Nations Unies

CRC/C/HTI/2-3

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

9 mars 2015

Original: français

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des droits de l’enfant

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 44 de la Convention

Deuxième et troisième rapports périodiques des États parties, présentés en un seul document

Haïti *

[Date de réception: 20 décembre 2013]

Table des matières

Paragraph e s Page

Sigles et abréviations5

Introduction1–67

I.Mesures d’applications générales7–478

A.Mesures prises en vue du réexamen de la législation et des pratiques8–188

1.Législation et mesures administratives8–138

2.Pratique institutionnelle14–1810

B.Coordination des activités des organismes gouvernementaux19–2111

C.Plan national pour la mise en œuvre de la Convention22–2412

D.Structure de surveillance indépendante de l’application de la Convention25–2712

E.Budget national destiné aux enfants28–3613

F.Coopération avec les ONG et la société civile37–4114

G.Formation et diffusion de la Convention42–4715

II.Définition de l’enfant48–5616

A.Le statut d’enfant selon la législation haïtienne50–5116

B.L’égalité des sexes par rapport à l’âge minimum légal5217

C.Répartition du nombre d’enfants suivant le sexe et la zone d’habitation53–5617

III.Principes généraux57–7218

A.Non-discrimination60–6619

B.Intérêt supérieur de l’enfant67–6920

C.Respect de l’opinion de l’enfant70–7120

D.Droit à la vie, à la survie et au développement7221

IV.Liberté et droits civils73–9221

A.Les droits-créance74–8521

1.L’enregistrement des naissances, le nom et la nationalité74–7921

2.La préservation de l’identité80–8222

3.Le droit de ne pas être soumis à la torture ou autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants, y compris les châtiments corporels.83–8522

B.Les droits-liberté86–9223

1.La liberté d’expression et le droit de rechercher, de recevoir et de répandre des informations.87–8823

2.La liberté de pensée, de conscience et de religion8923

3.La liberté d’association et la liberté de réunion pacifique9023

4.La protection de la vie privée et la protection de l’image91–9223

V.Milieu familial et protection de remplacement93–13824

A.Le milieu familial et la fourniture par les parents de conseils adaptés au degré de développement des capacités de l’enfant9424

B.La responsabilité commune des parents, l’aide aux services de garde d’enfants95–9624

C.Protection de l’enfant contre les violences ou mauvais traitements et les abus sexuels au sein du milieu familial97–10524

D.Enfants séparés de leurs parents106–10726

E.Réunification familiale108–11027

F.Les enfants privés de leur milieu familial111–12527

1.Enfants en domesticité113–11927

2.Placement en institution120–12528

G.Examen périodique du placement126–12729

H.Adoption nationale et internationale128–13430

I.Les déplacements et non-retours illicites135–13631

J.Violences, sévices et négligence137–13831

VI.Handicap, santé et bien-être de base139–21932

A.La survie et le développement140–15932

1.Mortalité infantile, juvénile et infanto-juvénile141–14232

2.Mortalité maternelle et formation des sages-femmes143–15033

3.Vaccination151–15334

4.Prévention de la malnutrition154–15935

B.La santé et les services de santé, en particulier les soins de santé primaires160–16836

C.Prévention des infections VIH/sida169–18738

D.Les efforts tendant à remédier aux problèmes les plus courants dans le domainede la santé et à promouvoir la santé et le bien-être physiques et mentaux des enfants et à prévenir et à combattre les maladies transmissibles et non transmissibles188–19442

E.La santé des adolescents et leur éducation sexuelle195–19743

F.La situation particulière et la santé des enfants en situation de handicap198–20843

1.Définition d’une stratégie globale et des plans d’action en faveur des enfants en situation de handicap200–20244

2.Données chiffrées sur les enfants en situation de handicap203–20444

3.Égalité des chances des enfants en situation de handicap par rapport aux autres et ressources nécessaires en faveur d’eux205–20845

G.Les mesures visant à interdire et à éliminer toutes les formes de pratiquestraditionnelles préjudiciables, notamment les mutilations génitales féminineset les mariages précoces et forcés20945

H.La protection des enfants contre l’usage de substances210–21146

I.La protection des enfants dont les parents sont incarcérés et des enfants vivant en prison avec leur mère.212–21346

J.Le niveau de vie et les mesures (notamment la fourniture d’une aide matérielleet les programmes de soutien dans les domaines de la nutrition, de l’habillementet du logement) destinées à promouvoir le développement physique, mental,spirituel, moral et social de l’enfant et à réduire la pauvreté et les inégalités21446

K.La sécurité sociale et les établissements de garde d’enfants215–21646

L.Le niveau de vie et les mesures d’aide matérielle217–21947

VII.Éducation, loisirs et activités culturelles220–24147

A.Le droit à l’éducation220–24047

1.Politique d’éducation de masse222–22948

2.Éducation pour les enfants en situation de handicap230–23649

3.Formation des maîtres et orientation professionnelle237–24051

B.La qualité de l’éducation24152

VIII.Mesures spéciales de protection242–28552

A.Enfants en situation d’exploitation243–25852

1.Exploitation économique243–24652

2.Utilisation d’enfants dans la production et le trafic illicites de stupéfiants247–24853

3.Exploitation et sévices sexuels249–25253

4.La vente, la traite et l’enlèvement d’enfants253–25854

B.Enfants réfugiés25955

C.Enfants dans les conflits armés260–26555

D.Enfants des rues266–27256

E.Enfants en conflit avec la loi273–28457

1.Administration de la justice pour mineurs274–27857

2.Mesures relatives aux enfants privés de liberté27958

3.Sanctions prononcées par les tribunaux pour enfants280–28158

4.Réadaptation psychologique et réinsertion sociale28259

5.Formation des professionnels intervenant dans le système de justice pour mineurs283–28459

F.Enfants appartenant à une minorité ou à un groupe autochtone28559

IX.Conclusion286–28959

Bibliographie61

A.Publications61

B.Textes législatifs62

C.Textes conventionnels62

D.Textes réglementaires63

E.Documents électroniques63

Annexes**

Sigles et abréviations

ACDIAgence canadienne pour le développement international

ARVAntirétroviraux

BSEIPHBureau de la Secrétairerie d’État à l’intégration des personnes handicapées

BIDBanque interaméricaine de développement

BIT-IPECBureau international du Travail-Programme de lutte pour l’éradication du travail de l’enfant

BPMBrigade de protection des mineurs

DSNCRPDocument de stratégie nationale pour la croissance et la réduction de la pauvreté

EMMUSEnquête mortalité, morbidité et utilisation des services

FOSREFFondation pour la santé reproductive et l’éducation familiale

IHSIInstitut haïtien de statistiques et d’informatique

IRCInternational Rescue Committee

MASTMinistère des affaires sociales et du travail

MCFDFMinistère à la condition féminine et aux droits de la femme

MENFPMinistère de l’éducation nationale et de la formation professionnelle

MINUSTAHMission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti

MJSPMinistère de la justice et de la sécurité publique

MPCE Ministère de la planification et de la coopération externe

MSPPMinistère de la santé publique et de la population

OCHABureau de la coordination des affaires humanitaires

OIMOrganisation internationale pour les migrations

OMDObjectifs du Millénaire pour le développement

OMSOrganisation mondiale de la Santé

ONGOrganisation non gouvernementale

ONUSIDAProgramme commun des Nations Unies sur le VIH/sida

OPCOffice de la protection du citoyen

OPSOrganisation panaméricaine de la santé

PADFFondation panaméricaine de développement

PAMProgramme alimentaire mondial

PNHPolice nationale d’Haïti

PNLSProgramme national de lutte contre le sida

PNUDProgramme des Nations Unies pour le développement

POPlan opérationnel

PSIPopulation Services International

PSUGOProgramme de scolarisation universelle gratuite et obligatoire

PTMEPrévention de la transmission de la mère à l’enfant

PVVIHPersonnes vivant avec le VIH/sida

sida Syndrome d’immunodéficience acquise

TPETribunaux pour enfants

TPI Tribunal de première instance

UCSUnité communale de santé

UNICEFFonds des Nations Unies pour l’enfance

USAIDAgence des États-Unis pour le développement international

US$ Dollars des États-Unis

VDHVolontariat pour le développement d’Haïti

VIHVirus de l’immunodéficience humaine

Introduction

Haïti a signé la Convention relative aux droits de l’enfant (ci-après la Convention), adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 20 novembre 1989, le 26 janvier 1990 et l’a ratifiée le 23 décembre 1994. Elle a remis le 3 avril 2001 un rapport initial détaillé sur le suivi de cette Convention (CRC/C/51/Add.7), examiné par le Comité des droits de l’enfant (ci‑après le Comité) le 22 juin 2002.

Depuis lors, il n’a encore fourni aucun autre rapport. Cependant il importe de noter que le retard enregistré par l’État haïtien dans la production des rapports de suivi n’est pas dû à la négligence ni à l’indifférence dans l’application de la Convention. Cela s’explique par des facteurs et difficultés d’ordre divers qui ont diminué la capacité de l’État à rendre compte de ses obligations internationales. Il faut considérer d’une part les événements politiques dont les violentes manifestations ayant conduit en 2004 au départ en cours de mandat du Président de la République Jean-Bertrand Aristide, l’apparition du phénomène d’enlèvement de manière systématique et du mouvement de violence, les tensions engendrées par les élections générales de 2006 et l’émeute de la faim en avril 2008 ayant emporté le Gouvernement de Jacques Edouard Alexis. Il faut considérer d’autre part les catastrophes naturelles qu’a connues le pays, à savoir, les inondations à Mapou, Fonds-Verrettes, Grand Gosier, Belle-Anse et la tempête Jeanne en 2004 causant des pertes en vie humaine et détruisant une bonne partie des infrastructures et des plantations dans les zones concernées, les deux cyclones dévastateurs Hanna et Ike en septembre et octobre 2008, le terrible séisme du 12 janvier 2010 et l’apparition de l’épidémie de choléra en octobre de la même année, les violences électorales de fin 2010 et début 2011. Les retombées économiques des deux derniers cyclones Isaac et Sandy en 2012 pèsent encore très lourdement sur Haïti.

Ces différents événements ont profondément affecté les assises administratives de l’État qui a souvent été contraint à ne gérer que les urgences et les impondérables. Au regard de ce contexte, le rapport de suivi d’application de la Convention n’a pas pu être transmis dans le temps imparti.

Cependant l’État haïtien, soucieux de ses engagements internationaux, n’entend pas se cacher derrière ces difficultés pour ne point s’acquitter de ses obligations. Il compte au contraire, par le présent document, rattraper son retard en soumettant au Comité les deuxième et troisième rapports périodiques incluant des données pour la période allant de 2002 à 2013. Ce rapport comprend exclusivement, selon le paragraphe 10 des directives de 2010, les informations utiles à la compréhension de la situation d’Haïti sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant et le suivi des recommandations du Comité. Le document de base commun a été transmis avec l’EPU.

Ce rapport a deux objectifs 1) fournir les informations relatives à l’application de la Convention relative aux droits de l’enfant tout en tenant compte des suggestions et recommandations formulées par le Comité des droits de l’enfant dans ses observations finales (CRC/C/15/Add.202) adoptées à l’issue de l’examen du rapport initial et 2) faire ressortir les efforts consentis par l’État haïtien pour se conformer aux recommandations du Comité des droits de l’enfant et les contraintes l’empêchant de faire droit, dans leur intégralité, aux recommandations et suggestions du Comité.

Il est la synthèse des contributions provenant des Ministères et organismes publics concernés par la mise en œuvre de la Convention. Il comprend aussi les informations recueillies et analysées de différents documents publics relatifs à l’enfance et au travers d’entretiens réalisés avec les responsables des institutions publiques et privées. Le Gouvernement a également pris en compte les informations communiquées par l’Office de la protection du citoyen (OPC), et les observations formulées les organisations de la société civile compétentes en matière de droits de l’homme, dont certaines en matière de droits de l’enfant, conviées pour consultation en octobre 2013 sur le rapport esquissé par l’État. Le Gouvernement ne manquera pas d’informer le Comité, à l’occasion des questions préalables à l’audition, des évolutions éventuelles qui interviendraient entre le dépôt du présent rapport et l’audition.

I.Mesures d’application générales

En vue de la mise en œuvre de la Convention et des recommandations et suggestions du Comité des droits de l’enfant (ci-après le Comité), l’État haïtien a adopté de nombreuses mesures portant sur divers aspects relatifs aux droits de l’enfant.

A.Mesures prises en vue du réexamen de la législation et des pratiques

1.Législation et mesures administratives

Le Comité a encouragé l’État haïtien à prendre toutes les mesures nécessaires pour que sa législation interne soit pleinement conforme aux principes et aux dispositions de la Convention et particulièrement de a) prendre toutes les mesures nécessaires pour achever l’harmonisation de la législation existante avec la Convention, b) adopter dans les meilleurs délais un code général de l’enfant reflétant les principes généraux et les dispositions de la Convention et c) d’assurer l’application de sa législation.

Tel que recommandé par le Comité, le processus d’harmonisation de la législation haïtienne en conformité à la Convention. En effet, des textes ont été élaboré depuis la ratification de la Convention, même si nombre reste à finaliser.

Des textes législatifs ou traités internationaux, ayant trait aux droits de l’enfant, ont été adoptés ou sont en voie d’adoption.

Textes législatifs et arrêtés en vigueur

Loi du 10 septembre 2001 interdisant les châtiments corporels contre les enfants;

Loi du 7 mai 2003 relative à l’interdiction et à l’élimination de toutes formes d’abus, de violences, de mauvais traitements ou traitements inhumains contre les enfants;

Décret du 6 juillet 2005 modifiant le régime des agressions sexuelles et éliminant en la matière les discriminations contre la femme;

Loi du 10 septembre 2007 créant et organisant l’Office national de partenariat en éducation (ONAPE);

Loi du 22 janvier 2009 sur l’enlèvement, la séquestration et la prise d’otages de personnes;

Loi du 13 mars 2012 portant sur l’intégration des personnes handicapées;

Loi du 9 mai 2012 portant sur l’organisation et le fonctionnement de l’Office de la protection du citoyen;

Arrêté du 26 avril 2013 créant le Comité interministériel des droits de la personne;

Arrêté du 18 juillet 2012 prenant des dispositions garantissant l’intégrité des procédures d’adoption internationale d’enfants d’haïtiens.

Textes législatifs en attente de promulgation

Nouvelle loi sur l’adoption du 29 août 2013;

Loi sur la paternité, la maternité et la filiation du 12 avril 2012.

Conventions, traités et accords internationaux ratifiés par l’État haïtien

Convention no 138 de l’Organiation internationale du Travail (OIT) concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi du 26 juin 1973, ratifiée le 14 mai 2007;

Convention no 182 de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants du 17 juin 1999, ratifiée le 14 mai 2007;

Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ratifié le 31 janvier 2012;

Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant;

Convention interaméricaine pour l’élimination de toutes les formes de discriminations contre les personnes handicapées (1999), ratifiée le 12 mars 2009.

Traités internationaux non ratifiés

Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale (1993), ratifiée le 11 juin 2012, mais non encore déposé.

Suite à la recommandation spécifique du Comité, il convient de faire état de l’élaboration d’un avant-projet de Code de l’enfant initié depuis 2001. L’objectif de ce Code est de permettre le développement d’un système de protection de l’enfant en établissant de nouveaux standards et normes juridiques conformes à tous les aspects de la Convention. En 2003, un draft a été produit, qui a été révisé en 2005 par des experts internationaux; mais le Gouvernement de transition (2004-2006) a décidé de ne pas procéder par décret pour adopter un Code aussi important. Le processus a été repris en 2011 et un draft revu en septembre 2012. La finalisation et le dépôt du texte au Parlement sont ainsi inscrits dans le Plan d’action du Ministère de la justice et de la sécurité publique 2012-2016.

Mesures administratives

Des mesures administratives ont été arrêtées; portant notamment sur la désignation et la formation de personnels travaillant dans le domaine de la protection de l’enfant et sur la création de structures nécessaires à la réalisation des droits protégés par la Convention.

Désignation de juges spécialisés en matière de justice des mineurs en 2009 dans 17 des 18 tribunaux de première instance (TPI) à l’exception du TPI de Mirebalais;

Révision du Curriculum de formation à l’intention des policiers à l’École de police pour l’inclusion de modules sur les droits de l’enfant;

Révision du Curriculum de formation à l’intention des magistrats à l’École de la magistrature pour l’inclusion de modules sur la justice des mineurs;

Construction du Centre de détention pour mineurs en 2004, meilleure réponse que le Centre de Fort National qui accueillait jusqu’alors les femmes et mineurs en conflit avec la loi (Delmas 33 pour les garçons, centre de Pétion-ville pour les filles); redéfinition du statut du Centre de Delmas 33 en Centre de rééducation des mineurs en conflit avec la loi (CERMICOL);

Création en novembre 2002 de la Brigade de protection des mineurs (BPM) – voir Directive générale no069 de la Direction générale de la PNH;

Mise en place d’une Unité de protection des droits de l’enfant (UPDE) au sein de l’Office de la protection du citoyen (OPC);

Commission de travail sur l’intégration des enfants des rues à l’école, instituée en 2012 par le Ministère de l’éducation nationale et de la formation professionnelle (MENFP) dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de scolarisation universelle gratuite et obligatoire (PSUGO);

Mesures d’application des articles 125 et 126 du décret du 4 novembre 1983 – Procédure administrative d’adoption (2012);

Plan 2012 de l’Institut du bien-être social et de recherches (IBESR) pour la déconcentration de ses services dans les 9 départements;

Mesure administrative régulant le voyage des mineurs (2012) et le protocole d’accord entre l’IBESR, la BPM et la Direction de l’immigration et de l’émigration (DIE).

Un dispositif sur les familles d’accueil a été préparé par le MAST/IBESR en 2012/2013.

2.Pratique institutionnelle

Beaucoup d’efforts ont été fournis pour améliorer les pratiques dont les mesures administratives mentionnées ci-dessus. De plus, des formations spécifiques ont été faites pour des personnels spécifiques comme pour les agents de la BPM, de l’IBESR ou des magistrats. La déconcentration des services de l’IBESR et de la BPM dans les départements tout comme l’existence des groupes de coordination des acteurs institutionnels et non gouvernementaux en protection de l’enfant a permis une meilleure prise en charge des enfants à risque d’abus, d’exploitation ou de violence. Par exemple, les agents de la BPM/IBESR coopèrent systématiquement dans les Départements.

Néanmoins, il convient de mentionner que nombre de provisions introduites par les traités et conventions internationales ne sont pas encore introduite dans la législation nationale. Par exemple, la notion de célérité dans le traitement des dossiers des enfants en conflit avec la loi prévue à l’article 37 d) de la Convention relative aux droits de l’enfant, par les Règles de Beijing et les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, n’a pas encore été intégrée dans la législation nationale. Cette faiblesse du cadre légal n’a à ce jour pas permis de développer les procédures nécessaires pour réduire les délais de traitement des dossiers des mineurs aujourd’hui identiques à ceux des majeurs. D’autre part, les magistrats ne prennent pas suffisamment en compte dans leurs pratiques le fait que les textes internationaux adoptés par Haïti s’imposent en droit national, ceci s’expliquant par un manque de connaissance de ces textes par nombre de professionnels du droit.

Au regard des difficultés mentionnées plus haut, des procédures d’application de certaines lois restent à développer. Par exemple, la loi de 2003 sur l’interdiction de toute forme d’abus, de violence et de traitement inhumain contre les enfants inclut l’obligation pour le Ministre du Ministère des affaires sociales et du travail (MAST) de prendre des décisions en recueillant l’avis de l’enfant; néanmoins, il n’existe aucune procédure d’application de cet aspect de la loi.

L’adoption de textes ne suffit pas à amener le changement de pratique recherché. Pour un changement plus important des comportements, l’État a besoin de temps pour contextualiser tout le contenu de la Convention et le pays est engagé sur le long terme pour que ces mutations s’inscrivent dans les pratiques quotidiennes.

D’autres mesures doivent accompagner les textes, telles que de meilleures conditions de travail du personnel intervenant dans la protection de l’enfance, la vulgarisation des textes protecteurs des enfants, la mise en place de trois tribunaux pour enfants dans les diverses juridictions de la République, ou la formation intensive de tous les professionnels intervenant en matière des droits de l’enfant, en particulier des magistrats.

B.Coordination des activités des organismes gouvernementaux

Le Comité a recommandé à Haïti d’instituer sans tarder un organisme ayant pour mandat précis de coordonner toutes les activités liées à la mise en œuvre de la Convention, et de le doter des compétences et des ressources humaines et autres dont il a besoin pour s’acquitter efficacement de son mandat aux niveaux national, régional et local. Le Comité recommande en outre à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner à l’Institut du bien-être social et de recherche les moyens de remplir sa mission aux niveaux national, régional et local.

Nombre d’organismes étatiques sont impliqués dans la mise en application de la Convention dont le MAST, l’Institut du bien-être social et de recherches (IBESR), le Ministère de la justice et de la sécurité publique (MJSP), le Ministère de l’éducation nationale et de la formation professionnelle (MENFP), le Ministère de la santé publique et de la population (MSPP), les tribunaux de première instance (TPI), les tribunaux pour enfants (TPE), le Ministère à la jeunesse, aux sports et à l’action civique (MJSAC), le Ministère à la condition féminine et aux droits de la femme (MCFDF), le Ministère délégué aux droits de l’homme et à la lutte contre la pauvreté extrême (MDH/LPE). Aucune de ces institutions ne remplit cependant, de manière formelle, la fonction de coordination de la mise en œuvre de la Convention.

Néanmoins des mécanismes de coordination et de collaboration sont opérationnels sous l’égide de l’Institut du bien-être social et de recherches.

C.Plan national pour la mise en œuvre de la Convention

Le Comité a encouragé l’État haïtien à élaborer un plan d’action national global aux fins de la mise en œuvre de la Convention faisant une place aux buts et objectifs du document final intitulé «Un monde digne des enfants», adopté par la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies consacrée aux enfants. À cet égard, l’État partie est invité à solliciter une assistance technique auprès du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et à faire participer la société civile à la préparation et à la mise en œuvre d’un tel plan d’action national.

