre d’organisations et d’organes internationaux de surveillance des droits de l’homme, dont le Comité contre la torture, le Groupe de travail sur la détention arbitraire, Human Rights Watch et Amnesty International, ont exprimé leurs préoccupations face au traitement subi par M. Formonov, qui a été torturé à de nombreuses reprises à la prison de Jaslyk. Entre le 23 mai et le 19 juin 2007, il a été détenu à l’isolement et frappé si violemment aux jambes et aux pieds qu’il a été incapable de marcher pendant dix jours. Entre le 10 et le 20 octobre 2007, il a été accusé de ne pas « marcher droit et en rang » et a été placé à l’isolement dans une cellule non chauffée pendant dix jours, durant lesquels il est resté menotté et a été frappé par les agents pénitentiaires. La température étant négative, il est tombé malade, et ses symptômes ont duré plusieurs mois. Les autorités l’ont battu à maintes reprises pour le forcer à signer diverses déclarations. En 2008, il a été frappé jusqu’à ce qu’il signe une déclaration dans laquelle il admettait avoir enfreint le règlement pénitentiaire. En 2011, pour obliger M. Formonov à signer un document indiquant qu’il n’était pas torturé et qu’il était en parfaite santé, jouissait de bonnes conditions de détention et avait accès à des soins médicaux, les autorités pénitentiaires l’ont frappé violemment à la tête, au dos et au ventre durant une heure. M. Formonov dit que, pendant qu’on l’étranglait, l’agent S. V. a menacé de le tuer, de tuer toute personne qui viendrait lui rendre visite, y compris sa femme, et d’emprisonner ses enfants.

2.3Les représentants de la Croix-Rouge n’ont pas pu rencontrer M. Formonov à la prison de Jaslyk car, lorsqu’ils se rendaient à la prison, ils étaient informés que M. Formonov avait été transféré dans une autre prison, à Nukus. Le Comité contre la torture s’est dit particulièrement préoccupé par le fait que M. Formonov aurait été soumis à la torture alors qu’il était arbitrairement détenu ou emprisonné (voir CAT/C/UZB/CO/4, par. 8).

2.4M. Formonov a interjeté plusieurs fois appel du jugement rendu par le tribunal de première instance le 15 juin 2006. Selon le Bureau du Procureur de Syr-Daria, le tribunal régional de Syr-Daria a examiné le recours mais n’a pas modifié la décision. Le document établi par le Bureau du Procureur prenait acte de la décision rendue en appel mais ne précisait pas la date de cette décision. L’auteure a tenté à de nombreuses reprises, sans succès, d’obtenir de la cour d’appel une copie de sa décision. Selon l’auteure, le beau-père de M. Formonov a « adressé des plaintes » au tribunal régional de Syr-Daria, au Bureau du Procureur de Syr‑Daria et à la Cour suprême concernant les violations du droit de M. Formonov à un procès équitable et les accusations de torture, mais n’a reçu aucune réponse. L’auteure a saisi le Médiateur et a reçu une réponse d’une page concluant sommairement que rien ne justifiait d’un point de vue juridique la formation d’un recours au titre de la procédure de contrôle. Elle a adressé une plainte au Bureau du Procureur général ; celui-ci l’a simplement transmise au Bureau du Procureur de Syr‑Darya, celui-là même qui était responsable de l’action pénale au cours de laquelle le droit de M. Formonov à un procès équitable avait été violé. Le 4 septembre 2009, le Bureau du Procureur de Syr Darya a rejeté la plainte sans la moindre justification et déclaré que toute nouvelle requête portant sur la même question ne serait « pas examinée ». L’auteure a également saisi le Vice-Ministre de l’intérieur et a adressé une lettre au Président Karimov. Le 26 avril 2014, la famille de M. Formonov a soumis une demande au titre de la procédure de contrôle auprès de la Cour suprême, demande qui est restée sans réponse.

2.5Deux requêtes ont été soumises par M. Formonov ou en son nom au Groupe de travail sur la détention arbitraire qui, dans un avis daté de novembre 2012, a conclu que le procès de M. Formonov et son incarcération avaient été arbitraires et constituaient une violation du droit à la liberté d’expression garanti par l’article 19 du Pacte, et a demandé à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour que M. Formonov soit rejugé.

Teneur de la plainte

3.1L’auteure affirme que son mari est victime de violations par l’Ouzbékistan de l’article 7, lu seul et conjointement avec l’article 2 (par. 2), ainsi que de l’article 9 (par. 1), de l’article 14 (par. 1, 2 et 3 b), e) et g)), de l’article 17 et de l’article 19 (par. 2) du Pacte.

3.2L’auteure affirme que M. Formonov, en violation de l’article 7 du Pacte, a été détenu au secret pendant une semaine après son arrestation, qu’on l’a asphyxié en le forçant à porter un masque à gaz dont les valves étaient fermées, qu’il a été frappé violemment à plusieurs reprises, maintenu à l’isolement, dévêtu et menotté et qu’il a été détenu dans une cellule non chauffée pendant vingt‑trois jours alors que la température était négative. L’auteure dénonce également une violation de l’article 7, lu conjointement avec l’article 2 (par. 2), car l’État partie n’a pas mis en place de garanties contre la torture, n’a pas empêché que M. Formonov soit détenu au secret, ne lui a pas donné et n’a pas donné à sa famille accès à un avocat indépendant, n’a pas fait en sorte qu’il n’y ait pas dans les lieux de détention d’instruments susceptibles d’être utilisés pour infliger des actes de torture, n’a pas permis une surveillance indépendante des installations de détention et n’a pas dûment enquêté sur les cas de torture ni offert de recours utiles.

3.3En ce qui concerne l’article 9 (par. 1) du Pacte, l’auteure affirme que le véritable dessein du Gouvernement, lorsqu’il a arrêté M. Formonov, l’a placé en détention et l’a incarcéré, était de le persécuter en raison de son action en faveur des droits de l’homme et de le réduire au silence. L’auteure soutient que l’arrestation et la détention de M. Formonov sont par conséquent arbitraires.

