Nations Unies

CAT/C/71/D/807/2017

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

6 septembre 2021

Original : français

Comité contre la torture

Décision adoptée par le Comité au titre de l’article 22 de la Convention concernant la communication no 807/2017 * , **

Communication présentée par :

X et Y (non représentés par un conseil)

Victime(s) présumée(s) :

Les requérants

État partie :

Suisse

Date de la requête :

27 septembre 2016 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise en application des articles 114 et 115 du règlement intérieur du Comité, transmise à l’État partie le 21 février 2017 (non publiée sous forme de document)

Date de la présente décision :

19 juillet 2021

Objet :

Expulsion vers la République islamique d’Iran

Questions de procédure :

Néant

Questions de fond :

Risque de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants en cas d’expulsion vers le pays d’origine

Article(s) de la Convention :

3

1.1Les requérants sont X, de nationalité iranienne, née le 21 mai 1987, et son père, Y, de nationalité iranienne également, né le 21 mars 1950. X et Y sont arrivés en Suisse respectivement le 31 octobre 2011 et le 15 novembre 2011, et ont déposé leurs demandes d’asile le jour de leurs arrivées. Leurs demandes d’asile ont été rejetées le 8 août 2014. Les requérants ont ensuite déposé une demande d’appel au Tribunal administratif fédéral, mais cette requête a également été rejetée le 26 novembre 2015. Leurs derniers appels ont été rejetés le 7 juillet 2016. Les requérants font ainsi l’objet d’une décision de renvoi vers laRépublique islamique d’Iran et considèrent qu’un tel renvoi constituerait une violation par l’État partie de l’article 3 de la Convention. L’État partie a fait la déclaration prévue à l’article 22 (par. 1) de la Convention le 2 décembre 1986. Les requérants n’étaient pas représentés par un conseil au moment de la soumission initiale, mais en ont engagé un par la suite.

1.2Le 21 février 2017, en application de l’article 114 de son règlement intérieur, le Comité, agissant par l’intermédiaire de son Rapporteur chargé des nouvelles requêtes et des mesures provisoires de protection, a prié l’État partie de ne pas expulser les requérants vers laRépublique islamique d’Iran tant que leur requête serait en cours d’examen. Le 24 février 2017, la Suisse a accepté la requête de n’entreprendre aucune démarche en vue de l’exécution du renvoi des requérants.

Rappel des faits présentés par les requérants

2.1X est née à Téhéran. À la suite du divorce de ses parents, à partir de l’âge de 2 ans, elle a vécu avec son père, Y, sans aucun contact avec sa mère. Y ne s’est pas remarié. C’est lors d’une visite chez sa tante à Kermanshah, une ville à proximité de la frontière iraquienne, que X a connu son fiancé Ramin, dont la famille est kurde. Le père de son fiancé avait été tué après la révolution islamique et sa mère avait quitté la région kurde pour habiter à Kermanshah par suite de menaces incessantes. À cause de ces événements, le fiancé de X fournissait une aide humanitaire aux Kurdes à la frontière. Sensibilisée à la cause de son fiancé, X a effectué plusieurs visites dans la région avec Y pour faire don à la communauté de vêtements, d’argent et d’autres biens collectés auprès d’amis. Prenant des risques, X a dûment documenté ses activités, y compris à l’aide de photos, afin également de recueillir des fonds auprès d’amis et de connaissances.

2.2Lors de sa dernière visite à Kermanshah, X a séjourné chez la mère de son fiancé alors que celui-ci et ses amis menaient leurs activités de distribution d’aide et de dons. Un soir, alors que la famille dînait ensemble, un ami de son fiancé a sonné à la porte et ce dernier est sorti discuter avec lui. Alors que son fiancé était dehors, on a de nouveau sonné à la porte. Supposant qu’il s’agissait de son fiancé, X a ouvert la porte sans vérifier l’identité du visiteur par l’interphone. Quatre ou cinq hommes et deux femmes qu’ils ne connaissaient pas sont entrés. Lorsque Y leur a demandé leur identité, ils l’ont frappé.

2.3Dès leur arrivée, les agresseurs ont bandé les yeux de toutes les personnes présentes, leur ont passé les menottes, et les ont frappées et insultées. Ils les ont ensuite embarquées dans une voiture et leur ont enjoint de s’accroupir. X a été conduite dans une cellule où, pendant une période qu’elle estime à quinze ou seize jours, elle a été interrogée au sujet de livraisons d’armes aux Kurdes afin de renverser l’État iranien. Elle a été frappée, insultée et violée à de multiples reprises par plusieurs hommes. Après avoir été torturée, asphyxiée à l’aide d’un sac mouillé sur le visage et enfermée dans une pièce, X a été forcée de signer une confession écrite. Après cela, on l’a sortie de son lieu de détention et abandonnée dans un endroit qui lui était inconnu. Grâce à un passant, elle a pu être conduite chez la mère de son fiancé. Quelques jours plus tard, Y a été libéré, après environ vingt jours de détention.