L’État est conscient des limites des activités sectorielles et reconnaît que, sans une prise en compte globale de la problématique des droits de l’enfant, il sera difficile de parvenir à la mise en œuvre de la Convention. Ainsi le Ministère des affaires sociales et du travail (MAST) avec l’appui de l’UNICEF a-t-il élaboré en novembre 2007 un document cadre, intitulé Plan national de protection de l’enfant haïtien en situation difficile ou de vulnérabilité visant à assurer une protection spéciale aux enfants vulnérables dont les enfants en domesticité, les enfants des rues, les enfants infectés par le VIH/sida, les enfants en conflit avec la loi, les enfants victimes de désastres ou de conflits armés, les enfants handicapés, les enfants victimes de trafic ou de traite, les enfants orphelins, les enfants associés aux groupes armés, les enfants victimes de violence, d’abus et d’exploitation sexuels.

Le Plan national a été validé et partiellement appliqué à ce jour. Ainsi l’absence d’un Comité de pilotage de suivi et une trop faible allocation budgétaire ont ralenti sa mise en œuvre occasionnant des interventions insuffisamment intégrées des ministères concernés. L’étape actuelle consiste à l’évaluer puis à procéder à l’élaboration d’une Stratégie nationale de protection de l’enfant.

D.Structure de surveillance indépendante de l’applicationde la Convention

Le Comité a invité l’État haïtien à envisager de créer une institution nationale des droits de l’homme indépendante, compte tenu de l’observation générale no2 du Comité sur le rôle des institutions nationales des droits de l’homme, qui serait chargée de suivre et d’évaluer les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Convention aux niveaux national et local. En outre, le Comité a recommandé d’allouer à cette institution des ressources humaines et financières suffisantes et de l’habiliter dans le cadre de son mandat à recevoir des plaintes relatives à des violations des droits de l’enfant et à enquêter sur ces plaintes en respectant la sensibilité des enfants, ainsi que donner à ces plaintes la suite qui convient. Le Comité a encouragé l’État partie à solliciter une assistance technique auprès du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et de l’UNICEF, entre autres.

Avant la Constitution de 1987, il n’existait aucun organe étatique de surveillance et de promotion des droits de l’homme en Haïti. C’est l’article 207 de la Constitution qui a jeté les bases d’une telle institution, en créant l’Office de la protection du citoyen (OPC).

La loi votée le 9 mai 2012 stipule que l’OPC a pour mission de veiller au «respect par l’État de ses engagements en matière de droits humains, notamment ceux contractés au niveau régional et international». La nouvelle loi a renforcé la capacité et le champ d’intervention de l’OPC. L’article 5 reconnaît aux femmes et enfants victimes d’abus de la part des organes publics la faculté de saisir l’OPC. Néanmoins les ressources humaines et financières disponibles sont actuellement insuffisantes.

E.Budget national destiné aux enfants

Tout en ayant conscience des difficultés économiques que connaît Haïti, le Comité a recommandé de tout faire pour mettre en œuvre le programme économique et social 2001-2006 et d’accroître la part du budget consacrée à la réalisation des droits des enfants, notamment en prenant les mesures nécessaires pour que reprennent les programmes d’aide internationale. À cet égard, l’État partie devrait veiller à consacrer aux enfants, en particulier aux plus vulnérables d’entre eux, des ressources humaines et financières adéquates, et garantir la mise en œuvre à titre prioritaire des politiques concernant les enfants.

Les fonds qui sont planifiés pour la protection de l’enfance viennent de plusieurs sources. Les ressources allouées à la réalisation des droits économiques et sociaux des enfants sont intégrées au budget national. Des chiffres du Ministère de la planification et de la coopération externe (MPCE) indiquent que 718 728 000 gourdes (17 968 200 U$) ont été prévues pour la protection de l’enfance pour le budget 2011/2012; 692 691 920 gourdes ont été allouées et 658 145 800 gourdes engagées. Spécifiquement, un montant de 50 000 000 gourdes (1 250 000 US$) est alloué annuellement à l’IBESR pour ses interventions en faveur des enfants depuis 2011.

De plus, l’État a bénéficié en 2012/2013 d’une assistance venant du secteur privé haïtien en soutien ponctuel aux interventions étatiques. Pour exemple, des entreprises commerciales ont supporté des activités de sensibilisation aux populations sur l’ensemble du territoire. Ces expériences positives de coopération public/privé seront systématisées dans certains secteurs à partir de 2014.

L’assistance internationale représente un apport considérable dans la réalisation des droits de l’enfant en Haïti. Parmi les principaux bailleurs de fonds au Gouvernement, il convient de mentionner la Banque mondiale, la Banque interaméricaine de développement (BID), l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), l’Union européenne, l’Agence canadienne pour le développement international (ACDI), European Community Humanitarian Organization (ECHO), le Fonds Pétrocaribe, l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Des soutiens ont aussi été obtenus au travers de coopérations bilatérales, comme par exemple de la Coopération espagnole très active dans le secteur de l’eau et de l’éducation.

Les organisations des Nations Unies ont soutenu directement et indirectement l’État dans la mise en œuvre de programmes pour l’enfance. Avant le tremblement de terre, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), l’UNICEF, le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), le Programme alimentaire mondial (PAM), l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) soutenaient notamment des interventions dans le secteur de l’éducation, de la santé, de la protection ou de la justice. En réponse au tremblement de terre, ces agences ont massivement élargi leur soutien et couvert d’autres secteurs comme celui de la reconstruction. Elles ont encore été encore appuyées par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA). Depuis 2012, ces interventions ont considérablement diminué, les fonds d’urgence étant épuisés.

Les organisations non gouvernementales (ONG) internationales ont toujours apporté une assistance technique à l’État et ont mis en œuvre directement des programmes de soutien à l’enfance. Selon l’envoyé spécial des Nations Unies en Haïti, l’ancien président Bill Clinton, Haïti comptait le plus grand nombre d’ONG par habitant au monde. Le tremblement de terre de 2010, a mis en évidence le rôle crucial de nombre de ces ONG dans la fourniture de services essentiels comme les soins de santé, l’éducation ou la création d’emplois. Cependant, ces efforts ont été entachés par des problèmes concernant leur réglementation et leur responsabilité, le cas le plus exemplaire étant les abus relatifs à l’adoption d’enfants haïtiens.

Après 2010, les ONG ont participé grandement à la gestion de l’urgence au lendemain du séisme. Par ailleurs, elles ont contribué au relèvement et à la restructuration du système de protection de l’enfance en élargissant leur apport technique et financier. Particulièrement post-2010, des centaines d’ONG sont intervenues en Haïti et il n’est pas possible de les citer. La conférence des donateurs de mars 2010 avait créé la Mission temporaire de reconstruction d’Haïti sous l’égide de l’envoyé spécial de l’ONU, du Premier Ministre et d’un fonds fiduciaire multi-donateurs géré par la Banque mondiale pour les grands projets pour faciliter la coordination et éviter les redondances. La conférence avait proposé de créer une Autorité permanente de développement haïtienne habilitée pour coordonner le travail des ONG.

En terme d’apport financier de ces organisations à l’État haïtien, le calcul de l’assistance internationale dédiée à l’enfance n’a pas fait l’objet d’un exercice spécifique et les informations disponibles ne seraient que partielles. Il n’existe pas encore de système de collecte de ces données, et nombre d’ONG fonctionnent encore sans accréditation du Ministère de la planification et de la coopération externe (MPCE). L’avant-projet de loi régissant le fonctionnement des ONG, actuellement en discussion avec la société civile, devrait faciliter une fois adoptée la collecte des informations, dont les données financières, et permettre plus de clarté et plus d’harmonisation dans les interventions.

Notons qu’un Cadre de coordination de l’aide externe au développement (CAED) a été créé en 2012 pour une meilleure gestion de l’aide internationale en vue de garantir des actions cohérentes pour le développement d’Haïti. Pour harmoniser les interventions et pour orienter les fonds alloués à l’enfance, des partenariats sont parfois formalisés par des protocoles à l’image de ceux développés par l’IBESR avec ses partenaires.

F.Coopération avec les ONG et la société civile

Le Comité a recommandé à l’État partie d’instaurer une coopération bien structurée et systématique avec les ONG de manière à fixer régulièrement des normes minimales claires pour les activités de prestation de service et à assurer le suivi nécessaire.

Les ONG sont l’un des maillons essentiels de la protection sociale en Haïti. Acteurs non étatiques, les ONG interviennent dans divers secteurs dont celui de la protection de l’enfance sous la supervision et le contrôle des pouvoirs publics. Aux termes de l’article 13 du décret du 14 septembre 1989 sur les ONG, le Ministère de la planification et de la coopération externe (MPCE) est ainsi responsable de la coordination et de la supervision des activités des ONG sur le territoire de la République. Le MPCE exerce cette attribution par l’intermédiaire d’une structure administrative dénommée Unité de coordination des activités des ONG (UCAONG). L’une des attributions importantes de cette unité est de présenter à la fin de chaque exercice le bilan des activités des ONG.

Il faut bien sur mentionner l’existence de Tables sectorielles et thématiques formalisées par le CAED, certaines touchant à la protection de l’enfant dont la Table Sectorielle sur la justice des mineurs et la Table sectorielle sur l’enfance en domesticité. Elles ont pour mission de supporter les capacités des différents ministères et institutions dans l’exécution des programmes conjoints de coopération, servir de plateformes de dialogue et de consensus pour la formulation de recommandations et la mise en œuvre des politiques sectorielles des ministères.

Il faut souligner le travail important réalisé par le Groupe de travail sur les enfants séparés (2010-2011) qui a évolué en Groupe de travail sur les enfants vulnérables (GTEV) rassemblant représentants de l’État, organismes des Nations Unies, ONG internationales et nationales jusqu’en 2013. Aujourd’hui, fort de l’expérience de ces groupes techniques, a été constitué le Groupe de travail sur la protection de l’enfant (GTPE) sous la direction de l’État, réunissant en 2013 partenaires étatiques et non gouvernementaux, groupe opérationnel dans la plupart des départements.

Notons encore l’existence de groupes de coordination des ONG qui visent – entre autres – à faciliter leurs travaux et leurs interactions avec l’État haïtien. Ainsi le Cadre de liaison inter-ONG (CLIO) compte 46 ONG haïtiennes et étrangères présentes en Haïti; il a notamment pour objectif de servir d’interface entre ses membres et les institutions gouvernementales, les bailleurs de fonds et autres. Le CLIO a des groupes de travail notamment sur la santé et l’éducation et a siégé comme observateur dans le Sous-comité interministériel de coordination et de suivi de la mise en œuvre du Document de stratégie nationale pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP). La présidence du CLIO a aussi siégé au conseil de la CIRH en tant que représentant permanent des ONG internationales de juin 2010 à mai 2011.

G.Formation et diffusion de la Convention

Le Comité a recommandé à Haïti a) d’intensifier ses efforts pour faire connaître les principes et dispositions de la Convention en tant que moyen de sensibiliser la société aux droits des enfants par la mobilisation sociale, b) de mettre en place des programmes systématiques d’éducation et de formation sur les dispositions de la Convention à l’intention de tous les groupes professionnels travaillant pour/avec des enfants (parlementaires, juges, avocats, responsables de l’application des lois, fonctionnaires, élus locaux, personnel des établissements accueillant des enfants et des centres de détention pour mineurs, enseignants, personnel de santé, y compris psychologues, et travailleurs sociaux; c) de solliciter une assistance technique auprès du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et de l’UNICEF, entre autres.

En termes de diffusion de la Convention, il n’y a pas eu de mesures systématiques tendant à la faire connaître au grand public, bien que la Constitution de 1987 amendée, en son article 40, fasse obligation à l’État de donner large publicité aux textes juridiques.

Néanmoins, de nombreuses formations et sensibilisations sur le Convention ont été faites par les organisations nationales et internationales, notamment après 2010, à l’intention des professionnels du secteur de l’enfance et des enfants eux-mêmes. On peut ainsi signaler l’initiative de l’IBESR et de l’UNICEF qui ont mis sur pied des causeries entre les maîtres et les élèves dans les établissements scolaires. D’autres initiatives à l’occasion du 20 novembre ont eu lieu chaque année pour vulgariser la Convention auprès des populations.

Quant aux formations institutionnalisées sur les droits de l’enfant, d’importants efforts ont été accomplis. Des programmes de formation sont conçus et exécutés à l’intention du personnel des lieux de détention. Tous les agents de la Brigade de protection des mineurs (BPM) ont reçu une formation intensive basée sur les droits et la protection de l’enfant. Sont aussi organisés en Haïti ou à l’étranger des stages de perfectionnement à l’intention des techniciens d’investigation de la Police nationale d’Haïti (PNH) en matière de protection des mineurs, notamment en ce qui concerne la lutte contre les mauvais traitements, la prostitution, les réseaux pédophiles, l’usage de drogue, ou l’exploitation des enfants en domesticité.

Les instructeurs de l’École nationale de police ont été formés sur les droits de l’enfant en 2012/2013 et les modules de formation sont en cours de finalisation. Plus d’une vingtaine de formateurs de l’École de la magistrature (EMA) ont été formés sur la justice des enfants et une centaine d’acteurs de la chaîne judiciaire et du secteur social sont en formation à l’EMA en 2013.

Il n’y a eu à date aucune mesure systématique pour informer le grand public et les organisations spécialisées sur le rapport initial relatif à l’application de la Convention et sur les observations finales émises par le Comité des droits de l’enfant. Seuls les professionnels très avisés ont connaissance de l’existence de ces documents.

II.Définition de l’enfant

Le Comité a recommandé à l’État partie d’aligner l’âge légal minimum du mariage pour les filles sur celui des garçons.

Selon l’article premier de la Convention, «un enfant s’entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable». La loi haïtienne est conforme à cette définition. Le rapport initial a déjà fourni les informations sur les tournures que prend le concept d’enfant, dépendamment du Code civil, du Code du travail ou du Code pénal haïtien et il ne semble pas nécessaire de le redéfinir. Cependant, l’État haïtien entend apporter certaines précisions en ce qui a trait au rapport initial, afin de mieux renseigner le Comité sur le statut légal de l’enfant.

A.Le statut d’enfant selon la législation haïtienne

Le statut d’enfant est défini à l’article 329 du Code civil haïtien au lieu de l’article 392 indiqué dans le rapport initial. Ce statut est déterminé par la fixation de l’âge de majorité. Hormis le Code civil, il est confirmé par deux autres textes, à savoir la Constitution haïtienne amendée et le décret du 8 octobre 1982 donnant à la femme mariée un statut conforme à la Constitution et éliminant toutes les formes de discrimination à son égard.

En complément du rapport initial, il faut ajouter que l’enfant peut, selon la loi, être relevé de sa situation de minorité s’il est émancipé par ses parents ou par le conseil de famille à défaut de ces derniers ou encore par d’autres personnes autorisées par la loi comme les maires. Soulignons que l’émancipation peut être révoquée en cas d’excès par le mineur. Quand cela arrive, ce dernier devra être placé à nouveau sous tutelle jusqu’à sa majorité. Cependant l’émancipation s’acquiert définitivement et de plein droit par le mariage, ceci même après la dissolution de cette union.

B.L’égalité des sexes par rapport à l’âge minimum légal

D’après les observations finales du Comité sur le rapport initial (CRC/C/15/Add.202, par. 21), il y aurait une différence entre l’âge minimum légal du mariage des garçons (18 ans) et celui des filles (15 ans). En conséquence, le Comité a recommandé à l’État haïtien de les aligner. À ce sujet, l’information a été soit mal fournie ou mal appréciée. On précise que la législation haïtienne ne fait aucune différence entre les garçons et les filles relativement à l’âge minimum requis pour le mariage. En effet l’article 139 du Code civil dispose: «les fils ayant atteint l’âge de 18 ans et les filles celui de 18 ans peuvent contracter mariage sans requérir le consentement de leurs ascendants». Ainsi s’établit l’égalité des sexes par rapport à l’âge minimum légal de mariage. C’est donc la règle générale, qui d’ailleurs se renforce, à la base, par la Constitution, en ces termes: «Les Haïtiens sans distinction de sexe et d’état civil, âgés de 18 ans accomplis, peuvent exercer leurs droits civils et politiques». Cependant, il convient de signaler que l’article 133 du Code civil prévoit une exception en ce que, pour des motifs graves, l’homme avant 18 ans révolus et la femme avant 15 ans révolus peuvent contracter mariage avec dispense du Président de la République.

C.Répartition du nombre d’enfants suivant le sexe et la zone d’habitation

Selon le recensement réalisé par l’Institut haïtien de statistiques et d’informatique (IHSI) en 2003, les mineurs de moins de 18 ans occupent à eux seuls 43,6 % de l’ensemble de la population haïtienne. Ce pourcentage correspond à 3 647 189 sur 8 373 750 Haïtiens (tableau 1). Le même recensement révèle une répartition plus ou moins égale entre les deux sexes. S’agissant du milieu de résidence des enfants, il y a un grand écart. Les enfants sont nettement plus nombreux dans les zones rurales que dans les zones urbaines (pour comparaison, tableaux 2 et 3).

Soulignons que le nombre d’enfants est plus élevé dans trois départements sur dix que renferme le pays. Ces trois départements sont l’Ouest, l’Artibonite et le Nord. Ces départements comptent respectivement 1 230 000, 574 200 et 368 400 enfants. Ces chiffres représentent 60 % de la population infantile totale de 0 à 17 ans. Il faut en déduire que les 40 % restant se répartissent entre les sept autres départements, ce qui signifie que la répartition des enfants sur le plan géographique est très inégale. Ainsi, l’État compte intensifier ses efforts au niveau des trois premiers départements, sans pour autant négliger les autres.

Comme les chiffres l’ont montré plus haut, l’Ouest, siège de la capitale, reste le Département le plus peuplé. L’aire métropolitaine concentre 23 % de la population totale d’Haïti. Le taux de chômage extrêmement élevé, le manque de services publics et privés et d’infrastructures dans le reste du pays sont les principaux facteurs qui expliquent la concentration des enfants et de leurs parents à la capitale.

Rappelons que les tableaux et les chiffres, mentionnés plus haut, sont extraits du recensement réalisé en 2003. Ils sont fournis en termes de réponse aux recommandations du Comité qui a réclamé, suite à l’examen du rapport initial, de l’État haïtien de fournir des données statistiques ventilées concernant le nombre d’enfants et leur répartition par groupe d’âge, par sexe et par zone d’habitation. Cependant, ces chiffres ne concernent qu’une partie du temps sur lequel le présent document s’élabore, puisqu’il représente un cumul de deux rapports. Ce qui revient à dire qu’après plus de huit ans du dernier recensement, la population haïtienne a, sans doute, augmenté. La réalisation du prochain recensement se fera dans le courant de l’année 2013: on y procède tous les dix ans. En attendant, une étude, menée par l’UNICEF et publiée en 2012, estime déjà la population haïtienne de moins de 18 ans à 4,316 millions. Par comparaison à l’estimation (3 647 189) du recensement de 2003, on enregistre une différence de 668 811 enfants.

III.Principes généraux

À l’issue de l’examen du rapport initial, le Comité des droits de l’enfant a recommandé à l’État haïtien d’intégrer de manière appropriée les principes généraux de la Convention, en particulier les dispositions des articles 2, 3, 6 et 12, dans tous les textes législatifs concernant les enfants et de les appliquer dans toutes les décisions politiques, judiciaires et administratives, ainsi que dans les projets, programmes et services ayant des répercussions sur tous les enfants. Ces principes devraient inspirer la planification et l’élaboration de politiques à tous les niveaux, ainsi que les mesures prises par les établissements de protection sociale et de santé, les tribunaux et les autorités administratives.

L’État haïtien n’a pas encore achevé l’intégration de ces dispositions dans toutes les lois, mais on peut se référer à l’article 276-2 de la Constitution haïtienne de 1987 amendée qui dispose que «Les traités ou accords internationaux, une fois sanctionnés et ratifiés dans les formes prévues par la Constitution, font partie de la législation du pays et abrogent toutes les lois qui leur sont contraires». Cette disposition constitutionnelle fait en principe entrer la Convention dans la législation haïtienne. L’adoption de la loi sur les personnes en situation de handicap (2012) et la ratification du Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels en 2012 répondent en partie à la recommandation.

L’État haïtien s’active à vulgariser davantage la Convention et entend prendre des mesures pour qu’elle soit appliquée dans toutes les décisions politiques, judiciaires et administratives ayant trait aux enfants qui seront détaillées ci-dessous.

A.Non-discrimination

Le Comité a recommandé à Haïti a) d’adopter à titre prioritaire des mesures juridiques efficaces pour faire cesser la discrimination à l’égard des enfants nés hors du mariage, b) de prendre les mesures législatives voulues pour que tous les enfants relevant de sa juridiction jouissent de tous les droits énoncés dans la Convention sans discrimination et, par des mesures proactives et globales, d’accorder une protection sociale prioritaire et ciblée aux enfants appartenant aux groupes les plus vulnérables, c) d’assurer l’application effective de la loi et de lancer de vastes campagnes d’information afin de prévenir et combattre, le cas échéant dans le cadre de la coopération internationale, toutes les formes de discrimination. Le Comité a demandé que le prochain rapport périodique inclue des renseignements spécifiques sur les mesures et programmes pertinents au regard de la Convention que l’État aura mis en œuvre pour donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban adoptés à la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, compte tenu de l’observation générale no 1 du Comité relative au paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention.

Suite à la recommandation sur l’adoption à titre prioritaire des mesures juridiques efficaces pour faire cesser la discrimination à l’égard des enfants nés hors mariage, la loi sur la paternité, la maternité et la filiation a été votée le 12 avril 2012. Elle prescrit en son article premier, le principe de «l’égalité des filiations légitimes, naturelles, adoptives ou autres impliquant nécessairement l’égalité entre tous les enfants qu’ils soient de couples mariés ou non». Cette loi qui n’est pas encore promulguée permettra à ces enfants jadis qualifiés d’adultérins ou d’incestueux dans le Code civil en son article 611 d’avoir droit à la succession de leur père. Cette filiation induit des obligations morales et pécuniaires pour les parents.

En général, la législation haïtienne condamne toutes formes de discrimination. Par exemple, la Constitution 1987 amendée, en son article 17, reconnaît que les Haïtiens sans distinction de sexe et d’état civil, âgés de 18 ans accomplis, peuvent exercer leurs droits civils et politiques. Elle reconnaît également en son article 18 que les Haïtiens sont égaux devant la loi.

Le Comité recommande également à l’État haïtien d’accorder une protection sociale prioritaire et ciblée aux enfants appartenant aux groupes les plus vulnérables tels que les fillettes, les enfants en domesticité, les enfants de familles pauvres, les enfants des rues, les enfants en situation de handicap et les enfants des zones rurales.