3.4L’auteure affirme que, pendant l’enquête préliminaire et le procès, les violations flagrantes de l’article 14 du Pacte suivantes ont été commises :

a)Les aveux de M. Formonov ont été obtenus par la torture ;

b)M. Formonov a été détenu au secret et privé du droit de communiquer avec un conseil quel qu’il soit. Il a finalement été autorisé à communiquer avec un avocat désigné par le Gouvernement et agissant sous l’influence de celui-ci et qui était présent lorsque les autorités ont interrogé et torturé M. Formonov pour le forcer à signer de faux aveux. M. Formonov l’a révoqué et a dû s’en remettre pour sa défense à son beau‑père, M. Yakubov, qui n’avait aucune formation juridique. Toutefois, le tribunal a d’abord empêché M. Yakubov de préparer la défense, puis l’a dessaisi de l’affaire, sans préavis, juste avant l’ouverture du procès. Le juge K. a tenté à plusieurs reprises de limiter l’accès de M. Yakubov au dossier. M. Yakubov et M. Formonov n’ont jamais eu la possibilité de consulter certaines pièces du dossier, notamment la décision de la cour d’appel ;

c)M. Formonov a été maintenu dans une cage en fer pendant son procès, ce qui est contraire à l’article 14 (par. 2) du Pacte ;

d)Aucun témoin n’a été interrogé en présence de M. Formonov ou de son représentant pendant l’unique audience, qui a duré moins de trente minutes, et, selon l’auteure, le tribunal se composait uniquement du juge K., lequel a donné lecture du verdict et de la peine ;

e)Le procès de M. Formonov n’a pas été impartial car l’audience était présidée par le juge que M. Formonov avait critiqué dans ses bulletins.

3.5En ce qui concerne l’article 17 du Pacte, l’auteure soutient que le droit de M. Formonov de ne pas faire l’objet d’immixtions dans sa vie privée, sa famille et son domicile a été bafoué lorsque les autorités ont plusieurs fois fouillé son appartement sans mandat de perquisition en bonne et due forme et ont saisi certains de ses biens.

3.6En ce qui concerne l’article 19 (par. 2) du Pacte, l’auteure soutient que le véritable dessein du Gouvernement, lorsqu’il a arrêté M. Formonov, l’a placé en détention et l’a incarcéré, était de le persécuter en raison de son action en faveur des droits de l’homme et de le réduire au silence. M. Formonov surveillait les violations des droits de l’homme commises par les autorités et les signalait dans des bulletins qui étaient distribués aux organisations de défense des droits de l’homme et aux ambassades étrangères. Ces bulletins n’avaient pas de valeur en tant que preuve s’agissant de l’accusation d’extorsion, qui était sans lien avec ces bulletins et dénuée de fondement, ce qui constituait une atteinte à la liberté d’expression.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

4.1Le 25 octobre 2016, l’État partie a fait part de ses observations, affirmant que les arguments exposés dans la communication avaient été soigneusement examinés et n’avaient pas été corroborés, faute d’éléments permettant d’établir que les organes chargés de faire appliquer la loi avaient commis des actes contraires aux articles 7, 9 (par. 1), 14, 17 et 19 (par. 2) du Pacte. L’État partie a déclaré que M. Formonov avait été reconnu coupable le 15 juin 2006 par le tribunal de Yangiyer sur le fondement de l’article 165 du Code pénal et condamné à une peine de neuf ans d’emprisonnement à purger dans une prison à régime général. Le 18 juin 2006, la cour régionale de Syr-Daria a examiné l’affaire et confirmé le verdict.

4.2La déclaration de culpabilité de M. Formonov se fondait sur plusieurs motifs : le 12 avril 2006, M. Formonov, prétendant représenter la Société des droits de l’homme pour la région de Syr-Daria avait, conjointement avec deux représentants d’agriculteurs, adressé un rapport au directeur de la société pétrolière unitaire dans l’intention de s’approprier les biens d’autrui par des moyens d’extorsion. Dans ce rapport, il affirmait que l’agent chargé de la distribution de la filiale de Dashtabad de la société U. M. n’avait pas livré dans les délais les produits pétroliers aux agriculteurs, et parfois n’avait pas livré toute la quantité de gazole prévue. M. Formonov et les deux représentants demandaient que des mesures soient prises contre les responsables.

4.3Une commission avait mené une enquête et n’avait pu confirmer ces allégations. M. Formonov s’était associé à des fins délictueuses avec une personne de sa connaissance, A. K., et, le 28 avril 2006, avait rencontré U. M. à Yangiyer. Il avait menacé de publier sur Internet le rapport décrivant les irrégularités constatées dans la livraison des produits pétroliers, ce qui aurait entraîné le licenciement de l’agent concerné. Il avait exigé que U. M. lui verse 600 000 sum, en échange de quoi il ne publierait pas le rapport.

4.4Le 29 avril 2006, vers 7 heures et demie du matin, M. Formonov et A. K. avaient été interpellés à l’arrêt de bus de la rue de Tachkent, à Gulistan, alors qu’ils recevaient de U. M. 250 dollars des États-Unis et 200 000 sum, dans le cadre d’une extorsion. Le même jour, en raison de questions urgentes survenues dans le cours de l’enquête, le domicile de M. Formonov a été perquisitionné, ce dont le procureur chargé de la procédure a ensuite été informé, conformément à l’article 161 du Code de procédure pénale. Pendant la perquisition, des biens liés à l’infraction ont été découverts. Compte tenu de la gravité des chefs d’accusation, les autorités ont décidé, le 1er mai 2006, de placer M. Formonov en détention provisoire. Sa culpabilité était prouvée par les éléments produits par la victime, des témoins, des rapports sur les recherches menées sur le lieu de l’infraction, des schémas et des photographies, les conclusions de l’expertise chimico‑légale et d’autres éléments réunis au cours de l’enquête et examinés par le tribunal.

4.5Les accusations formulées par M. Formonov dans son recours, concernant les actes de torture qu’il aurait subis, l’examen de son affaire à huis clos et la violation de son droit à la défense, ont été examinées en appel et n’ont pas été corroborées.

4.6Au cours de l’enquête préliminaire, M. Formonov était défendu par deux avocats, M. Kholikberdiyev et M. Nomozov. Dans une déclaration versée au dossier, M. Formonov s’est déclaré coupable au titre de l’article 168 du Code de procédure pénale. Pendant l’enquête préliminaire, M. Formonov n’a fait aucune déclaration concernant des actes de torture auxquels il aurait été soumis. À l’audience, lorsqu’on l’a interrogé sur les conditions de sa détention provisoire et qu’on lui a demandé s’il avait fait l’objet de mesures illégales, il n’a pas dit que de telles mesures avaient été prises. L’affaire a été examinée au cours d’une audience publique à laquelle participait un avocat, M. Mamadaliyev. M. Formonov a été expulsé de la salle d’audience pour outrage à magistrat, en application du paragraphe 2 de l’article 272 du Code de procédure pénale. À la fin des débats, le tribunal lui a proposé d’intervenir et de faire une déclaration finale, ce qu’il a refusé.

4.7L’enquête préliminaire et l’examen de l’affaire par le tribunal se sont déroulés conformément aux dispositions du Code de procédure pénale. La qualification des actes commis par M. Formonov par le tribunal est correcte et la peine prononcée est proportionnée à l’infraction commise. Sa condamnation est dûment fondée et légale.