2.4Quand X a vu son fiancé de nouveau, ce dernier ayant pu s’échapper après avoir vu les hommes hors de la maison, il lui a dit qu’il devrait se cacher et lui a demandé son journal intime ainsi que sa clef USB qui contenait ses rapports et les photos qu’elle avait prises lors de ses séjours dans les régions kurdes. Plus tard, X a été informée que son fiancé avait été arrêté, que la maison de la mère de ce dernier avait été perquisitionnée et que sa clef USB avait été saisie.

2.5La mère de son fiancé a insisté pour que les requérants quittent le pays tout de suite. Avec l’aide d’un trafiquant, X a quitté laRépublique islamique d’Iran pour se diriger vers l’Europe en passant par la Turquie, et Y l’a rejointe en Suisse quelques semaines plus tard. X a déposé une demande d’asile le 31 octobre 2011 et a été entendue par l’Office fédéral des migrations le 11 novembre 2011. Y a déposé sa demande d’asile le 15 novembre 2011 et a été entendu par l’Office le 13 décembre 2011.

2.6X a été entendue une deuxième fois par l’Office fédéral des migrations le 3 septembre 2013. Malheureusement, sans l’aide de la psychothérapie, qu’elle n’a commencée avec la Croix-Rouge suisse que le 21 novembre 2013, X n’a pas été en mesure, lors de ce deuxième entretien, de mentionner tous les aspects de sa détention, y compris son viol. Le 8 août 2014, l’Office a rejeté sa demande d’asile sans lui donner l’occasion de témoigner encore, et ce, malgré la demande de son psychiatre. L’Office a soutenu qu’il avait accepté le fait que X souffrait de troubles de stress post-traumatique, mais il ne croyait pas que son état avait été causé par la persécution que X avait décrite. En outre, les assertions de X n’avaient pas été considérées comme vraisemblables ; l’Office a considéré que sa description de ses voyages dans la région kurde était vague et stéréotypée, que ses comptes rendus écrits à la main de ses visites étaient contradictoires, et que ses éclaircissements concernant les événements survenus avant son arrestation mettaient en doute sa crédibilité. De plus, selon l’Office, X n’avait pas réussi à expliquer et à décrire de façon convaincante les conditions de sa détention et les méthodes d’interrogatoire auxquelles elle avait été soumise.

2.7En outre, l’Office fédéral des migrations avait reçu deux lettres anonymes, les 10 juin et 17 septembre 2013, accusant les requérants d’avoir utilisé de fausses identités devant les autorités suisses, à savoir Mme Ghazal Tarik et M. Ebrahim Tarik. Ces lettres allèguent que X a une sœur en Suisse (la fille de Y), qu’elle et Y sont entrés en Suisse avec des visas pour lui rendre visite et qu’ils sont ensuite partis en France avant de revenir en Suisse pour y demander l’asile. Du fait de la nature anonyme de ces lettres, les requérants craignent qu’elles soient l’œuvre des services de renseignement iraniens.

2.8Le 4 septembre 2014, ayant demandé la possibilité de compléter ses déclarations, X a été à nouveau entendue par l’Office fédéral des migrations. Encore une fois, elle a éprouvé des difficultés à raconter en détail tout ce qui s’était passé.

2.9Le 9 septembre 2014, son avocat de l’époque a déposé une demande d’appel devant le Tribunal administratif fédéral et demandé en particulier que X soit interrogée sur les questions auxquelles elle n’avait pas encore répondu. En référence aux lettres anonymes, une fois saisi de l’appel des requérants, le Tribunal s’est adressé à l’Ambassade de Suisse en République islamique d’Iran afin d’obtenir les dossiers complets des demandes de visa déposées par les personnes mentionnées dans ces lettres. Par réponse du 10 décembre 2014, l’Ambassade a déclaré que les dossiers de 2011 avaient été détruits. Le Tribunal s’est donc adressé à la famille Reusser qui, selon les lettres, avait hébergé les requérants. Celle‑ci a déclaré que les personnes mentionnées dans les lettres avaient séjourné chez une autre personne, Golnaz Tarik.

2.10Après s’être adressé à Golnaz Tarik, le Tribunal administratif fédéral a noté que la mère de celle-ci avait les mêmes nom et prénom (quoiqu’avec des orthographes différentes dues, selon l’État partie, à de simples différences de transcription) et date de naissance que la mère de X et ex-épouse de Y. Dans sa réponse du 10 juillet 2015, Golnaz Tarik a affirmé qu’elle avait accueilli son père et sa sœur chez elle en 2011 et qu’elle les avait accompagnés à l’aéroport. En outre, le Tribunal a conclu que les réponses de X aux questions sur Ghazal Tarik constituaient des indices forts qu’elle s’était présentée sous cette identité aux deux personnes avec lesquelles elle avait fait connaissance en Suisse. Contestant les allégations de fausse identité, les requérants ont proposé de se soumettre à une analyse ADN ; cependant, malgré la demande du Tribunal, Golnaz Tarik a refusé de donner son consentement pour effectuer l’analyse.