Bien qu’il n’y ait pas de discrimination systématique contre ces catégories d’enfants, l’État haïtien, en réponse à ces recommandations, a conçu en leur faveur un ensemble de programmes et sous-programmes dans le cadre du Plan stratégique de développement d’Haïti qui consiste à a) mettre en œuvre une politique d’égalité des sexes, b) mettre en place des classes de formation pour les sur-âgés et les enfants restés hors système, c) construire un orphelinat pour chaque pôle local de développement, d) assurer la production et la diffusion d’informations sur l’égalité de genre, e) renforcer la participation féminine.

Il est évident que ces programmes et sous-programmes visent à accorder une protection sociale prioritaire et ciblée aux enfants les plus vulnérables. Le Ministère à la condition féminine et aux droits de la femme (MCFDF) fait une campagne systématique dans la presse contre toutes formes de discrimination à l’égard des filles dans toutes les couches de la société. Le Bureau de la Secrétairerie d’État à l’intégration des personnes handicapées (BSEIPH) fait de même en faveur des enfants en situation de handicap. Le programme de scolarisation gratuite vise particulièrement les enfants des familles pauvres, les enfants des rues et ceux des zones rurales.

S’agissant des étrangers se trouvant sur le territoire de la République, ils bénéficient de la même protection que celle qui est accordée aux Haïtiens, conformément à la loi.

B.Intérêt supérieur de l’enfant

Le Comité a recommandé de veiller à ce que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant soit intégré dans toutes les lois politiques et dans les programmes pertinents en rapport avec la mise en œuvre de la Convention et d’abolir le droit de «correction paternelle» qui permet aux parents de faire emprisonner leurs enfants.

Si l’article 15 du décret du 8 octobre 1982 n’a pas été abrogé, les recherches effectuées démontrent que les Tribunaux haïtiens n’ont pas eu à se prononcer sur de telles demandes produites par des parents. Il importe aussi de souligner à l’attention du Comité que la ratification de la Convention relative aux droits de l’enfant entraîne l’abrogation tacite de l’article 15 du susdit décret.

Rappelons que, selon le principe de la hiérarchie des normes, l’article 276-2 de la Constitution permet aux traités internationaux régulièrement ratifiés d’abroger les lois qui leur sont contraires. Ainsi, l’article 15 du décret du 8 octobre 1982, pour être contraire à l’article 40 de la Convention, demeure abrogé. Les père et mère ou celui qui a la garde de l’enfant ne peuvent plus le faire incarcérer. L’État haïtien doit toutefois intensifier la vulgarisation de l’article 40 de la Convention et de son effet abrogatif.

C.Respect de l’opinion de l’enfant

Le Comité des droits de l’enfant a recommandé à l’État haïtien de veiller à ce que l’opinion de l’enfant soit dûment prise en considération, conformément à l’article 12 de la Convention, au sein de la famille, à l’école, devant les tribunaux et dans toute procédure administrative ou autre l’intéressant, notamment à travers l’adoption des lois appropriées, la formation des professionnels et la mise en place d’activités spécifiques à l’école.

L’État haïtien reconnaît ne pas avoir pris de dispositions législatives et administratives systématiques favorisant la mise en œuvre de cet article. En effet l’opinion de l’enfant même doué de discernement n’est pas sollicitée dans la constitution des conseils de famille ou dans les actions en garde d’enfant. Néanmoins la nouvelle loi réformant l’adoption inclut le recueil de l’avis de l’enfant avant 12 ans et son consentement après 12 ans. De plus, l’article 4.3 de la loi relative à l’interdiction de toute forme d’abus, de violence et de traitement inhumains contre les enfants (2003) fait obligation au Ministre du MAST d’examiner dans chaque cas avec l’enfant toute décision le concernant et de recueillir son avis, mesure effectivement mise en œuvre par l’IBESR. Encore, depuis 2012, le principe de participation de l’enfant fait partie des nouvelles procédures administratives préparées par l’IBESR, notamment dans le cadre des procédures d’apparentement et dans le dispositif des familles d’accueil.

D.Droit à la vie, à la survie et au développement

Des informations relatives à ce droit ont été fournies dans le rapport initial soumis en 2001. De cette date à aujourd’hui, la situation n’a pas évolué de manière significative. Elle s’est au contraire aggravée avec le séisme du 12 janvier 2010 et d’autres catastrophes naturelles. Les familles les plus vulnérables font face à de sérieuses difficultés pour entretenir leurs enfants.

IV.Liberté et droits civils

Les articles 7, 8, 13 à 17 et 37 de la Convention relative aux droits de l’enfant consacrent aux enfants un ensemble de droits, notamment le droit à un nom, à la nationalité, à l’identité, à la liberté d’expression, de pensée, de conscience, de religion et celui à ne pas être soumis à la torture dont chaque État partie à la Convention doit travailler au respect. L’ensemble des droits visés peut être étudié sous le titre de droits fondamentaux des enfants. Ces droits peuvent être regroupés en deux catégories: ceux requérant l’intervention de l’État pour leur jouissance (droits-créance) et ceux dont l’exercice suppose l’abstention de l’État et des parents ou personnes responsables (droits-liberté).

A.Les droits-créance

1.L’enregistrement des naissances, le nom et la nationalité

À la lumière de l’article 7 de la Convention, le Comité a prié Haïti d’intensifier ses efforts pour assurer que tous les enfants soient enregistrés à la naissance, entre autres par l’organisation de campagnes de sensibilisation, d’envisager de faciliter les procédures d’enregistrement des naissances, notamment en supprimant tous les droits à payer et en décentralisant la procédure, et de prendre des mesures pour enregistrer les enfants qui n’ont pas été déclarés à la naissance.

L’enregistrement des enfants à la naissance reste une préoccupation de l’État haïtien qui a toujours pris des mesures permettant aux parents qui ne se conforment pas au délai de déclaration prévu au Code civil de le faire tardivement sans la formalité de jugement. Dans cette perspective s’inscrit le décret de 1995 permettant l’enregistrement tardif de naissance, que le Comité avait salué avec satisfaction.

En termes de suivi, l’État haïtien a pris l’arrêté présidentiel du 1er février 2002 accordant à toute personne dépourvue d’acte de naissance de régulariser son état civil. L’arrêté accorde l’exemption fiscale aux formalités y afférentes et autorise la déclaration tardive sans jugement préalable. Cet arrêté n’est plus en vigueur depuis 2007. L’IBESR a renforcé depuis 2011 son Service des œuvres sociales qui facilite l’enregistrement des naissances des enfants abandonnés. Le Ministère de la justice et de la sécurité publique (MJSP) a initié en 2012 une campagne nationale de recouvrement d’actes de naissance qui a débuté en 2013 dans le département du Sud-est. Elle consiste à donner des actes de naissances aux enfants de moins de deux ans et permet des procédures célères et gratuites pour les autres.

Les Offices d’état civil (OEC) sont déconcentrés dans 137 des 140 communes. La couverture nationale de l’enregistrement des naissances à l’état civil est évaluée dans l’Enquête mortalité, morbidité et utilisation des services (EMMUS) V à 81 % (tableau 4).

Quant à la délivrance d’extrait d’actes d’état civil, une importante mesure de déconcentration a été adoptée en 2005 par le responsable des Archives nationales avec des accords conclus entre les Archives nationales d’Haïti et des maisons de transfert d’argent éparpillées à travers les communes. Aux termes de ces accords, les maisons de transfert reçoivent les demandes d’extraits des intéressés pour les acheminer aux Archives nationales. Cette mesure permet aux citoyens de trouver leurs extraits avec plus de facilité.

Quant au nom et à la nationalité de l’enfant, les informations juridiques fournies dans le premier rapport n’ont pas subi de modification.

2.La préservation de l’identité

Le Comité a recommandé à l’État haïtien de prendre les mesures nécessaires, notamment l’abrogation de l’article 306 du Code civil, afin de respecter, dans la mesure du possible, le droit de l’enfant à connaître l’identité de ses parents.

En termes de mesure de suivi, la loi du 12 avril 2012 sur la paternité, la maternité et la filiation a été votée, mais reste à ce jour non promulguée. L’article premier de ladite loi pose le principe de l’égalité des filiations légitime, naturelle, adoptive ou autres et son article 8 abroge de manière expresse l’article 306 du Code civil qui ne permettait pas aux enfants adultérins ou incestueux de connaître l’identité de leurs parents.

Cette loi va encore plus loin en abrogeant l’article 611 du Code civil qui disposait que l’enfant adultérin ou incestueux n’ait droit qu’à des aliments de leurs parents. Une fois cette loi promulguée, tous les enfants bénéficieront des mêmes droits et privilèges.

3.Le droit de ne pas être soumis à la torture ou autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants, y compris les châtiments corporels

Le Comité a recommandé à l’État partie: a) de prendre toutes les mesures pour assurer l’application effective de la loi interdisant le recours aux châtiments corporels, en particulier par l’intermédiaire de campagnes d’information et d’éducation destinées à sensibiliser les parents, les enseignants et d’autres professionnels s’occupant d’enfants, ainsi que le public dans son ensemble, au caractère néfaste des châtiments corporels et à l’importance d’appliquer d’autres formes de discipline non violentes, conformément au paragraphe 2 de l’article 28 de la Convention; b) d’enquêter avec diligence sur toutes les allégations de mauvais traitement d’enfant commis par des responsables de l’application des lois et de veiller à ce que les auteurs présumés soient retirés du service actif ou suspendus pendant la durée de l’enquête, et révoqués et punis s’ils sont condamnés, c) d’assurer la protection, la réadaptation et la réinsertion des enfants victimes.

La loi interdisant les châtiments corporels contre les enfants (2001) et la loi relative à l’interdiction et à l’élimination de toutes formes d’abus, de violences, de mauvais traitements ou traitements inhumains contre les enfants (2003) traduisent de manière non équivoque la volonté de l’État haïtien de protéger les enfants contre la torture et tout autre traitement cruel ou inhumain.

Aux termes de l’article 4 de la loi de 2003, des poursuites judiciaires pourront être engagées à l’encontre de toute personne qui se serait rendue coupable de torture, d’abus, de violences ou de maltraitance sur un enfant. Les peines sont prévues par le Code pénal.

B.Les droits-liberté

Les articles 14, 15 et 17 de la Convention font obligation à l’État haïtien de respecter le droit de l’enfant à la liberté d’expression, de pensée, de conscience, de religion, d’association de réunion pacifique, la protection de sa vie privée et de son image. En ce qui concerne ces droits, il n’existe pas de dispositions spécifiques aux enfants, et les dispositions de la Constitution de 1987 amendée s’appliquent.

1.La liberté d’expression et le droit de rechercher, de recevoir et de répandre des informations

Le droit à la liberté d’expression est consacré à l’article 28 de la Constitution qui reconnaît que tout Haïtien a le droit d’exprimer librement ses opinions, en toute matière par la voie qu’il choisit. Cette liberté est reconnue tant aux majeurs qu’aux mineurs.

De plus, aucune interdiction n’est faite aux enfants de rechercher, de recevoir et de faire circuler des informations de toute nature. L’accès des enfants à l’internet et aux bibliothèques a favorisé de façon significative l’essor de ce droit. Selon la Direction nationale du livre, en partenariat avec l’OIF, 16 Centres de lecture et d’animation culturelle (CLAC) sont installés dans cinq départements (Ouest, Sud, Artibonite, Nord et Nord-Est), majoritairement fréquentés par les 14-24 ans; l’objectif est d’atteindre le nombre de 40 centres pour tout le pays.

2.La liberté de pensée, de conscience et de religion

En Haïti, la Constitution reconnaît à tout citoyen la liberté de pensée, de conscience et de religion. L’article 30 de la Constitution de 1987 amendée prescrit que toutes les religions et tous les cultes sont libres et que toute personne a le droit de professer sa religion et son culte, pourvu que l’exercice de ce droit ne trouble pas l’ordre et la paix publics. Quant aux enfants, ils suivent généralement la religion de leurs parents, car c’est une pratique culturelle de la société haïtienne.

3.La liberté d’association et la liberté de réunion pacifique

L’article 31 de la Constitution garantit la liberté d’association, de réunion pacifique sans arme à des fins politiques, économiques, sociales, culturelles ou à toutes autres fins pacifiques. On en déduit que tous les Haïtiens, quel que soit leur âge, sont libres de jouir et d’exercer ces droits sur tout le territoire de la République sans qu’aucune intervention de l’État ne soit nécessaire. Dans les écoles publiques et privées, comme dans les quartiers résidentiels, les enfants peuvent librement s’associer et tenir des réunions sous forme de comités de classe ou de quartier pour discuter et préserver leurs intérêts. Des ONG comme Save the Children, Plan International, World Vision, la Fondation pour la santé reproductive et l’éducation familiale (FOSREF) et Population Services International (PSI), ont soutenu des initiatives de regroupements d’enfants et de jeunes, notamment avec des clubs d’enfants et des comités de protection. Par exemple, Save the Children soutient 71 comités de protection en 2013 selon les chiffres de l’IBESR, Plan Haïti et l’Association des clubs d’enfants soutiennent 67 clubs.

4.La protection de la vie privée et la protection de l’image

Les enfants, même doués de discernement, sont soumis à leurs parents ou à leurs représentants légaux en ce qui concerne leur vie privée selon l’article 12 du décret du 8 octobre 1982 sur la femme mariée C’est d’ailleurs l’implication des parents dans la vie privée des enfants qui facilite l’exécution du devoir de surveillance et d’orientation.

Quant à la protection de l’image de l’enfant, la loi haïtienne est muette en la matière. Néanmoins, l’image ne peut être utilisée sans le consentement des parents. Il n’existe pas de loi sur la presse ou de Code déontologique pour les journalistes qui pourraient traiter de ces questions de protection de vie privée, outre les dispositifs spécifiques à certaines associations de professionnels.

V.Milieu familial et protection de remplacement

Le Comité des droits de l’enfant a émis des préoccupations par rapport à l’incidence élevée des violences ou sévices sur les enfants au sein de certaines familles et au nombre croissant d’enfants qui vivent hors du milieu familial sans tenir compte de leur opinion. L’absence d’examen périodique de leur placement en dehors de ce milieu constituait aussi pour le Comité une grande inquiétude. La recommandation du Comité a porté sur l’orientation et la responsabilité légale des parents à l’égard de l’enfant, la protection de l’enfant contre les violences, les mauvais traitements et les abus sexuels au sein du milieu familial, la séparation de l’enfant de son milieu familial et la protection des intérêts de l’enfant pendant et après séparation d’avec les parents.

A.Le milieu familial et la fourniture par les parents de conseils adaptés au degré de développement des capacités de l’enfant

Dans le cadre du support aux familles donné aux familles, l’IBESR a facilité des rencontres avec des parents en difficulté pour faciliter les relations harmonieuses. Un module sur le développement de l’enfant existe à l’usage des professionnels des services.

B.La responsabilité commune des parents, l’aide aux servicesde garde d’enfants

L’ensemble des droits que la loi accorde aux père et mère sur la personne et sur les biens de leurs enfants mineurs constitue l’autorité parentale selon l’article 12 du décret du 8 octobre 1982.

En Haïti le Code de la famille prévu dans l’article 262 de la Constitution n’est pas encore établi. Cependant la législation existante fait obligation aux parents ou aux autres représentants légaux des enfants d’assurer une bonne orientation à ces derniers. On doit toutefois noter que certains enfants n’ont pas, au regard de la loi, la possibilité de connaître leur père, surtout lorsque ce dernier se trouve dans les liens d’un mariage au moment de leur conception. Cette lacune sera comblée à la promulgation de la loi du 12 avril 2012 sur la paternité, la maternité et la filiation. Cette nouvelle loi engagera la responsabilité commune de tous les pères et mères d’élever leurs enfants et d’assurer leur développement.

C.Protection de l’enfant contre les violences ou mauvais traitements et les abus sexuels au sein du milieu familial

La question de la violence exercée contre l’enfant au sein du milieu familial mérite une attention soutenue de la part de l’État. L’Enquête mortalité, morbidité et utilisation des services V (EMMUS V) réalisée en l’année 2012 a mis en évidence que 86 % des enfants auraient subi une forme quelconque de violence, soit psychologique, soit corporelle (tableau 5). EMMUS V fait part spécifiquement de trois formes de violences considérées comme des mesures disciplinaires, exercées par les parents ou représentants légaux sur la personne des enfants:

a)Sanctions non violentes, consistant en interdiction à l’enfant d’une chose qu’il aime, la privation de repas, l’interdiction de jouer etc. Une proportion relativement faible d’enfants, soit 8 %, auraient subi ces formes de sanctions;

b)Agressions psychologiques, prenant la forme de cri ou de hurlement contre l’enfant, d’insultes et de dénigrement. Cinq pour cent d’enfants auraient connu des agressions psychologiques;

c)Châtiments corporels, manifestés par des agressions physiques comme le fait de secouer l’enfant, lui tirer les oreilles, le frapper sur les fesses, le mettre à genoux, le gifler etc. Ces châtiments seraient commis sur 81 % des enfants.

La proportion d’enfants qui font l’objet de châtiments corporels varie peu selon le sexe de l’enfant, son milieu de résidence, le département et même le niveau d’instruction du chef de ménage. Cependant, elle est un peu plus faible pour les enfants de 10 à 14 ans (75 %) que pour les enfants plus jeunes (83 % ou plus). Par contre, les formes violentes de châtiments corporels sont plus fréquentes contre les enfants de sexe masculin (18 %) que pour les filles (14 %), contre les enfants du milieu urbain que du milieu rural (17 % contre 15 %). Elles sont aussi plus fréquentes dans les camps de déplacés (27 %) que dans les autres milieux de résidence.

Le Comité des droits de l’enfant a déploré les cas de mauvais traitements et d’abus sexuels perpétrés, notamment sur les fillettes, dans de nombreuses familles haïtiennes et a, de ce fait, recommandé de corriger la situation.

Conscient de ce problème, l’État haïtien s’est engagé dans des efforts visant à enrayer la violence dans les familles. En termes de mesures législatives, différents textes ont été adoptés:

La loi du 10 septembre 2001 interdisant les châtiments corporels contre les enfants; selon l’article, les traitements inhumains de quelque nature que ce soit, y compris les punitions corporelles contre les enfants, sont interdits;

La loi du 7 mai 2003 relative à l’interdiction et à l’élimination de toutes formes d’abus de violences, de mauvais traitements ou traitements inhumains contre les enfants; son article 4 permet au MAST de saisir l’autorité judiciaire compétente sur requête de tout enfant contre tout individu identifié comme auteur, coauteur et complice des actes de violence ou de mauvais traitement à son encontre;

Le décret du 6 juillet 2005 modifiant le régime des agressions sexuelles et éliminant en la matière les discriminations contre la femme; son article 3 stipule que «si le crime (d’agression sexuelle ou de viol) a été commis sur la personne d’un enfant au-dessous de quinze ans accomplis, la personne coupable sera punie de quinze ans de travaux forcés». En son article 4, la peine se transforme aux travaux forcés à perpétuité, si le délinquant est une personne ayant autorité sur l’enfant.

S’agissant des mesures administratives, on peut citer la création en novembre 2002 de la Brigade de protection des mineurs (BPM), unité spéciale de la PNH. Cette structure policière a pour objectif principal de venir en aide aux enfants, particulièrement les plus vulnérables. La BPM dispose en outre d’une section chargée de traiter des violences domestiques et de rechercher, d’identifier, d’interpeller et de déférer devant les autorités judiciaires les auteurs de mauvais traitements, de sévices physiques ou moraux à l’encontre de mineurs.

Des lignes téléphoniques gratuites ont encore été établies et désignées sous l’appellation de numéros verts, au service des enfants en danger. En 2008, Haïti a inauguré une ligne téléphonique gratuite, accessible 24/24 dans la capitale pour fournir des conseils aux victimes de violences/survivantes avec le financement de l’UNICEF et du trésor public. Les organismes proposant ce service sont le MCFDF en partenariat avec les ONG Promotion Objectif Zéro sida (POZ) et le centre médical GESKHIO. En juin 2012, l’IBESR a mis en place deux numéros d’appel gratuit pour l’enfance en danger avec le soutien financier de l’UNICEF et de Save the Children. Le Centre d’appel de la BPM a été mis en place en 2011 avec le soutien de l’UNICEF et de la MINUSTAH.

Quant aux mesures judiciaires, hormis les décisions des juridictions de jugement punissant les auteurs d’infractions contre les mineurs, il faut mettre en relief le rôle des Parquets près les TPI poursuivant les personnes soupçonnés d’abus sexuels contre les enfants. Néanmoins, les statistiques n’ont pas été communiquées pour ce rapport.

Le Plan national de protection de l’enfance en situation difficile ou de vulnérabilité de 2007 est constitué de divers volets, dont le programme national de réhabilitation des enfants victimes de violence et d’abus sexuels qui a pour finalité d’éliminer toutes les formes de violence et d’abus sexuels à l’endroit des filles et des garçons. Le Plan vise encore à accompagner les institutions de femmes soutenant les filles victimes d’exploitation, de violence et d’abus sexuels, afin d’accroître le rayonnement et l’efficacité des services d’accompagnement offerts, renforcer la capacité d’intervention de l’IBESR dans le domaine de la protection des enfants victimes d’abus sexuels.

Depuis 2005, selon les chiffres d’EMMUS IV à EMMUS V, on note une diminution générale (0,3 %) des violences commises à l’encontre des 15-24 ans. EMMUS V note une prévalence plus forte en milieu urbain (0,4 %).

D.Enfants séparés de leurs parents

Le Comité a recommandé à l’État: a) de faire en sorte que les enfants ne soient pas séparés de leurs parents contre leur volonté, sauf lorsque la séparation est dans l’intérêt supérieur de l’enfant et sur décision d’une autorité compétente – décision devant pouvoir être contestée devant la justice, b) de faire en sorte que les enfants privés à titre temporaire ou permanent de leur environnement familial aient droit à une protection et à une assistance spéciale, c) de veiller à ce que les enfants aient la possibilité de participer aux procédures et de faire connaître leur opinion, d) de prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre à l’IBESR de procéder à un réexamen périodique du placement de tout enfant séparé de ses parents, qu’il soit placé en institution ou en famille d’accueil.