4.8Pendant qu’il exécutait sa peine, M. Formonov a systématiquement enfreint le règlement de la prison, a refusé de se conformer aux instructions de l’administration pénitentiaire et a délibérément transgressé les règles, ce pour quoi il a fait l’objet de 20 sanctions disciplinaires. Le 3 avril 2015, le Procureur du district Kungrad de la République autonome du Karakalpakstan a ouvert une procédure pénale contre M. Formonov sur le fondement du paragraphe 2 b) de l’article 221 du Code de procédure pénale pour « non-respect des instructions de l’administration d’un établissement correctionnel ». Le 1er mai 2015, M. Formonov a été condamné par le tribunal du district Kungrad à cinq ans et vingt-six jours d’emprisonnement sur le fondement des articles 60 et 221 (Cumul de peines) du Code. En décidant de la nature et de la durée de la peine, le tribunal a tenu compte de toutes les circonstances atténuantes et aggravantes. Les mesures prises n’étaient pas contraires aux dispositions et règles de la législation nationale ou aux normes internationales. Pendant qu’il purgeait sa peine, M. Formonov ne s’est pas amendé mais a continué d’enfreindre les règles et le règlement intérieur de la prison. Le 2 mai et le 5 juin 2016, il a reçu des blâmes mais il n’a pas été placé à l’isolement à titre disciplinaire.

4.9M. Formonov a été généralement soigné par le personnel médical de la prison et il est en bonne santé et apte au travail. Le personnel médical a jugé que son état de santé était satisfaisant et ne nécessitait pas de traitement particulier. L’administration pénitentiaire n’a laissé commettre aucun acte attentatoire à ses droits. M. Formonov n’a pas été soumis à des pressions physiques ou psychologiques et n’a pas déposé la moindre plainte auprès de l’administration de la prison.

4.10Au cours de la période 2015-2016, M. Formonov a été autorisé à recevoir six visites de sa famille. Aucun avocat n’a demandé à le voir à l’occasion de ces visites et lui-même n’a soumis aucune demande à l’administration pénitentiaire pour s’entretenir avec ses conseils.

4.11Les allégations selon lesquelles des policiers auraient torturé M. Formonov lors de son arrestation et pendant l’instruction ne sont pas fondées, ne s’accompagnent d’aucun détail concret et ne sont confirmées par aucun fait ou argument. Elles visent à présenter une image négative des forces de l’ordre de l’État partie et à dénigrer leur action.

4.12Les violations des droits de l’homme décrites dans la communication, qui auraient eu lieu dans le système pénitentiaire, ne se sont pas produites et ne pouvaient pas se produire. Dans le système correctionnel, une attention particulière est accordée aux droits de l’homme, au respect de la légalité et à la prévention des violations des droits de l’homme au sein des institutions pénitentiaires.

Commentaires de l’auteure sur les observations de l’État partie

5.1Dans ses commentaires en date du 17 janvier 2017, l’auteure conteste le récit que l’État partie fait de l’arrestation, du procès et de la détention de M. Formonov, qui ne répond pas de façon satisfaisante aux allégations soumises au Comité. L’État partie reprend dans sa réponse la thèse erronée selon laquelle M. Formonov a été arrêté conformément aux règles d’une procédure régulière, placé en détention et déclaré coupable d’extorsion. L’auteure avance que l’allégation selon laquelle M. Formonov aurait enfreint les termes de sa détention, ainsi que la déclaration de culpabilité et la nouvelle sanction qui en ont résulté n’étaient qu’un prétexte pour allonger la durée de la peine initiale, et que la peine était à la fois outrageusement disproportionnée compte tenu des infractions reprochées à M. Formonov et le résultat d’une audience au cours de laquelle ses droits à un procès équitable ont été bafoués. L’État partie prétend de façon inexacte que les droits de M. Formonov, en tant que détenu, de consulter son avocat et de ne pas faire l’objet de torture ou de mauvais traitements n’ont pas été constamment bafoués.

5.2L’État partie ne répond pas aux allégations selon lesquelles on visait M. Formonov pour l’empêcher de poursuivre son activité de défense des droits de l’homme et pour restreindre sa liberté d’expression, et sa détention était arbitraire parce qu’elle réprimait l’exercice d’un droit fondamental. L’État partie n’évoque pas non plus et ne nie même pas sa pratique bien établie consistant à persécuter les défenseurs des droits de l’homme en les emprisonnant pour des motifs d’extorsion forgés de toutes pièces, et il ne reconnaît pas que la police a saisi des documents ayant trait aux droits de l’homme au domicile de M. Formonov.

5.3L’auteure soutient que les éléments de preuve utilisés ont été forgés de toutes pièces et que les aveux de M. Formonov ont été obtenus par la torture. La poudre chimique qui a servi à marquer l’argent du chantage a été appliquée sur M. Formonov par la police alors qu’il était en garde à vue.

5.4Il est faux de dire, comme l’affirme le Gouvernement, que M. Formonov a été arrêté après avoir reçu de U. M. 250 dollars É.-U. et 200 000 sum dans le cadre d’une extorsion, à l’arrêt de bus de la rue de Tachkent, à Gulistan. Cette affirmation n’explique pas les contradictions ressortant de la décision du tribunal qui dit tantôt que M. Formonov a été interpellé en flagrant délit au moment où on lui remettait l’argent, tantôt qu’il a été interpellé lorsque la somme extorquée a été découverte à l’intérieur de son ordinateur, lorsque son appartement a été perquisitionné.

5.5La perquisition a été effectuée en l’absence de mandat valide et avec une extraordinaire brutalité. La police a tenté de perquisitionner le domicile de M. Formonov à deux reprises sans mandat à cet effet ; la troisième fois, les policiers ont présenté un mandat incomplet ne portant ni la signature d’un agent responsable ni le cachet du Bureau du Procureur. Les policiers ont frappé si violemment l’auteure, qui était alors enceinte, que celle-ci a perdu connaissance et a dû passer la nuit à l’hôpital.

5.6L’État partie dit que la police a découvert des « biens ayant rapport avec la commission de l’infraction » sans plus de précision, alors qu’en fait les policiers ont saisi des biens liés à l’action de M. Formonov dans le domaine des droits de l’homme, à savoir un ordinateur et une photocopieuse qui servaient à produire des bulletins sur les droits de l’homme, et des documents relatifs aux droits de l’homme, dont des bulletins faisant état d’actes de torture et d’autres violations des droits de l’homme commis par les autorités. Ces documents n’étaient pas pertinents au regard d’une accusation légitime d’extorsion.

5.7L’auteure conteste l’argument de l’État partie selon lequel que M. Formonov n’a pas été placé en détention provisoire avant le 1er mai 2006 et affirme que M. Formonov a été placé en détention provisoire dès son arrestation, le 29 avril 2006, et a été détenu au secret pendant plus d’une semaine.