2.11Le Tribunal administratif fédéral a enfin rejeté l’appel le 26 novembre 2015, considérant que le récit des requérants n’était ni crédible ni plausible, en grande partie à cause de l’absence de détails concernant les actes de torture subis et de la nature vague du récit. X allègue pour sa part que le Tribunal n’a pas examiné les lettres anonymes comme il se devait, et que celles-ci ne sont pas fondées. Le Tribunal a également occulté le fait que les victimes de torture qui souffrent de stress post-traumatique ont souvent des difficultés à raconter des événements traumatiques, surtout dans le cadre d’une audition et sans l’aide de traitement psychothérapique. C’est pour cela que X estime que les autorités et les tribunaux suisses n’ont pas examiné de manière circonstanciée leurs allégations et les éléments de preuve apportés. Malgré ce fait, le rejet de l’appel par le Tribunal a confirmé l’ordre d’expulsion des requérants.

2.12En avril 2016, une amie de X s’est rendue en République islamique d’Iran et a pu trouver et rapporter le permis de conduire de celle-ci, permettant d’établir et de prouver son identité. Le 7 juillet 2016, le Tribunal administratif fédéral, saisi par X, a constaté que le permis de conduire ne prouvait pas l’identité de X et que, en outre, la question de l’identité n’était pas la seule raison pour laquelle la demande d’asile avait été rejetée.

2.13Le 27 septembre 2016, les requérants ont soumis leur communication au Comité, demandant des mesures provisoires, étant donné que leur renvoi vers laRépublique islamique d’Iran était imminent.

Teneur de la plainte

3.1Les requérants affirment qu’ils courent le risque d’être soumis à la torture ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants en cas de renvoi vers laRépublique islamique d’Iran, car ils ont déjà été arrêtés et torturés en juin 2011 pour avoir aidé les populations kurdes. Ils considèrent qu’un tel renvoi constituerait une violation par la Suisse de ses obligations au titre de l’article 3 de la Convention.

3.2Les requérants craignent aussi d’être à nouveau arrêtés et détenus car les autorités iraniennes ont à leur disposition toutes les informations relatives à X saisies dans la maison de son fiancé, à savoir sa clef USB ainsi que les photos prises et articles rédigés par ses soins. De plus, ils invoquent la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran et le traitement par les autorités iraniennes des Kurdes vivant près des frontières avec l’Iraq. Dans ce contexte, les autorités iraniennes considèrent l’aide humanitaire fournie par les requérants en faveur de la communauté kurde comme des activités politiques.

3.3Par ailleurs, les requérants considèrent que l’État partie n’a pas correctement examiné le témoignage de X sur les abus sexuels subis, y compris le viol, occultant le fait que les victimes de torture qui souffrent de stress post‑traumatique ne peuvent souvent pas raconter des événements traumatiques, et qu’il a fondé ses décisions sur les informations erronées contenues dans les deux lettres anonymes du 10 juin et du 17 septembre 2013, lesquelles accusaient les requérants d’avoir utilisé de faux noms devant les autorités et tribunaux suisses. Les requérants demandent le droit d’être pleinement entendus sur ces points, contestant la procédure devant l’Office fédéral des migrations − aujourd’hui devenu le Secrétariat d’État aux migrations − ainsi que devant le Tribunal administratif fédéral.

Observations de l’État partie sur le fond

4.1Le 16 août 2017, l’État partie a soumis des observations sur le fond, sans contester la recevabilité de la requête.

4.2L’État partie considère que, dans leur ensemble, les allégations des requérants manquent de cohérence et de crédibilité, en particulier en ce qui concerne les activités déployées en faveur des Kurdes vivant dans la pauvreté (collecte de vêtements et d’argent auprès d’amis, et distribution de ces dons à l’occasion de voyages dans la région kurde), l’arrestation, les abus sexuels, y compris le viol, subis par X lors de sa détention, l’allégation de X selon laquelle elle aurait entendu tomber la mère de son fiancé lorsqu’elle avait les yeux bandés, l’ajout dans le rapport médical des faits qu’elle n’avait pas racontés aux auditions et les questions d’identité. En ce qui concerne les allégations indiquant que le Tribunal administratif fédéral se serait essentiellement basé sur des dénonciations anonymes selon lesquelles X aurait une sœur vivant en Suisse, l’État partie affirme que ce fait n’aurait jamais été étayé, puisque la sœur alléguée a refusé de se soumettre à un test ADN. De plus, les requérants n’auraient pas pu prouver leur identité, puisque les autorités suisses n’auraient pas reconnu, comme documents d’identité, des permis de conduire ou des certificats scolaires.