En la matière, il n’y a pas eu de changement notable depuis le rapport initial. Néanmoins il convient de noter la mise en place par l’IBESR d’un système de suivi systématique des enfants séparés après le tremblement de terre de 2010, outil qui a ensuite été mobilisé après le passage des cyclones Sandy et Isaac (2012). Ce dispositif fait partie de la réponse d’urgence de l’IBESR et des efforts sont en cours pour l’institutionnaliser dans le Système national de gestion des risques et des désastres (SNGRD), particulièrement au sein du Groupe de prévention et de réponse aux urgences (GPRU) de la Direction de la protection civile (DPC) opérant sous l’ombrelle du Ministère de l’intérieur et des collectivités territoriales (MICT).

E.Réunification familiale

L’IBESR avec le soutien de ses partenaires des ONG, de l’IOM et de l’UNICEF effectue des recherches pour localiser les familles de nombreux mineurs abandonnés ou passés pour orphelins dans des maisons d’enfants. Les enfants dont les parents sont identifiés seront réunifiés avec leur famille si celle-ci est jugée en mesure de les accueillir. Des aides sont parfois accordées sous forme d’AGR, de soutien à la scolarisation ou autre aide spécifique à la situation des enfants – notamment ceux vivant avec un handicap.

Le programme de réunification familiale a permis d’obtenir des résultats satisfaisants, car plus de 4 500 enfants ont pu rejoindre leur famille durant les trois dernières années (2010-2013). Pour s’assurer de la pérennité de ces réunifications, l’IBESR et ses partenaires effectuent des suivis réguliers. Une base de données inter-agences a ainsi été mise en place pour assurer le suivi des recherches et réunification, ce en collaboration avec l’UNICEF, Save the Children, International Rescue Committee (IRC), Terre des Hommes et Heartland Alliance.

De plus, en marge des réunifications, des sensibilisations communautaires sont réalisées par les travailleurs sociaux en vue de renforcer la capacité des familles à accueillir durablement leurs enfants et, en même temps, contribuer à prévenir de nouvelles séparations.

F.Les enfants privés de leur milieu familial

Normalement la famille, cellule de base de la société, est le milieu qui offre le plus de garantie au développement de l’enfant. Malheureusement, le phénomène de séparation familiale en Haïti constitue un sérieux problème. Plusieurs causes expliquent ces séparations, dont l’extrême pauvreté, l’absence des pères et/ou des mères, l’irresponsabilité de certains parents qui se dédouanent de leurs obligations en confiant leurs enfants à des tiers.

Les enfants séparés se retrouvent alors dans d’autres foyers, parfois en situation d’exploitation domestique, d’autres sont confiés à l’adoption, des milliers sont en situation de rue tandis que près de 32 000 vivent dans des centres résidentiels, la majorité sans mesure sociale appropriée.

1.Enfants en domesticité

Selon une étude réalisée par la FAFO en 2002 en collaboration avec le MAST, BIT‑IPEC, le PNUD, l’UNICEF, Save the Children Canada et Save the Children UK, la domesticité en Haïti est, entre autres, due aux difficultés économiques de nombreux parents. Disposant de faibles revenus, ces derniers, pour la plupart, des paysans, offrent leurs enfants en domesticité afin de garantir leur survie et un minimum d’éducation.

Cette étude identifie trois critères objectifs comme constitutifs du travail des enfants domestiques: une séparation des enfants de leurs parents, une charge de travail élevée pour l’enfant et un manque ou un retard dans la scolarité. En utilisant ces critères, l’étude estime à 173 000 le nombre d’enfants domestiques soit 8,2 % de la population infantile âgée de 5 à 17 ans. Par la suite, d’autres études telle que celle conduite par l’USAID et la Pan American Development Foundation avancent le chiffre de 225 000 enfants domestiques et ce uniquement dans les zones urbaines. Enfin, suite au séisme de 2010, le nombre des enfants en domesticité aurait considérablement augmenté au point que l’on puisse parler de 400 000 enfants.

Il faut avouer que les chiffres avancés plus haut restent des estimations difficilement vérifiables, car «malgré l’ampleur évidente de la pratique de la domesticité dans la société haïtienne aucun dénombrement systématique du nombre d’enfants […] n’a été jusqu’ici effectué». Le prochain recensement de la population sera l’opportunité d’obtenir des données plus complètes et actualisées sur la domesticité. Dû au caractère informel des mouvements, il est difficile de mettre en place des mécanismes de contrôle et de suivi systématiques.

En 2013, l’IBESR en collaboration avec l’UNICEF, le BIT, IOM, Terre des Hommes et IRC, soutient une analyse de la situation sur les enfants en situation de travail domestique, étude qui permettra la mise en place de mécanismes de prévention et de réponses aux victimes par les partenaires étatiques et non gouvernementaux.

Si les enfants en domesticité sont originaires de tous les départements, avec des parts plus importantes pour le Sud (26 %), le Sud-Est (22 %) et le Nord-Ouest (22 %) (tableau 6), ils vivent en plus grande proportion dans les départements de l’Ouest et de l’Artibonite. En zone urbaine, 72 % des enfants en domesticité sont des filles, tandis qu’elles ne sont que 53 % en zone rurale. Cela s’illustre dans le département de l’Ouest, plus particulièrement à Port-au-Prince. Ces enfants doivent en outre travailler péniblement au profit des ménages qui les exploitent. L’étude de la FAFO mentionnée ci-dessus indique en outre que 40 % des enfants en domesticité n’étaient pas scolarisés.

L’État haïtien n’est pas resté inactif face au fléau de la domesticité. Le MAST et l’IBESR ont soutenu de nombreuses campagnes de sensibilisation pour lutter contre le phénomène depuis 2001, dont celle conduite dans le plan de prévention de la séparation développé en 2013. Le MAST coordonne encore les efforts des organisations nationales et internationales au sein de la table sectorielle contre la pratique de la domesticité, opérationnelle au niveau central et dans quatre départements (Nord, Sud, Sud-Est et Artibonite).

Les efforts de l’État sont renforcés par les initiatives d’organisations de la société civile qui mettent en œuvre des campagnes de sensibilisation ou gèrent des centres d’accueil pour les enfants victimes.

2.Placement en institution

Le placement en institution désigne l’hébergement de certains mineurs en situation de vulnérabilité dans des maisons d’enfants. L’IBESR dans ses efforts d’assurer une protection maximale à cette catégorie d’enfants a pris, en signe de progrès, l’initiative en 2011 de réaliser un annuaire sur les maisons d’enfant pour lui permettre de contrôler avec plus d’efficacité ces maisons, les enfants qui y vivent, et de procéder à la surveillance de leurs activités. Par cette initiative, il a recensé et enregistré, à travers tout le pays, un total de 736 institutions et plus de 32 000 enfants hébergés pour la très grande majorité hors de tout contexte légal. L’initiative a été prise pour déterminer le nombre de centres, pour jauger des standards de prise en charge et pouvoir prendre des mesures de régulation suivant les prescrits de la loi de 1971 sur le fonctionnement des maisons d’enfant. Au vu des résultats, il apparaît que seuls 15 % respectaient les standards minimums. En conséquence, 36 centres ont été fermés, ce faible nombre étant dû aux difficultés rencontrées pour trouver des solutions de remplacement pour les enfants. Cette initiative a aussi permis l’accréditation des centres répondant aux normes.

Par ailleurs, il faut souligner que la pratique actuelle des maisons d’enfant relative au placement est contraire à la loi de 1971; les enfants accueillis ne faisant pas l’objet de mesures de placement par l’État qui seul est habilité à placer un enfant selon les lois de 1961, 1971 et 1973.

L’État dispose de deux centres d’accueil – celui de Carrefour et celui de «Delmas 3» tous deux à Port-au-Prince.

Par ailleurs dans le souci d’améliorer la situation de certains adolescents privés de cadre familial, l’IBESR et S.O.S Village d’enfants d’Haïti ont conclu, au cours de l’exercice 2011-2012, une convention aux termes de laquelle le S.O.S Village d’enfants d’Haïti s’engage à accorder une attention spéciale aux enfants adolescents qui sont privés de leur famille, à partir d’un programme d’hébergement familial qui offre un modèle d’attention à long terme aux enfants orphelins. À travers le programme de renforcement familial, le S.O.S Village d’enfants d’Haïti dirige ses actions vers les enfants en situation de risque social très élevé et dont les familles biologiques ne peuvent répondre à leur éducation et à leur prise en charge, faute de moyens économiques. Le but de ce programme est de prévenir la séparation familiale.

Dans le but de donner un encadrement plus fiable, notamment aux enfants orphelins, l’IBESR vient de valider un projet en partenariat avec l’UNICEF, Terre des Hommes et l’IRC pour mettre sur pied un dispositif de familles d’accueil, dont le processus de pilotage est prévu pour la période 2013/2014 dans quatre départements. Par ce projet, l’IBESR entend proposer des familles d’accueil aux enfants ayant besoin de prise en charge alternative.

De plus, il existe un mécanisme de garde provisoire accordé à des familles haïtiennes en prévision d’une adoption nationale, permettant aussi de réguler les gardes de fait pour les familles hébergeant des enfants qui ne sont pas les siens. En moyenne, 81 mesures de garde provisoire sont prises annuellement. Ces familles font l’objet d’évaluations régulières par l’IBESR.

G.Examen périodique du placement

L’examen ou le réexamen périodique de l’enfant placé dans une institution ou dans une famille d’accueil constitue l’une des recommandations du Comité. Cette tâche fait partie des attributions de l’IBESR. Elle constitue une mesure de protection des intérêts de l’enfant dans son nouvel environnement familial.

De fait, le placement de l’enfant hors du milieu familial est périodiquement évalué. L’IBESR travaille en outre sur la révision des mécanismes de placement, en vue d’établir une structure mieux appropriée que le placement institutionnel.

H.Adoption nationale et internationale

Le Comité a recommandé à Haïti: a) de ratifier la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, b) de s’attacher à renforcer sa capacité à contrôler les adoptions internationales afin d’assurer le plein respect de l’article 21 et des autres dispositions pertinentes de la Convention.

Les conditions et procédures de l’adoption sont définies par le décret du 4 avril 1974 et par le Code de procédure civile haïtien. Elles sont, de façon sommaire, déjà évoquées dans le rapport initial. L’adoption en Haïti peut être nationale ou internationale. Elle est nationale, lorsque l’adopté et l’adoptant résident en Haïti. Cependant, si l’adoptant réside dans un autre pays, quelle que soit sa nationalité, l’adoption est internationale.

Suite aux préoccupations exprimées par le Comité sur la hausse du nombre d’adoptions internationales, le Parlement haïtien a ratifié en juin 2012 de la Convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale tel que recommandé, et a renforcé sa capacité à contrôler les adoptions internationales par la mise en place de mesures administratives intermédiaires.

Selon l’IBESR (b) et la Conférence de La Haye (a), les nombres d’adoptions à l’international étaient comme suit de 2003 à 2013:

2003a

2004a

2005a

2006a

2007a

2008a

2009a

2010a

2011a

2012b

2013b

1 056

1 159

958

1 096

783

1 368

1 238

2 601

195

674

400

Après les dérives constatées après le tremblement de terre, les adoptions ont été suspendues en mai 2010 par les pays d’accueil sauf les États Unis. Le 18 juillet 2012, le Gouvernement a pris, comme mesure administrative, un arrêté qui garantit l’intégrité des procédures d’adoption internationale. D’avril à septembre 2012 et de novembre 2012 à janvier 2013, des moratoires ont été adoptés par l’IBESR aux fins de restructuration des procédures. Les adoptions n’ont repris qu’en janvier 2013. Encore le Parlement haïtien a voté un projet de loi réformant l’adoption le 29 août 2013, disposition restant à finaliser.

Pour s’assurer du respect de l’intérêt supérieur de l’enfant, l’article 32 de la loi réformant l’adoption dispose conformément à l’article 7 de la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale: «les dossiers des adoptants étrangers doivent être envoyés à l’IBESR par l’intermédiaire d’un organisme public compétent du pays d’accueil dûment habilité par l’IBESR. Si le pays d’accueil ne dispose pas d’organisme public compétent, le dossier des adoptants sera transmis à l’IBESR par l’autorité centrale d’adoption du pays d’accueil qui a émis l’agrément d’adoption». Aux termes de l’arrêté ci-dessus mentionné, il est interdit d’entreprendre des procédures d’adoption internationale de manière individuelle. À ce titre, l’arrêté met en œuvre la loi, en précisant ce qui suit: «pour des motifs de protection de l’enfance et afin de garantir la sécurité juridique des procédures, les procédures d’adoption internationale ne peuvent être menées qu’avec le concours d’autorités publiques ou d’organismes dûment agréés par le pays d’accueil et régulièrement autorisées par l’Institut du Bien-être Social et de Recherches, autorité nationale compétente». Cette disposition de l’article 7 de la Convention est déjà mise en œuvre à travers les nouvelles procédures administratives adoptées en 2012.

En plus de l’arrêté présidentiel, la Convention de La Haye, une fois déposée auprès du Ministère des affaires étrangères des Pays-Bas, et la loi réformant l’adoption, une fois promulguée, constitueront des avancées nettes pour l’application pleine et entière de la Convention en matière d’adoption internationale.

I.Les déplacements et non-retours illicites

Beaucoup d’efforts ont été entrepris pour réguler les voyages de mineurs. À cet égard, depuis 2007, il est délivré un certificat d’accompagnement par l’IBESR spécifiquement pour tous ceux qui doivent laisser le pays – avec ou sans leurs tuteurs. Cette mesure a été renforcée en 2012 pour prévenir les trafics existant par une nouvelle directive administrative de l’IBESR et le protocole d’entente conclu entre l’IBESR, la PNH (BPM) et la Direction de l’immigration et de l’émigration du MICT. Les modèles de certificat ont été transmis à toutes les représentations diplomatiques en Haïti. Plus spécifiquement, ce document a été partagé avec les autorités de l’enfance du Brésil, de l’Argentine, de la République dominicaine et du Chili, pays recevant un nombre important d’enfants haïtiens ne disposant pas du document adéquat. Suite à ces mesures, fin 2013, la décision a été prise de publier une directive exigeant aux parents d’informer l’État au retour des enfants dans le pays.

L’État dispose d’un accord bilatéral sur le rapatriement depuis 1999 avec la République dominicaine selon lequel la liste des personnes à être rapatriées devrait être communiquée préalablement aux autorités haïtiennes, ce qui n’est pas toujours le cas. Par ailleurs, beaucoup d’enfants non accompagnés sont rapatriés sans qu’Haïti ne soit dûment informé. De plus, des enfants sont parfois renvoyés en Haïti au travers de points non officiels de passage ce qui ne permet pas une connaissance exhaustive des cas et une prise en charge adéquate par les services mis en place et disponibles. Avec les autres pays, les informations sont généralement disponibles en avance pour les rapatriements et déportations prévues.

J.Violences, sévices et négligence

À la lumière des articles 19 et 39 de la Convention, le Comité a recommandé à Haïti: a) d’évaluer l’ampleur, la nature et les causes de la violence à l’encontre des enfants, en particulier les violences sexuelles dont sont victimes les filles, en vue d’adopter une stratégie globale ainsi que des mesures et politiques concrètes et de changer les mentalités; b) d’enquêter comme il se doit en cas de violences, dans le cadre de procédures judiciaires respectueuses de l’enfant, notamment en accordant le poids voulu à l’opinion de l’enfant dans l’action judiciaire, et d’imposer des sanctions aux coupables, tout en veillant à ce que le droit de l’enfant au respect de sa vie privée soit garanti; c) de mettre des services de réadaptation physique et psychologique et de réinsertion sociale à la disposition des filles victimes de sévices sexuels et de tous les autres enfants victimes d’un quelconque type de sévices, négligence, mauvais traitements, violence ou exploitation, et de prendre les mesures voulues pour empêcher la criminalisation et la stigmatisation des victimes, d) de prendre en considération les recommandations que le Comité a adoptées lors du débat général sur la violence contre les enfants, e) de demander une assistance technique, notamment à l’UNICEF et à l’OMS.

Les informations sur cette recommandation sont inclues dans d’autres sections de ce rapport.

VI.Handicap, santé et bien-être de base

Le Comité des droits de l’enfant, tout en reconnaissant les efforts de l’État haïtien dans les domaines du handicap, de la santé et du bien-être de base a toutefois fait des recommandations préconisant le développement d’un Plan national de santé, l’amélioration de la santé des enfants, une meilleure accessibilité aux services primaires de santé, la réduction de la mortalité infantile, infanto-juvénile et maternelle, la prévention du VIH/sida, la garantie de la santé des adolescents tant sur le plan de l’éducation sexuelle que sur le plan de la santé mentale. Le Comité a aussi porté son intérêt sur les enfants en situation de handicap, en demandant à l’État haïtien de définir, en leur faveur, une stratégie globale et des plans d’action. L’État haïtien a pris acte de ces requêtes et essayé d’y apporter des réponses.

A.La survie et le développement

Le Comité avait recommandé à Haïti, notamment grâce à une mise en route aussi rapide que possible de son plan national pour la santé: a) de redoubler d’efforts pour débloquer des ressources d’un montant approprié et de définir et appliquer des politiques et programmes globaux tendant à améliorer l’état de santé des enfants, en particulier en milieu rural; b) de faciliter un accès accru aux services de santé primaire, notamment dans les zones rurales; de réduire l’incidence de la mortalité maternelle et infanto-juvénile; de prévenir et combattre la malnutrition, en particulier dans les groupes d’enfants vulnérables et défavorisés; de continuer à promouvoir les bonnes pratiques en matière d’allaitement maternel; c) de poursuivre ses campagnes de vaccination et de les inscrire dans le cadre intégré de gestion des maladies infantiles; d) de mettre en place des programmes de formation de sages-femmes pour contribuer au bon déroulement des accouchements à domicile; e) de rechercher de nouvelles possibilités de coopération et d’assistance.

1.Mortalité infantile, juvénile et infanto-juvénile

La réduction de la mortalité des enfants de moins de 5 ans est aussi préoccupante pour le Comité que pour le Gouvernement haïtien. De 1990 à 2008, grâce aux efforts continus de l’État, le taux de mortalité infantile a diminué de manière régulière, soit de 105 à 57 pour mille et pour cette même période, celui de la mortalité infanto-juvénile est réduit de 152 à 76 pour mille (la variation de ces tendances s’illustre mieux au tableau 7 présentant l’évolution de certains indicateurs des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD)). Les chiffres ont légèrement changé, entre janvier et juin 2012, selon l’Enquête mortalité, morbidité et utilisation des services (EMMUS V). Cette nouvelle enquête statistique présente et compare les données sur trois périodes: 1997-2001, 2002-2006 et 2007-2012. Elle offre, par conséquent, une large possibilité pour apprécier l’évolution de ces données. Selon les résultats d’EMMUS V, pour la période 2007-2012, la mortalité avant un an est évaluée à 59 ‰ et la mortalité de 0 à 4 ans est de 31 ‰. Le risque de décès avant l’âge de cinq ans est de 88 ‰ (tableau 8a pour une meilleure appréciation et comparaison par rapport aux autres périodes).

La mortalité juvénile a connu des variations irrégulière, mais, autour de 1993 elle a baissé jusqu’au début des années 2010 pour se maintenir ensuite au même niveau jusqu’à la période actuelle. L’État haïtien s’est encore donné comme perspective de réduire davantage ces taux pour la décennie 2010-2020 (tableau 8b pour évolution 1988-2012).

2.Mortalité maternelle et formation des sages-femmes

Le taux de mortalité maternelle a connu une baisse en vingt ans passant de 620 mille à 360 pour 100 000. Dans la quasi-totalité des cas, elle s’explique, selon EMMUS V, en raison des accouchements à domicile. En milieu rural, ces derniers constituent des pratiques courantes, ce qui implique des complications obstétriques. Au cours des deux dernières décennies, beaucoup d’efforts ont été consentis pour améliorer l’accès des femmes enceintes aux services de santé.

La comparaison des trois derniers EMMUS indique une claire tendance à l’amélioration entre 2000 et 2012 pour les accouchements par personnel qualifié. En effet, ce taux est passé de 24 % à 38 % en dix ans. L’analyse des données (tableau 9) montre que parmi les femmes âgées de 15 à 49 ans qui ont donné naissance à un enfant vivant au cours des cinq années ayant précédé l’EMMUS V, neuf sur dix (90 %) avaient reçu des soins prénatals d’un prestataire formé contre 85 % en 2005. Le pourcentage de femmes, pratiquant des consultations prénatales auprès d’un professionnel, est plus élevé chez les femmes jeunes – 90 % (moins de 20 ans) et 92 % pour celles âgées de 20 à 34 ans dans EMMUS V, nette amélioration des constatations de EMMUS III et IV. Les femmes les plus jeunes ont plus accès à l’assistance d’un prestataire formé pour leur accouchement (40 % pour les moins de 20 ans et 38,7 % pour les 20-34, et 30,31 % pour les 35 et plus). Cette assistance varie peu selon le niveau d’instruction et le milieu de résidence de ces femmes (tableau 9a).

Haïti dispose d’une Politique nationale de santé depuis 1996 qui a été révisée en 1999 et actualisée en 2012. En conséquence, un Plan stratégique national pour la réforme du secteur de santé a été développé (2005-2010) suivi d’un Plan intérimaire du secteur de santé de 18 mois couvrant la période de mars 2010 à septembre 2011. De plus un Plan national stratégique de réduction de la mortalité maternelle (PNSRMM) a été mis en place en 2012 en partenariat avec des institutions internationales dont l’UNICEF et l’OMS. En 2007, la Direction de la santé familiale (DSF) du MSPP avait prévu une baisse de trois quart du taux de la mortalité maternelle pour 2015, projection révisée en 2012 pour n’être que de moitié.

Le Gouvernement a encore développé des actions d’appui comme l’élargissement de la couverture des soins prénatals (44 % en 2000 à 54 % en 2005-2006 et 67 % en 2012), un programme des soins obstétricaux gratuits (SOG) de l’OPS/OMS en 2008 intensifié en 2011 avec le financement d’ACDI. La prévalence contraceptive et moderne parmi les femmes en union n’a guère variée entre 2000 et 2005-2006, avant de connaître une augmentation importante en 2012 passant de 22 % en 2000, à 25 % en 2005-2006, puis à 31 % en 2012.