5.8Alors que le jugement fait référence aux dépositions de sept témoins, aucun témoin n’a été interrogé en présence de M. Formonov ou de son représentant et il n’a pas été possible d’examiner ces dépositions. M. Formonov était représenté par des conseils désignés par les autorités et non par le défenseur de son choix et il est peu probable qu’un quelconque élément de preuve présenté au procès ait fait l’objet d’un examen contradictoire rigoureux. Le procès au cours duquel tous les éléments de preuve ont prétendument été présentés a duré moins d’une demi-heure et s’est déroulé en présence du seul juge K., qui a donné lecture du verdict et de la peine. Étant donné que les éléments de preuve ont été fabriqués de toute pièce, que M. Formonov et le représentant choisi par ses soins n’ont pu procéder à un examen contradictoire et que le procès pendant lequel ces éléments devaient être examinés, il est faux d’affirmer comme le fait l’État partie que la culpabilité de M. Formonov a été prouvée.

5.9L’auteure fait observer que l’audience d’appel n’était pas ouverte au public ni à la famille de M. Formonov, de sorte que l’on ne sait pas très bien ce qui s’est passé derrière les portes closes. La famille de M. Formonov n’a pas pu obtenir de copie de la décision d’appel bien qu’une demande ait été soumise auprès de la cour régionale. L’État partie ne peut donc pas se prévaloir de l’argument selon lequel la cour d’appel a dûment examiné et rejeté les plaintes de M. Formonov alors que celle-ci garde le compte rendu d’audience secret.

5.10MM. Kholikberdiyev et Mamadaliev n’ont pas été choisis comme avocats par M. Formonov. M. Kholikberdiyev était un avocat commis d’office que la famille de M. Formonov a révoqué car il était présent lorsque M. Formonov avait été torturé et il avait refusé de porter plainte. Contrairement aux vœux expressément formulés par M. Formonov, le tribunal a de nouveau chargé M. Kholikberdiyev de le représenter pendant le procès. M. Mamadaliev était lui aussi un avocat commis d’office, notoirement sous l’influence du Gouvernement. Le représentant choisi par M. Formonov, M. Yakubov, a été dessaisi de l’affaire par le tribunal le jour du procès, prétendument parce qu’il était susceptible d’être cité comme témoin. Or, pendant le procès, qui s’est tenu juste après son remplacement, M. Yakubov n’a pas été cité à comparaître comme témoin, ce qui montre que le tribunal l’avait remplacé sans motif légitime.

5.11Les aveux arrachés à M. Formonov par la torture révèlent non pas la culpabilité de l’accusé mais une violation du droit international par les autorités qui ont mené l’interrogatoire. À aucun moment avant sa condamnation M. Formonov n’a pu porter plainte pour les actes de torture subis, mais M. Yakubov et l’auteure ont déposé des plaintes à ce sujet. M. Formonov a d’abord été détenu au secret avant de pouvoir contacter un avocat commis d’office, lequel a sanctionné l’usage que les autorités ont fait de la torture pour obtenir des aveux en assistant aux actes de torture et en refusant de porter plainte. M. Formonov a fait part à M. Yakubov des actes de torture qu’il avait subis. Toutefois, M. Yakubov a été dessaisi du dossier avant le procès et n’a donc pas pu soulever la question devant le tribunal. M. Formonov lui-même a été expulsé de la salle d’audience pendant au moins une partie des débats et n’a pas été autorisé à soumettre les témoins à un contre‑interrogatoire, ce qui l’a, une fois encore, empêché de dénoncer la manière dont les éléments de preuve avaient été réunis.

5.12Ni le public, ni la famille et les sympathisants de M. Formonov, ni le représentant qu’il s’était choisi n’ont pu assister à l’audience. Comme l’État partie l’a admis, M. Formonov lui-même n’a pas été autorisé à participer à une partie de son propre procès car on l’a expulsé du prétoire, prétendument pour « outrage à magistrat ». Ses avocats commis d’office, notoirement sous l’influence du Gouvernement, étaient présents.

5.13Dans sa réponse, l’État partie ne répond pas aux allégations particulières concernant les violations des droits garantis à M. Formonov à l’article 14 du Pacte, à savoir : a) la violation du droit de ne pas être forcé de s’avouer coupable, car on lui a arraché des aveux par la torture ; b) la violation du droit de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense et de s’entretenir avec un défenseur de son choix, liée au fait qu’il a été détenu au secret pendant la semaine qui a suivi son arrestation, que le représentant qu’il avait choisi a été empêché de consulter le dossier et que ce représentant a ensuite été remplacé par des avocats commis d’office qui ont donné des avis non professionnels et non éthiques ; c) la violation du droit de soumettre les témoins à un contre-interrogatoire, tenant au fait que le procès écourté a duré moins de trente minute, qu’aucun élément de preuve n’a été présenté et qu’aucun témoin n’a été entendu ; d) la violation du droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal impartial, liée au fait que l’audience s’est tenue à huis clos et était présidée par un juge que M. Formonov avait auparavant critiqué dans ses bulletins sur les droits de l’homme ; e) la violation du droit à la présomption d’innocence, en ce qu’il a été présenté au tribunal dans une cage.

5.14Les actes de torture infligés à M. Formonov ont été décrits en détail, notamment la manière dont il a été torturé ainsi que les personnes qui étaient présentes et les déclarations faites pendant les séances de torture ; les actes de torture infligés à M. Formonov après sa condamnation ont également été bien détaillés, notamment ses placements à l’isolement, les coups incessants qui lui ont été administrés et qui l’ont empêché de marcher pendant une semaine, son placement dans des cellules non chauffées où des températures négatives l’ont rendu malade, sa strangulation par les agents pénitentiaires et les menaces d’emprisonnement visant ses enfants. En suggérant que les allégations de torture visaient à dénigrer les services du Ministère de l’intérieur et à donner une image négative des agents, sans enquêter sur ces allégations, l’État partie fait abstraction non seulement des accusations précises et détaillées qui sont formulées mais aussi de la pratique de la torture généralisée et injustifiée régnant au sein de son système de justice pénale, en particulier contre les défenseurs des droits de l’homme, comme l’a confirmé notamment le Comité contre la torture (voir CAT/C/UZB/CO/4, par. 8). Ces accusations de mauvaise foi ont aussi pour but de détourner l’attention des mesures prises par l’État partie pour dissimuler ces actes de torture en privant M. Formonov de visites en prison pour ne pas qu’on décèle ses marques de torture ou en le transférant dans un autre établissement pendant les visites de la Croix-Rouge.