4.3Le Tribunal administratif fédéral a relevé que des doutes quant à la crédibilité des requérants persistaient également au vu de leur comportement concernant la présentation de documents d’identité. Lors de sa première audition, Y aurait déclaré que le passeur avait pris ses documents d’identité alors que, selon ses déclarations lors de la seconde audition, ses documents d’identité avaient été confisqués lors de son arrestation et il n’avait donné au passeur que son acte de naissance. Dans leurs observations du 1er juin 2015, les requérants auraient fait valoir qu’ils ne pourraient pas se procurer de documents d’identité en République islamique d’Iran bien qu’en annexe, ils aient remis un long courriel de l’ex‑employeur de X, auquel était joint un certificat de travail récemment établi.

4.4En ce qui concerne la demande de X de procéder à une confrontation avec sa sœur alléguée, le Tribunal administratif fédéral a considéré que cette mesure n’aurait pas pu réfuter les indices constatés. En outre, Golnaz Tarik n’aurait jamais contesté être parente avec les requérants − même pas lorsque le Tribunal a demandé son consentement à fournir un échantillon d’ADN. Au vu de tous ces éléments, le Tribunal a conclu à l’absence de crédibilité des allégations des requérants quant à un éventuel risque de torture en cas de renvoi.

4.5Le 1er juillet 2016, les requérants ont saisi le Tribunal administratif fédéral d’une demande de révision. À l’appui de leur demande, ils ont remis des documents qui prouveraient que les allégations selon lesquelles ils étaient en réalité Ebrahim Tarik et Ghazal Tarik étaient fausses. Le juge d’instruction a rendu une décision intérimaire le 7 juillet 2016, rejetant la demande d’octroi de l’assistance judiciaire des requérants ; il a considéré la demande de révision comme dénuée de chances de succès et a invité les requérants à verser une avance de 1 600 francs suisses en garantie des frais de procédure, sous peine d’irrecevabilité du recours. Les requérants n’ont pas versé l’avance de frais dans le délai imparti. Par conséquent, le Tribunal a rayé de son rôle la demande de révision. L’État partie soutient donc le bien-fondé des décisions des autorités nationales, à la lumière de l’article 3 de la Convention ainsi que de la jurisprudence du Comité et de ses observations générales.

4.6L’État partie rappelle les éléments qui doivent être pris en compte pour apprécier l’existence d’un risque « personnel, réel, actuel et sérieux » d’être soumis à la torture ou à des mauvais traitements en cas de retour dans le pays d’origine : preuves de l’existence d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme graves, flagrantes ou massives dans le pays d’origine ; allégations de torture ou de mauvais traitements subis dans un passé récent et preuves indépendantes à l’appui de celles-ci ; activités politiques des requérants à l’intérieur ou à l’extérieur du pays d’origine ; preuves de la crédibilité des requérants ; et incohérences factuelles dans les affirmations des requérants.

4.7Pour ce qui est de l’existence d’un ensemble systématique de violations des droits de l’homme graves, flagrantes ou massives, celle-ci ne constitue pas en soi un motif suffisant pour penser qu’un individu serait victime de torture à son retour dans son pays d’origine. Le Comité doit établir si les requérants risquent « personnellement » d’être soumis à la torture dans le pays vers lequel ils seraient renvoyés. D’autres motifs doivent exister pour que le risque de torture puisse être qualifié, au sens de l’article 3 (par. 1) de la Convention, de « prévisible, réel et personnel ». Le risque de torture doit être apprécié selon des éléments qui ne se limitent pas à de simples supputations ou soupçons.

4.8L’État partie n’estime pas que, malgré la situation préoccupante en République islamique d’Iran, ce pays soit actuellement dans une situation de violence généralisée ; en outre, la situation dans un pays d’origine ne peut pas constituer à elle seule un motif suffisant pour la conclusion que les requérants courraient le risque d’y être torturés en cas de renvoi. Selon l’État partie, les requérants n’ont de toute façon pas démontré qu’ils courent ce risque. De plus, l’État partie considère que les affirmations selon lesquelles X aurait subi des actes de torture ou de mauvais traitements et été détenue ne sont pas crédibles ; son rapport médical ne montre aucun indice concernant les mauvais traitements qu’elle aurait subis. D’ailleurs, il n’y a aucune mention d’actes politiques par les requérants en République islamique d’Iran, malgré toutes les affirmations relatives à des activités humanitaires menées en faveur des Kurdes avancées devant les tribunaux suisses ainsi que devant le Comité, ou d’actes politiques entrepris contre laRépublique islamique d’Iran en Suisse.