En particulier, le Comité avait recommandé de mettre en place des programmes de formation de sages-femmes pour contribuer au bon déroulement des accouchements à domicile. En effet, encore aujourd’hui, seules 36 % des femmes accouchent dans les milieux hospitaliers en Haïti. À ce propos, l’État a déployé des efforts pour doter les sages-femmes d’une formation adéquate avec l’ouverture à Cité Soleil de l’Institut national supérieur de formation des sages-femmes en octobre 2013 avec le soutien de la MINUSTAH et de l’UNFPA. L’Institut comprend une filière d’entrée directe de sages-femmes qui donnera, sur une période de trois ans, une formation aux bacheliers intéressés et une filière de formation de 18 mois pour les professionnels du milieu médical, dont les infirmières licenciées. Quatre autres devraient être ouverts dans le reste du pays et l’École nationale des infirmières et sages-femmes (ENISF) ré-ouverte.

Le Comité a encore recommandé: a) de prendre toutes les mesures nécessaires pour définir des politiques et programmes adaptés en matière de santé des adolescents, en portant une attention toute particulière aux adolescentes et b) de renforcer l’éducation sexuelle et génésique ainsi que les services de santé mentale et services de conseil dans le respect de la sensibilité des adolescents, et de les rendre accessibles aux adolescents.

En 2006, le Gouvernement a lancé une Politique de planification familiale. Depuis 2009, le MSPP a fait de la planification familiale un de ses cinq axes stratégiques pour la réduction de la mortalité maternelle. Les normes en planification familiale ont été mises à jour en 2010 dans le but de standardiser la qualité. À partir de 2012 ont été mis en place avec le soutien de l’UNFPA quatre méthodes de planification et des programmes d’éducation de la population visant spécifiquement les jeunes.

Ainsi, il existe trois organisations (USAID, OPS et UNFPA) qui financent l’approvisionnement en préservatifs à distribuer soit à des fins de santé de la reproduction soit de prévention de la transmission du VIH. La disponibilité de ces préservatifs est assurée d’une part par PSI à travers ses points de vente et par le MSPP à travers des institutions sanitaires avec de 2006 à 2011, 227 571 690 préservatifs rendus disponibles (tableau 9b). Néanmoins le recours des adolescents et les jeunes aux préservatifs est affecté notamment par leur faible niveau de connaissance, le coût d’acquisition et la méconnaissance des lieux de vente ou de distribution. En effet, en 2012, il n’y avait que 31,1 % de jeunes qui possédaient une connaissance approfondie de la problématique du VIH. Cette ignorance, ajoutée à la difficulté d’accès suite au coût d’acquisition des préservatifs, fait que l’évolution du taux de recours n’a pas beaucoup progressé. L’évolution de la proportion d’adolescents et jeunes qui déclarent avoir utilisé un préservatif lors du dernier rapport à risque fait voir une progression linéaire pour les jeunes garçons, passant respectivement de 28 % en 2000 à 43 % en 2005-2006 et à 51 % en 2011. Bien que cette évolution soit positive, pour 49 % de jeunes garçons, le risque persiste malgré la progression de 8 % observée entre les deux dernières périodes sous examen. Pour les jeunes filles, par contre, on observe une régression après une amélioration entre les années 2000 et 2005. En effet, le taux d’utilisation du préservatif lors du dernier rapport sexuel à risque passe de 12,60 % en 2000 à 29 % entre 2005-2006 pour retomber à 23 % entre 2007-2011, soit une régression de 6 % (tableau 9c).

3.Vaccination

Dans le rapport initial, il était mentionné la faiblesse de la couverture vaccinale du pays et le Comité avait recommandé au Gouvernement de poursuivre ses campagnes de vaccination et de les inscrire dans le cadre intégré de gestion des maladies infantiles.

Les progrès constatés dans la réduction de la mortalité des enfants sont dus aux efforts consentis par l’État, certaines ONG, l’UNICEF et l’OMS dans la mise sur pied, de façon intensive, des programmes de vaccination, afin de préserver les enfants des maladies contagieuses. Sur les enfants de 12-23 mois, la proportion des enfants vaccinés est passée de 34 % en 2000 à 41 % en 2005-2006 pour atteindre 45 % en 2012 selon les chiffres d’EMMUS V.

Ces actions entreprises ont consisté en la mise en œuvre de nombreux programmes de vaccination, notamment le Programme élargi de vaccination (PEV) et des «Activités intensives de vaccination». Par ailleurs, dans le cadre de la lutte contre la mortalité infantile et infanto-juvénile, les programmes de vaccination s’accompagnent d’autres actions d’appui qui les consolident, par exemple le Paquet minimum de services de santé (PMS), la mise en œuvre en 2012 du programme «manman ak timoun an sante» (mères et enfants en santé), la Prise en charge intégrée des maladies de l’enfance (PCIME) en 2009 et la réhabilitation de centres hospitaliers et de santé.

4.Prévention de la malnutrition

La malnutrition, parallèlement aux problèmes sanitaires, constitue aussi une préoccupation pour le Comité qui recommandait de prévenir et combattre la malnutrition, en particulier dans les groupes d’enfants vulnérables et défavorisés et de continuer à promouvoir les bonnes pratiques en matière d’allaitement maternel. Selon EMMUS V, en 2012, un peu plus d’un cinquième des enfants de moins de 5 ans (22 %) souffrent de malnutrition chronique: 8 % sous forme sévère, 14 % sous sa forme modérée. Selon la même source, 29,7 % souffraient de malnutrition chronique en 2005-2006 (EMMUS IV) et 21,9 % en 2012 (EMMUS V). En ce qui concerne la malnutrition aiguë, 10 % des moins de cinq ans en souffraient en 2005 contre 5 % en 2012 (tableau 9d).

La Politique nationale de nutrition mise en place par le MSPP vise avant tout les groupes vulnérables de la population, et particulièrement les moins de cinq ans, les femmes enceintes et allaitantes, les personnes âgées et les patients atteints par la tuberculose ou le VIH/sida. Cette politique actualisée et validée en 2011 comprend six axes stratégiques dont 1) la prévention de la malnutrition, 2) la prise en charge nutritionnelle, 3) la protection nutritionnelle en situation d’urgence, 4) l’amélioration des systèmes d’information en matière de nutrition, 5) la coordination intra et interministérielle et inter sectorielle et 6) la recherche appliquée et formation en nutrition.

Face au problème que représente la malnutrition, le MSPP, supporté par l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS), à travers l’Unité de coordination du Programme national d’alimentation et nutrition (UCPNAN) a établi le Protocole national de prise en charge de la malnutrition aiguë globale en Haïti. Le MENFP, dans le même sens, a lancé depuis décembre 2012 un document politique sur le développement intégral de la petite enfance qui vise, entre autres, à sensibiliser les parents sur la nécessité de bien nourrir leurs petits, ce qui constitue un facteur d’apprentissage rassurant au niveau du préscolaire.

Pour prévenir la malnutrition, l’État s’est engagé dans la promotion de l’allaitement maternel à travers des campagnes de sensibilisation. En 2012, selon EMMUS V, 97 % des enfants ont été allaités (96 % en 2005-2006 selon EMMUS IV), 81 % dans les 24 heures après leur naissance.

Après le tremblement de terre, un accroissement sans précédent des services de nutrition préventifs et curatifs destinés aux enfants et aux femmes a été supporté notamment par l’UNICEF soutenant cet accroissement par une aide à la coordination en vue d’améliorer l’égalité d’accès aux soins, une aide matérielle, technique et financière destinée à la création de 290 unités de soins réservées aux consultations externes et 24 unités de stabilisation pour des patients hospitalisés et souffrant de malnutrition infantile aiguë sévère associée à d’autres complications médicales. Dans la même période et pour parer aux conséquences de l’affluence du lait artificiel gratuit, des points conseils en nutrition pour bébés (PCNB) ont été mis en place dans les camps de déplacés offrant un appui aux personnes en détresse afin d’assurer la prévention, le dépistage et le traitement de la malnutrition aiguë. Ces points ont été essentiellement mis en place dans les départements de l’Ouest et de l’Artibonite. Encore, un programme d’hôpitaux amis des bébés a été mis en place par le MSPP fin 2012 pour que toutes les maternités deviennent des centres de soutien à l’allaitement maternel.

De nombreuses institutions comme l’OPS, le PAM, l’UNICEF et nombre d’ONG ont donné à l’État haïtien un apport très soutenu en la matière.

B.La santé et les services de santé, en particulier les soins de santé primaires

Le droit à la santé est l’un des droits fondamentaux reconnus par la Constitution haïtienne. Il s’applique aux adultes comme aux mineurs. Le Comité avait recommandé à l’État partie, notamment grâce à une mise en route aussi rapide que possible de son plan national pour la santé, a) de redoubler d’efforts en vue de débloquer des ressources d’un montant approprié et de définir et appliquer des politiques et programmes globaux tendant à améliorer l’état de santé des enfants, en particulier en milieu rural et b) de faciliter un accès accru aux services de santé primaire, notamment dans les zones rurales.

Selon les leçons apprises du DSNCRP, les ressources allouées dans le domaine de la santé ne permettent pas une amélioration significative de la couverture sanitaire en termes de qualité de soins et d’accessibilité aux soins de santé pour tous. En plus du DSNCRP, dont la mise en œuvre est limitée dans le temps, le Plan stratégique de développement d’Haïti (PSDH) vise à faire d’Haïti un pays émergeant en 2030 et indique que les services de santé seront largement renforcés. Ainsi l’État se donne pour objectif de doter le pays de centres hospitaliers universitaires, de construire des hôpitaux de référence dans les pôles régionaux de développement et des hôpitaux communautaires de référence dans les pôles locaux de développement, de mettre en place à l’échelle nationale des programmes de santé scolaire.

En vue de rendre ce droit opérationnel, l’État haïtien, par le biais du MSPP, a établi en 2003 un Plan d’action national de santé dans lequel s’incorpore le Plan stratégique pour la santé de l’enfant (2003-2008) en cours de revue en 2013. Ce plan comporte les axes principaux suivants: le développement des capacités techniques et institutionnelles tendant à remplir un rôle spécialisé dans la conduite du secteur de la santé, la décentralisation des fonctions clés de supervision et de suivi des Directions départementales, l’augmentation de la participation communautaire à la production des collectivités locales de services de santé, l’augmentation du niveau de disponibilité des services de santé de base, particulièrement le service materno-infantile à travers les Unités communales de santé (UCS).

La mise en œuvre du Plan national de santé commence à produire des résultats intéressants comme l’accès aux services de santé (2012 – 1 531 960 consultations pédiatriques), la réduction de la mortalité infantile et infanto-juvénile, la réduction de la mortalité maternelle et la formation des sages-femmes, la poursuite des campagnes de vaccination et la prévention de la malnutrition, la prévention des infections VIH/sida, la situation particulière et la santé des enfants en situation de handicap, la santé et l’éducation sexuelle des adolescents.

L’accès aux services de santé

Les efforts de l’État dans le domaine sanitaire ont visé à augmenter l’accès des enfants aux soins médicaux par le renforcement des capacités institutionnelles et des infrastructures du secteur de santé. L’accès aux soins de santé primaire a été priorisé dans les zones urbaines tout comme dans les zones rurales suivant les recommandations du Comité, ceci afin d’atteindre les groupes d’enfants vulnérables et défavorisés.

En effet, le MSPP a entrepris dans presque tous les départements du pays des activités de réhabilitation, d’extension et de modernisation du service de médecine interne des hôpitaux, sans compter la construction des services de pédiatrie et de chirurgie. Citons à titre d’exemples: construction d’un hôpital pour maladies respiratoires à Sigueneau (département de l’Ouest), de trois centres de santé dans le département du Sud, de 12 centres de santé dans le département de l’Artibonite, construction et/ou réhabilitation de 21 blocs sanitaires dans les différentes communes du département du Nord, construction de deux incinérateurs l’un à Saint-Marc (département de l’Artibonite) et l’autre aux Gonaïves (département de l’Artibonite), d’un centre de santé à Grand Bassin (département du Nord-Est), réhabilitation du centre de santé de Boucan Carré (département du Centre), du dispensaire de Grand Vincent (département de la Grand-Anse), renforcement de l’Hôpital Sainte Croix de Léogane (département de l’Ouest), réhabilitation du Dispensaire de Beaudin à Petit Goâve (département de l’Ouest), construction d’un Hôpital communautaire de référence à Bassin Bleu (département du Nord-Ouest).

Pour garantir un meilleur fonctionnement des institutions sanitaires, le MSPP a organisé dans tout le pays des formations pour les travailleurs sociaux, matrones, médecins, infirmières, techniciens de laboratoire, auxiliaires, agents de santé sur la prise en charge de certaines maladies. La formation des professionnels de santé est aussi prise en compte dans le cadre du Plan national de santé et des spécialistes du domaine médical sont formés en Haïti, d’autres à l’étranger. Par exemple, dans le cadre du programme entre Haïti et Cuba, 818 médecins, 32 techniciens bio-médico et 58 agents sanitaires ont été formés à Cuba, les étudiants étant pris en charge par l’État haïtien. En attendant une couverture nationale par un nombre suffisant de spécialistes haïtiens, des techniciens étrangers, notamment 619 professionnels cubains de santé concourent à l’amélioration de la santé de la population. Entretenus pour la plupart par l’État haïtien, ces techniciens offrent des services à moindre coût dans plusieurs régions du pays, principalement celles touchées par le séisme.

Ces institutions se santé sont partiellement approvisionnées en matériels ou accessoires médicaux, tels que microscopes, médicaments, dépliants d’éducation sanitaire, etc. En outre, le MSPP a mis en place en 2008 un Système national d’information sanitaire (SNIS) pour rendre disponibles les informations sur l’état de santé, les services et les ressources en vue d’orienter l’action sanitaire.

Dans le cadre du Plan national de santé, le MSPP a mis en œuvre en 2003 un Programme d’organisation et de rationalisation du secteur de la santé visant particulièrement l’amélioration de la santé maternelle et infantile, spécifiquement au niveau de la qualité, de l’accès et de l’efficience des services fournis. Pour être plus précis, le programme a notamment pour cible, les femmes en âge de procréer (celles comprises entre 15 et 49 ans) et les enfants de moins de 5 ans. Toutefois, les résultats escomptés ne sont pas encore atteints, les Unités Communales de Santé (UCS) opérationnelles sont actuellement six après avoir été 58.

C.Prévention des infections VIH/sida

Le Comité recommande à Haïti: a) de redoubler d’efforts pour prévenir les infections par le VIH/sida, en prenant en considération les recommandations du Comité lors de sa journée de débat général sur les enfants vivant dans un monde marqué par le VIH/sida; b) de prendre d’urgence des mesures pour prévenir la transmission de la mère à l’enfant, entre autres choses en combinant ces mesures aux activités de lutte contre la mortalité maternelle, prendre les mesures adéquates pour atténuer les répercussions du décès de parents, d’enseignants ou d’autres personnes victimes du VIH/sida sur la vie familiale et affective des enfants et leur éducation ainsi que sur leur accès à l’adoption; c) d’amplifier ses efforts pour sensibiliser les adolescents en particulier les plus vulnérables au VIH/sida; d) demander une assistance technique supplémentaire, notamment à ONUSIDA.

L’épidémie du VIH/sida reste aujourd’hui encore un grand défi pour le système de santé haïtien. Beaucoup d’efforts ont été consentis pour contrôler son évolution; la prévalence du VIH/sida a chuté de manière significative passant de 6 % environ dans les années 90,4 % en 2000 à 2,2 % en 2012 (EMMUS V).

L’épidémie est de type généralisée avec tendance à la féminisation et à la juvénilisation. En effet, la prévalence est de 2,7 % chez les femmes contre 1,7 % chez les hommes. Pour les 15-24 ans, la prévalence est de 0,6 % pour les hommes et de 1,5 % pour les femmes, les jeunes âgés de 15-24 ans représentant plus d’un tiers de tous les nouveaux cas d’infection au VIH. Selon EMMUS V, la prévalence du virus est nettement plus élevée dans les camps (3,9 %), surtout parmi les femmes qui y résident (5,7 %). Ces données concordent avec une autre étude de PSI qui signale que près de 70 % des nouvelles contaminations sont constituées de femmes et que le sous-groupe des travailleuses de sexe est particulièrement touché avec une prévalence de 8,4 %. Une comparaison avec les données de 2009, 2010 et 2011 est fournie en tableau 12a et le tableau 12b annexé donne les chiffres d’EMMUS V. Selon les chiffres du MSPP/NASTAD (tableau 12c), 4,7 % des enfants de 0 à 14 ans seraient infectés par le VIH/sida en 2011.

Par ailleurs, un des effets les plus dévastateurs de l’épidémie du VIH est l’augmentation du nombre d’orphelins et d’enfants vulnérables suite au décès ou à la maladie grave de l’un des parents. Ainsi en 2012, sur les 88 200 enfants orphelins du syndrome d’immunodéficience acquise (sida) cumulés projetés, 70 970 ont été enrôlés dans des programmes dont seuls 43 659 soit 61,5 % étaient actifs jusqu’en 2010.

En termes de prévention et d’accompagnement, plusieurs mesures et programmes ont été mis en place par l’État. Le MSPP a établi un Plan stratégique national contre le VIH/sida (2002-2006) comportant une double dimension: prévention et prise en charge. Ce Plan stratégique national multisectoriel (PSNM) couvre un champ d’actions plus étendu, en permettant une plus grande intégration des secteurs étatiques particulièrement dans la lutte contre le VIH/sida et plus généralement dans l’amélioration durable de la santé de la population. Le MENFP, pour sa part, donne sa contribution à travers son Plan stratégique sectoriel de l’éducation (PSSE) à la prévention et à la lutte contre le VIH/sida, mis en place depuis 2002 et comprenant des mesures préventives, vulgarisées à l’aide d’émissions radio-télédiffusées destinées à la jeunesse.

Entre janvier 2011 et décembre 2012, dans le cadre du PSNM, le Programme national de lutte contre le sida (PNLS) a été élaboré pour prévenir la hausse du risque d’infection liée au VIH/sida suite à l’aggravation des problèmes socio-économiques et de l’endommagement des structures sanitaires post-séisme. La cible du PNLS est «la population des camps d’hébergement, les jeunes de 10-24 ans, les femmes enceintes, les femmes en âge de procréer (15-49 ans), les personnes à mobilité réduite».

Beaucoup de facteurs favorisent l’expansion du VIH/sida en Haïti, parmi lesquels il faut citer selon une analyse du MPCE, la pauvreté, la multiplicité des partenaires sexuels, l’accès insuffisant aux soins de santé et aux informations relatives à la santé, la stigmatisation des personnes affectés et impactés par le VIH/sida, l’insuffisance des mécanismes de contrôle et de traitement des infections sexuellement transmissibles. Il convient de mentionner l’importance des comportements sexuels à risque comme facteur dans la compréhension de la prévalence du VIH/sida. En effet, le nombre de partenaires sexuels et les rapports non protégés doivent être considérés. Pour exemple, 57 % des femmes ayant connu plus de deux partenaires au cours de 12 mois n’ont pas utilisé de condoms lors de leurs derniers rapports sexuels (EMMUS V).

Pour ce qui est de la connaissance du VIH par les jeunes, la proportion des 15-24 ans qui possèdent les connaissances exactes sur les moyens de prévenir la transmission sexuelle du VIH et qui en rejettent les principales idées fausses est de 31,1 %. EMMUS V a inclus toute une série de questions sur la connaissance du VIH/sida, ses modes de transmission et de prévention ainsi que celles sur les comportements à risque. D’après les résultats de cette enquête (tableau 10b), près de 100 % des femmes et des hommes âgés de 15 à 49 ans ont déclaré connaître ou avoir entendu parler du VIH/sida, cette connaissance constituant un élément positif dans la lutte engagée contre ce fléau. Pourtant, si 97 % de la population est informée sur les modes de contamination, la couverture des tests de dépistage reste élevée pour les deux sexes, 97 % pour les femmes et 94 % pour les hommes.

Avant d’atteindre 15 ans, 13 % des femmes et 28,3 % d’hommes enquêtés âgés de 20-49 ans, avaient déjà eu des rapports sexuels. La proportion des 15-24 ans qui déclare avoir utilisé un préservatif lors du dernier rapport sexuel à risque s’élève à 51 % en 2011 pour les jeunes garçons contre 23 % pour les jeunes filles de la même tranche d’âge. En matière de conseil et dépistage, selon EMMUS V, seuls 7 % des garçons (15-19 ans) contre 18 % des filles de même âge se sont dépistés et connaissent leur résultat.

En matière de conseil et dépistage du VIH, seulement 39 % (soit 354 institutions de santé sur 908) des institutions de santé offrent des services de dépistage – 85 % des hôpitaux / 11 % des dispensaires. Ainsi 50 % des institutions de santé privées offrent des services de dépistage, 30 % des structures publiques. D’autre part, des points de services cliniques ont été établis dans plusieurs villes du pays, afin de sensibiliser la population, notamment les jeunes, sur le VIH/sida.

La prise en charge comprend l’hébergement des enfants infectés dans des centres de traitement et leur placement sous antirétroviraux (ARV) pédiatriques. L’État, parallèlement à ou conjointement avec d’autres institutions, fournit un accompagnement médical et psychosocial aux personnes vivant avec le VIH/sida, notamment celles victimes de stigmatisation et de discrimination. Ainsi, ont été institué des centres spéciaux en termes de soins et de prévention ainsi que des groupes de support dans tout le pays en vue de venir en aide sur le plan psychologique aux personnes vivant avec le VIH/sida (PVVIH). À cet effet, le MSPP a produit et diffusé en 2003 une première version du manuel de normes de «prise en charge clinique et thérapeutique» dans le but de standardiser les soins destinés aux PVVIH. Vu les avancées scientifiques et la disponibilité de nouvelles molécules d’ARV sur le marché, le MSPP a actualisé ce «Manuel de prise en charge clinique et thérapeutique des adultes et adolescents» en 2008.

Concernant la transmission du virus de la mère à l’enfant, grâce aux partenariats développés entre l’État et d’autres organisations dont l’UNICEF, des progrès significatifs sont réalisés au travers notamment du Programme national de Prévention de la transmission de la mère à l’enfant (PTME) qui accompagne un nombre croissant de femmes enceintes. Le nombre de centres PTME est passé de de 77 à 88 en 2006 et 139 en 2013 selon le MSPP. En 2006, 12 % des femmes enceintes testées séropositives avaient accès aux traitements antirétroviraux, permettant de prévenir la transmission du virus au bébé. La prévalence du VIH/sida chez ces dernières a ainsi connu une baisse quasi continue et considérable durant la période 1993–2009: soit 9,4 % à 3,0 % pour le milieu urbain et de 3,5 % à 2,4 % pour le milieu rural (tableau 11a). De 2010 à 2012 le programme national PTME a permis le dépistage de 149 000 femmes enceintes et fourni un traitement antirétroviral à 1 875 femmes enceintes séropositives.