5.15On a frappé M. Formonov pour le forcer à signer une déclaration dans laquelle il reconnaissait qu’il avait enfreint le règlement de la prison. Le récit que l’État partie fait de cette infraction présumée au règlement pénitentiaire indique que la nouvelle peine prononcée contre M. Formonov était « liée » aux 20 sanctions disciplinaires dont il avait fait l’objet. Or, le jugement rendu par le tribunal de district de Kungrad en date du 1er mai 2015 montre que M. Formonov n’a été jugé que pour quatre infractions, qui se seraient produites quelques mois avant la date fixée pour sa mise en liberté. M. Formonov a nié avoir commis ces infractions mais confirmé qu’il avait été placé en cellule disciplinaire pour leur commission. La nouvelle peine de cinq ans d’emprisonnement qui lui a été infligée constitue une violation supplémentaire de son droit à un procès équitable, de son droit à la liberté d’expression et de son droit de ne pas faire l’objet d’une détention arbitraire. Le tribunal n’a pas autorisé à M. Formonov à s’entretenir avec le conseil de son choix ni à recevoir l’assistance du conseil pendant l’audience. Le tribunal s’est fondé exclusivement sur les témoignages de gardiens de prison et n’a pas permis à M. Formonov de soumettre ces témoins à un contre-interrogatoire. Bien que le verdict indique que l’audience était « ouverte au public », ni le conseil de M. Formonov ni les membres de sa famille n’ont été informés de sa tenue et ils ont donc été empêchés d’y assister.

5.16Malgré de graves violations du Code de procédure pénale et des normes internationales relatives à une procédure régulière, le tribunal de district de Kungrad a conclu que les dépositions des témoins étaient fiables et recevables et que la culpabilité de M. Formonov avait été pleinement prouvée. Cependant, même si M. Formonov avait bénéficié d’une procédure régulière et avait quand même été reconnu coupable d’avoir tenu des propos insultants, la peine de cinq ans de prison prononcée serait outrageusement disproportionnée à la gravité de ses « crimes », tout comme son placement à l’isolement pendant des périodes prolongées pour de telles infractions. Dans le pire des cas, les infractions prétendument commises par M. Formonov constituent seulement une infraction administrative − défaut de pièce d’identité valide et insultes sans incitation à la violence. Une fois encore, M. Formonov a été condamné à une longue peine d’emprisonnement pour avoir exercé un droit fondamental, ce qui, ajouté aux atteintes à la régularité de la procédure, fait qu’il va continuer à être victime d’une détention arbitraire pendant encore cinq ans.

5.17M. Formonov a été victime de nombreuses atteintes à ses droits après sa condamnation : il a été privé de la visite de ses avocats, maintenu à l’isolement et torturé. Ses avocats ont été empêchés à deux reprises de lui rendre visite. Le 1er mars 2016, une avocate, Mme Parpieva, s’est rendue à la prison pour le voir mais n’a pas été autorisée à entrer. Le 1er mai 2016, un autre avocat, M. Mardiev, s’est lui aussi heurté à un refus.

5.18Entre le 23 mai et le 19 juin et entre le 10 et le 20 octobre 2007, M. Formonov a été incarcéré dans une cellule d’isolement non chauffée. Il a par la suite été de nouveau placé à l’isolement à plusieurs occasions : le 24 janvier, le 17 février et le 9 mars 2015, respectivement pendant cinq, dix et vingt jours, prétendument pour avoir insulté des détenus. En 2007, il a été frappé si violemment aux jambes et aux pieds qu’il n’a pas pu marcher pendant dix jours. En 2008, il a été roué de coups jusqu’à ce qu’il accepte de signer une déclaration disant qu’il avait enfreint le règlement de la prison. En 2011, il a été étranglé et frappé jusqu’à ce qu’il accepte de signer une déclaration attestant qu’il était détenu dans de bonnes conditions et avait accès à des soins médicaux. Ces coups s’accompagnaient de menaces verbales contre sa famille. L’État partie a en outre cherché à dissimuler les mauvais traitements qui lui étaient infligés en empêchant sa famille de lui rendre visite tant qu’il présentait des marques de torture ou en le transférant dans un autre établissement pendant les visites de la Croix-Rouge. En février 2012, M. Formonov a fait une grève de la faim pour protester contre les actes de torture qui lui étaient infligés et contre le refus d’autoriser les visites de sa famille.

Observations complémentaires de l’État partie

6.1Le 13 avril 2017, l’État partie a réitéré ses observations précédentes. Il conteste l’argument de l’auteure qui affirme que les éléments de preuve sur lesquels s’appuie la déclaration de culpabilité de M. Formonov ont été forgés de toutes pièces et que les aveux ont été obtenus sous la contrainte physique, et il décrit de nouveau en détail l’infraction commise par M. Formonov et son arrestation. Il explique que M. Formonov a reçu de l’argent de U. M. à un arrêt de bus vers 7 heures du matin avant de s’enfuir à l’arrivée de la police. Après s’être échappé en traversant un hôpital local puis en prenant un minibus public pour rentrer chez lui, il est revenu en voiture sur les lieux de l’infraction, où il a été interpellé comme suspect. La conversation du 28 avril 2006 entre M. Formonov et U. M. a été enregistrée et la transcription de l’enregistrement prouve que M. Formonov avait demandé 600 000 sum : 500 000 pour convaincre la direction de son organisation de ne pas publier de faits compromettants pour U. M. et 100 000 pour lui-même. De la poudre chimique utilisée pour marquer l’argent du chantage a été retrouvée sur les mains, le visage et les cheveux de M. Formonov. Son coaccusé, A. K., a avoué sa culpabilité, reconnaissant qu’ils avaient reçu de l’argent de U. M.

6.2L’État partie indique qu’aucun mandat de perquisition n’était nécessaire en vertu de l’article 161 du Code de procédure pénale, la perquisition ayant été ordonnée par l’enquêteur et effectuée dans des circonstances urgentes. De plus, l’État partie dit qu’il n’y a aucun élément de preuve dans le dossier et aucun élément corroborant l’assertion selon laquelle l’auteure aurait été frappée et hospitalisée. En réponse à l’allégation selon laquelle les matériels saisis étaient sans lien avec l’infraction d’extorsion commise par M. Formonov, l’État partie dit qu’aucun document sur les droits de l’homme n’a été saisi et que, M. Formonov ayant utilisé son matériel de bureau pour commettre l’infraction, la confiscation de ce matériel était utile pour l’enquête. Le 1er mai 2006, M. Formonov a été placé en détention en tant qu’accusé. Le 18 mai, l’enquête préliminaire s’est achevée et l’affaire a été déférée au tribunal de district de Yangiyer.