4.9L’État partie est d’avis que les requérants n’ont pas rendu plausibles leurs allégations de persécution en République islamique d’Iran. Il relève que l’ensemble des arguments avancés relatifs à un risque de persécution dans ce pays a été apprécié de manière circonstanciée par les autorités suisses. Il convient de souligner que la communication des requérants ne contient pas d’éléments ou moyens de preuve nouveaux. En examinant la présente communication, le Comité se penche ainsi sur un cas qui a déjà fait l’objet d’un examen juridique complet par les autorités suisses, qui sont spécialisées en la matière. L’État partie rappelle aussi la pratique du Comité selon laquelle c’est aux tribunaux des États parties à la Convention qu’il appartient d’apprécier les faits et les éléments de preuve dans un cas d’espèce. En particulier, le Comité doit apprécier les faits et les éléments de preuve dans une affaire donnée lorsqu’il est établi que la manière dont ces éléments de preuve ont été appréciés était manifestement arbitraire, ou équivalait à un déni de justice. Or, dans l’affaire à l’examen, les éléments présentés par les requérants ne montrent pas que l’examen par l’État partie ait été entaché de telles irrégularités. Ce dernier constat vaut en particulier pour l’allégation indiquant que le Tribunal administratif fédéral se serait essentiellement basé sur deux lettres anonymes selon lesquelles X aurait une sœur vivant en Suisse : les auteurs desdites lettres sont connus des autorités suisses, mais leur identité n’a, pour d’évidentes raisons, pas été dévoilée aux requérants ; lesdites lettres ont provoqué des recherches supplémentaires du Tribunal visant à clarifier les faits ; les requérants ont eu accès au dossier et ont pu soumettre leurs observations au Tribunal ; et, plus important encore, le rejet des demandes d’asile des requérants était motivé par d’autres raisons que leur identité.

4.10En conclusion, selon l’État partie, rien n’indique qu’il existe des motifs sérieux de craindre que les requérants soient exposés concrètement et personnellement à la torture en cas de retour en République islamique d’Iran. Leurs allégations et les moyens de preuve fournis ne permettent pas, en effet, de considérer que leur renvoi les exposerait à un risque réel, actuel et personnel d’être torturés. L’État partie constate donc que le renvoi des requérants en République islamique d’Iran ne constituerait pas une violation de ses obligations au titre de l’article 3 de la Convention.

Commentaires des requérants sur les observations de l’État partie

5.1Le 31 août 2018, les requérants ont transmis des commentaires relatifs aux observations de l’État partie.

5.2Sur le fond, les requérants indiquent que l’État partie accorde un rôle central à la deuxième audition de X, lui reprochant d’avoir des explications ne contenant que peu de détails et qui sont illogiques, voire contradictoires. Ils notent que la deuxième audition a duré une journée complète et a eu lieu avec une interprète de langue persane. Étant donné que la première lettre anonyme accusant X et Y d’avoir utilisé de fausses identités a été reçue par l’Office fédéral des migrations en juin 2013, la deuxième audition de X avec l’Office, le 3 septembre 2013, s’est déroulée dans un climat de méfiance. Bien que sa mémoire ait pu parfois lui faire défaut, en particulier concernant des souvenirs douloureux, comme c’est souvent le cas avec des victimes qui souffrent de stress post-traumatique, X maintient qu’elle a fait un effort en toute bonne foi pour essayer de répondre au mieux aux près de 200 questions que la collaboratrice de l’Office lui a posées, et qu’elle se serait expliquée si davantage d’informations avaient été nécessaires. Les requérants notent que la collaboratrice avait l’air peu intéressée par les réponses données par X, à part celles relatives aux 2 dernières questions concernant la dénonciation des lettres anonymes, à partir desquelles elle a paru soudainement très intéressée, mais très insatisfaite des réponses de X.

5.3De plus, le second courrier de dénonciation envoyé reprend presque mot pour mot le contenu du premier courrier. Bien que l’Office fédéral des migrations prétende ne pas avoir pris sa décision uniquement sur la base de ces courriers, mais sur l’ensemble des éléments, les requérants constatent que la réception de ces courriers représente pourtant bien un tournant dans la procédure.

5.4Les requérants ont en outre essayé de collaborer à maintes reprises tout au long du processus. X a sollicité plusieurs fois qu’on lui communique l’identité des auteurs des lettres de dénonciation pour qu’elle puisse mieux y répondre, elle a proposé de se soumettre à un test ADN pour aider à établir son identité et à prouver qu’elle n’avait aucun lien de parenté avec la personne considérée comme sa sœur présumée, laquelle a refusé. X a tout de même insisté et a essayé de convaincre cette personne de se soumettre au test en la contactant personnellement. C’est par un examen biaisé du dossier que les autorités suisses ont considéré que les allégations des requérants n’étaient pas crédibles et ont refusé de leur accorder l’asile.

5.5Concernant la vraisemblance de leur récit, les requérants affirment que toutes les possibles contradictions ou imprécisions qui ont été relevées par les autorités ont une explication cohérente. Comme c’est souvent le cas avec des victimes de stress post‑traumatique, X a indiqué ne pas pouvoir se souvenir du nombre exact de voyages qu’elle a entrepris dans la région kurde. À la demande de la collaboratrice de l’Office fédéral des migrations d’en spécifier le nombre, X a répondu avoir fait quatre ou cinq voyages.