En matière de prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant, en 2012 environ 51 % de femmes enceintes ont été testées pour le VIH et la prévalence du VIH chez ces dernières s’élevait à 2,3 %. En outre, environ 50 % de ces femmes ont bénéficié de la prophylaxie aux ARV pour prévenir la transmission du VIH à leurs enfants. Des mêmes sources, seuls 33,8 % des enfants nés de mère séropositive ont été dépistés avant l’âge de 2 mois. En 2012, près de 12 000 enfants vivaient avec le VIH dont 47 % étaient sous traitement antirétroviral (TAR) en 2012.

Force est de constater que du protocole TAR est diversement mis en œuvre et qu’il n’y a que 14 % des structures de santé qui administrent effectivement des ARV. En outre, on observe une régression à partir de 2010, période caractérisée par des catastrophes et des urgences survenues au pays; la proportion d’enfants sous TAR passe ainsi de 62 % à 45 % en 2011 pour remonter légèrement à 47 % en 2012.

En Haïti, il existe 126 institutions de santé (tableau 11b) qui dispensent des ARV aux personnes vivant avec le VIH (adultes, enfants et jeunes compris). Dans leur implantation, ce sont des services mis en place pour desservir les adultes. En plus, la majorité de ces institutions se retrouvent en milieu urbain et au niveau des chefs-lieux des communes. Ce qui soulève la question de la prise en charge des coûts indirects (transports, transit en cas de besoin) pour une population vivant sous le seuil de la pauvreté et touchée par les effets dévastateurs de la maladie.

FOSREF, Volontariat pour le développement d’Haïti (VDH) et PSI avec leurs interventions multiservices sont trois organisations particulièrement bien connues pour leur travail de sensibilisation avec les jeunes haïtiens. Pour les adolescents et jeunes, il n’existe que 16 institutions offrant des services adaptés (tableau 11c), 56 % concentrées dans le département de l’Ouest. Ces cliniques jeunes mises en place par FOSREF et GHESKIO ne peuvent à elles-seules absorber tous les besoins des jeunes en matière du dépistage

Plusieurs programmes des Nations Unies ont contribué aux travaux sur le VIH/sida. L’ONUSIDA a mobilisé des groupes techniques de travail pour développer ses priorités stratégiques sur l’accès étendu au dépistage et counseling volontaire, l’amélioration du système de surveillance nationale, la réduction de la transmission du VIH, l’amélioration des soins aux personnes malades et la promotion de la femme. L’UNFPA a financé des programmes visant les jeunes, dont POZ (Promoteurs Objectif Zéro sida), FOSREF (Fondation pour la santé reproductive et l’éducation familiale), et VDH (Volontariat pour le développement d’Haïti). L’UNICEF a été investi avec les ONG sur la transmission verticale, avec entre autre la fourniture d’ARV. Le PNUD a financé des recherches en matière de réponses communautaires au VIH/sida tandis que l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) a collaboré avec le CDC pour améliorer les systèmes de surveillance du VIH/sida et avec l’ONG POZ pour la prise en charge d’une ligne téléphonique ouverte pour des questions relatives à la santé reproductive. L’USAID a appuyé diverses organisations dans les domaines de la prévention, des services et du traitement, du plaidoyer et de la mobilisation communautaire. Geskio et Zanmi Lasanté ont encore procédé à des tests de vaccins.

Cette chute serait due au fait que jusqu’en 2009, il y avait environ 10 ONG qui prenaient en charge cette problématique mais avec les catastrophes que le pays a connues et les ressources financières diminuant, il y a à peine deux organisations qui continuent à en faire une priorité.

Pour le MENPF il existe des curricula développés en rapport avec la problématique du VIH. Le secteur éducatif privé dispense aussi des leçons qui intègrent la problématique dans le cadre de l’éducation sexuelle.

D.Les efforts tendant à remédier aux problèmes les plus courants dans le domaine de la santé et à promouvoir la santé et le bien-être physiques et mentaux des enfants et à prévenir et à combattre les maladies transmissibles et non transmissibles

Beaucoup d’informations relatives à cette section sont fournies dans les sections précédentes.

Cependant, l’épidémie de choléra survenu en octobre 2010 mérite une attention particulière constituant un problème majeur de santé publique en Haïti. Du fait de la faiblesse des taux d’accès à l’assainissement et l’insuffisance de l’hygiène décrite ci-dessus, l’épidémie la plus vaste du monde, enregistrée dans un seul pays avec un total cumulé de 668 270 de personnes atteintes dont et 8 197 décès, pour un taux de létalité de 0,9 %, au 28 juillet 2013, soit plus de 2 ans et demi après le début de l’épidémie en octobre 2010.

EMMUS V a mis en évidence qu’entre octobre 2010 et 2012, 16 % des ménages interrogés ont déclaré qu’au moins un des membres de leur famille avait été atteint par la maladie, qu’il soit décédé ou encore en vie. Si on rapporte ce nombre à la population totale des ménages enquêtés, 5 % de la population totale auraient été affectées. Parmi les personnes touchées par le choléra, 35,1 % avaient moins de 20 ans. Parmi les personnes décédées, 24,9 % avait moins de 20 ans, parmi les survivants 35,7 % avaient moins de 20 ans.

Du 1er décembre 2012 au 18 mars 2013, 24 192 cas suspects de choléra et 205 décès associés ont été recensés par le système de surveillance. Cependant, ce nombre global de cas suspect, encore élevé, cache une tendance marquée à la décroissance et une hétérogénéité spatiale.

Aujourd’hui encore, un déficit en ressources humaines persiste pour les actions de lutte communautaire ciblées, dont un manque d’épidémiologistes. Les postes de brigadiers choléra sont insuffisamment financés et le déploiement des agents de santé polyvalents n’est pas encore systématique. De plus, nombre de financements se sont achevés fin 2012, et les Unités communales de santé (UCS) sont souvent dans l’incapacité de supporter les agents chargés de la sensibilisation et de la distribution d’intrants. Depuis novembre 2012, les 140 communes du pays ont deux techniciens en eau potable et assainissement communaux (TEPAC), dont la mission est le recensement des points d’eau et la lutte contre les urgences.

Le manque de moyens logistiques rend difficiles les investigations de terrain et les interventions sur les foyers. Les réserves en produits de chloration à domicile restent très insuffisantes en 2013.

Tout ceci s’accompagne de problèmes de coordination entre les acteurs de la réponse et ceux responsables de la production, de la diffusion et de l’investigation des alertes épidémiologiques. Au sein du MSPP, la circulation des informations entre l’UADS et DELR n’est pas encore optimale et la collaboration est à renforcer entre épidémiologiste et coordinateurs choléra quand, au niveau local, les brigadiers choléra restent à être connus des institutions sanitaires. La tenue des réunions sectorielles santé et WASH est en cours de renforcement tout comme le contrôle de l’État haïtien sur le secteur commercial et sur toutes les ONG impliquées.

E.La santé des adolescents et leur éducation sexuelle

Le Comité recommande à l’État partie: a) de prendre toutes les mesures nécessaires pour définir des politiques et programmes adaptés en matière de santé des adolescents, en portant une attention toute particulière aux adolescentes; b) de renforcer l’éducation sexuelle et génésique ainsi que les services de santé mentale et services de conseil dans le respect de la sensibilité des adolescents, et de les rendre accessibles aux adolescents.

Dans le souci de respecter la Convention, l’observation générale (CRC/GC/2003/4) du Comité et en réponse aux recommandations de ce dernier, l’État haïtien combine ses efforts avec des ONG et organisations internationales, notamment FOSREF, VDH, l’UNICEF, l’ONUSIDA, PSI et World Relief, en vue de fournir aux jeunes et adolescents un accompagnement raisonnable. Les efforts de l’État haïtien et de ses partenaires consistent en la mise en application de divers programmes, comme les campagnes de sensibilisation relatives à la prévention des maladies sexuellement transmissibles, particulièrement le VIH/sida, et des grossesses précoces, l’éducation à la santé sexuelle, reproductive et familiale, l’offre des services cliniques aux jeunes, la création des maisons de jeunes. Ces maisons sont des centres communautaires dans l’ensemble des départements offrant aux jeunes l’amélioration de leur qualité de vie, le développement de leurs compétences personnelles et sociales afin qu’ils puissent faire une heureuse transition vers le monde adulte.

Les chiffres d’EMMUS V indiquent que 8,7 % des jeunes femmes de 15 à 19 ans ont recours à la contraception, contre 21,5 % en 2005-2006. Selon les chiffres de 2005-2006, 11,6 % de femmes ont eu leur premier enfant avant 20 ans, 11,2 % en 2012. Néanmoins, la situation des jeunes filles ayant des grossesses précoces est parfois inquiétante comme en témoignent les professionnels des services sociaux.

F.La situation particulière et la santé des enfants en situation de handicap

Les enfants en situation de handicap, compte tenu de leur situation particulière, constituent pour le Comité des droits de l’enfant une grande source d’inquiétudes. Le Comité a ainsi recommandé: a) de définir une stratégie globale, et les plans d’action qui s’imposent, en faveur des enfants handicapés; b) de rassembler des données sur les enfants handicapés afin de déterminer leur situation en termes d’accès à des soins de santé adaptés, aux services d’éducation et au marché de l’emploi; c) de prendre note des Règles de l’ONU pour l’égalisation des chances des handicapés (résolution 48/96 de l’Assemblée générale, annexe) et des recommandations adoptées par le Comité à sa journée de débat général sur les droits des personnes handicapées (CRC/C/69, par. 310 à 339); d) de dégager les ressources nécessaires pour renforcer les services en faveur des enfants handicapés, soutenir leur famille et former des professionnels dans ce domaine; e) de demander une assistance, entre autres auprès de l’UNICEF et de l’OMS.

Le MAST à travers ses recherches, retient trois types de causes du handicap: «les problèmes génétiques, le faible accès aux soins de santé de base ou la méconnaissance de ceux-ci, les conséquences des mauvais traitements ou actes violents (y compris ceux exercés sur la mère de l’enfant durant la grossesse)».

1.Définition d’une stratégie globale et des plans d’action en faveur des enfants en situation de handicap

En premier lieu, comme mesure administrative, l’État a créé en mai 2007 sous le contrôle du MAST, le Bureau du Secrétaire d’État à l’intégration des personnes handicapées (BSEIPH), dont la principale mission d’intervenir en matière de prévention des invalidités et de travailler à l’intégration des personnes en situation de handicap.

Le Parlement a ratifié la Convention interaméricaine pour l’élimination de toutes les formes de discrimination contre les personnes handicapées et la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées ainsi que ses deux Protocoles additionnels en 2009. En exécution des textes internationaux ratifiés, une loi relative à l’intégration des personnes handicapées votée en 2009 et promulguée en 2012 vise à promouvoir les principes et des valeurs concourant à l’intégration pleine et entière des personnes handicapées dans toutes les sphères de la société haïtienne. Elle définit les grands axes concernant le droit au respect et au développement des enfants en situation de handicap.

De plus, l’État dispose depuis cette même année d’une Politique nationale du handicap relative aux personnes handicapées; une stratégie globale concernant spécialement les enfants en situation de handicap reste à mettre en œuvre. Actuellement le BSEIPH, dans le but d’implémenter la Politique nationale du handicap mise sur pied par le MAST en 2009, travaille sur plusieurs projets tels que: le projet de création de l’institut haïtiano-brésilien de réadaptation qui s’attachera principalement à former des professionnels et à offrir des services en matière de réadaptation, le projet de transport adapté, en vue de faciliter la mobilité des personnes handicapées par la mise en place, au niveau du transport en commun, des bus adaptés et le projet d’un plan national d’éducation massive, car le nombre d’enfants en situation de handicap non scolarisés est très élevé. Sur la population d’enfants en situation de handicap en âge de fréquenter l’école estimée à 120 000, seuls 2 000 y vont.

2.Données chiffrées sur les enfants en situation de handicap

Il n’est pas encore établi de banque de données spéciale sur ces enfants. Les organismes de la société civile travaillant avec eux fournissent des chiffres approximatifs. On estime à 800 000 le nombre des personnes handicapées en 2003 (tableau 13), illustrant leur répartition suivant leur déficience), avec un nombre d’enfants compris entre 200 000 et 300 000.

En outre, le BSEIPH envisage de réaliser conjointement avec l’IHSI, avec le support technique du Gouvernement brésilien, une enquête sur la population des personnes handicapées en Haïti, afin de parvenir à l’établissement d’une banque de données fiables. Les personnels qualifiés pouvant offrir un encadrement aux enfants en situation de handicap sont en nombre extrêmement réduits.

3.Égalité des chances des enfants en situation de handicap par rapport aux autres et ressources nécessaires en faveur d’eux

Depuis la création du BSEIPH en 2007, l’État s’engage à offrir aux enfants en situation de handicap les mêmes droits que les autres.

Dans le domaine de l’éducation, des informations complémentaires sont fournies sous le volet Éducation. Néanmoins, on peut noter qu’il existe environ neuf établissements dans le département de l’Ouest, un dans le Nord, quatre dans le Sud et un dans le Sud-Est qui œuvrent pour la scolarité des enfants en situation de handicap. Ces établissements touchent, au total, près d’un millier d’enfants. Les Écoles spéciales les plus connues sont Saint Vincent de Paul (œuvre de l’église épiscopale), l’Institut Monfort et le Centre d’éducation spéciale. Ces Institutions garantissent des services de formation professionnelle, de médecine physique et mentale, de réadaptation et des matériels les aidant à surmonter leurs handicaps. On doit aussi mentionner que l’Hôpital Espoir offre aussi des services aux enfants en situation de handicap. Encore le BSEIPH a lancé, avec le support de l’USAID, un projet portant sur le réaménagement de certains bâtiments scolaires afin que ceux-ci répondent aux normes d’accessibilité universelle.

Dans le secteur de la santé, le BSEIPH a mis en place un partenariat avec l’HUEH (Hôpital de l’Université d’État d’Haïti) et avec les hôpitaux du réseau de Développement des activités de santé en Haïti (DASH) permettant aux enfants en situation de handicap de bénéficier des soins à des coûts préférentiels.

Le BSEIPH entreprend également des formations relatives à l’apprentissage de la langue des signes, le développement du handisport de concert avec plusieurs autres organismes concernés spécialisés, le renforcement des associations des personnes handicapées etc. Ces projets sont établis, parallèlement, au Programme d’intégration communautaire de l’enfant handicapé, lancé en 2007 par l’État haïtien sous la responsabilité et la coordination du MAST. Ce programme, dont les objectifs à atteindre s’étendent sur la période 2008-2013, visait à la «pleine réalisation des droits des filles et des garçons à besoins spéciaux à la survie, au développement et au bien-être». Encore, malgré des difficultés en ressources, l’État, à travers le BSEIPH, aide quelques familles ayant des enfants en situation de handicap.

G.Les mesures visant à interdire et à éliminer toutes les formes de pratiques traditionnelles préjudiciables, notamment les mutilations génitales féminines et les mariages précoces et forcés

Les mutilations génitales ne sont pas pratiquées en Haïti. Si les mariages forcés ne sont pas légion, on note seulement des cas isolés, suite à des avis malheureux de certains juges de paix qui conseillent aux parents de jeunes filles victimes de viol à se marier avec leurs agresseurs. Ces cas ne sont pas dénombrés officiellement mais ne semblent pas fréquents. Néanmoins il convient de noter que tout mariage forcé est illégal dans le pays.

H.La protection des enfants contre l’usage de substances

Un Plan national de lutte contre la drogue a été élaboré en 2003 visant des programmes de réhabilitation, de traitement et de réinsertion sociale existent au profit des toxicomanes et particulièrement pour les enfants et adolescents. Il convient de faire état de la loi relative au contrôle et à la répression du trafic illicite de drogue qui en son article 65 stipule que toute personne qui fournit à un mineur l’un des inhalants chimiques toxiques figurant sur la liste établie par le MSPP est passible d’une peine d’emprisonnement de trois ans et d’une amende de 100 000 à 500 000 gourdes.

Selon la Commission nationale de lutte contre la drogue (CONALD) en 2005, 53 % des élèves ont déjà consommé de l’alcool, 11,12 % ont déjà fumé une cigarette, 29,70 % ont utilisé des tranquillisants et 11,04 % une substance illicite. La CONALD en partenariat avec l’IBESR a aussi fait des interventions de prévention et de prise en charge auprès des enfants incarcérés. La CONALD a ensuite mis en place un programme d’étude sur la toxicomanie pour former des professionnels en toxicomanie (travailleurs, psychologues, médecins). La première promotion a touché 22 personnes en 2007-2008, la seconde 20 en 2008-2009. Suite aux résultats d’une enquête en 2009 faisant état de la consommation d’alcool par près de 60 % d’écoliers et de la consommation par 53 % de substances illicites, la CONALD a lancé en 2013 une campagne de lutte contre la consommation de drogue en milieu scolaire.

I.La protection des enfants dont les parents sont incarcérés et des enfants vivant en prison avec leur mère

Il n’y a pas à date d’enfants en prison avec leurs mères. Néanmoins quand une mère accouche en prison, l’enfant reste avec elle pour un maximum de trois mois pour permettre l’allaitement. Ensuite l’enfant est placé dans sa famille élargie ou pris en charge par l’IBESR. Pendant la période d’allaitement, l’enfant est amené à sa mère quotidiennement.

Le Service social pénitentiaire de l’IBESR ne réalise pas de manière systématique la prise en charge des enfants de parents incarcérés. Par contre, en cas d’incarcération d’un ou des deux parents, une visite est assurée par l’IBESR dans la famille pour évaluer la situation des enfants. Une prise en charge par les services sociaux des enfants est effectuée si et quand nécessaire. Si les parents l’exigent, l’IBESR doit effectuer un suivi régulier de la situation de prise en charge de l’enfant en famille élargie.

J.Le niveau de vie et les mesures (notamment la fourniture d’une aide matérielle et les programmes de soutien dans les domaines de la nutrition, de l’habillement et du logement) destinées à promouvoir le développement physique, mental, spirituel, moral et social de l’enfant et à réduire la pauvreté et les inégalités

Les informations sont fournies dans les autres sections.

K.La sécurité sociale et les établissements de garde d’enfants

Le système de sécurité sociale est principalement rattaché au MAST à travers les organismes suivants: l’Office d’assurance accident du travail maladie-maternité (OFATMA), l’Office national d’assurance-vieillesse (ONA), la Direction de la pension civile de retraite, la Caisse d’assistance sociale (CAS), l’Entreprise publique de promotion des logements sociaux (EPPLS) et l’IBESR. Les trois premières institutions n’offrent pas de services directs aux enfants.

Il existe un service de garderie payant exclusivement géré par le secteur privé. Néanmoins ce service n’est pas accessible aux familles vulnérables.

L.Le niveau de vie et les mesures d’aide matérielle

Selon le dernier rapport sur l’Indice de développement humain (IDH) publié par le PNUD au mois de mars 2013, Haïti occupe la 161e place sur 187 pays. De ce classement, on déduit aisément la situation de pauvreté dans laquelle vivent la grande majorité des enfants d’Haïti.

De plus, le Gouvernement a mis en place d’autres programmes à travers le Fonds d’assistance économique et sociale (FAES) et certains ministères comme le MPCE. Le Programme le plus important est Ede Pèp mis en place en 2012 qui consiste à apporter un appui aux personnes et familles vulnérables. Parmi ces mesures, il faut noter l’existence en 2013 du programme Ti Manman Cheri (1 000 gourdes sont données mensuellement aux mères ayant plus de trois enfants), des paniers de solidarité sont donnés aux plus vulnérables, les Cantines mobiles (des camions distribuent des plats chauds aux personnes vulnérables dans tous centres urbains), la mise en place de 60 Restaurants communautaires (30 existent pour les personnes les plus vulnérables) ou les boulangeries communautaires qui fournissent du pain gratuitement. Le programme Aba Grangou (programme visant à réduire la faim de 50 % d’ici fin 2016 et à l’éradiquer à l’horizon 2025. Il consiste dans l’alimentation scolaire, dans la prévention de la malnutrition et la valorisation des produits locaux.

Il importe de souligner que certains programmes sont soutenus par la Communauté internationale, avec au premier chef, la Banque mondiale, la BID et les fonds Petrocaribe.

VII.Éducation, loisirs et activités culturelles

A.Le droit à l’éducation

Le Comité des droits de l’enfant a recommandé à l’État haïtien de a) s’attacher à mettre en œ uvre rapidement et efficacement le Plan national d’éducation et de formation, b) de poursuivre ses efforts tendant à assurer à tous les enfants, en particulier aux filles, l’égalité d’accès à l’éducation, en portant une attention particulière aux enfants des zones rurales et isolées; c) prendre les mesures nécessaires pour garantir l’accès à des programmes adaptés et adéquats conçus pour les enfants en situation de vulnérabilité, tels que les enfants des rues, les restaveks et les enfants ou les adolescents en retard scolaire; d) de prendre les mesures voulues pour identifier les causes des forts taux de redoublement et d’abandon scolaire enregistrés dans les écoles primaires et de s’employer à remédier à la situation; e) de mieux contrôler les programmes scolaires et la qualité de l’enseignement dispensé dans les écoles privées; f) d’introduire, de renforcer et de systématiser l’enseignement des droits de l’homme, y compris des droits de l’enfant, dans les programmes scolaires, et ce dès le primaire; g) d’assurer une formation adéquate aux enseignants; h) de revoir sa politique de façon à prendre les rênes du secteur éducatif, notamment en élargissant les pouvoirs de la Commission nationale de partenariat; i) de demander une assistance technique, entre autres à l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture et à l’UNICEF.

En termes de suivi, l’État haïtien a mis sur pied une politique d’éducation de masse, y compris un plan de réforme de secteur 2010-2015 et a renforcé la formation des maîtres et l’orientation professionnelle.

1.Politique d’éducation de masse

En 2008, a été créé le Groupe de travail sur l’éducation et la formation (GTEF), lequel a proposé un Pacte national d’éducation entre l’État et les acteurs privés du système éducatif qui vise à œuvrer à son amélioration. Ce Pacte a le double mandat de recommander à l’exécutif les stratégies et initiatives pour accroître l’accès et la qualité de l’école haïtienne et moderniser l’organisation et le fonctionnement du système éducatif national et d’élaborer et soumettre à la discussion un projet de pacte national sur l’éducation. Le mandat du GTEF a été reconduit en 2009 dans les mêmes termes et renouvelé en 2010 avec un renforcement de sa mission incluant la reconstruction des infrastructures scolaires.