6.3L’État partie décrit le procès et affirme que la culpabilité de M. Formonov a été prouvée par les aveux qu’il a faits volontairement en présence de son avocat, M. Kholikberdiev, au stade de l’enquête préliminaire. Son autre avocat, M. Nomozov, a cherché à faire modifier la qualification de l’infraction commise par M. Formonov. M. Yakubov, le représentant que M. Formonov avait choisi, a eu largement le temps de préparer la défense. Il a été autorisé à consulter le dossier pendant trois heures le 8 juin et pendant huit heures et trente minutes le 9 juin 2006. Le 12 juin 2006, il a demandé du temps supplémentaire pour étudier le dossier. L’audience a été remise au lendemain et M.Yakubov a été invité par téléphone à poursuivre son examen des pièces, mais il a refusé. Il a été dessaisi de l’affaire parce qu’il refusait de se conformer aux instructions du juge. M. Formonov a été expulsé de la salle d’audience pendant un certain temps parce qu’au lieu d’obéir aux instructions du juge, il tournait le dos au tribunal et gardait le silence. Il a refusé de prendre part aux débats et de faire une déclaration finale. De plus, ni M. Formonov ni sa famille n’ont demandé à assister à l’audience d’appel alors que son avocat, M. Mamadaliev, était présent. Les griefs de M. Formonov concernant l’irrégularité de la procédure en première instance ont été examinés et rejetés par la cour d’appel. M. Formonov a reçu une copie de la décision de la cour d’appel contre attestation écrite.

6.4Les avocats commis d’office, MM. Kholikberdiev et Mamadaliev, n’étaient pas sous l’influence du Gouvernement. Pour preuve qu’aucune pression physique ou psychologique n’a été exercée, l’État partie fait valoir que M. Nomozov était présent pendant les aveux de M. Formonov. Celui-ci n’a jamais été empêché au stade de l’enquête de porter plainte pour les actes de torture qu’il dit avoir subis. Le 11 mai 2006, il a pu former une requête de libération sous caution et faire une déclaration demandant la requalification de l’infraction au titre de l’article 168 (escroquerie).

6.5La culpabilité de M. Formonov a été établie sur la base de l’ensemble des éléments de preuve réunis. Sa déposition contredisait celle de son coaccusé ainsi que le témoignage de la victime et la transcription de l’enregistrement de leur conversation. Si M. Formonov avait été soumis à la torture, sa déposition ne contredirait pas les autres éléments de preuve. De plus, ses derniers aveux ont été faits en présence d’un conseil, M. Nomozov.

6.6L’affaire a été examinée en audience publique. Les représentants de M. Formonov ont été autorisés à assister à l’audience et le procès était public. Ceci est confirmé par M. Yakubov, qui s’est plaint qu’il y ait de nombreux spectateurs dans la salle d’audience ; en outre, M. Formonov n’avait pas précédemment critiqué le juge qui présidait le tribunal dans ses bulletins. L’État partie explique que, conformément au droit interne, M. Formonov a été présenté au tribunal dans une cage dans l’intérêt de sa propre sécurité et de celle d’autrui.

6.7Les accusations de torture ont été formulées pour discréditer les organes d’enquête et les forces de l’ordre ; cette campagne de dénigrement est attestée par le fait que M. Formonov n’avait pas formulé la moindre allégation de torture avant de s’entretenir avec M. Yakubov et avec sa famille. En outre, la nouvelle peine prononcée contre lui s’explique par le fait qu’il a enfreint le règlement intérieur de la prison. On lui a proposé l’assistance d’un conseil mais il a choisi de ne pas être représenté. M. Formonov n’a jamais été placé à l’isolement pour ces infractions ; dans la prison où il purge sa peine, les cellules peuvent accueillir entre 10 et 12 détenus et il n’y a pas de cellules d’isolement.

6.8Le 31 octobre 2017, l’État partie a présenté une nouvelle fois ses principaux arguments, réfutant toutes les allégations de violations des droits garantis à M. Formonov par le Pacte.

Nouveaux commentaires de l’auteure

7.1En date du 19 juin 2017, l’auteure dénonce ce qu’elle décrit comme de nouvelles incohérences dans le récit de l’État partie, ainsi que l’argumentation juridique qui ne correspond pas aux règles d’une procédure régulière selon le droit international et l’absence de réponse au sujet d’allégations essentielles contenues dans la communication. D’après l’auteure, dans ses observations complémentaires, l’État partie fait une description de l’arrestation qui contredit celle qu’il a donnée dans ses premières observations, il ne répond pas directement aux allégations indiquant que les éléments de preuve ont été forgés de toutes pièces par la police, et il n’est pas plus convaincant que précédemment lorsqu’il affirme que M. Formonov n’a pas été torturé en vue de l’extorsion d’aveux.

7.2L’auteure dit que l’État partie continue d’invoquer des éléments de preuve douteux ou secrets, prétendant que les propos de M. Formonov ont été enregistrés pendant qu’il menaçait U. M. alors qu’aucun enregistrement ni la moindre transcription d’enregistrement n’ont jamais été présentés à la défense ou rendus publics. L’État partie ne répond pas directement à l’allégation de l’auteure qui affirme qu’en réalité, la police a appliqué de la poudre chimique sur les doigts, les cheveux et les sourcils de M. Formonov après son arrestation.

7.3L’État partie a admis que la perquisition avait été effectuée sans mandat mais a laissé entendre qu’un tel mandat n’était pas nécessaire en vertu de l’article 161 du Code de procédure pénale parce que la perquisition a été menée dans des circonstances urgentes, sans expliquer ce qu’étaient ces circonstances urgentes qui justifiaient une perquisition sans mandat. De plus, il n’a pas expliqué pourquoi la police avait besoin de saisir tous les documents relatifs aux droits de l’homme qui se trouvaient au domicile de M. Formonov, et pourquoi les autorités n’avaient pas établi la liste de tous les objets saisis dans l’appartement. Les biens confisqués avaient trait à l’activité que menait M. Formonov dans le domaine des droits de l’homme et non à l’infraction dont on l’accusait.