5.6En ce qui concerne l’épisode de son arrestation, X estime avoir été mal comprise. En effet, la maison était surveillée en permanence. Par contre, X n’a pas prétendu que son fiancé s’était échappé, mais plutôt qu’il était sorti avant l’arrivée des officiers, pour une autre raison. Ce cas de figure est plausible, sachant que la maison était surveillée depuis plusieurs jours et que les officiers n’ont pas débarqué immédiatement. X a simplement fait une déduction basée sur son appréciation des faits.

5.7De plus, le fait que X a entendu tomber la mère de son fiancé lorsqu’elle avait les yeux bandés est tout à fait possible, étant donné qu’une personne avec les yeux bandés peut entendre et reconnaître la voix d’une personne qui tombe. Les requérants maintiennent que ce fait n’est pas absurde.

5.8Le journal de X est également sujet à controverse. Comme elle l’a affirmé plusieurs fois, X a écrit à la première personne dans son journal et l’a rédigé à la main, et ajoutait des photos imprimées pour illustrer son récit, y compris des photos de son père et d’elle, de sorte qu’ils seraient identifiables. Elle scannait le journal au fur et à mesure sur sa clef USB, que son fiancé a ensuite prise. D’ailleurs, quand ce dernier a été arrêté, il avait cette clef USB sur lui. En outre, X n’a pas demandé de nouvelles de son fiancé lorsqu’elle était en Suisse afin de le protéger. Elle note que c’est un comportement très courant chez les requérants d’asile. La seule personne dont elle a demandé des nouvelles a été son père.

5.9De surcroît, les différents rapports médicaux que X a présentés confirment qu’elle a été confrontée à des mauvais traitements en République islamique d’Iran. X n’a jamais réussi à établir un lien de confiance avec son premier thérapeute, et sa prise en charge n’était pas optimale ; par conséquent, elle n’a pas été en mesure de s’exprimer parfaitement lors de ses auditions en raison des troubles de stress post-traumatique dont elle souffre toujours. En conséquence, X a fait une tentative de suicide après sa deuxième audition. Pour ce qui est de l’affirmation de l’État partie selon laquelle les causes du stress post-traumatique sont autres que celles avancées par X, même si les symptômes ont été établis, X souligne que l’État partie n’explique pas sur quelles sources d’information il fonde cette conclusion. Elle maintient que les autorités suisses ont manifestement fait preuve d’une mauvaise appréciation des faits concernant les requérants, ce qui a conclu au rejet de leur demande d’asile.

5.10Enfin, concernant la question des activités politiques ou plutôt de l’opinion politique, les autorités suisses, y compris l’Office fédéral des migrations, ont considéré que les livraisons d’aide aux Kurdes par les requérants n’étaient pas le fruit d’un engagement politique. Malgré cela, les requérants déclarent que, si leur soutien ne résultait pas d’un idéal politique, l’appréciation d’un tel soutien impliquait soit l’existence d’une opinion politique, soit l’imputation par le Gouvernement d’une opinion politique. Au vu des tensions toujours croissantes entre la République islamique d’Iran et les minorités kurdes, toute aide en faveur des Kurdes, même neutre, humanitaire et philanthropique, est perçue par le Gouvernement iranien comme une trahison envers la patrie et, de ce fait, comme une activité politique ainsi qu’un motif de persécution qui justifie l’octroi du statut de réfugié selon les interprétations contemporaines du droit international. Les requérants concluent donc que les autorités suisses ont exercé une mauvaise appréciation des faits qui a conduit à une violation du droit.

5.11Le 3 octobre 2018, le conseil des requérants, au nom du Service ambulatoire pour victimes de la torture et de la guerre de la Croix-Rouge suisse à Berne, a exprimé ses préoccupations à l’égard de la fermeture prévue de l’établissement d’hébergement collectif pour les réfugiés, où les requérants seraient hébergés jusqu’à fin octobre 2018. Le conseil a demandé de ne pas les reloger dans un autre logement collectif, car cela aggraverait sérieusement les problèmes médicaux et psychiatriques des requérants, qui ont souffert de traumatismes complexes et de démence (des copies de rapports médicaux ont été jointes). Les requérants jugent raisonnable et appropriée la suggestion de les loger dans un appartement pour personnes handicapées.

Renseignements complémentaires fournis par les requérants

6.Le 3 mai 2021, les requérants ont présenté une demande de statut quant à la date à laquelle la décision finale serait prise, fournissant également une mise à jour sur leur état de santé.