Suite aux recommandations du Groupe de travail sur l’éducation et la formation en 2008, le Plan opérationnel du système éducatif haïtien (PO) en 2010 et par le Programme de scolarisation universelle gratuite et obligatoire (PSUGO) en 2011 dans le cadre de la politique d’éducation de masse.

Plan opérationnel du système éducatif haïtien (PO)

L’État a développé pour cinq années (2010-2015) le Plan opérationnel du système éducatif haïtien (PO) en réponse aux recommandations du GTEF. Ceci a été fait avec l’aide technique et financière de divers partenaires dont l’USAID, la Coopération espagnole, la Coopération canadienne, l’Union européenne, la Banque mondiale et l’UNICEF. Le coût de la mise en œuvre du PO est évalué à environ 172 000 000 000 gourdes (4,3 milliards US$). Le PO poursuit les objectifs suivants 1) une école nationale accessible à tous les Haïtiens et Haïtiennes, quelle que soit leur lieu de résidence et leur situation sociale et 2) une éducation de qualité appuyée sur un socle commun de connaissances, de savoir-faire dispensés par des enseignants et enseignantes compétents. Dans le cadre du PO de 2010 à décembre 2012, 25 milliards 412 millions de gourdes (635,3 millions US$) ont été investis dans le secteur, dont 48 % proviennent du Trésor Public.

L’État haïtien reconnaît cependant que certains axes prévus au PO ne sont pas encore exécutés, faute de financement car seulement quelque 10 % du montant promis par les bailleurs a été alloué. Cette difficulté a été soulignée par le MENPF à la cérémonie d’ouverture de la revue sectorielle du PO de février 2013 en présence des partenaires techniques et financiers.

Programme de scolarisation universelle gratuite et obligatoire (PSUGO)

Ce programme débuté en l’année scolaire 2011-2012 s’inscrit dans l’objectif du millénaire et vise indistinctement tous les enfants en âge scolaire notamment ceux de 6 à 12 ans, au niveau des 1er et 2e cycles du Fondamental. Le PSUGO répartit les enfants comme suit:

Si l’enfant a entre 6 et 7 ans d’âge, il bénéficiera de six années de scolarisation gratuite;

Si l’enfant a entre 8 et 9 ans d’âge, il suivra un programme accéléré de 4 ans;

Si l’enfant est âgé de 10 ans et plus, il bénéficiera de deux années de scolarisation. C’est dans cette perspective qu’en l’année 2014, l’État haïtien organisera un examen officiel pour les enfants du PSUGO recrutés dans cette tranche d’âge.

En vue de réaliser le PSUGO, l’État a recruté des diplômés de l’École nationale d’instituteurs (ENI), de la Formation initiale accélérée et des CAPistes (détenteurs d’un CAP, Certificat d’aptitude professionnelle) auxquels il a donné une formation spéciale. Le coût de ce programme pour 5 ans est de 11 milliards 728 millions de gourdes (293,2 millions US$). Actuellement 1 288 956 enfants à travers 10 020 écoles publiques et non publiques réparties sur tout le territoire de la République bénéficient de ce programme pour un montant déjà investi de 649 062 894 gourdes (16 millions US$) (tableau 14).

La mise en œuvre du PO et du PSUGO a permis d’augmenter la fréquentation scolaire. En effet, le taux net de fréquentation scolaire pour le niveau primaire est estimé à 77 %, ce qui signifie que près de huit enfants de 6 à 11 ans sur dix fréquentent l’école primaire. Selon EMMUS V, le taux net de fréquentation scolaire pour le niveau primaire est plus élevé en milieu urbain (85,9 %) qu’en milieu rural (72,8 %). Les plus forts taux nets de fréquentation scolaire sont observés dans l’Aire métropolitaine du département de l’Ouest (86,3 %) et dans le département des Nippes (85,7 %). Le reste de l’Ouest et de l’Artibonite présentent les taux les moins élevés avec 69,7 % et 69,8 % respectivement. Au niveau secondaire, c’est-à-dire parmi les enfants âgés de 12 à 17 ans, le taux net de fréquentation scolaire enregistré est beaucoup plus faible avec 25,4 %. On note une grande différence entre les milieux urbain (40,6 %) et rural (15,7 %). Ce taux est de 31,7 % pour les jeunes vivant dans les camps. Les départements de la Grande-Anse (13,5 %), du Centre (15,9 %) et du Sud-Est (16,4 %) se caractérisent par les taux nets de fréquentation scolaire les plus faibles. À l’opposé, l’Aire Métropolitaine de l’Ouest (43,4 %) enregistre le niveau le plus élevé (tableau 15).L’indice de parité de 1,35 montre une discrimination positive pour les filles de 12-17 ans, dont 29 % sont scolarisés contre 22 % pour les garçons du même âge.

Par ailleurs, en terme de suivi de la recommandation de garantir l’accès à des programmes adaptés et adéquats conçus pour les enfants en situation de vulnérabilité, tels que les enfants des rues, les enfants en domesticité et les enfants ou les adolescents en retard scolaire, l’État a créé une Commission de travail sur l’intégration des enfants des rues à l’école dans le cadre du PSUGO. Pour l’année académique 2012/2013, 723 enfants ont bénéficié de ces initiatives pris en charge dans les centres de Delmas (266), à Croix-des-Bouquets (350) et Port-au-Prince (107) selon la Commission; 32 enseignants diplômés de Formation initiale accélérée et 12 travailleurs sociaux ont été recrutés. Les enseignants sont assignés en fonction de l’effectif de chaque centre, deux ou trois affectés par classe, ce afin d’aplanir les difficultés en terme de communication enseignant-apprenant. Conformément à l’article 32.8 de la Constitution de 1987 amendée qui dispose que «L’État garantit aux personnes à besoins spéciaux la protection, l’éducation et tout autre moyen nécessaire à leur plein épanouissement et à leur intégration ou réintégration dans la société», l’État haïtien a offert à ces enfants les services suivants: un plat chaud par jour, 2 uniformes, 1 kit scolaire, prise en charge complète (chaussures- sous-vêtements-kits hygiéniques, coupe de cheveux, etc.), transport (1 bus de la compagnie Dignité), téléviseurs et DVD Player installés dans les centres (tableau 16).

2.Éducation pour les enfants en situation de handicap

En ce qui a trait aux enfants en situation de handicap, le Bureau du Secrétaire d’État à l’intégration des personnes handicapées (BSEIPH) a favorisé, durant la période 2008-2010, la scolarisation de jeunes et d’enfants en situation de handicap en attribuant des bourses d’études à 23élèves d’une part et l’intégration de 421élèves en situation de handicap dans des écoles régulières d’autre part. De plus, de novembre 2011 à décembre 2012, 56élèves en situation de handicap de trois départements (Ouest, Nord et Sud) ont reçu une subvention scolaire ou une bourse complète.

Encore il faut noter depuis la création de la Commission de l’adaptation scolaire et d’appui social (CASAS) en 1993, l’élaboration du curriculum pour les déficients mentaux légers en 1997 (CRC, 2002), la mise en place du Secrétariat d’État aux handicapés en 2007 et l’incorporation des problématiques du handicap dans l’élaboration du Plan national de protection du MAST la même année.

Les enfants en situation de handicap demeurent une préoccupation majeure, malgré les avancées faites à date. Les besoins de ces enfants sont peu connus et les données les concernant sont limitées. Ce n’est que dans le dernier recensement scolaire 2010-2011 que le DPCE a recensé cette catégorie d’enfant séparément.

Situation de l’enfant à besoins spéciaux dans le préscolaire. Dans le préscolaire, il y a 941 enfants handicapés au total avec 71 dans les écoles publiques contre 870 dans les écoles privées. Cependant il n’y a pas de détails sur leur répartition par région ou par milieu de résidence. Les informations terrain n’ont pas élucidé des faits les concernant.

Situation de l’enfant à besoins spéciaux dans le fundamental. Le dernier recensement scolaire 2010-2011 estime la population d’enfants dans le niveau fondamental à 2 893 enfants dans tous les départements. Le département de l’Ouest accueille 37 % de l’effectif des enfants handicapés, suivi de l’Artibonite à 18 %, du Centre, 14 % et le Nord-Ouest 11 %. Il n’y a pas eu d’information sur le milieu d’implantation (urbain-rural) de ces enfants.

Situation de l’enfant à besoins spéciaux dans le secondaire. Le dernier recensement scolaire 2010-2011 estime la population d’enfants dans le niveau secondaire à 1 251 enfants dans tous les départements, représentant 0,20 % de la population d’écoliers au secondaire (MENFP Info, Mars 2012).

Il existe 23écoles spécialisées en Haïti dont trois publiques. Le MENFP et le BSEIPH ont encore établi de partenariats pour accroître la sensibilisation des populations tel que celui formalisé dans la Convention de partenariat avec l’Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés (INS HEA-France) pour la mise en œuvre de Journées de sensibilisation «Education spéciale et approche inclusives» en 2013.

L’État instaure, en outre, un Programme national de cantines scolaires (PNCS) visant à offrir un plat chaud par jour aux élèves des établissements publics. En vue de renforcer le PNCS, le Gouvernement a signé un Mémorandum d’accord avec le Programme alimentaire mondial (PAM) en Haïti en décembre 2012.

Le PSUGO est à ses débuts et n’a pas encore produit tous les résultats escomptés. On peut malgré tout constater que sa mise en œuvre fait face à de nombreuses difficultés. Conformément à l’article 32.5 de la Constitution de 1987 amendée qui prescrit que «La formation préscolaire et maternelle ainsi que l’enseignement non formel sont encouragés», l’État a, depuis quelques 4 ans, essayé au niveau préscolaire de mettre emphase sur les enfants de 4 et 5 ans. Il assure 2 ans de préscolaire dans les écoles publiques, tout en reconnaissant toutefois que la norme est de trois ans. L’État dispose actuellement de 616 centres préscolaires à raison de 50 enfants par centre, soit un total de 30 800 enfants pris en charge. Cependant, la problématique des sur-âgés au préscolaire reste préoccupante. En effet, il arrive que des professionnels de l’éducation eux-mêmes dirigent des enfants de plus de six ans n’ayant pas fait de classes préscolaires vers le préscolaire et non en première année du primaire.

Par ailleurs, il est établi depuis décembre 2012 un document politique sur le développement intégral de la petite enfance (DIPE) avec le soutien technique et financier de la Banque mondiale, de la Banque interaméricaine de développement et de l’UNICEF. Le DIPE a pour objectif de favoriser le développement intégral et équilibré de tous les jeunes enfants d’Haïti en mettant l’accent sur la période de grossesse à la naissance jusqu’à l’âge de trois ans à travers des services coordonnées et multisectoriels prénatals, néonatals et postnatals d’éducation et de soutien parental. L’exécution de ce document est assurée par le Bureau de gestion de l’éducation préscolaire (BUGEP).

3.Formation des maîtres et orientation professionnelle

En suivi des recommandations du Comité pour assurer une formation adéquate aux enseignants, l’État entreprend des programmes de formation des maîtres. Au niveau préscolaire, l’État fait une évaluation globale, contrôle les salles préscolaires et identifie les lacunes et les faiblesses des acteurs. Des formateurs vont dans tous les Départements pour rencontrer les éducateurs préscolaires et tenir avec eux des tables rondes. Les formateurs ont pratiqué avec les éducateurs préscolaires des séances de répétition. Les écoles reçoivent tout au long de l’année la visite des inspecteurs / superviseurs du MENFP qui vérifient la qualité du travail des éducateurs. Le Ministère prend des dispositions pour étendre le travail de vérification à toutes les écoles. Par ailleurs, l’État recrute de plus en plus de CAPistes et des normaliens, ce qui facilite leur formation. L’assistance technique et financière des partenaires (UNICEF, Banque mondiale, BID) soutiennent la politique de petite enfance, aident à préparer les documents de gouvernance et de référence et fournissent les matériels didactiques et les mobiliers. Au niveau du Fondamental, le MENFP a effectué de grands efforts sur le plan de la formation des maîtres avec:

Le projet de Formation initiale accélérée financé par la Banque mondiale et l’État est en cours d’exécution depuis 2002;

Des activités de formation continue sont réalisées et ont permis au MENFP de former plus de 11 000 maîtres au niveau des 2 premiers cycles du Fondamental en 2012-2013;

Des formations sont réalisées dans les EFACAP (École fondamentale d’application et Centre d’appui pédagogique) grâce au financement de la Coopération espagnole. Le MENFP dispose d’un réseau de 37 EFACAP comprenant bibliothèques et internet. À ces EFACAP sont associées 20 écoles qui y envoient leurs professeurs en formation;

Depuis le lancement du PSUGO en octobre 2011, des séances de formation ont été tenues à l’intention des enseignants et directeurs d’écoles. Pour exemple, la dernière en date s’étalait sur cinq jours, en mars 2013 et plus de 11 000 agents, soit 8 000 enseignants et 3 000 directeurs ont été formés. Avec les directeurs d’écoles, la formation portait sur l’évaluation des apprentissages, la supervision pédagogique et le leadership en milieu scolaire. Les enseignants ont été formés sur la préparation des cours.

La question de l’orientation professionnelle est aussi prise en compte par l’État avec la mise en œuvre par l’Institut national à la formation professionnelle (INFP) à l’intention des jeunes écoliers du 3e cycle fondamental d’un projet de formation aux métiers en milieu scolaire et des activités de formation au début de février 2013 à Fort-Liberté, Cap-Haïtien, Gonaïves, Petit-Goâve, Carrefour, Port-au-Prince et les Cayes. Comme résultats, huit centres de formation professionnelle, 29 écoles nationales ou lycées ont formé plus de 3 000 jeunes dans une douzaine de métiers offerts dans cinq des dix départements du pays. Ce programme s’étend aussi aux enfants des rues les plus âgés qui pourront intégrer le circuit de la formation professionnelle.

La Commission de travail sur l’intégration des enfants des rues à l’école de concert avec l’INFP travaille à la mise en place d’un projet de formation professionnelle qui leur permettra d’apprendre un métier et du même coup intégrer le marché du travail. Le Centre professionnel Haïti-Tech devra sous peu recevoir le premier groupe de jeunes (tableau 17).

Des modules spécifiques aux droits humains ou aux droits de l’enfant ne sont pas encore intégrés, même si certains aspects sont inclus dans les cours d’instruction civiques dans le primaire.

B.La qualité de l’éducation

La formation des maîtres et des inspecteurs, la supervision de l’enseignement, la nomination des enseignants formés dans le système, le contrôle des programmes scolaires et le système d’information sur les enseignants permettent au MENFP de soigner de plus en plus la qualité de l’enseignement dispensé dans les écoles.

VIII.Mesures spéciales de protection

Dans le domaine des mesures spéciales de protection, les recommandations du Comité des droits de l’enfant ont porté l’État haïtien à adopter diverses mesures notamment pour la protection des enfants dans les conflits armés, les enfants en situation d’exploitation, les enfants des rues et les enfants en conflit avec la loi. Aucune mesure spéciale n’est prise en faveur d’enfants réfugiés ou d’enfants appartenant à une minorité ou à un groupe autochtone, ces derniers pouvant toujours, au besoin, bénéficier de la législation de droit commun.

A.Enfants en situation d’exploitation

1.Exploitation économique

Le comité a recommandé: a) d’appliquer plus énergiquement sa législation du travail et d’accroître le nombre des inspecteurs du travail; b) de ratifier les Conventions nos 138 (concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi) et 182 de l’OIT; c) de demander une assistance technique, notamment à l’OIT.

L’État a pris en compte les recommandations du Comité en augmentant le nombre d’inspecteurs du travail. En 2013, 50 inspecteurs sont en poste pour renforcer le contrôle de l’emploi de l’enfant.

En 2007, l’État haïtien a procédé à la ratification de la Convention no 138 concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi du 26 juin 1973 et la Convention no182 sur les pires formes de travail des enfants du 17 juin 1999. Par ailleurs, une loi du 13 mai 2003 a abrogé non seulement l’article 341 du Code du travail actualisé, mais aussi l’ensemble des articles du Code concernant l’enfant en service. L’âge légal du travail est ainsi de 12 à 14 ans. L’adoption de la loi du 13 mai 2003 annulant le chapitre 9 du Code du travail actualisé a pratiquement fait disparaître dans le droit haïtien la notion d’enfants en service. L’article 3 de la loi prévoit cependant qu’un enfant peut être confié à une famille d’accueil dans le cadre d’une relation d’aide et de solidarité. Dans ce cas, l’enfant doit être traité comme un membre de cette famille.

Pour prévenir et faire cesser l’emploi d’enfants en-dessous de l’âge légal, il a été adopté les mesures suivantes:

Publication par le MAST en 2009 d’un communiqué informant la population de la décision du Gouvernement d’adopter 14 ans comme âge minimum d’admission d’enfants à l’emploi;

Réalisation de septembre à décembre 2009 d’une campagne de vulgarisation de la Convention 138 sur l’âge minimum et de la Convention 182 sur les pires formes du travail des enfants dans les départements du Nord, de l’Artibonite, du Sud-est, des Nippes et Sud;

Création d’un Comité tripartite pour l’éradication du travail des enfants avec l’appui du BIT;

Campagne de sensibilisation dans les écoles et églises sur la problématique des enfants en domesticité.

2.Utilisation d’enfants dans la production et le trafic illicites de stupéfiants

La production et le trafic illicites de stupéfiants sont sévèrement sanctionnés par la législation haïtienne. La loi du 7 août 2001 relative au contrôle et à la répression du trafic illicite de la drogue a renforcé le système de sanctions prévu par le décret du 18 décembre 1975 modifié par la loi du 7 juin 1982.

Selon l’article 72, lorsque l’infraction a été commise en utilisant un mineur ou au préjudice d’un mineur ou d’un handicapé mental, les peines prévues par les articles 47 à 53 et 57 à 59 sont portées au double. Les articles 47, 49 et 51 prévoient des peines allant de 10 à 30 ans d’emprisonnement.

3.Exploitation et sévices sexuels

L’enfant victime de violence sexuelle est celle ou celui sur qui un adulte ou un autre enfant, a tenté de commettre ou a commis un acte d’agression sexuelle, telle que viol, inceste, attouchement, exploitation sexuelle, proxénétisme, prostitution, incitation à la débauche. La notion d’abus sexuel désigne l’implication d’enfants et d’adolescents dépendants ou immatures dans leur développement, dans des activités sexuelles dont ils ne comprennent pas pleinement le sens ou qui violent les tabous sociaux concernant les rôles familiaux.

Le problème d’exploitation et de sévices sexuels est très courant en Haïti, mais il est difficile de déterminer les chiffres exacts concernant le nombre d’enfants victimes. Cette difficulté est liée aux tabous qui entourent cette problématique et la peur des représailles lorsque l’auteur de l’acte a une certaine autorité sur la victime. Néanmoins selon les résultats préliminaires de la Violence Against Children Survey (VACS) conduite par le Center for Disease Control (CDC) conduite en 2012, une femme sur quatre a subi au moins un incident d’abus sexuel avant avoir atteint l’âge de 18 ans. Parmi les hommes du même groupe d’âge, un homme sur cinq a subi au moins un incident d’abus sexuel avant avoir atteint l’âge de 18 ans. Parmi ceux qui ont expérimenté au moins un incident d’abus sexuel avant l’âge de 18 ans, 69,5 % des femmes et 85,4 % des hommes ont subi plusieurs incidents (i.e. deux ou plus) d’abus sexuel. La forme la plus courante d’abus sexuel expérimenté par les femmes et les hommes avant l’âge de 18 ans était des attouchements sexuels forcés suivi par des tentatives de rapports sexuels.

Un décret du 6 juillet 2005 a modifié le régime des agressions sexuelles et augmenté les peines pour les auteurs. On doit noter l’intervention positive des services de l’État dont celle des services sociaux et de santé, appuyée encore par des organisations de femmes comme par exemple KAY FANM ou SOFA. Ces organisations apportent non seulement un encadrement aux victimes de viol et d’autres abus sexuels, mais exercent beaucoup de pressions pour que les agresseurs soient jugés et punis conformément à la loi.

Un dispositif de signalement a été mis en place pour les enfants vulnérables, dont les enfants victimes d’abus ou d’exploitation sexuelle, dispositif monté autour du Centre d’appel de l’IBESR et d’autres lignes gratuites comme signalé plus haut dans le rapport.

4.La vente, la traite et l’enlèvement d’enfants

La traite d’enfants constitue la grande préoccupation des autorités et de la société tout entière. Si le phénomène est difficilement quantifiable, les quelques données disponibles permettent d’évaluer l’ampleur des mouvements d’enfant à risque. Ainsi selon le Réseau Jeannot Succès, 7 599 enfants auraient passé illégalement la frontière avec la République Dominicaine pour la seule zone Nord d’Haïti depuis 2010. En 2010, la Brigade de protection des mineurs a soustrait 280 enfants aux mains des passeurs sur les 1 200 enfants contrôlés aux points frontières officiels entre Haïti et la République dominicaine. Ce phénomène n’est pas nouveau. Par exemple, selon des données du Groupe d’appui pour rapatriés et refugiés pour la seule année 2004, plus de 20 000 Haïtiens dont des mineurs auraient traversé la frontière vers la République dominicaine illégalement et en situation de vulnérabilité.

L’une des mesures prise en ce domaine est la ratification du Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Ce texte est venu s’ajouter au décret du 17 novembre 1980 sur les voyages clandestins et à la loi du 7 mai 2003 relative à l’interdiction et à l’élimination de toutes formes d’abus, de violence, de mauvais traitements ou traitements inhumains contre les enfants. Un projet de loi sur le trafic et la traite a été voté par la Chambre des députés en août 2013. Cette loi servira de cadre de référence pour le traitement des cas relatifs à cette problématique. Encore, l’enlèvement d’enfants est puni avec la plus grande vigueur par la loi du 22 janvier 2009. Lorsqu’en effet la victime aura été un enfant nouveau-né ou un enfant de moins de 16 ans, la peine sera celle des travaux forcés à perpétuité (art. 2).

En outre, en partenariat avec l’UNICEF, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et d’autres organisations nationales, le MAST conscient de la nécessité d’adresser le problème, a relancé en juillet 2011 la Table Sectorielle sur la lutte contre la domesticité et la traite des enfants. Cette démarche s’est par la suite étendue à d’autres départements, notamment le Nord, l’Artibonite, le Sud-Est et le Sud.