7.4L’État partie a prétendu à tort que l’octroi à M. Yakubov de onzeheures et trente minutes pour consulter le dossier, moins d’une semaine avant le début du procès, revient à accorder le temps et les facilités nécessaires à la préparation de la défense. M. Yakubov a été dessaisi de l’affaire à la demande de l’enquêteur principal, K., qui a fait valoir qu’il serait appelé à témoigner au sujet de la teneur de l’enregistrement d’une conversation entre M. Formonov et U. M. et qu’il ne pouvait donc pas être à la fois témoin et représentant. Cet enregistrement n’a jamais été produit et M. Yakubov n’a jamais été appelé à témoigner. M. Formonov n’a pas eu la possibilité de désigner un autre avocat de son choix et il a été obligé de continuer d’être assisté par deux avocats commis d’office. M. Formonov n’était pas présent lors de la présentation des dépositions et éléments à charge et n’a pas pu les soumettre à un contre-examen. L’État partie ne donne aucune explication convaincante de la raison pour laquelle il a été expulsé de la salle d’audience. Pour manifester sa contestation, M. Formonov ne s’est pas montré bruyant ni n’a perturbé les débats ; il est resté silencieux, dos au juge ; il serait difficile de prétendre qu’un accusé silencieux cause tant de perturbations qu’il faut l’expulser du prétoire afin de permettre la poursuite des débats.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

8.1Avant d’examiner tout grief formulé dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

8.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément au paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même question n’était pas déjà en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

8.3Le Comité prend note du grief de l’auteure qui affirme que la police s’est immiscée arbitrairement dans la vie privée, la famille, le domicile et la correspondance de M. Formonov en perquisitionnant leur domicile plusieurs fois sans mandat, en saisissant tous les documents relatifs aux droits de l’homme, qui n’avaient pas de lien avec l’accusation d’extorsion, et en frappant l’auteure au point qu’elle a perdu connaissance et a dû passer la nuit à l’hôpital. Cependant, les éléments figurant au dossier ne permettent pas au Comité de s’assurer que ces griefs ont été soulevés devant les tribunaux nationaux. En conséquence, le Comité déclare les griefs tirés de l’article 17 irrecevables pour non-épuisement des recours internes.

8.4Le Comité prend note du grief de l’auteure qui affirme qu’elle a épuisé tous les recours internes utiles disponibles. En l’absence de toute objection de l’État partie à cet égard, le Comité considère que les conditions prévues au paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif sont remplies.

8.5Le Comité note que l’auteure affirme que l’État partie ne s’est pas acquitté des obligations lui incombant en vertu du paragraphe 2 de l’article 2 du Pacte, lu conjointement avec l’article 7, puisqu’il n’a pas adopté les lois ou pris les autres mesures voulues pour donner effet aux droits reconnus à l’article 7 du Pacte. Il rappelle sa jurisprudence selon laquelle les dispositions de l’article 2 ne sauraient être invoquées conjointement avec d’autres dispositions du Pacte dans une communication présentée en vertu du Protocole facultatif, sauf lorsque le manquement de l’État partie aux obligations que lui impose l’article 2 est la cause immédiate d’une violation distincte du Pacte qui affecte directement la personne qui se dit lésée. Le Comité note à cet égard que l’auteure affirme qu’il y a violation de l’article 2 (par. 2) lu conjointement avec l’article 7 en ce que l’État partie n’a pas pris de mesures efficaces pour prévenir la torture, protéger M. Formonov de la torture et enquêter comme il se doit sur les cas de torture et offrir un recours utile (voir par. 3.2). Le Comité considère cependant que l’auteure n’a pas, aux fins de la recevabilité, fourni suffisamment d’informations pour étayer ces griefs de manière à ce que ceux-ci soient distincts des griefs soulevés au titre de l’article 7. Il déclare donc cette partie de la communication irrecevable au regard de l’article 2 du Protocole facultatif.

8.6Le Comité prend note des allégations de l’auteure selon lesquelles son mari a été arrêté, poursuivi et condamné en raison des activités qu’il menait dans le domaine des droits de l’homme, que les perquisitions effectuées à son domicile n’avaient pas été dûment autorisées, qu’il a été torturé et que des preuves ont été forgées de toutes pièces, et que son procès a été entaché de violations de ses droits à une procédure régulière. Il considère que les allégations de l’auteure soulèvent également des questions au titre du paragraphe 3 d) de l’article 14 du Pacte. De l’avis du Comité, l’auteure a suffisamment étayé, aux fins de la recevabilité, les griefs qu’elle tire de l’article 7, lu seul et conjointement avec l’article 2 (par. 3), et des articles 9 (par. 1) et 14 (par. 1, 2 et 3 b), d), e) et g)) du Pacte, et procède donc à leur examen quant au fond.

Examen au fond

9.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations que lui ont communiquées les parties.

9.2L’auteure a affirmé que l’État partie avait violé l’article 7, lu seul et conjointement avec l’article 2 (par. 3) du Pacte, parce que son mari, un défenseur des droits de l’homme qui suivait des procès et rédigeait des bulletins sur des questions relatives aux droits de l’homme, avait été, après son arrestation, détenu au secret durant plus d’une semaine et torturé pendant sa détention, et parce que, après avoir été reconnu coupable, il avait été violemment frappé à maintes reprises, maintenu à l’isolement, dévêtu, menotté et détenu dans une cellule non chauffée pendant vingt‑trois jours alors que la température était inférieure à zéro. À cet égard, le Comité note que l’État partie a indiqué qu’initialement ni M. Formonov ni ses avocats ne s’étaient plaints d’actes de torture, et que les accusations de torture que M. Formonov avait formulées dans sa requête en appel avaient été examinées lors de l’audience d’appel et n’avaient pas été confirmées par la cour d’appel. Le Comité note toutefois que le conseil choisi par l’auteure et son mari, M. Yakubov, a déposé plusieurs plaintes, sans résultat, et que l’auteure a exposé les cas de torture de façon très détaillée, en précisant notamment comment son mari avait été torturé, les personnes qui étaient présentes pendant ces séances de torture et certaines déclarations faites à cette occasion. Les actes de torture infligés à M. Formonov après sa condamnation étaient également décrits en détail, notamment le placement de M. Formonov à l’isolement, les coups qui lui avaient été continûment administrés et qui l’avaient empêché de marcher pendant plus d’une semaine, son placement dans des cellules non chauffées où la température négative l’avait rendu malade, sa strangulation par les agents pénitentiaires et les menaces d’emprisonnement proférées à l’égard de ses enfants. Le Comité note en outre que l’auteure affirme que, si M. Formonov n’a pu avoir que peu d’entrevues avec sa famille, c’était dans le but de dissimuler les marques de torture. Il relève que l’État partie n’a fourni aucun élément montrant que des enquêtes particulières ont été menées sur les nombreuses allégations de mauvais traitements. Le Comité note également que l’État partie n’a fourni aucune explication au sujet des raisons du transfert de M. Formonov dans d’autres établissements pénitentiaires pendant les visites de la Croix-Rouge à Jaslyk. Le Comité considère que, dans les circonstances de l’espèce, l’État partie n’a pas démontré de manière satisfaisante que les autorités avaient enquêté sérieusement sur les allégations de torture et de mauvais traitements formulées par l’auteure. Il rappelle que la charge de la preuve en matière de torture ou de mauvais traitements ne saurait incomber uniquement à l’auteur d’une communication, en particulier du fait que l’auteur et l’État partie n’ont pas toujours un égal accès aux éléments de preuve et que, bien souvent, seul l’État partie est en possession des éléments d’information utiles. L’État partie a l’obligation de mener promptement une enquête diligente et indépendante sur toute allégation crédible de violation de l’article 7 du Pacte. Dans ces circonstances, le Comité estime qu’il convient d’accorder le crédit voulu aux allégations de torture et de mauvais traitements formulées par l’auteure. En conséquence, il conclut que les faits tels qu’ils sont exposés par l’auteure font apparaître une violation des droits que M. Formonov tient de l’article 7, lu seul et conjointement avec l’article 2 (par. 3) du Pacte.