Observations complémentaires de l’État partie

7.Le 5 mai 2021, l’État partie a fait valoir qu’il n’avait pas d’autres observations à formuler.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

8.1Avant d’examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité doit déterminer si celle-ci est recevable au regard de l’article 22 de la Convention. Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément à l’article 22 (par. 5 a)) de la Convention, que la même question n’a pas été et n’est pas actuellement examinée par une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

8.2Le Comité rappelle que, conformément à l’article 22 (par. 5 b)) de la Convention, il ne peut examiner aucune requête émanant d’un particulier sans s’être assuré que celui-ci a épuisé tous les recours internes disponibles. Cette règle ne s’applique pas s’il est établi que les procédures de recours ont excédé des délais raisonnables ou s’il est peu probable qu’elles donnent, à l’issue d’un procès équitable, satisfaction à la victime présumée. Le Comité note qu’en l’espèce, l’État partie n’a pas contesté le fait que les requérants ont épuisé tous les recours internes disponibles, ou d’autres critères de recevabilité de la requête.

8.3En l’absence de toute question relative à la recevabilité de la requête, le Comité la déclare recevable, étant donné qu’elle soulève des questions au titre de l’article 3 de la Convention et que les faits et la base des demandes des requérants ont été dûment étayés, et procède à son examen au fond.

Examen au fond

9.1Conformément à l’article 22 (par. 4) de la Convention, le Comité a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations que lui ont communiquées les parties.

9.2En l’espèce, le Comité doit déterminer si le renvoi des requérants vers la République islamique d’Iran constituerait une violation de l’obligation incombant à l’État partie au titre de l’article 3 de la Convention de ne pas expulser ou refouler une personne vers un autre État où il y a des motifs de croire qu’elle risquerait d’être soumise à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

9.3Le Comité doit apprécier s’il existe des motifs sérieux de croire que les requérants risquent personnellement d’être soumis à la torture en cas de renvoi en République islamique d’Iran. Pour ce faire, conformément à l’article 3 (par. 2) de la Convention, il doit tenir compte de tous les éléments pertinents, y compris l’existence éventuelle d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme graves, flagrantes ou massives. Le Comité rappelle toutefois que le but de cette analyse est de déterminer si l’intéressé court personnellement un risque prévisible et réel d’être soumis à la torture dans le pays où il serait renvoyé. Il s’ensuit que l’existence, dans un pays, d’un ensemble de violations systématiques des droits de l’homme, graves, flagrantes ou massives ne constitue pas en soi une raison suffisante pour établir qu’une personne donnée risquerait d’être soumise à la torture à son retour dans ce pays. Il doit exister des motifs supplémentaires donnant à penser que l’intéressé court personnellement un risque. Inversement, l’absence d’un ensemble de violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme ne signifie pas qu’une personne ne puisse pas être soumise à la torture dans la situation particulière qui est la sienne. En outre, le Comité note que, puisque laRépublique islamique d’Iran n’est pas partie à la Convention, en cas de violation de leurs droits en vertu de la Convention dans ce pays, les requérants seraient privés de la possibilité légale de s’adresser au Comité pour obtenir une forme quelconque de protection.

9.4Le Comité rappelle son observation générale no 4 (2017), selon laquelle, premièrement, l’obligation de non-refoulement existe chaque fois qu’il y a des « motifs sérieux » de croire qu’une personne risque d’être soumise à la torture dans l’État vers lequel elle doit être expulsée, que ce soit à titre individuel ou en tant que membre d’un groupe susceptible d’être torturé dans l’État de destination, et, deuxièmement, le Comité a pour pratique de déterminer qu’il existe des « motifs sérieux » chaque fois que le risque est « prévisible, personnel, actuel et réel ». Il rappelle également qu’il incombe à l’auteur de la communication de présenter des arguments défendables, c’est-à-dire des arguments circonstanciés montrant que le risque d’être soumis à la torture est prévisible, personnel, actuel et réel. Toutefois, lorsque le requérant se trouve dans une situation où il ne peut pas donner de détails sur son cas, la charge de la preuve est renversée et il incombe à l’État partie concerné d’enquêter sur les allégations et de vérifier les informations sur lesquelles est fondée la communication. Le Comité accorde un poids considérable aux conclusions des organes de l’État partie ; toutefois, il n’est pas lié par ces conclusions et il apprécie librement les informations dont il dispose, conformément à l’article 22 (par. 4) de la Convention, compte tenu de toutes les circonstances pertinentes pour chaque cas.

9.5En l’espèce, le Comité prend note de l’argument des requérants selon lequel, en cas de renvoi vers laRépublique islamique d’Iran, ils seraient considérés comme traîtres pour avoir fourni une aide humanitaire aux populations kurdes en République islamique d’Iran, et risqueraient à ce titre d’être de nouveau soumis à la torture ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il note également que les requérants craignent que les documents illustrant leurs activités et trouvés par les autorités iraniennes n’aggravent leur situation et que leur aide puisse être perçue comme des activités politiques du point de vue du Gouvernement iranien. Le Comité observe aussi que les requérants considèrent que l’État partie n’a pas correctement examiné le témoignage de X sur les abus sexuels qu’elle aurait subis, n’ayant pas tenu compte du fait que les victimes de torture qui souffrent de stress post‑traumatique ont souvent des difficultés à raconter des événements traumatiques, et qu’il a fondé ses décisions sur les informations erronées contenues dans les deux lettres anonymes du 10 juin et du 17 septembre 2013, lesquelles accusent les requérants d’avoir utilisé de fausses identités.