S’agissant de mesures pratiques et effectives contre la traite, il y a lieu de signaler que le Gouvernement a chargé les agents de la BPM de la responsabilité de procéder à la vérification des documents de voyage de tout enfant haïtien quittant le pays par les points frontaliers terrestres et l’aéroport international de Port-au-Prince. Le MAST a désigné un point focal national pour les questions de traite et de trafic des humains et des enfants en particulier au sein de l’IBESR. Enfin, pour un contrôle plus efficace du déplacement des enfants en dehors du pays, l’IBESR, le Service de l’immigration et de l’émigration du MICT et la PNH ont mis en place en 2012 une procédure aux termes de laquelle il est réclamé une autorisation de départ signée de l’IBESR pour laisser le territoire haïtien avec un mineur dont on n’est ni père ni mère. Cette mesure a déjà porté fruit et a permis d’interpeller quelques trafiquants d’enfants dont plusieurs dirigeaient des maisons d’enfants.

Au niveau de la société civile, il s’est manifesté un grand intérêt à combattre la traite et le trafic des enfants. Plusieurs ONG dont le Groupe d’appui pour rapatriés et refugiés, la Fondation panaméricaine de développement (PADF) ont en effet constitué un «collectif contre la traite et le trafic de personnes» qui a élaboré un plan d’action contre ledit phénomène. Les efforts sont mis en œuvre sur l’égide du Groupe de travail sur la protection de l’enfant (GTPE).

Les données combinées (MINUSTAH, IBESR et BPM) traitent des cas d’agressions sexuelles, de traite d’enfants, de violences domestiques, physiques et psychologiques continuent d’être enregistrés: 789 cas ont été enregistrés de janvier à octobre 2013. Selon la MINUSTAH, 1 221 mineurs dont 922 filles ont été victimes de violences de tout genre de janvier 2012 à avril 2013. On constate cependant que les Conventions ratifiées et les mesures législatives adoptées ne suffisent pas à éradiquer le phénomène. La Brigade de protection des mineurs, avec le concours de la MINUSTAH, envisage de renforcer ses actions, en vue d’établir un meilleur système de prévention contre les violences sur mineurs.

B.Enfants réfugiés

Il n’est pas encore enregistré en Haïti de demande d’asile venant d’enfants étrangers. Si de telles demandes viennent à se produire, les protections nécessaires seront accordées aux enfants requérants par l’État en application des normes en vigueur dans le pays, notamment la Convention relative aux droits de l’enfant et la Convention relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951, ratifiée par Haïti le 25 septembre 1984.

C.Enfants dans les conflits armés

Le Comité avait recommandé à Haïti de ratifier les Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant, respectivement, la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, et l’implication d’enfants dans les conflits armés.

Un enfant associé aux groupes armés est comme le terme l’indique, toute personne de moins de 18 ans, qui est soit manipulée, soit utilisée comme éclaireur, ou utilisée pour perpétrer des actes criminels par des groupes armés quelles que soient leur nature, leur origine ou leurs constitutions. Les enfants associés aux groupes armés ont beaucoup en commun avec ceux qui sont en conflit avec la loi ou ceux qui sont victimes de conflits armés.

Le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés a été signé en 2002, mais non encore ratifié.

La catégorie d’enfants liés aux groupes armés a fait son apparition en Haïti depuis environ une dizaine d’années, avec le développement de gangs armés dans les plus grands bidonvilles de Port-au-Prince à des fins qui peuvent être politiques ou motivées par des désirs d’enrichissement. La plupart de ces gangs ont recruté des enfants qu’ils utilisent comme éclaireurs, indicateurs, ou pour commettre des actes criminels. Selon la MINUSTAH, l’effectif des enfants associés aux groupes armés fin 2005, dans la seule commune de Cité Soleil, oscillait autour de 600 dont au moins 300 enfants armés. Des cas ont été aussi répertoriés aux Cayes, à Carrefour Feuilles, au Bel-Air.

Dans le cadre de ses efforts de désarmement en 2006, l’Unité de protection de l’enfant de la MINUSTAH conjointement avec l’UNICEF avait entamé, sur la base du Plan national de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR), un processus de négociation avec les gangs qui inclut la démobilisation et le désarmement des enfants associés. Entre temps, l’UNICEF avait déjà mis en œuvre en partenariat avec le PNUD, dans trois sites particulièrement affectés par la violence (un important bidonville de Port-au-Prince, les Cayes et Gonaïves), trois projets communautaires de prévention de la violence et de désarmement, démobilisation et réinsertion des enfants/jeunes associés. À date, ces projets qui servent de point de lancement du processus de désarmement communautaire de la MINUSTAH ont permis de collecter des armes à feu et de travailler à la réinsertion socioéconomique d’adolescents et de jeunes.

Le Centre d’accueil de Carrefour géré par la MAST a ainsi reçu des enfants sortis des groupes armés.

D.Enfants des rues

Le Comité recommande à l’État partie a) de faire en sorte que les enfants des rues disposent de nourriture, de vêtements, d’un logement, de soins de santé et de services éducatifs appropriés, notamment d’une formation pour l’acquisition de compétences professionnelles ou pour la vie quotidienne, afin de favoriser leur plein développement; b) de veiller à ce que ces enfants bénéficient de services de réadaptation et de réinsertion en cas de violences physiques ou sexuelles et d’abus de substances, ainsi que de services de médiation visant à leur permettre de se réconcilier avec leur famille; c) d’enquêter dans les cas de disparitions d’enfants des rues; d) de définir une stratégie globale pour faire face au nombre grandissant d’enfants des rues, l’objectif étant de prévenir le phénomène et d’inverser la tendance.

En 2006, les données du premier recensement des enfants et jeunes des rues mises à disposition par Aide Médicale International (AMI) indiquaient que 2 129 enfants et jeunes étaient présents dans les rues de Port-au-Prince (dont 9 % de filles). Les résultats d’un recensement de 2011 montrent qu’en février 2011, au moins 3 380 enfants et jeunes habitaient dans les rues de Port-au-Prince et de Carrefour (dont 22 % suite au tremblement de terre). Le recensement indique que depuis 2006, 1 251 enfants supplémentaires ont ainsi rejoint la rue, soit une augmentation de 55 %. Le problème est aussi présent dans les autres centres urbains du pays.

Le Plan national de protection élaboré en 2007 prévoyait un Programme d’éradication du phénomène des enfants des rues sur la période allant de 2008 à 2013. Le tableau 19 en annexe reproduit les objectifs, les résultats attendus et les actions prioritaires.

Le MAST a mis en œuvre des initiatives pour la prise en charge les enfants des rues avec trois centres d’hébergement situés dans la région métropolitaine. Il s’agit du Centre d’accueil de Carrefour, du Centre Petit Place Cazeau et du Centre de Delmas 3. Les deux premiers sont opérationnels à 100 % et les enfants y reçoivent nourriture, vêtements, soins de santé, formation scolaire et formation professionnelle. La gestion du Centre d’accueil de Carrefour et de celui de Petit Place Cazeau est assurée par l’ONG religieuse «Petits Frères et Petites Sœurs de l’Incarnation». Une enveloppe de 55 000 000 de gourdes (1 375 000 US$) a été allouée au Centre d’accueil de Carrefour pour l’exercice 2011-2012. Le MAST avait voulu donner réponse à la situation de 950 enfants des rues, âgés entre 4 et 16 ans conduits dans les différents centres en 2012 (tableau 18 sur la répartition de la balance prévisionnelle). Le Centre de Delmas 3 va être inauguré. Les trois centres d’hébergement n’ont pas la capacité d’accueillir l’ensemble des enfants des rues. L’État en est conscient et projette d’en aménager d’autres à l’avenir, tout en réfléchissant à des solutions plus durables pouvant permettre la réduction du nombre d’enfants des rues.

Dans le même ordre d’idées, le MAST a conçu le projet de construire des centres de transit dans les 10 départements du pays pouvant héberger chacun 1 000 enfants en difficultés, tout en procédant périodiquement à leur insertion dans leurs familles biologiques. Le coût prévisionnel du projet s’élève à cinq cents millions de gourdes, à raison de 50 millions de gourdes (1 250 000 US$) par centre. Le démarrage effectif des travaux a eu lieu en octobre 2011 et l’achèvement est prévu au mois de septembre 2016. Au cours de l’exercice 2011-2012, un montant de 25 millions de (62 500 000 US$) est alloué et décaissé pour la poursuite des travaux.

En février 2013, l’IBESR a expérimenté une méthodologie en vue de préparer un recensement national des enfants des rues dans la perspective de mieux adresser la problématique. Quatre-vingt-dix-huit enfants ont pris part à cette expérience.

Tel que mentionné plus au haut dans le chapitre VII portant sur l’éducation, la scolarisation des enfants des rues a retenu l’attention des autorités étatiques.

E.Enfants en conflit avec la loi

Le Comité a recommandé à l’État partie de prendre les mesures voulues pour réformer la législation relative au système de justice pour mineurs, conformément à la Convention et en particulier à ses articles 37, 40 et 39, ainsi qu’aux autres normes de l’ONU applicables en matière de justice des mineurs, notamment l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), les Principes directeurs de Riyad, les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté et les Directives de Vienne relatives aux enfants dans le système de justice pénale. Dans le cadre de cette réforme, le Comité a recommandé particulièrement: a) de prendre toutes les mesures nécessaires pour instituer des tribunaux pour mineurs et nommer des juges pour enfants dûment formés dans toutes les régions de l’État partie; b) de n’envisager la privation de liberté qu’en dernier recours et pour une période aussi brève que possible, de limiter légalement la durée de la détention avant jugement et de faire en sorte que la légalité de toute détention soit déterminée sans délai par un juge, puis réexaminée régulièrement par la suite; c) de fournir une assistance, juridique et autre, à tout enfant dès le début d’une procédure à son encontre; d) de fournir des services élémentaires aux enfants concernés; e) de protéger les droits des enfants privés de leur liberté et d’améliorer les conditions de détention et d’incarcération, notamment en créant des prisons spéciales pour les enfants, adaptées à leur âge et à leurs besoins, et en veillant à la disponibilité des services sociaux dans l’ensemble des centres de détention du pays, tout en s’assurant dans le même temps que les enfants sont séparés des adultes dans toutes les prisons et tous les lieux de détention avant jugement sur tout le territoire; f) de solliciter une assistance technique dans le domaine de la justice des mineurs et de la formation des forces de police, notamment auprès du HCDH et des membres du Groupe ONU de coordination des services consultatifs et de l’assistance technique dans le domaine de la justice pour mineurs.

1.Administration de la justice pour mineurs

Comme l’a relevé le Comité des droits de l’enfant dans l’examen du rapport initial, seules les villes de Port-au-Prince et du Cap-haïtien sont dotées d’un tribunal pour enfants, même si il convient de noter que le TPE de Cap-haïtien n’est pas officialisé par la loi. Il faut mentionner que celui de Port-au-Prince a été sérieusement endommagé par le séisme de 2010 et l’État a engagé des démarches en vue de le réhabiliter avec un devis estimatif établi à 3 897 913 gourdes (97 450 US$). Le système de justice pour mineurs souffre donc d’une forte carence en Tribunaux pour enfants.

Malgré ses moyens limités, l’État haïtien s’est efforcé de suivre tant soit peu les recommandations du Comité, dans le sens de l’amélioration du fonctionnement du système de justice pour mineurs. Parmi les mesures importantes adoptées, on peut retenir:

La désignation d’un juge pour enfants dans 17 des 18 tribunaux de première instance de la République;

La formation en droits relatifs aux enfants des magistrats;

L’amélioration des conditions de détention pour les mineurs incarcérés au Centre de rééducation des mineurs en conflit avec la loi (CERMICOL).

Il faut souligner l’amélioration qui a consisté à transférer les mineurs du Pénitencier du Fort National au CERMICOL, structure créée en 2010 par décision administrative et destinée à la rééducation des mineurs. Le Centre dispose d’une école, d’un atelier de couture et d’un dispensaire. La création de ce Centre apporte un début de solution à l’épineux problème de séparation des enfants et des adultes dans la juridiction du Tribunal pour Enfants de Port-au-Prince. Une initiative publique/privée a visé à mettre en place un premier Centre de rééducation et de réinsertion, le Centre haïtien de réinsertion des mineurs en conflit avec la loi (CHARMICAL) dans le département de l’Ouest. Quoique les infrastructures soient disponibles, aucune date n’est encore retenue pour son ouverture.

Quant à la réforme de la législation relative au système de justice pour mineurs, elle vient d’être prise en compte en 2013 par le Ministère de la justice et de sécurité publique (MJSP) qui a mis sur pied une table sectorielle sur la justice des mineurs. L’une des missions de cette table sectorielle composée de huit commissions est d’élaborer un projet de loi sur la justice pour mineurs. La table sectorielle inaugurée le 9 avril 2013 a eu sa première séance de travail avec les Commissions le 30 avril 2013.

Un Bureau d’assistance légale (BAL) est en place dans le département de l’Ouest supporté par la MINUSTAH, et un Bureau d’assistance aux mineurs est soutenu dans le département du Sud par l’UNICEF.

2.Mesures relatives aux enfants privés de liberté

En moyenne depuis 2010, quelques 320 enfants sont détenus dans les prisons haïtiennes. Les enfants restent souvent en détention préventive prolongée avant que leur cas ne soit déféré par devant le juge.

3.Sanctions prononcées par les tribunaux pour enfants

Les tribunaux pour enfants ne prononcent pas de peine capitale ni d’emprisonnement à vie à l’encontre d’enfants en conflit avec la loi. On relève toutefois que les peines de substitution sont timidement utilisées dans le traitement des dossiers de mineurs (interdiction de jouer, obligation de réaliser un dessein, etc.).

Le mineur de moins de 13 ans bénéficie d’une irresponsabilité pénale indiscutable bien que le texte ne le stipule pas explicitement; il ne peut faire l’objet que de mesures de protection spéciales. Le mineur de plus de 13 ans et de moins de 16 ans bénéficie d’une irresponsable pénale simple et de l’excuse atténuante de minorité à moins que le juge ne décide de l’écarter par une décision motivée.

4.Réadaptation psychologique et réinsertion sociale

Les services de réadaptation physique, psychologique et de réinsertion sociale font défaut dans le système haïtien de protection de l’enfance, les centres de rééducation et de réinsertion prévus dans la loi n’étant pas encore sur pied. À ce jour, la loi ne prévoit pas de mesures spécifiques post-détention de réhabilitation, de réinsertion ou de réparation pour les garçons et les filles victimes ou auteurs de violences. Si les victimes ou leurs parents, consultent parfois des spécialistes privés, l’État, par le Service social pénitentiaire a pour mandat d’accompagner ces enfants.

5.Formation des professionnels intervenant dans le système de justice pour mineurs

En ce qui concerne la formation des professionnels et agents travaillant dans le domaine de la justice pour mineurs, plusieurs activités ont été conçues et exécutées. On note par exemple la réalisation de programmes de formation à l’intention du personnel des établissements de détention pour mineurs dont la formation en 2012/2013 de 50 agents de la DAP. Les agents de la Brigade de protection des mineurs (BPM) ont aussi tous bénéficié de diverses formations par les acteurs de protection dont l’UNICEF, la MINUSTAH, l’OIM et autres ONG; deux de ces fonctionnaires opèrent ainsi en tant que formateurs pour leurs pairs; néanmoins la réaffectation fréquente des fonctionnaires de la PNH diminue l’impact spécifique de long terme de ces efforts. Quant aux magistrats assis et debout, ils ont reçu une formation très solide sur la justice des mineurs dispensée à l’École de la magistrature.

L’État projette toutefois de combler les nombreuses lacunes relevées au niveau de la justice des mineurs. À cet effet, dans le cadre de la table sectorielle sur la justice des mineurs, il est prévu de développer un plan d’action pour la création de centres de rééducation et de réhabilitation des mineurs et pour la construction de TPE dotés de magistrats spécialisés.

F.Enfants appartenant à une minorité ou à un groupe autochtone

Il n’existe pas en Haïti d’enfants appartenant à un groupe autochtone. Mais leur éventuelle présence sur le territoire ne devrait pas poser de difficulté en ce qui concerne leur droit d’avoir leur propre vie culturelle et de pratiquer leur religion comme le prévoit l’article 30 de la Convention relative aux droits de l’enfant à laquelle la République d’Haïti est partie. Même séparés de leurs parents, les enfants minoritaires doivent bénéficier de tous les droits reconnus aux enfants haïtiens.

IX.Conclusion

Le présent rapport élaboré conformément à l’article 44 de la Convention relative aux droits de l’enfant et des directives harmonisées de 2010 expose les efforts et les contraintes de l’État haïtien dans le cadre de l’exécution de son engagement par rapport aux recommandations du Comité des droits de l’enfant, à l’issue de l’examen du rapport initial soumis le 3 avril 2001. Certaines recommandations ont été suivies et d’autres sont en cours d’exécution.

Haïti a fait face à d’importantes contraintes depuis la présentation du rapport initial qui ont entravé ses progrès pour une réalisation plus complète des droits de l’enfant. Il convient de rappeler l’instabilité politique qui a bouleversé le pays de 2000 à 2006, les cyclones dévastateurs de 2008 et le tremblement de terre de 2010.

Toutefois, de 2006 à 2012, d’importants efforts ont été consentis en faveur des enfants dans les domaines du social, de l’éducation, de la nutrition, de la santé et de l’assainissement. Les résultats sont ainsi reflétés par différentes enquêtes dont l’Enquête mortalité, morbidité et utilisation des services (cinquième édition de 2012). Force est de reconnaître que les progrès réalisés en rapport aux recommandations du Comité et aux exigences de la Convention restent inachevés.

Les lois et les mesures administratives nouvellement adoptées, les projets initiés, les bonnes pratiques, les nouvelles attitudes au niveau des institutions et des communautés augurent d’un meilleur avenir en ce qui concerne la jouissance par les enfants vivant sur le territoire haïtien des droits consacrés par la Convention relative aux droits de l’enfant. Il convient ici de reconnaître la contribution significative des hommes et des femmes, des organisations communautaires nationales, de la société civile et des acteurs internationaux qui permettent ces avancées au quotidien et qui reflètent la volonté commune de promouvoir un système fort de protection de l’enfant et ainsi d’améliorer la situation des enfants en Haïti, particulièrement des plus vulnérables.

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Ministère des affaires sociales et du travail, Plan national de protection, Enfance en situation difficile ou de vulnérabilité, Port-au-Prince, novembre 2007, p. 15 (section 2)

Ministère des affaires sociales et du travail/Secrétairerie d’État à l’intégration des personnes handicapées, Politique nationale du handicap, les grandes orientations, Port-au-Prince, Presses nationales, 2009

Ministère des affaires sociales et du travail, Domesticité des enfants en Haïti, caractéristiques, contexte et organisation, Port-au-Prince, 2002

Nations Unies, Revue internationale sur la politique criminelle, Vienne, 1999

Pierre-Louis Menan et Patrick Pierre-Louis, Code civil haïtien (annoté), Zemes, Port-au-Prince, 2001

Michel, Pierre Marie, Code de procédure civile, Port-au-Prince, Edityak, 1999

Pierre-Louis Menan et Patrick Pierre-Lois, Code pénal haïtien (annoté), Areytos, Port-au-Prince, 2007

République d’Haïti, Constitution amendée, Port-au-Prince, Presses nationales, 1987 et 2012

République d’Haïti, Rapport de suivi d’application de la Convention relative aux droits de l’enfant, Port-au-Prince, 2000

Trenton Daniel, Bill Clinton Tells Diaspora: ‘Haiti Needs You Now” The Miami Herald, 10 août 2009

UNICEF, Deux ans après: Les enfants d’Haïti qu’est ce qui change? Qui participe au changement?, Port-au-Prince, 2012

UNICEF/OIM, Trafic des enfants haïtiens vers la République dominicaine, Port-au-Prince, 2012

USAID & PADF, Lost Childhoods in Haiti, 2009

B.Textes législatifs

Loi du 8 octobre 1982 donnant à la femme mariée un statut conforme à la Constitution et éliminant toutes les formes de discrimination à son égard

Loi du 7 août 2001 relative au contrôle et à la répression du trafic illicite de la drogue

Loi du 10 septembre 2001 interdisant les châtiments corporels contre les enfants

Loi du 7 mai 2003 relative à l’interdiction et à l’élimination de toutes formes d’abus de violences, de mauvais traitements ou traitements inhumains

Loi du 6 juillet 2005 modifiant le régime des agressions sexuelles et éliminant en la matière les discriminations contre la femme

Loi du 10 septembre 2007 créant et organisant l’office national de partenariat en éducation

Loi du 22 janvier 2009 sur l’enlèvement, la séquestration et la prise d’otages de personnes

Loi du 12 mars 2012 sur l’intégration des personnes handicapées

Loi du 12 avril 2012 sur la paternité, la maternité et la filiation (non promulguée)

Loi du 9 mai 2012 portant organisation et fonctionnement de l’Office de la Protection du Citoyen

Loi du 7 mai 2010, reformant l’adoption (non promulguée)

C.Textes conventionnels

Convention relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951, ratifiée le 25 septembre 1984

Convention relative aux droits de l’enfant, ratifiée le 23 décembre 1994

Convention sur les pires formes de travail des enfants, ratifiée le 14 mai 2007

Convention relative aux droits des personnes handicapées, ratifiée le 12 mars 2009

Convention de La Haye du 28 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale (ratification non finalisée)

Convention interaméricaine pour l’élimination de toutes les formes de discrimination contre les personnes handicapées, ratifiée le 12 mars 2009

Déclaration des droits de l’enfant, ratifiée le 16 janvier 1979

Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées, ratifié le 12 mars 2009

Convention no 138 concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi du 26 juin 1973, ratifiée par Haïti le 14 mai 2007

Convention no 182 sur les pires formes de travail des enfants du 17 juin 1999, ratifiée par Haïti le 14 mai 2007

Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ratifié par Haïti le 31 janvier 2012 (ratification non finalisée)

D.Textes réglementaires

Décret du 4 avril 1974 sur l’adoption

Arrêté du 18 juillet 2012 prenant des dispositions garantissant l’intégrité des procédures d’adoption internationale d’enfants d’Haïtiens

E.Documents électroniques

www.unicef.org/haiti/french/nutrition.htmlwww.unicef.org/haiti/french/nutrition.html

Crises en Haïti–fr.wfp.org

www.unicef.org/haiti/french/nutrition.html

www.haitilibre.com/article-2492-haiti-societe-des-projets-pour-les-handicapes.htm