9.3En ce qui concerne les allégations de l’auteure selon lesquelles M. Formonov a été détenu arbitrairement en raison de ses activités de défense des droits de l’homme, en violation des droits qu’il tient des articles 9 (par. 1) et 19 (par. 2), le Comité note que l’auteure indique que M. Formonov présidait une antenne régionale d’une organisation de défense des droits de l’homme, qu’il suivait des procès et qu’il rédigeait des bulletins sur les droits de l’homme. Il note également que l’État partie affirme qu’il a été arrêté pour extorsion. À cet égard, le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle la protection contre la détention arbitraire doit être appliquée de manière large et l’adjectif « arbitraire » n’est pas synonyme de « contraire à la loi » mais doit recevoir une interprétation plus large, intégrant le caractère inapproprié, l’injustice, le manque de prévisibilité et le non-respect des garanties judiciaires. Il rappelle également qu’il y a arbitraire si l’arrestation ou la détention vise à sanctionner quelqu’un pour l’exercice légitime des droits protégés par le Pacte, comme le droit à la liberté d’opinion et d’expression. Le Comité note que l’auteure affirme que l’arrestation avait pour but d’intimider M. Formonov et de le réduire au silence, en ciblant ses activités en tant que défenseur des droits de l’homme. Il note aussi que l’auteure indique que la photocopieuse de M. Formonov et tous ses documents et bulletins relatifs aux droits de l’homme ont été saisis pendant la perquisition, et que l’État n’a pas expliqué en quoi il pouvait y avoir un lien entre les documents relatifs aux droits de l’homme qui ont été saisis et l’accusation d’extorsion. Le Comité considère par conséquent que l’auteure a établi que M. Formonov avait été arrêté et détenu en raison de ses activités dans le domaine des droits de l’homme. Dans les circonstances décrites par l’auteure, et en l’absence d’explications de l’État partie concernant ces éléments de la communication, le Comité considère que les droits que M. Formonov tire des articles 9 (par. 1) et 19 du Pacte ont été violés.

9.4En ce qui concerne l’article 14 du Pacte, le Comité prend note de l’affirmation de l’auteure selon laquelle M. Formonov était enfermé dans une cage métallique pendant son procès. Il note aussi que l’État partie a admis cette situation comme un fait. Il rappelle que les défendeurs ne devraient pas être entravés ou enfermés dans des cages pendant les audiences, ni présentés au tribunal d’une manière laissant penser qu’ils peuvent être des criminels dangereux. Compte tenu des informations dont il est saisi, le Comité conclut que le maintien de M. Formonov dans une cage constitue une violation de son droit à être présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie, droit reconnu au paragraphe 2 de l’article 14 du Pacte.

9.5Le Comité prend note des griefs de l’auteure, qui affirme que, pendant presque tout le procès, son mari n’a pas eu accès à un conseil de son choix, que le conseil qu’il avait choisi n’a pas disposé du temps nécessaire pour préparer sa défense et qu’aucun des conseils n’a eu accès à certains documents, notamment la décision de la cour d’appel. Il prend également note du fait, non contesté par l’État partie, que le conseil choisi par M. Formonov, avant d’être dessaisi, a disposé de onze heures et trente minutes pour consulter les documents, qui lui ont été communiqués moins d’une semaine avant la tenue du procès. Par conséquent, le Comité conclut que l’État partie a violé les droits garantis à M. Formonov au paragraphe 3 b) et d) de l’article 14 du Pacte.

9.6Le Comité prend aussi note de l’argument selon lequel les aveux de M. Formonov obtenus sous la contrainte en présence de l’avocat commis d’office ont été acceptés par le tribunal comme un élément de preuve de l’extorsion. Il prend note également de la déclaration de l’État partie indiquant que l’élément de preuve examiné par le tribunal a été obtenu légalement et déclaré recevable par le tribunal, et que les allégations de torture soulevées dans le recours déposé par M. Formonov ont été examinées et rejetées par la cour d’appel. À cet égard, le Comité prend note de l’affirmation de l’auteure selon laquelle la décision de la cour d’appel a été tenue secrète. Il observe ensuite que l’État partie n’a pas fourni le moindre élément à l’appui de ses dires et que rien dans le dossier ne laisse penser que le tribunal de première instance ou la cour d’appel ont examiné le grief de M. Formonov, selon lequel il était détenu au secret lorsqu’il a fait ses aveux sous la contrainte, et qu’il est revenu sur ses aveux après s’être entretenu avec le conseil de son choix. À la lumière de ce qui précède, le Comité conclut à une violation des droits garantis au paragraphe 3 g) de l’article 14 du Pacte.

9.7Ayant constaté une violation des paragraphes 2 et 3 b), d) et g) de l’article 14 du Pacte, le Comité n’examinera pas séparément les autres griefs de l’auteure au titre des paragraphes 1 et 3 e) de l’article 14 du Pacte.

10.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif, constate que les faits dont il est saisi font apparaître une violation par l’État partie des droits garantis à M. Formonov à l’article 7, lu seul et conjointement avec l’article 2 (par. 3), à l’article 14 (par. 2 et 3 b), d) et g)) et à l’article 19 (par. 2) du Pacte.

11.Conformément au paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer à un recours utile, sous la forme d’une pleine réparation, à toute personne dont les droits et libertés reconnus dans le Pacte ont été violés. En conséquence, l’État partie est tenu, entre autres : a) de mener une enquête approfondie et efficace sur les allégations selon lesquelles le mari de l’auteure a été torturé et, si celles-ci sont confirmées, de poursuivre, juger et punir les responsables ; b) d’annuler le verdict rendu en première instance ; c) d’accorder une indemnisation appropriée au mari de l’auteure pour les violations subies. L’État partie est également tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se reproduisent pas.

12.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif, l’État partie a reconnu que le Comité a compétence pour déterminer s’il y a ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et une réparation exécutoire lorsqu’il a été établi qu’une violation a été commise, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet aux présentes constatations. L’État partie est invité en outre à rendre celles-ci publiques et à les diffuser largement dans ses langues officielles.