9.6Le Comité note que les autorités suisses ont considéré comme vagues les descriptions de la distribution des biens ainsi que le nombre de voyages entrepris par les requérants dans la région kurde, et ont notamment relevé que X ne pouvait pas préciser avec certitude combien de fois son père l’avait accompagnée. Il note également que l’Office fédéral des migrations a ensuite considéré que les déclarations de X sur des prestations d’aide offertes aux Kurdes, son arrestation, les abus sexuels subis, ainsi que sa description des conditions de détention étaient incohérentes et superficielles, en partie illogiques et limitées à ce qui est « généralement connu ». Le Comité note ensuite que, selon l’évaluation de l’État partie : a) X n’a pas donné pendant ses interrogatoires d’éléments concrets sur sa détention, mais pleurait, se souvenait des mauvais traitements et des actes de torture ; b) les déclarations de X concernant son journal intime étaient vagues et contradictoires, et les autorités iraniennes ne disposeraient pas d’indices quant à la personne à qui ce journal appartient, puisque le nom de X n’y était pas explicitement mentionné ; c) X a ajouté dans son rapport médical des faits qu’elle n’avait pas racontés aux auditions ; d) les rapports médicaux indiquant que X souffrait de stress post-traumatique n’étaient pas pertinents, car il n’était pas possible d’affirmer que ces troubles résultaient des actes de persécution qu’elle alléguait avoir subis ; e) les déclarations de Y concernant l’aide humanitaire, son arrestation et sa détention étaient invraisemblables ; f) il n’y avait aucune mention d’actes politiques menés par les requérants en République islamique d’Iran, ou d’actes politiques entrepris contre laRépublique islamique d’Iran en Suisse ; g) les allégations des requérants indiquant que les autorités suisses se seraient essentiellement basées sur des dénonciations anonymes selon lesquelles X aurait une sœur vivant en Suisse n’avaient jamais été étayées, puisque la sœur alléguée avait refusé de se soumettre à un test ADN ; h) Golnaz Tarik n’aurait jamais contesté être parente avec les requérants ; i) les requérants n’auraient pas pu prouver leur identité ; et j) des doutes quant à la crédibilité des requérants persistaient également au vu de leur comportement concernant la présentation de documents d’identité.

9.7Le Comité rappelle qu’il lui appartient de déterminer si les requérants courent actuellement le risque d’être soumis à la torture ou à des mauvais traitements en cas de renvoi vers laRépublique islamique d’Iran. Il note que les requérants ont eu de nombreuses occasions d’étayer et de préciser leurs griefs devant l’Office fédéral des migrations − aujourd’hui devenu le Secrétariat d’État aux migrations − et le Tribunal administratif fédéral, mais que les éléments apportés n’ont pas permis aux autorités nationales de conclure que l’aide humanitaire apportée par les requérants aux populations kurdes, leurs opinions prétendues ou les périodes de détention ou mauvais traitements qu’ils auraient subis pouvaient les mettre en danger de subir actuellement des actes de torture ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants à leur retour. De plus, le Comité rappelle que l’existence de violations des droits de l’homme dans le pays d’origine n’est pas suffisante en soi pour conclure qu’un requérant court personnellement le risque d’être torturé. Le Comité observe que les requérants contestent en particulier l’évaluation par l’État partie des faits et des éléments de preuve, notamment le témoignage de X sur les abus sexuels qu’elle aurait subis et les informations contenues dans les deux lettres anonymes du 10 juin et du 17 septembre 2013.

9.8Sur la base des informations dont il dispose, le Comité considère que les requérants n’ont pas apporté la preuve que les autorités iraniennes les chercheraient ou que leurs activités revêtaient une importance suffisante pour attirer actuellement l’intérêt desdites autorités. De plus, ils n’ont pas établi que l’examen effectué par l’État partie était manifestement arbitraire, ou équivalait à un déni de justice. Le Comité conclut que les informations soumises par les requérants ne sont pas suffisantes pour établir qu’ils courraient personnellement un risque prévisible et réel d’être torturés ou de subir des traitements cruels, inhumains ou dégradants s’ils retournaient en République islamique d’Iran.

10.Le Comité, agissant en vertu de l’article 22 (par. 7) de la Convention, conclut que le renvoi des requérants vers laRépublique islamique d’Iran ne constituerait pas une violation par l’État partie de l’article 3 de la Convention.